Language of document : ECLI:EU:T:2016:83

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

18 février 2016 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale HARRY’S NEW YORK BAR – Marque nationale figurative antérieure PUB CASINO Harrys RESTAURANG – Refus partiel d’enregistrement – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans les affaires jointes T‑84/14 et T‑97/14,

Harrys Pubar AB, établie à Göteborg (Suède), représentée par Me L.‑E. Ström, avocat,

partie requérante dans l’affaire T‑84/14,

Harry’s New York Bar SA, établie à Paris (France), représentée par Me S. Arnaud, avocat,

partie requérante dans l’affaire T‑97/14,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme V. Melgar, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été, en ce qui concerne l’affaire T‑84/14,

Harry’s New York Bar SA,

et

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal dans l’affaire T‑97/14, étant

Harrys Pubar AB, établie à Göteborg, représentée par Me Ström,

ayant pour objet deux recours formés contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 14 novembre 2013 (affaires jointes R 1038/2012‑1 et R 1045/2012‑1), relative à une procédure d’opposition entre Harrys Pubar AB et Harry’s New York Bar SA,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de M. H. Kanninen (rapporteur), président, Mme I. Pelikánová et M. E. Buttigieg, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu les requêtes déposées au greffe du Tribunal le 6 février 2014 (affaire T‑84/14) et le 13 février 2014 (affaire T‑97/14),

vu les mémoires en réponse de l’OHMI déposés au greffe du Tribunal le 4 juin 2014 (affaire T‑84/14) et le 6 juin 2014 (affaire T‑97/14),

vu le mémoire en réponse de l’intervenante dans l’affaire T‑94/14 déposé au greffe du Tribunal le 28 mai 2014,

vu l’ordonnance du 22 juillet 2014 portant jonction des affaires T‑84/14 et T‑97/14 aux fins de la procédure écrite, de l’éventuelle procédure orale et de l’arrêt,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant dès lors décidé, sur proposition du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 2 octobre 2003, la requérante dans l’affaire T‑97/14, Harry’s New York Bar SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est la marque verbale HARRY’S NEW YORK BAR.

3        Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 25, 30, 32 et 43 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 25 : « Vêtements ; sous-vêtements, lingerie, layette, robes, chemises, costumes, vestes, jupes, cravates, t-shirts, casquettes, pantalons, vêtements de sport, maillots de bains ; chaussures, bottes, chaussures de sport ; chapellerie ; gants, bonneterie » ;

–        classe 30 : « Café, thé, cacao, sucre, riz, tapioca, sagou, succédanés du café ; miel, sirop de mélasse ; sel, moutarde ; vinaigre, sauces (condiments) ; épices ; glace à rafraîchir ; préparations pour faire des boissons à base de café, de thé ou de cacao » ;

–        classe 32 : « Boissons non alcooliques et préparations pour faire des boissons (à l’exception de celles à base de café, de thé ou de cacao et des boissons lactées) ; bières ; eaux minérales et gazeuses ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops » ;

–        classe 43 : « Débits de boissons, à savoir cafés, cafétérias, bars, restaurants, restaurants libre-service, restaurants à service rapide et permanent ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 39/2004, du 27 septembre 2004.

5        Le 27 décembre 2004, la requérante dans l’affaire T‑84/14 et intervenante dans l’affaire T‑97/14, Harrys Pubar AB, a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur les droits antérieurs suivants (ci-après, conjointement, les « signes opposés ») :

–        la marque suédoise figurative, reproduite ci-après, déposée le 8 mars 1999 et enregistrée le 7 juin 2002 sous le numéro 356 009, pour désigner les produits relevant de la classe 25 et les services relevant de la classe 42 (devenue classe 43 au sens de l’arrangement de Nice), correspondant respectivement à la description suivante : « vêtements, chaussures, chapellerie » et « services de restauration fournis dans le cadre de services de restaurant, brasserie et café » :

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–        la marque suédoise figurative, reproduite ci-après, déposée le 21 décembre 1993 et enregistrée le 6 décembre 1996 sous le numéro 320 026, pour désigner les produits relevant de la classe 25 et les services relevant de la classe 42 (devenue classe 43), correspondant respectivement à la description suivante : « vêtements, chaussures, chapellerie » et « brasseries, cafés, bars et restaurants ; services de restauration » :

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–        la marque suédoise figurative, reproduite ci-après, déposée le 15 octobre 1993 et enregistrée le 26 juillet 1996 sous le numéro 315 142, pour désigner les services relevant de la classe 42 (devenue classe 43) et correspondant à la description suivante : « services de fourniture de repas et boissons dans le cadre de services de restaurant, brasserie et café » :

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–        la dénomination commerciale suédoise Harrys Pubar Aktiebolag, enregistrée le 15 mai 1995 sous le numéro 55 6513‑1066, pour désigner l’activité commerciale « services de traiteur et activités connexes », utilisée dans la vie des affaires dont la portée n’est pas seulement locale, et conférant à son titulaire, en vertu des articles 1, 2, 3, 14.4 et 14.6 de la loi suédoise sur les marques, le droit d’interdire l’utilisation de la marque demandée.

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 4, du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 4, du règlement n° 207/2009].

8        Le 25 mars 2011, Harry’s New York Bar a demandé une preuve de l’usage des signes opposés qui avaient été enregistrés plus de cinq ans avant la date de publication de la demande. Harrys Pubar y a répondu en présentant des articles parus dans la presse suédoise, des extraits de son site Internet et des informations sur ses activités commerciales et de franchise.

9        Par décision du 30 mars 2012, la division d’opposition a rejeté l’opposition pour les produits compris dans la classe 30 correspondant à la description suivante : « sucre, riz, tapioca, sagou ; miel, sirop de mélasse ; sel, moutarde ; vinaigre, sauces (condiments) ; épices ; glace à rafraîchir ». Elle a en revanche accueilli l’opposition pour le reste des produits et services visés au point 3 ci-dessus, au motif de l’existence d’un risque de confusion avec la marque suédoise figurative enregistrée sous le numéro 356 009 (ci-après la « marque antérieure »).

10      Le 29 mai 2012, Harry’s New York Bar a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition, en ce qu’elle a accueilli l’opposition pour le reste des produits et services tel qu’indiqué au point 9 ci-dessus.

11      Le 30 mai 2012, Harrys Pubar a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition, en ce qu’elle a rejeté l’opposition pour les produits relevant de la classe 30 visés au point 9 ci-dessus.

12      Le recours de Harrys Pubar a été enregistré sous le numéro R 1045/2012‑1 et le recours de Harry’s New York Bar a été enregistré sous le numéro R 1038/2012‑1.

13      Dans la mesure où ces deux recours ont été formés contre la même décision, ils ont été examinés au cours d’une même procédure.

14      Par décision du 14 novembre 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a, au point 1 du dispositif, relatif à l’affaire R 1038/2012‑1, fait partiellement droit au recours de Harry’s New York Bar, autorisant l’enregistrement de la marque demandée également pour les produits compris dans les classes 30 et 32, correspondant respectivement à la description suivante : « café, thé, cacao ; succédanés du café ; préparations pour faire des boissons à base de café, de thé ou de cacao » et « boissons non alcooliques et préparations pour faire des boissons (à l’exception de celles à base de café, de thé ou de cacao et des boissons lactées) ; eaux minérales et gazeuses ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops ». Au point 2 du dispositif, relatif à l’affaire R 1038/2012‑1, le recours de Harry’s New York Bar a été rejeté pour le surplus. Au point 1 du dispositif, relatif à l’affaire R 1045/2012‑1, le recours de Harrys Pubar a été rejeté dans son intégralité.

15      La chambre de recours de l’OHMI a suivi l’approche de la division d’opposition en examinant l’opposition au regard de la marque antérieure. En premier lieu, la chambre de recours a considéré que le public pertinent était le consommateur moyen suédois, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

16      En deuxième lieu, la chambre de recours a conclu, d’une part, que la marque demandée et la marque antérieure étaient similaires sur les plans visuel et conceptuel, notamment dans la mesure où elles correspondaient au prénom courant Harry. Elle a conclu en outre qu’elles étaient identiques sur le plan phonétique. La chambre de recours a ajouté que, dans leur impression d’ensemble, les marques en conflit étaient similaires.

17      En troisième lieu, la chambre de recours a relevé qu’il n’était pas contesté que les produits compris dans la classe 25 et les services compris dans la classe 43 visés par la marque demandée étaient identiques aux produits et services des classes 25 et 42 couverts par la marque antérieure. S’agissant des produits compris dans la classe 30 correspondant aux « café, thé, cacao ; succédanés du café ; préparations pour faire des boissons à base de café, de thé ou de cacao », la chambre de recours n’a pas retenu le faible degré de similitude entre ces produits et les services couverts par la marque antérieure. Elle a considéré que le consommateur commanderait lesdits produits par leur nom générique, contrairement, par exemple, à des vins ou des bières, qui seraient typiquement demandés par leur nom de marque. La chambre de recours a considéré que ce raisonnement s’appliquait également aux produits visés par la marque demandée compris dans la classe 32 correspondant aux « boissons non alcooliques et préparations pour faire des boissons (à l’exception de celles à base de café, de thé ou de cacao et des boissons lactées) ; eaux minérales et gazeuses ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops ». Elle a estimé qu’ils n’étaient pas comparables aux services couverts par la marque antérieure, contrairement à ce que la division d’opposition avait décidé. Quant au reste des produits de la classe 32, à savoir les « bières », visés par la marque demandée, la chambre de recours a validé la décision de la division d’opposition, en estimant qu’il existait un faible degré de similitude entre ces produits et les services couverts par la marque antérieure.

18      En quatrième lieu, s’agissant de l’appréciation du risque de confusion, la chambre de recours a d’abord estimé que les produits compris dans la classe 30, ainsi que ceux compris dans la classe 32 correspondant aux « boissons non alcooliques et préparations pour faire des boissons (à l’exception de celles à base de café, de thé ou de cacao et des boissons lactées) ; eaux minérales et gazeuses ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops » n’étant pas comparables aux services couverts par la marque antérieure, il ne saurait y avoir de risque de confusion entre la marque antérieure et la marque demandée par rapport à ces produits. Par ailleurs, selon la chambre de recours, il est concevable que le public pertinent puisse considérer que, d’une part, les « bières » de la classe 32, les produits de la classe 25 et les services de la classe 43 visés par la marque demandée et, d’autre part, les produits et les services couverts par la marque antérieure proviennent des mêmes entreprises. Pour tous ces produits et services visés par la marque demandée, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion.

19      En cinquième lieu, pour ce qui concerne le moyen tiré de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, invoqué par Harrys Pubar, la chambre de recours a d’abord observé que celle-ci n’avait pas contesté l’appréciation globale de la division d’opposition, à savoir qu’il n’y avait pas d’atteinte à une dénomination commerciale en vertu de la législation suédoise lorsque les produits et les services étaient différents. Par ailleurs, la chambre de recours a estimé que, dans la mesure où les produits compris dans la classe 30, ainsi que les produits compris dans la classe 32 correspondant aux « boissons non alcooliques et préparations pour faire des boissons (à l’exception de celles à base de café, de thé ou de cacao et des boissons lactées) ; eaux minérales et gazeuses ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops » n’étaient pas comparables aux services couverts par la dénomination commerciale antérieure, une atteinte à une dénomination commerciale au titre du droit suédois ne pouvait pas être retenue.

 Conclusions des parties

 Affaire T‑84/14

20      Harrys Pubar conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée et

–        condamner l’OHMI aux dépens qu’elle aura exposés au cours de la procédure devant le Tribunal et condamner l’OHMI et Harry’s New York Bar à supporter chacun leurs propres dépens.

21      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours et

–        condamner Harrys Pubar aux dépens exposés par l’OHMI.

 Affaire T‑97/14

22      Harry’s New York Bar conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours recevable ;

–        annuler la décision attaquée et

–        condamner l’OHMI et Harrys Pubar à supporter chacun les dépens qu’ils ont encourus au cours de la procédure devant le Tribunal.

23      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours et

–        condamner Harry’s New York Bar aux dépens exposés par l’OHMI.

24      Harrys Pubar conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours et

–        condamner Harry’s New York Bar aux dépens de la présente procédure, ainsi que des procédures devant la chambre de recours et la division d’opposition.

 En droit

 Sur la recevabilité

 Sur l’argumentation tirée de la violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009 dans l’affaire T‑84/14

25      Au soutien du recours dans l’affaire T‑84/14, Harrys Pubar a allégué une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, ainsi qu’une violation de l’article 8, paragraphe 4, dudit règlement.

26      Or, ainsi que l’OHMI le soutient à bon droit dans son mémoire en réponse, Harrys Pubar n’a pas étayé le moyen tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009. En effet, elle n’invoque aucun élément d’explication au soutien de ce moyen. Harrys Pubar a uniquement fait valoir qu’une application correcte de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009 aurait dû conduire au rejet intégral de la demande d’enregistrement, dès lors qu’il serait très probable que le consommateur pertinent confonde la marque demandée avec les signes opposés.

27      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, applicable en ce qui concerne la recevabilité du présent recours (voir ordonnance du 7 septembre 2010, Norilsk Nickel Harjavalta et Umicore/Commission, T‑532/08, Rec, EU:T:2010:353, point 70 et jurisprudence citée), la requête doit contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit ressortir du texte même de la requête et être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autre information à l’appui [arrêts du 27 septembre 2005, Cargo Partner/OHMI (CARGO PARTNER), T‑123/04, Rec, EU:T:2005:340, point 27, et du 3 décembre 2014, Max Mara Fashion Group/OHMI – Mackays Stores (M & Co.), T‑272/13, EU:T:2014:1020, points 17 et 18].

28      Il y a encore lieu d’ajouter que Harrys Pubar a demandé l’autorisation de déposer un mémoire en réplique pour notamment répondre à l’observation de l’OHMI relative à l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009. Cette autorisation a été accordée, mais Harrys Pubar n’a pas déposé de mémoire en réplique dans le délai imparti.

29      Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009 invoqué par Harrys Pubar dans le cadre du recours dans l’affaire T‑84/14 est irrecevable. Partant, le Tribunal n’examinera sur le fond que le moyen invoqué par cette requérante, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Sur l’allégation présentée pour la première fois devant le Tribunal dans l’affaire T‑97/14

30      Dans l’affaire T‑97/14, Harry’s New York Bar soutient, dans le cadre du moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, que les exigences de clarté et de précision pour décrire les produits et services couverts par la marque antérieure et, en conséquence, pour déterminer l’étendue de la protection conférée par celle-ci ne sont pas remplies.

31      Or, il ressort du dossier que cette allégation a été présentée pour la première fois devant le Tribunal. Elle constitue un élément nouveau que Harry’s New York Bar n’a pas présenté dans son recours devant l’OHMI. Cette allégation vise l’existence et l’étendue du droit antérieur et, partant, une question qui faisait partie de l’objet du litige dès la procédure devant la division d’opposition.

32      À cet égard, il y a lieu de rappeler, d’une part, que le contrôle exercé par le Tribunal ne peut aller au-delà du cadre factuel et juridique du litige tel qu’il a été porté devant la chambre de recours [voir arrêt du 22 juin 2004, « Drie Mollen sinds 1818 »/OHMI – Nabeiro Silveria (Galáxia), T‑66/03, Rec, EU:T:2004:190, point 45 et jurisprudence citée] et, d’autre part, que le requérant n’a pas le pouvoir de modifier devant le Tribunal les termes du litige, tels qu’ils résultent des prétentions et allégations avancées par lui et celui qui avait formé opposition devant l’OHMI (voir arrêt du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, Rec, EU:C:2007:252, point 43 et jurisprudence citée).

33      Dans ces conditions, c’est à bon droit que l’OHMI avance, dans son mémoire en réponse, que ladite allégation ne peut pas être prise en considération, dans la mesure où elle est invoquée pour la première fois par Harry’s New York Bar devant le Tribunal. Cette allégation est, dès lors, irrecevable.

 Sur le fond

34      À titre liminaire, il y a lieu de constater que, par la décision attaquée, l’enregistrement de la marque demandée a été refusé pour tous les produits et les services des classes 25 et 43 visés par la marque demandée et qu’il a été autorisé pour tous les produits des classes 30 et 32 visés par cette marque, à l’exception des « bières » relevant de la classe 32. Par leurs recours respectifs, Harrys Pubar vise à ce que la demande d’enregistrement soit entièrement rejetée et Harry’s New York Bar vise à ce que cette demande soit intégralement accueillie.

35      À l’appui du recours dans l’affaire T‑84/14, Harrys Pubar invoque, premièrement, en substance, que la chambre de recours a erronément appliqué l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, en ce qu’elle n’a pas conclu à la similitude des produits et services. Deuxièmement, la chambre de recours aurait dû arriver à la conclusion que la similitude des signes litigieux était encore plus élevée que celle admise dans la décision attaquée. Troisièmement, Harrys Pubar conteste l’appréciation du risque de confusion effectuée par la chambre de recours.

36      Dans l’affaire T‑97/14, Harry’s New York Bar invoque deux moyens, tirés, d’une part, de la violation du considérant 10 et de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009 et, d’autre part, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Le second moyen s’articule en trois branches, dont la troisième a été déclarée irrecevable aux points 30 à 33 ci-dessus. S’agissant des deux autres branches, la première porte sur l’erreur que la chambre de recours aurait commise dans son appréciation du caractère dominant d’un ou de plusieurs éléments des marques en conflit. La deuxième branche porte sur l’erreur que la chambre de recours aurait commise dans son appréciation de la similitude, sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, de la marque demandée et des signes opposés.

37      L’OHMI conteste les arguments des deux requérantes et soutient que la chambre de recours a correctement apprécié l’existence du risque de confusion.

38      Dans l’affaire T‑97/14, Harrys Pubar, en sa qualité d’intervenante, affirme, tout d’abord, en substance qu’il n’y avait pas lieu d’examiner l’usage sérieux de la marque antérieure en vertu de l’article 42 du règlement n° 207/2009, contrairement à ce que soutient Harry’s New York Bar. Ensuite, Harrys Pubar fait valoir que, premièrement, la marque demandée, appréciée de façon globale, est fortement semblable aux signes opposés, deuxièmement, elle concerne des produits et des services identiques ou fortement comparables à ceux couverts par les signes opposés et, troisièmement, elle vise le même groupe pertinent de consommateurs suédois, de telle sorte qu’il existe un risque élevé de confusion entre ladite marque et les signes opposés.

39      Il y a lieu de rappeler que, en l’espèce, l’opposition était fondée sur les signes opposés, ainsi qu’il a été exposé au point 6 ci-dessus. La chambre de recours a examiné l’opposition uniquement au regard de la marque antérieure au motif indiqué au point 25 de la décision attaquée et qui n’a pas été contesté par les parties. C’est sur la base de cette prémisse que le Tribunal effectuera son contrôle de la légalité de la décision attaquée.

 Sur le premier moyen dans l’affaire T‑97/14, tiré de la violation du considérant 10 et de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009

40      Il y a lieu de rappeler que l’opposition était fondée sur plusieurs signes opposés, ainsi qu’il a été exposé au point 6 ci-dessus. Comme indiqué au point 39 ci-dessus, dans la décision attaquée, la chambre de recours a examiné l’opposition uniquement au regard de la marque antérieure, en indiquant qu’elle n’était pas subordonnée à l’obligation d’usage et que les produits et services couverts par cette marque étaient les mêmes que ceux couverts par les autres signes opposés.

41      Harry’s New York Bar soutient que, n’ayant pas examiné la preuve de l’usage de la marque antérieure et des marques suédoises n° 315 142 et n° 320 026, invoquées à l’appui de l’opposition, la chambre de recours a méconnu le considérant 10 du règlement n° 207/2009 et a violé l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009.

42      L’OHMI et Harrys Pubar contestent le bien-fondé des arguments de Harry’s New York Bar.

43      Selon l’article 42, paragraphes 2, et 3, du règlement n° 207/2009, le demandeur de l’enregistrement d’une marque communautaire peut demander que le titulaire d’une marque nationale antérieure qui a formé opposition apporte la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la publication de la demande de marque communautaire, la marque nationale a fait l’objet d’usage sérieux, pour autant qu’à cette date, cette marque était enregistrée depuis cinq ans au moins.

44      En l’espèce, d’une part, la marque antérieure a été enregistrée le 7 juin 2002, soit moins de cinq ans avant la publication de la demande de marque communautaire, intervenue le 27 septembre 2004. Par conséquent, la marque antérieure ne pouvait pas faire l’objet d’une demande de preuve d’un usage sérieux, ce qui implique que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en n’ayant pas examiné cette preuve.

45      D’autre part, il y a lieu de rappeler que, à l’instar de la décision de la division d’opposition, la décision attaquée est fondée uniquement sur l’examen de l’existence d’un risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure et qu’elle a conclu à une telle existence pour les produits et services jugés identiques ou similaires tels qu’indiqués au point 18 ci-dessus. Dans ces circonstances, la preuve de l’usage sérieux des autres marques invoquées par Harrys Pubar au soutien de son opposition, à savoir des marques suédoises enregistrées sous les numéros 320 026 et 315 142, est sans pertinence pour le raisonnement retenu par la chambre de recours dans la décision attaquée, ce qui implique que l’argumentation de Harry’s New York Bar, tirée de ce que cette preuve n’a pas été examinée par la chambre de recours, est inopérante.

46      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le premier moyen dans l’affaire T‑97/14 comme étant, en partie, non fondé et, en partie, inopérant.

 Sur le premier moyen dans l’affaire T‑84/14 et le second moyen dans l’affaire T‑97/14, tirés de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

47      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

48      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

49      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

50      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier, en l’espèce, si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé, d’une part, qu’il existait pour certains des produits et pour les services visés par la marque demandée un risque de confusion avec la marque antérieure et, d’autre part, qu’il n’y avait aucun risque de confusion pour les autres produits visés par la marque demandée.

 Sur le public pertinent

51      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

52      Par ailleurs, il importe de relever que le public pertinent est composé des consommateurs susceptibles d’utiliser tant les produits ou services de la marque antérieure que ceux de la marque en cause [arrêts du 1er juillet 2008, Apple Computer/OHMI – TKS-Teknosoft (QUARTZ), T‑328/05, EU:T:2008:238, point 23, et du 30 septembre 2010, PVS/OHMI – MeDiTA Medizinische Kurierdienst (medidata), T‑270/09, EU:T:2010:419, point 28].

53      En premier lieu, s’agissant du territoire pertinent à prendre en compte pour apprécier le risque de confusion en l’espèce, il y a lieu de constater que ledit territoire est celui de la Suède, la marque antérieure étant une marque suédoise.

54      En second lieu, étant donné que les produits couverts par la marque antérieure et les produits visés par la marque demandée sont des produits de consommation courante, à savoir non destinés à un public spécialisé, c’est à bon droit que la chambre de recours a relevé, au point 27 de la décision attaquée, que le public pertinent était le consommateur moyen suédois, censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé [voir, en ce sens, arrêt du 3 septembre 2010, Companhia Muller de Bebidas/OHMI – Missiato Industria e Comercio (61 A NOSSA ALEGRIA), T‑472/08, Rec, EU:T:2010:347, point 39]. Les parties ne contestent au demeurant pas cette définition.

 Sur la comparaison des produits et services

55      Harrys Pubar soutient, dans l’affaire T‑84/14, d’abord que les produits pour lesquels l’enregistrement de la marque demandée a été autorisé sont fortement semblables à ses services aux yeux du consommateur concerné. Elle relève à cet égard que la chambre de recours n’a pas tenu compte du fait que, par rapport à ses services, lesdits produits partageaient les mêmes utilisation et finalité (à savoir la consommation de nourriture et de boisson) et étaient au moins complémentaires, ni du fait que les uns et les autres utilisaient les mêmes canaux de vente et de distribution, ou des canaux similaires. Ensuite, d’une part, il serait courant pour des cafés, bars, brasseries et restaurants d’avoir leurs propres produits alimentaires et boissons, qui seraient servis dans l’établissement ou emportés. D’autre part, les consommateurs seraient habitués au fait que la fourniture de certains produits dans des restaurants ou établissements comparables peut être liée économiquement et d’un point de vue organisationnel à un établissement particulier. Enfin, la question de savoir si les clients d’un restaurant ou d’un établissement comparable commandent leurs boissons en précisant la marque qu’ils préfèrent ou le fait qu’ils choisissent ou non directement les ingrédients des aliments et boissons qui composent leur commande ne pourraient être décisifs lorsqu’il s’agit de déterminer si les produits et les services sont similaires.

56      Harry’s New York Bar fait valoir, dans l’affaire T‑97/14, que la chambre de recours a commis une erreur méthodologique. Un risque de confusion ne pourrait en effet être reconnu que pour des produits et services identiques ou similaires, lorsqu’ils font l’objet d’un enregistrement pour les mêmes classes. Or, la première chambre de recours aurait comparé des produits relevant de la classe 25 (de Harry’s New York Bar et de Harrys Pubar) avec des services de la classe 43 (qui ne concernaient que Harry’s New York Bar), en les considérant comme identiques aux produits et services de Harrys Pubar. Harry’s New York Bar en conclut que la chambre de recours ne devait pas comparer des produits et des services qui ne faisaient pas partie des mêmes classes visées par l’enregistrement, telle que la classe 43, puisque seuls les produits ou services relevant des classes pour lesquelles une protection était revendiquée devaient être protégés, la protection étant exclue pour les produits ou services qui ne relevaient pas des mêmes classes. En outre, la chambre de recours n’aurait pas examiné la question de savoir si les produits et les services des classes concernés se trouvaient dans le même lieu de fabrication et de distribution. Le fait que les produits soient distribués dans des établissements non spécialisés (débits de boisson) exclurait toute similitude entre les produits et services enregistrés sous les classes 25 et 43.

57      L’OHMI conteste les arguments des requérantes et affirme que la chambre de recours n’a commis aucune erreur dans son appréciation de la similitude entre les produits et services couverts par les signes litigieux.

58      Dans l’affaire T‑97/14, Harrys Pubar, en sa qualité d’intervenante, conteste tout d’abord la prétendue existence d’un lieu de fabrication et de distribution différent pour la fourniture d’aliments et de boissons et pour les services de restauration. Ensuite, en ce qui concerne l’affirmation de Harry’s New York Bar, selon laquelle l’existence d’un risque de confusion serait écartée par le seul fait que les produits et services couverts par la marque antérieure n’appartiennent pas aux mêmes catégories que ceux visés par la marque demandée, elle soutient que la classification de Nice est un simple instrument administratif et n’est aucunement déterminante dans l’appréciation d’un risque de confusion. Enfin, selon Harrys Pubar, les produits de la classe 25 visés par la marque demandée sont identiques aux produits de la même classe couverts par la marque antérieure. Les aliments et boissons des classes 30 et 32 et les services de la classe 43 seraient très similaires et identiques aux produits et services couverts par la marque antérieure.

59      Il y a tout d’abord lieu de rappeler que, eu égard au fait que la classification des produits et des services effectuée par l’arrangement de Nice l’est à des fins exclusivement administratives, des produits et des services ne peuvent être considérés comme étant non semblables au seul motif que, comme en l’espèce les produits de la classe 25 et les services de la classe 43, ils figurent dans des classes différentes de cette classification [voir arrêt du 10 septembre 2014, DTM Ricambi/OHMI – STAR (STAR), T‑199/13, EU:T:2014:761, point 39 et jurisprudence citée].

60      Dès lors, l’argument de Harry’s New York Bar, selon lequel l’existence d’un risque de confusion serait écartée par le seul fait que les produits et services concernés par les droits de Harrys Pubar n’appartiennent pas aux mêmes classes que ceux visés par la marque demandée doit être rejeté.

61      Ensuite, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

62      Les produits ou les services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise. Par définition, des produits adressés à des publics différents ne peuvent pas présenter un caractère complémentaire (voir arrêt easyHotel, point 49 supra, EU:T:2009:14, points 57 et 58 et jurisprudence citée).

–       Sur les produits et services des classes 25 et 43 visés par la marque demandée

63      Pour ce qui concerne les produits de la classe 25 et les services relevant de la classe 43, correspondant respectivement aux « vêtements ; sous-vêtements, lingerie, layette, robes, chemises, costumes, vestes, jupes, cravates, t-shirts, casquettes, pantalons, vêtements de sport, maillots de bains ; chaussures, bottes, chaussures de sport ; chapellerie ; gants, bonneterie » et aux « débits de boissons, à savoir cafés, cafétérias, bars, restaurants, restaurants libre-service, restaurants à service rapide et permanent », visés par la marque demandée, il y a lieu de rappeler que la chambre de recours a constaté que les parties n’ont pas contesté la conclusion de la division d’opposition selon laquelle ces produits et services étaient, respectivement, identiques aux produits de la classe 25 et aux services de la classe 42 (devenue classe 43), correspondant respectivement aux « vêtements, chaussures, chapellerie » et aux « services de restauration fournis dans le cadre de services de restaurant, brasserie et café », couverts par la marque antérieure. Il convient de considérer que cette partie de la comparaison des produits et services n’est pas litigieuse et qu’elle est, en outre, correcte.

–       Sur les produits de la classe 30 visés par la marque demandée

64      S’agissant des produits de la classe 30 visés par la marque demandée, il y a lieu de rappeler que la chambre de recours s’est ralliée à la conclusion de la division d’opposition en estimant que les « sucre, riz, tapioca, sagou, miel, sirop de mélasse ; sel, moutarde ; vinaigre, sauces (condiments) ; épices ; glace à rafraîchir », compris dans lesdits produits n’étaient pas comparables aux services de la classe 42 (devenue classe 43) couverts par la marque antérieure, à savoir les « services de restauration fournis dans le cadre de services de restaurant, brasserie et café ». Elle a toutefois ajouté que la même conclusion valait également pour les « café, thé, cacao ; succédanés du café ; préparations pour faire des boissons à base de café, de thé ou de cacao ».

65      Harrys Pubar conteste les appréciations de la chambre de recours. En s’appuyant sur une jurisprudence du Tribunal [arrêt du 13 avril 2011, Bodegas y Viñedos Puerta de Labastida/OHMI – Unión de Cosecheros de Labastida (PUERTA DE LABASTIDA), T‑345/09, EU:T:2011:173], elle soutient notamment que les produits visés au point précédent sont complémentaires avec les services couverts par la marque antérieure et que les canaux de vente et de distribution sont les mêmes ou similaires. En plus, elle invoque la pratique en Suède selon laquelle il serait courant que les restaurants et les établissements comparables vendent de la nourriture et des boissons sous la même marque qu’ils utilisent pour les servir.

66      L’OHMI, tout en admettant l’existence de la jurisprudence du Tribunal citée par Harrys Pubar, estime que la position prise par la chambre de recours est correcte.

67      S’agissant de la comparaison entre, d’une part, les produits, compris dans la classe 30, « café, thé, cacao, sucre, riz, tapioca, sagou, succédanés du café ; miel, sirop de mélasse ; sel, moutarde ; vinaigre, sauces (condiments) ; épices ; glace à rafraîchir ; préparations pour faire des boissons à base de café, de thé ou de cacao » visés par la marque demandée et, d’autre part, les services compris dans la classe 42 (devenue classe 43) « services de restauration fournis dans le cadre de services de restaurant, brasserie et café » couverts par la marque antérieure, il est incontestable que, au regard des facteurs relatifs à leur nature, à leur destination ou à leur utilisation, ils ne sont pas semblables (voir, en ce sens, arrêt PUERTA DE LABASTIDA, point 65 supra, EU:T:2011:173, point 51).

68      Toutefois, il y a lieu de constater que les services de restauration utilisent nécessairement ces produits, de sorte qu’il existe une complémentarité entre lesdits services et ces produits. Par ailleurs, des produits alimentaires peuvent être offerts à la vente dans les lieux de restauration. De tels produits sont donc utilisés et proposés dans le cadre des services de restaurant, brasserie et café. Ces produits sont par conséquent étroitement liés auxdits services [voir, en ce sens, arrêts du 15 février 2011, Yorma’s/OHMI – Norma Lebensmittelfilialbetrieb (YORMA’S), T‑213/09, EU:T:2011:37, point 46, et PUERTA DE LABASTIDA, point 65 supra, EU:T:2011:173, point 52].

69      Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de considérer, contrairement à ce qu’a estimé la chambre de recours, qu’il existe un certain degré de similitude entre les produits mentionnés au point 67 ci-dessus et les services de restauration visés par la marque antérieure.

–       Sur les produits de la classe 32 visés par la marque demandée

70      S’agissants des produits compris dans la classe 32 visés par la marque demandée, la chambre de recours a conclu que les « boissons non alcooliques et préparations pour faire des boissons (à l’exception de celles à base de café, de thé ou de cacao et des boissons lactées) ; eaux minérales et gazeuses ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops » étaient dissemblables des services couverts par la marque antérieure. En revanche, les « bières » présenteraient un faible degré de similitude avec lesdits services.

71      Harrys Pubar soutient que tous les produits compris dans la classe 32 et visés par la marque demandée sont comparables aux services couverts par la marque antérieure.

72      L’OHMI partage les conclusions de la chambre de recours et souligne qu’il existe une différence entre les « bières » et les boissons alcooliques et les autres boissons comprises dans la classe 32. Par rapport à ces autres boissons, les consommateurs feraient un choix spontané et impulsif parmi une sélection de boissons qui leur seront proposées. Le fait qu’il soit possible, dans certains restaurants, de demander une marque spécifique d’eau ou de jus ne rendrait pas ces produits comparables aux services de restauration. En revanche, comme considéré par la chambre de recours, il existerait un faible degré de similitude entre les « bières » et les services couverts par la marque antérieure, même si la nature et la finalité de ce produit diffèrent totalement de celles desdits services.

73      Il y a lieu de considérer que le raisonnement exposé aux points 67 et 68 ci-dessus doit être également appliqué aux boissons et aux autres produits compris dans la classe 32 visés par la marque demandée. Ces boissons et produits sont en effet complémentaires aux services de restauration de la classe 42 (devenue classe 43) couverts par la marque antérieure lorsqu’ils sont utilisés et proposés dans le cadre des services de restaurant, brasserie et café (voir, en ce sens, arrêt YORMA’S, point 68 supra, EU:T:2011:37, point 46).

74      Il convient donc de conclure, contrairement à ce qu’a estimé la chambre de recours, que tous les produits relevant de la classe 32 visés par la marque demandée présentent un certain degré de similitude avec les services de la classe 42 (devenue classe 43) couverts par la marque antérieure.

75      Il résulte de ce qui précède que tous les produits compris dans les classes 30 et 32 visés par la marque demandée sont comparables aux services de la classe 42 (devenue classe 43) couverts par la marque antérieure et que, par conséquent, la décision attaquée est, à cet égard, partiellement entachée d’erreur d’appréciation.

 Sur la comparaison des signes

76      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

77      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt OHMI/Shaker, point 76 supra, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêt OHMI/Shaker, point 76 supra, EU:C:2007:333, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, EU:C:2007:539, point 43).

78      En l’espèce, la marque demandée se compose des éléments verbaux « harry’s », « new york » et « bar ». La marque antérieure est une marque figurative qui consiste en une enseigne de brasserie à l’ancienne, contenant le mot « harrys » au centre et les mots « pub », « casino » et « restaurang » autour de celui-ci. L’élément verbal « harrys » dans la marque antérieure apparaît en caractères italiques stylisés, avec un « H » majuscule et les autres lettres en minuscules, tandis que les autres mots sont écrits en majuscules et en caractères gras, dans une police de taille inférieure.

79      La chambre de recours a considéré que tant dans la marque antérieure que dans la marque demandée, les éléments « harrys » et « harry’s » seront compris comme une référence au prénom Harry présenté au génitif possessif. Plus précisément, la marque antérieure serait perçue dans le sens que les produits ont été préparés par Harry. Les deux marques seraient dès lors similaires sur le plan visuel, dans la mesure où elles correspondent au prénom courant Harry. La référence à la ville de New York (États-Unis) désignerait l’image et le style de bar exploité par cette personne et, pour cette raison, ne serait pas particulièrement distinctive. Les éléments verbaux additionnels de la marque antérieure seraient dépourvus de caractère distinctif dans la mesure où ils désignent le type d’établissement exploité par la personne prénommée Harry. L’élément graphique serait simplement décoratif et renforcerait le mot « harrys » qui occupe la position centrale. Sur le plan phonétique, les deux marques seraient identiques. Sur le plan conceptuel, elles seraient similaires dans la mesure où les mots « pub » et « bar » désignent le même type d’établissement servant des boissons. Selon la chambre de recours, les deux marques sont similaires.

80      Harrys Pubar soutient que la marque demandée et les signes opposés sont fortement similaires sur le plan visuel et identiques sur les plans phonétique et conceptuel. Elle relève que la chambre de recours a échoué dans son obligation d’effectuer une appréciation globale de la marque demandée et des signes opposés, en ce qu’elle n’a tenu aucun compte de la nature similaire des éléments verbaux « bar », « pub », « café » et « restaurang ». La similitude des signes serait encore plus élevée que celle admise par la chambre de recours. L’élément « new york » dans la marque demandée serait perçu par les consommateurs pertinents seulement comme une indication du style du bar et non comme un élément caractéristique, en soi, d’une marque. Selon Harrys Pubar, la marque antérieure et la marque demandée sont dominées par les éléments « harrys » et « harry’s » et les éléments figuratifs ainsi que les mots autres que « harrys » et « harry’s » ne l’emportent pas sur la forte similitude existante entre les deux marques.

81      Harry’s New York Bar soutient que la chambre de recours a commis une erreur dans son appréciation du caractère dominant du prénom Harry, qui aurait en revanche un caractère distinctif limité en tant que composant. Harry’s New York Bar relève ensuite que la chambre de recours a commis une erreur dans son appréciation de la similitude (sur les plans visuel, phonétique et conceptuel) de la marque demandée et de la marque antérieure.

82      L’OHMI partage les conclusions de la chambre de recours. Sur le plan visuel, les deux marques seraient similaires, en ce qu’elles correspondent au prénom Harry. Sur le point phonétique, les marques en conflit seraient fortement similaires, voire identiques. Sur le plan conceptuel, les marques en conflit seraient identiques dans la mesure où elles font référence au génitif possessif du mot « harry ».

83      Il convient dès lors de vérifier si la chambre de recours n’a pas commis d’erreur dans l’appréciation des similitudes entre les signes en conflit.

84      S’agissant de l’appréciation du caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre, et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe [voir arrêt du 19 juin 2012, H.Eich/OHMI – Arav (H.EICH), T‑557/10, EU:T:2012:309, point 30 et jurisprudence citée].

85      Par ailleurs, comme relevé au point 77 ci-dessus, ce n’est que si l’élément dominant est susceptible de dominer à lui seul l’image de la marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci, que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant [voir arrêt du 31 janvier 2012, Cervecería Modelo/OHMI – Plataforma Continental (LA VICTORIA DE MEXICO), T‑205/10, EU:T:2012:36, point 37 et jurisprudence citée].

86      Ainsi que le fait valoir à juste titre l’OHMI, quand une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, comme c’est le cas de la marque antérieure, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque (voir arrêt LA VICTORIA DE MEXICO, point 85 supra, EU:T:2012:36, point 38 et jurisprudence citée).

87      En l’espèce, l’élément « harrys » de la marque antérieure, écrit dans une police de caractères très lisible, est immédiatement perceptible et très facilement reconnaissable, compte tenu de sa taille, de son caractère stylisé et de sa position centrale.

88      Au vu de ces considérations, la chambre de recours a donc considéré à juste titre que l’élément verbal « harrys » était dominant dans la marque antérieure, tandis que les éléments verbaux additionnels étaient dépourvus de caractère distinctif. La divergence stylistique des éléments verbaux est sans importance et l’élément graphique sera perçu par le public pertinent comme simplement décoratif. L’élément « Harrys » fournira une indication objective du type d’établissement exploité par la personne prénommée Harry, sans pour autant identifier l’origine du produit ou du service en cause.

89      Ensuite, s’agissant, premièrement, de la comparaison des signes en conflit sur le plan visuel, il y a lieu de rappeler que rien ne s’oppose à ce que soit vérifiée l’existence d’une similitude visuelle entre une marque verbale et une marque figurative, étant donné que ces deux types de marques ont une configuration graphique capable de donner lieu à une impression visuelle [voir arrêt du 4 mai 2005, Chum/OHMI – Star TV (STAR TV), T‑359/02, Rec, EU:T:2005:156, point 43 et jurisprudence citée].

90      Il convient également de rappeler que, si le consommateur moyen des produits et services en cause perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’en reste pas moins que, en percevant un élément verbal au sein d’un signe figuratif, il décomposera cet élément verbal en des éléments verbaux qui, pour lui, évoquent une signification précise ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît [voir arrêt du 6 septembre 2013, Eurocool Logistik/OHMI – Lenger (EUROCOOL), T‑599/10, EU:T:2013:399, point 104 et jurisprudence citée].

91      En l’espèce, il convient d’écarter d’emblée les arguments de Harry’s New York Bar tirés des erreurs que la chambre de recours aurait commises dans son appréciation de la similitude sur les plans visuel, phonétique et conceptuel des signes en conflit. En effet, Harry’s New York Bar se réfère uniquement à la marque communautaire HARRY’S BAR contestée dans les affaires jointes T‑711/13 et T‑716/13 et ne formule aucun argument spécifique en lien avec la demande de marque communautaire HARRY’S NEW YORK BAR. Ces arguments doivent dès lors être rejetés comme dénués de pertinence.

92      Quant à l’appréciation de la similitude entre la marque demandée et la marque antérieure, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les signes en conflit sont similaires sur le plan visuel au motif de la présence du mot « harry », se terminant par un « s » dans la marque antérieure et par une apostrophe et un « s » dans la marque demandée, doit être approuvée. Tant dans la marque antérieure que dans la marque demandée, les éléments « harrys » et « harry’s » seront compris comme une référence au prénom anglais Harry au possessif, le « s » final étant, en suédois, la marque du génitif, équivalent au « s » précédé par une apostrophe en anglais. Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de Harry’s New York Bar selon lequel le mot « harrys » dans la marque antérieure représente en réalité une forme plurielle. En effet, si le pluriel des prénoms se terminant avec « y » est en anglais généralement « ys », à la différence de tout autre mot avec la même terminaison, dont le pluriel est généralement « ies », le public suédois percevra normalement le « s » final du mot « harrys » comme une référence possessive.

93      Les autres éléments verbaux de la marque antérieure, à savoir « pub », « casino » et « restaurang », et l’élément « bar » dans la marque demandée sont susceptibles d’être perçus par le consommateur comme essentiellement décoratifs, voire descriptifs, désignant l’endroit où a lieu la vente de nourriture et de boissons, ou la consommation de ces produits ou des produits qui leur sont généralement associés. Ces éléments verbaux additionnels sont ainsi négligeables dans l’impression d’ensemble produite par les marques en conflit.

94      L’élément graphique ne saurait non plus établir une différence substantielle entre la marque demandée et la marque antérieure sur le plan visuel. La marque antérieure met en effet en évidence le mot « harrys », qui occupe la position centrale, visiblement la plus accrocheuse, tandis que les autres éléments verbaux contenus dans sa partie supérieure ou inférieure ont visiblement un caractère accessoire.

95      L’impression générale donnée par la marque demandée est semblable à celle suscitée par la marque antérieure en dépit de la présence de l’élément « new york ». En effet, cette désignation n’a qu’une importance limitée dès lors que, en combinaison avec les mots « harry’s» et « bar », elle sera perçue par le public pertinent comme évoquant un certain style de bar exploité par la personne prénommée Harry.

96      Deuxièmement, sur le plan phonétique, en raison de la tendance naturelle des consommateurs d’abréger les signes longs et du caractère descriptif des termes « pub », « casino » et « restaurang », relevé au point 93 ci-dessus, tous les éléments verbaux de la marque antérieure ne seront pas prononcés [arrêt du 9 avril 2013, Italiana Calzature/OHMI – Vicini (Giuseppe GIUSEPPE ZANOTTI DESIGN), T‑336/11, EU:T:2013:156, point 40]. Il s’ensuit que, dans la marque antérieure, seul le terme « harrys » sera prononcé par le public pertinent. Bien que la marque demandée soit en revanche et en toute probabilité prononcée entièrement, il subsiste néanmoins un certain degré de similitude phonétique dérivant du mot « harry’s », d’autant que le mot « bar » est descriptif à l’égard des produits et services concernés.

97      Harry’s New York Bar se réfère à deux des autres signes opposés, où le mot « casino » dans la marque antérieure est remplacé par le mot « café », pour soutenir que tous les mots dans les signes opposés sont aussi importants et devraient être prononcés. Toutefois, cette allégation est sans pertinence dans la mesure où la décision attaquée est fondée uniquement sur l’examen de l’existence du risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure.

98      Troisièmement, sur le plan conceptuel, il convient d’apprécier la similitude des marques en conflit, d’une part, par rapport à la compréhension qu’en a le public pertinent et, d’autre part, par rapport aux produits ou aux services concernés [voir arrêt du 9 juillet 2008, Coffee Store/OHMI (THE COFFEE STORE), T‑323/05, EU:T:2008:265, point 33 et jurisprudence citée].

99      Or, ainsi que le souligne à juste titre l’OHMI, Harry est un prénom anglais courant que le public suédois sera en mesure d’identifier comme un prénom masculin, parce qu’il y est accoutumé et en raison de son association avec de nombreux personnages célèbres. Bien que l’utilisation du nom d’une personne comme désignation commerciale soit une pratique relativement courante dans le secteur de la restauration, les marques en conflit sont conceptuellement similaires dans la mesure où le public concerné peut certainement penser que les produits et services concernés ont été produits ou sont offerts par une entreprise portant ce nom. En effet, en dépit du fait que le prénom Harry dans les marques en conflit ne transmet pas une information précise quant à l’identité du fabricant des produits ou des prestataires des services, il permet au public concerné de distinguer les produit ou les services désignés par les marques contenant ce prénom de ceux qui ont une autre origine commerciale et de conclure que tous les produits ou les services ainsi désignés ont été fabriqués, commercialisés ou fournis sous le contrôle de leurs titulaires, auxquels peut être attribuée la responsabilité de leur qualité [voir arrêt du 21 mai 2014, Bateaux mouches/OHMI (BATEAUX-MOUCHES), T‑553/12, EU:T:2014:264, point 34 et jurisprudence citée].

100    De plus, le mot « bar » d’un côté et les mots « pub » et « restaurang » de l’autre révèlent également une similitude conceptuelle forte, ces mots désignant tous des endroits de vente ou de consommation de nourriture et de boissons ainsi que des services y afférents. Le mot « casino », en revanche, se réfère à des jeux de divertissement et à des activités récréatives et de paris et pourrait ainsi avoir une signification différente, ainsi que le souligne Harry’s New York Bar. Toutefois, la marque antérieure étant enregistrée pour des services de restauration et non pour des activités de divertissement, la similitude conceptuelle susmentionnée entre les marques en conflit n’en sera pas infirmée.

101    Eu égard aux considérations précédentes, il convient de constater qu’il existe une similitude conceptuelle entre les marques en conflit.

102    Dès lors, il y a lieu de retenir que les marques en conflit sont similaires.

 Sur le risque de confusion

103    L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec, EU:T:2006:397, point 74].

104    En outre, ainsi qu’il découle du considérant 8 du règlement n° 207/2009, l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, Rec, EU:C:1997:528, point 24 ; Canon, point 103 supra, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec, EU:C:1999:323, point 20).

105    La chambre de recours a considéré qu’il ne saurait y avoir de risque de confusion entre la marque antérieure et la marque demandée par rapport aux produits compris dans la classe 30, ainsi que par rapport aux produits compris dans la classe 32 correspondant aux « boissons non alcooliques et préparations pour faire des boissons (à l’exception de celles à base de café, de thé ou de cacao et des boissons lactées) ; eaux minérales et gazeuses ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops », dès lors qu’elle avait exclu toute similitude entre ces produits et les services couverts par la marque antérieure. En revanche, elle a soutenu que le public pertinent pouvait considérer que les produits de la classe 25, les « bières » de la classe 32 et les services de la classe 43 visés par la marque demandée provenaient des mêmes entreprises. La chambre de recours a ajouté, d’une part, que, bien que courant, le prénom Harry ne serait pas dépourvu de caractère distinctif, et, d’autre part, que la stylisation et l’intégration du prénom dans l’élément figuratif de la marque antérieure, ainsi que la désignation de la ville de New York dans la marque demandée, ne seraient pas suffisantes pour écarter un risque de confusion.

106    Harrys Pubar soutient qu’il y a un risque de confusion entre les marques en conflit par rapport à tous les produits et services visés par la marque demandée.

107    Harry’s New York Bar soutient que la chambre de recours a commis une erreur méthodologique et méconnu l’exigence d’une appréciation globale du risque de confusion, qui tienne compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce et de l’impression d’ensemble produite par les marques en conflit.

108    En l’espèce, dès lors qu’il a été relevé que tous les produits et services visés par la marque demandée étaient identiques ou présentaient des similitudes avec ceux couverts par la marque antérieure et que les marques en conflit étaient similaires, il y a lieu de conclure qu’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent pour tous les produits et services pour lesquels l’enregistrement avait été demandé.

109    La conclusion qui précède n’est pas remise en cause par les observations de Harry’s New York Bar qui se réfèrent uniquement à la marque communautaire HARRY’S BAR contestée dans les affaires jointes T‑711/13 et T‑716/13. Ces arguments sont inopérants et doivent, dès lors, être rejetés.

110    L’argument de Harry’s New York Bar tiré du caractère distinctif limité du prénom Harry en tant que composant de la marque antérieure doit également être rejeté. En effet, si le caractère distinctif de la marque antérieure doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion, il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenants lors de cette appréciation. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services visés [voir arrêt du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, Rec, EU:T:2007:387, point 70 et jurisprudence citée]. Tel est le cas en l’espèce. En effet, même si la marque antérieure avait un caractère distinctif faible, ce qui n’est pas établi, il y aurait lieu de conclure en tout état de cause, eu égard aux éléments mentionnés au point 108 ci-dessus, à l’existence d’un risque de confusion entre les deux marques en conflit.

111    Il résulte de ce qui précède que, dans l’affaire T‑84/14, le moyen de Harrys Pubar, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, doit être accueilli. Par conséquent, il y a lieu d’annuler les points 1 du dispositif de la décision attaquée relatifs aux affaires R 1038/2012‑1 et R 1045/2012‑1.

112    Il résulte également de ce qui précède que, dans l’affaire T‑97/14, le moyen de Harry’s New York Bar, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 doit être rejeté. Ce moyen, ainsi que celui tiré de la violation du considérant 10 et de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009 étant rejetés, le recours dans cette affaire est par conséquent également rejeté.

 Sur les dépens

113    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

114    Dans les circonstances de l’espèce, le recours de Harrys Pubar étant fondé et le recours de Harry’s New York Bar étant rejeté, il y a lieu de condamner l’OHMI à ses propres dépens et à un tiers des dépens exposés par Harrys Pubar et de condamner Harry’s New York Bar à ses propres dépens et à deux tiers des dépens exposés par Harrys Pubar.

115    En outre, Harrys Pubar, en tant qu’intervenante dans l’affaire T‑97/14, a conclu à la condamnation de Harry’s New York Bar aux dépens qu’elle a exposés dans la procédure administrative devant l’OHMI. À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure, les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme dépens récupérables. Il n’en va toutefois pas de même des frais exposés aux fins de la procédure devant la division d’opposition. Partant, la demande de Harrys Pubar tendant à ce que Harry’s New York Bar, ayant succombé en ses conclusions, soit condamnée aux dépens des procédures devant la chambre de recours et la division d’opposition ne peut être accueillie que s’agissant des seuls dépens indispensables exposés par l’intervenante aux fins de la procédure devant la chambre de recours [voir, en ce sens, arrêt du 12 janvier 2006, Devinlec/OHMI – TIME ART (QUANTUM), T‑147/03, Rec, EU:T:2006:10, point 115].

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Dans l’affaire T‑84/14, les points 1 du dispositif de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 14 novembre 2013 (affaires jointes R 1038/2012‑1 et R 1045/2012‑1), relative à une procédure d’opposition entre Harrys Pubar AB et Harry’s New York Bar SA, sont annulés.

2)      Dans l’affaire T‑97/14, le recours de Harry’s New York Bar est rejeté.

3)      Harry’s New York Bar est condamnée à supporter ses propres dépens, deux tiers des dépens de Harrys Pubar exposés par cette dernière dans la procédure devant le Tribunal, ainsi que ceux exposés par Harrys Pubar au cours de la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI. L’OHMI est condamné à supporter ses propres dépens ainsi qu’un tiers des dépens de Harrys Pubar exposés par cette dernière dans la procédure devant le Tribunal.

Kanninen

Pelikánová

Buttigieg

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 18 février 2016.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.