Language of document : ECLI:EU:T:2021:818

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

24 novembre 2021 (*) (1)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises à l’encontre de la Syrie – Gel des fonds – Erreurs d’appréciation – Proportionnalité – Droit de propriété – Droit d’exercer une activité économique – Détournement de pouvoir – Obligation de motivation – Droits de la défense – Droit à un procès équitable »

Dans l’affaire T‑256/19,

Bashar Assi, demeurant à Damas (Syrie), représenté par Me L. Cloquet, avocat,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme S. Kyriakopoulou et M. V. Piessevaux, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision d’exécution (PESC) 2019/87 du Conseil, du 21 janvier 2019, mettant en œuvre la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2019, L 18 I, p. 13), du règlement d’exécution (UE) 2019/85 du Conseil, du 21 janvier 2019, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2019, L 18 I, p. 4), de la décision (PESC) 2019/806 du Conseil, du 17 mai 2019, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2019, L 132, p. 36), du règlement d’exécution (UE) 2019/798 du Conseil, du 17 mai 2019, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2019, L 132, p. 1), de la décision (PESC) 2020/719 du Conseil, du 28 mai 2020, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2020, L 168, p. 66), et du règlement d’exécution (UE) 2020/716 du Conseil, du 28 mai 2020, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2020, L 168, p. 1), en tant que ces actes visent le requérant,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. S. Gervasoni, président, L. Madise et J. Martín y Pérez de Nanclares (rapporteur), juges,

greffier : M. L. Ramette, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 22 octobre 2020,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige et faits postérieurs à l’introduction du recours

1        Le requérant, M. Bashar Assi, est décrit par le Conseil de l’Union européenne comme étant un homme d’affaires de nationalité syrienne ayant des intérêts et des activités dans de multiples secteurs de l’économie syrienne.

2        Condamnant fermement la répression violente des manifestations pacifiques en Syrie et lançant un appel aux autorités syriennes pour qu’elles s’abstiennent de recourir à la force, le Conseil a adopté, sur le fondement de l’article 29 TUE, la décision 2011/273/PESC, du 9 mai 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2011, L 121, p. 11). Compte tenu de la gravité de la situation, le Conseil a institué un embargo sur les armes, une interdiction des exportations de matériel susceptible d’être utilisé à des fins de répression interne, des restrictions à l’admission dans l’Union européenne ainsi que le gel des fonds et des ressources économiques de certaines personnes et entités responsables de la répression violente exercée contre la population civile syrienne.

3        Les noms des personnes responsables de la répression violente exercée contre la population civile en Syrie ainsi que ceux des personnes, physiques ou morales, et des entités qui leur sont liées sont mentionnés dans l’annexe de la décision 2011/273. En vertu de l’article 5, paragraphe 1, de cette décision, le Conseil, statuant sur proposition d’un État membre ou du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, peut modifier ladite annexe. Le nom du requérant n’y figurait pas lors de l’adoption de ladite décision.

4        Étant donné que certaines des mesures restrictives prises à l’encontre de la République arabe syrienne entrent dans le champ d’application du traité FUE, le Conseil a adopté, sur le fondement de l’article 215, paragraphe 2, TFUE, le règlement (UE) no 442/2011, du 9 mai 2011, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2011, L 121, p. 1). La teneur de ce règlement est, pour l’essentiel, identique à celle de la décision 2011/273, mais il prévoit des possibilités de déblocage des fonds gelés. La liste des personnes, des entités et des organismes reconnus comme étant soit responsables de la répression en cause, soit associés auxdits responsables, figurant à l’annexe II dudit règlement, est identique à celle figurant à l’annexe de la décision 2011/273. En vertu de l’article 14, paragraphes 1 et 4, du règlement no 442/2011, lorsque le Conseil décide d’appliquer à une personne, physique ou morale, à une entité ou à un organisme les mesures restrictives visées, il modifie l’annexe II en conséquence et, par ailleurs, examine la liste qui y figure à intervalles réguliers et au moins tous les douze mois.

5        Par la décision 2011/782/PESC, du 1er décembre 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/273 (JO 2011, L 319, p. 56), le Conseil a estimé, compte tenu de la gravité de la situation en Syrie, qu’il était nécessaire d’instituer des mesures restrictives supplémentaires. Par souci de clarté, les mesures imposées par la décision 2011/273 et les mesures supplémentaires ont été regroupées dans un instrument juridique unique. La décision 2011/782 prévoit, à son article 18, des restrictions en matière d’admission sur le territoire de l’Union des personnes dont la liste figure à l’annexe I et, à son article 19, le gel des fonds et des ressources économiques des personnes et des entités dont le nom figure aux annexes I et II.

6        Le règlement no 442/2011 a été remplacé par le règlement (UE) no 36/2012 du Conseil, du 18 janvier 2012, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2012, L 16, p. 1).

7        La décision 2011/782 a été remplacée par la décision 2012/739/PESC du Conseil, du 29 novembre 2012, concernant des mesures restrictives à l'encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/782 (JO 2012, L 330, p. 21), elle-même remplacée par la décision 2013/255/PESC du Conseil, du 31 mai 2013, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2013, L 147, p. 14).

8        Le 12 octobre 2015, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2015/1836, modifiant la décision 2013/255 (JO 2015, L 266, p. 75). Le même jour, il a adopté le règlement (UE) 2015/1828, modifiant le règlement no 36/2012 (JO 2015, L 266, p. 1).

9        Aux termes du considérant 6 de la décision 2015/1836, « [l]e Conseil a estimé que, en raison du contrôle étroit exercé sur l’économie par le régime syrien, un cercle restreint de femmes et d’hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie n’[était] en mesure de maintenir son statut que grâce à des liens étroits avec le régime et au soutien de celui-ci, ainsi qu’à l’influence exercée en son sein » et « [l]e Conseil estime qu’il devrait prévoir des mesures restrictives pour imposer des restrictions à l’admission des femmes et des hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie, identifiés par [lui] et dont la liste figure à l’annexe I, ainsi que pour geler tous les fonds et ressources économiques qui leur appartiennent, qui sont en leur possession, ou qui sont détenus ou contrôlés par eux, afin de les empêcher de fournir un soutien matériel ou financier au régime et, par l’influence qu’ils exercent, d’accroître la pression sur le régime lui-même afin qu’il modifie sa politique de répression ».

10      La rédaction des articles 27 et 28 de la décision 2013/255 a été modifiée par la décision 2015/1836. Ces articles prévoient désormais des restrictions à l’entrée ou au passage en transit sur le territoire des États membres ainsi que le gel des fonds des « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie », sauf « informations suffisantes indiquant [que ces personnes] ne sont pas, ou ne sont plus, lié[e]s au régime ou qu’[elles] n’exercent aucune influence sur celui-ci ou qu’[elles] ne sont pas associé[e]s à un risque réel de contournement ».

11      Le règlement 2015/1828 a modifié, notamment, la rédaction de l’article 15 du règlement no 36/2012 afin d’y intégrer les nouveaux critères d’inscription définis par la décision 2015/1836 et introduits dans la décision 2013/255.

12      Par la décision d’exécution (PESC) 2019/87 du Conseil, du 21 janvier 2019, mettant en œuvre la décision 2013/255 (JO 2019, L 18 I, p. 13), et par le règlement d’exécution (UE) 2019/85 du Conseil, du 21 janvier 2019, mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2019, L 18 I, p. 4) (ci-après, dénommés ensemble, les « actes initiaux »), le nom du requérant a été inséré à la ligne 270 du tableau A des listes des noms des personnes, entités et organismes visés par les mesures restrictives qui figurent à l’annexe I de la décision 2013/255 et à l’annexe II du règlement no 36/2012 (ci-après, prises ensemble, les « listes en cause »), avec mention des motifs suivants :

« Homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ayant des intérêts et des activités dans de multiples secteurs de l’économie syrienne, y compris en tant que partenaire fondateur de la compagnie aérienne Fly Aman et président du conseil d’administration de “Aman [Dimashq]”, coentreprise active dans la construction de Marota City, un projet immobilier et commercial haut de gamme appuyé par le régime. Assi soutient le régime et en tire avantage de par sa fonction de président du conseil d’administration de “Aman [Dimashq]”. »

13      Le 22 janvier 2019, le Conseil a procédé à la publication au Journal officiel de l’Union européenne de l’avis à l’attention des personnes faisant l’objet des mesures restrictives prévues par la décision 2013/255 et par le règlement no 36/2012 (JO 2019, C 27, p. 3).

14      Par lettre du 20 février 2019, le représentant du requérant s’est opposé à l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause et a demandé au Conseil de lui communiquer les documents étayant ladite inscription.

15      Par lettre du 12 mars 2019, d’une part, le Conseil a indiqué au représentant du requérant que, en substance, ses observations n’étaient pas de nature à remettre en cause la décision d’inscrire le nom du requérant sur les listes en cause. D’autre part, le Conseil lui a communiqué le document portant la référence WK 50/2019 INIT, daté du 10 janvier 2019, comprenant les éléments de preuve venant au soutien des motifs de ladite inscription.

16      Le 17 mai 2019, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2019/806, modifiant la décision 2013/255 (JO 2019, L 132, p. 36), qui a prorogé l’application de cette dernière décision jusqu’au 1er juin 2020 ; le même jour, le Conseil a également adopté le règlement d’exécution (UE) 2019/798, mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2019, L 132, p. 1) (ci-après, dénommés ensemble, les « actes de maintien de 2019 »). Le nom du requérant a été maintenu à la ligne 270 du tableau A des listes en cause sur la base de motifs identiques à ceux figurant dans les actes initiaux (ci-après les « motifs de 2019 »).

17      Par lettre du 20 mai 2019, le Conseil a informé le représentant du requérant de l’adoption des actes de maintien de 2019 ainsi que de la possibilité de solliciter un réexamen de la décision de maintien de l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause avant le 28 février 2020.

18      Par lettre du 28 février 2020, le requérant, par l’intermédiaire de son représentant, s’est opposé au maintien de son nom sur les listes en cause.

19      Par lettres des 16 et 22 avril 2020, le Conseil a informé le requérant, tout d’abord, de son intention de maintenir son nom sur les listes en cause pour des motifs partiellement différents de ceux figurant dans les motifs de 2019. Ensuite, le Conseil l’a invité à présenter ses observations sur la proposition de motifs d’inscription avant le 4 mai 2020. Enfin, le Conseil lui a communiqué, tout d’abord, le document portant la référence WK 3599/2020 INIT, du 6 avril 2020, puis le document portant la référence WK 3599/2020 REV 1, du 20 avril 2020, incluant la traduction en français des éléments de preuve rédigés en arabe, comprenant les éléments de preuve venant au soutien de la proposition des motifs d’inscription partiellement modifiés par rapport à ceux des actes de maintien de 2019.

20      Par lettre du 4 mai 2020, le requérant a contesté la proposition de motifs d’inscription sur laquelle le Conseil entendait se fonder ainsi que la fiabilité et l’exactitude du document WK 3599/2020 REV 1.

21      Le 28 mai 2020, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2020/719, modifiant la décision 2013/255 (JO 2020, L 168, p. 66), qui a prorogé l’application de cette dernière décision jusqu’au 1er juin 2021, et le règlement d’exécution (UE) 2020/716, mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2020, L 168, p. 1) (ci-après, dénommés ensemble, les « actes de maintien de 2020 »). Le nom du requérant a été maintenu à la ligne 270 du tableau A des listes en cause, sous des motifs partiellement différents de ceux mentionnés dans les actes de maintien de 2019 (ci-après les « motifs de 2020 »). Le Conseil a justifié l’adoption des mesures restrictives à son égard par la mention des motifs suivants :

« Homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ayant des intérêts et des activités dans de multiples secteurs de l’économie syrienne, y compris en tant que partenaire fondateur de la compagnie aérienne Fly Aman et, jusqu’en mai 2019, président du conseil d’administration de “Aman [Dimashq]”, coentreprise active dans la construction de Marota City, un projet immobilier et commercial haut de gamme appuyé par le régime syrien. Du fait de ses activités commerciales, Assi tire avantage du régime et le soutient. Le [30 janvier 2020], il a fondé la société “Aman Facilities” avec Samer Foz et pour le compte de ce dernier. »

22      Par lettre du 2 juin 2020, le Conseil a informé le représentant du requérant de l’adoption des actes de maintien de 2020 ainsi que de la possibilité de solliciter un réexamen desdits actes, avant le 1er mars 2021. Le Conseil a également informé le représentant du requérant que, en substance, les observations transmises dans ses lettres du 28 février et du 4 mai 2020 n’étaient pas de nature à remettre en cause la décision de maintenir le nom du requérant sur les listes en cause.

 Procédure et conclusions des parties

23      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 15 avril 2019, le requérant a introduit le présent recours tendant à l’annulation des actes initiaux, en tant que ces actes le concernent.

24      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 30 juillet 2019, le requérant a, sur le fondement de l’article 86 du règlement de procédure du Tribunal, adapté la requête, de sorte que celle-ci tend également à l’annulation des actes de maintien de 2019, en tant que ces actes le concernent. Le requérant a également réitéré les chefs de conclusions qui figuraient dans la requête.

25      Le 8 août 2019, le Conseil a déposé au greffe du Tribunal le mémoire en défense et les observations sur le premier mémoire en adaptation.

26      La réplique a été déposée le 1er octobre 2019.

27      Par décision du 17 octobre 2019, le président du Tribunal a, en application de l’article 27, paragraphe 3, du règlement de procédure, réattribué l’affaire à un nouveau juge rapporteur, affecté à la quatrième chambre.

28      La duplique a été déposée le 8 janvier 2020.

29      La phase écrite de la procédure a été close le 8 janvier 2020.

30      Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89, paragraphe 3, sous a), du règlement de procédure, le Tribunal a, le 22 juillet 2020, demandé au Conseil de répondre à une série de questions. Le Conseil a répondu aux questions dans le délai imparti.

31      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 13 août 2020, le requérant a, sur le fondement de l’article 86 du règlement de procédure, adapté une seconde fois la requête, de sorte que celle-ci tend également à l’annulation des actes de maintien de 2020, en tant que ces actes le concernent. Le requérant a également réitéré les chefs de conclusions qui figuraient dans la requête ainsi que dans le premier mémoire en adaptation et a présenté de nouveaux arguments.

32      Le 2 octobre 2020, le Conseil a présenté ses observations sur le second mémoire en adaptation.

33      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal au cours de l’audience qui s’est déroulée le 22 octobre 2020.

34      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les actes initiaux, les actes de maintien de 2019 et les actes de maintien de 2020 (ci-après, dénommés ensemble, les « actes attaqués ») en tant qu’ils le concernent ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

35      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens ;

–        à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où le Tribunal annulerait les actes attaqués en tant qu’ils concernent le requérant, ordonner le maintien des effets de la décision d’exécution 2019/87 ainsi que des décisions 2019/806 et 2020/719 en tant que celles-ci concernent le requérant, jusqu’à la prise d’effet de l’annulation des règlements d’exécution 2019/85, 2019/798 et 2020/716 en tant qu’ils concernent le requérant.

 En droit

36      Au soutien de son recours, le requérant invoque six moyens, tirés, le premier, d’erreurs d’appréciation, le deuxième, d’une violation du principe de proportionnalité, le troisième, d’une violation du droit de propriété et de la liberté d’exercer une activité économique, le quatrième, d’un « abus de pouvoir », le cinquième, d’une violation de l’obligation de motivation et, enfin, le sixième, d’une violation des droits de la défense et du droit à un procès équitable.

37      Il convient d’examiner, tout d’abord, le cinquième moyen, puis le sixième moyen, avant d’examiner le premier moyen, le quatrième moyen et, enfin, les deuxième et troisième moyens pris ensemble.

 Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

38      Le requérant soutient que la motivation fournie par le Conseil ne satisfait pas à l’obligation qui incombe aux institutions de l’Union en vertu de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE. Plus précisément, le requérant fait valoir que la motivation retenue dans les actes attaqués ne lui permet pas de déterminer quelles seraient les transactions litigieuses. En outre, il ajoute que le Conseil n’a pas examiné avec soin la motivation adoptée et que celle-ci est purement formelle, n’ayant pas fait l’objet d’une réflexion de la part du Conseil.

39      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

40      Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver un acte faisant grief, qui constitue le corollaire du principe du respect des droits de la défense, a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si l’acte est bien fondé ou s’il est éventuellement entaché d’un vice permettant d’en contester la validité devant le juge de l’Union et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de cet acte (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 60 et jurisprudence citée).

41      Il convient également de rappeler que la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 61 et jurisprudence citée).

42      La motivation d’un acte du Conseil imposant une mesure de gel de fonds doit permettre que soient identifiées les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles celui-ci considère, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire d’appréciation, que l’intéressé doit faire l’objet d’une telle mesure (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 63 et jurisprudence citée).

43      Cependant, l’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires peuvent avoir à recevoir des explications (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 64 et jurisprudence citée).

44      Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 65 et jurisprudence citée).

45      En particulier, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 66 et jurisprudence citée).

46      Enfin, il y a lieu de rappeler que l’obligation de motiver un acte constitue une forme substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. En effet, la motivation d’un acte consiste à exprimer formellement les motifs sur lesquels repose cet acte. Si ces motifs sont entachés d’erreurs, celles-ci entachent la légalité au fond dudit acte, mais non la motivation de celui-ci, qui peut être suffisante tout en exprimant des motifs erronés (voir arrêt du 5 novembre 2014, Mayaleh/Conseil, T‑307/12 et T‑408/13, EU:T:2014:926, point 96 et jurisprudence citée).

47      En l’espèce, en premier lieu, il convient de relever que l’argument du requérant selon lequel le Conseil n’a pas examiné avec soin la motivation adoptée vise, en réalité, à contester les éléments factuels qui ont été retenus par le Conseil. Dès lors que cet argument ne tend pas à remettre spécifiquement en cause le caractère suffisant de la motivation des actes attaqués, mais plutôt le statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie du requérant et l’existence de liens entre le requérant et le régime syrien, il doit être examiné dans le cadre du premier moyen, tiré d’erreurs d’appréciation.

48      En second lieu, en ce qui concerne les raisons pour lesquelles des mesures restrictives visant le requérant ont été adoptées et maintenues, il convient de relever que les motifs d’inscription du nom du requérant sont restés inchangés entre l’adoption des actes initiaux et celle des actes de maintien de 2019. En revanche, les motifs d’inscription du nom du requérant ont été partiellement modifiés lors de l’adoption des actes de maintien de 2020. Ainsi, s’agissant des actes initiaux et des actes de maintien de 2019, le Conseil a motivé l’inscription de son nom sur les listes en cause de la manière suivante :

« Homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ayant des intérêts et des activités dans de multiples secteurs de l’économie syrienne, y compris en tant que partenaire fondateur de la compagnie aérienne Fly Aman et président du conseil d’administration de “Aman [Dimashq]”, coentreprise active dans la construction de Marota City, un projet immobilier et commercial haut de gamme appuyé par le régime. Assi soutient le régime et en tire avantage de par sa fonction de président du conseil d’administration de “Aman [Dimasqh]”. »

49      Par la suite, dans les actes de maintien de 2020, le Conseil a motivé l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause de la manière suivante :

« Homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, ayant des intérêts et des activités dans de multiples secteurs de l’économie syrienne, y compris en tant que partenaire fondateur de la compagnie aérienne Fly Aman et, jusqu’en mai 2019, président du conseil d’administration de “Aman [Dimashq]”, coentreprise active dans la construction de Marota City, un projet immobilier et commercial haut de gamme appuyé par le régime syrien. Du fait de ses activités commerciales, Assi tire avantage du régime et le soutient. Le [30 janvier 2020], il a fondé la société “Aman Facilities” avec Samer Foz et pour le compte de ce dernier. »

50      Tout d’abord, il convient de rappeler que les critères généraux d’inscription énoncés à l’article 27, paragraphe 1, et à l’article 28, paragraphe 1, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, repris, en ce qui concerne le gel des fonds, à l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828, prévoient que les personnes et les entités bénéficiant des politiques menées par le régime syrien ou soutenant celui-ci font l’objet de mesures restrictives. De même, l’article 27, paragraphe 2, sous a), et paragraphe 3, et l’article 28, paragraphe 2, sous a), et paragraphe 3, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, repris, en ce qui concerne le gel des fonds, à l’article 15, paragraphe 1 bis, sous a), et paragraphe 1 ter, du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828, disposent que la catégorie des « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie » fait l’objet de mesures restrictives, sauf s’il existe des informations suffisantes indiquant qu’ils ne sont pas, ou ne sont plus, liés au régime ou qu’ils n’exercent aucune influence sur celui-ci ou qu’ils ne sont pas associés à un risque réel de contournement.

51      Il y a lieu de déduire des motifs d’inscription du nom du requérant sur les listes en cause, mentionnés aux points 12, 21, 48 et 49 ci-dessus, que ce dernier a vu son nom être inscrit et maintenu sur les listes en cause en raison, premièrement, de son statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie et, deuxièmement, de son lien avec le régime syrien. Autrement dit, l’inscription du nom du requérant est fondée, d’une part, sur le critère défini au paragraphe 2, sous a), de l’article 27 et de l’article 28 de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, et au paragraphe 1 bis, sous a), de l’article 15 du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828 (critère de l’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie) et, d’autre part, sur le critère défini au paragraphe 1 de l’article 27 et de l’article 28 de ladite décision et au paragraphe 1, sous a), de l’article 15 dudit règlement (critère de l’association avec le régime).

52      Ensuite, il convient de constater que les raisons, spécifiques et concrètes, ayant conduit le Conseil à procéder à l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause et à l’y maintenir sont indiquées de manière suffisamment claire pour permettre au requérant de les comprendre. En effet, premièrement, les motifs de 2019 portent sur des faits clairs concernant le requérant, à savoir ses intérêts et activités dans l’économie syrienne, en ce compris, d’une part, sa qualité de partenaire fondateur dans la compagnie Fly Aman et, d’autre part, sa qualité de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq. Deuxièmement, les motifs de 2019 se réfèrent, de manière claire, au soutien que le requérant apporte au régime syrien et à l’avantage qu’il tire dudit régime en raison de sa fonction de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq, société qui participe à la construction du projet Marota City, appuyé par le régime syrien. Troisièmement, les motifs de 2019 mentionnent que le requérant est un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie.

53      Les motifs de 2020 font référence à des faits mentionnés de manière claire et contiennent trois modifications substantielles par rapport aux motifs de 2019. Premièrement, les motifs de 2020 précisent que, jusqu’en mai 2019, le requérant a occupé la fonction de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq. Deuxièmement, ils évoquent de manière claire le fait que le requérant a fondé, avec M. Samer Foz et pour le compte de ce dernier, la société Aman Facilities, le 30 janvier 2020. Troisièmement, il ressort des motifs de 2020 que le requérant apporte un soutien au régime syrien et en retire un avantage du fait de ses activités commerciales. Si ce dernier élément est moins précis en comparaison des autres faits évoqués dans ces motifs, une lecture d’ensemble de ces derniers permet de comprendre, sans difficulté, que le Conseil fait référence aux activités du requérant telles qu’elles sont mentionnées dans la première phrase des motifs de 2020. Le Conseil a confirmé cette interprétation lors de l’audience.

54      De surcroît, les moyens et les arguments soulevés par le requérant dans ses écritures indiquent, d’une part, qu’il a été mis en mesure de connaître les justifications des mesures prises à son égard afin de pouvoir les contester utilement devant le juge de l’Union et, d’autre part, que le contexte dans lequel s’inscrivent ces mesures était connu de lui.

55      Enfin, le fait que le Conseil n’ait pas exposé de manière détaillée les transactions litigieuses qui seraient à l’origine de l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause ne saurait conduire à constater une violation de l’obligation de motivation qui lui incombe, dès lors que, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 44 et 45 ci-dessus, le Conseil n’est pas tenu de spécifier tous les éléments de fait et de droit pertinents et que le requérant a été mis en mesure de comprendre la portée des mesures prises à son égard.

56      Il convient d’en conclure que la motivation des actes attaqués est compréhensible et suffisamment précise pour permettre au requérant de connaître les raisons ayant conduit le Conseil à considérer que l’inscription et le maintien de son nom sur les listes en cause étaient justifiés et d’en contester la légalité devant le juge de l’Union et pour permettre à ce dernier d’exercer son contrôle.

57      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le cinquième moyen.

 Sur le sixième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense et du droit à un procès équitable

58      Le requérant soutient, en substance, que les actes attaqués violent ses droits de la défense et son droit à un procès équitable, tels que prévus à l’article 48, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») et à l’article 6, paragraphe 3, de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, dans la mesure où le Conseil ne l’a pas entendu avant l’adoption desdits actes.

59      À cet égard, le requérant fait valoir qu’il n’a pas pu présenter ses observations en temps utile, c’est-à-dire avant l’adoption des actes attaqués. Selon lui, il n’existait aucune urgence, ni aucun risque qu’il compromette l’efficacité des actes attaqués en étant auditionné préalablement à leur adoption. En revanche, la possibilité d’être entendu a posteriori ne lui aurait pas permis d’éviter des pertes.

60      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

61      Il y a lieu de rappeler que le respect des droits de la défense comporte notamment le droit d’être entendu, qui est consacré à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 99 et jurisprudence citée).

62      L’article 52, paragraphe 1, de la Charte admet toutefois des limitations à l’exercice des droits consacrés par celle-ci, pour autant que la limitation concernée respecte le contenu essentiel du droit fondamental en cause et que, dans le respect du principe de proportionnalité, elle soit nécessaire et réponde effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 101 et jurisprudence citée).

63      Enfin, l’existence d’une violation des droits de la défense doit être appréciée en fonction des circonstances spécifiques de chaque cas d’espèce, notamment de la nature de l’acte en cause, du contexte de son adoption et des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 102 et jurisprudence citée).

64      C’est à la lumière de cette jurisprudence qu’il convient d’analyser le sixième moyen.

65      Il convient de rappeler que le juge de l’Union distingue, d’une part, l’inscription initiale du nom d’une personne sur les listes imposant des mesures restrictives et, d’autre part, le maintien du nom de cette personne sur lesdites listes (arrêt du 30 avril 2015, Al-Chihabi/Conseil, T‑593/11, EU:T:2015:249, point 40).

66      En premier lieu, en ce qui concerne les actes initiaux, inscrivant le nom du requérant sur les listes en cause, il ne saurait être requis des autorités de l’Union qu’elles communiquent les motifs desdites mesures préalablement à l’inscription initiale du nom d’une personne ou d’une entité sur les listes imposant des mesures restrictives (voir, en ce sens, arrêt du 21 janvier 2015, Makhlouf/Conseil, T‑509/11, non publié, EU:T:2015:33, point 34 et jurisprudence citée).

67      En effet, une telle mesure, afin de ne pas compromettre son efficacité, doit, par sa nature même, pouvoir bénéficier d’un effet de surprise et s’appliquer immédiatement. Dans un tel cas, il suffit, en principe, que l’institution procède à la communication des motifs à la personne ou à l’entité concernée et ouvre le droit à l’audition de celle-ci concomitamment avec ou immédiatement après l’adoption de la décision (arrêt du 21 décembre 2011, France/People’s Mojahedin Organization of Iran, C‑27/09 P, EU:C:2011:853, point 61).

68      En l’espèce, la communication des motifs de l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause a fait l’objet d’un avis publié au Journal officiel de l’Union européenne du 22 janvier 2019.

69      En outre, par lettre du 20 février 2019, le représentant du requérant, en substance, a demandé au Conseil de lui communiquer les documents visant à étayer l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause, ce que le Conseil a fait par lettre du 12 mars 2019.

70      Dès lors, il y a lieu de constater que, en l’espèce, le fait que le requérant n’a pas été entendu préalablement à l’inscription initiale de son nom sur les listes en cause constitue une limitation justifiée de ses droits de la défense au sens de la jurisprudence citée au point 62 ci-dessus.

71      Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’argument, non étayé, du requérant, tiré de ce qu’il n’existait aucune urgence ni aucun risque qu’il compromette l’efficacité des actes initiaux en étant auditionné préalablement à leur adoption, alors que la possibilité d’être entendu a posteriori ne lui aurait pas permis d’éviter des pertes.

72      En second lieu, s’agissant des actes de maintien de 2019 et des actes de maintien de 2020, il convient de rappeler que, dans le cas des actes par lesquels le nom d’une personne ou d’une entité figurant déjà dans les listes imposant des mesures restrictives est maintenu, un effet de surprise n’est plus nécessaire afin d’assurer l’efficacité desdites mesures, de sorte que l’adoption de tels actes doit, en principe, être précédée d’une communication des éléments retenus à charge ainsi que de l’opportunité conférée à la personne ou à l’entité concernée d’être entendue (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2011, France/People’s Mojahedin Organization of Iran, C‑27/09 P, EU:C:2011:853, point 62).

73      À cet égard, la Cour a souligné que l’élément de protection qu’offraient l’exigence de communication des éléments à charge et le droit de présenter des observations avant l’adoption d’actes qui maintiennent le nom d’une personne ou d’une entité sur une liste de personnes ou d’entités visées par des mesures restrictives était fondamental et essentiel aux droits de la défense. Cela est d’autant plus vrai que les mesures restrictives en question ont une incidence importante sur les droits et les libertés des personnes et des groupes visés (arrêt du 21 décembre 2011, France/People’s Mojahedin Organization of Iran, C‑27/09 P, EU:C:2011:853, point 64).

74      Toutefois, lorsque le maintien du nom de la personne ou de l’entité concernée sur une liste de personnes ou d’entités visées par des mesures restrictives est fondé sur les mêmes motifs que ceux qui ont justifié l’adoption de l’acte initial sans que de nouveaux éléments aient été retenus à son égard, le Conseil n’est pas tenu, pour respecter son droit d’être entendu, de lui communiquer à nouveau les éléments retenus à charge (voir, en ce sens, arrêt du 7 avril 2016, Central Bank of Iran/Conseil, C‑266/15 P, EU:C:2016:208, points 32 et 33 et jurisprudence citée). La communication des éléments à charge s’impose, en revanche, lorsqu’il existe des éléments nouveaux par lesquels le Conseil réactualise les informations concernant la situation personnelle de la personne ou de l’entité concernée ou la situation politique et sécuritaire du pays à l’encontre duquel le régime de mesures restrictives a été adopté (voir, en ce sens, arrêt du 12 février 2020, Kande Mupompa/Conseil, T‑170/18, EU:T:2020:60, point 72).

75      En l’espèce, il convient de rappeler que, ainsi qu’il a été signalé au point 16 ci-dessus, d’une part, les actes de maintien de 2019 n’ont pas modifié les motifs d’inscription du nom du requérant figurant aux annexes des actes initiaux. En outre, le Conseil a, par lettre du 12 mars 2019, c’est-à-dire avant l’adoption des actes susmentionnés, communiqué au représentant du requérant le document WK 50/2019 INIT, comprenant les éléments de preuve venant au soutien des motifs de l’inscription initiale de son nom sur les listes en cause.

76      De plus, le Conseil, dans la réponse aux mesures d’organisation de la procédure, a précisé qu’il n’avait pas recueilli de nouveaux éléments de preuve concernant le requérant afin d’étayer les motifs d’inscription du nom de ce dernier sur les listes en cause entre la date d’adoption des actes initiaux et celle des actes de maintien de 2019.

77      Dès lors, il ressort de ce qui précède que le Conseil n’a pas porté aux droits de la défense du requérant une atteinte qui justifierait l’annulation des actes de maintien de 2019 pour autant qu’ils le concernent.

78      D’autre part, il convient de rappeler, ainsi qu’il a été signalé au point 21 ci-dessus, que les actes de maintien de 2020 ont partiellement modifié les motifs d’inscription du nom du requérant figurant aux annexes des actes initiaux et des actes de maintien de 2019.

79      En l’espèce, il ressort du dossier que, par lettres des 16 et 22 avril 2020, le Conseil a informé le requérant, tout d’abord, de son intention de maintenir son nom sur les listes en cause sous des motifs partiellement différents et lui a communiqué la proposition des motifs d’inscription partiellement modifiés. En outre, le Conseil lui a communiqué le document WK 3599/2020 REV 1 qui comprend les éléments de preuve venant au soutien de ladite proposition de motifs. De plus, le Conseil a invité le requérant à présenter ses observations sur la proposition des motifs d’inscription partiellement modifiés avant le 4 mai 2020, ce que le requérant a fait. Enfin, par lettre du 2 juin 2020, le Conseil a informé le requérant de l’adoption des actes de maintien de 2020, maintenant son nom sur les listes en cause sous des motifs partiellement différents par rapport aux motifs de 2019.

80      Dès lors, concernant les actes de maintien de 2020, il ressort de ce qui précède que le Conseil, en communiquant au requérant, préalablement à l’adoption des actes précités, d’une part, la proposition de motifs partiellement modifiés ainsi que, d’autre part, le document comprenant les éléments de preuve venant au soutien de ladite proposition de motifs et en l’invitant à présenter des observations tant sur la proposition de motifs partiellement modifiés que sur les éléments de preuve, a respecté les droits de la défense de l’intéressé.

81      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le sixième moyen.

 Sur le premier moyen, tiré d’erreurs d’appréciation

82      En premier lieu, le requérant conteste être un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie. À cet égard, il conteste les éléments retenus par le Conseil pour inscrire son nom sur les listes en cause. En particulier, le requérant fait valoir qu’il est un simple salarié, employé par Aman Holding JSC. Il reconnaît que, dans le cadre de ses fonctions, il a été chargé de représenter Aman Holding au conseil d’administration d’Aman Damascus JSC (ci-après « Aman Dimashq ») et a rempli la fonction de président du conseil d’administration de cette dernière société. Cependant, il soutient qu’il a démissionné de son poste au sein d’Aman Holding et que, par conséquent, dans le cadre de ses fonctions, il ne représente plus cette société en tant que membre du conseil d’administration d’Aman Dimashq. À ce titre, il fait valoir qu’Aman Dimashq n’est pas une coentreprise bénéficiant du soutien du régime et que, dans le cadre du projet Marota City, il n’a pas exploité des terrains expropriés appartenant à des personnes déplacées par le conflit en Syrie, ce qui les aurait empêchées de regagner leur foyer. Dans la réplique, il fait valoir que les terrains sur lesquels le projet Marota City va être développé n’ont pas été le théâtre d’affrontements entre les forces de l’opposition et le régime syrien et que les quartiers de Damas (Syrie) situés dans cette zone n’ont jamais été détruits pendant le conflit armé qui a eu cours en Syrie. Enfin, il dément détenir une quelconque participation dans la coentreprise Aman Dimashq. En outre, le requérant conteste, d’une part, posséder une participation dans Fly Aman et, d’autre part, être un partenaire fondateur de cette société puisque, avant que la constitution de Fly Aman ne produise ses effets, il a été remplacé en tant que fondateur et actionnaire.

83      En deuxième lieu, concernant les actes de maintien de 2020, le requérant conteste le nouveau motif d’inscription de son nom et fait valoir, à cet égard, que sa qualité au sein d’Aman Facilities OPLLC n’est pas de nature à lui conférer la qualité d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie, puisque cette société dispose d’un capital faible et opère dans un domaine d’activité limité. En outre, Aman Facilities ne constituerait pas une succursale ou une filiale d’Aman Holding et ne serait pas soutenue par cette dernière ou par M. Foz.

84      En troisième lieu, le requérant conteste avoir un lien avec le régime syrien.

85      En quatrième lieu, le requérant soutient qu’aucune des pièces du document WK 50/2019 INIT ne fait référence à son lien allégué avec le régime syrien, mais que ces pièces concernent principalement M. Foz.

86      Le Conseil conteste les arguments du requérant.

 Considérations liminaires

87      Il convient de rappeler que l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la Charte exige notamment que le juge de l’Union s’assure que la décision par laquelle des mesures restrictives ont été adoptées ou maintenues, qui revêt une portée individuelle pour la personne ou l’entité concernée, repose sur une base factuelle suffisamment solide. Cela implique une vérification des faits allégués dans l’exposé des motifs qui sous-tend ladite décision, de sorte que le contrôle juridictionnel ne soit pas limité à l’appréciation de la vraisemblance abstraite des motifs invoqués, mais porte sur la question de savoir si ces motifs, ou, à tout le moins, l’un d’eux considéré comme suffisant en soi pour soutenir cette même décision, sont étayés (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 119).

88      Il incombe au juge de l’Union de procéder à cet examen en demandant, le cas échéant, à l’autorité compétente de l’Union de produire des informations ou des éléments de preuve, confidentiels ou non, pertinents aux fins d’un tel examen (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 120 et jurisprudence citée).

89      C’est en effet à l’autorité compétente de l’Union qu’il appartient, en cas de contestation, d’établir le bien-fondé des motifs retenus à l’encontre de la personne ou de l’entité concernée, et non à ces dernières d’apporter la preuve négative de l’absence de bien-fondé desdits motifs (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 121).

90      À cette fin, il n’est pas requis que ladite autorité produise devant le juge de l’Union l’ensemble des informations et des éléments de preuve inhérents aux motifs allégués dans l’acte dont il est demandé l’annulation. Il importe toutefois que les informations ou les éléments produits étaient les motifs retenus à l’encontre de la personne ou de l’entité concernée (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 122).

91      Si l’autorité compétente de l’Union fournit des informations ou des éléments de preuve pertinents, le juge de l’Union doit vérifier l’exactitude matérielle des faits allégués au regard de ces informations ou éléments et apprécier la force probante de ces derniers en fonction des circonstances de l’espèce et à la lumière des éventuelles observations présentées, notamment, par la personne ou l’entité concernée à leur sujet (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 124).

92      Conformément à la jurisprudence de la Cour, l’appréciation du bien-fondé d’une inscription doit être effectuée en examinant les éléments de preuve non pas de manière isolée, mais dans le contexte dans lequel ils s’insèrent (voir, en ce sens, arrêts du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑630/13 P, EU:C:2015:247, point 51, et du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 50).

93      Enfin, dans le cadre de l’appréciation de la gravité de l’enjeu, qui fait partie du contrôle de la proportionnalité des mesures restrictives en cause, il peut être tenu compte du contexte dans lequel s’inscrivent ces mesures, du fait qu’il était urgent d’adopter de telles mesures ayant pour objet de faire pression sur le régime syrien afin qu’il arrête la répression violente dirigée contre la population et de la difficulté d’obtenir des preuves plus précises dans un État en situation de guerre civile doté d’un régime de nature autoritaire (arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 46).

94      Il convient de rappeler, ainsi qu’il ressort des points 50 et 51 ci-dessus, que l’inscription du nom du requérant est fondée, d’une part, sur le critère défini au paragraphe 2, sous a), de l’article 27 et de l’article 28 de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, et au paragraphe 1 bis, sous a), de l’article 15 du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828 (critère de l’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie) et, d’autre part, sur le critère défini au paragraphe 1 de l’article 27 et de l’article 28 de ladite décision et au paragraphe 1, sous a), de l’article 15 dudit règlement (critère de l’association avec le régime).

95      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner le premier moyen soulevé par le requérant et, tout d’abord, les arguments de ce dernier qui visent, en substance, à remettre en cause le premier motif d’inscription, à savoir celui selon lequel il est un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie.

 Sur les éléments de preuve soumis par le Conseil

96      Tout d’abord, pour justifier l’inscription et le maintien du nom du requérant sur les listes figurant aux annexes des actes initiaux et des actes de maintien de 2019, le Conseil a fourni le document WK 50/2019 INIT comportant des éléments d’information publiquement accessibles, à savoir des liens vers des sites Internet, des articles de presse et des captures d’écran provenant :

–        du site Internet « Aliqtisadi », consulté le 28 septembre 2018, qui est un site d’information du monde des affaires rédigé en arabe et indiquant que le requérant est le président du conseil d’administration d’Aman Dimashq ; selon cette page Internet, le requérant est un partenaire fondateur de Fly Aman ;

–        du site Internet « Damacham.sy » de la société Damascus Cham Holding, dont la page est datée du 5 septembre 2017 et a été consultée le 20 septembre 2018, selon laquelle la première assemblée générale d’Aman Dimashq s’est tenue le 7 octobre 2017, au siège de Damascus Cham Holding, qui se situe sur le site du projet Marota City ; selon ce site, le requérant a été nommé président du conseil d’administration d’Aman Dimashq et il est le représentant d’Aman Holding ; en outre, ce site Internet indique que le requérant dispose d’une solide expérience professionnelle et qu’il a occupé divers postes de direction dans le domaine de la gestion et du développement immobiliers ; de surcroît, le projet réalisé par Aman Dimashq est, au vu de son ampleur, l’un des plus importants et des plus grands du projet Marota City et la valeur de l’investissement est supérieure à 150 milliards de livres syriennes (SYP) ;

–        du site Internet syrien « 7al.net », contenant un article intitulé « Two employees of a businessman, Samer Foz, founded an airline » (Deux employés de l’homme d’affaires Samer Foz ont créé une compagnie aérienne), publié le 10 avril 2018, qui mentionne que le requérant et l’homme d’affaires M. Khaldoun Al Zoubi ont fondé une nouvelle compagnie aérienne, Fly Aman, à Damas ; selon cet article, le requérant et M. Al Zoubi sont employés par une société détenue par M. Foz ; cet article indique que le ministère du Commerce intérieur et de la Protection des consommateurs syrien a ratifié les statuts de Fly Aman dont 10 % des parts appartiennent au requérant ; en outre, Fly Aman fait des affaires dans les services d’information aux passagers et pour le fret, possède, achète, prête, affrète et investit dans les aéronefs, arrange des plans de vol et fournit des services de conseil, des services au sol et des services d’agence ; enfin, selon cet article, en Syrie, le secteur de l’aviation civile souffre de grandes difficultés au regard des opérations militaires s’y déroulant depuis plus de sept ans et ayant pour conséquence la cessation du trafic touristique et celle des services au sein de certains aéroports ;

–        du site Internet du journal d’information syrien Wall Street Journal qui, dans un article publié le 5 septembre 2017, intitulé « Out of Syria’s Chaos, a Tycoon Builds a Fortune » (Du chaos syrien, un magnat construit une fortune), donne des détails concernant la variété des affaires que dirige M. Foz, lequel est présenté comme ayant accumulé une fortune pendant la guerre qui a anéanti son pays ; en outre, l’article indique que M. Foz est resté proche du gouvernement syrien au cours de la guerre et que, plus tard, il a réalisé des affaires avec ce dernier ; enfin, l’article décrit les sociétés détenues par M. Foz, dont Aman Holding serait la société faîtière (umbrella company) ;

–        du site Internet « The Syria Report », lequel mentionne un premier article, publié le 17 avril 2018, contenant une liste de coentreprises créées par Damascus Cham Holding avec des investisseurs privés, dans laquelle apparaît Aman Dimashq, créée en septembre 2017 par, d’une part, M. Foz, à titre d’actionnaire individuel dans cette dernière par l’intermédiaire de sa société Aman Holding et, d’autre part, la société détenue par le gouvernorat de Damas, Damascus Cham Holding, afin de développer le projet Marota City ; il y est indiqué que M. Foz détient la majorité des parts de cette coentreprise et que Aman Dimashq est dotée d’un capital de 18,9 millions de dollars des États-Unis (USD) (environ 16,8 millions d’euros) ; la liste les projets développés par cette coentreprise est détaillée et il est fait mention du développement de trois gratte-ciel et de cinq bâtiments résidentiels, d’une valeur de 150 milliards de SYP (environ 312 millions d’USD, soit environ 278,1 millions d’euros) en termes de coûts d’investissement ; puis un second article, publié le 1er juin 2018, intitulé « Factsheet : Marota City, Syria’s Most Controversial Investment Project » (Résumé : Marota City, le projet d’investissement syrien le plus controversé), où il est indiqué que le projet de construction de la cité de luxe dénommé « Marota City » est un projet soutenu par le régime syrien dans le cadre du décret no 66/2012, ce dernier ayant permis l’expropriation et l’exploitation de terrains au statut socio-économique inférieur, dont le quartier de Mazzeh, dénommé Basateen Al-Razi, situé à Damas ; Marota City est le nouveau nom donné au quartier d’une superficie de 2,15 millions de mètres carrés ; cette zone est proche du centre-ville, des ambassades et des services de sécurité, ce qui la rend attractive aux yeux des promoteurs immobiliers ; cet article indique que la société de droit privé Damascus Cham Holding est détenue par le gouvernorat de Damas et a créé, avec M. Foz, en juillet 2017, la coentreprise Aman Dimashq, dotée d’un capital de 10 milliards de SYP (18,9 millions d’USD) ; cet article ajoute qu’Aman Holding détient la majorité des parts de cette coentreprise et nomme trois représentants au sein de son conseil d’administration ; en outre, il est indiqué que, en septembre 2017, Damascus Cham Holding a accordé à Aman Dimashq le droit de construire trois gratte-ciel devant compter jusqu’à 70 étages et cinq bâtiments résidentiels, d’une valeur de 312 millions d’USD ; enfin, selon cet article, M. Foz est devenu l’un des acteurs économiques les plus puissants et son influence sur les plus hautes sphères de l’élite syrienne résulte de ses liens étroits avec le président M. Bashar Al-Assad ;

–        du site Internet « Open Democracy », qui, dans un article publié le 5 septembre 2017 et intitulé « Militias and crony capitalism to hamper Syria reconstruction » (Les milices et les affairistes entravent la reconstruction de la Syrie), mentionne les bénéfices que le régime syrien tire du décret no 66/2012, notamment comme instrument d’investissement pour les projets de développement rapide et de grande ampleur bénéficiant aux alliés du régime qui permet en même temps d’opérer comme instrument punitif à l’encontre des populations opposées à ce régime ; selon cet article, le développement de projets résidentiels sera conduit par des holdings détenues par les gouvernorats ou les municipalités, mais la construction et l’organisation desdits projets seront attribuées à des entreprises du secteur privé détenues par des investisseurs liés au régime ; en outre, cet article mentionne que, en août 2017, Aman Holding, dirigée par M. Foz, qui a des liens étroits avec le régime syrien, annonce sa participation à la reconstruction du quartier Basateen Al-Razi, dans le quartier de Mazzeh à Damas, en partenariat avec le gouvernorat de Damas par l’intermédiaire de sa société Damascus Cham Holding ;

–        du site Internet « Syrian Law Journal », qui, sur une page du 14 mai 2018, révèle que le décret no 66/2012 a établi les conditions de délimitation des zones de Damas qui seraient dédiées au projet Marota City ; le décret no 19/2015 aurait, quant à lui, permis la création de sociétés privées par des entités publiques afin d’organiser et d’investir dans les biens appartenant aux divers gouvernorats ; selon cette source, le gouvernorat de Damas aurait ainsi pu créer, en 2016, Damascus Cham Holding dans l’objectif de développer le projet Marota City ; le gouvernorat de Damas détiendrait la totalité des parts de Damascus Cham Holding et le gouverneur de Damas serait le président de cette société ;

–        du site Internet du gouvernement syrien « 66.damascus.gov.sy », qui, sur une page datée du 18 septembre 2012, reproduit la partie du décret no 66/2012 identifiant les deux zones de Damas désignées afin d’y réaliser un projet de développement résidentiel et commercial ;

–        du site Internet « The Foundation for Strategic Research », qui, dans un article publié en avril 2018, énonce les circonstances ayant guidé l’adoption du décret no 66/2012 ; cette source mentionne que, selon les autorités syriennes, le décret no 66/2012 visait à améliorer les conditions de vie des habitants en remplaçant les habitations mal construites par des constructions plus modernes et confortables ; selon cet article, seules deux zones d’habitation de Damas, dont les habitants ont appuyé l’opposition, ont été désignées dans ce décret tandis que ledit décret a laissé intacts des quartiers de Damas où les habitants vivent dans des conditions similaires, mais où, à l’inverse, ils ont soutenu le régime syrien ; enfin, l’article indique que le décret va, d’une part, faciliter le développement rapide d’importants projets de construction favorisant l’enrichissement d’hommes et de femmes d’affaires proches du régime et, d’autre part, servir d’instrument punitif à l’encontre des franges de la population opposées au régime syrien ;

–        du site Internet « The Syrian Observer », qui, dans un article publié le 6 avril 2018, intitulé « Alliance Companies Monopolizes New Damascus Development Organizations » (L’alliance des sociétés monopolise les nouvelles organisations de développement de Damas), indique que des hommes et des femmes d’affaires proches du régime syrien investissent dans les nouveaux projets de reconstruction impulsés par ce dernier à Damas ainsi que dans la banlieue de Damas ; selon cette source, ces hommes et femmes d’affaires seraient choisis par le régime syrien en fonction de leur soumission, de leur loyauté et de leurs liens avec les marchés étrangers ;

–        du site Internet « Brookings Institution », qui a publié un rapport, daté du mois de juin 2018 et intitulé « Beyond Fragility : Syria and the challenges of reconstruction in fierce states » (Au-delà de la fragilité : la Syrie et les défis de la reconstruction dans les États violents), qui mentionne les actes adoptés par le régime syrien, dont le décret no 66/2012, afin de faire saisir des terrains et des biens, de punir les opposants, de récompenser les personnes proches du régime syrien et les gouverneurs, de réimposer son autorité sur le territoire, de renforcer le contrôle sur l’économie syrienne et d’« aménager » la démographie syrienne pour atteindre, selon les termes de M. Bashar Al-Assad, une « société plus saine et homogène » ; selon ce rapport, le régime syrien, se fondant sur une réglementation nouvelle et préexistante, a exproprié des quartiers de Damas connus pour être des zones favorables à l’opposition et des biens appartenant à des personnes déplacées et suspectées d’être en faveur de l’opposition pour en faire profiter certains hommes d’affaires ; enfin, selon cet article, le projet de construction de la cité de luxe « Marota City » est cité, dans ce rapport, comme l’exemple le plus saillant de cette politique.

97      Ensuite, pour justifier le maintien du nom du requérant sur les listes figurant aux annexes des actes de maintien de 2020, le Conseil a fourni, en plus du document WK 50/2019 INIT, le document WK 3599/2020 REV 1 comportant des éléments d’information publiquement accessibles, à savoir des liens vers des sites Internet, des articles de presse et des captures d’écran provenant :

–        du site Internet « Aliqtisadi », dont la page « who is who », consultée le 13 mars 2020, indique, sur une première page, que le requérant est le président du conseil d’administration d’Aman Dimashq depuis 2017 ; selon cette page, le requérant est un partenaire fondateur de Fly Aman ; enfin, ce site indique que le requérant est le directeur et propriétaire d’Aman Facilities ; sur une seconde page, consultée également le 13 mars 2020, ce site Internet mentionne qu’Aman Facilities, créée le 30 janvier 2020, est spécialisée dans le tourisme et les services hôteliers et appartient au requérant ; selon cette source, la création de la société uninominale à responsabilité limitée a été approuvée par le ministère du Commerce intérieur et de la Protection des consommateurs syrien ; enfin, selon le certificat d’enregistrement d’Aman Facilities, que ce site Internet affirme avoir pu consulter, les domaines d’activités de la société seraient les suivants : gestion des hôtels, des installations privées et des établissements dédiés au tourisme, aux services ou à 1’administration, activités de conseil en matière de tourisme et de services ;

–        du site Internet « Eqtsad News », dont l’article, intitulé « M. Bashar Assi, nouvel homme de main de M. Foz pour les investissements », a été publié le 1er février 2020 et décrit les liens entre M. Foz, homme d’affaires controversé, et le requérant, notamment la manière dont M. Foz utilise le nom du requérant pour créer de nouvelles sociétés ; selon cet article, avant l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause, ce dernier était inconnu du public, sauf en tant qu’avocat et homme actif occupant de nombreuses fonctions au sein des conseils d’administration de sociétés privées ; cet article indique que, par la suite, M. Foz en a fait un associé fondateur de Fly Aman, qui n’avait pas encore vu le jour ; en outre, selon cette source, M. Foz s’est ensuite mis à utiliser le requérant pour créer des sociétés en son nom, la dernière opération en date étant l’obtention d’une autorisation du ministère du Commerce intérieur et de la Protection des consommateurs syrien pour Aman Facilities ; l’article indique également que le nom de M. Foz n’apparaissait pas dans le dossier de demande d’autorisation ; enfin, selon ce site Internet, le requérant a été choisi par M. Foz pour assurer la présidence du conseil d’administration d’Aman Dimashq.

 Sur la pertinence des éléments de preuve produits par le Conseil

98      Au préalable, il importe de souligner que, lors de l’audience, le requérant a fait valoir, en substance, que le document portant la référence WK 3599/2020 INIT ne contenait pas une version traduite vers l’anglais des trois articles qu’il contient. À cet égard, il ressort des écritures que le Conseil a fourni, à la demande du requérant, une nouvelle version du document WK 3599/2020 INIT, à savoir le document WK 3599/2020 REV 1, lequel contient une traduction en français de ces articles, de sorte que l’argument du requérant est, en tout état de cause, inopérant.

99      Par conséquent, l’ensemble des éléments de preuve figurant dans le document WK 3599/2020 REV 1 est pertinent pour apprécier la légalité des actes attaqués.

 Sur la fiabilité des éléments de preuve produits par le Conseil

100    Le requérant conteste la fiabilité des éléments de preuve soumis par le Conseil dans le document WK 50/2019 INIT en faisant valoir que ce dernier n’est qu’une simple compilation de captures d’écran de sites Internet et d’articles de presse partiaux, dénués de toute valeur probante, sans indication de leurs sources.

101    Plus spécifiquement et premièrement, le requérant soutient, à l’égard des articles issus des sites Internet « 7al.net » et « Wall Street Journal », qu’il s’agit d’articles de presse qui, par leur nature même, ne sont pas mis à jour et contiennent des informations imprécises et fragmentées.

102    Deuxièmement, en ce qui concerne le site Internet « The Syrian Observer », le requérant relève, tout d’abord, qu’il s’agit d’une société syrienne de publication d’informations qui prétend être « indépendante sur les plans éditorial et politique ». Ensuite, le requérant signale que ce site Internet est consacré, principalement, à la traduction en anglais d’articles provenant de publications en Syrie sans que, pour autant, un travail de vérification du contenu de ces publications soit réalisé. Ce site précise d’ailleurs qu’il ne se rallierait pas aux points de vue exprimés dans les publications susmentionnées. En outre, selon ce site, la sélection d’articles serait opérée sur la base de deux paramètres, à savoir, d’une part, le sérieux de la publication et, d’autre part, la mesure dans laquelle l’article reflète les positions politiques des auteurs.

103    Troisièmement, s’agissant du site Internet « The Syria Report », le requérant signale, tout d’abord, que ce site Internet d’informations syrien s’organise autour d’une « vaste base d’informations, de données et de statistiques, incluant une base de données d’institutions syriennes ». Il s’agirait, principalement, d’un bulletin d’informations économiques. Ensuite, le requérant souligne que A est, d’une part, le fondateur et le rédacteur en chef du site Internet « The Syria Report » ainsi que, d’autre part, le co-fondateur du site Internet « The Syrian Observer ». Cette circonstance explique, selon le requérant, que les sites Internet « The Syria Report » et « The Syrian Observer » publient souvent les mêmes informations et opinions sous différentes formes et dans différentes publications. Ce faisant, ces sites Internet donnent l’impression que les informations publiées sont largement partagées par différents médias et peuvent donc être considérées comme objectives. Par ailleurs, le requérant émet des doutes sur l’intégrité de A, qui, selon lui, est, en sa qualité d’intervenant extérieur auprès du European Council on Foreign Relations (Conseil européen des relations internationales), amené à collaborer avec les institutions de l’Union, en ce compris le Conseil, sur des questions concernant la Syrie, notamment au vu du fait qu’il a publié des rapports portant sur l’économie de guerre syrienne et sur la décentralisation de cet État durant la guerre. Dans ce contexte, le requérant allègue, en substance, que le Conseil utilise ses liens avec A pour obtenir des articles appuyant la politique que celui-ci entend appliquer avant leur publication sur ces sites Internet, afin de servir par la suite de justification concernant des mesures restrictives amenées à être adoptées ou nouvellement adoptées. À l’appui de cette allégation, le requérant fournit une page extraite du site Internet « News Deeply », contenant une brève présentation de A et un article intitulé « Analyse : pas de fonds pour le projet de loi de reconstruction de la Syrie ». Enfin, le requérant souligne que le site Internet « The Syria Report » n’a pas respecté les règles professionnelles journalistiques, dans la mesure où il ne l’a jamais contacté afin de vérifier le contenu des informations publiées sur son site ou de solliciter son point de vue sur ces dernières.

104    Dans le cadre de la réponse aux mesures d’organisation de la procédure adoptées par le Tribunal, le Conseil soutient qu’il ne dispose pas d’autres informations concernant les sources d’informations sur lesquelles il s’est fondé que ce qui peut être déduit du document WK 50/2019 INIT. Ensuite, il reproduit des informations publiquement accessibles sur Internet concernant les sites Internet « The Syria Report », « The Foundation for Strategic Research », « The Syrian Observer », « Brookings Institution », « Open Democracy », « Wall Street Journal », « Syrian Law Journal » et « Aliqtisadi ».

105    Il convient de rappeler que, d’une part, dans le cadre de l’appréciation de la gravité de l’enjeu, qui fait partie du contrôle de la proportionnalité des mesures restrictives en cause, il peut être tenu compte du contexte dans lequel s’inscrivent ces mesures, du fait qu’il était urgent d’adopter de telles mesures ayant pour objet de faire pression sur le régime syrien afin qu’il arrête la répression violente dirigée contre la population et de la difficulté d’obtenir des preuves plus précises dans un État en situation de guerre civile doté d’un régime de nature autoritaire (arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 46).

106    D’autre part, conformément à une jurisprudence constante, l’activité de la Cour et du Tribunal est régie par le principe de libre appréciation des preuves et le seul critère pour apprécier la valeur des preuves produites réside dans leur crédibilité. En outre, pour apprécier la valeur probante d’un document, il faut vérifier la vraisemblance de l’information qui y est contenue et tenir compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration ainsi que de son destinataire, et se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable [voir, en ce sens, arrêts du 14 mars 2018, Kim e.a./Conseil et Commission, T‑533/15 et T‑264/16, EU:T:2018:138, point 224, et du 12 février 2020, Kande Mupompa/Conseil, T‑170/18, EU:T:2020:60, point 107 (non publié)].

107    En l’espèce, s’agissant de l’argument du requérant relatif au fait qu’il s’agirait principalement d’articles de presse manquant « cruellement de sources », il importe de relever que la situation de guerre en Syrie rend en pratique difficile, voire impossible, le recueil de témoignages de la part de personnes acceptant d’être identifiées et les difficultés d’investigation qui s’ensuivent et le danger auquel s’exposent ceux qui livrent des renseignements font obstacle à ce que des sources précises de comportements personnels de soutien au régime soient apportées (voir, en ce sens, arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 46, et conclusions de l’avocat général Bot dans les affaires Anbouba/Conseil, C‑605/13 P et C‑630/13 P, EU:C:2015:2, point 204).

108    En outre, le requérant ne précise pas en quoi les informations figurant dans les articles issus de sites Internet, notamment les sites « 7al.net » et « Wall Street Journal », seraient imprécises et fragmentées. En outre, il reste en défaut d’expliquer en quoi l’absence de mise à jour des articles dont il essaie de se prévaloir les priverait de tout caractère sensé et fiable à la date qu’ils comportent. En tout état de cause, il ne saurait être reproché à des articles de presse, dont la fonction est d’informer de l’existence d’une situation à un instant déterminé, de ne pas être mis à jour. En effet, si la situation évolue, elle peut faire l’objet d’un nouvel article de presse. Par conséquent, en l’absence d’explications plus détaillées de la part du requérant, l’absence de mise à jour de telles sources n’est pas un critère pertinent pour en apprécier le caractère sensé et fiable. Cet argument doit, partant, être écarté.

109    Par ailleurs, il convient de relever, tout d’abord, que les éléments de preuve figurant dans le document WK 50/2019 INIT et dont la force probante est contestée par le requérant émanent de sources d’informations numériques d’origines variées, non seulement locales, mais également étrangères. Ainsi, parmi les sources d’informations locales, il peut être mentionné « The Syria Report », la première source d’informations économiques, d’affaires et financières sur la Syrie, indépendante et ne se rattachant à aucune organisation religieuse, sociale ou politique ; « The Syrian Observer », un service d’informations en ligne qui, pour l’essentiel, collecte et traduit en anglais des contenus informatifs produits par la presse officielle syrienne, des groupes d’opposition au régime ou encore la société civile et qui est financé par des donateurs dont, notamment, la Fondation Konrad Adenauer et le Département fédéral des affaires étrangères suisse ; « Aliqtisadi », un des dix principaux sites Internet consacrés à la vie des affaires du Moyen-Orient ; « Syrian Law Journal », un site spécialisé dans le domaine juridique et couvrant des informations en provenance de Syrie dans ce domaine ainsi que dans les domaines économiques et des affaires. Parmi les sources d’informations d’origine étrangère peuvent être cités « Open Democracy », un site Internet pour l’analyse des questions sociales et politiques dont les fondateurs sont actifs dans des médias bien établis et dans le domaine du militantisme politique et qui compte parmi ses contributeurs des personnalités connues sur le plan international ; « Brookings Institution », un groupe de réflexion réputé aux États-Unis ; « The Foundation for Strategic Research », une organisation indépendante à but non lucratif, reconnue en France comme une fondation d’utilité publique. En outre, le Conseil a produit des pages provenant des sites Internet de Damascus Cham Holding et du gouvernement syrien. Or, ces différentes sources relaient des éléments d’information qui se corroborent, de sorte que le requérant ne saurait uniquement se prévaloir du fait qu’il s’agit de captures d’écran de sites Internet et d’articles de presse pour en contester le caractère sensé et fiable.

110    De plus, concernant les arguments du requérant relatifs au site Internet « The Syrian Observer », il convient de constater, tout d’abord, que la description faite de cette source d’information ne contient pas d’éléments permettant de douter de sa fiabilité. Au contraire, en indiquant de manière transparente le fait que le contenu des articles qui y sont publiés n’est pas systématiquement vérifié, cette source avertit ses lecteurs de ce qu’il peut être nécessaire de croiser les informations transmises par les articles publiés pour en apprécier la véracité. C’est pourquoi il apparaît également utile que ce site Internet publie des articles provenant de différentes sources, certaines proches du régime syrien et d’autres s’opposant à celui-ci. Partant, il y a lieu de rejeter cet argument.

111    Il en va de même pour les arguments du requérant concernant le site Internet « The Syria Report ». Plus précisément, s’agissant de l’allégation selon laquelle cette publication ne respecte pas les règles professionnelles journalistiques, force est de constater, tout d’abord, que le requérant ne précise pas au regard de quelles règles il aurait dû être contacté par ce site Internet. En outre, il ne ressort aucunement du dossier que le requérant a réagi à ce prétendu manque de respect de telles règles, notamment, en entreprenant une action en diffamation. Enfin, en tout état de cause, il convient de relever que le fait que le requérant n’aurait pas été contacté afin de vérifier les informations relayées, à le supposer avéré, n’est pas, en tant que tel, suffisant pour dénier toute fiabilité aux informations publiées sur ce site Internet. Il convient donc d’écarter cet argument.

112    Ensuite, concernant, d’une part, l’allégation du requérant selon laquelle les sites Internet « The Syrian Observer » et « The Syria Report » publient, en substance, les mêmes informations afin de doter ces dernières d’une objectivité apparente, force est de constater, tout d’abord, que le requérant ne produit aucune preuve illustrant la collusion alléguée. En outre, il ne ressort pas davantage du document WK 50/2019 INIT que les informations publiées sur ces deux sites Internet sont similaires au point de témoigner d’une telle collusion. Lors de l’audience, le requérant a développé son argumentation en faisant valoir que les deux articles dont la fiabilité est contestée présentent les informations de la même manière, ce qui témoigne de la subjectivité de leurs auteurs par rapport au projet Marota City et par rapport au fait que ledit projet soutiendrait le régime syrien. Enfin, au cours de l’audience, il fait valoir que « The Syria Report » est la première source d’informations du Conseil. À cet égard, il convient de relever que, indépendamment de la circonstance que A est le directeur de publication du site Internet « The Syrian Observer » et le co-fondateur du site Internet « The Syria Report », le fait que deux sources publient les mêmes informations ne saurait être suffisant pour remettre en cause leur fiabilité, dès lors qu’il est courant, dans le milieu journalistique, que différents journaux ou sites d’informations relaient les mêmes faits. Enfin, au cours de l’audience, force est de constater que le requérant a reconnu que certains des faits relatés par le site Internet « The Syria Report » étaient corrects, de sorte que, même à supposer, ainsi qu’il le soutient, qu’ils fassent l’objet d’une présentation subjective de la part de leur auteur, ils n’en demeurent pas moins fiables. Dès lors, cet argument doit être rejeté.

113    Concernant, d’autre part, les doutes exprimés par le requérant quant à l’intégrité de A, force est de constater qu’il n’a avancé aucun élément au soutien de cette allégation. En effet, la brève présentation de A, apportée par le requérant, ne mentionne pas l’existence de relations entre ce dernier et le Conseil. Cette circonstance ne peut pas non plus être déduite de l’article intitulé « Analyse : pas de fonds pour le projet de loi de reconstruction de la Syrie », dont A est l’auteur. Enfin, le requérant n’explique pas non plus quel serait l’intérêt pour A de publier des articles appuyant la politique que le Conseil entend appliquer afin de servir par la suite de justification concernant des mesures restrictives amenées à être adoptées ou nouvellement adoptées. Dès lors, il y a lieu de rejeter cet argument.

114    Au vu de ce qui précède, le Tribunal estime, en l’absence d’élément dans le dossier susceptible de remettre en cause la fiabilité des sources utilisées par le Conseil, qu’il convient de leur reconnaître un caractère sensé et fiable, au sens de la jurisprudence rappelée au point 106 ci-dessus.

 Sur le statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie

115    Il convient de vérifier si l’ensemble des éléments de preuve soumis par le Conseil satisfait à la charge de la preuve qui lui incombe en vertu de la jurisprudence rappelée au point 89 ci-dessus et constitue ainsi un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants pour étayer le premier motif d’inscription.

116    À cet égard, le Conseil a considéré que le requérant est un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie en raison des intérêts et des activités qu’il a dans de multiples secteurs de l’économie syrienne. Concernant les actes initiaux et les actes de maintien de 2019, les éléments de preuve soumis par le Conseil dans le document WK 50/2019 INIT se rapportent à trois activités, à savoir son statut de partenaire fondateur de la compagnie aérienne Fly Aman, puis son statut de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq, coentreprise active dans le projet Marota City et, enfin, ses fonctions au sein d’Aman Holding qui sont liées à son statut de président du conseil d’administration précité. Concernant les actes de maintien de 2020, en plus des activités susmentionnées, les éléments de preuve complémentaires soumis par le Conseil dans le document WK 3599/2020 REV 1 mentionnent la création par le requérant d’Aman Facilities, avec M. Foz et pour le compte de ce dernier.

117    Il convient dès lors d’examiner chacun de ces éléments.

–       Sur le statut de partenaire fondateur de Fly Aman

118    Concernant le motif figurant dans les actes attaqués relatif au statut de partenaire fondateur de Fly Aman, il ressort des éléments de preuve provenant des sites Internet « Aliqtisadi », « Eqtsad News » et « 7al.net » que le requérant est un partenaire fondateur de Fly Aman. En outre, le site Internet « 7al.net » précise que le ministère du Commerce intérieur et de la Protection des consommateurs syrien a ratifié les statuts de Fly Aman, dont 10 % des parts appartiennent au requérant.

119    À cet égard, d’une part, le requérant conteste posséder une participation dans Fly Aman et fait valoir que, en tout état de cause, elle serait minoritaire. À l’appui de son allégation, il produit la première version des statuts de Fly Aman, datée du 22 février 2018 et signée par la direction des entreprises syrienne, et le certificat d’enregistrement de Fly Aman daté du 28 mai 2018. D’autre part, le requérant conteste être un fondateur de Fly Aman et fait valoir que, avant que la constitution de Fly Aman ne produise ses effets, la société B l’avait remplacé en tant qu’associé fondateur.

120    Il convient de relever que le certificat d’enregistrement de Fly Aman, du 28 mai 2018, mentionne que les fondateurs de l’entreprise sont M. Al Zoubi et la société B. En outre, il en ressort que la société B est actionnaire de Fly Aman aux côtés de M. Al Zoubi. En revanche, le nom du requérant n’y est pas mentionné. Cependant, la première version des statuts de Fly Aman, datée du 22 février 2018 et signée par la direction des entreprises syrienne, désigne le requérant comme fondateur et partenaire de Fly Aman et mentionne que ce dernier possède 10 % du capital de l’entreprise. À cet égard, il y a lieu de remarquer que le requérant n’a pas démontré que les statuts du 22 février 2018 de Fly Aman n’avaient pas produit d’effets juridiques entre leur date et la date du certificat d’enregistrement du 28 mai 2018, au regard du fait que la société n’aurait pas été constituée alors que ses statuts ont été ratifiés par la direction des entreprises syrienne. Lors de l’audience, il a en revanche confirmé qu’il ne s’agissait pas d’une première version, mais bien des statuts définitifs de Fly Aman, en attente d’être enregistrés auprès de la direction des entreprises syrienne. Enfin, le requérant reconnaît ne pas avoir apporté de preuve relative au transfert de son titre à la société B, désignée comme partenaire fondateur dans le certificat d’enregistrement daté du 28 mai 2018. Or, force est de rappeler que le nom du requérant a été inscrit sur les listes en cause en raison de son statut de partenaire fondateur de la compagnie aérienne Fly Aman et non en tant que simple actionnaire. En tout état de cause, le requérant se contredit dans ses écritures, puisque, tout en contestant être actionnaire, il reconnaît en être un en soutenant qu’il ne serait qu’un actionnaire minoritaire. Par ailleurs, il convient d’ajouter, concernant les actes de maintien de 2020, que les éléments de preuve provenant des sites Internet « Aliqtisadi » et « Eqtsad News », issus du document WK 3599/2020 REV 1, mentionnent que le requérant est un partenaire fondateur de Fly Aman.

121    Il ressort de ce qui précède que le requérant n’a pas réussi à remettre en cause le motif selon lequel il était un partenaire fondateur de Fly Aman lors de la constitution de celle-ci le 22 février 2018. Ainsi, le motif d’inscription relatif au fait que le requérant est un partenaire fondateur de la compagnie aérienne Fly Aman, présent dans les actes attaqués, est bien fondé.

–       Sur le statut de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq

122    Concernant le motif relatif au statut du requérant de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq, il ressort des éléments d’information provenant des sites Internet « Aliqtisadi » et « Damacham.sy » que le requérant a été nommé président du conseil d’administration d’Aman Dimashq. Cette nomination a eu lieu, selon le site Internet « Damacham.sy », à l’issue de la première assemblée générale de cette société, qui s’est tenue le 7 octobre 2017, au siège de Damascus Cham Holding à Marota City.

123    Sur ce point, comme le souligne le Conseil, le requérant admet avoir occupé la fonction de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq.

124    Le requérant fait néanmoins valoir que sa situation professionnelle a évolué, puisqu’il n’occuperait plus la fonction de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq. À cet égard, il apporte une première lettre du 28 mai 2019, adressée au conseil d’administration d’Aman Holding, dans laquelle il aurait présenté sa démission, qui aurait été acceptée par celui-ci dans une lettre du même jour. Le requérant fournit une seconde lettre du 29 mai 2019, adressée par le président du conseil d’administration d’Aman Holding à Aman Dimashq, ainsi qu’un certificat d’enregistrement d’Aman Dimashq, daté du 1er juillet 2019, qui démontreraient qu’il ne représenterait plus Aman Holding au sein du conseil d’administration d’Aman Dimashq et qu’il aurait été remplacé. Par conséquent, il ne serait plus président dudit conseil d’administration.

125    Premièrement, dans le cadre de l’examen de la légalité des actes initiaux et des actes de maintien de 2019, il convient de noter que les preuves de la démission du requérant et de son remplacement au poste de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq ne sont pas pertinentes. En effet, la démission du requérant a été acceptée le 28 mai 2019, c’est-à-dire postérieurement à la date d’adoption des actes initiaux et à celle des actes de maintien de 2019, à savoir, respectivement, le 21 janvier et le 17 mai 2019.

126    Or, selon une jurisprudence constante, la légalité d’un acte de l’Union doit être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date où l’acte a été adopté (voir arrêts du 3 septembre 2015, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Commission, C‑398/13 P, EU:C:2015:535, point 22 et jurisprudence citée, et du 4 septembre 2015, NIOC e.a./Conseil, T‑577/12, non publié, EU:T:2015:596, point 112 et jurisprudence citée). Par conséquent, puisque la démission du requérant est postérieure à l’adoption des actes initiaux et des actes de maintien de 2019, elle ne saurait remettre en cause la légalité desdits actes.

127    Deuxièmement, concernant les actes de maintien de 2020, il convient de remarquer que, en ce qui concerne le motif relatif au statut du requérant en tant que président du conseil d’administration d’Aman Dimashq, le Conseil a maintenu le nom du requérant sur les listes en cause en citant précisément la date de démission alléguée par l’intéressé, c’est-à-dire mai 2019. Cela signifie que le Conseil a admis comme étant démontré le fait que le requérant n’était plus, à compter de mai 2019, président du conseil d’administration d’Aman Dimashq.

128    Or, il ressort de la jurisprudence que la circonstance qu’une personne a cessé d’exercer ses fonctions au sein d’une structure n’implique pas, à elle seule, que ces anciennes fonctions sont dénuées de pertinence, dans la mesure où ses activités passées pourraient influencer son comportement. La jurisprudence a cependant précisé que, prises isolément, les anciennes fonctions d’une personne ne sauraient justifier l’inscription du nom de cette dernière sur les listes en cause. Si le Conseil entendait se fonder sur les activités passées de ladite personne, il lui incomberait en effet d’avancer des indices sérieux et concordants permettant raisonnablement de considérer que cette dernière maintient des liens avec la structure qui l’employait à la date d’adoption de l’acte attaqué, justifiant l’inscription de son nom sur les listes, après la cessation de ses activités au sein de cette structure (voir, par analogie, arrêts du 6 septembre 2013, Bateni/Conseil, T‑42/12 et T‑181/12, non publié, EU:T:2013:409, points 64 et 65, et du 18 février 2016, Jannatian/Conseil, T‑328/14, non publié, EU:T:2016:86, point 40).

129    En l’espèce, il ne ressort pas du document WK 3599/2020 REV1 que le Conseil ait présenté des indices sérieux et concordants, au sens de la jurisprudence rappelée au point 128 ci-dessus, permettant raisonnablement de considérer que le requérant maintenait des liens avec la structure qui l’employait à la date d’adoption de l’acte attaqué. Ainsi, le document WK 3599/2020 REV1 ne comporte aucun élément de preuve de nature à justifier que, malgré la démission du requérant en mai 2019, il conviendrait de maintenir cette mention dans les motifs d’inscription. En particulier, le Conseil n’explique pas et n’a pas démontré en quoi le fait, pour le requérant, d’avoir été président du conseil d’administration d’Aman Dimashq jusqu’en mai 2019 justifie, à la date d’adoption des actes de maintien de 2020, d’utiliser cet élément pour établir son statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie. À cet égard, il n’a pas démontré que le requérant maintenait des liens particuliers avec Aman Dimashq. Force est encore de relever que, lors de l’audience, le Conseil a reconnu que le requérant avait quitté ses fonctions en démissionnant, mais s’est uniquement référé à ses autres activités commerciales pour justifier, en raison de leur importance, la qualification d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie du requérant.

130    Partant, il y a lieu de conclure que, concernant les actes de maintien de 2020, le Conseil ne pouvait retenir le motif relatif au statut de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq jusqu’en mai 2019 du requérant afin de démontrer son statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie.

–       Sur la participation du requérant, en tant que président du conseil d’administration d’Aman Dimashq, coentreprise active dans la construction du projet Marota City, à un projet immobilier et commercial haut de gamme appuyé par le régime

131    Concernant, premièrement, le motif figurant dans les actes initiaux et les actes de maintien de 2019, relatif au statut de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq, coentreprise active dans la construction du projet Marota City, un projet immobilier et commercial haut de gamme appuyé par le régime, il ressort des articles provenant des sites Internet « The Syria Report » (articles publiés le 17 avril et le 1er juin 2018) et « Open Democracy » qu’Aman Dimashq est une coentreprise qui a été créée par M. Foz et Damascus Cham Holding et qu’elle a été dotée d’un capital de 18,9 millions d’USD afin de construire plusieurs immeubles dans le cadre du projet Marota City.

132    À cet égard, s’agissant plus précisément du projet Marota City, mentionné dans les motifs d’inscription du nom du requérant sur les listes en cause, il ressort des éléments de preuve produits par le Conseil, notamment des sites Internet « Open Democracy », « The Syria Report » (article publié le 1er juin 2018) et « Damacham.sy », que ce projet est mené à bien dans le quartier de Damas dénommé Basateen Al-Razi (Mazzeh).

133    En outre, il convient de relever qu’il ressort tant du site Internet « Damacham.sy » que de « The Syria Report » (articles publiés le 17 avril et le 1er juin 2018) que les investissements prévus par Aman Dimashq dans le projet Marota City sont particulièrement importants, puisqu’ils s’élèvent à 150 milliards de SYP, soit environ 312 millions d’USD. À ce titre, le site Internet « Damacham.sy » estime qu’il s’agit de l’une des plus importantes participations au projet Marota City.

134    Il y a lieu de constater que ces éléments sont, en substance, confirmés par le requérant. En effet, il reconnaît, dans la requête, que l’objet social d’Aman Dimashq consiste à construire de nouveaux bâtiments résidentiels, commerciaux et récréatifs sur une partie (environ 3,1 % de la superficie) des terrains du projet Marota City apportés en nature au capital de Damascus Cham Holding, qui supervise les droits de 30 % des terrains du projet Marota City, dont la superficie totale s’étend sur 2,15 millions de mètres carrés.

135    Concernant, deuxièmement, les motifs figurant dans les actes de maintien de 2020, il suffit de constater que, dès lors qu’il a été établi, au point 130 ci-dessus, que, afin de démontrer le statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie du requérant, le Conseil ne pouvait retenir le motif relatif à sa qualité de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq jusqu’en mai 2019, il ne saurait, a fortiori, retenir sa participation au projet Marota City en cette qualité afin de démontrer ledit statut.

–       Sur le statut d’employé d’Aman Holding

136    Il ressort des sites Internet « Aliqtisadi », « Damacham.sy », « Wall Street Journal », « Open Democracy » et « The Syria Report » (article publié le 17 avril 2018) que, d’une part, le requérant est employé au sein d’Aman Holding, dont il est le représentant au sein du conseil d’administration d’Aman Dimashq, et que, d’autre part, Aman Holding est détenue par M. Foz. Or, le requérant n’a pas contesté ces éléments d’information et les a au contraire confirmés.

137    Premièrement, dans le cadre de l’examen de la légalité des actes initiaux et des actes de maintien de 2019, il convient de remarquer que, en raison de son emploi auprès d’Aman Holding, le requérant a été élu président du conseil d’administration d’Aman Dimashq, société dans laquelle sont impliqués des hommes d’affaires importants, tels que M. Foz, mais également des hommes politiques, comme le gouverneur de Damas, président de Damascus Cham Holding, ainsi qu’il ressort du site Internet « Syrian Law Journal », sans que cela ait été contesté par le requérant. Dans ses écritures, le requérant a également précisé qu’il travaillait à temps plein comme président du conseil d’administration d’Aman Dimashq. Or, être choisi par de telles personnalités pour un poste aussi important au sein d’une entreprise réalisant des investissements de très grande ampleur est un élément significatif qu’il convient de prendre en compte pour l’appréciation du statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie du requérant.

138    Deuxièmement, dans le cadre de l’examen de la légalité des actes de maintien de 2020, force est de rappeler que le requérant n’était plus président du conseil d’administration d’Aman Dimashq, ainsi que le Tribunal l’a constaté au point 130 ci-dessus.

139    En outre, il ressort du dossier que le requérant a été maintenu à son poste au sein d’Aman Holding pendant environ une année après la date de sa démission. De plus, en réponse à une question du Tribunal posée lors de l’audience, le requérant a précisé que son salaire avait été réduit de moitié. En particulier, son contrat de travail conclu avec Aman Holding stipulait qu’il était rémunéré 1 250 000 SYP (environ 2 526,60 euros) par mois. Par ailleurs, il fait valoir qu’il n’est plus autant impliqué dans les projets d’Aman Holding, eu égard au fait qu’il supervise moins de projets. De plus, dans ses écritures et ainsi que cela a été confirmé lors de l’audience, le requérant a demandé à Aman Holding l’autorisation de créer Aman Facilities, en raison du fait qu’il percevait une rémunération d’Aman Holding et qu’il entendait adopter un nom commercial proche de celui d’Aman Holding, ce qui indique qu’il n’avait pas toute latitude pour conduire comme il l’entendait son projet d’entreprise. Enfin, le requérant a avancé qu’Aman Holding l’avait aidé à trouver un avocat afin de le représenter et avait pris en charge les frais de justice qu’il exposerait dans le cadre d’un recours à l’encontre des mesures restrictives litigieuses.

140    Il en résulte que le requérant conserve bien des liens avec Aman Holding, mais que ceux-ci ont sensiblement changé en comparaison de ceux qui existaient au moment de l’adoption des actes initiaux et des actes de maintien de 2019. En effet, le requérant soutient, sans être contredit par le Conseil, ne plus superviser de projet et qu’Aman Holding l’a autorisé à conserver cet emploi dans l’attente de trouver une autre source de revenus. En outre, le requérant n’étant plus mandataire social, mais simple employé d’Aman Holding, il ne saurait être admis que ses activités au sein de cette société feraient de lui un homme d’affaires influent. Partant, il y a lieu de conclure que, concernant les actes de maintien de 2020, le Conseil ne pouvait retenir, afin de démontrer le statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie du requérant, son statut d’employé au sein d’Aman Holding.

–       Sur le statut de membre fondateur d’Aman Facilities avec et pour le compte de M. Foz

141    Concernant le nouveau motif figurant dans les actes de maintien de 2020, il convient de relever que le requérant admet avoir créé Aman Facilities et le justifie au regard des difficultés à trouver un emploi à la suite de l’adoption par le Conseil des actes initiaux et des actes de maintien de 2019.

142    Premièrement, il convient de noter que la date de création d’Aman Facilities indiquée dans les motifs fondant les actes de maintien de 2020 ne correspond pas à celle invoquée par le requérant dans le second mémoire en adaptation. En effet, lesdits motifs précisent que la société a été créée le 30 janvier 2020, ce qui est confirmé par l’article du site Internet « Aliqtisadi ». En revanche, le requérant indique que la société a été constituée en mai 2019, seulement quelques jours avant sa démission effective de son poste de mandataire social d’Aman Holding, à savoir le 28 mai 2019. De plus, selon le certificat d’enregistrement d’Aman Facilities, produit par le requérant, la société a été créée le 23 mai 2019. Enfin, l’attestation de la Syria International Islamic Bank confirme également une création antérieure au 30 janvier 2020, puisque le remboursement du prêt octroyé pour la constitution de cette société a débuté le 10 novembre 2019. Cette différence de date n’est toutefois pas de nature à affecter la légalité des actes de maintien de 2020 car, même à considérer que le Conseil ait retenu une date erronée, il n’en demeure pas moins que le requérant reconnaît avoir constitué cette société avant l’adoption desdits actes.

143    Deuxièmement, il ressort de l’article issu du site Internet « Aliqtisadi » qu’Aman Facilities opère dans le secteur du tourisme et fournit des services hôteliers. Selon cet article, les domaines d’activités de la société seraient les suivants : la gestion des hôtels, des installations privées et des établissements dédiés au tourisme, aux services ou à 1’administration et les activités de conseil en matière de tourisme et de services. Le requérant soutient qu’Aman Facilities fournit des services de nettoyage et de stérilisation à certaines entreprises et installations, ce qui peut inclure les hôtels, mais il conteste en revanche que cette société exploite ou développe des activités hôtelières et touristiques. À l’appui de son argument, il produit deux contrats de prestation de services dont l’objet confirme qu’Aman Facilities fournit des services de nettoyage et de stérilisation dans un hôtel. Le requérant produit également le certificat d’enregistrement d’Aman Facilities, daté du 22 janvier 2020, qui confirme cependant la description de l’objet d’Aman Facilities tel que reproduit dans l’article « Aliqtisadi ». Partant, les deux contrats de prestation de services et le certificat d’enregistrement d’Aman Facilities ne remettent pas en cause la liste des domaines d’activités cités dans l’article « Aliqtisadi » et, partant, la pertinence dudit article.

144    Troisièmement, s’agissant de la partie des motifs de 2020 mentionnant que le requérant a créé Aman Facilities avec M. Foz et pour le compte de ce dernier, il convient de relever que le Conseil n’a produit qu’un seul article visant à l’étayer, à savoir l’article intitulé « Bashar Assi, nouvel homme de main de M. Foz pour les investissements », issu du site Internet « Eqtsad News », qui évoque les liens existant entre M. Foz et le requérant. Selon cet article, M. Foz utilise le nom du requérant pour créer de nouvelles sociétés. C’est dans le cadre de cette collaboration que le requérant aurait obtenu l’autorisation du ministère du Commerce intérieur et de la Protection des consommateurs syrien pour la constitution d’Aman Facilities.

145    Il convient de relever que, sur ce point, le requérant a déposé une attestation sur l’honneur, rédigée par un responsable de la Syria International Islamic Bank et datée du 13 août 2020, qui démontre l’existence d’un emprunt, d’un montant de 20 millions de SYP (environ 26 000 euros), accordé au requérant ainsi que l’échéancier de remboursement de ce crédit, débutant le 10 novembre 2019. Selon le requérant, cet emprunt bancaire a servi à financer une partie de la création d’Aman Facilities, l’autre partie ayant été financée par ses fonds privés. À cet égard, lors de l’audience, le Conseil a indiqué qu’il ne pouvait être exclu que le requérant ait eu d’autres sources de financement, à travers M. Foz ou une autre banque, même s’il a reconnu ne disposer d’aucune preuve afin de corroborer son propos.

146    Il résulte de ce qui précède que le requérant a démontré, sans être utilement contredit par le Conseil, avoir souscrit un prêt en son nom personnel pour constituer Aman Facilities. De même, il ressort de l’article issu du site Internet « Eqtsad News » que l’autorisation pour la création de ladite société a été donnée au requérant par le ministère du Commerce intérieur et de la Protection des consommateurs syrien. En revanche, il n’en ressort pas qu’Aman Facilities a été officiellement créée par le requérant et M. Foz.

147    Quatrièmement, lors de l’audience, le Conseil s’est prévalu de la similitude existant entre les dénominations Aman Holding et Aman Facilities pour mettre en exergue le lien existant entre M. Foz et le requérant et ainsi démontrer que, en réalité, Aman Facilities a été créée pour le compte de M. Foz. Le requérant, quant à lui, justifie ce choix comme un atout à des fins de marketing, pour gagner en visibilité et développer ses activités, en bénéficiant du prestige d’Aman Holding.

148    À cet égard, il suffit de constater que la circonstance que les dénominations de ces deux sociétés aient en commun le terme « Aman » ne saurait constituer une preuve suffisante en tant que telle pour démontrer qu’Aman Facilities a été créée avec et pour le compte de M. Foz. De même, même si le requérant a indiqué avoir choisi le nom Aman Facilities pour profiter de la renommée d’Aman Holding, il ne ressort d’aucun élément de preuve contenu dans le document WK 3599/2020 REV 1 qu’Aman Facilities a été nommée ainsi en raison de son lien avec Aman Holding ni que M. Foz a approuvé une telle démarche.

149    Cinquièmement, aucune preuve contenue dans le document WK 3599/2020 REV 1 ne démontre que l’activité d’Aman Facilities bénéficie à M. Foz, voire à Aman Holding.

150    Enfin, sixièmement, même s’il ressort du dossier que M. Foz possède Aman Holding, il importe de remarquer que les motifs d’inscription des actes de maintien de 2020 sont relatifs au lien existant entre Aman Facilities et M. Foz et ne mentionnent pas le lien entre Aman Holding et Aman Facilities.

151    Il ressort de l’ensemble de ce qui précède que, si le requérant admet avoir créé Aman Facilities, il n’est pas possible d’affirmer qu’il a agi pour le compte de M. Foz en créant ladite société. Il ressort de la jurisprudence que, compte tenu de la situation en Syrie, le Conseil satisfait à la charge de la preuve qui lui incombe s’il fait état devant le juge de l’Union d’un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants permettant d’établir l’existence d’un lien suffisant entre la personne sujette à une mesure de gel de ses fonds et le régime combattu (arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 52). En ce sens, l’unique élément de preuve produit par le Conseil visant à démontrer le bien-fondé du nouveau motif d’inscription ne remplit pas les exigences résultant de cette jurisprudence, eu égard notamment àla présentation par le requérant d’éléments de preuve et d’arguments contraires.

–       Conclusion sur le statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie du requérant

152    En premier lieu, concernant les actes initiaux et les actes de maintien de 2019, il convient de conclure, de l’ensemble de ce qui précède, que le Conseil a apporté un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants permettant d’établir que le requérant était bien, premièrement, le président du conseil d’administration d’Aman Dimashq, impliquée dans la réalisation du projet d’envergure que représente Marota City, deuxièmement, le représentant d’Aman Holding et, troisièmement, un partenaire fondateur de Fly Aman. Ainsi, c’est à bon droit que le Conseil a conclu que le requérant était un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie.

153    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les autres arguments du requérant.

154    Premièrement, le requérant conteste être un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie dans la mesure où il ne serait qu’un simple salarié, employé d’Aman Holding, ainsi que l’attesterait son contrat de travail, du 11 octobre 2017. Cet argument ne saurait toutefois prospérer. En effet, tout d’abord, ainsi que l’a admis le requérant, il a été chargé, dans le cadre de ses fonctions, de représenter Aman Holding au conseil d’administration d’Aman Dimashq et a été nommé président du conseil d’administration d’Aman Dimashq. Ainsi, il ne saurait, pendant la période où il exerçait ces responsabilités, être considéré comme étant un « simple » salarié. Par ailleurs, le requérant ne démontre pas, de manière convaincante, que, dans les circonstances propres à l’espèce, le fait d’être salarié ne serait pas compatible avec le fait d’être un homme d’affaires influent.

155    Deuxièmement, l’allégation du requérant selon laquelle il ne saurait être un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie en raison de ses antécédents tant personnels que professionnels démontrant qu’il appartient à la classe moyenne ne saurait non plus prospérer. En effet, ses origines modestes, même à les considérer avérées, ne l’ont de toute évidence pas empêché de gravir les échelons professionnels l’ayant mené à être élu président du conseil d’administration d’Aman Dimashq. En particulier, quand bien même les informations données par le site Internet « Damacham.sy » et relatives à son expérience professionnelle seraient excessivement flatteuses à des fins promotionnelles, elles ne sauraient occulter le fait qu’il a été nommé au plus haut poste d’une coentreprise chargée d’investir 18,9 millions d’USD dans un projet décrit comme étant de grande envergure, ce qui est suffisant pour démontrer qu’il ne saurait être considéré comme appartenant toujours à la classe moyenne, en particulier eu égard à la structure de l’économie syrienne.

156    Troisièmement, le requérant allègue qu’il ne détiendrait aucune participation dans Aman Dimashq, comme le démontrerait l’article 8 des statuts de la société qu’il a produits. Selon les statuts de cette société, ses actionnaires sont Damascus Cham Holding, détenant 49 % des parts, Aman Holding, détenant 40 % des parts et, enfin, Foz Trading, détenant 11 % des parts. Aman Holding et Foz Trading détiendraient donc, à elles deux, la majorité des actions et des votes à l’assemblée générale de la société. Néanmoins, même à la considérer fondée, cette allégation ne permet pas de remettre en question la fonction de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq du requérant, élément pris en compte pour justifier son statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie dans les actes initiaux et les actes de maintien de 2019.

157    Quatrièmement, le requérant soutient que le projet Marota City n’est pas construit sur des terrains expropriés. Il fait valoir, en ce sens, que les terrains sur lesquels est bâti le projet Marota City n’ont jamais fait l’objet d’une expropriation forcée, mais bien d’une négociation avec les propriétaires de logements non conformes situés sur ces terrains. À cet égard, le requérant soutient que 359 opérations d’acquisition desdits logements ont été réalisées, leur valeur totale approximative s’élevant à 8,856 milliards de SYP (soit 18 335 403 euros). Le requérant a produit, à titre d’illustration, des éléments de preuve concernant le paiement du prix aux propriétaires dans 20 de ces 359 opérations. En outre, il ajoute, en substance, qu’une indemnité locative aurait été versée aux propriétaires de logements non conformes qui n’ont pas désiré vendre leur bien. Enfin, le requérant allègue, en substance, que ces terrains n’ont pas été le théâtre d’affrontements entre les forces de l’opposition et le régime syrien et que les quartiers de Damas situés dans cette zone n’ont jamais été détruits pendant le conflit armé qui a eu cours en Syrie.

158    Il convient de relever que les arguments exposés au point 157 ci-dessus sont dénués de pertinence. À cet égard, aux termes du considérant 6 de la décision 2015/1836, « [l]e Conseil a estimé que, en raison du contrôle étroit exercé sur l’économie par le régime syrien, un cercle restreint de femmes et d’hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie n’[était] en mesure de maintenir son statut que grâce à des liens étroits avec le régime et au soutien de celui-ci, ainsi qu’à l’influence exercée en son sein » et « [l]e Conseil estime qu’il devrait prévoir des mesures restrictives pour imposer des restrictions à l’admission des femmes et des hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie, identifiés par le Conseil et dont la liste figure à l’annexe I, ainsi que pour geler tous les fonds et ressources économiques qui leur appartiennent, qui sont en leur possession, ou qui sont détenus ou contrôlés par eux, afin de les empêcher de fournir un soutien matériel ou financier au régime et, par l’influence qu’ils exercent, d’accroître la pression sur le régime lui-même afin qu’il modifie sa politique de répression ».

159    Il en découle que le critère de l’« homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie » suppose notamment un soutien par le régime syrien et vise à empêcher les femmes et les hommes appartenant à cette catégorie de fournir un soutien matériel ou financier audit régime. Ainsi, la question de savoir si le projet Marota City est construit sur des terrains expropriés ou si ces terrains ont été le théâtre d’affrontements est sans incidence sur la participation du requérant dans un projet soutenu par le régime syrien et, ainsi, sur l’application dudit critère au cas d’espèce.

160    Cinquièmement, le requérant prétend avoir réussi à renverser la présomption de lien existant entre lui et le régime syrien. À cet égard, il fait valoir, en substance, d’une part, qu’il appartenait au Conseil de démontrer que les conditions établies à l’article 27, paragraphe 3, et à l’article 28, paragraphe 3, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, n’étaient pas remplies et, d’autre part, qu’il a apporté des preuves matérielles renversant ladite présomption.

161    À cet égard, il convient de relever que, en l’espèce, l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause a eu lieu en application de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836. À ce titre, la décision 2015/1836 a notamment introduit comme critère d’inscription objectif, autonome et suffisant celui des « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie », de sorte que le Conseil n’est plus tenu de démontrer l’existence d’un lien entre cette catégorie de personnes et le régime syrien, au sens où l’entendait la décision 2013/255 avant sa modification, ni non plus entre cette catégorie de personnes et le soutien apporté à ce régime ou le bénéfice tiré de ce dernier, étant donné qu’être une femme ou un homme d’affaires influents exerçant ses activités en Syrie suffit pour l’application des mesures restrictives en cause à une personne. Ainsi, il ne découle aucunement de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, qu’il incomberait au Conseil de rapporter la preuve que tant la condition relative à la situation de femme ou d’homme d’affaires influent que celle de liens suffisants avec le régime sont cumulativement remplies [voir, en ce sens, arrêts du 11 septembre 2019, HX/Conseil, C‑540/18 P, non publié, EU:C:2019:707, point 38 ; du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil, C‑241/19 P, EU:C:2020:545, points 71 à 74 ; et du 4 avril 2019, Sharif/Conseil, T‑5/17, EU:T:2019:216, points 55 et 56 (non publiés)].

162    En ce sens, le Tribunal a considéré qu’il pouvait être déduit du critère relatif à la qualité de « femmes et hommes d’affaires influents exerçant leurs activités en Syrie » une présomption réfragable de lien avec le régime syrien (voir, en ce sens, arrêt du 4 avril 2019, Sharif/Conseil, T‑5/17, EU:T:2019:216, point 106, et ordonnance du 11 septembre 2019, Haswani/Conseil, T‑231/15 RENV, non publiée, EU:T:2019:589, point 60). Cette présomption trouve à s’appliquer dès lors que le Conseil a été en mesure de démontrer que la personne est non seulement une femme ou un homme d’affaires exerçant ses activités en Syrie, mais aussi qu’elle peut être qualifiée d’influente. En effet, ainsi qu’il ressort des termes du considérant 6 de la décision 2015/1836, c’est l’influence que cette catégorie de personnes est susceptible d’exercer sur le régime syrien que le Conseil vise à exploiter en les poussant, par le biais des mesures restrictives qu’il adopte à leur égard, à faire pression sur le régime syrien pour qu’il modifie sa politique de répression. Ainsi, dès lors que le Conseil est parvenu à démontrer l’influence qu’une femme ou un homme d’affaires peut exercer sur ledit régime, le lien entre ladite personne et le régime syrien est présumé.

163    En outre, il y a lieu de rappeler que le respect des règles relatives à la charge et à l’administration de la preuve en matière de mesures restrictives par le Tribunal implique que ce dernier respecte le principe énoncé par la jurisprudence constante mentionnée au point 89 ci-dessus et rappelé par la Cour, en dernier lieu, dans l’arrêt du 11 septembre 2019, HX/Conseil (C‑540/18 P, non publié, EU:C:2019:707, points 48 à 50), selon lequel, en substance, la charge de la preuve incombe à l’institution en cas de contestation du bien-fondé des motifs d’inscription. La Cour a ainsi jugé que la charge de la preuve de l’existence d’informations suffisantes, au sens de l’article 27, paragraphe 3, et de l’article 28, paragraphe 3, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, indiquant que la partie requérante n’était pas, ou n’était plus, liée au régime syrien, qu’elle n’exerçait aucune influence sur celui-ci et qu’elle n’était pas associée à un risque réel de contournement des mesures restrictives adoptées à l’égard de ce régime n’incombait pas à cette partie (voir, en ce sens, arrêts du 14 juin 2018, Makhlouf/Conseil, C‑458/17 P, non publié, EU:C:2018:441, point 86, et du 11 septembre 2019, HX/Conseil, C‑540/18 P, non publié, EU:C:2019:707, points 50 et 51).

164    Par conséquent, il ne saurait être imposé à la partie requérante un niveau de preuve excessif aux fins de renverser la présomption de lien avec le régime syrien. Ainsi, celle-ci doit être considérée comme ayant réussi à renverser la présomption de lien avec le régime syrien si elle fait valoir des arguments ou des éléments susceptibles de remettre sérieusement en cause la fiabilité des éléments de preuve soumis par le Conseil ou leur appréciation, notamment au regard des conditions posées par l’article 27, paragraphe 3, et l’article 28, paragraphe 3, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, ou si elle produit devant le juge de l’Union un faisceau d’indices de l’inexistence ou de la disparition du lien avec le régime syrien, ou de l’absence d’influence sur ledit régime, ou de l’absence d’association avec un risque réel de contournement des mesures restrictives, conformément à l’article 27, paragraphe 3, et à l’article 28, paragraphe 3, de cette décision (arrêt du 8 juillet 2020, Zubedi/Conseil, T‑186/19, EU:T:2020:317, point 71).

165    En l’espèce, force est de constater que le requérant allègue seulement condamner fermement et sans réserve les méfaits du régime syrien, mais n’étaye son argument par aucun élément concret, de sorte qu’il ne saurait prospérer.

166    Par conséquent, le requérant n’a présenté aucun argument ou élément permettant de douter de la fiabilité des éléments de preuve soumis par le Conseil ou de l’appréciation qu’il convenait d’en faire, ni fait état d’aucun indice concret permettant au Tribunal de considérer qu’il n’existait pas, ou plus, de lien entre lui et ledit régime, qu’il n’exerçait aucune influence sur ce régime et qu’il était étranger à tout risque réel de contournement des mesures restrictives.

167    Au vu de tout ce qui précède, il convient de considérer que le premier motif d’inscription du nom du requérant sur les listes en cause fondé sur le statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie est suffisamment étayé, de sorte que, au regard de ce critère, l’inscription et le maintien de son nom sur les listes en cause, résultant des actes initiaux et des actes de maintien de 2019, sont bien fondés.

168    Or, selon la jurisprudence, eu égard à la nature préventive des décisions adoptant des mesures restrictives, si le juge de l’Union considère que, à tout le moins, l’un des motifs mentionnés est suffisamment précis et concret, qu’il est étayé et qu’il constitue en soi une base suffisante pour soutenir cette décision, la circonstance que d’autres de ces motifs ne le seraient pas ne saurait justifier l’annulation de ladite décision (voir arrêt du 28 novembre 2013, Conseil/Manufacturing Support & Procurement Kala Naft, C‑348/12 P, EU:C:2013:776, point 72 et jurisprudence citée).

169    Dès lors, il y a lieu, sans qu’il soit besoin d’examiner le bien-fondé des autres griefs soulevés par le requérant et visant à remettre en cause le second motif d’inscription, de rejeter le premier moyen en ce qui concerne les actes initiaux et les actes de maintien de 2019 comme non fondé.

170    En second lieu, s’agissant des actes de maintien de 2020, il résulte de ce qui précède que le Conseil a apporté un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants permettant d’établir que le requérant était le partenaire fondateur de Fly Aman et avait constitué Aman Facilities. En revanche, il est resté en défaut de prouver le rôle prépondérant que le requérant occupait dans Aman Holding, ainsi que cela ressort des points 139 et 140 ci-dessus. De même, le Conseil n’apporte pas la preuve qu’Aman Facilities a été constituée avec et pour le compte de M. Foz. Enfin, le Conseil s’est fondé, à tort, sur le statut de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq jusqu’en mai 2019 du requérant et sur sa participation à ce titre au projet Marota City.

171    Or, d’une part, il y a lieu de constater que, ainsi qu’il résulte de l’article du site Internet « Eqtsad News », Fly Aman n’a pas encore vu le jour. Le requérant a également soutenu, sans être contesté par le Conseil sur ce point, que Fly Aman n’était pas opérationnelle. D’autre part, le requérant confirme avoir créé Aman Facilities. Néanmoins, la constitution d’Aman Facilities, dont l’objet social est décrit au point 143 ci-dessus, n’est pas un élément suffisant pour fonder, à lui seul, le statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie. Le requérant a en outre précisé à l’audience, en réponse à une question du Tribunal, que cette société employait un nombre très réduit de salariés, au maximum cinq, ce que le Conseil n’a pas contesté. Dans de telles circonstances, le Conseil ne saurait être considéré comme ayant démontré, à suffisance, le statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie du requérant lors de l’adoption des actes de maintien de 2020.

172    Partant, concernant les actes de maintien de 2020, le premier motif d’inscription n’est pas suffisamment étayé ; dès lors, il convient d’examiner le second motif d’inscription.

 Sur l’association avec le régime syrien

173    Il importe de relever que, tel qu’il ressort des actes de maintien de 2020, le second motif d’inscription concerne le soutien au régime syrien et l’avantage que tire le requérant dudit régime en raison de ses activités commerciales.

174    Il convient, dès lors, d’identifier les activités commerciales concernées.

175    Force est de constater que les activités commerciales pour lesquelles le requérant est considéré, par le Conseil, comme soutenant le régime syrien et comme en tirant avantage sont les mêmes que celles l’ayant conduit à le considérer comme un homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie.

176    À cet égard, il ne saurait être exclu que, pour une personne déterminée, les motifs d’inscription se recoupent dans une certaine mesure, en ce sens qu’une personne peut être qualifiée de femme ou d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie et être considérée comme bénéficiant, dans le cadre de ses activités, du régime syrien ou comme soutenant celui-ci au travers de ces mêmes activités. Cela ressort précisément de ce que, ainsi qu’il est établi au considérant 6 de la décision 2015/1836, les liens étroits avec le régime syrien et le soutien de celui-ci apporté par cette catégorie de personnes sont l’une des raisons pour lesquelles le Conseil a décidé de créer cette catégorie. Il n’en demeure pas moins qu’il s’agit, même dans cette hypothèse, de critères différents (arrêt du 23 septembre 2020, Kaddour/Conseil, T‑510/18, EU:T:2020:436, point 77).

177    Or, premièrement, il convient de déduire des conclusions tirées aux points 130 et 135 ci-dessus que, dès lors que le requérant n’était pas président du conseil d’administration d’Aman Dimashq à la date d’adoption des actes de maintien de 2020, il ne saurait être considéré comme bénéficiant du régime syrien à ce titre, ni comme le soutenant en raison de sa participation au projet Marota City.

178    Deuxièmement, il a été établi, au point 121 ci-dessus, que le requérant est le partenaire fondateur de Fly Aman. Cependant, le requérant allègue que Fly Aman n’est pas opérationnelle. Il convient de constater, à cet égard, qu’il ressort de l’article issu du site Internet « Eqtsad News » que Fly Aman n’a pas encore vu le jour. Aucun élément de preuve compris dans les documents WK 50/2019 INIT et WK 3599/2020 REV 1 ne démontre que le requérant bénéficie, en sa qualité de partenaire fondateur de ladite compagnie, du régime syrien ni qu’il le soutient. Certes, selon le site Internet « 7al.net », en Syrie, le secteur de l’aviation civile souffre de grandes difficultés au regard des opérations militaires s’y déroulant et ayant pour conséquence la cessation du trafic touristique et des services au sein de certains aéroports. Toutefois, le Conseil ne s’est pas prévalu de cette considération dans ses écritures afin de justifier un éventuel lien entre la constitution de la société et le régime syrien.

179    Troisièmement, s’il ressort du point 139 ci-dessus que le requérant conserve des liens avec Aman Holding, il ne ressort d’aucun des éléments de preuve compris dans les documents WK 50/2019 INIT et WK 3599/2020 REV 1 que le requérant bénéficie, en cette qualité, du régime syrien ni qu’il le soutient. À cet égard, le requérant a fait valoir qu’il ne supervisait plus de projet au sein d’Aman Holding. En particulier, il a apporté la preuve qu’il avait été remplacé dans le cadre de sa fonction de mandataire d’Aman Holding et de président élu au conseil d’administration d’Aman Dimashq. Il a justifié qu’il conservait un statut de salarié de manière temporaire, en attendant de trouver une autre source de revenus. Aussi, le soutien et le bénéfice que perçoit le requérant de son ancien employeur ne constituent pas une preuve directe démontrant qu’il soutient ou tire un bénéfice du régime syrien.

180    Enfin, quatrièmement, concernant Aman Facilities, s’il ressort du point 146 ci-dessus que le requérant a obtenu une autorisation du ministère du Commerce intérieur et de la Protection des consommateurs syrien pour sa constitution, le simple fait de constituer une société, employant un nombre limité d’employés, ne saurait être suffisant pour considérer que le requérant tire avantage du régime syrien et le soutient. À cet égard, le site Internet « Eqtsad News » évoque les liens existant entre le requérant et M. Foz, en ce que ce dernier utiliserait le nom du requérant pour créer de nouvelles sociétés, dont Aman Facilities. Toutefois, cet élément n’est pas corroboré par d’autres preuves contenues dans le document WK 3599/2020 REV 1. En outre, force est de relever qu’aucun élément du document WK 3599/2020 REV 1 ne permet de conclure que le requérant soutient, précisément, le régime syrien par l’intermédiaire d’Aman Facilities.

181    Au vu de tout ce qui précède, il convient de constater que le second motif d’inscription du nom du requérant sur les listes en cause en raison de son association avec le régime syrien n’est pas suffisamment étayé, de sorte que le maintien du nom du requérant n’est pas fondé.

182    Dès lors, concernant les actes de maintien de 2020, il convient d’accueillir le premier moyen du recours et, partant, de les annuler, en ce qu’ils concernent le requérant, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les quatrième, deuxième et troisième moyens soulevés à l’appui du recours s’agissant de ces actes.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’un « abus de pouvoir »

183    À l’appui de son moyen, le requérant fait valoir que le Conseil a adopté les actes attaqués pour cibler non le régime syrien, mais lui-même, alors qu’il a toujours, d’une part, respecté les sanctions décrétées par l’Union et la communauté internationale et, d’autre part, conservé son indépendance vis-à-vis du régime syrien. Ce faisant, le requérant doit être regardé comme invoquant un détournement de pouvoir.

184    Le Conseil conteste l’argument du requérant.

185    Il y a lieu de rappeler qu’un acte n’est entaché de détournement de pouvoir que s’il apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été pris dans le but exclusif, ou à tout le moins déterminant, d’atteindre des fins autres que celles excipées ou d’éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’espèce (voir arrêt du 25 novembre 2014, Safa Nicu Sepahan/Conseil, T‑384/11, EU:T:2014:986, point 30 et jurisprudence citée).

186    En l’espèce, le requérant se borne à émettre des soupçons quant à l’existence d’un « abus de pouvoir » et n’explique pas en quoi le Conseil aurait poursuivi un autre objectif que celui qui ressort du considérant 6 de la décision 2015/1836, à savoir l’exercice d’une pression sur le régime syrien afin qu’il modifie sa politique de répression. En effet, le requérant n’a aucunement étayé ladite allégation, ni apporté le moindre indice ou argument au soutien de celle-ci.

187    Au vu de ce qui précède et s’agissant des actes initiaux et des actes de maintien de 2019, il y a lieu de rejeter le quatrième moyen.

 Sur les deuxième et troisième moyens, pris ensemble, tirés d’une violation du principe de proportionnalité, du droit de propriété et de la liberté d’exercer une activité économique

188    Premièrement, le requérant fait valoir que les mesures restrictives adoptées à son égard sont disproportionnées. En effet, compte tenu du fait qu’il serait privé de tout contact commercial international et qu’il serait de ce fait exclu de son environnement professionnel, il lui serait difficilement possible d’exercer son métier. En pratique, les mesures restrictives l’empêcheraient d’exercer toute activité professionnelle et d’effectuer toute opération économique dans sa vie professionnelle et privée.

189    Deuxièmement, il estime, en substance, que les actes attaqués violent son droit de propriété ainsi que sa liberté d’exercer une activité économique, ce qui constituerait également une violation du premier protocole additionnel de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

190    Troisièmement, le requérant fait valoir, dans les premier et second mémoires en adaptation, que la prorogation des mesures restrictives adoptées à son égard en vertu, respectivement, des actes de maintien de 2019 et des actes de maintien de 2020 aggrave les conséquences disproportionnées desdites mesures pour lui.

191    Le Conseil conteste les arguments du requérant.

192    Il convient de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence que les droits fondamentaux invoqués par le requérant, à savoir le droit de propriété, consacré à l’article 17 de la Charte, et la liberté d’exercer une activité économique, consacré aux articles 15 et 16 de la Charte, ne sont pas des prérogatives absolues et que leur exercice peut faire l’objet de restrictions justifiées par des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union. Ainsi, toute mesure restrictive économique ou financière comporte, par définition, des effets qui affectent les droits de propriété et le libre exercice des activités professionnelles de la personne ou de l’entité qu’elle vise, causant ainsi des préjudices à cette dernière. L’importance des objectifs poursuivis par les mesures restrictives en cause est toutefois de nature à justifier des conséquences négatives, même considérables, pour les personnes ou les entités concernées (voir, en ce sens, arrêt du 25 mars 2015, Central Bank of Iran/Conseil, T‑563/12, EU:T:2015:187, point 115).

193    De plus, si le respect des droits fondamentaux constitue une condition de la légalité des actes de l’Union, selon une jurisprudence constante, ces droits fondamentaux ne jouissent pas, en droit de l’Union, d’une protection absolue, mais doivent être pris en considération par rapport à leur fonction dans la société. Par conséquent, des restrictions peuvent être apportées à l’usage de ces droits, à condition qu’elles répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union et ne constituent pas, au regard du but poursuivi, une intervention démesurée et intolérable qui porterait atteinte à la substance même des droits ainsi garantis (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 97 et jurisprudence citée).

194    En outre, il résulte d’une jurisprudence constante que le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union et qui est repris à l’article 5, paragraphe 4, TUE, exige que les moyens mis en œuvre par une disposition du droit de l’Union soient de nature à permettre que soient atteints les objectifs légitimes poursuivis par la réglementation concernée et n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre lesdits objectifs [voir, en ce sens, arrêts du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 122 ; du 25 juin 2015, Iranian Offshore Engineering & Construction/Conseil, T‑95/14, EU:T:2015:433, point 60 (non publié), et du 14 mars 2017, Bank Tejarat/Conseil, T‑346/15, non publié, EU:T:2017:164, point 149].

195    S’agissant des actes initiaux et des actes de maintien de 2019, en ce qui concerne le droit de propriété et la liberté d’exercer une activité économique du requérant, il convient, certes, de relever que ces droits sont restreints du fait des mesures restrictives prises à son égard, dès lors qu’il ne peut pas, notamment, disposer de ses fonds éventuellement situés sur le territoire de l’Union, ni les transférer vers l’Union, sauf en vertu d’autorisations particulières.

196    Cependant, en l’occurrence, l’adoption de mesures restrictives à l’encontre du requérant revêt un caractère adéquat, dans la mesure où elle s’inscrit dans un objectif d’intérêt général aussi fondamental pour la communauté internationale que la protection des populations civiles. En effet, le gel de fonds, d’avoirs financiers et d’autres ressources économiques ainsi que l’interdiction d’entrer sur le territoire de l’Union concernant des personnes identifiées comme étant impliquées dans le soutien du régime syrien ne sauraient, en tant que tels, passer pour inadéquats (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 100 et jurisprudence citée).

197    Quant au caractère prétendument disproportionné de l’inscription du nom du requérant sur les listes figurant aux annexes des actes de maintien de 2019, il convient de rappeler que l’article 28, paragraphe 6, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, ainsi que l’article 16 du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828, prévoient la possibilité, d’une part, d’autoriser l’utilisation de fonds gelés pour faire face à des besoins essentiels ou satisfaire à certains engagements et, d’autre part, d’accorder des autorisations spécifiques permettant de dégeler des fonds, d’autres avoirs financiers ou d’autres ressources économiques (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 364, et du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 127).

198    Il en résulte que, étant donné l’importance primordiale de la protection des populations civiles en Syrie, les restrictions aux droits du requérant éventuellement causées par les actes initiaux et les actes de maintien de 2019 sont justifiées par un objectif d’intérêt général et ne sont pas disproportionnées au regard des buts visés.

199    Enfin, concernant la prolongation de l’application dans le temps des mesures restrictives adoptées à l’égard du requérant en vertu des actes de maintien de 2019, qui aggraverait les conséquences disproportionnées desdites mesures pour ce dernier, il y a lieu de constater que, dans le cadre de telles mesures restrictives, le Conseil est appelé à procéder à un réexamen périodique, conformément à l’article 34, deuxième et troisième phrases, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, ainsi qu’à l’article 32, paragraphe 4, du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828, qui comporte à chaque fois la possibilité pour la personne ou l’entité concernée d’opposer ses arguments et de soumettre des éléments factuels corroborant ses allégations (voir, en ce sens, arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil, C‑241/19 P, EU:C:2020:545, points 106 et 107).

200    Dès lors, c’est à bon droit, sur la base d’un réexamen du maintien du nom du requérant sur les listes figurant aux annexes des actes de maintien de 2019, que le Conseil a décidé de proroger ces mesures restrictives jusqu’au 1er juin 2020.

201    Au vu de l’ensemble de ce qui précède et s’agissant des actes initiaux et des actes de maintien de 2019, il y a lieu de rejeter les deuxième et troisième moyens, pris ensemble et, partant, le recours.

 Conclusion sur le recours et les effets dans le temps de l’annulation des actes de maintien de 2020

202    Il résulte de l’examen des six moyens soulevés par le requérant à l’appui de son recours qu’il convient de rejeter ce dernier en ce qu’il tend à obtenir l’annulation des actes initiaux et des actes de maintien de 2019. En revanche, en raison de l’accueil du premier moyen, tiré d’erreurs d’appréciation, en ce qui concerne les actes de maintien de 2020, il y a lieu d’accueillir le recours en ce qu’il tend à obtenir l’annulation de ces actes en tant qu’ils concernent le requérant.

203    À cet égard, le Conseil a demandé, dans le cadre de son troisième chef de conclusions, que, dans l’hypothèse où le Tribunal annulerait les actes attaqués en ce qu’ils visent le requérant, le Tribunal ordonne le maintien des effets de la décision d’exécution 2019/87 ainsi que des décisions 2019/806 et 2020/719 en tant que celles-ci concernent le requérant, jusqu’à la prise d’effet de l’annulation partielle des règlements d’exécution 2019/85, 2019/798 et 2020/716 en tant qu’ils concernent le requérant.

204    Tout d’abord, s’agissant du règlement d’exécution 2020/716, il doit être rappelé que, en vertu de l’article 60, second alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, par dérogation à l’article 280 TFUE, les décisions du Tribunal annulant un règlement ne prennent effet qu’à compter de l’expiration du délai de pourvoi visé à l’article 56, premier alinéa, dudit statut ou, si un pourvoi a été introduit dans ce délai, à compter du rejet de celui-ci.

205    Dans ces circonstances, en l’absence de pourvoi, le Conseil dispose d’un délai de deux mois, augmenté du délai de distance de dix jours, à compter de la notification du présent arrêt pour remédier aux violations constatées en adoptant, le cas échéant, de nouvelles mesures restrictives à l’égard du requérant.

206    Ensuite, s’agissant de la décision 2020/719, il convient de constater que celle-ci a été modifiée par la décision (PESC) 2021/855 du Conseil, du 27 mai 2021, modifiant la décision 2013/255 (JO 2021, L 188, p. 90), qui a remplacé la liste à partir du 29 mai 2021 et a prorogé l’application des mesures restrictives, en ce qui concerne le requérant, jusqu’au 1er juin 2022.

207    Partant, à ce jour, le requérant fait l’objet d’une nouvelle mesure restrictive. Il s’ensuit que l’annulation de la décision 2020/719, en ce qu’elle vise le requérant, n’entraîne pas la disparition de l’inscription du nom de ce dernier sur la liste.

208    Par conséquent, il n’est pas nécessaire de maintenir les effets de la décision 2020/719.

 Sur les dépens

209    Aux termes de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens. Toutefois, si cela apparaît justifié au vu des circonstances de l’espèce, le Tribunal peut décider que, outre ses propres dépens, une partie supporte une fraction des dépens de l’autre partie.

210    En l’espèce, il y a lieu de décider que le Conseil doit supporter, outre ses propres dépens, la moitié des dépens du requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision (PESC) 2020/719 du Conseil, du 28 mai 2020, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie, et le règlement d’exécution (UE) 2020/716 du Conseil, du 28 mai 2020, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie, sont annulés en tant qu’ils concernent M. Bashar Assi.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      Le Conseil de l’Union européenne supportera, outre ses propres dépens, la moitié de ceux de M. Assi.

4)      M. Assi supportera la moitié de ses propres dépens.

Gervasoni

Madise

Martín y Pérez de Nanclares

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 novembre 2021.

Signatures


Table des matières


Antécédents du litige et faits postérieurs à l’introduction du recours

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

Sur le sixième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense et du droit à un procès équitable

Sur le premier moyen, tiré d’erreurs d’appréciation

Considérations liminaires

Sur les éléments de preuve soumis par le Conseil

Sur la pertinence des éléments de preuve produits par le Conseil

Sur la fiabilité des éléments de preuve produits par le Conseil

Sur le statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie

– Sur le statut de partenaire fondateur de Fly Aman

– Sur le statut de président du conseil d’administration d’Aman Dimashq

– Sur la participation du requérant, en tant que président du conseil d’administration d’Aman Dimashq, coentreprise active dans la construction du projet Marota City, à un projet immobilier et commercial haut de gamme appuyé par le régime

– Sur le statut d’employé d’Aman Holding

– Sur le statut de membre fondateur d’Aman Facilities avec et pour le compte de M. Foz

– Conclusion sur le statut d’homme d’affaires influent exerçant ses activités en Syrie du requérant

Sur l’association avec le régime syrien

Sur le quatrième moyen, tiré d’un « abus de pouvoir »

Sur les deuxième et troisième moyens, pris ensemble, tirés d’une violation du principe de proportionnalité, du droit de propriété et de la liberté d’exercer une activité économique

Conclusion sur le recours et les effets dans le temps de l’annulation des actes de maintien de 2020

Sur les dépens


*      Langue de procédure : l’anglais.


1      Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.