Language of document : ECLI:EU:T:2000:28

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

3 février 2000 (1)

«Recours en annulation — Fonds européen de développement régional — Réduction d'un concours financier — Défaut de motivation — Confiance légitime — Sécurité juridique»

Dans les affaires jointes T-46/98 et T-151/98,

Conseil des communes et régions d'Europe (CCRE), association de droit français, établie à Paris, représentée par Me Daniel M. Tomasevic et puis par Me Francis Herbert, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Katia Manhaeve, 56-58, rue Charles Martel,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. Peter Oliver, membre du service juridique, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision de la Commission, réduisant un concours financier octroyé à la requérante par le Fonds européen de développement régional au titre du projet European city cooperation system,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de M. R. M. Moura Ramos, président, Mme V. Tiili et M. P. Mengozzi, juges,

greffier: M. A. Mair, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 17 juin 1999,

rend le présent

Arrêt

Faits à l'origine du litige et procédure

1.
    Le Conseil des communes et régions d'Europe (ci-après «CCRE») est une association de droit français regroupant des associations nationales de pouvoirs locaux et régionaux en Europe. Parmi ses activités de représentation et d'assistance des collectivités territoriales, le CCRE favorise, notamment, la coopération interrégionale et intermunicipale en assistant les pouvoirs locaux et régionaux dans leurs recherches de fonds communautaires liés aux programmes mis en place par la Communauté européenne. Le requérant est associé à la gestion de plusieurs projets et programmes financés par la Commission.

2.
    La Commission, par lettre du 10 décembre 1991, a octroyé au CCRE un concours, d'un montant maximal de 4 844 250 écus (ci-après «premier octroi»), du Fonds européen de développement régional (ci-après «FEDER») pour la réalisation du projet pilote European city cooperation system (ECOS), présenté par le CCRE le 19 juillet 1991, dans le cadre du programme «régions et villes d'Europe» (Recite). Cette décision était fondée sur l'article 10 du règlement (CEE) n° 4254/88 du Conseil, du 19 décembre 1988, portant dispositions d'application du règlement (CEE) n° 2052/88 en ce qui concerne le Fonds européen de développement régional (JO L 374, p. 15). Le montant octroyé représentait 50 % de la dépense totale éligible. Le projet pilote couvrait la période allant du 1er janvier 1992 au 31 décembre 1994.

3.
    En 1993, le CCRE a organisé son assemblée générale triennal, les «États généraux» (ci-après «États généraux de Strasbourg»), sur le thème de la coopération interrégionale et intermunicipale en Europe. La ville de Strasbourg, qui assurait le secrétariat permanent du projet ECOS, s'est proposée pour organiser cet événement comprenant, notamment, un atelier n° 2 intitulé «Les

coopérations pour le renforcement de l'Union européenne et le développement de la solidarité (réseaux, échanges d'expérience et programme ECOS)».

4.
    A cet effet, la ville de Strasbourg a sollicité, par lettre du 31 mars 1993, une subvention auprès de la Commission.

5.
    Par lettre du 23 juin 1993, la Commission a informé la ville de Strasbourg qu'elle acceptait de donner une contribution à hauteur de 100 000 écus. La défenderesse a ajouté que «cette contribution [...] [était] allouée à titre exceptionnel et ne pourra en aucun cas constituer un précédent pour d'autres manifestations de même nature».

6.
    En outre, par lettre du 7 octobre 1993, la Commission a communiqué au CCRE: «[...] à titre exceptionnel, il vous sera possible de cofinancer à hauteur de 100 000 écus, à partir du programme ECOS, la tenue, pendant les États généraux du CCRE, de l'atelier n° 2 qui porte sur la coopération interrégionale Est-Ouest».

7.
    Par lettre du 9 décembre 1993, le CCRE s'est vu octroyer un concours supplémentaire d'un montant maximal de 2 550 000 écus pour le même projet pilote, pour une période débutant le 1er décembre 1993 (ci-après «deuxième octroi»). Ce montant représentait 60 % de la nouvelle dépense éligible, sauf en ce qui concerne la participation du FEDER aux frais de gestion qui a été limitée à 55 %. Le montant global du cofinancement communautaire s'est ainsi élevé à 7 394 250 écus.

8.
    En mars 1996, le CCRE a soumis à la Commission le rapport final relatif au premier octroi, en application du paragraphe 2 des conditions spéciales de l'octroi du concours qui dispose qu'«un rapport annuel sera présenté à la Commission à la fin de chaque année. Un rapport final contiendra une évaluation détaillée des résultats du projet [...]»

9.
    Le 19 avril 1996, un fonctionnaire de la DG XVI a envoyé une télécopie au CCRE l'informant que le rapport final relatif au premier octroi avait été approuvé par le service opérationnel qui «l'avait jugé satisfaisant, tant au niveau de son contenu, qu'au niveau financier».

10.
    Pendant le mois d'août 1996, le requérant a soumis le rapport final relatif au deuxième octroi.

11.
    Le 7 novembre 1996, le CCRE a déposé un rapport conjoint, couvrant les deux octrois, dont le solde final demandé est resté le même que celui de l'ensemble des deux autres rapports précédents, à savoir 6 119 866 écus. Ce rapport présentait des dépenses divisées en deux titres: «projets» et «coordination et animation».

12.
    Du 21 au 24 avril 1997, les services de la Commission ont effectué une mission de contrôle sur place.

13.
    Dans une lettre du 16 mai 1997 adressée au CCRE, la Commission a estimé que «l'annonce faite par le service opérationnel de la DG XVI, au sujet de la première version du rapport final d'ECOS, péchait par optimisme en ne tenant pas suffisamment compte du délai nécessaire aux services financiers de la Commission pour se prononcer à ce sujet» et a informé le CCRE que le rapport final avait été transmis pour accord au contrôle financier.

14.
    Par courrier du 30 juillet 1997, le directeur général de la DG XVI a annoncé au CCRE:

«Les dépenses suivantes non documentées ne peuvent être acceptées pour cofinancement:

—    les estimations effectuées par le CCRE concernant les dépenses éventuelles non documentées que des maires et des fonctionnaires communaux pourraient avoir engagées pour assister à des événements d'intérêt pour la coopération;

—    les dépenses éventuelles que des communes et des régions pourraient avoir engagées en actions de promotion diverses, et

—    les contributions éventuelles en nature que les corporations locales pourraient avoir engagées en expertise financière, juridique et technique.

Ces montants estimés par le CCRE concernent des dépenses éventuelles sans preuve qu'elles ont été effectivement encourues. Il n'y a pas de preuve du paiement, et de toute manière ces dépenses n'ont pas été supportées par le CCRE. En outre, les montants présentés ne sont pas exacts, puisqu'il s'agit de simples estimations de coûts éventuels qui ne peuvent être acceptées comme dépenses à cofinancer par le FEDER.»

15.
    En conséquence, la Commission a annoncé que le montant maximal retenu par le FEDER était réduit à 5 552 065 écus, mais en tenant compte de l'avance de 5 915 400 écus faite au bénéfice du CCRE, ce dernier avait à rembourser 363 335 écus.

16.
    Le CCRE, par lettre du 28 août 1997, a répondu aux critiques de la Commission et lui a demandé de convoquer une réunion pour discuter de ces questions. Cette réunion, à laquelle ont participé des représentants du CCRE et de la Commission, a eu lieu le 24 septembre 1997. A l'issue de la réunion, la Commission a demandé au CCRE de lui faire parvenir certaines pièces justificatives des dépenses encourues, afin de lui permettre de compléter son dossier et de prendre une décision sur la clôture définitive des deux octrois concernés. Elle a également fait

cette demande à la ville de Strasbourg qui était une des collectivités locales impliquées dans la gestion du projet ECOS.

17.
    Le CCRE a répondu aux critiques de la Commission, par lettre du 2 octobre 1997, tout en maintenant les conclusions présentées dans les précédents rapports financiers. Il a, en outre, transmis un dossier de pièces justificatives relatives aux dépenses à l'égard desquelles des objections avaient été soulevées.

18.
    Entre-temps, le requérant a reçu deux courriers de la Commission, l'un envoyé le 1er octobre 1997 par un directeur de la DG XVI, et l'autre, envoyé le 24 octobre 1997 par le directeur général de la DG XVI, contenant des tableaux relatifs à la clôture du projet et reprenant le détail de la liquidation à pratiquer pour l'ensemble des deux octrois du projet pilote ECOS.

19.
    Durant le mois de janvier 1998, le CCRE a reçu une note de débit portant le numéro 97009405 F non datée émise en décembre 1997, par laquelle la Commission exigeait le remboursement du montant trop payé sur les premier et deuxième octrois, à savoir 363 336 écus.

20.
    Par la suite, les parties ont entretenu des contacts en vue de trouver une solution au différend qui les opposait. Lors d'une réunion, le 5 mars 1998, les services de la Commission auraient informé le CCRE de leurs conclusions sur la documentation qui leur a été transmise à la suite de la réunion du 24 septembre 1997. Cette affirmation est contestée par le requérant.

21.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 10 mars 1998, le requérant a introduit un recours en annulation contre la décision prise dans la note de débit n° 97009405 F. Le recours a été enregistré au greffe sous le numéro T-46/98.

22.
    Par lettre du 15 juin 1998 adressée au requérant, la Commission a reconnu avoir commis certaines erreurs en calculant le montant de cofinancement des frais de gestion accordés au programme ECOS. En conséquence, le directeur général de la DG XVI a annoncé au CCRE que le montant demandé avait été réduit à 300 173 écus et que la première note de débit était annulée et remplacée par une autre portant le même numéro, émise le 15 juillet 1998. Il a communiqué, en outre, que «s'agissant des dépenses de gestion déclarées dans vos rapports finals, les justifications produites par vos services, suite à la réalisation de la mission de contrôle de la Commission, ne permettent — pour ce qui concerne en particulier la gestion décentralisée — ni d'identifier leur imputation au programme ECOS ni de les confirmer sur base de pièces probantes. Par conséquent, la Commission n'estpas en mesure, sans ces justifications, d'accroître la part de ces dépenses qui peut être considérée comme éligible».

23.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 22 septembre 1998, le CCRE a introduit un second recours contre la décision contenue dans la deuxième note de débit. Le recours a été enregistré au greffe sous le numéro T-151/98.

24.
    Par ordonnance du 18 mai 1999, le président de la quatrième chambre du Tribunal a joint les deux affaires aux fins de la procédure orale et de l'arrêt en application de l'article 50 du règlement de procédure du Tribunal.

25.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale et a invité les parties à répondre par écrit à certaines questions. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience qui s'est déroulée le 17 juin 1999.

Conclusions des parties

Dans l'affaire T-46/98

26.
    La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

—    annuler la décision contenue dans la note de débit de décembre 1997, telle que modifiée par la décision contenue dans la note de débit du 15 juillet 1998;

—    condamner la Commission aux dépens.

27.
    La défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

—    rejeter le recours comme non fondé (sauf en ce qui concerne le montant de 63 163 écus, qui a fait l'objet d'une rectification);

—    condamner la partie requérante aux dépens.

Dans l'affaire T-151/98

28.
    La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

—    annuler la décision contenue dans la note de débit du 15 juillet 1998;

—    condamner la Commission, quelle que soit l'issue de la procédure, à supporter l'ensemble des dépens.

29.
    La défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

—    rejeter le recours comme non fondé;

—    condamner la partie requérante aux dépens.

Sur l'objet des recours dans les affaires T-46/98 et T-151/98

Arguments des parties

30.
    La Commission fait valoir que, ayant remplacé la première note de débit par la seconde réclamant une somme inférieure, le recours dans l'affaire T-46/98 est devenu sans objet et est donc irrecevable.

31.
    Le requérant relève que le remplacement de la décision initialement attaquée par une décision postérieure n'engendre pas l'irrecevabilité du recours, mais plutôt un non-lieu à statuer dans la mesure où après un tel incident le recours peut, éventuellement, devenir sans objet. Cette différence serait pertinente puisqu'elle emporte des conséquences lors de l'application des dispositions du règlement de procédure concernant les dépens.

32.
    En tout état de cause, la seconde note de débit n'a pas rendu le premier recours sans objet. En effet, la Commission n'est revenue que partiellement sur la décision attaquée et l'affaire devrait donc se poursuivre pour le reste. Le CCRE demande, par conséquent, au Tribunal de lui permettre de poursuivre la procédure en adaptant ses conclusions suite à l'attitude prise par la Commission. Le second recours a été introduit à titre conservatoire pour le cas où le Tribunal accepterait la thèse de la Commission et déciderait de prononcer le non-lieu à statuer dans l'affaire T-46/98.

Appréciation du Tribunal

33.
    Il convient de rappeler, à titre liminaire, la jurisprudence selon laquelle, lorsqu'une décision est, en cours de procédure, remplacée par une décision ayant le même objet, celle-ci doit être considérée comme un élément nouveau permettant au requérant d'adapter ses conclusions et moyens. Comme la Cour l'a jugé, notamment, dans l'arrêt du 3 mars 1982, Alpha Steel/Commission (14/81, Rec. p. 749, point 8), «il serait contraire à une bonne administration de la justice et à une exigence d'économie de procédure d'obliger la requérante à introduire un nouveau recours devant la Cour. Il serait, en outre, injuste que la Commission puisse, pour faire face aux critiques contenues dans une requête présentée à la Cour contre une décision, adapter la décision attaquée ou lui en substituer une autre et se prévaloir, en cours d'instance, de cette modification ou de cette substitution pour priver l'autre partie de la possibilité d'étendre ses conclusions et ses moyens initiaux à la décision ultérieure ou de présenter des conclusions et moyens supplémentaires contre celle-ci» (voir également les arrêts de la Cour du 29 septembre 1987, Fabrique de fer de Charleroi et Dillinger Huttenwerke/Commission, 351/85 et 360/85, Rec. p. 3639, point 11, et du 14 juillet 1988, Stahlwerke Peine-Salzgitter/Commission, 103/85, Rec. p. 4131, point 11).

34.
    En l'espèce, malgré le fait que, dans la seconde note de débit, la Commission indique que celle-ci annule et remplace la première, il y a lieu de constater que, par la seconde note, la Commission retient les mêmes faits et griefs que ceux retenus par la décision contenue dans la première. Le seul changement intervenu est dû au fait que la Commission est revenue sur ses calculs du taux de cofinancement des dépenses de gestion et a appliqué un taux de cofinancement rectifié. En conséquence, par la seconde note de débit, la défenderesse s'est limitée à altérer le montant du cofinancement approuvé et à modifier la somme précédemment demandée au requérant. La deuxième note de débit ne constitue donc qu'une simple rectification de la première.

35.
    Cette conclusion est renforcée par le fait que la Commission elle-même indique, dans ses conclusions dans l'affaire T-46/98, que la décision attaquée a, entre l'introduction du recours et le dépôt du mémoire en défense, fait l'objet d'une rectification de sa part.

36.
    Dans ces conditions, la décision rectifiée doit être considérée comme un élément nouveau permettant au requérant d'adapter ses moyens et conclusions, tel qu'il l'a fait dans son mémoire en réplique dans l'affaire T-46/98. Le fait qu'un second recours ait été introduit, à titre conservatoire, par le requérant contre cette dernière décision ne saurait modifier cette conclusion dès lors qu'il a effectivement utilisé la possibilité offerte par la jurisprudence de prendre en compte les changements intervenus lors de la procédure.

37.
    Il s'ensuit que le moyen soulevé par la Commission, à cet égard, ne saurait être retenu.

38.
    Il résulte de tout ce qui précède que l'objet de l'affaire T-151/98, introduit par le requérant à titre purement conservatoire, coïncide avec l'objet de l'affaire T-46/98, à savoir la demande d'annulation de la décision de la Commission contenue dans la note de débit n° 97009405 F, émise en décembre 1997, telle qu'elle a été modifiée par la note de débit émise le 15 juillet 1998 (ci-après «décision litigieuse»). Dans ces circonstances, le Tribunal, en vertu de l'article 113 du règlement de procédure, déclare d'office qu'il n'y a plus lieu à statuer dans l'affaire T-151/98.

Sur le fond

39.
    A titre liminaire, il y a lieu de déterminer la portée du litige en cause. A cet effet, les parties ont confirmé à l'audience que la somme indiquée dans la note de débit qui constitue la décision litigieuse correspond à la différence entre le montant des dépenses déclarées par le requérant et le montant accepté par la Commission à titre de cofinancement. Cette différence résulte, d'une part, du refus, par la Commission, de reconnaître certaines dépenses et, d'autre part, de l'imputation, par la Commission, de dépenses au titre «coordination et animation» des dépenses déclarées par le CCRE au titre «projets».

40.
    Les dépenses déclarées inéligibles à un cofinancement sont les suivantes:

Dépenses
Montant

(en écus)
États généraux de Strasbourg

— Rubrique A - Conférences de lancement et promotion

— Rubrique C2 - Instruction des dossiers/Promotion

— Rubrique E - Participation aux actions de formation

Total déduit États généraux CCRE

101 598

53 300

256 882

411 780
C1 — Secrétariat permanent, Strasbourg (frais de fonctionnement)

56 565
C2 — Instruction des dossiers/Promotion (frais d'équipement)

18 471
D — Coordination projets de coopération (frais de déplacements/réunions)

19 520
E — Gestion décentralisée de la coopération (expertise financière, juridique et technique)

432 000
E — Gestion décentralisée de la coopération (coordinateurs 12 points communautaires)

85 204
Total
1 023 540

41.
    Les dépenses qui ont été transférées d'un titre à l'autre sont les suivantes:

Dépenses
Cofinancement prévu par le requérant

(en écus)

Cofinancement

appliqué par la

Commission (en écus)
Journées de coopération Est-Ouest

69 016

36 394

42.
    Le requérant invoque, en substance, trois moyens d'annulation: le premier, présenté à titre principal, est tiré d'une violation de l'obligation de motivation. Les deuxième et troisième moyens, soulevés à titre subsidiaire, regroupent des arguments tirés l'un, d'une violation du principe de protection de la confiance légitime et du principe de sécurité juridique, l'autre d'une violation du principe de proportionnalité et du principe d'égalité.

Sur le moyen principal, pris de la violation de l'obligation de motivation

Arguments des parties

43.
    Le requérant fait valoir que la décision litigieuse ne lui permet pas de comprendre pourquoi les nombreuses pièces comptables qui ont été fournies à la Commission à la suite de la réunion du 24 septembre 1997 ne suffisent pas à justifier la réalité des dépenses encourues et leur imputation au programme ECOS. De plus, la Commission n'aurait jamais répondu aux arguments du requérant développés dans les lettres qui lui ont été envoyées à la suite de ladite réunion. Cette situation constituerait une violation de l'obligation de motivation des actes de la Commission, prévue à l'article 190 du traité CE (devenu article 253 CE), en particulier dans lecas où une décision porte sur la réduction du montant d'un concours financier, dans la mesure où elle entraîne des conséquences graves pour le bénéficiaire du concours (arrêts du Tribunal du 6 décembre 1994, Lisrestal e.a./Commission, T-450/93, Rec. p. II-1177, point 52, et du 15 octobre 1997, IPK-München/Commission, T-331/94, Rec. p. II-1665, point 51).

44.
    La Commission relève que la note de débit litigieuse était la conclusion d'un long dialogue établi entre les parties, pendant lequel elles ont échangé plusieurs courriers et se sont rencontrées lors des réunions du 24 septembre 1997 et du 5 mars 1998. La note de débit n'étant qu'un formulaire standard, elle ne contiendrait pas de motivation détaillée, cette dernière se trouverait dans la lettre envoyée au requérant par les services de la Commission le 15 juin 1998. La Commission invoque, à cet égard, la jurisprudence de la Cour selon laquelle on ne saurait exiger une motivation spécifique à l'appui de tous les détails que l'acte litigieux peut comporter, dès lors que ceux-ci rentrent dans le cadre du système d'ensemble (arrêts de la Cour du 1er décembre 1965, Schwarze, 16/65, Rec. p. 1081, 1096 et 1097, et du 23 février 1978, An Bord Bainne, 92/77, Rec. p. 497, 515).

45.
    En outre, la Commission aurait accepté de rencontrer les représentants du CCRE le 24 septembre 1997 et elle leur a longuement expliqué son point de vue. Dans ces conditions, l'argument du CCRE serait dénué de fondement. (défense T-46/98, points 15 et 16)

Appréciation du Tribunal

46.
    Il ressort d'une jurisprudence constante que l'obligation de motiver une décision individuelle a pour but de permettre au juge communautaire d'exercer son contrôle sur la légalité de la décision et de fournir à l'intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est bien fondée ou si elle est, éventuellement, entachée d'un vice permettant d'en contester la validité. La portée de cette obligation dépend de la nature de l'acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté (arrêt du Tribunal du 12 janvier 1995, Branco/Commission, T-85/94, Rec. p. II- 47, point 32, et jurisprudence citée).

47.
    Il en résulte que la motivation doit, en principe, être communiquée à l'intéressé en même temps que la décision lui faisant grief, et que l'absence de motivation ne saurait être régularisée par le fait que l'intéressé prend connaissance des motifs de la décision au cours de la procédure devant le Tribunal (arrêt de la Cour du 26 novembre 1981, Michel/Parlement, 195/80, Rec. p. 2861, point 22).

48.
    Il y a lieu de rappeler que, en ce qui concerne la motivation d'une décision portant réduction du montant d'un concours du Fonds social européen initialement accordé, il a été jugé que, au vu, notamment, du fait qu'une telle décision entraîne des conséquences graves pour le bénéficiaire du concours, celle-ci doit faire clairement apparaître les motifs qui justifient la réduction du concours par rapport au montant initialement agréé (arrêt Branco/Commission, précité, point 33).

49.
    Les exigences de motivation formulées par la jurisprudence à propos d'une décision portant réduction de concours financiers en matière de Fonds social européen doivent être imposées également à l'égard d'une telle décision dans le cadre du FEDER. En conséquence, il y a lieu d'examiner si, en l'espèce, la décision litigieuse satisfait aux exigences posées par l'article 190 du traité, tel que celui-ci a été interprété par le juge communautaire.

50.
    Il convient de constater que la modification apportée par la note de débit du 15 juillet 1998 n'a en rien ajouté aux griefs qui étaient reprochés au requérant lors de l'émission de la première note de débit. Dans ces circonstances, et compte tenu du fait que la décision se limite à ordonner un remboursement, la suffisance de motivation doit être analysée au regard des contacts établis entre les parties jusqu'à cette date. Il résulte de l'analyse du dossier que la réduction du concours financier a fait l'objet de différentes lettres envoyées au requérant et d'une réunion entre les parties selon l'ordre chronologique suivant:

—    lettre de la Commission du 30 juillet 1997 dans laquelle cette dernière fait savoir au requérant que, après avoir effectué un contrôle sur place, certaines dépenses non documentées ne pouvaient pas être acceptées pour cofinancement;

—    réunion du 24 septembre 1997 durant laquelle, comme il ressort de la lettre du requérant du 2 octobre 1997, la Commission a identifié les dépenses considérées inéligibles et a formulé des critiques à leur égard;

—    courrier du directeur de la DG XVI du 1er octobre 1997 établissant, pour les premier et second octrois, rubrique par rubrique, les dépenses inéligibles;

—    courrier du directeur général de la DG XVI du 24 octobre 1997 contenant un tableau incomplet et peu détaillé dans lequel la

Commission se limite à énoncer les sommes encore dues par le CCRE pour chaque soumission au titre «projets»;

—    lettre du 15 juin 1998 confirmant le refus des justificatifs présentés par le requérant.

51.
    Le défaut de motivation soulevé par le requérant repose, en premier lieu, sur l'absence d'explications, par la Commission, du rejet des pièces justificatives concernant les dépenses relevant des rubriques C1, C2, D et E (dans ses deux sous-rubriques; voir ci-dessus point 40) qu'il a envoyées à la suite de la réunion du 24 octobre 1997, en deuxième lieu, sur l'absence de justification du transfert de lignes budgétaires des dépenses relatives aux journées Est-Ouest, opérant de fait une réduction du concours financier attendu et, en dernier lieu, sur l'insuffisance de motivation du refus de la Commission de considérer comme éligibles, au titre «coordination et animation», les dépenses afférentes aux États généraux de Strasbourg.

52.
    En premier lieu, en ce qui concerne les rubriques C1, C2 et E (dans ses deux sous-rubriques), il ressort du dossier qu'aucun des documents échangés entre les parties, après la lettre du requérant du 2 octobre 1997, ne fournit d'explications suffisantes permettant au requérant de comprendre les raisons pour lesquelles la Commission a refusé valeur probante aux pièces qu'il a envoyées après la réunion du 24 septembre 1997 pour écarter les critiques de la Commission relatives à certaines dépenses. En outre, aucun de ces documents ne permet au Tribunal d'exercer son contrôle sur la légalité de ce refus.

53.
    La défenderesse ne saurait prétendre, à cet égard, que sa lettre du 15 juin 1998 contient une motivation suffisante de la décision. Dans cette lettre, la Commission s'est limitée à répéter les raisons qui avaient été invoquées dans la première correspondance échangée entre les parties, notamment dans la lettre du 30 juillet 1997. La lettre du 15 juin 1998 ne contient aucun éclaircissement sur les raisons pour lesquelles la Commission a considéré que ni les justifications ni les pièces comptables produites par le CCRE, après la mission de contrôle et la réunion du 24 septembre 1997, ne permettaient de confirmer l'exigibilité de ces dépenses et leur imputation au programme ECOS.

54.
    En deuxième lieu, en ce qui concerne le transfert, par la Commission, des dépenses relatives aux journées de coopération Est-Ouest de la ligne budgétaire relative aux «projets» à la ligne budgétaire relative aux opérations de «coordination et animation», provoquant de ce fait une réduction du concours financier de 32 622 écus, il résulte de la note envoyée par la Commission au requérant, le 30 décembre 1993, que la défenderesse avait donné des indications précises selon lesquelles ces dépenses devraient être prises en charge par les fonds disponibles au titre de la ligne «projets». Bien que la requérante ait, dans sa lettre du 2 octobre 1997, attiré l'attention de la Commission sur le fait que le transfert envisagé comportait une modification du budget global du contrat et une réduction du concours financier

apporté par la Commission, il y a lieu de constater que celle-ci n'a, jusqu'à l'adoption de la décision litigieuse, fourni aucun élément permettant au requérant de comprendre les raisons pour lesquelles elle a, entre-temps, changé d'avis et au Tribunal d'apprécier le bien-fondé de ce transfert.

55.
    En dernier lieu, en ce qui concerne les dépenses relatives aux États généraux de Strasbourg, il ressort de la lettre envoyée par le requérant le 2 octobre 1997 qu'à cette date le requérant connaissait déjà les raisons pour lesquelles la Commission considérait inéligibles certaines dépenses relatives à l'organisation de ces États généraux. En effet, la Commission a toujours maintenu que ces dépenses dépassaient les plafonds autorisés tant dans le cadre de l'approbation du programme ECOS que dans celui tracé par l'autorisation spécifique obtenue pour la tenue de ces États généraux.

56.
    Il découle de ce qui précède que la décision litigieuse doit être annulée pour défaut de motivation en ce qui concerne toutes les dépenses dont l'inéligibilité a été justifiée par le refus de valeur probante aux pièces comptables ainsi qu'en ce qui concerne la réduction du concours par le transfert de lignes budgétaires des dépenses relatives aux journées de coopération Est-Ouest.

57.
    Cette conclusion comprend toutes les dépenses couvertes par la décision attaquée à l'exception de celles relatives aux États généraux de Strasbourg au sujet desquelles le moyen tiré du défaut de motivation du refus de cofinancement est rejeté.

58.
    Dans ces circonstances, il n'y a lieu d'analyser les autres moyens d'annulation invoqués par le requérant que dans la mesure où ils concernent le refus de cofinancement des dépenses relatives aux États généraux de Strasbourg. Le Tribunal analysera donc le moyen tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime et du principe de sécurité juridique qui est le seul invoqué à cet égard.

Sur le moyen subsidiaire, pris de la violation du principe de confiance légitime et du principe de sécurité juridique

    Arguments des parties

59.
    Le requérant soutient d'abord que les dépenses encourues lors des États généraux de Strasbourg ont été réalisées dans les conditions établies dans la première décision d'octroi et, notamment, selon les termes du paragraphe 7 des conditions générales annexées à cette décision qui stipule que le CCRE est responsable de la mise en oeuvre du projet ECOS et veille à ce que l'action fasse l'objet d'une publicité adéquate.

60.
    Il soutient que, indépendamment de l'attribution d'une contribution de 100 000 écus à la ville de Strasbourg, les frais encourus par le CCRE afin de contribuer au financement des États généraux de Strasbourg étaient éligibles à titre de frais de gestion dans le cadre du programme ECOS.

61.
    A supposer que, par sa lettre du 7 octobre 1997, la Commission ait voulu limiter à un montant maximal de cofinancement de 100 000 écus les dépenses encourues par le CCRE pour des activités en marge de l'organisation des États généraux, cette réduction du budget aurait été tardive et préjudiciable pour le requérant. En effet, la Commission ne pourrait limiter ce montant de cofinancement sans avoir averti suffisamment à l'avance le CCRE. Or, alors que la Commission a envoyé un courrier relatif au cofinancement de cet événement à la ville de Strasbourg dès le 23 juin 1993, ce ne serait que le 7 octobre 1993, quelques jours avant cette manifestation, et alors que les dépenses étaient déjà largement engagées, qu'elle aurait informé le secrétaire général du CCRE de la limite imposée à cette dépense.

62.
    De plus, des hauts fonctionnaires de la DG XVI auraient été au courant del'événement. Par ailleurs, le directeur général de la DG XVI serait intervenu comme orateur. En outre, dans une lettre du 19 juillet 1993, la Commission aurait indiqué que le membre de la Commission compétent, M. Millan, était heureux que la Communauté puisse être impliquée dans le financement de cet événement. Ce courrier laisserait, par ailleurs, clairement entendre que les dépenses en cause pourraient être éligibles au financement communautaire.

63.
    De surcroît, les dépenses relatives aux États généraux auraient été approuvées par le fonctionnaire chargé de la gestion du programme ECOS à la DG XVI, dans une télécopie du 19 avril 1996, par laquelle il aurait exprimé sa satisfaction à l'égard du rapport final du premier octroi et aurait informé le requérant que le rapport avait été jugé satisfaisant tant au niveau opérationnel qu'au niveau financier. En s'appuyant sur l'arrêt du Tribunal du 18 mai 1994, BEUC et NCC/Commission, T-37/92, Rec. p. II-285, le requérant prétend que cette réponse était suffisamment claire et précise pour faire naître dans son chef des espérances fondées en ce que l'exécution financière du projet ne serait pas ultérieurement contestée.

64.
    A la lumière de ces développements, le requérant aurait été en droit de s'attendre à ce que le cofinancement de ces dépenses ne soit pas remis en cause. En les refusant, la Commission aurait violé la confiance légitime que le requérant avait placée dans le cofinancement des dépenses en cause. Une telle attitude constituerait, en outre, une atteinte aux termes des conditions d'octroi et au principe de la sécurité juridique.

65.
    La Commission conteste les arguments du requérant et soutient que, ces dépenses n'ayant pas été prévues dans le budget initial, elles ne pouvaient être éligibles que par voie d'autorisation. Celle-ci a été accordée par les lettres des 23 juin et 7 octobre 1993 qui ont, néanmoins, limité le cofinancement en question à 100 000 écus. Or, si la Commission a accepté 200 000 écus de dépenses éligibles

à un cofinancement, déclarées au titre «projets» dans le rapport final du CCRE, elle ne pouvait pas en accepter d'autres, car ces dernières n'étaient pas couvertes par ladite autorisation.

Appréciation du Tribunal

66.
    Il y a lieu de constater, à titre liminaire, que le requérant a déclaré, dans son rapport final, quatre types de dépenses liées à la tenue des États généraux de Strasbourg:

a)    200 000 écus au titre «projets», que la Commission a considéré éligibles à un cofinancement à hauteur de 100 000 écus en application de l'engagement qu'elle avait pris dans ses lettres des 23 juin et 7 octobre 1993;

b)    les dépenses restantes ont été déclarées au titre «coordination et animation» (gestion):

—    101 598 écus dans la rubrique A «Conférences de lancement et de promotion» pour la participation des élus locaux à l'atelier n° 2 portant sur la coopération interrégionale Est-Ouest et le programme ECOS;

—    53 300 écus dans la rubrique C2 «Instruction des dossiers/Promotion» (sous-rubrique «Actions d'information/Publications»), pour la création d'un stand d'information destiné à l'information des élus locaux;

—    256 882 écus dans la rubrique E «Gestion décentralisée de la coopération», (sous-rubrique «Participation aux actions de promotion»), pour le financement des déplacements des participants aux États généraux du CCRE.

67.
    Les dépenses déclarées au titre «coordination et animation» [voir ci-dessus point 66, sous b)] ont été considérées inéligibles par la Commission en ce qu'elles n'auraient pas été prévues dans le budget initial et dépasseraient la limite imposée dans les lettres des 23 juin et 7 octobre 1993 par lesquelles la Commission a autorisé, à titre exceptionnel, un cofinancement de 100 000 écus.

68.
    Il y a lieu de relever au préalable que l'octroi d'un concours financier est subordonné au respect non seulement des conditions énoncées par la Commission dans la décision d'octroi du concours, mais également au respect des termes de la demande de concours qui a fait l'objet de ladite décision (arrêt du Tribunal du 14 juillet 1997, Interhotel/Commission, T-81/95, Rec. p. II-1265, point 42).

69.
    Il convient de rappeler, par ailleurs, que, s'agissant de l'invocation du principe de la confiance légitime dans ce contexte, la Commission est en droit de rejeter la demande de paiement du solde s'il y est demandé l'approbation de coûts qui n'avaient pas été prévus dans la demande de concours, sans qu'il soit par là porté atteinte audit principe (arrêt Interhotel/Commission, précité, point 46).

70.
    De même, en ce qui concerne le principe de sécurité juridique, s'il est vrai que, selon une jurisprudence constante, le caractère de certitude et de prévisibilité de la réglementation communautaire constitue un impératif qui s'impose avec une rigueur particulière lorsqu'il s'agit d'une réglementation susceptible de comporter des conséquences financières (arrêt de la Cour du 27 mars 1990, Italie/Commission, C-10/88, Rec. p. I-1229), ce principe ne saurait être utilement invoqué lorsque la réglementation en vigueur prévoit clairement la possibilité de la répétition du concours financier dans les cas où les conditions auxquelles le concours était subordonné n'ont pas été respectées (arrêt Interhotel/Commission, précité, point 61).

71.
    En l'espèce, lors de la demande du concours financier, le requérant a présenté à la Commission un programme de travail accompagné d'un projet de budget. Celui-ci a été accepté par la Commission qui l'a assujetti à des conditions générales et spéciales. Le paragraphe 8 des conditions générales énonce que «le non-respect d'une des conditions mentionnées ci-dessus [...] autorisera la Commission à réduire ou à annuler le concours octroyé par la présente décision; la Commission pourra dans ces cas réclamer la restitution totale ou partielle de l'aide déjà versée au bénéficiaire de la décision [...]»

72.
    Il ressort du dossier que la somme de 53 300 écus déclarée au titre «Actions d'information/Publications» et considérée comme inéligible par la Commission a fait l'objet d'une prévision dans le budget initial. En effet, le requérant avait prévu de dépenser 128 700 écus (42 900 écus x 3) en actions d'information et de promotion, auxquelles appartient la dépense engagée dans le stand de promotion et d'information sur le programme ECOS durant les États généraux de Strasbourg. Dans ces conditions, ayant approuvé le budget initial, la Commission ne peut, sans violer le principe de confiance légitime et de sécurité juridique, réduire le concours financier en ce qui concerne ce montant.

73.
    En revanche, à l'égard des autres dépenses afférentes aux États généraux de Strasbourg, à savoir, celles de 101 598 écus (conférences de lancement et promotion) et de 256 882 écus (participation aux actions de formation), il y a lieu de constater qu'elles n'ont pas fait l'objet de prévision budgétaire.

74.
    S'agissant de la rubrique A (101 598 écus), somme déclarée au titre «Dépenses de conférences de lancement», le budget ne prévoyait que 120 000 écus au titre des conférences de lancement à réaliser à Strasbourg en mars 1992 et à Prague en octobre 1992. En conséquence, aucune ligne budgétaire n'a été prévue pour la conférence de lancement de Strasbourg en octobre 1993. En outre, dans le

programme de travail présenté par le CCRE à la Commission, il n'est expressément prévu que ces deux conférences de lancement pour le programme ECOS.

75.
    En ce qui concerne la rubrique E (256 882 écus), somme déclarée à titre de participation aux actions de promotion, le Tribunal constate qu'aucune ligne budgétaire n'a été prévue à cet effet.

76.
    En conséquence, les dépenses relevant des rubriques A et E relatives aux États généraux de Strasbourg ne se rattachent pas au projet tel qu'initialement accepté. Il convient donc d'examiner si ces dépenses peuvent être éligibles en vertu de l'autorisation expresse de la Commission contenue dans les lettres du 23 juin et 7 octobre 1993.

77.
    Il y a lieu de constater que le montant autorisé expressément par la Commission dans ces lettres, qui a été déclaré par le requérant à titre de projet et accepté par la Commission, a été intégralement utilisé par la ville de Strasbourg pour l'organisation de l'atelier n° 2 portant sur la coopération interrégionale Est-Ouest. Dans ces circonstances, toute autre dépense ne saurait bénéficier de cette autorisation.

78.
    Les arguments avancés par le requérant pour démontrer que l'attitude de la Commission à son égard a pu faire naître, dans son chef, des espérances légitimes quant à un cofinancement des dépenses relevant des rubriques A et E relatives aux États généraux de Strasbourg ou que la Commission a violé le principe de sécurité juridique en ne considérant pas ces dépenses comme éligibles ne sauraient être acceptés. En effet, en ce qui concerne l'argument tendant à établir que ce financement aurait été accordé à la ville de Strasbourg et que le CCRE aurait appris son existence et son plafonnement quelques jours à peine avant l'événement, le Tribunal estime que le requérant, en tant que bénéficiaire du financement communautaire pour la mise en place du programme ECOS et en tant que responsable de la gestion financière globale du réseau ne peut légitimement prétendre ignorer les démarches qui ont été faites par la ville de Strasbourg, qui assurait, par ailleurs, le secrétariat permanent du réseau ECOS, en vue de l'organisation de sa propre assemblée générale.

79.
    Quant à l'argument tiré de la teneur de la télécopie du 19 avril 1996, il ressort clairement de ce document, d'une part, que l'accord de la Commission qui y est mentionné ne visait que l'exécution opérationnelle du projet et, d'autre part, que cet accord ne visait que le premier octroi. En effet, le requérant a reçu la télécopie en question le 19 avril 1996 et n'a déposé le rapport financier conjoint couvrant les deux octrois que le 7 novembre 1996. En outre, le requérant, qui gère plusieurs autres projets financés par la Commission, était en mesure de savoir que l'approbation de tout projet cofinancé par cette institution dépend d'un contrôle

de fond opéré par la DG XVI et d'un contrôle de forme opéré par les services financiers de la DG XVI et de la DG XX.

80.
    De plus, pour autant que le requérant fasse valoir une espérance fondée, au regard de la télécopie mentionnée, en ce que la Commission ne procèderait pas, par la suite, à une réduction du concours financier, il suffit de constater que la prise de position de la Commission contenue dans cette télécopie n'équivaut pas à une décision claire et définitive d'approbation du rapport financier qu'il a présenté et ne saurait donc faire naître un tel espoir.

81.
    En ce qui concerne les arguments du requérant fondés sur le soutien apporté par la DG XVI, la Commission, par sa lettre du 19 juillet 1993, a uniquement décliné l'invitation qui avait été adressée à M. Millan et à son chef de cabinet à participer aux États généraux de Strasbourg et a indiqué que le Commissaire était heureux de la participation de la Commission au financement de cet événement. Cette déclaration ne saurait non plus faire naître des espérances fondées, dans le chef du requérant, en ce que toutes les dépenses engagées lors de cet événement seraient éligibles au financement communautaire.

82.
    Il s'ensuit que, à l'égard des deux dépenses relevant des rubriques A et E relatives aux États généraux de Strasbourg, la Commission s'est limitée à déduire du décompte final des coûts présentés par le requérant dans son rapport final ceux qui n'ont été ni prévus ni autorisés postérieurement. Dans ces conditions, les principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique n'ont pas été violés en ce qui concerne le refus de l'éligibilité au cofinancement de ces dépenses.

83.
    Il résulte de tout ce qui précède que ce moyen est accueilli partiellement à l'égard de la dépense relevant de la rubrique C2 et relative à la création d'un stand d'information sur le programme ECOS d'un montant de 53 300 écus et rejeté pour le surplus.

84.
    En conséquence, le recours est fondé à l'égard de la décision de la Commission de refus de cofinancement de toutes les dépenses déclarées inéligibles, à l'exception de celles relevant des rubriques A et E liées aux États généraux de Strasbourg et portant, respectivement, sur des montants de 101 598 et 256 882 écus.

Sur les dépens

    Dans l'affaire T-46/98

85.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens.

86.
    En l'espèce, les conclusions en annulation du requérant, qui a demandé la condamnation de la Commission en ce qui concerne la prise en charge des dépens

de la présente affaire, ont été déclarées partiellement fondées. Le Tribunal estime que, bien que le requérant ait succombé en partie dans ses prétentions, il convient toutefois de tenir également compte, pour le règlement des dépens, du comportement de la Commission qui a attendu l'introduction du recours pour reconnaître partiellement la demande du requérant et, de ce fait, pour revenir sur sa position.

87.
    En conséquence, il convient d'appliquer, en outre, l'article 87, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement de procédure selon lequel le Tribunal peut condamner une partie, même gagnante, à rembourser à l'autre partie les frais d'une procédure occasionnée par son propre comportement (voir, mutatis mutandis, l'arrêt Interhotel/Commission, précité, point 82, et la jurisprudence citée).

88.
    Il y a donc lieu de condamner la Commission à supporter, outre ses propres dépens, les dépens exposés par le requérant dans cette affaire.

Dans l'affaire T-151/98

89.
    En cas de non-lieu à statuer, l'article 87, paragraphe 6, du règlement de procédure, prévoit que le Tribunal règle librement les dépens.

90.
    Le Tribunal estime que la Commission a, par son comportement, favorisé l'introduction du recours en l'espèce en invoquant le non-lieu à statuer dans l'affaire T-46/98 et en obligeant de cette manière le requérant à introduire un nouveau recours contre la décision rectifiée, en dépit d'une jurisprudence bien établie à cet égard.

91.
    L'introduction du présent recours ayant été justifiée par l'attitude de la défenderesse, il y a lieu de statuer que celle-ci supportera, outre ses dépens, les dépens exposés par le requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête:

1.
    La décision de la Commission contenue dans la note de débit n° 97009405 F relative au projet European city cooperation system n° 91/00/29/003, émise en décembre 1997 et modifiée le 15 juillet 1998, est annulée en ce qui concerne le refus de cofinancement des dépenses déclarées inéligibles par la Commission, à l'exception de celles liées aux

États généraux de Strasbourg pour les montants de 101 598 et 256 882 écus.

2)    Le recours dans l'affaire T-46/98 est rejeté pour le surplus.

3)    Il n'y a pas lieu à statuer sur le recours dans l'affaire T-151/98.

4)     La Commission supportera l'ensemble des dépens.

Moura Ramos Tiili Mengozzi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 3 février 2000.

Le greffier

Le président

H. Jung

V. Tiili


1: Langue de procédure: le français.