Language of document : ECLI:EU:T:2023:375

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre élargie)

5 juillet 2023 (*)

« Fonction publique – Agents temporaires – Recrutement – Contrat d’engagement – Article 2, sous b), du RAA – Rejet de candidature – Promotion – Reclassement – Nouveau contrat – Expiration du contrat – Article 8, deuxième alinéa, et article 10, paragraphe 3, du RAA – Erreur de droit – Égalité de traitement – Recours en annulation – Recevabilité »

Dans l’affaire T‑223/21,

SE, représenté par Me L. Levi, avocate,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. T. Bohr, L. Vernier et Mme I. Melo Sampaio, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre élargie),

composé de MM. R. da Silva Passos, président, S. Gervasoni, Mmes N. Półtorak (rapporteure), I. Reine et T. Pynnä, juges,

greffier : M. P. Cullen, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 19 janvier 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE, le requérant, SE, demande, d’une part, l’annulation de la décision de la Commission européenne du 4 août 2020 rejetant sa candidature au poste vacant publié sous la référence COM/2020/1474 (ci-après la « décision de rejet de candidature ») et de la réponse du 28 octobre 2020 à sa demande fondée sur l’article 90, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») et relative à son éligibilité à une promotion, un reclassement et une affectation à un autre poste et, d’autre part, la réparation du préjudice qu’il aurait subi du fait de ces décisions.

 Antécédents du litige

2        Le 16 mai 2018, le requérant est entré en fonctions à la Commission en tant qu’agent temporaire de grade AST 3 sur le fondement de l’article 2, sous b), du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le « RAA »), pour une période de trois ans (ci-après le « contrat initial »). Le 18 janvier 2021, le contrat initial a, par un avenant, été prorogé pour une période de deux ans, arrivant à son terme le 15 mai 2023.

3        À compter de la date de son engagement et jusqu’au 30 juin 2018, le requérant a été affecté à l’unité « [confidentiel] (1) » en qualité d’« [confidentiel] ». Le 1er juillet 2018, en raison d’une réorganisation de la direction générale (DG) « [confidentiel] », il a été réaffecté au sein de la même unité en qualité d’« [confidentiel] ».

4        Le 1er avril 2020, un emploi permanent du groupe de fonctions administrateur (AD) est devenu disponible au sein de l’unité du requérant. Ce dernier s’est porté candidat à ce poste ouvert aux candidatures par l’avis de vacance COM/2020/816.

5        Le 15 mai 2020, le chef d’unité du requérant a informé ce dernier que la DG « Ressources humaines et sécurité » avait émis une objection quant à sa candidature au motif que, en vertu de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA, un agent temporaire, tel que lui, engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, ne pouvait avoir qu’un seul contrat de ce type au cours de sa carrière.

6        Le 29 juin 2020, le requérant a introduit une demande, en vertu de l’article 90, paragraphe 1, du statut (ci-après la « demande du 29 juin 2020 »), afin d’obtenir une position définitive de l’administration sur la question de savoir, notamment, s’il était éligible à une promotion, à un reclassement ou à une affectation à un emploi d’un grade supérieur et s’il pouvait poser sa candidature et être affecté à d’autres emplois d’agent temporaire au sein de la Commission.

7        Le 10 juillet 2020, le requérant a présenté sa candidature à un autre emploi permanent du groupe de fonctions AD devenu vacant dans son unité et faisant l’objet de l’avis de vacance COM/2020/1474 (ci-après le « poste litigieux »).

8        Le 24 juillet 2020, une note a été rédigée par le chef d’unité du requérant proposant que, compte tenu du fait qu’aucun candidat approprié, interne ou externe, n’avait présenté sa candidature, le requérant soit recruté au poste litigieux.

9        Le 29 juillet 2020, le chef d’unité du requérant a oralement indiqué à ce dernier que la DG « Ressources humaines et sécurité » émettait des objections quant à sa candidature au poste litigieux en raison de son statut d’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA.

10      Le 4 août 2020, en raison d’une erreur d’encodage du nom du requérant, une notification de rejet de sa candidature au poste litigieux a été envoyée, par le biais du système informatique de gestion du personnel de la Commission dénommé « SysPer 2 », à une adresse électronique erronée. Une copie de cette décision a été transmise au requérant par courriel le 4 mars 2021.

11      Le 10 septembre 2020, après que le requérant a sollicité des renseignements sur l’état d’avancement de sa candidature, la cheffe d’unité adjointe de la DG « Ressources humaines et sécurité » l’a informé, par retour de courriel, qu’il « n’[était] pas possible pour un agent temporaire de la Commission d’obtenir un second contrat en qualité d’agent temporaire de la Commission durant sa carrière » et l’a invité à attendre les conclusions de l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci-après l’« AHCC ») quant à la demande du 29 juin 2020.

12      Le 15 septembre 2020, le requérant a appris qu’une autre personne avait pris ses fonctions au poste litigieux.

13      Le 16 septembre 2020, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut afin de contester la décision de rejet de candidature (ci-après la « réclamation R/440/20 »).

14      Le 28 octobre 2020, le requérant a reçu de l’administration une réponse à la demande du 29 juin 2020 (ci-après la « réponse du 28 octobre 2020 »).

15      Le 2 novembre 2020, le requérant a introduit une réclamation, en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut, contre la réponse du 28 octobre 2020 (ci-après la « réclamation R/507/20 »).

16      Le 3 novembre 2020, le requérant a formulé des observations et moyens supplémentaires dans le cadre de la réclamation R/440/20.

17      Par une décision du 18 janvier 2021, l’administration a rejeté la réclamation R/440/20 (ci-après la « décision de rejet de la réclamation R/440/20 »).

18      Le 19 janvier 2021, après avoir pris connaissance de la décision de rejet de la réclamation R/440/20, le requérant a saisi le service de médiation de la Commission afin que celui-ci intervienne dans le cadre de la réclamation R/507/20 et s’assure que la Commission examine bien les principales questions soulevées.

19      Le 3 mars 2021, la Commission a adopté une décision d’irrecevabilité de la réclamation R/507/20, laquelle examine néanmoins à titre subsidiaire certains arguments du requérant (ci-après la « décision de rejet de la réclamation R/507/20 »).

 Conclusions des parties

20      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de rejet de candidature ;

–        annuler la réponse du 28 octobre 2020 ;

–        annuler, pour autant que nécessaire, la décision de rejet de la réclamation R/440/20 et la décision de rejet de la réclamation R/507/20 ;

–        condamner la Commission à réparer le préjudice matériel qu’il a subi en raison de la perte d’une chance d’être nommé ou affecté au poste litigieux dès le 1er septembre 2020 ;

–        condamner la Commission à réparer le préjudice matériel, estimé à 24 245 euros, qu’il a subi en raison de la perte d’une chance d’être promu à partir du 16 mai 2020 ;

–        condamner la Commission à réparer le préjudice matériel qu’il a subi en raison de la perte d’une chance de devenir fonctionnaire titulaire en participant à des concours internes réservés aux agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA de niveau AD ;

–        condamner la Commission aux dépens.

21      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme manifestement irrecevable ;

–        en tout état de cause, rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur l’objet du litige

22      Le requérant demande au Tribunal, outre l’annulation de la décision de rejet de candidature et de la réponse du 28 octobre 2020, l’annulation, pour autant que nécessaire, des décisions de rejet des réclamations R/440/20 et R/507/20.

23      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, des conclusions en annulation formellement dirigées contre la décision de rejet d’une réclamation ont, dans le cas où cette décision est dépourvue de contenu autonome, pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée (voir arrêt du 5 juin 2019, Bernaldo de Quirós/Commission, T‑273/18, non publié, EU:T:2019:371, point 20 et jurisprudence citée).

24      En effet, toute décision de rejet d’une réclamation, qu’elle soit implicite ou explicite, ne fait, si elle est pure et simple, que confirmer l’acte ou l’abstention dont le réclamant se plaint et ne constitue pas, prise isolément, un acte attaquable, de sorte que les conclusions dirigées contre cette décision sans contenu autonome eu égard à la décision initiale doivent être regardées comme dirigées contre l’acte initial (arrêt du 12 septembre 2019, XI/Commission, T‑528/18, non publié, EU:T:2019:594, point 20).

25      Cependant, une décision explicite de rejet d’une réclamation peut, eu égard à son contenu, ne pas avoir un caractère confirmatif de l’acte contesté par la partie requérante. Tel est le cas lorsque la décision de rejet de la réclamation contient un réexamen de la situation de la partie requérante, en fonction d’éléments de droit et de fait nouveaux, ou lorsqu’elle modifie ou complète la décision initiale. Dans ces hypothèses, le rejet de la réclamation constitue un acte soumis au contrôle du juge, qui le prend en considération dans l’appréciation de la légalité de l’acte contesté, voire le considère comme un acte faisant grief se substituant à ce dernier (voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2019, XI/Commission, T‑528/18, non publié, EU:T:2019:594, point 21).

26      En premier lieu, s’agissant des conclusions en annulation de la décision de rejet de candidature, il convient d’observer que la décision de rejet de la réclamation R/440/20 confirme le refus de la Commission de considérer la candidature du requérant au poste litigieux comme étant éligible, tout en précisant les motifs de ce refus. Dès lors, il y a lieu de considérer que le présent recours a pour effet de saisir le Tribunal des conclusions aux fins d’annulation de la décision de rejet de candidature, dont la légalité doit être examinée en prenant en considération la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation R/440/20.

27      En second lieu, s’agissant des conclusions en annulation de la réponse du 28 octobre 2020, il y a lieu de relever que l’AHCC rejette comme irrecevable la réclamation R/507/20, mais elle examine néanmoins, à titre subsidiaire, les arguments du requérant soulevés contre la réponse du 28 octobre 2020. Pour ces raisons, il convient de prendre lesdits motifs en considération dans l’appréciation de la légalité de la réponse du 28 octobre 2020 au sens de la jurisprudence citée au point 25 ci-dessus.

 Sur les conclusions en annulation de la décision de rejet de candidature

 Sur la recevabilité

28      Il convient de rappeler que la Commission a excipé de l’irrecevabilité des présentes conclusions en vertu de l’article 130, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, alléguant, en substance, que le requérant n’avait pas d’intérêt à agir en annulation de la décision de rejet de candidature.

29      Toutefois, il y a lieu de préciser que, lors de l’audience de plaidoiries, la Commission a indiqué qu’elle renonçait à ses conclusions portant sur l’irrecevabilité des conclusions en annulation de la décision de rejet de candidature, ce dont il a été pris acte dans le procès-verbal de l’audience.

 Sur le fond

30      À l’appui de ses conclusions en annulation de la décision de rejet de candidature, le requérant invoque quatre moyens, tirés, le premier, d’un défaut de notification de la décision et d’un défaut de motivation, le deuxième, d’une interprétation incorrecte de l’article 8, deuxième alinéa, et de l’article 10, paragraphe 3, du RAA et de la violation desdits articles, le troisième, du non‑respect de pratiques administratives constantes, d’un traitement inégal et d’une discrimination fondée sur l’âge et, le quatrième, d’un défaut de transparence, d’une violation du droit d’être entendu et du droit à un recours effectif.

–       Sur le premier moyen, tiré d’un défaut de notification de la décision de rejet de candidature et d’un défaut de motivation

31      Le requérant soutient n’avoir jamais reçu de notification formelle concernant la suite donnée à sa candidature au poste litigieux, en violation de l’obligation prévue à l’article 25, deuxième alinéa, du statut et du principe de bonne administration consacré à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »). Selon lui, ce n’est que le 15 septembre 2020 qu’il a appris que sa candidature avait été rejetée lorsqu’une autre personne a pris ses fonctions au poste litigieux en tant qu’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA. Ainsi, il ne saurait être considéré que la décision de rejet de la réclamation R/440/20 ait remédié au défaut de motivation de la décision de rejet de candidature.

32      La Commission conteste l’argumentation du requérant.

33      À titre liminaire, il y a lieu de constater que le requérant soutient, en substance, que les motifs de la décision de rejet de candidature ne lui ont pas été communiqués en raison de la notification erronée de ladite décision. Il vise donc à démontrer que la Commission a méconnu son obligation de motivation.

34      Selon une jurisprudence constante, l’obligation de motivation prescrite par l’article 25, deuxième alinéa, du statut, qui ne constitue que la reprise de l’obligation générale édictée à l’article 296, second alinéa, TFUE, a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de l’acte lui faisant grief et l’opportunité d’introduire un recours devant le Tribunal et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de l’acte (voir arrêt du 16 octobre 2019, ZV/Commission, T‑684/18, non publié, EU:T:2019:748, point 72 et jurisprudence citée).

35      Le caractère suffisant de la motivation doit être apprécié en fonction des circonstances concrètes de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que le destinataire peut avoir à recevoir des explications (arrêt du 9 juillet 2019, VY/Commission, T‑253/18, non publié, EU:T:2019:488, point 49). En particulier, une décision est suffisamment motivée dès lors qu’elle est intervenue dans un contexte connu du fonctionnaire concerné, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (arrêt du 29 septembre 2005, Napoli Buzzanca/Commission, T‑218/02, EU:T:2005:343, point 64).

36      Il y a lieu de rappeler que l’AHCC n’est pas tenue de motiver les décisions de ne pas retenir une candidature. En revanche, elle est tenue de motiver sa décision portant rejet d’une réclamation déposée en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut par un candidat, la motivation de cette décision étant censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation était dirigée (voir arrêt du 9 juillet 2019, VY/Commission, T‑253/18, non publié, EU:T:2019:488, point 47 et jurisprudence citée).

37      Le requérant prétend qu’il n’a jamais reçu, par le biais de SysPer 2, de notification de l’unité 5 « Centre de gestion des comptes » de la DG « Ressources humaines et sécurité » lui indiquant qu’il n’était pas éligible au poste litigieux. Par ailleurs, à supposer qu’il ait reçu une telle notification, le contenu de celle-ci serait insuffisant pour l’informer correctement.

38      À cet égard, il convient d’observer qu’il ressort du dossier que la Commission a admis avoir commis une erreur dans l’encodage de SysPer 2 du destinataire de la notification de la décision de rejet de candidature. Bien que l’envoi de ladite notification ait été effectué le 4 août 2020, celle-ci n’est pas parvenue au requérant à cette date, puisqu’elle ne lui a été communiquée que le 4 mars 2021.

39      Dans ces conditions, il y a lieu de se prononcer sur la question de savoir si, en présence d’une communication tardive de la décision de rejet de candidature, le requérant a néanmoins été mis en mesure de comprendre les motifs ayant justifié que la Commission considère sa candidature au poste litigieux comme inéligible.

40      Premièrement, il convient de noter que le chef d’unité du requérant a oralement informé ce dernier, le 29 juillet 2020, que la DG « Ressources humaines et sécurité » ou l’AHCC émettaient des objections quant à sa nomination au poste litigieux, en raison de son statut d’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA.

41      Deuxièmement, le 10 septembre 2020, après avoir sollicité des renseignements sur l’état d’avancement de sa candidature, le requérant a reçu une brève communication de la DG « Ressources humaines et sécurité » au sujet de sa candidature au poste litigieux (ci-après le « courriel du 10 septembre 2020 »). Celui-ci indiquait notamment au requérant qu’« il n’[était] pas possible pour un agent temporaire de la Commission d’obtenir un second contrat en qualité d’agent temporaire de la Commission durant sa carrière ».

42      Troisièmement, le requérant, comme il le reconnaît dans la requête, a eu connaissance le 15 septembre 2020, alors qu’il apprenait qu’une autre personne avait pris ses fonctions au poste litigieux, que sa candidature avait été rejetée.

43      Compte tenu de ce qui précède, au moment où le requérant a pris connaissance de l’existence de la décision de rejet de candidature, c’est-à-dire, au plus tard le 15 septembre 2020, le contexte dans lequel ladite décision est intervenue était connu par lui, au sens de la jurisprudence citée au point 35 ci-dessus.

44      À cet égard, en particulier, le courriel du 10 septembre 2020 comporte une motivation qui n’en reste pas moins précise et circonstanciée et explique le motif faisant obstacle à l’éligibilité du requérant au poste litigieux, à savoir, qu’il ne peut obtenir un second contrat d’agent temporaire sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA au sein de la Commission.

45      La circonstance selon laquelle le requérant a été en mesure de contester, dans la réclamation R/440/20, l’interprétation donnée par la Commission de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA démontre qu’il avait compris que le motif de rejet de sa candidature était lié à son statut d’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA.

46      Enfin, étant donné que la décision de rejet de candidature ne devait pas nécessairement être motivée, conformément à la jurisprudence citée au point 36 ci-dessus, il suffit, pour écarter l’argumentation du requérant tirée d’un défaut de motivation, de constater que, le 18 janvier 2021, la Commission a adopté une décision explicite de rejet de la réclamation R/440/20 et que, dans cette décision, l’AHCC a donné une indication suffisante au requérant pour apprécier le bien-fondé de la décision de rejet de candidature et lui permettre d’en contester la légalité. De même, la motivation contenue dans la décision de rejet de la réclamation R/440/20 permet au Tribunal d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision de rejet de candidature.

47      S’agissant de l’allégation du requérant selon laquelle l’auteur du courriel du 10 septembre 2020 n’était pas compétent pour adopter la décision de rejet de candidature, il y a lieu de relever que ce courriel n’est pas une décision de rejet de candidature, mais confirme et explique les motifs de la décision de rejet de candidature. Il convient également de tenir compte du contexte connu par le requérant, qui lui a permis, comme cela est constaté au point 43 ci-dessus, de comprendre la portée de la mesure prise à son égard. Partant, force est de constater que cet argument n’est pas pertinent aux fins de l’examen du caractère suffisant de la motivation.

48      Partant, il y a lieu de rejeter le premier moyen.

–       Sur le deuxième moyen, tiré d’une interprétation incorrecte de l’article 8, deuxième alinéa, et de l’article 10, paragraphe 3, du RAA

49      Le requérant fait valoir que la Commission a violé l’article 8, deuxième alinéa, du RAA en ce qu’elle a estimé qu’il ne pouvait conclure, en tant qu’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, un second contrat d’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA au sein de la Commission.

50      À cet égard, le requérant soutient, en substance, que, contrairement à ce qu’affirme la Commission, il ne ressort d’aucune disposition du RAA qu’il n’est pas possible pour un agent temporaire de la Commission engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA d’obtenir un deuxième contrat en cette même qualité au cours de sa carrière. En particulier, il ne ressortirait pas de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA, qu’un agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA ne puisse conclure qu’un seul contrat d’agent temporaire sur ce fondement.

51      Le requérant ajoute que, à supposer que l’article 8, deuxième alinéa, du RAA limite d’une manière ou d’une autre le nombre de contrats pendant l’engagement initial, cet article ne s’appliquerait pas dès lors qu’il pourrait toujours, en vertu de l’article 10, paragraphe 3, du RAA, être nommé à un nouvel emploi, y compris à un grade supérieur, par le biais d’un avenant à son contrat, et donc sans qu’il soit nécessaire de conclure un nouveau contrat.

52      La Commission conteste les arguments du requérant.

53      La Commission soutient que le poste litigieux était un poste permanent qui, en ce qui concernait les agents temporaires, ne pouvait donc être ouvert qu’à des agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, à l’exclusion des autres catégories d’agents temporaires. Or, dans la mesure où le requérant était d’ores et déjà un agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, il ne pouvait obtenir un autre contrat d’agent temporaire engagé sur ce même fondement au sein de la Commission, conformément à l’article 8, deuxième alinéa, du RAA. En outre, l’engagement du requérant audit poste n’aurait été possible que si celui-ci n’avait pas nécessité la conclusion d’un nouveau contrat.

54      À titre liminaire, il convient d’observer que, au moment où le requérant a introduit sa candidature au poste litigieux, il exerçait ses fonctions dans le cadre d’un contrat en tant qu’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA de grade AST 3 pour une période initiale de trois ans, avant que celle-ci ne soit prorogée pour une période de deux ans, dont le terme était prévu en mai 2023. C’est donc au cours du contrat initial que le requérant a présenté sa candidature au poste litigieux, correspondant à un emploi permanent d’administrateur vacant au sein du service dans lequel il travaillait au moment de l’introduction de sa candidature.

55      Dans la décision de rejet de candidature, l’AHCC a considéré que la candidature du requérant au poste litigieux était inéligible au motif que son engagement audit poste aurait nécessité la conclusion d’un nouveau contrat d’agent temporaire sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, ce qui, selon la Commission, aurait été contraire à l’article 8, deuxième alinéa, du RAA. Ainsi, la Commission fonde exclusivement sa décision sur l’interprétation qu’elle retient de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA.

56      Cette interprétation est contestée par le requérant, qui soutient que la Commission a commis une erreur de droit en considérant que l’article 8, deuxième alinéa, du RAA devait être interprété en ce sens qu’il s’opposait à ce qu’un agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA dont, à l’instar du requérant, le contrat initial était en cours puisse obtenir un autre contrat d’agent temporaire sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA.

57      Il convient de rappeler qu’il ressort d’une lecture combinée de l’article 1er bis, paragraphe 1, du statut et des articles 2 à 5 du RAA que les emplois permanents des institutions ont, en principe, vocation à être pourvus par des fonctionnaires et que ce n’est donc qu’à titre d’exception que de tels emplois peuvent être occupés par d’autres agents (voir arrêt du 13 juillet 2022, TL/Commission, T‑438/21, non publié, EU:T:2022:455, point 33 et jurisprudence citée).

58      Ainsi, si l’article 2, sous b), du RAA prévoit expressément que des agents temporaires peuvent être engagés en vue d’occuper un emploi permanent, cet article précise que cet engagement ne peut être que temporaire. En outre, aux termes de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA, dans sa version applicable au présent litige, l’engagement d’un agent visé à l’article 2, sous b) ou d), ne peut excéder quatre ans, mais peut être limité à toute durée inférieure et son contrat ne peut être renouvelé qu’une fois pour une durée de deux ans au plus, à condition que la possibilité de renouvellement ait été prévue dans le contrat initial, dans les limites fixées dans ce contrat. À l’issue de cette période, il est obligatoirement mis fin aux fonctions de l’agent en qualité d’agent temporaire au sens des présentes dispositions. À l’expiration de son contrat, l’agent ne peut occuper un emploi permanent de l’institution que s’il fait l’objet d’une nomination en qualité de fonctionnaire dans les conditions fixées par le statut.

59      Conformément à une jurisprudence constante, aux fins de l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union européenne, il convient de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également du contexte dans lequel elle s’inscrit et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie. La genèse d’une disposition du droit de l’Union peut également révéler des éléments pertinents pour son interprétation (voir arrêt du 7 septembre 2022, LR/BEI, T‑529/20, EU:T:2022:523, point 19 et jurisprudence citée).

60      En premier lieu, s’agissant de l’interprétation littérale de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA, reproduit au point 58 ci-dessus, il convient d’observer, d’emblée, que cet article ne prévoit aucune limitation explicite du nombre de contrats d’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA qu’un agent temporaire pourrait conclure pendant la durée totale cumulée de prestation de services d’un agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, qu’il fixe à six ans. Par ailleurs, la version anglaise de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA se réfère à plusieurs contrats d’engagement et non à un contrat unique s’agissant de l’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA. Ainsi, cette version utilise expressément le pluriel s’agissant des expressions « [t]heir contrats may be renewed » et « [o]n the expiry of their contracts ».

61      Toutefois, selon la Commission, il ressort de l’interprétation littérale de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA et, en particulier, de l’emploi des expressions « à l’issue de cette période » et « [à] l’expiration de son contrat » que le législateur de l’Union a entendu faire obstacle à ce qu’un agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA puisse, dès lors que son contrat d’agent temporaire fondé sur l’article 2, sous b), du RAA prenait fin, contracter un nouveau contrat d’agent temporaire sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA. Cela signifierait, sans équivoque, qu’un agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA ne peut pas obtenir un autre contrat d’agent temporaire sur ce même fondement pendant le reste de sa carrière. Dans cette perspective, lorsqu’un agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, qui n’a pas réussi un concours permettant une nomination en tant que fonctionnaire dans les conditions fixées par le statut, se porte candidat à un emploi permanent, il serait nécessairement inéligible, sauf s’il peut être établi que sa réaffectation ne nécessite pas la conclusion d’un nouveau contrat d’agent temporaire sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA.

62      De l’avis du requérant, l’expiration du contrat doit être distinguée de la cessation prématurée ou de la résiliation du contrat. À ce sujet, il considère que le terme « expiration » du contrat ne saurait être interprété en ce sens qu’il englobe la cessation anticipée ou la résiliation du contrat, quelle que soit la méthode d’interprétation utilisée. Cette interprétation serait corroborée par le libellé de l’article 47, sous b), du RAA.

63      Premièrement, s’agissant de l’expression « cette période », visée à l’article 8, deuxième alinéa, du RAA, il y a lieu de noter que celle-ci désigne la durée du contrat initial telle qu’elle est mentionnée dans la seconde phrase de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA, laquelle ne peut excéder quatre ans, éventuellement augmentée de la durée d’un renouvellement de deux ans au plus.

64      Par conséquent, il y a lieu de comprendre que le membre de phrase « à l’issue de cette période » désigne le terme de l’engagement de l’agent temporaire recruté sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, entendu soit, dans l’hypothèse de l’absence de renouvellement, comme l’échéance du contrat initial, soit, dans l’hypothèse de l’octroi d’un renouvellement, comme l’échéance de la prolongation accordée.

65      Or, au moment de l’adoption de la décision de rejet de candidature, le contrat d’agent temporaire du requérant fondé sur l’article 2, sous b), du RAA, qui n’avait pas encore été renouvelé, était toujours en cours et ce dernier ne se trouvait donc pas « à l’issue de cette période » au sens de ladite disposition.

66      Deuxièmement, s’agissant de l’expression « à l’expiration de son contrat » visée à l’article 8, deuxième alinéa, du RAA, en l’absence d’une définition, dans le statut, de la notion d’« expiration », il convient d’interpréter cette notion conformément à son sens habituel dans le langage courant (voir, en ce sens, arrêt du 7 septembre 2022, LR/BEI, T‑529/20, EU:T:2022:523, point 23 et jurisprudence citée).

67      Or, il y a lieu d’observer que, dans son sens usuel, le terme « expiration » vise le « terme d’un délai », soit, en l’espèce, le terme du délai pour lequel le contrat d’un agent temporaire a été conclu.

68      En deuxième lieu, l’interprétation contextuelle de l’article 8, deuxième alinéa, quatrième phrase, du RAA corrobore l’interprétation littérale de cette disposition.

69      En effet, il y a lieu de relever, à cet égard, que l’article 47, sous b), ii), du RAA dispose que, « [e]n cas de résiliation du contrat par l’institution, l’agent a droit à une indemnité égale au tiers de son traitement de base pour la période comprise entre la date de cessation de ses fonctions et la date à laquelle expirait son contrat ». Il établit ainsi une distinction entre la résiliation et l’expiration du contrat d’un agent temporaire.

70      Or, puisque, au sein d’un même acte, des expressions identiques doivent être interprétées de manière uniforme (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 septembre 2019, Peters, C‑700/17, EU:C:2019:753, point 18), il n’y a pas lieu de remettre en cause l’établissement, par le législateur, d’une différenciation entre la résiliation et l’expiration du contrat par les dispositions du statut.

71      Ainsi, contrairement à ce que prétend la Commission, la notion d’« expiration du contrat » évoquée à l’article 8, deuxième alinéa, quatrième phrase, du RAA n’est pas équivalente à la notion de « résiliation du contrat ».

72      Partant, dans l’hypothèse où, comme le soutient la Commission, l’engagement du requérant au poste litigieux aurait nécessairement entraîné la résiliation de son contrat d’agent temporaire conclu sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, l’article 8, deuxième alinéa, quatrième phrase, du RAA ne serait pas applicable à la situation du requérant.

73      Au regard de ce qui précède, il y a lieu de conclure qu’il ne ressort pas du libellé de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA qu’il ne serait pas possible, pour un agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, de conclure un nouveau contrat d’agent temporaire sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA pendant la durée de son contrat initial.

74      En troisième lieu, l’interprétation téléologique de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA confirme l’interprétation littérale et contextuelle de cette disposition.

75      Conformément à la jurisprudence citée au point 59 ci-dessus, il convient d’interpréter l’article 8, deuxième alinéa, du RAA au regard, notamment, de ses finalités et de celles sous-tendant plus généralement le RAA (voir, en ce sens, arrêt du 5 février 2014, Drakeford/EMA, F‑29/13, EU:F:2014:10, point 45).

76      Premièrement, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence citée au point 57 ci-dessus, les emplois permanents des institutions ont, en principe, vocation à être pourvus par des fonctionnaires et que ce n’est donc qu’à titre d’exception que de tels emplois peuvent être occupés par d’autres agents, tels que les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA.

77      Dans cette logique, l’article 3, paragraphe 1, de la décision C(2013) 9049 de la Commission, du 16 décembre 2013, relative à la politique d’engagement et d’emploi des agents temporaires dispose notamment que « [l]es emplois permanents étant destinés à la nomination de fonctionnaires, le total de tous les agents temporaires au titre de l’article 2, sous b), du RAA ne doit pas dépasser 3 % du nombre total d’emplois permanents autorisés à la Commission ». En outre, l’article 3, paragraphe 2, de ladite décision dispose que « [l]e recours à de tels engagements ne peut être autorisé qu’après une publication infructueuse de l’emploi conformément aux articles 4 et 29 du statut ».

78      Il en ressort que l’objectif principal de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA est de limiter le recours aux agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, lesquels occupent temporairement des emplois permanents ayant vocation à être occupés par des fonctionnaires, et que la durée maximale totale de six ans de la relation de travail d’un agent temporaire engagé en cette qualité sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA a pour objet de servir cet objectif.

79      Deuxièmement, en l’absence de disposition spécifique faisant obstacle à une telle approche, il convient de s’inspirer, pour l’interprétation de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA, de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, conclu le 18 mars 1999 (ci-après l’« accord-cadre »), qui figure en annexe à la directive 1999/70/CE du Conseil, du 28 juin 1999, concernant l’accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée (JO 1999, L 175, p. 43) (arrêt du 5 février 2014, Drakeford/EMA, F‑29/13, EU:F:2014:10, point 44).

80      À cet égard, il convient de rappeler que la circonstance selon laquelle une directive ne lie pas, comme telle, les institutions ou les agences ne saurait exclure que ces dernières doivent en tenir compte de manière indirecte dans leurs relations avec leurs fonctionnaires ou agents (arrêt du 13 avril 2011, Scheefer/Parlement, F‑105/09, EU:F:2011:41, point 54).

81      En outre, la directive 1999/70 et l’accord-cadre qu’elle vise à mettre en œuvre sont, dans les limites fixées par la jurisprudence, invocables par les justiciables à l’encontre des institutions de l’Union aux fins, dans la mesure du possible, d’une interprétation des règles du statut et du RAA qui soit conforme aux exigences prévues par l’accord-cadre (voir, en ce sens, arrêt du 21 septembre 2011, Adjemian e.a./Commission, T‑325/09 P, EU:T:2011:506, point 57).

82      Il s’ensuit que le législateur, dans l’exercice du pouvoir législatif qu’il tire de l’article 336 TFUE pour arrêter le RAA, et l’AHCC, dans l’exercice du large pouvoir d’appréciation dont elle dispose, dans le cadre fixé par les dispositions du RAA, sont tenus, lors de l’adoption ou de la mise en œuvre des règles qui régissent les relations entre l’Union et ses agents, de prévenir les abus de droit pouvant résulter de l’utilisation de contrats d’engagement à durée déterminée successifs, conformément aux objectifs d’amélioration des conditions de vie et de travail des travailleurs ainsi que d’une protection sociale adéquate de ces derniers, visés à l’article 151 TFUE (arrêt du 21 septembre 2011, Adjemian e.a./Commission, T‑325/09 P, EU:T:2011:506, point 61).

83      Or, l’accord-cadre fait de la stabilité de l’emploi un élément majeur en matière de protection des travailleurs au sein de l’Union (arrêt du 8 mars 2012, Huet, C‑251/11, EU:C:2012:133, points 35 et 44). Plus précisément, la clause 5, paragraphe 1, de celui-ci tend spécifiquement à encadrer le recours successif aux contrats ou aux relations de travail à durée déterminée, considéré comme une source potentielle d’abus au détriment des travailleurs, en prévoyant un certain nombre de dispositions protectrices minimales destinées à éviter la précarisation de la situation des salariés. En particulier, la clause 5, paragraphe 1, sous c), de l’accord-cadre prescrit de fixer un nombre maximal de renouvellements de contrats ou de relations de travail à durée déterminée (voir arrêt du 5 février 2014, Drakeford/EMA, F‑29/13, EU:F:2014:10, point 44 et jurisprudence citée).

84      Il convient de relever que l’article 8 du RAA a déjà été jugé conforme à l’accord-cadre, en tant qu’il ne portait pas atteinte aux finalités et aux prescriptions minimales de celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 2012, AI/Cour de justice, F‑85/10, EU:F:2012:97, point 140).

85      Il doit être observé que l’article 8, deuxième alinéa, du RAA prévoit, d’une part, une durée maximale de l’engagement de l’agent temporaire visé à l’article 2, sous b), du RAA et, d’autre part, une limite quant au nombre de renouvellements qui peuvent être accordés à ce même agent, à savoir, en l’occurrence, un seul renouvellement.

86      Les objectifs poursuivis par l’établissement de ces deux limites doivent également être pris en compte aux fins de l’interprétation téléologique de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA.

87      En ce qui concerne la durée maximale de l’engagement, selon la jurisprudence, l’article 8, deuxième alinéa, du RAA, en fixant la durée maximale totale de la relation de travail d’un agent temporaire engagé au titre de l’article 2, sous b), du RAA, contient l’une des mesures énumérées à la clause 5 de l’accord-cadre visant à prévenir l’utilisation abusive de contrats à durée déterminée successifs, en l’occurrence celle qui est prévue au paragraphe 1, sous b), de ladite clause (arrêt du 11 juillet 2012, AI/Cour de justice, F‑85/10, EU:F:2012:97, point 138).

88      À cet égard, les parties ont confirmé lors de l’audience que la durée totale de l’engagement du requérant en tant qu’agent temporaire au titre de l’article 2, sous b), du RAA, qu’il fût ou non recruté au poste litigieux, ne pouvait excéder la période maximale de six ans prévue par l’article 8, deuxième alinéa, du RAA.

89      S’agissant de la limite quant au nombre de renouvellements possibles, ainsi que l’a reconnu la Commission lors de l’audience, l’article 8, deuxième alinéa, du RAA, en limitant le nombre de renouvellements du contrat de l’agent temporaire engagé au titre de l’article 2, sous b), du RAA, contient également une des mesures énumérées à la clause 5 de l’accord-cadre visant à prévenir l’utilisation abusive de contrats à durée déterminée successifs, en l’occurrence celle qui est prévue au paragraphe 1, sous c), de ladite clause, de sorte que la possibilité d’un renouvellement unique du contrat d’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA vise à garantir le respect, par l’institution qui l’engage, de la protection de l’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA contre les abus qui pourraient résulter du recours à de nombreux contrats courts à durée déterminée successifs (voir, en ce sens, arrêt du 21 septembre 2011, Adjemian e.a./Commission, T‑325/09 P, EU:T:2011:506, point 66).

90      Or, il y a lieu de constater que la possibilité pour l’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA de conclure un nouveau contrat d’agent temporaire sur le même fondement pour une durée n’excédant pas la période maximale de six ans prévue à l’article 8, deuxième alinéa, du RAA n’enfreint pas, en tant que tel, l’objectif de cette disposition tendant à limiter dans le temps l’occupation des emplois permanents par les agents temporaires.

91      Par ailleurs, rien n’indique que la conclusion d’un nouveau contrat aurait entraîné un risque d’abus de droit au détriment du requérant pouvant résulter de l’utilisation de contrats d’engagement à durée déterminée successifs.

92      Partant, l’article 8, deuxième alinéa, du RAA ne s’oppose pas à la possibilité pour un agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA de conclure un nouveau contrat d’agent temporaire sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, dès lors que la limitation dans le temps de six ans prévue par ladite disposition est respectée.

93      Cette interprétation de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA est également conforme à la pratique d’autres institutions et agences de l’Union. En effet, en réponse à une mesure d’organisation de la procédure, la Commission a fourni les résultats d’une consultation qu’elle avait engagée en juin 2022 auprès d’autres institutions et agences de l’Union au sujet de la possibilité pour un agent temporaire engagé sur la base de l’article 2, sous b), du RAA de conclure un nouveau contrat en cette qualité dans le délai maximum prévu par l’article 8, deuxième alinéa, du RAA. Lesdits résultats montrent que la majorité des institutions et agences sollicitées envisagent ou prévoient une telle possibilité.

94      Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de conclure que la décision de rejet de candidature, tenant la candidature du requérant pour inéligible, est fondée sur une interprétation erronée de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA.

95      Partant, il y convient d’accueillir le présent moyen et d’annuler la décision de rejet de candidature sans qu’il y ait lieu d’examiner les autres arguments du présent moyen ainsi que les autres moyens présentés au soutien des conclusions en annulation à l’encontre de la décision de rejet de candidature.

 Sur les conclusions en annulation de la réponse du 28 octobre 2020

 Sur la recevabilité

96      La Commission a présenté une exception d’irrecevabilité des présentes conclusions en vertu de l’article 130, paragraphe 1, du règlement de procédure, au motif que la réponse du 28 octobre 2020 ne constituerait pas un acte faisant grief au requérant.

97      Premièrement, la Commission soutient que la réponse du 28 octobre 2020 n’est qu’une simple réponse aux questions soumises par le requérant dans la demande du 29 juin 2020 et ne vise qu’à donner une interprétation des dispositions statutaires évoquées. Ainsi, les réponses apportées ne modifieraient pas le statut juridique du requérant.

98      Deuxièmement, la Commission soutient qu’elle n’a pas manqué d’agir en n’organisant pas un exercice de promotion pour les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA et que, dans l’hypothèse où le requérant souhaitait attaquer l’absence de promotion, il lui revenait de contester la décision de promotion qui ne comportait pas son nom.

99      Le requérant soutient que son recours est recevable.

100    Il y a lieu de relever que, dans la réponse du 28 octobre 2020, l’AHCC s’exprime, à la demande du requérant, sur l’application de dispositions légales à l’égard de celui-ci et sur quatre questions, portant, principalement, sur l’application de l’article 45, paragraphe 1, du statut, des articles 10 et 15 du RAA et de la clause 4, paragraphe 1, de l’accord-cadre à sa situation individuelle.

101    À cet égard, premièrement, l’AHCC indique que les articles 10 et 15 du RAA ne confèrent pas aux membres du personnel un « droit direct » à la promotion, pas plus qu’ils ne font naître à l’attention de l’administration une quelconque obligation de procéder à des exercices de reclassement des agents temporaires. Deuxièmement, l’AHCC précise que la conclusion d’un second contrat sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA n’est pas possible dans le cas du requérant et que, en principe et sauf circonstances exceptionnelles, la réaffectation du requérant à un autre emploi permanent que celui qu’il occupait n’est pas possible. Troisièmement, elle expose que l’article 45, paragraphe 1, du statut ne s’applique pas directement à sa situation et, quatrièmement, que l’accord-cadre n’est pas applicable dans le cas du requérant dans la mesure où sa situation factuelle, en tant qu’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, est différente de celle des agents temporaires recrutés sur la base d’autres dispositions légales.

102    Ainsi, la réponse du 28 octobre 2020 aborde essentiellement de deux sujets ayant trait, premièrement, à la possibilité de « promouvoir » ou de « reclasser » l’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA et, deuxièmement, à la possibilité pour l’agent temporaire recruté sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA d’obtenir un nouveau contrat, alors que son contrat est en cours.

103    Selon une jurisprudence constante, un acte faisant grief est celui qui produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter directement et immédiatement les intérêts de la partie requérante, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celle-ci, un tel acte devant émaner de l’autorité compétente et renfermer une prise de position définitive de l’administration (voir ordonnance du 10 septembre 2021, Kühne/Parlement, T‑691/20, non publiée, EU:T:2021:600, point 26 et jurisprudence citée).

104    S’agissant des conclusions en annulation de la réponse du 28 octobre 2020 visant les motifs exposant au requérant qu’il ne peut, au titre de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA, bénéficier d’un autre contrat d’agent temporaire sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, il y a lieu de relever que la motivation de l’AHCC à cet égard se contente de réitérer sa position, formulée dans la décision de rejet de candidature. Il s’ensuit que cette partie de la réponse du 28 octobre 2020, déjà précédée par l’adoption de la décision de rejet de candidature, ne modifie pas de façon caractérisée la situation juridique du requérant au sens de la jurisprudence citée au point 103 ci-dessus.

105    Il convient donc de rejeter comme irrecevables les conclusions en annulation de la réponse du 28 octobre 2020 visant les motifs exposant au requérant qu’il ne peut, au titre de l’article 8, deuxième alinéa, du RAA, bénéficier d’un autre contrat d’agent temporaire sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA.

106    Pour le reste des conclusions en annulation de la réponse du 28 octobre 2020, il convient de rappeler que le juge de l’Union est en droit d’apprécier, suivant les circonstances de chaque espèce, si une bonne administration de la justice justifie de rejeter au fond un recours sans statuer préalablement sur sa recevabilité (voir, en ce sens, arrêt du 26 février 2002, Conseil/Boehringer, C‑23/00 P, EU:C:2002:118, point 52).

107    Or, compte tenu des circonstances de l’espèce ainsi que du principe de bonne administration de la justice, il y a lieu d’examiner les conclusions en annulation de la réponse du 28 octobre 2020 en ce qui concerne la partie tenant à la possibilité de promouvoir ou de reclasser, au sein de la Commission, un agent temporaire sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA sans statuer préalablement sur la recevabilité de ces conclusions, dans la mesure où elles sont, en tout état de cause et pour les motifs exposés ci-après, non fondées.

 Sur le fond

108    À l’appui de ses conclusions en annulation de la réponse du 28 octobre 2020, le requérant invoque, en substance, deux moyens, tirés, le premier, d’une interprétation incorrecte et d’une violation de l’article 8, deuxième alinéa, et de l’article 10, paragraphe 3, du RAA et, le second, d’une violation du principe d’égalité de traitement.

–       Sur le premier moyen, tiré d’une interprétation incorrecte et d’une violation de l’article 8, deuxième alinéa, et de l’article 10, paragraphe 3, du RAA

109    Le requérant estime que la réponse de l’administration, devant selon lui s’interpréter comme un refus de promotion, de reclassement ou de nomination à un autre emploi, est manifestement erronée et constitue une violation de l’article 45 du statut et de l’article 8, deuxième alinéa, et de l’article 10, paragraphe 3, du RAA.

110    La Commission conteste l’argumentation du requérant.

111    Premièrement, quant à la possibilité pour le requérant de bénéficier d’une promotion au sens de l’article 45 du statut, il y a lieu de constater, comme le souligne la Commission à juste titre, que le RAA ne fait pas référence à la promotion. Aux termes de l’article 45 du statut, la promotion « se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d’un minimum de deux ans d’ancienneté dans leur grade ».

112    Le RAA ne prévoit donc pas de possibilité de promotion pour les agents temporaires, mais plutôt, en application de ses articles 15 et 16, d’être classés à un grade correspondant aux fonctions qu’ils sont appelés à exercer pendant la durée de leur contrat (voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2016, Todorova Androva/Conseil e.a., T‑366/15 P, non publié, EU:T:2016:729, point 48).

113    Il y a donc lieu de conclure que la Commission était fondée à considérer, dans la réponse du 28 octobre 2020, que la procédure de la promotion visée par l’article 45 du statut ne concernait que les fonctionnaires.

114    Deuxièmement, en ce qui concerne la possibilité d’un reclassement, au sens de l’article 10, paragraphe 3, du RAA, il convient de relever que, dans la réponse du 28 octobre 2020, la Commission ne soutient pas, contrairement aux allégations du requérant, que l’article 8, deuxième alinéa, du RAA interdit le reclassement des agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA. Elle se contente d’affirmer que, au vu de la large marge d’appréciation dont elle jouit à cet égard, il lui est possible de ne pas prévoir d’organiser un exercice de reclassement des agents temporaires sous contrats à durée déterminée, dont les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA.

115    Par ailleurs, il convient de souligner que l’article 10, paragraphe 3, du RAA, qui porte sur la possibilité d’un reclassement, n’établit en aucune façon un droit pour tout agent temporaire de bénéficier, à sa demande, d’un reclassement.

116    Il y a lieu de rappeler que, si, selon le principe d’unicité de la fonction publique, tous les fonctionnaires de l’Union sont soumis à un statut unique, un tel principe n’implique pas que les institutions doivent user à l’identique du pouvoir d’appréciation qui leur a été reconnu par le statut, alors que, au contraire, dans la gestion de leur personnel, ces dernières jouissent d’un « principe d’autonomie » (arrêt du 9 juin 2021, KZ/Commission, T‑453/20, non publié, EU:T:2021:339, point 52). Il y a lieu de raisonner de manière analogue en ce qui concerne les agents temporaires soumis au RAA.

117    Par conséquent, il convient de considérer que, dans la mesure où le RAA ne prévoit pas d’obligation incombant à l’administration de procéder à un exercice de reclassement des agents temporaires, la Commission n’a pas enfreint l’article 8, deuxième alinéa, et l’article 10, paragraphe 3, du RAA, en ne prévoyant pas, dans le cadre de l’autonomie administrative dont elle jouissait, d’organiser un exercice de reclassement des agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA.

118    Cette constatation ne saurait être remise en cause par l’argument du requérant selon lequel, aux points 60 à 63 de l’arrêt du 28 avril 2021, Correia/CESE (T‑843/19, EU:T:2021:221), le Tribunal précise, en substance, que l’absence de règles écrites et la pratique de décisions ad hoc, sans qu’il soit procédé à une publication, représenteraient un manque de transparence qui enfreindrait le principe de sécurité juridique.

119    En effet, la jurisprudence citée au point 118 ci-dessus vise l’hypothèse selon laquelle une institution prévoit la possibilité de reclasser ses agents temporaires, mais ne prévoit pas de critères explicites pour de telles procédures. Or, tel n’est pas le cas en l’espèce. Par ailleurs, cet argument n’est pas de nature à remettre en cause l’autonomie de la Commission quant à la décision de ne pas prévoir la possibilité pour les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA d’être reclassés.

120    Par ailleurs, le requérant soutient, au regard d’une capture d’écran de SysPer 2, que la Commission a lancé, vraisemblablement jusqu’en 2017, des exercices de promotion distincts pour les fonctionnaires, les agents contractuels et les agents temporaires.

121    À cet égard, il convient de relever que l’existence même d’une pratique de tels exercices de promotion distincts pour les agents temporaires est niée par la Commission, qui explique que les données présentées par le requérant découlent d’une erreur technique dans SysPer 2, qui a été résolue. Toutefois, à supposer qu’une telle pratique ait existé, la Commission a valablement pu modifier cette pratique, conformément au principe d’autonomie administrative, évoqué au point 116 ci-dessus.

122    Par conséquent, le premier moyen doit être rejeté.

–       Sur le second moyen, tiré d’une violation du principe de non-discrimination

123    Par son second moyen, le requérant fait valoir, en substance, qu’en adoptant la réponse du 28 octobre 2020, la Commission a violé le principe de non-discrimination à plusieurs égards.

124    Le présent moyen se divise en trois branches. La première branche est tirée d’un traitement inégal et d’une discrimination entre les participants au programme Pilot Junior Professionals (ci-après le « programme JPP ») et les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA au sein de la Commission, la deuxième est tirée d’un traitement inégal entre les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA et les autres agents temporaires de la Commission et la troisième est tirée d’un traitement inégal entre les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA de différentes institutions, organes ou organismes de l’Union.

125    La Commission conteste cette argumentation.

126    À titre liminaire, il convient de rappeler que le principe d’égalité de traitement constitue un principe général du droit de l’Union, consacré à l’article 20 de la Charte, dont le principe de non-discrimination énoncé à son article 21, paragraphe 1, est une expression particulière. Ce principe exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir arrêt du 27 novembre 2018, Hebberecht/SEAE, T‑315/17, EU:T:2018:842, points 58 et 59 et jurisprudence citée).

127    En ce qui concerne l’exigence tenant au caractère comparable des situations, celle-ci s’apprécie au regard de l’ensemble des éléments qui les caractérisent. Ces éléments doivent, notamment, être déterminés et appréciés à la lumière de l’objet et du but de l’acte de l’Union qui institue la distinction en cause. Doivent, en outre, être pris en considération les principes et les objectifs du domaine dont relève l’acte en cause (voir arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 67 et jurisprudence citée).

128    Par la première branche, le requérant prétend que les pratiques de la Commission constituent une discrimination à son égard au regard des participants au programme JPP qui sont, comme lui, des agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA. En effet, dans la mesure où les participants au programme JPP seraient des agents temporaires qui pourraient être réaffectés à d’autres emplois dans les services de la Commission, sensiblement différents de par la nature des fonctions, sans qu’il soit nécessaire de conclure un nouveau contrat, ces candidats seraient traités d’une manière plus favorable que d’autres agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA pour lesquels l’administration considère qu’un nouveau contrat est nécessaire et par conséquent interdit.

129    Tout d’abord, comme la Commission l’a expliqué dans la décision de rejet de la réclamation R/507/20, si un agent temporaire recruté sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA appartenant au groupe de fonctions AST devait être sélectionné afin de participer au programme JPP, il se verrait proposer un contrat d’agent temporaire sur le fondement de l’article 2, sous a), du RAA, et non un contrat d’agent temporaire sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA.

130    Ensuite, quant à l’allégation du requérant selon laquelle il serait discriminé du fait que les réaffectations régulières des participants au programme JPP ne nécessiteraient pas la conclusion de nouveaux contrats, il suffit de rappeler que le requérant a d’ores et déjà été réaffecté, ainsi qu’il a été rappelé au point 3 ci-dessus, au moyen d’un avenant à son contrat, et donc sans qu’un nouveau contrat ait été conclu. Il n’est donc pas fondé à soutenir qu’il lui était impossible de bénéficier d’une réaffectation sans que cela implique nécessairement la conclusion d’un nouveau contrat.

131    Enfin, s’agissant de l’allégation selon laquelle le requérant serait victime d’une discrimination fondée sur l’âge dans la mesure où les candidats au programme JPP seraient exclusivement des jeunes professionnels possédant une expérience professionnelle de trois ans au plus, il y a lieu de la rejeter, compte tenu du fait que, comme il ressort des points 129 et 130 ci-dessus, aucune différence de traitement entre les participants au programme JPP et les autres agents temporaires recrutés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA n’a été établie en ce qui concerne une réaffectation sans qu’il soit nécessaire de conclure un nouveau contrat.

132    Par voie de conséquence, le requérant n’est pas fondé à soutenir que les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA et recrutés dans le cadre du programme JPP bénéficieraient d’un traitement plus favorable que celui qui lui est appliqué, en pouvant être réaffectés sans conclure de nouveaux contrats d’agent temporaire sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA.

133    Par la deuxième branche, le requérant fait valoir que le fait que l’administration n’organise pas d’exercices de promotion ou n’autorise pas de promotions individuelles des agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA aboutit à un traitement inégal entre lui, en tant qu’agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, et d’autres catégories d’agents temporaires, en particulier les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous a), du RAA et de l’article 2, sous c), du RAA.

134    Le requérant soutient que les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous c), du RAA exercent directement des fonctions auprès d’une personne remplissant un mandat, tandis que les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA n’ont pas de mission spécialisée de ce type. Toutefois, l’article 2 du RAA n’établirait aucune différence significative entre la nature des fonctions et cette distinction serait peu pertinente en matière d’égalité de traitement.

135    Sur ce point, le requérant fait valoir que la Commission tente de justifier le traitement inégal en expliquant que les agents temporaires engagés à durée indéterminée représentent des effectifs très restreints. Par ailleurs, le requérant prétend que la distinction significative entre les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous a), du RAA et ceux engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA réside dans le classement de l’emploi à des fins budgétaires. Or, ces critères seraient dénués de pertinence aux fins d’une analyse relative au traitement inégal.

136    Comme cela est rappelé au point 126 ci-dessus, le principe d’égalité de traitement et de non-discrimination exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié.

137    En ce qui concerne la question de la comparaison des situations des différents types d’agents temporaires, premièrement, il convient de rappeler que, en ce qui concerne les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous a), du RAA, leurs emplois sont compris dans le tableau des effectifs, et correspondent à des tâches permanentes définies de service public, lesquelles ne correspondent toutefois pas, en vertu du choix de l’autorité budgétaire, à un « emploi permanent » (arrêt du 27 novembre 2012, Sipos/OHMI, F‑59/11, EU:F:2012:164, point 39).

138    Deuxièmement, en ce qui concerne les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous c), du RAA, ces derniers ont conclu un contrat de travail intuitu personae ayant pour élément essentiel la confiance mutuelle (voir, en ce sens, arrêt du 17 octobre 2006, Bonnet/Cour de justice, T‑406/04, EU:T:2006:322, points 47 et 101).

139    Troisièmement, en ce qui concerne les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, bien que le RAA prévoie expressément qu’ils peuvent être engagés en vue d’occuper un emploi permanent, celui-ci précise également que cela ne peut être qu’à titre temporaire (voir, en ce sens, arrêt du 21 septembre 2011, Adjemian e.a./Commission, T‑325/09 P, EU:T:2011:506, point 79).

140    À cet égard, la Commission soutient à juste titre que le législateur a créé différentes catégories d’agents temporaires, jouissant de conditions de travail différentes, ce qui les place dans des situations non comparables, de sorte qu’il n’est pas possible d’établir une différence de traitement entre les agents temporaires qui constituerait une discrimination au sens de l’article 21, paragraphe 1, de la Charte.

141    Toutefois, le requérant fait valoir que cette pratique est contraire à la clause 4, paragraphe 1, de l’accord-cadre, qui interdit de traiter les travailleurs à durée déterminée de manière moins favorable que les travailleurs à durée indéterminée comparables au seul motif que les premiers travaillent à durée déterminée, à moins qu’un traitement différent ne soit justifié par des raisons objectives.

142    Or, c’est à juste titre que la Commission a conclu que les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA ne se trouvaient pas dans une situation comparable à celle des autres catégories d’agents temporaires. La différence fondamentale entre les différentes catégories d’agents temporaires réside dans le « type d’emploi » occupé par chacune des catégories concernées, et non directement dans la durée du contrat. En effet, ces trois catégories d’agents temporaires visent à répondre à des besoins différents des institutions, organes ou organismes. Dès lors, la durée des contrats que peuvent conclure les différentes catégories d’agents temporaires découle directement des types d’emplois distincts qu’ils peuvent occuper et ainsi de leur nature différente.

143    Par la troisième branche, le requérant prétend que d’autres institutions et organes de l’Union ont expressément reconnu la possibilité pour les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA de bénéficier d’un reclassement.

144    La Commission conteste la recevabilité de la troisième branche au motif qu’elle serait avancée pour la première fois dans la requête.

145    À cet égard, il convient de rappeler que la règle de concordance entre la réclamation et la requête subséquente exige, sous peine d’irrecevabilité, qu’un moyen soulevé devant le juge de l’Union l’ait déjà été dans le cadre de la procédure précontentieuse, afin que l’AHCC ait été en mesure de connaître les critiques que l’intéressé formule à l’encontre de la décision contestée (voir arrêt du 25 octobre 2013, Commission/Moschonaki, T‑476/11 P, EU:T:2013:557, point 71 et jurisprudence citée).

146    En l’espèce, dans la demande du 29 juin 2020, le requérant a fait mention de la pratique des autres institutions de l’Union au soutien de son argumentation tirée de son droit à être reclassé. En outre, dans la réclamation, il se prévaut également du non-respect de pratiques administratives constantes. Par ailleurs, il convient de constater que la réclamation contient des arguments relatifs à la prétendue discrimination, notamment fondée sur l’âge des différents agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, et au traitement inégalitaire entre les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA et d’autres catégories d’agents temporaires. Dans sa requête, le requérant soulève, au-delà de ces allégations, la troisième branche, tirée d’une prétendue discrimination fondée sur des pratiques différentes qui existeraient dans d’autres institutions, dans le contexte plus large du moyen tiré d’une violation du principe de non-discrimination.

147    Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la circonstance selon laquelle le requérant a, pour la première fois, fait explicitement état dans sa requête d’une différence de traitement entre les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA au sein de la Commission et au sein d’autres institutions, organes et organismes ne modifie ni la cause ni l’objet de la réclamation.

148    Dès lors, il convient de rejeter les allégations de la Commission concernant la recevabilité de la troisième branche.

149    Le requérant fait valoir que, faute d’organiser des exercices de promotion et d’accorder le même droit à la promotion aux agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA, la Commission traite ces agents temporaires d’une manière moins favorable que d’autres institutions et organes tels que le Service européen pour l’action extérieure (SEAE) ou l’Agence de l’Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust). En outre, si les différentes institutions et agences de l’Union jouissent d’un certain degré d’autonomie administrative dans la manière d’organiser les exercices de reclassement, elles ne sauraient donner une interprétation divergente des dispositions du RAA de façon à accorder moins de droits à des agents temporaires.

150    À cet égard, force est de constater que le requérant ne peut valablement se prévaloir des règles internes applicables au personnel d’autres institutions. En effet, il convient de rappeler qu’il est de jurisprudence constante que les institutions disposent d’un large pouvoir d’appréciation dans l’organisation de leurs services en fonction des missions qui leur sont confiées et dans l’affectation, en vue de celles-ci, du personnel qui se trouve à leur disposition (voir arrêt du 14 octobre 2004, Pflugradt/BCE, C‑409/02 P, EU:C:2004:625, point 42 et jurisprudence citée).

151    Partant, comme cela est indiqué au point 117 ci-dessus, la Commission pouvait décider, dans le cadre de l’autonomie administrative dont elle jouissait, de ne pas organiser d’exercice de reclassement pour les agents temporaires engagés sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA. Une telle décision n’est nullement contraire au principe de non-discrimination, d’autant plus qu’elle s’applique aux mêmes catégories d’agents temporaires au sein de la même institution.

152    Il découle de tout ce qui précède qu’il convient de rejeter le second moyen et, partant, les conclusions en annulation de la réponse du 28 octobre 2020 dans leur ensemble.

 Sur les conclusions indemnitaires

153    Le requérant demande l’octroi de dommages et intérêts en réparation des préjudices matériels qu’il estime avoir subis du fait de la prétendue illégalité de la décision de rejet de candidature et de la réponse du 28 octobre 2020. Les conclusions indemnitaires du requérant se divisent, en substance, en deux branches. Dans le cadre de la première branche, liée à la décision de rejet de candidature, le requérant soutient que cette décision lui a causé un préjudice matériel qui consiste en la perte d’une chance, d’une part, de se voir recruter au poste litigieux et, d’autre part, de devenir fonctionnaire titulaire en participant aux concours internes réservés aux agents temporaires appartenant au groupe de fonctions AD. Dans le cadre de la seconde branche, liée à la réponse du 28 octobre 2020, le requérant soutient que cette réponse lui a causé un préjudice matériel consistant en la perte d’une chance de bénéficier d’un reclassement au grade AST 4 à compter du 16 mai 2020.

154    La Commission conteste l’argumentation du requérant.

 Sur le préjudice matériel lié à la décision de rejet de candidature

155    En raison de la décision de rejet de candidature, le requérant soutient avoir perdu une chance de se voir recruter au poste litigieux. Il affirme à cet égard que, le comité de sélection ayant émis, le 24 juillet 2020, une demande aux fins de son recrutement et de sa nomination au poste litigieux, la perte de chance d’être recruté en raison de la décision de rejet de candidature doit être évaluée à 100 %. À ce titre, il demande à être indemnisé à hauteur d’un montant de 24 245 euros, qui correspond à la différence entre son salaire actuel et le salaire auquel il aurait eu droit s’il avait été recruté au poste litigieux, au grade AD 5, à compter du 1er septembre 2020 et jusqu’à l’expiration de son contrat.

156    En outre, le requérant aurait perdu une chance de devenir fonctionnaire titulaire en participant aux concours internes réservés aux agents temporaires appartenant au groupe de fonctions AD. En effet, s’il avait été recruté au poste litigieux et donc reclassé au grade AD 5 à compter du 1er septembre 2020, le requérant soutient qu’il aurait été en mesure de participer auxdits concours internes organisés en 2021 et 2022. Or, dans le cadre du concours qui se serait tenu au moment de l’introduction du présent recours, le requérant soutient que, pour 20 postes de fonctionnaires dans le domaine juridique, environ 90 candidats ont réussi les examens informatisés, ce qui permettrait d’évaluer qu’il serait devenu fonctionnaire selon une probabilité de 44 %. Au titre de la perte de chance de devenir fonctionnaire, le requérant demande à être indemnisé à hauteur d’un montant de 600 000 euros, lequel correspond à une perte de rémunération comprenant le montant du salaire et des allocations liées aux personnes à charge qui lui auraient été versées chaque mois pendant 20 ans, à laquelle il conviendrait d’appliquer un coefficient de probabilité de 0,44.

157    À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que l’engagement de la responsabilité de l’Union suppose la réunion d’un ensemble de conditions en ce qui concerne l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement et le préjudice invoqué (arrêt du 21 février 2008, Commission/Girardot, C‑348/06 P, EU:C:2008:107, point 52). Ces conditions devant être cumulativement remplies, il suffit que l’une d’entre elles fasse défaut pour que soit rejeté un recours en indemnité (arrêt du 9 septembre 1999, Lucaccioni/Commission, C‑257/98 P, EU:C:1999:402, point 14).

158    En ce qui concerne les deux chefs de préjudice évoqués aux points 155 et 156 ci-dessus, il doit être relevé que ceux-ci trouvent leur origine dans la décision de rejet de candidature.

159    Or, il convient de constater que, s’agissant des conclusions en annulation de la décision de rejet de candidature, le deuxième moyen visant ladite décision ayant été accueilli, la première condition d’engagement de la responsabilité de la Commission, à savoir l’illégalité du comportement reproché, est remplie.

160    Il convient donc d’examiner les deux autres conditions d’engagement de la responsabilité de la Commission, à savoir la réalité du dommage et le lien de causalité.

161    S’agissant de la réalité du préjudice matériel, il est de jurisprudence constante que celui‑ci doit être dûment établi et certain (voir, en ce sens, arrêt du 21 février 2008, Commission/Girardot, C‑348/06 P, EU:C:2008:107, point 54). En particulier, lorsque le préjudice allégué consiste, comme en l’espèce, en une perte de chance, d’une part, la chance perdue doit avoir été réelle et, d’autre part, cette perte doit être définitive (voir arrêt du 24 octobre 2018, Fernández González/Commission, T‑162/17 RENV, non publié, EU:T:2018:711, point 110 et jurisprudence citée).

162    Quant au degré de certitude du lien de causalité, il est atteint lorsque l’illégalité commise par une institution de l’Union a, de façon certaine, privé une personne non pas nécessairement d’un recrutement, dont l’intéressé ne pourra jamais prouver qu’il se serait produit, mais d’une chance sérieuse d’être recruté comme fonctionnaire ou agent, avec comme conséquence pour l’intéressé un préjudice matériel consistant en une perte de revenus (voir arrêt du 24 octobre 2018, Fernández González/Commission, T‑162/17 RENV, non publié, EU:T:2018:711, point 111 et jurisprudence citée).

163    Premièrement, il convient d’examiner la condition concernant le caractère réel de la perte de chance alléguée.

164    Selon la jurisprudence, afin d’apprécier le caractère réel de la perte de chance, il y a lieu de se placer à la date à laquelle la décision de rejet de candidature a été prise (voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2022, SU/AEAPP, T‑296/21, EU:T:2022:808, point 85 et jurisprudence citée).

165    En l’espèce, il ressort du dossier que, en l’absence de l’illégalité dont est entachée la décision de rejet de candidature, le requérant aurait pu être recruté au poste litigieux.

166    Tout d’abord, comme le requérant l’affirme, il avait donné pleinement satisfaction au poste qu’il occupait au moment de l’introduction de sa candidature, lequel présentait des similitudes avec le poste litigieux. En effet, il ressort des rapports d’évaluation du requérant pour les années 2019 et 2020 qu’il avait accompli ses fonctions de manière très satisfaisante, son niveau de prestations ayant été jugé exceptionnel, de sorte que, à l’issue de la période initiale de trois ans pour laquelle il avait été engagé, il a été renouvelé dans ses fonctions. Or, il est constant que la possession d’une expérience professionnelle réussie constitue un indice important à prendre en compte pour décider du choix du candidat à recruter (voir arrêt du 13 septembre 2011, AA/Commission, F‑101/09, EU:F:2011:133, point 91 et jurisprudence citée).

167    En outre, il y a lieu de relever que le chef d’unité du requérant avait émis, le 24 juillet 2020, une note indiquant que, dans la mesure où le poste litigieux n’avait pu être pourvu par un candidat interne ou externe approprié, y compris parmi les lauréats d’un concours général organisé par l’Office européen de sélection du personnel (EPSO), et sur la base des mérites du requérant, il sollicitait l’engagement du requérant au poste litigieux.

168    Ces considérations constituent une série d’éléments suffisamment précis et plausibles pour démontrer que le requérant disposait, en 2020, dans le cadre de la procédure de sélection au poste litigieux, d’une chance réelle de se voir engagé audit poste, nonobstant le large pouvoir d’appréciation de l’administration en matière de recrutement (voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2022, TM/BCE, T‑440/21, non publié, EU:T:2022:800, point 113).

169    Deuxièmement, quant au caractère définitif de la perte de chance alléguée, il y a lieu de rappeler que celui-ci s’apprécie au moment où le juge de l’Union statue, en tenant compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris des éléments postérieurs à l’adoption de l’acte illégal à l’origine du préjudice (voir arrêt du 14 décembre 2022, SU/AEAPP, T‑296/21, EU:T:2022:808, point 90 et jurisprudence citée).

170    Afin d’évaluer ce caractère définitif, il convient d’examiner si, au jour du prononcé du présent arrêt et au vu des mesures d’exécution de celui-ci qu’il incombe à la Commission d’adopter, le requérant a définitivement perdu la chance qu’il avait de se voir engagé au poste litigieux (voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2022, SU/AEAPP, T‑296/21, EU:T:2022:808, point 91).

171    En l’espèce, il convient de rappeler que, le 18 janvier 2021, le contrat initial du requérant, conclu le 16 mai 2018 pour une période de trois ans, a été renouvelé pour une période de deux ans, arrivant à son terme le 15 mai 2023. Or, dans la mesure où, conformément à l’article 8, deuxième alinéa, du RAA, à l’expiration de son contrat, l’agent engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA ne peut occuper un emploi permanent de l’institution que s’il fait l’objet d’une nomination en qualité de fonctionnaire dans les conditions fixées par le statut, il convient de constater que, au jour du prononcé du présent arrêt, le requérant ne peut plus être engagé pour les postes en question sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA.

172    Par ailleurs, il y a lieu d’ajouter que, dans des litiges relatifs à des décisions de rejet de candidatures, tels que celui qui fait l’objet du présent recours, le Tribunal a jugé que le caractère définitif de la perte d’une chance d’être recruté découlait de la protection des droits des tiers, dont les candidatures avaient été retenues pour les postes en question (voir, en ce sens, arrêts du 6 juin 2006, Girardot/Commission, T‑10/02, EU:T:2006:148, point 49, et du 24 octobre 2018, Fernández González/Commission, T‑162/17 RENV, non publié, EU:T:2018:711, point 91), et non de l’impossibilité pour l’administration de corriger juridiquement l’illégalité commise (arrêt du 14 décembre 2022, SU/AEAPP, T‑296/21, EU:T:2022:808, point 95).

173    Ainsi, au vu de ce qui précède, le requérant est fondé à soutenir qu’il a perdu définitivement la chance de se voir engagé au poste litigieux.

174    Par conséquent, sur la base de ces éléments, il convient de considérer que l’illégalité commise par la Commission a privé le requérant d’une chance réelle de se voir recruter au poste litigieux de sorte qu’il existe un lien de causalité entre l’illégalité de la décision de rejet de candidature et la perte de chance alléguée.

175    Les deuxième et troisième conditions de l’engagement de la responsabilité de la Commission sont ainsi remplies.

176    Selon la jurisprudence, pour déterminer le montant de l’indemnité à verser au titre de la perte d’une telle chance, il convient, après avoir identifié la nature de la chance dont le fonctionnaire ou l’agent a été privé, de déterminer la date à partir de laquelle il aurait pu bénéficier de cette chance, puis de quantifier ladite chance et, enfin, de préciser quelles ont été pour lui les conséquences financières de cette perte de chance (voir arrêt du 14 décembre 2022, SU/AEAPP, T‑296/21, EU:T:2022:808, point 102 et jurisprudence citée).

177    En ce qui concerne le mode et l’étendue de la réparation de la perte de chance, lorsque cela est possible, la chance dont un fonctionnaire ou un agent a été privé doit être déterminée objectivement, sous la forme d’un coefficient mathématique résultant d’une analyse précise (voir arrêt du 14 décembre 2022, SU/AEAPP, T‑296/21, EU:T:2022:808, point 103 et jurisprudence citée), tout en considérant qu’il est très difficile, sinon impossible, de définir une méthode permettant de quantifier avec exactitude la chance d’être recruté à un emploi au sein d’une institution et, par conséquent, d’évaluer le préjudice résultant de la perte de cette chance (voir, en ce sens, arrêt du 21 février 2008, Commission/Girardot, C‑348/06 P, EU:C:2008:107, points 59 et 60).

178    En outre, il a déjà été jugé que le critère de la perte de rémunération ne saurait déterminer à lui seul l’étendue de la réparation du dommage causé à la suite de la perte d’une chance d’être recruté. En effet, dans un tel cas, le dommage subi ne saurait être assimilé au montant de la rémunération qui aurait été perçue si cette chance s’était réalisée, puisque, eu égard au pouvoir d’appréciation dont jouit la Commission en la matière, l’intéressé ne peut faire valoir aucun droit à être recruté. Partant, le dommage dont un tel intéressé est en droit d’obtenir la réparation ne saurait correspondre au manque à gagner résultant de la perte d’un droit (voir, en ce sens, arrêt du 21 février 2008, Commission/Girardot, C‑348/06 P, EU:C:2008:107, point 65).

179    En l’espèce, le requérant a donné une évaluation chiffrée du montant devant servir de base au calcul du montant de l’indemnité liée à la perte de chance. Toutefois, cette évaluation ne saurait être retenue. En effet, il n’est pas possible de quantifier cette chance et de préciser les conséquences financières de la perte de chance, au motif qu’un calcul correct du préjudice matériel du requérant dépendrait de diverses hypothèses, notamment l’impact de l’intérêt du service sur la probabilité de l’engagement du requérant et sur la durée totale de cet engagement étant donné que la durée maximale totale de la relation de travail d’un agent temporaire engagé sur le fondement de l’article 2, sous b), du RAA est de six ans, et que, en l’espèce, le contrat initial du requérant, conclu pour une durée de trois ans, était en cours depuis le 16 mai 2018.

180    Par conséquent, il y a lieu d’évaluer, compte tenu de toutes les circonstances de l’affaire, le préjudice subi ex æquo et bono (voir, en ce sens, arrêt du 16 décembre 2020, VP/Cedefop, T‑187/18, non publié, EU:T:2020:613, point 200 et jurisprudence citée).

181    Dans ce contexte, il sera fait une juste appréciation de l’entier préjudice matériel subi par le requérant en raison de sa perte de chance de se voir recruté au poste litigieux en condamnant la Commission à lui verser, ex æquo et bono, la somme forfaitaire de 10 000 euros.

182    En ce qui concerne le chef de préjudice consistant en la perte de chance de devenir fonctionnaire en participant aux concours internes organisés par la Commission en 2021 et 2022 et réservés aux agents temporaires du groupe de fonctions AD, il y a lieu de relever que la condition tenant à la preuve de l’existence d’un préjudice réel et certain, ainsi qu’au lien de causalité, relative à la perte de chance de succès auxdits concours internes organisés par la Commission en 2021 et 2022 et, subséquemment, d’être recruté en tant que fonctionnaire de l’Union, n’est pas remplie. En effet, la décision de rejet de candidature n’a pas pour conséquence d’empêcher le requérant de devenir administrateur au sein de la Commission. La décision de rejet de candidature ne faisait pas obstacle à ce que le requérant présente sa candidature à d’autres postes du groupe de fonctions AD qui étaient vacants à la Commission postérieurement à l’adoption de ladite décision, tout comme elle ne l’empêche pas d’être recruté, à l’avenir, à un poste de niveau AD, par exemple, sur le fondement de l’article 2, sous a), du RAA.

183    Partant, la demande d’indemnisation du préjudice matériel résultant de la prétendue perte de chance de devenir fonctionnaire en participant aux concours internes organisés par la Commission en 2021 et 2022 et réservés aux agents temporaires du groupe de fonctions AD doit être rejetée.

 Sur le préjudice matériel lié à la réponse du 28 octobre 2020

184    Le requérant fait valoir qu’il a perdu une chance de bénéficier d’une promotion au grade AST 4 à compter du 16 mai 2020. Cette chance d’être promu devant être évaluée à 100 %, étant donné son niveau de prestations exceptionnel, le montant de l’indemnité demandée est de 13 152 euros.

185    Selon une jurisprudence constante, les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice matériel ou moral doivent être rejetées lorsqu’elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui ont, elles-mêmes, été rejetées comme étant irrecevables ou non fondées (voir arrêt du 12 janvier 2022, MW/Parlement, T‑630/20, non publié, EU:T:2022:3, point 137 et jurisprudence citée).

186    En l’espèce, il existe un lien étroit entre le chef de préjudice tiré de la perte de chance de bénéficier d’une promotion au grade AST 4 à compter du 16 mai 2020 et les conclusions en annulation de la réponse du 28 octobre 2020.

187    Dans ces circonstances, l’examen des moyens présentés au soutien des conclusions en annulation de la réponse du 28 octobre 2020 n’ayant révélé aucune illégalité commise par la Commission, le chef de préjudice tiré de la perte de chance de bénéficier d’une promotion au grade AST 4 à compter du 16 mai 2020 doit également être rejeté.

188    Il en résulte que la demande d’indemnisation du préjudice matériel tiré de la prétendue perte de chance de bénéficier d’une promotion au grade AST 4 à compter du 16 mai 2020 doit être rejetée.

 Sur les dépens

189    Aux termes de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens. Toutefois, si cela apparaît justifié au vu des circonstances de l’espèce, le Tribunal peut décider que, outre ses propres dépens, une partie supporte une fraction des dépens de l’autre partie. En vertu de l’article 135, paragraphe 1, de ce règlement, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe ne soit condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doive pas être condamnée à ce titre.

190    En l’espèce, la Commission a succombé pour une partie essentielle des chefs de conclusions du requérant. Par ailleurs, la Commission a déposé une exception d’irrecevabilité en ce qui concerne les conclusions contre la décision de rejet de candidature, qu’elle a ensuite retirée, ce qui a eu une incidence sur les dépens. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en condamnant la Commission aux entiers dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)      La décision de la Commission européenne du 4 août 2020 rejetant la candidature de SE pour l’emploi vacant publié sous la référence COM/2020/1474 est annulée.

2)      La Commission est condamnée à payer à SE la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice matériel subi.

3)      Le recours est rejeté pour le surplus.

4)      La Commission est condamnée aux dépens.

da Silva Passos

Gervasoni

Półtorak

Reine

 

      Pynnä

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 juillet 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.


1 Données confidentielles occultées.