Language of document : ECLI:EU:T:2024:67

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

7 février 2024 (*)

 « Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale wetoper – Marques nationale verbale antérieure TOPPER et Benelux figurative antérieure Topper – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑630/22,

Topper Argentina, SA, établie à Buenos Aires (République d’Argentine), représentée par Me J. M. Mora Cortés, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme E. Nicolás Gómez, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Ningbo Xiangxinli Network Technology Co. Ltd, établie à Qingdao (Chine),

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mme K. Kowalik‑Bańczyk, présidente, M. E. Buttigieg (rapporteur) et Mme B. Ricziová, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Topper Argentina, SA, demande l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 29 juin 2022 (affaire R 2126/2021-4) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 8 juin 2020, l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours, Ningo Xiangxinli Network Technology Co. Ltd., a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal wetoper.

3        La marque demandée désignait les produits relevant de la classe 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant à la description suivante : « Ceintures porte-monnaie [habillement] ; gants [habillement] ; costumes de mascarade ; sandales ; bas ; manteaux ; vêtements de sport ; vestes de pêcheurs ; tenues de motocyclisme ; chaussures d’alpinisme ; vêtements pour enfants ; foulards ; sous-vêtements ».

4        Le 14 septembre 2020, la requérante, à l’époque dénommée Alpargatas Sociedad Anónima Industrial y Comercial, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque verbale TOPPER, enregistrée en Espagne, désignant les produits relevant de la classe 25 et correspondant à la description suivante : « Robes ; chaussures ; chapeaux » ;

–        la marque figurative, enregistrée au Benelux et reproduite ci-après, désignant les « malles et valises ; sacs de voyage ; sacs à provisions ; sacs d’alpinistes et de campeurs ; sacs de sport ; sacs de plage et sacs de loisirs », relevant de la classe 18, et les « vêtements ; chaussures ; chapellerie », relevant de la classe 25 :

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6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 15 octobre 2021, la division d’opposition a rejeté l’opposition.

8        Le 14 décembre 2021, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours au motif que, pour le public pertinent en l’espèce, à savoir le grand public, dont le niveau d’attention serait moyen, il n’existe pas de risque de confusion, eu égard, notamment, au faible degré de similitude des marques en conflit sur les plans visuel et phonétique et nonobstant l’identité des produits visés par ces marques.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens de la procédure, y compris ceux afférents aux procédures devant la division d’opposition et la chambre de recours.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens, en cas de convocation à une audience.

 En droit 

12      La requérante invoque un moyen unique à l’appui de son recours, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

13      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement 2017/1001, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre ou, pour ce qui concerne la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas, auprès de l’Office Benelux de la propriété intellectuelle, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque de l’Union européenne.

14      Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

15      Par ailleurs, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

16      En l’espèce, à titre liminaire, il y a lieu de noter que la chambre de recours a conclu, au point 26 de la décision attaquée, que les produits visés par les marques en conflit s’adressaient au grand public, dont le niveau d’attention est moyen. Au point 27 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que les marques antérieures couvraient les territoires de l’Espagne, de la Belgique, des Pays-Bas et du Luxembourg et que, par conséquent, le territoire pertinent aux fins de l’appréciation du risque de confusion était le territoire de ces États membres où les langues officielles sont l’espagnol, le néerlandais, le français et l’allemand.

17      Ces constatations de la chambre de recours ne sont pas contestées par la requérante.

18      La requérante ne conteste non plus la conclusion de la chambre de recours, au point 28 de la décision attaquée, selon laquelle les produits compris dans la classe 25, visés par les marques en conflit, sont identiques.

 Sur la comparaison des signes

19      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

20      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants. Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant. Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, points 41 et 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, points 42 et 43).

21      En l’espèce, avant de traiter la question de la similitude des marques en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, il y a lieu d’examiner l’appréciation des éléments distinctifs et dominants desdites marques effectuée par la chambre de recours.

 Sur les éléments distinctifs et dominants des marques en conflit

22      Il convient de rappeler que, pour déterminer le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’apprécier l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée [voir arrêt du 5 octobre 2020, Eugène Perma France/EUIPO – SPI Investments Group (NATURANOVE), T‑602/19, non publié, EU:T:2020:463, point 27 et jurisprudence citée].

23      En outre, il y a lieu de relever que, même si le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’en reste pas moins que, en percevant un signe verbal, il identifiera des éléments verbaux qui, pour lui, suggèrent une signification concrète ou ressemblent à des mots qu’il connaît (voir arrêt du 5 octobre 2020, NATURANOVE, T‑602/19, non publié, EU:T:2020:463, point 28 et jurisprudence citée).

24      En l’espèce, s’agissant des marques antérieures, la chambre de recours a, tout d’abord, constaté, au point 35 de la décision attaquée, que l’élément verbal « topper » n’avait pas de signification en espagnol, en français et en allemand, mais qu’il avait une signification en néerlandais, signifiant quelque chose « qui est le meilleur de son genre ». Par ailleurs, la chambre de recours, partant de la considération que, en substance, une partie significative du public pertinent aux Pays-Bas et au Luxembourg a une certaine connaissance de l’anglais (point 37 de la décision attaquée), a constaté, au point 38 de la décision attaquée, que l’élément verbal « topper » avait également une signification en anglais, signifiant notamment « une personne ou une chose exceptionnellement bonne ».

25      La chambre de recours a, ainsi conclu, au point 39 de la décision attaquée, que l’élément verbal « topper » des marques antérieures serait reconnu par les consommateurs néerlandophones et anglophones comme étant un terme plutôt laudatif.

26      Par ailleurs, au point 41 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que l’élément verbal « topper » de la marque figurative antérieure était « plus dominant » que son élément figuratif.

27      L’analyse présentée aux points 24 à 26 ci-dessus a permis à la chambre de recours de constater, au point 43 de la décision attaquée, que l’élément verbal « topper » des deux marques antérieures constituait l’élément le plus distinctif de celles-ci, y compris pour les parties néerlandophone et anglophone du public pertinent.

28      S’agissant de la marque demandée, la chambre de recours a constaté, au point 44 de la décision attaquée, qu’elle était composée d’un seul élément verbal, à savoir « wetoper », lequel ne présentait aucun élément dominant et, étant donné qu’il n’avait de signification dans aucune langue, possédait un caractère distinctif normal.

29      La requérante conteste, en substance, la constatation de la chambre de recours, au point 44 de la décision attaquée, selon laquelle l’élément verbal « wetoper » n’avait pas d’élément dominant. Elle fait valoir qu’une partie, au moins, du public pertinent, reconnaîtra dans les deux premières lettres du signe demandé le pronom personnel « we » (nous) en anglais, de sorte qu’elle considérera que ce signe se compose des éléments « we » et « toper », même lorsqu’elle ne peut pas associer l’élément « toper » à un verbe. En effet, selon la requérante, à partir du moment où une partie du public pertinent reconnaîtra dans le signe demandé le pronom personnel « we » de la langue anglaise, elle séparera forcément les éléments « we » et « toper ». L’élément « toper » constitue, selon la requérante, l’élément pertinent du signe demandé aux fins de la comparaison avec les marques antérieures.

30      Pour corroborer son argumentation, la requérante invoque également l’existence de plusieurs marques enregistrées auprès de l’EUIPO, composées de la structure « we + [verbe] », telles que les marques comprenant les éléments verbaux « wego », « weknow », « wechat » et « weadapt », lesquels ne seraient pas perçus sous une forme insécable, mais seraient décomposés en deux éléments, à savoir « we go », we know », « we chat » et « we adapt ». Selon la requérante, il est évident que, par analogie, la marque demandée wetoper sera comprise par la partie du public pertinent qui a une connaissance de base de l’anglais comme « we toper ».

31      L’EUIPO conteste l’argumentation de la requérante.

32      À titre liminaire, il y a lieu de relever que les constatations de la chambre de recours relatives aux éléments distinctifs et dominants des marques antérieures ne sont pas contestées par la requérante.

33      De la même manière, il est constant entre les parties qu’au moins une partie du public pertinent a une connaissance de base de l’anglais lui permettant de comprendre le pronom personnel « we ».

34      Toutefois, la question litigieuse est de savoir si la partie du public pertinent ayant une connaissance de base de l’anglais reconnaîtra le pronom personnel « we » au début du signe demandé, de sorte qu’elle décomposera ledit signe en deux parties « we » et « toper ». La chambre de recours a constaté, aux points 44, 46 et 47 de la décision attaquée, que tel n’était pas le cas.

35      L’argumentation de la requérante ne saurait remettre en cause cette constatation de la chambre de recours.

36      En effet, en premier lieu, il n’y a aucune raison pour que les consommateurs anglophones, faisant partie du public pertinent, divisent le signe demandé en deux parties simplement en raison du fait que les deux premières lettres dudit signe coïncident avec le pronom personnel « we » de la langue anglaise. Ainsi que la chambre de recours le note à juste titre au point 46 de la décision attaquée, les consommateurs anglophones ont l’habitude de voir des mots commençant par les lettres « we », comme les mots « weather », « western », « welcome » et « wedding », de sorte qu’il n’y a pas de raison de supposer que, en l’espèce, ces consommateurs diviseront le signe demandé en deux parties, à savoir « we » et « toper ».

37      En deuxième lieu, rien ne permet de supposer que le public pertinent reconnaîtra la partie « toper » du signe demandé comme étant un élément qui devrait être dissocié de la partie « we ». En effet, ainsi que la chambre de recours le note au point 47 de la décision attaquée, le terme « toper » est un mot anglo-américain qui signifie « une personne qui boit de l’alcool avec excès ; poivrot ». Ce mot ne fait pas partie des mots les plus connus de la langue anglaise, de sorte qu’il n’est pas probable que le public pertinent, même celui qui a une bonne connaissance de l’anglais, reconnaîtra ce mot au sein du signe demandé et décomposera ledit signe en deux parties.

38      Concernant la problématique relative à la compréhension de la partie « toper » par le public pertinent, la requérante soutient qu’il existe plusieurs verbes en anglais composés de cinq lettres qui commencent par la lettre « t » et finissent par les lettres « er » à l’instar de la partie « toper ». La requérante soutient ainsi, en substance, que le public pertinent ayant une connaissance de l’anglais percevra la partie « toper » comme un verbe qui aurait comme sujet le pronom personnel « we ».

39      Cette argumentation ne convainc pas le Tribunal. La circonstance selon laquelle il existe, en anglais, plusieurs verbes qui commencent par la lettre « t », se terminent par les lettres « er » et contiennent cinq lettres ne démontre pas que tout mot qui répond à ces critères – comme « toper » en l’espèce – puisse être perçu comme un verbe.

40      En troisième lieu, la chambre de recours constate également, aux points 44 et 47 de la décision attaquée, sans être contestée par la requérante, que la combinaison des éléments « we » et « toper » n’a de signification dans aucune des langues du territoire pertinent et n’est conforme à aucune règle grammaticale, ce qui corrobore la conclusion que le public pertinent ne décomposera pas le signe demandé en ces deux éléments susvisés.

41      En quatrième lieu, s’agissant de l’argument de la requérante présenté au point 30 ci-dessus, il convient de noter, à l’instar de l’EUIPO, que les éléments verbaux des marques invoquées par la requérante sont composés de deux termes ayant une signification claire en anglais. Par ailleurs, dans plusieurs de ces marques, la séparation entre les deux termes apparaît clairement au niveau visuel à travers une stylisation particulière. Tel n’est pas le cas en l’espèce, où il n’y a aucune stylisation particulière séparant les parties « we » et « toper » et où, ainsi que la chambre de recours le note à juste titre, aucune de ces parties ne présente de caractère dominant au sein du signe demandé.

42      Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de valider les conclusions de la chambre de recours relatives aux éléments distinctifs et dominants des marques en conflit.

 Sur les similitudes visuelle, phonétique et conceptuelle des signes en conflit

43      La chambre de recours a considéré que les signes en conflit présentaient un faible degré de similitude sur les plans visuel et phonétique. Elle a également relevé, d’une part, que la comparaison conceptuelle n’était pas possible à l’égard des parties hispanophone, francophone et germanophone du public pertinent, pour lesquelles les signes en conflit ne véhiculaient aucun concept, et, d’autre part, que ces signes n’étaient pas similaires pour les parties néerlandophone et anglophone dudit public, pour lesquelles l’élément verbal « topper » des marques antérieures véhiculait un concept, à la différence de la marque demandée qui n’en véhiculait aucun.

44      La requérante conteste les appréciations de la chambre de recours en faisant valoir que, en l’espèce, le fait que le public pertinent puisse porter davantage attention à l’élément « we », compte tenu de sa position au début du signe demandé, est neutralisé par les circonstances suivantes. Premièrement, l’élément « we » est privé en soi de caractère distinctif, deuxièmement, l’élément « toper » est composé de plus de lettres que l’élément « we » et, troisièmement, le fait que l’élément « we » soit un pronom ou que, tout au moins, il soit identifié comme tel par le public pertinent implique, conformément aux règles de la langue anglaise, que, pour avoir un sens, il doit être associé à un autre terme faisant fonction de verbe, comme cela est le cas ici de l’élément « toper ».

45      La requérante invoque également la jurisprudence du Tribunal et la pratique décisionnelle des instances de l’EUIPO en vertu desquelles le pronom personnel « we » et d’autres pronoms ne posséderaient pas de caractère distinctif et n’auraient pas d’impact sur la comparaison des signes en cause.

46      Toutefois, ainsi qu’il a déjà été noté, les lettres « we » au début du signe demandé ne sont pas perçues séparément du reste du signe en tant que pronom personnel de la langue anglaise et ne constituent, dès lors, pas un élément dépourvu de caractère distinctif ainsi que le soutient la requérante. En revanche, elles font partie du signe demandé, qui possède un caractère distinctif normal, ainsi que la chambre de recours l’a constaté à juste titre. Dans la mesure où ces deux lettres ne sont pas perçues comme un pronom personnel, rien ne suggère que, du point de vue sémantique, elles doivent être suivies d’un verbe – en l’occurrence l’élément « toper » – ainsi que le soutient la requérante.

47      Il s’avère ainsi que la partie « we » du signe demandé, bien que plus courte que la partie « toper », distingue clairement ce signe des marques antérieures. Comme l’EUIPO le note à juste titre, étant donné que le consommateur ne percevra pas la partie « toper » du signe demandé de manière isolée, le fait que cette partie présente une certaine ressemblance avec l’élément verbal « topper » des marques antérieures n’est pas suffisant pour contrebalancer la différence caractérisant le début des signes en conflit.

48      Par ailleurs, la jurisprudence et la pratique décisionnelle de l’EUIPO, invoquées par la requérante (voir point 45 ci-dessus), ne sont pas pertinentes pour trancher le litige en l’espèce, dans la mesure où elles concernent des affaires dans lesquelles il ne faisait pas de doute et il n’était pas contesté que les marques en cause comprenaient des pronoms personnels ou d’autres pronoms. Or, tel n’est pas le cas en l’espèce, où les lettres « we » du signe demandé ne sont pas perçues comme le pronom personnel « we » en anglais.

49      Dans ces conditions, il convient de relever que la requérante n’est pas fondée à remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours relative à la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit.

 Sur le risque de confusion

50      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, VENADO avec cadre e.a., T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74).

51      Il convient de rappeler que la chambre de recours a constaté, au point 61 de la décision attaquée, que les produits en cause étaient identiques et qu’ils s’adressaient au grand public dont le niveau d’attention est moyen. Elle a également constaté que le degré de caractère distinctif des marques antérieures pour les produits en cause était normal et que les signes en conflit présentaient un faible degré de similitude sur les plans visuel et phonétique, tandis que la comparaison conceptuelle n’influençait pas la similitude sauf pour les parties néerlandophone et anglophone du public pertinent pour lesquelles les signes n’étaient pas similaires.

52      Par ailleurs, la chambre de recours a considéré, au point 63 de la décision attaquée, que les différences visuelles et phonétiques des signes en conflit étaient clairement perceptibles pour le public pertinent, notamment celles résultant de la présence des lettres « we » au début du signe demandé.

53      Au vu de l’ensemble des considérations présentées ci-dessus, la chambre de recours a conclu, au point 64 de la décision attaquée, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, à l’absence d’un tel risque pour le public pertinent.

54      À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’argumentation de la requérante portant sur la comparaison des signes en conflit a été rejetée. Par ailleurs, la requérante n’a développé aucune argumentation spécifique visant à contester l’appréciation globale du risque de confusion effectuée par la chambre de recours.

55      Dans ces circonstances, il convient de rejeter le moyen unique invoqué par la requérante. Le recours doit, dès lors, être rejeté.

 Sur les dépens

56      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

57      Bien que la requérante ait succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens qu’en cas de convocation à une audience. En l’absence d’organisation d’une audience, il convient de décider que chaque partie supportera ses propres dépens exposés au cours de la procédure devant le Tribunal.

58      Par ailleurs, aux termes de l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure, seuls les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme dépens récupérables. Dès lors, ainsi que le fait valoir l’EUIPO, la demande de la requérante concernant les dépens afférents à la procédure d’opposition, qui ne constituent pas des dépens récupérables, est irrecevable. S’agissant des dépens relatifs à la procédure devant la chambre de recours, dès lors que le présent arrêt rejette le recours dirigé contre la décision attaquée, c’est le dispositif de celle-ci qui continue à régler les dépens en cause [voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2021, Yongkang Kugooo Technology/EUIPO – Ford Motor Company (kugoo), T‑324/20, non publié, EU:T:2021:280, point 89].

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Topper Argentina, SA et l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supporteront leurs propres dépens.

Kowalik-Bańczyk

Buttigieg

Ricziová

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 février 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’espagnol.