Language of document : ECLI:EU:T:2023:781

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

6 décembre 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne tridimensionnelle – Forme d’une figurine-jouet – Causes de nullité absolue – Signe constitué exclusivement par la forme imposée par la nature même du produit – Signe constitué exclusivement par la forme du produit nécessaire à l’obtention d’un résultat technique – Article 7, paragraphe 1, sous e), i) et ii), du règlement (CE) n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous e), i) et ii), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑298/22,

BB Services GmbH, établie à Flörsheim am Main (Allemagne), représentée par Me M. Krogmann, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme E. Nicolás Gómez et M. D. Hanf, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Lego Juris A/S, établie à Billund (Danemark), représentée par Mes V. von Bomhard et J. Fuhrmann, avocats,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de Mmes M. J. Costeira, présidente, M. Kancheva (rapporteure) et E. Tichy‑Fisslberger, juges,

greffier : Mme R. Ūkelytė, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 16 mars 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, BB Services GmbH, demande l’annulation et la réformation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 16 mars 2022 (affaire R 1354/2021-5) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 1er juillet 2020, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande de nullité de la marque de l’Union européenne ayant été enregistrée le 23 juin 2000, sous le numéro 50518 et sur le fondement d’un caractère distinctif acquis par l’usage, à la suite d’une demande déposée le 1er avril 1996 par Kirkbi A/S, le prédécesseur en droit de l’intervenante, Lego Juris A/S, pour le signe tridimensionnel suivant :

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3        Les produits couverts par la marque contestée pour lesquels la nullité était demandée relevaient des classes 9, 25 et 28 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondaient, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Aimants décoratifs [magnets] ; programmes de jeux pour ordinateurs ; jeux informatiques téléchargeables, supports de données et d’informations enregistrés » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie » ;

–        classe 28 : « Jeux, jouets ».

4        Les causes invoquées à l’appui de la demande en nullité étaient celles visées à l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous e), i) et ii), du même règlement.

5        Le 25 juin 2021, la division d’annulation a rejeté la demande en nullité dans son intégralité.

6        Le 3 août 2021, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation.

7        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours dans son intégralité. En substance, elle a considéré qu’il n’avait pas été démontré que la marque contestée, sous la forme d’une figurine-jouet, relevait des causes de nullité de l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous e), i) et ii), du même règlement, pour tous les produits relevant des classes 9, 25 et 28.

 Conclusions des parties

8        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        déclarer la nullité de la marque contestée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

9        L’EUIPO et l’intervenante concluent, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

10      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 1er avril 1996, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié, lui-même remplacé par le règlement 2017/1001] (voir, en ce sens, ordonnance du 5 octobre 2004, Alcon/OHMI, C‑192/03 P, EU:C:2004:587, points 39 et 40, et arrêt du 23 avril 2020, Gugler France/Gugler et EUIPO, C‑736/18 P, non publié, EU:C:2020:308, point 3 et jurisprudence citée).

11      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée et par les parties dans leurs écritures à l’article 7, paragraphe 1, sous e), i) et ii), et à l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001 comme visant, respectivement, l’article 7, paragraphe 1, sous e), i) et ii), et l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94, d’une teneur en substance identique pour ce qui concerne le présent litige.

12      Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le présent litige est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001.

 Sur les conclusions aux fins de déclaration de nullité de la marque contestée

13      Par son deuxième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal de déclarer la nullité de la marque contestée.

14      À cet égard, il convient de considérer que, en demandant au Tribunal de déclarer la nullité de la marque contestée, la requérante formule, en vertu de l’article 72, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, une demande de réformation visant à ce que le Tribunal adopte la décision que la chambre de recours aurait dû prendre [voir, en ce sens, arrêt du 21 mars 2012, Feng Shen Technology/OHMI – Majtczak (FS), T‑227/09, EU:T:2012:138, point 54 et jurisprudence citée].

 Sur la recevabilité

 Sur la recevabilité du recours en ce qui concerne les produits relevant des classes 9 et 25

15      L’EUIPO et l’intervenante excipent de l’irrecevabilité du recours en ce qui concerne les produits relevant des classes 9 et 25. En particulier, l’EUIPO fait valoir que les observations formulées dans la requête se limitent à l’absence d’aptitude à la protection de la marque contestée pour les jeux et les jouets relevant de la classe 28, mais que, en revanche, la requête ne contient aucun argument remettant en cause la légalité de la décision attaquée en ce qui concerne les autres produits relevant des classes 9 et 25.

16      En vertu de l’article 177, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, toute requête doit indiquer, notamment, l’objet du litige, les moyens et les arguments invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même [voir arrêt du 7 décembre 2022, Borussia VfL 1900 Mönchengladbach/EUIPO – Neng (Fohlenelf), T‑747/21, non publié, EU:T:2022:773, point 17 et jurisprudence citée].

17      En l’espèce, force est de constater que la requête ne contient aucun argument spécifique à l’égard des produits relevant des classes 9 et 25, et, en particulier, n’expose pas les motifs pour lesquels l’article 7, paragraphe 1, sous e), i) ou ii), du règlement n° 40/94 devrait s’appliquer à ces produits. Partant, la requête ne satisfait pas aux exigences minimales de l’article 177, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure en ce qui concerne lesdits produits.

18      Il s’ensuit que le recours doit être rejeté comme irrecevable en tant qu’il concerne les produits relevant des classes 9 et 25.

 Sur le renvoi global de la requérante à ses écritures devant l’EUIPO

19      Aux points 18, 54 et 68 de la requête, la requérante se réfère à l’ensemble des éléments qu’elle a précédemment exposés devant la division d’annulation et la chambre de recours. Elle entend inclure ces éléments dans les motifs du présent recours.

20      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 177, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure, la requête doit contenir les moyens et arguments invoqués ainsi qu’un exposé sommaire desdits moyens. Selon une jurisprudence bien établie, si le corps de la requête peut être étayé et complété, sur des points spécifiques, par des renvois à des extraits de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit, qui, en vertu des dispositions rappelées ci-dessus, doivent figurer dans la requête elle-même. Il n’incombe pas au Tribunal de se substituer aux parties en essayant de rechercher les éléments pertinents dans les documents auxquels elles se réfèrent [voir arrêts du 8 juillet 2010, Engelhorn/OHMI – The Outdoor Group (peerstorm), T‑30/09, EU:T:2010:298, points 18 et 19 et jurisprudence citée, et du 2 mars 2022, Distintiva Solutions/EUIPO – Makeblock (Makeblock), T‑86/21, non publié, EU:T:2022:107, point 22 et jurisprudence citée].

21      Il s’ensuit que la requête, pour autant qu’elle renvoie aux écrits déposés devant l’EUIPO, est irrecevable dans la mesure où le renvoi global qu’elle contient n’est pas rattachable aux moyens et arguments développés dans cette requête elle-même.

 Sur le fond

22      À l’appui du recours, la requérante invoque en substance deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94, lu conjointement avec l’article 51, paragraphe 1, sous a), du même règlement, et, le second, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), de ce règlement, lu conjointement avec l’article 51, paragraphe 1, sous a), dudit règlement. Elle fait valoir, d’une part, que la marque contestée consiste exclusivement en une forme imposée par la nature même du produit et, d’autre part, que cette marque consiste exclusivement en une forme nécessaire à l’obtention d’un résultat technique.

23      Il ressort notamment de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94 que la nullité de la marque de l’Union européenne est déclarée, sur demande présentée auprès de l’EUIPO, lorsque cette marque a été enregistrée contrairement aux dispositions de l’article 7 du même règlement.

24      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i) et ii), du règlement n° 40/94, sont refusés à l’enregistrement les signes constitués exclusivement soit par la forme imposée par la nature même du produit, soit par la forme nécessaire à l’obtention d’un résultat technique.

25      L’objectif immédiat de l’interdiction d’enregistrer les formes visées à l’article 7, paragraphe 1, sous e), du règlement n°°40/94 est d’éviter que le droit exclusif et permanent que confère une marque puisse servir à perpétuer, sans limitation dans le temps, d’autres droits que le législateur de l’Union européenne a voulu soumettre à des délais de péremption (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 45, et du 18 septembre 2014, Hauck, C‑205/13, EU:C:2014:2233, points 19 et 20).

26      La marque de l’Union européenne bénéficie d’une  présomption de validité, de sorte qu’il appartient au demandeur en nullité d’invoquer devant l’EUIPO les éléments concrets qui mettent en cause sa validité [voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2013, Fürstlich Castell’sches Domänenamt/OHMI – Castel Frères (CASTEL), T‑320/10, EU:T:2013:424, points 27 et 28].

27      En l’espèce, afin de démontrer que la marque contestée relève des causes de nullité de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i) et ii), du règlement n° 40/94, la requérante a présenté devant l’EUIPO les éléments de preuve suivants, recensés au point 38 de la décision attaquée :

–        BDR 1 : extrait du registre de la marque contestée ;

–        BDR 2 : aperçu de l’histoire et de l’évolution de la « figurine » depuis 1975 ;

–        BDR 3 : extrait de Lego Minifigure year by year – A visual History (édition française : Les figurines Lego au fil du temps) (Dorling Kindersley, Londres, 2013) ;

–        BDR 4 : extrait de Das Lego Buch (édition française : Lego, le livre) (Dorling Kindersley, Munich, 2020) ;

–        BDR 5 : extrait de Lego Minifiguren, eine Erfolgsgeschichte von 1978 bis heute (édition française : Les figurines, 30 ans d’histoire) (Dorling Kindersley, Munich, 2010) ;

–        BDR 6 : brevet US n° 3 005 282 du 24 octobre 1961 de la brique Lego (Toy Building Brick) ;

–        BDR 7 : fascicule du brevet britannique n° 866 557 du 26 avril 1961 sur l’amélioration des boîtes de jeux de construction ;

–        BDR 8 : extrait de Lego Minifigure year by year – A visual History (Dorling Kindersley, Londres, 2013) ;

–        BDR 9 : fascicule du brevet allemand DE 28 36 971 C2 relatif à la conception d’éléments assemblables permettant de faire pivoter les jambes de la figurine en cause.

28      À titre liminaire, il convient de signaler que la marque contestée a déjà fait l’objet de l’arrêt du 16 juin 2015, Best-Lock (Europe)/OHMI – Lego Juris (Forme d’une figurine de jouet) (T‑395/14, non publié, EU:T:2015:380), confirmé par l’ordonnance du 14 avril 2016, Best-Lock (Europe)/EUIPO (C‑451/15 P, non publiée, EU:C:2016:269). Dans cet arrêt, le Tribunal a rejeté une demande en nullité fondée sur les mêmes causes que celles invoquées dans la présente affaire, mais formée par une demanderesse distincte de la requérante. Faute d’identité des parties, ledit arrêt n’est donc pas revêtu de l’autorité de la chose jugée à l’égard du cas d’espèce.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94

29      La requérante soutient que la chambre de recours a commis des erreurs d’appréciation dans l’application du motif de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94.

30      En premier lieu, s’agissant de la nature du produit en cause, la requérante allègue qu’il s’agit d’une « figurine de construction emboîtable », compatible avec le système modulaire de construction de l’intervenante. Elle reproche à la chambre de recours de n’avoir pas fondé son appréciation sur le produit concret, mais plus généralement sur une « figurine-jouet » comprise dans la catégorie des jeux et des jouets relevant de la classe 28.

31      En deuxième lieu, s’agissant des caractéristiques essentielles de la marque contestée, la requérante soutient qu’il convient de les apprécier au regard de la forme concrète de cette marque. Selon elle, une caractéristique peut être essentielle, au sens de la jurisprudence, bien qu’elle ne figure pas parmi les plus importantes. Elle fait valoir que ces caractéristiques comprennent non seulement la tête, le corps, les bras et les jambes, mais également les mains munies d’accroches et les parties évidées à l’arrière des jambes et sous les pieds, aux fins de l’assemblage avec d’autres briques de construction de l’intervenante.

32      En troisième lieu, s’agissant de la fonction générique du produit, la requérante allègue qu’elle a démontré que la marque contestée et ses éléments individuels, en particulier la tête ainsi que le torse, les bras et les jambes, étaient également conçus à tous égards de façon à ce que la figurine de construction emboîtable en cause et ses éléments individuels reproduits dans ladite marque soient compatibles et puissent être assemblés avec d’autres figurines de construction emboîtables et d’autres briques de construction de l’intervenante. Aucune caractéristique de ladite marque, ni, à plus forte raison, aucune caractéristique essentielle de celle-ci, non plus que la marque contestée dans son ensemble ne présenterait d’élément décoratif ou de fantaisie qui aille au-delà de la fonctionnalité décrite. Le facteur décisif serait que toutes les caractéristiques visibles de cette marque, c’est-à-dire la forme donnée à la tête, au corps, aux bras et aux jambes, serviraient exclusivement au caractère démontable, au caractère empilable ou à la compatibilité de ladite figurine au sein du système modulaire de construction de l’intervenante et auraient reçu en cela une forme fonctionnelle. Ainsi, la forme de la tête serait entièrement conçue afin de permettre son assemblage immédiat avec d’autres briques de l’intervenante et il en irait de même pour tous les autres éléments de ladite marque, notamment le torse, les bras et les jambes.

33      La requérante conclut que chacune des caractéristiques techniques et fonctionnelles de la marque contestée forme à cet égard une caractéristique « générique », au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94, pour une figurine de construction emboîtable et est imposée par la nature de ce produit. Elle souligne que la question de savoir si le produit peut également revêtir une forme alternative importe peu dans le cadre de cette disposition.

34      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

35      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94, sont refusés à l’enregistrement les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature même du produit.

36      Une application correcte de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94 implique que les caractéristiques essentielles du signe concerné, à savoir les éléments les plus importants de celui-ci, soient dûment identifiées au cas par cas, en se fondant sur l’impression globale dégagée par le signe ou sur un examen successif de chacun des éléments constitutifs de ce signe (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 septembre 2014, Hauck, C‑205/13, EU:C:2014:2233, point 21 et jurisprudence citée).

37      Par conséquent, l’identification des caractéristiques essentielles d’un signe tridimensionnel en vue d’une éventuelle application du motif de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94 peut, selon le cas, et en particulier eu égard au degré de difficulté de celui-ci, être effectuée par une simple analyse visuelle dudit signe ou, au contraire, être basée sur un examen approfondi dans le cadre duquel sont pris en compte des éléments utiles à l’appréciation, tels que des enquêtes et des expertises (voir, par analogie, arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 71).

38      Ainsi, l’autorité compétente peut effectuer un examen approfondi dans le cadre duquel sont pris en compte, outre la représentation graphique et les éventuelles descriptions fournies lors du dépôt de la demande d’enregistrement, des éléments utiles à l’identification convenable des caractéristiques essentielles d’un signe (voir, par analogie, arrêt du 6 mars 2014, Pi-Design e.a./Yoshida Metal Industry, C‑337/12 P à C‑340/12 P, non publié, EU:C:2014:129, point 54).

39      Il s’ensuit que, si l’identification des caractéristiques essentielles du signe en cause doit en principe débuter par l’examen de la représentation graphique de ce signe, l’autorité compétente peut également se référer à d’autres éléments d’information utiles permettant de déterminer correctement ces caractéristiques, tels que la perception du public pertinent (voir, par analogie, arrêt du 23 avril 2020, Gömböc, C‑237/19, EU:C:2020:296, points 30, 31 et 37).

40      Il ressort ainsi de la jurisprudence citée aux points 37 à 39 ci-dessus, relative à l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94, applicable par analogie, mutatis mutandis, au paragraphe 1, sous e), i), du même article, que des éléments d’information autres que la seule représentation graphique, tels que la perception du public pertinent, peuvent être utilisés afin d’identifier les caractéristiques essentielles du signe en cause.

41      Afin d’analyser la forme imposée par la nature du produit au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94, les caractéristiques essentielles du signe doivent, dans la mesure du possible, être appréciées au regard de la nature du produit concret représenté. Une telle analyse ne peut être effectuée sans que soient pris en considération, le cas échéant, les éléments supplémentaires ayant trait à la nature du produit concret, même s’ils ne sont pas visibles dans la représentation graphique (voir, par analogie, arrêts du 10 novembre 2016, Simba Toys/EUIPO, C‑30/15 P, EU:C:2016:849, points 46 et 48, et du 23 avril 2020, Gömböc, C‑237/19, EU:C:2020:296, point 33).

42      Dans l’application du motif de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94, il y a lieu de tenir compte du fait que la notion de « forme imposée par la nature même du produit » implique que les formes dont les caractéristiques essentielles sont inhérentes à la fonction ou aux fonctions génériques de ce produit doivent, en principe, également être refusées à l’enregistrement (voir, par analogie, arrêt du 18 septembre 2014, Hauck, C‑205/13, EU:C:2014:2233, point 25).

43      De surcroît, il s’agit de caractéristiques essentielles que le consommateur pourra rechercher dans les produits des concurrents étant donné que ces produits visent à remplir une fonction identique ou similaire (voir, par analogie, arrêt du 18 septembre 2014, Hauck, C‑205/13, EU:C:2014:2233, point 26).

44      Toutefois, l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94 ne saurait s’appliquer lorsque la demande d’enregistrement en tant que marque porte sur une forme de produit dans laquelle un autre élément, tel qu’un élément ornemental ou de fantaisie, qui n’est pas inhérent à la fonction générique du produit, joue un rôle important ou essentiel (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 septembre 2014, Hauck, C‑205/13, EU:C:2014:2233, point 22 et jurisprudence citée).

45      Il s’ensuit que le motif de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94 ne peut s’appliquer dès qu’il existe au moins une caractéristique essentielle de la forme qui n’est pas imposée par la nature même du produit, de sorte que la marque contestée n’est pas constituée « exclusivement » par la forme imposée par la nature même du produit.

46      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner le bien-fondé du premier moyen.

–       Sur la détermination de la nature du produit

47      S’agissant de la nature du produit en cause, aux points 41 à 44 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé qu’il ressortait « indubitablement », tant des éléments de preuve produits par la requérante que de l’expérience pratique, qu’il s’agissait de la figurine-jouet Lego, et non d’une figurine de construction emboîtable, comme le soutenait la requérante. Selon la chambre de recours, s’il était certes incontestable que la figurine-jouet Lego était compatible avec le système modulaire de construction de l’intervenante (dont elle ne faisait pas nécessairement « partie », contrairement à la brique Lego), il était toutefois également notoire qu’il était par principe possible de jouer avec cette figurine-jouet exactement comme avec n’importe quelle figurine-jouet (c’est-à-dire en la tenant, la déplaçant, la démontant, etc.), sans nécessairement devoir l’associer audit système modulaire de construction. La chambre de recours a donc établi que la présente affaire concernait une figurine-jouet comprise dans la catégorie des « jeux et jouets » relevant de la classe 28.

48      Dans le cadre du premier moyen, la requérante reproche tout d’abord à la chambre de recours d’avoir défini la nature du produit comme étant celle d’une « figurine-jouet ». Selon la requérante, il s’agit clairement d’une « figurine de construction emboîtable », compatible avec le système de construction modulaire de l’intervenante. Il conviendrait ainsi d’apprécier les caractéristiques essentielles de la marque contestée par rapport au produit concret que constitue une telle figurine de construction emboîtable. Elles ne pourraient pas se limiter abstraitement à la tête, au torse, aux bras et aux jambes de ladite figurine-jouet.

49      D’emblée, il y a lieu de constater que la figurine en cause constitue, notamment, une « figurine-jouet » qui peut être perçue et utilisée à des fins ludiques sans entrave ni contrainte, indépendamment d’autres produits ou jouets en général et, plus particulièrement, du système de construction modulaire de l’intervenante. À titre de preuve, au point 74 de la décision attaquée, la chambre de recours s’est, à juste titre, référée à l’annexe BDR 3, produite par la requérante et selon laquelle la figurine en cause a été créée pour participer à des « jeux de rôle » (role-play) et « raconter des histoires » (storytelling).

50      Aucun élément du dossier ne permet de supposer que la figurine-jouet en cause pourrait uniquement être utilisée en combinaison avec les briques de construction de l’intervenante. La présence de trous sur cette figurine-jouet ne saurait être déterminante à cet égard. Par suite, la finalité ludique de ladite figurine-jouet ne saurait être restreinte à celle d’une « figurine de construction emboîtable ».

51      C’est donc à juste titre que la chambre de recours, au point 44 de la décision attaquée, a considéré que la figurine en cause était une figurine-jouet comprise dans la catégorie des « jeux et jouets » relevant de la classe 28.

52      Cela étant, force est de constater que la figurine en cause constitue également une « figurine de construction emboîtable » compatible avec le système de briques de construction de l’intervenante et comprise dans une sous-catégorie générique des « jeux et jouets » relevant de la classe 28.

53      En effet, en l’espèce, contrairement à la procédure de nullité antérieure ayant donné lieu à l’arrêt du 16 juin 2015, Forme d’une figurine de jouet (T‑395/14, non publié, EU:T:2015:380), sur la base de l’exposé concret de la requérante dans la présente procédure, il y a lieu de considérer que le caractère emboîtable de la figurine en cause dans le cadre d’un système modulaire de construction peut être déduit de la marque contestée, au regard de sa représentation graphique, mais aussi d’autres éléments utiles, en particulier la connaissance par le public de systèmes modulaires de construction tels que celui de l’intervenante, ainsi qu’elle ressort des pièces versées au dossier par la requérante (voir point 27 ci-dessus), dans la mesure où elles sont rattachables aux moyens et arguments que celle-ci développe devant le Tribunal (voir point 21 ci-dessus).

54      Ainsi, il ressort de l’annexe BDR 3, consistant en un extrait du livre Lego Minifigure year by year – A visual History (édition française : Les figurines Lego au fil du temps), que les figurines Lego « possèdent des connecteurs sur leurs corps qui sont compatibles avec les briques Lego et d’autres éléments » et qu’elles « peuvent être désassemblées et combinées avec des pièces d’autres figurines pour créer un personnage entièrement nouveau ».

55      En outre, la connaissance par le public de systèmes modulaires de construction, tels que celui de l’intervenante, constitue un fait notoire au sens de la jurisprudence, c’est-à-dire un fait qui est susceptible d’être connu par toute personne ou qui peut être connu par des sources généralement accessibles, sans que des preuves soient requises à cet égard [voir, en ce sens, arrêts du 10 novembre 2011, LG Electronics/OHMI, C‑88/11 P, non publié, EU:C:2011:727, points 27 à 29 et jurisprudence citée, et du 24 octobre 2018, Bayer/EUIPO – Uni-Pharma (SALOSPIR), T‑261/17, non publié, EU:T:2018:710, point 42 et jurisprudence citée]. Ainsi, la Cour a jugé qu’il n’est pas requis d’établir l’exactitude de faits notoires et que, en outre, la constatation, par le Tribunal, du caractère notoire ou non des faits concernés constitue une appréciation de nature factuelle (voir, en ce sens, arrêt du 17 septembre 2020, EUIPO/Messi Cuccittini, C‑449/18 P et C‑474/18 P, non publié, EU:C:2020:722, point 57 et jurisprudence citée).

56      Il résulte ainsi de l’aptitude de la figurine en cause à être assemblée, démontée et de sa compatibilité avec les briques de construction de l’intervenante que cette figurine est également comprise dans la catégorie des « figurines de construction emboîtables ». Contrairement à ce qu’allègue l’intervenante, ladite catégorie n’est pas concrètement limitée à la figurine en cause, mais peut contenir beaucoup d’autres figurines.

57      C’est donc à tort que la chambre de recours, au point 43 de la décision attaquée, a suggéré que la possibilité de jouer avec la figurine-jouet en cause sans nécessairement devoir l’associer au système modulaire de construction de l’intervenante pouvait empêcher sa qualification de figurine de construction emboîtable. En effet, la possibilité d’utiliser la figurine en cause pour jouer indépendamment du système modulaire de construction de l’intervenante, ne constitue pas une caractéristique de la forme donnée à la marque contestée et s’avère sans incidence sur sa nature de figurine de construction emboîtable.

58      C’est également à tort que la chambre de recours, au point 48 de la décision attaquée, a constaté que la marque contestée, eu égard à sa représentation graphique, ne reproduisait pas clairement et sans ambiguïté une « figurine de construction emboîtable ». En effet, l’exposé de la requérante et les preuves qu’elle a produites, considérées à la lumière de la connaissance par le public du système modulaire de construction de l’intervenante, permettent de comprendre que la forme en cause présente les fonctions génériques d’une figurine de construction emboîtable. Une telle compréhension de cette forme ne requiert pas d’envisager des caractéristiques supplémentaires qui ne font pas partie de ladite marque.

59      Il s’ensuit que la chambre de recours, aux points 41 à 44 de la décision attaquée, a commis une erreur d’appréciation en se bornant à constater que la nature du produit constitué par la marque contestée était seulement celle d’une « figurine-jouet » et en omettant ainsi de constater que cette nature était également celle d’une « figurine de construction emboîtable ».

60      À cet égard, il convient de considérer que le produit concerné possède une nature duelle, à la fois celle d’une « figurine-jouet » aux traits humains, comme l’a décidé la chambre de recours à la suite de l’arrêt du 16 juin 2015, Forme d’une figurine de jouet (T‑395/14, non publié, EU:T:2015:380), et celle d’une « figurine de construction emboîtable » présentant un résultat technique de caractère emboîtable et de modularité avec le système de construction de l’intervenante, comme l’allègue itérativement la requérante. Par suite, ce produit consiste en une « figurine-jouet emboîtable » présentant deux finalités, à savoir celle de jouer, qui est de nature non technique, et celle de permettre l’assemblage ou l’imbrication, qui est de nature technique.

61      Il y a donc lieu de conclure que, si c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que la nature du produit concerné relevait de la catégorie d’une figurine-jouet, en revanche, elle a commis une erreur d’appréciation en omettant de considérer que la nature dudit produit relevait également de la catégorie des figurines de construction emboîtable.

–       Sur la détermination des caractéristiques essentielles du signe

62      S’agissant des caractéristiques essentielles de la marque contestée, aux points 45 à 47 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que celle-ci constituait un signe tridimensionnel sous la forme d’une figurine-jouet ou d’une figurine à forme humaine, et ressemblait donc à un être humain. Se fondant sur l’arrêt du 16 juin 2015, Forme d’une figurine de jouet (T‑395/14, non publié, EU:T:2015:380, points 31 et 33), elle a considéré que, eu égard à sa représentation graphique et au fait qu’elle a la forme d’une figurine ayant une apparence humaine, la tête, le corps, les bras et les jambes, qui sont nécessaires pour qu’une telle apparence puisse lui être conférée, constituent les caractéristiques essentielles de ladite marque. En revanche, selon la chambre de recours, la représentation graphique des mains de la figurine-jouet en cause et les trous sous ses pieds et à l’arrière de ses jambes ne pouvaient être considérés, que ce soit au regard de l’impression d’ensemble produite par la marque contestée ou du résultat de l’analyse des éléments constitutifs de celle-ci, comme étant les plus importants de cette marque et ne constituaient donc pas une caractéristique essentielle de la forme en cause.

63      Aux points 48 à 50 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que la marque contestée ne reproduisait pas clairement et sans ambiguïté une « figurine de construction emboîtable », telle qu’alléguée par la requérante, mais qu’il ressortait clairement de la représentation graphique, de l’impression d’ensemble produite par cette marque et de l’analyse de ses éléments qu’il s’agissait de la forme d’une figurine-jouet représentant un être humain. Selon elle, il ne ressortait indubitablement ni de l’impression d’ensemble ni de l’examen des éléments du signe en cause que les caractéristiques essentielles ou les plus importantes dudit signe étaient le caractère démontable, le caractère empilable ou la compatibilité de ladite figurine, comme le prétendait la requérante. L’argument de cette dernière reviendrait, selon la chambre de recours, à ajouter à la forme du signe contesté des éléments supplémentaires qui ne lui appartenaient pas réellement et un tel ajout arbitraire serait illégal. La chambre de recours a ajouté que s’il était possible que la figurine-jouet Lego soit démontée et soit compatible avec le système modulaire de construction de l’intervenante, il n’avait toutefois pas été démontré que ces caractéristiques étaient en l’espèce les plus importantes, de manière à pouvoir être qualifiées de caractéristiques essentielles du signe contesté. Selon elle, le caractère démontable, le caractère empilable ou la compatibilité n’avaient pas une importance essentielle pour la fonction de la figurine-jouet Lego en tant que telle, c’est-à-dire en tant que figurine-jouet ayant la forme d’un être humain avec laquelle il était possible de jouer indépendamment de ces dernières caractéristiques.

64      Au point 51 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que la marque contestée montrait une petite figurine-jouet qui représentait un personnage ayant une configuration spéciale, mais ne se composait pas « exclusivement de caractéristiques génériques concernant les jeux ou jouets ». Selon elle, cette marque se référait plutôt à une forme de produits (figurine-jouet) pour laquelle d’autres éléments décoratifs et de fantaisie, qui n’avaient pas la « fonction générique typique de ce produit », étaient importants ou essentiels. En l’espèce, ces éléments étaient ceux que la requérante elle-même avait identifiés en détail, à savoir :

–        une tête cylindrique (avec des yeux et une bouche ; sans nez ni oreilles) ;

–        un cou rectangulaire court ;

–        un torse trapézoïdal qui, vu latéralement, s’inclinait en avant et en arrière ;

–        des bras légèrement inclinés au niveau du coude se terminant par des mains en forme de crochets ;

–        des jambes avec des renflements sous les pieds et deux orifices ronds à l’arrière et

–        le fait que les jambes ainsi que le torse avaient proportionnellement à peu près la même longueur.

65      La requérante fait valoir que les caractéristiques essentielles de la figurine en cause comprennent non seulement la tête, le torse, les bras et les jambes, mais également les mains munies d’accroches et les parties évidées à l’arrière des jambes et sous les pieds, aux fins de l’assemblage avec d’autres briques de construction de l’intervenante.

66      D’emblée, il y a lieu de relever que, contrairement à ce qu’allègue la requérante, l’expression « caractéristiques essentielles » doit être comprise comme visant les éléments les plus importants du signe [arrêts du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 69, et du 30 mars 2022, Établissement Amra/EUIPO – eXpresio, estudio creativo (Forme d’une botte de rebond), T‑264/21, non publié, EU:T:2022:193, point 33].

67      Selon une jurisprudence constante, une application correcte de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94 implique que les caractéristiques essentielles du signe concerné, à savoir les éléments les plus importants de celui-ci, soient dûment identifiées au cas par cas, en se basant sur l’impression globale dégagée par ce signe ou sur un examen successif de chacun de ses éléments constitutifs (voir point 36 ci-dessus).

68      En outre, il ressort de la jurisprudence récente relative à l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94, applicable par analogie, mutatis mutandis, au paragraphe 1, sous e), i), du même article, que des éléments d’information autres que la seule représentation graphique, tels que la perception du public pertinent, peuvent être utilisés afin d’identifier les caractéristiques essentielles du signe en cause (voir point 40 ci-dessus).

69      En l’espèce, certes, c’est à juste titre que la chambre de recours, au point 46 de la décision attaquée, a considéré comme des caractéristiques essentielles de la figurine-jouet en cause les caractéristiques qui lui confèrent un aspect humain, à savoir la tête, le torse, les bras et les jambes.

70      À cet égard, il importe de souligner que c’est encore à juste titre que la chambre de recours, au point 51 de la décision attaquée, a également retenu comme essentiels des éléments ornementaux et de fantaisie de la figurine en cause, à savoir la forme cylindrique de la tête, la forme courte et rectangulaire du cou et la forme trapézoïdale du torse. Le design aux formes rectangulaires et compactes ainsi que les proportions générales sont également des éléments graphiques importants de ladite figurine.

71      Toutefois, c’est à tort que la chambre de recours a, sur la base de sa représentation graphique sous la forme d’une figurine-jouet aux traits humains, limité les caractéristiques essentielles de la marque contestée aux caractéristiques mentionnées aux points 69 et 70 ci-dessus et a, en substance, constaté que les accroches à ses mains et les trous sous ses pieds et à l’arrière de ses jambes, dont la fonction ne pouvait être déduite de ladite marque, ne contribuaient pas à la fonction générique d’une figurine-jouet présentant simplement des traits humains et destinée à la participation à des jeux de rôle et à la narration d’histoires, de sorte que ces éléments ne pouvaient pas compter parmi les caractéristiques essentielles de ladite figurine-jouet.

72      En effet, les caractéristiques essentielles résultant des accroches sous les mains et des trous sous les pieds et à l’arrière des jambes de la figurine en cause peuvent être déduites de la marque contestée, au regard de sa représentation graphique, mais aussi d’autres éléments d’information, en particulier de la connaissance par le public du système modulaire de construction de l’intervenante, telle qu’elle ressort des pièces versées au dossier par la requérante (voir points 27, 53 et 54 ci-dessus), dans la mesure où elles sont rattachables aux moyens et arguments que celle-ci développe devant le Tribunal (voir point 21 ci-dessus), et qui constitue également un fait notoire (voir point 55 ci-dessus).

73      Ainsi, force est de constater que les accroches aux mains et les trous à l’arrière des jambes et sous les pieds de la figurine en cause constituent des caractéristiques essentielles de la marque contestée, au regard de sa nature de « figurine de construction emboîtable ». Ces éléments s’avèrent importants pour la compatibilité de cette figurine et son aptitude à être assemblée avec d’autres produits.

74      La chambre de recours, aux points 45 à 52 de la décision attaquée, a donc commis une erreur d’appréciation en se bornant à considérer comme essentielles les caractéristiques « non techniques » qui confèrent à la figurine en cause un aspect humain, à savoir la tête, le torse, les bras et les jambes, et en omettant ainsi de considérer comme des caractéristiques essentielles les caractéristiques « techniques » de la marque contestée envisagée en tant que figurine de construction emboîtable, à savoir les accroches aux mains et les trous à l’arrière des jambes et sous les pieds.

75      Ce faisant, c’est à tort que la chambre de recours, aux fins d’établir les caractéristiques essentielles de la marque contestée, s’est bornée à prendre en considération la représentation graphique de cette marque et a négligé de prendre en considération d’autres éléments utiles ayant trait à la nature du produit concret, en particulier la connaissance par le public du système modulaire de construction de l’intervenante.

76      C’est également à tort que la chambre de recours, au point 49 de la décision attaquée, a considéré que l’argumentation de la requérante reviendrait à ajouter à la forme du signe contesté des éléments supplémentaires qui ne lui appartenaient pas réellement et qu’un tel ajout arbitraire serait illégal. En effet, les accroches aux mains et les trous à l’arrière des jambes et sous les pieds de la figurine en cause constituent manifestement des caractéristiques qui appartiennent à cette figurine, envisagée sur la base non seulement de sa représentation graphique, mais aussi sur la base d’autres éléments utiles tels que la connaissance par le public du système modulaire de construction de l’intervenante. Ces caractéristiques ne forment donc en aucune façon un « ajout arbitraire » au produit concret d’éléments qui n’en seraient pas constitutifs.

77      Il y a lieu de conclure que, si c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les caractéristiques retenues au point 51 de la décision attaquée étaient des caractéristiques essentielles de la marque contestée, en revanche, elle a commis une erreur d’appréciation en omettant de considérer comme essentielles les caractéristiques supplémentaires alléguées par la requérante, à savoir les accroches aux mains et les trous à l’arrière des jambes et sous les pieds.

–       Sur la question de la forme imposée ou non par la nature même du produit

78      Aux points 51 à 54 de la décision attaquée, la chambre de recours a recensé les éléments décoratifs et de fantaisie énumérés au point 64 ci-dessus et a établi que la combinaison de ces éléments était conçue de manière à conférer à la figurine-jouet en cause un aspect original ou de fantaisie dans l’impression d’ensemble qu’elle produisait. Elle a également considéré qu’une figurine-jouet appartenait donc à une espèce de produit pour laquelle il existait par principe une large liberté de conception. Selon elle, une figurine-jouet ou une figurine relevant de la classe 28 pouvait ainsi être conçue en prenant concrètement n’importe quelle forme, différente de la forme spécifique du signe contesté, et pouvait être modifiée et configurée avec la plus grande des créativités. Par exemple, au gré du concepteur, les jambes pourraient être configurées avec une autre forme arrondie que la forme rectangulaire enregistrée et le torse pourrait avoir une autre forme, rectangulaire ou arrondie, au lieu de la forme trapézoïdale concrètement enregistrée. Si une figurine-jouet ou une figurine ayant une forme humaine devait certes avoir une tête, un corps, deux bras et deux jambes qui lui donnaient son apparence humaine, ces caractéristiques essentielles pouvaient prendre concrètement n’importe quelle forme.

79      Aux points 55 et 56 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré qu’une telle liberté de conception s’appliquait non seulement aux produits en cause relevant de la classe 28, mais aussi mutatis mutandis aux autres produits concernés relevant des classes 9 et 25 (pour lesquels il manquait des explications matérielles de la requérante) de la même façon s’ils étaient fabriqués sous la forme d’une figurine-jouet ou d’une figurine à forme humaine et, a fortiori, s’ils étaient conçus sous toute autre forme. Selon la chambre de recours, il ne ressortait pas non plus clairement des explications de la requérante que le signe contesté était « exclusivement » constitué par la forme imposée par la nature du produit et les raisons pour lesquelles les produits en cause étaient « nécessairement » conçus sous la forme de la figurine-jouet enregistrée n’apparaissaient pas non plus clairement. En outre, la requérante n’avait pas prouvé que la forme desdits produits comportait des éléments imposés par leur nature et le signe contesté, dans son ensemble, ne présentait pas une telle forme inévitable qui correspondait nécessairement à la catégorie de ces mêmes produits.

80      Aux points 57 à 59 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que le seul fait que la figurine concrète représente un être humain ne saurait suffire à réfuter l’aptitude à la protection de la marque contestée, conformément à l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94, étant donné que, sinon, le champ de la protection conférée par cette disposition « s’étendrait à l’infini » à partir du moment où ladite marque aurait une forme initiale naturelle, comme en l’espèce le corps humain. Selon elle, le signe contesté ne représentait tout simplement pas une forme des produits en cause relevant des classes 9, 25 ou 28, dont les caractéristiques essentielles seraient inhérentes aux fonctions génériques de ces produits. Elle a conclu que les conditions dudit article n’étaient pas remplies.

81      La requérante allègue, en substance, que toutes les caractéristiques visibles de la figurine en cause (notamment la tête, le torse, les bras et les jambes), essentielles ou non, sont conçues à tous égards de façon à assurer la fonction générique du produit, en s’emboîtant aux briques de construction et à d’autres figurines de l’intervenante.

82      Il convient de rappeler que les formes dont toutes les caractéristiques essentielles sont inhérentes à la fonction ou aux fonctions génériques du produit doivent, en principe, être refusées à l’enregistrement (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 septembre 2014, Hauck, C‑205/13, EU:C:2014:2233, point 25).

83      Il y a également lieu de souligner que, conformément à la jurisprudence citée au point 44 ci-dessus, l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94 ne saurait s’appliquer lorsque la marque contestée porte sur une forme de produit dans laquelle un autre élément ornemental ou de fantaisie, qui n’est pas inhérent à la fonction générique du produit, joue un rôle important ou essentiel (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 septembre 2014, Hauck, C‑205/13, EU:C:2014:2233, point 22 et jurisprudence citée).

84      Ainsi, l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94 ne peut s’appliquer dès que la marque contestée représente une forme de produit ayant au moins une caractéristique essentielle qui n’est pas inhérente à la fonction générique de ce produit ou, en d’autres termes, dès qu’il existe au moins une caractéristique essentielle de la forme qui n’est pas imposée par la nature même du produit, de sorte que la marque contestée n’est pas constituée « exclusivement » par la forme imposée par la nature même du produit (voir point 45 ci-dessus).

85      En l’espèce, la forme en cause est ainsi apte à la protection en tant que marque de l’Union européenne si au moins une de ses caractéristiques essentielles n’est pas inhérente à la fonction générique d’une figurine-jouet ou à la fonction générique d’une figurine de construction emboîtable.

86      Or, force de constater que la forme cylindrique ou « en tonneau » de la tête de la figurine en cause ne s’avère inhérente ni à la fonction générique d’une figurine-jouet ni à la fonction générique d’une figurine de construction emboîtable. Il en va de même pour la forme courte et rectangulaire du cou et la forme trapézoïdale, plate et angulaire du torse, ainsi que pour la forme spécifique des bras avec les mains et celle des jambes avec les pieds.

87      La conception concrète de ces caractéristiques essentielles de la forme en cause n’est donc qu’une expression possible de l’application concrète de la fonction générique d’une figurine-jouet ou de celle d’une figurine de construction emboîtable.

88      Ainsi, les caractéristiques ornementales et de fantaisie mentionnées au point 51 de la décision attaquée (voir points 64 et 78 ci-dessus) et énumérées au point 86 ci-dessus, résultent de la liberté du créateur de la figurine-jouet et de la figurine de construction emboîtable. Alors que la présence de traits humains et de dispositifs d’assemblage s’impose fondamentalement du fait de la nature duelle du produit, une large liberté existe quant à la configuration de ces éléments. Eu égard à cette large liberté de conception en ce qui concerne les figurines-jouets de construction emboîtables, lesdites caractéristiques peuvent prendre beaucoup d’autres formes que celle de la marque contestée.

89      C’est donc à juste titre que la chambre de recours, au point 53 de la décision attaquée, a considéré que ces caractéristiques essentielles, vu leur nature ornementale et de fantaisie, pouvaient être modifiées et configurées avec, en principe, une « large liberté de conception ».

90      À cet égard, l’allégation de la requérante selon laquelle « aucune caractéristique de la marque contestée, ni, à plus forte raison, aucune caractéristique essentielle de celle‑ci, non plus que la marque contestée dans son ensemble, ne présente d’élément ornemental ou de fantaisie qui aille au-delà de la fonctionnalité décrite » n’est pas fondée et doit être écartée. En effet, les caractéristiques essentielles énumérées au point 86 ci-dessus constituent de tels éléments.

91      Il s’ensuit que la requérante, à qui incombe la charge de la preuve dans la présente procédure de nullité (voir point 26 ci-dessus), n’a pas réfuté le constat qu’au moins une caractéristique essentielle du produit en cause n’est pas inhérente à sa fonction générique de figurine-jouet ou à celle de figurine de construction emboîtable.

92      Eu égard aux principes énoncés aux points 83 et 84 ci-dessus, ce constat suffit à écarter l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94.

93      Il y a lieu de conclure que, nonobstant les erreurs d’appréciation constatées aux points 59 et 74 ci-dessus, lesquelles, au vu de ce qui précède, sont dénuées d’incidence sur la légalité de la décision attaquée, c’est à juste titre que la chambre de recours a confirmé l’aptitude de la marque contestée à être enregistrée au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94.

94      Le premier moyen doit donc être rejeté comme non fondé.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94

95      La requérante soutient que la chambre de recours a commis des erreurs d’appréciation dans l’application du motif de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94.

96      En premier lieu, s’agissant de la fonction du produit en cause et de ses caractéristiques essentielles, la requérante fait valoir qu’il convient d’apprécier ces caractéristiques non de manière abstraite, mais au regard de la façon concrète dont elles sont respectivement agencées dans la représentation de la marque contestée. Selon elle, le fait que la figurine de construction emboîtable puisse aussi théoriquement être utilisée comme une figurine-jouet indépendamment du système modulaire de construction de l’intervenante n’est pas une caractéristique de la forme donnée à ladite marque et ne la prive surtout pas de son caractère de figurine de construction emboîtable. De surcroît, elle fait valoir que, selon la jurisprudence récente, l’appréciation de la fonction technique ne peut pas se fonder uniquement sur la représentation graphique de la marque en cause.

97      En second lieu, s’agissant de la fonctionnalité des caractéristiques essentielles de la marque contestée, la requérante reproche à la chambre de recours de ne s’être « absolument pas penchée », aux points 78 à 80 de la décision attaquée, sur les éléments qu’elle a exposés. Elle soutient que le résultat technique de la figurine de construction emboîtable, reproduite dans ladite marque et de ses éléments est son caractère empilable et sa modularité dans le cadre du système de construction de l’intervenante. Cette figurine de construction emboîtable et ses différents éléments seraient conçus à tous égards de manière à pouvoir être empilés et combinés avec d’autres figurines de construction emboîtables et d’autres briques de construction de l’intervenante. Un grand nombre de variantes de construction seraient uniquement possibles dans la forme concrète de la figurine de construction emboîtable reproduite dans ladite marque. Toutes les caractéristiques de la marque contestée auraient exclusivement pour but de garantir le caractère empilable et la modularité de cette marque et de ses éléments dans le cadre du système modulaire de construction de l’intervenante. Non seulement les mains munies d’accroches et les orifices sous les pieds et à l’arrière des jambes, mais, plus précisément, la taille et les dimensions de la tête, sa forme cylindrique, la forme plate et angulaire du torse, ses côtés légèrement réduits, la légère courbure des bras, les poignets, les mains munies d’accroches et les jambes pivotantes, dont la longueur permettrait à la figure de tenir assise sur quatre tenons, seraient eux aussi exclusivement destinés à permettre l’assemblage de la figure reproduite dans cette marque. Il en irait de même de l’intégralité de ladite figurine, dont les proportions et la hauteur, correspondant exactement à la hauteur de quatre briques de construction de l’intervenante, seraient exclusivement destinées à permettre son assemblage avec de telles briques. La compatibilité des figurines de construction emboîtables serait perdue ou restreinte lorsque celles-ci présentent des formes divergentes. La chambre de recours aurait été incapable d’indiquer quelles caractéristiques prétendument essentielles de ladite marque étaient censées être de fantaisie et ne pas être exclusivement liées à leur fonction technique. Selon la requérante, il s’ensuit que la forme de la marque contestée et de ses éléments vise « exclusivement » à l’obtention des résultats techniques décrits, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94. L’existence d’autres formes permettant d’obtenir le même résultat technique serait sans incidence et ne saurait écarter l’application dudit article.

98      Enfin, la requérante estime qu’est incompréhensible l’analyse de la chambre de recours, au point 79 de la décision attaquée, selon laquelle la marque contestée « ne présente pas de lignes ou modèle qui révèlent clairement et sans ambiguïté son caractère empilable et sa modularité dans le contexte du système de construction » de l’intervenante. À cet égard, la chambre de recours se détournerait à nouveau de la jurisprudence actuelle, selon laquelle il ne serait plus acceptable, pour déterminer le résultat technique des caractéristiques d’une marque, de s’en tenir uniquement à l’enregistrement de cette marque et à sa présentation extérieure. La requérante aurait démontré en détail, à l’aide d’illustrations, que, au-delà de la représentation graphique, la marque contestée possède les fonctionnalités décrites dans la demande en nullité.

99      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

100    Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94, sont refusés à l’enregistrement les signes constitués exclusivement par la forme du produit nécessaire à l’obtention d’un résultat technique.

101    L’intérêt général sous-tendant l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 est d’éviter que le droit des marques aboutisse à conférer à une entreprise un monopole quant aux solutions techniques ou aux caractéristiques utilitaires d’un produit (arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 43).

102    Une application correcte de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 implique que les caractéristiques essentielles du signe tridimensionnel en cause soient dûment identifiées. L’expression « caractéristiques essentielles » doit être comprise comme visant les éléments les plus importants du signe (arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, points 68 et 69).

103    L’identification des caractéristiques essentielles d’un signe doit être opérée au cas par cas, sans aucune hiérarchie systématique entre les différents types d’éléments qu’un signe peut comporter. Elle peut être opérée soit en se basant directement sur l’impression globale dégagée par le signe, soit en procédant, dans un premier temps, à un examen successif de chacun des éléments constitutifs du signe (voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 70).

104    Par conséquent, l’identification des caractéristiques essentielles d’un signe tridimensionnel peut, selon le cas, et en particulier eu égard au degré de difficulté de celui-ci, être effectuée par une simple analyse visuelle dudit signe ou, au contraire, être basée sur un examen approfondi dans le cadre duquel sont pris en compte des éléments utiles à l’appréciation, tels que des enquêtes et des expertises, ou encore des données relatives à des droits de propriété intellectuelle conférés antérieurement en rapport avec le produit concerné [arrêts du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 71, et du 24 octobre 2019, Rubik’s Brand/EUIPO – Simba Toys (Forme d’un cube avec des faces ayant une structure en grille), T‑601/17, non publié, EU:T:2019:765, point 49].

105    Ainsi, l’autorité compétente peut effectuer un examen approfondi dans le cadre duquel sont pris en compte, outre la représentation graphique et les éventuelles descriptions fournies lors du dépôt de la demande d’enregistrement, des éléments utiles à l’identification convenable des caractéristiques essentielles d’un signe (arrêt du 6 mars 2014, Pi-Design e.a./Yoshida Metal Industry, C‑337/12 P à C‑340/12 P, non publié, EU:C:2014:129, point 54).

106    Il s’ensuit que, si l’identification des caractéristiques essentielles du signe en cause doit en principe débuter par l’examen de la représentation graphique de ce signe, l’autorité compétente peut également se référer à d’autres éléments d’information utiles permettant de déterminer correctement ces caractéristiques, tels que la perception du public pertinent (arrêt du 23 avril 2020, Gömböc, C‑237/19, EU:C:2020:296, points 30, 31 et 37).

107    Il ressort ainsi de la jurisprudence citée aux points 104 à 106 ci-dessus que des éléments d’information autres que la seule représentation graphique, tels que la perception du public pertinent, peuvent être utilisés afin d’identifier les caractéristiques essentielles du signe en cause.

108    Ni le caractère distinctif des éléments d’un signe ni le caractère distinctif acquis par l’usage d’un signe ne sont pertinents pour la détermination de ses caractéristiques essentielles au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 [arrêt du 24 septembre 2019, Roxtec/EUIPO – Wallmax (Représentation d’un carré noir contenant sept cercles bleus concentriques), T‑261/18, EU:T:2019:674, point 64].

109    La détermination des caractéristiques essentielles de la forme en cause, dans le cadre de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94, se fait dans le but précis de permettre l’examen de la fonctionnalité de ladite forme (arrêt du 30 mars 2022, Forme d’une botte de rebond, T‑264/21, non publié, EU:T:2022:193, point 41).

110    Dès que les caractéristiques essentielles du signe sont identifiées, il incombe encore à l’EUIPO de vérifier si ces caractéristiques répondent toutes à la fonction technique du produit en cause (arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 72) ou, plus précisément, à une fonction technique de ce produit (voir arrêt du 23 avril 2020, Gömböc, C‑237/19, EU:C:2020:296, point 28 et jurisprudence citée).

111    Afin d’analyser la fonctionnalité d’un signe au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94, les caractéristiques essentielles de la forme nécessaire à l’obtention d’un résultat technique doivent, dans la mesure du possible, être appréciées au regard de la fonction technique du produit concret représenté. Une telle analyse ne peut être effectuée sans que soient pris en considération, le cas échéant, les éléments supplémentaires ayant trait à la fonction du produit concret, même s’ils ne sont pas visibles dans la représentation (arrêt du 10 novembre 2016, Simba Toys/EUIPO, C‑30/15 P, EU:C:2016:849, points 46 et 48).

112    Ainsi, pour l’analyse de la fonctionnalité d’un signe au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94, le juge de l’Union n’est pas lié par les seules fonctions visibles à partir de la représentation graphique de la marque, mais doit prendre en considération les autres éléments issus du produit concret, tels que le mécanisme de rotation dans le cas du « Rubik’s Cube » (voir, en ce sens, arrêt du 24 octobre 2019, Forme d’un cube avec des faces ayant une structure en grille, T‑601/17, non publié, EU:T:2019:765, points 85 et 86), la face inférieure de la brique dans le cas de la « brique Lego » [arrêt du 12 novembre 2008, Lego Juris/OHMI – Mega Brands (Brique de Lego rouge), T‑270/06, EU:T:2008:483, point 78] et, pour un pansement, son mode d’action [arrêt du 31 janvier 2018, Novartis/EUIPO – SK Chemicals (Représentation d’un timbre transdermique), T‑44/16, non publié, EU:T:2018:48, point 37]. Toutefois, le juge de l’Union ne peut ajouter à la forme du produit concret des éléments qui n’en sont pas constitutifs (arrêt du 3 juin 2021, Yokohama Rubber et EUIPO/Pirelli Tyre, C‑818/18 P et C‑6/19 P, non publié, EU:C:2021:431, points 62 à 66).

113    Si des éléments d’information qui ne ressortent pas de la représentation graphique du signe peuvent être pris en compte pour déterminer si ces caractéristiques répondent à une fonction technique du produit en cause, ces éléments d’information doivent provenir de sources objectives et fiables et ne peuvent inclure la perception du public pertinent (arrêt du 23 avril 2020, Gömböc, C‑237/19, EU:C:2020:296, point 37).

114    La condition selon laquelle une forme de produit ne peut être refusée à l’enregistrement en tant que marque de l’Union européenne en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 que si elle est « nécessaire » à l’obtention du résultat technique visé ne signifie pas que la forme en cause doive être la seule permettant d’obtenir ce résultat (arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 53).

115    L’existence d’autres formes permettant d’obtenir le même résultat technique ne constitue pas, pour l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94, une circonstance de nature à écarter le motif de refus d’enregistrement (voir arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, points 58 et 83 et jurisprudence citée).

116    En d’autres termes, l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 s’oppose à l’enregistrement de toute forme constituée exclusivement, dans ses caractéristiques essentielles, par la forme du produit techniquement causale et suffisante à l’obtention du résultat technique visé, même si ce résultat peut être atteint par d’autres formes employant la même, ou une autre, solution technique (arrêt du 12 novembre 2008, Brique de Lego rouge, T‑270/06, EU:T:2008:483, point 43).

117    Dans le cadre de l’examen de la fonctionnalité d’un signe constitué par la forme d’un produit, il importe seulement d’apprécier, après que les caractéristiques essentielles dudit signe ont été identifiées, si ces caractéristiques répondent à la fonction technique du produit concerné. Cet examen doit, de toute évidence, être fait en analysant le signe déposé ou contesté, et non les signes constitués d’autres formes de produit. La fonctionnalité technique des caractéristiques d’une forme peut être appréciée, notamment, en tenant compte de la documentation relative aux brevets antérieurs qui décrivent les éléments fonctionnels de la forme concernée (arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, points 84 et 85).

118    Seules les formes de produit qui ne font qu’incorporer une solution technique, et dont l’enregistrement en tant que marque gênerait donc réellement l’utilisation de cette solution technique par d’autres entreprises, sont refusées à l’enregistrement [arrêts du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 48 ; du 19 septembre 2012, Reddig/OHMI – Morleys (Manche de couteau), T‑164/11, non publié, EU:T:2012:443, point 24, et du 24 octobre 2019, Forme d’un cube avec des faces ayant une structure en grille, T‑601/17, non publié, EU:T:2019:765, point 45]. L’enregistrement d’une forme exclusivement fonctionnelle d’un produit en tant que marque serait susceptible de permettre au titulaire de cette marque d’interdire aux autres entreprises non seulement l’utilisation de la même forme, mais aussi l’utilisation de formes similaires (arrêts du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 56 ; du 19 septembre 2012, Manche de couteau, T‑164/11, non publié, EU:T:2012:443, point 22, et du 24 octobre 2019, Forme d’un cube avec des faces ayant une structure en grille, T‑601/17, non publié, EU:T:2019:765, point 46).

119    La présence d’un ou de quelques éléments arbitraires mineurs dans un signe, dont tous les éléments essentiels sont dictés par la solution technique à laquelle ce signe donne expression, est sans incidence sur la conclusion selon laquelle ledit signe est constitué exclusivement par la forme du produit nécessaire à l’obtention d’un résultat technique. En outre, le motif de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 s’applique seulement lorsque les caractéristiques essentielles du signe sont toutes fonctionnelles, de telle sorte que l’enregistrement d’un signe en tant que marque ne peut pas être refusé sur la base de cette disposition si la forme du produit en cause incorpore un élément non fonctionnel majeur, tel qu’un élément ornemental ou de fantaisie qui joue un rôle important dans ladite forme (voir arrêts du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 52 et jurisprudence citée, et du 11 mai 2017, Yoshida Metal Industry/EUIPO, C‑421/15 P, EU:C:2017:360, point 27 et jurisprudence citée).

120    Ainsi, l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 ne saurait s’appliquer lorsque la marque demandée ou contestée porte sur une forme de produit dans laquelle un élément non fonctionnel, tel qu’un élément ornemental ou fantaisiste, joue un rôle important. Dans ce cas, les entreprises concurrentes ont facilement accès à des formes alternatives de fonctionnalité équivalente, de sorte qu’il n’existe pas un risque d’atteinte à la disponibilité de la solution technique. Cette dernière pourra, dans cette hypothèse, être incorporée sans difficulté par les concurrents du titulaire de ladite marque dans des formes de produit qui n’ont pas le même élément non fonctionnel que celui dont dispose la forme du produit dudit titulaire et qui, par rapport à celle-ci, ne sont donc ni identiques ni similaires (arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, points 52 et 72).

121    Il résulte de ce qui précède que le motif de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 ne peut s’appliquer que si chacune des caractéristiques essentielles du signe en cause est nécessaire pour obtenir un résultat technique auquel est destiné le produit concerné. En revanche, ce motif ne s’applique pas dès qu’il existe un élément non fonctionnel majeur, tel qu’un élément ornemental ou de fantaisie, qui constitue une caractéristique essentielle dudit signe, mais qui n’est pas nécessaire à l’obtention d’un tel résultat technique.

122    En d’autres termes, le motif de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 ne peut s’appliquer dès qu’il existe au moins une caractéristique essentielle de la forme qui n’est pas nécessaire à l’obtention d’un résultat technique, de sorte que la marque contestée n’est pas constituée « exclusivement » par la forme nécessaire à l’obtention d’un résultat technique.

123    C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner le bien-fondé du second moyen.

–       Sur la détermination de la fonctionnalité du produit

124    S’agissant de la nature du produit en cause, au point 67 de la décision attaquée, la chambre de recours a rappelé que le signe en cause montrait une petite figurine-jouet qui représentait un personnage ayant une configuration spéciale (voir point 47 ci-dessus). Au point 77 de la même décision, elle a donc établi que la présente affaire concernait une figurine-jouet comprise dans la catégorie des « jeux et jouets » relevant de la classe 28.

125    S’agissant de la fonctionnalité technique du produit concerné, aux points 71 à 74 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les figurines-jouets ou les jeux en tant que tels étaient des objets avec lesquels jouer et que le fait de s’en servir était donc censé divertir et détendre, ou servir de passe-temps et de divertissement. Elle a concédé qu’il se pouvait certes que tant la conception des caractéristiques essentielles (tête, torse, bras et jambes) que celle de tous les éléments non essentiels (par exemple, les mains et les trous) permettaient d’assembler la figurine-jouet en cause à des briques de construction et à d’autres éléments Lego et qu’il était incontestable que la figurine-jouet Lego était compatible avec le système modulaire de construction de l’intervenante. Toutefois, elle a relevé qu’il était également notoire qu’il était possible, par principe, de jouer avec la figurine-jouet Lego exactement comme avec n’importe quelle figurine-jouet (c’est-à-dire en la tenant, la déplaçant, la démontant, etc.), sans nécessairement l’associer à ce système modulaire de construction. Selon elle, le fait que la figurine-jouet en cause soit en principe destinée à inciter à faire des jeux de rôle et à inventer des histoires et que la compatibilité audit système modulaire de construction soit un motif de contribution à l’amélioration et une utilisation fantaisiste de ladite figurine-jouet résultait des arguments et des éléments de preuve avancés par la requérante elle-même, par exemple à l’annexe BDR 3.

126    Aux points 78 et 79 de la décision attaquée, la chambre de recours a également considéré que le « résultat » de la forme de la figurine-jouet en cause était simplement de lui conférer des traits humains et que le fait que cette figurine-jouet représente un personnage et puisse être utilisée dans un contexte ludique approprié n’était pas un « résultat technique ». Contrairement à l’arrêt du 24 octobre 2019, Forme d’un cube avec des faces ayant une structure en grille (T‑601/17, non publié, EU:T:2019:765, point 88), qui concernait concrètement des « puzzles en trois dimensions » relevant de la classe 28, il n’y avait pas lieu, en l’espèce, de prendre en considération des éléments supplémentaires (tels que la capacité de rotation des éléments individuels ainsi que des éléments invisibles), en ce qui concernait les « jeux et jouets » relevant de la même classe.

127    Il convient de rappeler que les fonctions auxquelles répondent les caractéristiques essentielles de la forme en cause doivent, dans la mesure du possible, être appréciées au regard du produit concret représenté (voir point 111 ci-dessus).

128    En l’espèce, certes, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, en substance, que le produit concret était une figurine-jouet relevant de la classe 28 (voir points 49 à 51 ci-dessus) et qu’un résultat non technique de la forme de ce produit était de conférer à cette figurine-jouet des traits humains en vue de permettre à ce « bonhomme » de participer à des jeux de rôle et à la narration d’histoires.

129    Dans cette optique, il y a lieu de considérer que la fonction de certaines caractéristiques essentielles de la marque contestée, à savoir la tête, le torse, les bras et les jambes, est de conférer à la figurine en cause des traits humains. Le produit « figurine-jouet » étant destiné au jeu sans entrave ni contrainte, l’intégralité des caractéristiques humanoïdes de ladite figurine visent à ce que l’on puisse jouer avec elle en tant que telle, c’est-à-dire indépendamment de tout autre élément d’un système modulaire de construction. Le fait que cette figurine représente un personnage et puisse être utilisée dans n’importe quel contexte ludique approprié n’est pas un « résultat technique » (voir, en ce sens, arrêt du 16 juin 2015, Forme d’une figurine de jouet, T‑395/14, non publié, EU:T:2015:380, points 31, 32 et 34).

130    Cela étant, force est de constater que le produit concret constitue également une figurine de construction emboîtable (voir point 52 ci-dessus), dont la fonctionnalité technique est aussi son caractère emboîtable et sa modularité, c’est-à-dire son aptitude à être assemblé à d’autres éléments de jeu du système de construction de l’intervenante, tels que les briques de construction.

131    En effet, en l’espèce, contrairement à la procédure de nullité antérieure ayant donné lieu à l’arrêt du 16 juin 2015, Forme d’une figurine de jouet (T‑395/14, non publié, EU:T:2015:380), sur la base de l’exposé concret de la requérante dans la présente procédure, il y a lieu de considérer que le caractère emboîtable de la figurine en cause dans le cadre d’un système modulaire de construction peut être déduit de la marque contestée, au regard de sa représentation graphique, mais aussi d’autres éléments utiles, en particulier la connaissance par le public de systèmes modulaires de construction tels que celui de l’intervenante, ainsi qu’elle ressort des pièces versées au dossier par la requérante (voir point 27 ci-dessus), dans la mesure où elles sont rattachables aux moyens et arguments que celle-ci développe devant le Tribunal (voir point 21 ci-dessus).

132    Ainsi, il ressort de l’annexe BDR 3, consistant en un extrait du livre Lego Minifigure year by year – A visual History (édition française : Les figurines Lego au fil du temps), que les figurines Lego « possèdent des connecteurs sur leurs corps qui sont compatibles avec les briques Lego et d’autres éléments » et qu’elles « peuvent être désassemblées et combinées avec des pièces d’autres figurines pour créer un personnage entièrement nouveau ».

133    En outre, la connaissance par le public de systèmes modulaires de construction, tels que celui de l’intervenante, constitue un fait notoire au sens de la jurisprudence (voir point 55 ci-dessus).

134    C’est donc à tort que la chambre de recours, au point 73 de la décision attaquée, a suggéré que la possibilité de jouer avec la figurine-jouet en cause sans nécessairement devoir l’associer au système modulaire de construction de l’intervenante pouvait empêcher sa fonctionnalité technique de caractère emboîtable et de modularité. En effet, la possibilité d’utiliser la figurine en cause pour jouer indépendamment du système modulaire de construction de l’intervenante s’avère sans incidence sur sa fonctionnalité technique de caractère emboîtable et de modularité.

135    C’est également à tort que la chambre de recours, au point 79 de la décision attaquée, a considéré que la marque contestée, qui avait la forme d’une figurine-jouet, « ne présent[ait] pas de lignes ou modèle qui révèlent clairement et sans ambiguïté son caractère empilable et sa modularité dans le contexte du système de construction » de l’intervenante.

136    Il s’ensuit que la chambre de recours, aux points 67 à 79 de la décision attaquée, a commis une erreur d’appréciation en se bornant à constater que la fonctionnalité du produit constitué par la marque contestée consistait seulement en les résultats non techniques de la capacité de jouer et de l’évocation d’un « bonhomme » par des traits humains et en omettant ainsi de constater que cette fonctionnalité comportait aussi les résultats techniques de son caractère emboîtable et de sa modularité, ou encore de sa capacité d’assemblage et d’imbrication.

137    À cet égard, il convient de considérer que le produit en cause comporte une double finalité, à la fois celle de jouer en tant que « figurine-jouet » aux traits humains, comme l’a décidé la chambre de recours à la suite de l’arrêt du 16 juin 2015, Forme d’une figurine de jouet (T‑395/14, non publié, EU:T:2015:380), et celle d’une « figurine de construction emboîtable » présentant un résultat technique de caractère emboîtable et de modularité avec, notamment, le système de construction de l’intervenante.

138    Il y a lieu de conclure que, si c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que le résultat non technique du produit consistait en la capacité de jouer et l’évocation d’un « bonhomme » par des traits humains, en revanche, elle a commis une erreur d’appréciation en omettant de considérer que le résultat technique dudit produit comportait également son caractère emboîtable et sa modularité.

–       Sur la détermination des caractéristiques essentielles du signe

139    S’agissant des caractéristiques essentielles du signe, aux points 69 et 70 de la décision attaquée, la chambre de recours s’est fondée sur l’arrêt du 16 juin 2015, Forme d’une figurine de jouet (T‑395/14, non publié, EU:T:2015:380, points 31 et 33). Elle a considéré, eu égard à sa représentation graphique et au fait que celle-ci avait la forme d’une figurine ayant une apparence humaine, que les caractéristiques essentielles du signe en cause, qui lui conféraient une telle apparence humaine, étaient la tête, le corps (torse), les bras et les jambes. Elle a estimé, en revanche, que la représentation graphique précise des mains de la figurine-jouet en cause et les trous sous ses pieds et à l’arrière de ses jambes – que ce soit en concernant l’impression d’ensemble produite par le signe contesté ou concernant le résultat de l’analyse de ses différents éléments – ne constituaient pas une ou des caractéristiques essentielles du signe en question.

140    Aux points 75 et 76 de la décision attaquée, la chambre de recours a rappelé, en outre, que le Tribunal avait établi, pour la même marque que celle contestée en l’espèce, que la représentation graphique des mains de la figurine en cause et des trous sous ses pieds et à l’arrière de ses jambes ne permettait pas de savoir, à elle seule et a priori, si ces éléments comportaient une quelconque fonction technique ni, le cas échéant, quelle était celle-ci (arrêt du 16 juin 2015, Forme d’une figurine de jouet, T‑395/14, non publié, EU:T:2015:380, point 33). En tout état de cause, a-t-elle ajouté, même en admettant, comme la requérante, que la forme des éléments susmentionnés pouvait avoir une fonction technique consistant à permettre de les assembler à d’autres éléments, notamment à des briques qui s’emboîtent, ces éléments ne sauraient être considérés comme les plus importants de cette marque, ni au regard de l’impression d’ensemble produite par ladite marque ni à la suite de l’analyse de ses éléments. En effet, selon elle, lesdits éléments ne constituaient pas une caractéristique essentielle de la forme en cause au sens de la jurisprudence et, de surcroît, rien n’indiquait que les caractéristiques fonctionnelles essentielles de la forme de ces éléments étaient imputables au résultat technique allégué.

141    Selon une jurisprudence constante, une application correcte de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 implique que les caractéristiques essentielles du signe concerné, à savoir les éléments les plus importants de celui-ci, soient dûment identifiées au cas par cas, en se basant sur l’impression globale dégagée par le signe ou sur un examen successif de chacun des éléments constitutifs de ce signe (voir points 102 et 103 ci-dessus).

142    En outre, il ressort de la jurisprudence récente relative à l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 que des éléments d’information autres que la seule représentation graphique, tels que la perception du public pertinent, peuvent être utilisés afin d’identifier les caractéristiques essentielles du signe en cause (voir point 107 ci-dessus).

143    En l’espèce, certes, c’est à juste titre que la chambre de recours, au point 69 de la décision attaquée et à la suite de l’arrêt du 16 juin 2015, Forme d’une figurine de jouet (T‑395/14, non publié, EU:T:2015:380), a considéré comme des caractéristiques essentielles de la figurine-jouet en cause les caractéristiques qui lui confèrent des traits humains, à savoir la tête, le torse, les bras et les jambes.

144    À cet égard, il importe de souligner que c’est encore à juste titre que la chambre de recours, au point 51 de la décision attaquée, a également retenu comme essentiels des éléments ornementaux et de fantaisie de la figurine en cause, à savoir la forme cylindrique de la tête, la forme courte et rectangulaire du cou et la forme trapézoïdale du torse. Le design aux formes rectangulaires et compactes ainsi que les proportions générales sont également des éléments graphiques importants de ladite figurine.

145    Toutefois, c’est à tort que la chambre de recours, au point 70 de la décision attaquée, a limité les caractéristiques essentielles de la marque contestée, sur la base de sa représentation graphique sous la forme d’une figurine-jouet aux traits humains, aux caractéristiques mentionnées aux points 143 et 144 ci-dessus et a, en substance, constaté que les accroches à ses mains et les trous sous ses pieds et à l’arrière de ses jambes, dont la fonction ne pouvait être déduite de ladite marque, ne contribuaient pas à un résultat technique d’une figurine-jouet qui présentait simplement des traits humains et était destinée à la participation à des jeux de rôle et à la narration d’histoires, de sorte que ces éléments ne pouvaient pas compter parmi les caractéristiques essentielles de ladite figurine-jouet.

146    En effet, les caractéristiques essentielles résultant des accroches aux mains de la figurine en cause et des trous sous ses pieds et à l’arrière de ses jambes peuvent être déduites de la marque contestée, au regard de sa représentation graphique, mais aussi d’autres éléments d’information, en particulier de la connaissance par le public du système modulaire de construction de l’intervenante, telle qu’elle ressort des pièces versées au dossier par la requérante (voir points 27, 131 et 132 ci-dessus), dans la mesure où elles sont rattachables aux moyens et arguments que celle-ci développe devant le Tribunal (voir point 21 ci-dessus), et qui constitue également un fait notoire (voir point 133 ci-dessus).

147    Ainsi, force est de constater que les accroches aux mains et les trous à l’arrière des jambes et sous les pieds de la figurine en cause constituent des caractéristiques essentielles de la marque contestée, au regard de sa nature de « figurine de construction emboîtable » et de sa fonctionnalité technique de caractère emboîtable et de modularité. Ces éléments s’avèrent importants pour la compatibilité de cette figurine et son aptitude à être assemblée avec d’autres produits.

148    La chambre de recours, aux points 69 à 76 de la décision attaquée, a donc commis une erreur d’appréciation en se bornant à considérer comme essentielles les caractéristiques « non techniques » qui confèrent à la figurine en cause un aspect humain, à savoir la tête, le torse, les bras et les jambes, et en omettant ainsi de considérer comme des caractéristiques essentielles les caractéristiques « techniques » de la marque contestée envisagée en tant que figurine de construction emboîtable, à savoir les accroches aux mains et les trous à l’arrière des jambes et sous les pieds.

149    Ce faisant, c’est à tort que la chambre de recours, aux fins d’établir les caractéristiques essentielles de la marque contestée, s’est bornée à prendre en considération la représentation graphique de cette marque et a négligé de prendre en considération d’autres éléments utiles, notamment des éléments supplémentaires ayant trait à la nature du produit concret, en particulier la connaissance par le public du système modulaire de construction de l’intervenante.

150    Il y a lieu de conclure que, si c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les caractéristiques retenues aux points 51 et 69 de la décision attaquée étaient des caractéristiques essentielles de la marque contestée, en revanche, elle a commis une erreur d’appréciation en omettant de considérer comme essentielles les caractéristiques supplémentaires alléguées par la requérante, à savoir les accroches aux mains et les trous à l’arrière des jambes et sous les pieds.

–       Sur la question de la forme nécessaire ou non à l’obtention d’un résultat technique

151    S’agissant de la fonctionnalité des caractéristiques essentielles du signe, aux points 78 à 81 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté qu’aucun élément de preuve ne permettait de conclure que la forme de la figurine en cause était nécessaire, dans son ensemble, à l’obtention d’un résultat technique spécifique. En particulier, elle a considéré qu’il n’avait pas été prouvé que cette forme était, en tant que telle et dans son ensemble, nécessaire pour permettre l’assemblage avec des briques de construction emboîtables. Selon elle, le « résultat » de cette forme était simplement de conférer des traits humains à la figurine en question et le fait que la figurine-jouet en cause représente un personnage et puisse être utilisée dans un contexte ludique approprié n’était pas un « résultat technique ». Contrairement à l’arrêt du 24 octobre 2019, Forme d’un cube avec des faces ayant une structure en grille (T‑601/17, non publié, EU:T:2019:765, point 88), qui concernait concrètement des « puzzles en trois dimensions » relevant de la classe 28, la chambre de recours a estimé qu’il n’y avait pas lieu, en l’espèce, de prendre en considération des éléments supplémentaires (tels que la capacité de rotation des éléments individuels ainsi que des éléments invisibles), en ce qui concernait les « jeux et jouets » relevant de la même classe. Elle a constaté que la marque contestée, qui avait la forme d’une figurine-jouet, ne présentait pas de lignes ou de modèle révélant clairement et sans ambiguïté son caractère empilable et sa modularité dans le contexte du système de construction de l’intervenante. Les exemples avancés par la requérante à propos des différentes caractéristiques utilitaires de cette marque ne permettaient, selon la chambre de recours, de démontrer ni la « modularité » ni aucun résultat technique. Par ailleurs, selon cette dernière, il ressortait expressément du fascicule de brevet allemand DE 28 36 971 C2, relatif à la conception des éléments assemblables permettant de faire pivoter les jambes de la figurine-jouet litigieuse (annexe BDR 9), que tous ses éléments ne présentaient pas de résultat technique, mais uniquement ses jambes.

152    Aux points 82 à 86 de la décision attaquée, la chambre de recours a rappelé que, en imposant « les deux restrictions » prévues à l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 (« exclusivement » et « nécessaire »), le législateur avait dûment tenu compte du fait que chaque forme de produit était fonctionnelle jusqu’à un certain point, et qu’il serait donc inapproprié de refuser d’enregistrer une forme de produit en tant que marque au seul motif qu’elle présentait des caractéristiques fonctionnelles (arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 48). Afin de rejeter les arguments de la requérante selon lesquels la conception de la marque contestée et de ses éléments servirait « exclusivement » à la compatibilité avec les briques de construction de l’intervenante, la chambre de recours a fait observer qu’il était permis à d’autres entreprises de vendre des figurines-jouets comportant des trous adaptables à d’autres briques de construction, mais qui avaient un aspect différent – c’est-à-dire une conception différente des jambes, des bras, du torse et de la tête – de la conception de cette marque et de la figurine qu’elle représentait. En effet, selon la chambre de recours, ladite marque ne conférait pas à l’intervenante le droit d’interdire à des tiers ou à ses concurrents de commercialiser des jouets ou des figurines de construction emboîtables qui, bien que techniquement compatibles avec ses systèmes de construction, présentaient une forme différente de celle enregistrée (arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 72). L’éventuelle compatibilité d’une figurine-jouet avec n’importe quel système de blocs de construction ne pouvait de toute façon pas être monopolisée au sens du droit des marques. Enfin, la chambre de recours a relevé à nouveau que, comme la requérante exposait ses arguments pour les jeux et les jouets relevant de la classe 28 et qu’il manquait des explications matérielles pour les autres produits relevant des classes 9 et 25, la liberté de conception s’appliquait non seulement aux produits en cause relevant de la classe 28, mais aussi mutatis mutandis aux autres produits concernés relevant des classes 9 et 25. Par conséquent, elle a conclu que les conditions de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 n’étaient pas remplies.

153    La requérante allègue, en substance, que toutes les caractéristiques visibles de la figurine (notamment la tête, le torse, les bras et les jambes), essentielles ou non, sont conçues à tous égards de façon à assurer la fonction technique du produit, en s’emboîtant aux briques de construction et à d’autres figurines de l’intervenante.

154    Il convient de rappeler que les formes dont toutes les caractéristiques essentielles sont nécessaires à l’obtention d’un résultat technique du produit doivent, en principe, être refusées à l’enregistrement (voir point 119 ci-dessus).

155    Il y a également lieu de souligner que, conformément à la jurisprudence citée au point 120 ci-dessus, l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 ne saurait s’appliquer lorsque la marque contestée porte sur une forme de produit dans laquelle un élément non fonctionnel, tel qu’un élément ornemental ou de fantaisie, joue un rôle important (arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 72).

156    Ainsi, l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 ne peut s’appliquer dès qu’il existe au moins une caractéristique essentielle de la forme qui n’est pas nécessaire à l’obtention d’un résultat technique, de sorte que la marque contestée n’est pas constituée « exclusivement » par la forme nécessaire à l’obtention d’un résultat technique (voir points 121 et 122 ci-dessus).

157    En l’espèce, la forme en cause est ainsi apte à la protection en tant que marque de l’Union européenne si au moins une de ses caractéristiques essentielles ne découle pas directement du résultat technique du caractère emboîtable ou de la modularité du produit envisagé en tant que figurine de construction emboîtable. Incidemment, il convient de noter que les résultats non techniques du produit envisagé en tant que figurine-jouet sont dénués de pertinence pour l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 et ne sauraient faire obstacle à l’enregistrement de la marque contestée.

158    Or, force est de constater que la forme cylindrique ou « en tonneau » de la tête de la figurine en cause ne découle pas directement du résultat technique d’assemblage et d’imbrication d’une figurine de construction emboîtable dans le système modulaire de construction de l’intervenante. Il en va de même pour la forme courte et rectangulaire du cou et la forme trapézoïdale, plate et angulaire du torse, ainsi que pour la forme spécifique des bras avec les mains et celle des jambes avec les pieds.

159    Ainsi, les caractéristiques ornementales et de fantaisie mentionnées aux points 51 à 54 de la décision attaquée (voir points 64 et 78 ci-dessus) et énumérées au point 158 ci-dessus, résultent de la liberté du créateur de la figurine-jouet et de la figurine de construction emboîtable. Alors que la présence de traits humains et de dispositifs d’assemblage s’impose fondamentalement du fait de la double fonctionnalité du produit, une large liberté existe quant à la configuration de ces éléments.

160    C’est donc à juste titre que la chambre de recours, aux points 53 et 84 de la décision attaquée, a considéré, en substance, que ces caractéristiques essentielles, vu leur nature ornementale et de fantaisie, pouvaient être modifiées et configurées avec, en principe, une large liberté de conception.

161    À cet égard, l’allégation de la requérante selon laquelle « aucune caractéristique de la marque contestée, ni, à plus forte raison, aucune caractéristique essentielle de celle‑ci, non plus que la marque contestée dans son ensemble, ne présente d’élément ornemental ou de fantaisie qui aille au-delà de la fonctionnalité décrite » n’est pas fondée et doit être écartée. En effet, les caractéristiques essentielles énumérées au point 158 ci-dessus constituent de tels éléments ornementaux et de fantaisie.

162    Il en résulte que, bien que la finalité technique liée au caractère emboîtable et à la modularité soit obtenue par des caractéristiques essentielles (énumérées au point 146 ci-dessus), il existe également d’autres caractéristiques essentielles (énumérées au point 158 ci-dessus) qui ne sont pas nécessaires à l’obtention d’une finalité technique.

163    Comme l’a constaté à juste titre la chambre de recours au point 81 de la décision attaquée, le fascicule du brevet allemand DE 28 36 971 C2, produit par la requérante en annexe BDR 9, ne saurait conduire à un résultat différent. Certes, dans la mesure où la chambre de recours a constaté qu’il ressortait de ce brevet que seules les jambes de la figurine présentaient une fonctionnalité technique, étant donné que ledit brevet ne portait pas sur d’autres caractéristiques de la marque contestée, il convient de considérer qu’un tel constat ne peut, par lui-même, être extrapolé afin de dénier à d’autres caractéristiques une fonctionnalité technique. En toute rigueur, puisque le brevet en question ne concerne que les jambes, il ne permet aucune conclusion, ni dans un sens ni dans l’autre, concernant les autres caractéristiques de la forme en cause.

164    Toutefois, il est exact que le fascicule du brevet allemand DE 28 36 971 C2 démontre un résultat technique seulement pour les éléments de la jambe de la figurine en cause, mais non pour les autres caractéristiques essentielles de la marque contestée. En effet, ce brevet porte sur la face arrière des jambes et les parties évidées qu’elles présentent et concerne donc seulement cette caractéristique essentielle de ladite marque. En ce qui concerne les caractéristiques de l’aspect donné à la tête, au torse, aux bras et aux jambes de la figurine, ledit brevet ne contient aucune indication quant à un éventuel résultat technique.

165    L’appréciation de la chambre de recours ne va pas non plus à l’encontre de l’intérêt sous-tendant l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94, lequel est d’éviter que le droit des marques aboutisse à conférer à une entreprise un monopole sur des solutions techniques ou des caractéristiques utilitaires d’un produit (voir point 101 ci-dessus). La chambre de recours a dûment pris en compte cet intérêt au point 84 de la décision attaquée (voir point 160 ci-dessus). La marque contestée ne rend pas impossible, pour les concurrents, la mise sur le marché de figurines présentant des caractéristiques typiques de cette catégorie de jouets. Elle ne permet pas non plus d’empêcher la distribution de figurines de conception différente qui sont compatibles avec le système modulaire de construction de l’intervenante. Comme l’a, en substance, relevé la chambre de recours au point 53 de la même décision, il existe une large liberté de conception pour de telles figurines.

166    Enfin, s’agissant du grief de la requérante selon lequel la chambre de recours ne s’est « absolument pas penchée » sur l’argumentation exposée et les éléments de preuve qu’elle a produits, tout d’abord, il convient de relever que le fait que la chambre de recours n’ait pas suivi le point de vue de la requérante ne signifie pas qu’elle n’a pas tenu compte de son argumentation ni qu’elle n’ait pas examiné ses éléments de preuve. Aux points 80 et suivants de la décision attaquée, la chambre de recours a expressément examiné l’exposé de la requérante, les exemples produits ainsi que le fascicule du brevet allemand DE 28 36 971 C2.

167    En outre, il y a lieu de rappeler que la chambre de recours, au point 7 de la décision attaquée, a résumé les arguments de la requérante relatifs au présent moyen et, au point 38 de la même décision, a recensé les éléments de preuve produits par celle-ci. Il s’ensuit que ces arguments et ces éléments de preuve ont été pris en considération par la chambre de recours lors de son appréciation [voir, en ce sens, arrêt du 29 juin 2022, bet-at-home.com Entertainment/EUIPO (bet-at-home), T‑640/21, non publié, EU:T:2022:408, point 26 et jurisprudence citée].

168    À cet égard, il convient également de rappeler que les instances de l’EUIPO ne sont pas obligées de prendre position sur tous les arguments avancés par les parties. Il leur suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de leurs décisions. Il s’ensuit que le fait qu’une chambre de recours n’a pas repris l’ensemble des arguments d’une partie ou n’a pas répondu à chacun de ces arguments ne permet pas, à lui seul, de conclure que cette chambre de recours a refusé de les prendre en considération. En d’autres termes, la motivation peut être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (voir arrêt du 29 juin 2022, bet-at-home, T‑640/21, non publié, EU:T:2022:408, point 21 et jurisprudence citée). Tel est le cas en l’espèce.

169    Il s’ensuit que la requérante, à qui incombe la charge de la preuve dans la présente procédure de nullité (voir point 26 ci-dessus), n’a pas réfuté le constat qu’au moins une caractéristique essentielle du produit n’est pas nécessaire à l’obtention d’un résultat technique.

170    Eu égard aux principes énoncés aux points 155 et 156 ci-dessus, ce constat suffit à écarter l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94.

171    Il y a lieu de conclure que, nonobstant les erreurs d’appréciation constatées aux points 136 et 148 ci-dessus, lesquelles, au vu de ce qui précède, sont dénuées d’incidence sur la légalité de la décision attaquée, c’est à juste titre que la chambre de recours a confirmé l’aptitude de la marque contestée à être enregistrée au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94.

172    Le second moyen doit donc être rejeté comme non fondé.

173    Il en résulte que la décision attaquée n’est entachée d’aucun motif d’annulation ou de réformation.

174    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

175    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

176    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      BB Services GmbH est condamnée aux dépens.

Costeira

Kancheva

Tichy-Fisslberger

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 décembre 2023.

Signatures


Table des matières


Antécédents du litige

Conclusions des parties

En droit

Sur les conclusions aux fins de déclaration de nullité de la marque contestée

Sur la recevabilité

Sur la recevabilité du recours en ce qui concerne les produits relevant des classes 9 et 25

Sur le renvoi global de la requérante à ses écritures devant l’EUIPO

Sur le fond

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 40/94

– Sur la détermination de la nature du produit

– Sur la détermination des caractéristiques essentielles du signe

– Sur la question de la forme imposée ou non par la nature même du produit

Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94

– Sur la détermination de la fonctionnalité du produit

– Sur la détermination des caractéristiques essentielles du signe

– Sur la question de la forme nécessaire ou non à l’obtention d’un résultat technique

Sur les dépens


*      Langue de procédure : l’allemand.