Language of document : ECLI:EU:T:2021:156

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

24 mars 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative représentant un poisson – Marque nationale verbale antérieure BLINKA – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Absence de similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 – Obligation de motivation – Article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑354/20,

Wirtschaftsgesellschaft des Kfz-Gewerbes mbH, établie à Bonn (Allemagne), représentée par Me N. Hebeis, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme L. Lapinskaite, MM. J. Crespo Carrillo et V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

The Blink Fish Srl, établie à Milan (Italie),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 6 avril 2020 (affaire R 2333/2019‑4), relative à une procédure de nullité entre Wirtschaftsgesellschaft des Kfz-Gewerbes et The Blink Fish,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme V. Tomljenović, présidente, M. F. Schalin et Mme P. Škvařilová-Pelzl (rapporteure), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 4 juin 2020,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 24 septembre 2020,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 9 octobre 2017, l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours, The Blink Fish Srl, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

Image not found

3        Les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 35, 38 et 41 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 35 : « Publicité ; services de gestion commerciale ; administration commerciale ; services de secrétariat » ;

–        classe 38 : « Services de télécommunications » ;

–        classe 41 : « Services de divertissement ; activités sportives et culturelles ; enseignement ; formation ».

4        La marque a été enregistrée le 24 janvier 2018 sous le numéro 17301359.

5        Le 8 mai 2018, la requérante, Wirtschaftsgesellschaft des Kfz-Gewerbes mbH, a présenté une demande en nullité de la marque susmentionnée pour l’ensemble des services pour lesquels celle-ci avait été enregistrée.

6        La demande en nullité était fondée sur la marque allemande verbale antérieure BLINKA, enregistrée le 2 décembre 2015 sous le numéro 302015053329 pour, notamment, les services suivants :

–        classe 35 : « Publicité ; services de gestion commerciale » ;

–        classe 38 : « Services de télécommunications » ;

–        classe 41 : « Éducation ; formation ; services de divertissement ; activités sportives et culturelles ».

7        Les motifs invoqués par la requérante étaient ceux visés à l’article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du même règlement.

8        Le 22 août 2019, la division d’annulation a rejeté la demande en nullité, au motif qu’il n’existait aucun risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement 2017/1001.

9        Le 17 octobre 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’annulation.

10      Par décision du 6 avril 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours, au motif qu’il n’existait aucun risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement 2017/1001. Premièrement, elle a constaté que le territoire pertinent pour évaluer le risque de confusion était l’Allemagne, en raison de l’enregistrement de la marque antérieure dans cet État. Deuxièmement, la chambre de recours a considéré que le public pertinent, qu’il s’agisse du grand public ou des professionnels, percevrait la marque contestée comme la représentation d’un poisson stylisé et n’associerait pas cet élément figuratif à une signification particulière autre que celle d’un poisson. Troisièmement, la chambre de recours a conclu à l’absence de similitude visuelle entre les marques en cause, alors que, sur les plans phonétique et conceptuel, lesdites marques ne pouvaient pas être comparées. Quatrièmement, la chambre de recours a constaté que, en raison de l’absence de similitude ou d’identité des marques en cause, l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement 2017/1001 n’était pas applicable.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler partiellement la décision attaquée, en ce qu’elle concerne les services suivants, désignés par la marque contestée :

–        classe 35 : « Publicité ; services de gestion commerciale » ;

–        classe 38 : « Services de télécommunications » ;

–        classe 41 : « Services de divertissement ; activités sportives et culturelles ; enseignement ; formation » ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

12      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur l’objet du recours

13      Dans sa requête, la requérante indique ne pas contester la décision attaquée en ce qu’elle concerne les « services de secrétariat » et les services d’« administration commerciale », relevant de la classe 35, désignés par la marque contestée, qui ont été considérés comme similaires aux services visés par la marque antérieure.

14      Ainsi, le présent recours a uniquement pour objet la décision attaquée en ce qu’elle concerne les services désignés par la marque contestée qui ont été considérés comme identiques aux services visés par la marque antérieure, tels que cités au point 11 ci-dessus.

 Sur le fond

15      La requérante invoque, en substance, deux moyens au soutien de sa demande d’annulation partielle de la décision attaquée. Le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, en ce que la chambre de recours aurait conclu, à tort, à l’absence d’un risque de confusion dans le cas d’espèce. Le second moyen est tiré d’une violation de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, en ce que la chambre de recours n’aurait pas suffisamment motivé la décision attaquée.

16      L’EUIPO conclut au rejet des deux moyens identifiés au point 15 ci-dessus, qu’il considère non fondés, et, par conséquent, du recours.

17      À cet égard, il convient de rappeler que le défaut ou l’insuffisance de motivation vise à établir une violation des formes substantielles et requiert, de ce fait, un examen distinct, en tant que tel, de l’appréciation de l’inexactitude des motifs de la décision attaquée, dont le contrôle relève de l’examen du bien-fondé de cette décision (voir, en ce sens, arrêts du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, EU:C:1998:154, point 67, et du 15 décembre 2005, Italie/Commission, C‑66/02, EU:C:2005:768, point 26).

18      Il s’ensuit que le second moyen, en ce qu’il vise à faire constater une violation de l’obligation de motivation, doit être examiné avant le premier moyen, lequel porte sur la légalité au fond de la décision attaquée.

 Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001

19      Dans le cadre du second moyen, la requérante soutient que la chambre de recours a violé l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001 en ce qu’elle n’a pas suffisamment motivé la décision attaquée. En particulier, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas traité, d’une manière suffisante en droit, la question de la perception de la marque contestée par le public pertinent.

20      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

21      Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. Cette obligation de motivation a la même portée que celle découlant de l’article 296 TFUE, selon laquelle le raisonnement de l’auteur de l’acte doit apparaître de façon claire et non équivoque. Elle a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union européenne d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En outre, l’obligation de motivation n’impose pas aux chambres de recours qu’elles fournissent un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements que les parties ont articulés devant elles. Il suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision. Par ailleurs, la motivation peut être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle [voir arrêt du 12 mars 2020, Maternus/EUIPO – adp Gauselmann (Jokers WILD Casino), T‑321/19, non publié, EU:T:2020:101, points 15 à 17 et jurisprudence citée].

22      En l’espèce, il ressort de la décision attaquée que, selon la chambre de recours, le public pertinent percevra la marque contestée uniquement comme la représentation d’un poisson stylisé, car le consommateur moyen n’a pas tendance à analyser les marques en détail et il ne perdra pas de temps à essayer de déterminer si des lettres ou des mots sont dissimulés dans ledit poisson. De plus, en ce qui concerne la perception des signes par un consommateur moyen, la chambre de recours s’est référée à la jurisprudence de la Cour.

23      Bien que la motivation de la chambre de recours ne soit pas très détaillée quant à la question de la perception de la marque contestée par le public pertinent, elle permet néanmoins, d’une part, aux parties au présent litige de connaître les justifications de la décision attaquée afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de cette décision, conformément aux exigences de la jurisprudence citée au point 21 ci-dessus.

24      Par conséquent, il convient de constater que la chambre de recours a motivé à suffisance de droit, dans la décision attaquée, sa position sur la perception de la marque contestée par le public pertinent.

25      Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de rejeter le second moyen.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

26      Dans le cadre du premier moyen, la requérante soutient que la chambre de recours aurait conclu à tort à l’absence d’un risque de confusion dans le cas d’espèce.

27      En particulier, premièrement, la requérante ne conteste pas les conclusions de la chambre de recours selon lesquelles, d’une part, le territoire pertinent pour l’appréciation du risque de confusion est celui de l’Allemagne et, d’autre part, les services en cause, visés par la marque contestée, tels que repris au point 11 ci-dessus, sont identiques aux services visés par la marque antérieure. Deuxièmement, selon la requérante, le public pertinent, constitué tant du grand public que des professionnels, fait preuve d’un niveau d’attention élevé, voire particulièrement élevé. Troisièmement, la requérante fait valoir que, contrairement aux conclusions de la chambre de recours, la marque contestée serait perçue par le public pertinent non seulement comme la représentation d’un poisson stylisé, mais également comme la suite de lettres « b », « l », « i », « n » et « k » qui forme le mot « blink ». Par conséquent, selon la requérante, les marques en cause présentent un degré élevé de similitude sur le plan phonétique et un degré moyen de similitude sur le plan visuel, tandis qu’une comparaison conceptuelle, ainsi qu’il a été constaté par la chambre de recours, ne peut pas être effectuée en raison de l’absence de signification de la marque antérieure en allemand. Quatrièmement, la requérante soutient que, la marque antérieure n’ayant aucune signification en allemand ou en anglais, son caractère distinctif est moyen. Cinquièmement, eu égard auxdits éléments, la requérante fait valoir que le public pertinent va considérer la marque contestée comme un logo et que, aux yeux de ce public, il existe un risque de confusion, sous la forme d’un risque d’association, conformément à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

28      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

29      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

30      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

31      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

32      En premier lieu, s’agissant du territoire pertinent pour l’appréciation du risque de confusion, il convient de rappeler que, selon l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, l’existence d’un risque de confusion résultant de la similitude, d’une part, entre la marque dont l’enregistrement est demandé et une marque antérieure et, d’autre part, entre les produits ou les services que ces marques désignent doit être appréciée dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée [voir arrêt du 18 novembre 2020, LG Electronics/EUIPO – Staszewski (K7), T‑21/20, non publié, EU:T:2020:550, point 22 et jurisprudence citée].

33      La chambre de recours a constaté que, dans la mesure où la marque antérieure était une marque allemande, le territoire pertinent aux fins de l’appréciation du risque de confusion était l’Allemagne. Une telle constatation, qui d’ailleurs n’est pas contestée par les parties, est conforme à la jurisprudence citée au point 32 ci-dessus.

34      En deuxième lieu, s’agissant du public pertinent pour l’appréciation du risque de confusion, la chambre de recours, quant à l’examen de la perception des marques en cause, a pris en compte tant le grand public que les professionnels. Elle n’a pas explicitement défini le niveau d’attention du public pertinent, ce qui, en tout état de cause, ne met pas le Tribunal dans l’impossibilité de procéder à l’examen de la légalité de la décision attaquée, ni la requérante dans l’impossibilité de faire valoir ses droits [arrêt du 25 novembre 2015, Sephora/OHMI – Mayfield Trading (Représentation de deux lignes verticales ondulées), T‑320/14, non publié, EU:T:2015:882, point 21].

35      La requérante soutient que le public pertinent, constitué à la fois du grand public et des professionnels, fait preuve d’un niveau d’attention élevé, voire particulièrement élevé. Elle souligne, à cet égard, que les professionnels de la publicité, du divertissement, des activités culturelles, du fait de la nature même de leur profession, sont non seulement très créatifs et dotés d’une vive imagination, mais font également preuve d’une diligence et d’une attention professionnelles accrues. En outre, selon la requérante, le niveau d’attention de l’ensemble du public pertinent est particulièrement élevé, en raison du caractère marquant et accrocheur de la marque contestée.

36      À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

37      Même si la chambre de recours ne s’est pas prononcée explicitement sur le niveau d’attention du public pertinent, elle a, en fait, défini le public pertinent de la même manière que la division d’annulation, en prenant en compte, dans son examen de l’appréciation des marques en cause, tant le grand public que les professionnels. De plus, il ressort des motifs de la décision attaquée qu’elle a effectué ledit examen, de la même manière que la division d’annulation, par rapport au consommateur moyen du public pertinent ainsi défini.

38      Dans un cas similaire, il a déjà été considéré que la chambre de recours avait implicitement fait sienne la conclusion de la division d’annulation sur le niveau d’attention du public pertinent [voir, en ce sens, arrêt du 11 décembre 2014, Sherwin-Williams Sweden/OHMI – Akzo Nobel Coatings International (ARTI), T‑12/13, non publié, EU:T:2014:1054, point 51 et jurisprudence citée]. Ainsi, en l’espèce, il y a lieu de considérer que la chambre de recours a implicitement fait sienne la conclusion de la division d’annulation selon laquelle le niveau d’attention du public pertinent variait de moyen à élevé.

39      La requérante ne conteste pas que le public pertinent était constitué tant du grand public que de professionnels, mais soutient que le niveau d’attention dudit public devait être considéré comme étant élevé, voire particulièrement élevé, alors que, selon la décision attaquée, il variait de moyen à élevé.

40      À cet égard, il convient de distinguer deux catégories au sein des services en cause.

41      D’une part, les services de « [p]ublicité » et les « services de gestion commerciale », relevant de la classe 35, sont destinés à des professionnels plutôt qu’au grand public. Eu égard à leur nature, il convient de constater que les professionnels font preuve d’un niveau d’attention élevé lorsqu’ils ont recours à de tels services.

42      D’autre part, les autres services en cause, tels que les « [s]ervices de télécommunications », relevant de la classe 38, et les « [s]ervices de divertissement », les « activités sportives et culturelles », les services d’« enseignement » et de « formation » ou les services d’« [é]ducation », relevant de la classe 41, sont destinés tant au grand public qu’à des professionnels. Bien que les professionnels fassent preuve d’un niveau d’attention élevé lorsqu’ils recourent à ces services, une telle conclusion ne peut pas être étendue au grand public. Eu égard à leur nature, il n’y a pas lieu de considérer qu’un consommateur moyen du grand public ferait preuve d’un niveau d’attention élevé et, a fortiori, particulièrement élevé lorsqu’il aurait recours à de tels services, ce niveau étant plutôt moyen, surtout pour les « [s]ervices de divertissement » ou les « activités sportives et culturelles », relevant de la classe 41.

43      À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, s’agissant de l’appréciation du risque de confusion, le public ayant le niveau d’attention le moins élevé doit être pris en considération [voir arrêt du 20 mai 2014, Argo Group International Holdings/OHMI – Arisa Assurances (ARIS), T‑247/12, EU:T:2014:258, point 29 et jurisprudence citée].

44      Il ressort de ce qui précède que le niveau d’attention du public pertinent varie de moyen, pour les services visés au point 42 ci-dessus, à élevé, pour les services visés au point 41 ci-dessus, en fonction de la nature et du destinataire des services en cause.

45      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel le niveau d’attention du public pertinent, qu’il s’agisse du grand public ou des professionnels, est particulièrement élevé en raison du caractère marquant et accrocheur de la marque contestée. À cet égard, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 36 ci-dessus, le facteur pertinent pour l’appréciation du niveau d’attention du public pertinent est la catégorie des services en cause et non la nature de la marque contestée. Partant, cet argument de la requérante ne saurait prospérer.

46      En troisième lieu, s’agissant de la comparaison des marques en cause, la chambre de recours a constaté que la marque contestée serait perçue par le public pertinent uniquement comme la représentation d’un poisson stylisé, tandis que la marque antérieure consistait en un élément verbal unique, à savoir le mot « blinka ». Par conséquent, elle a considéré que les marques en cause étaient différentes sur le plan visuel. S’agissant de la comparaison phonétique, la chambre de recours a constaté, à titre principal, que les marques en cause ne pouvaient pas être comparées sur ce plan, car la marque contestée ne serait pas prononcée. À titre subsidiaire, elle a noté que, même dans le cas où la marque contestée serait prononcée « poisson », les marques en cause ne seraient pas similaires. S’agissant de la comparaison conceptuelle, la chambre de recours a conclu qu’une telle comparaison n’était pas possible, car la marque antérieure était dépourvue de signification.

47      La requérante soutient que les marques en cause présentent un degré moyen de similitude sur le plan visuel et un degré élevé de similitude sur le plan phonétique, tandis qu’elle ne conteste pas l’appréciation de la chambre de recours relative à la comparaison de ces marques sur le plan conceptuel.

48      Il convient de souligner que les arguments de la requérante reposent, en substance, sur une appréciation différente de celle de la chambre de recours, faite dans la décision attaquée, concernant la perception de la marque contestée par le public pertinent. Selon elle, cette marque sera perçue par ledit public non seulement comme la représentation d’un poisson stylisé, mais également comme la suite de lettres « b », « l », « i », « n » et « k » qui compose le corps dudit poisson.

49      Selon la jurisprudence, la perception des marques qu’a le consommateur moyen du type de produit ou de service en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale du risque de confusion. À cet égard, il y a lieu de relever que le consommateur moyen appréciera le signe dans une situation d’achat, dans laquelle il ne se livre pas, habituellement, à une analyse de détail. Dès lors, il convient de considérer comme illisible non seulement le signe qui est effectivement impossible à lire ou à déchiffrer, mais aussi le signe qui est si difficile à déchiffrer, à comprendre ou à lire que le consommateur raisonnablement attentif et avisé ne pourra y parvenir qu’en se livrant à une analyse dépassant ce qui peut être raisonnablement attendu de lui dans une situation d’achat [voir arrêt du 2 juillet 2008, Stradivarius España/OHMI – Ricci (Stradivari 1715), T‑340/06, non publié, EU:T:2008:241, point 34 et jurisprudence citée].

50      En l’espèce, la manière dont la marque contestée est présentée ne permet pas au consommateur moyen, qu’il s’agisse du grand public ou des professionnels, de reconnaître immédiatement que cette marque peut être perçue non seulement comme la représentation d’un poisson stylisé, mais également comme la suite de lettres « b », « l », « i », « n » et « k ». Même s’il n’est pas complètement impossible pour le consommateur moyen d’identifier et de lire cette suite de lettres dans la marque contestée, cela lui imposerait néanmoins de se livrer à une analyse dépassant de loin ce qui peut être raisonnablement attendu de lui dans une situation d’achat.

51      Ainsi que le soutient à bon droit la chambre de recours dans la décision attaquée, le consommateur moyen ne perdra généralement pas de temps, dans une situation d’achat, à essayer de distinguer si des lettres ou des mots sont dissimulés dans la représentation d’un poisson. De plus, ainsi que l’EUIPO l’a souligné à juste titre dans son mémoire en réponse, le terme « blink » n’ayant aucune signification en allemand, il est d’autant moins probable qu’un consommateur moyen identifiera ce mot dans la marque contestée.

52      Par conséquent, eu égard à la jurisprudence citée au point 49 ci-dessus, la chambre de recours a conclu à bon droit que, d’une part, la marque contestée devait être considérée comme la représentation d’un poisson stylisé et, d’autre part, le public pertinent n’associerait pas cet élément figuratif à une signification particulière autre que celle d’un poisson.

53      Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante.

54      Premièrement, la requérante soutient que la chambre de recours a appliqué à tort la règle selon laquelle le consommateur moyen n’a pas tendance à analyser les marques en détail, car cette règle ne s’appliquerait qu’aux marques verbales contenant des éléments plus ou moins descriptifs.

55      Il convient de souligner que ce principe ressort d’une jurisprudence bien établie qui ne limite aucunement son application aux marques verbales contenant des éléments descriptifs, ce principe ayant en effet été appliqué à différents types de marques [voir, en ce sens, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 23 ; du 20 septembre 2017, Jordi Nogues/EUIPO – Grupo Osborne (BADTORO), T‑350/13, EU:T:2017:633, point 23, et du 9 décembre 2020, Almea/EUIPO – Sanacorp Pharmahandel (Almea), T‑190/20, non publié, EU:T:2020:597, point 25].

56      Deuxièmement, en se fondant sur les explications qui ressortent des directives relatives aux marques et aux dessins ou modèles adoptées par l’EUIPO (ci-après les « directives de l’EUIPO »), la requérante soutient qu’au moins une partie importante du public pertinent serait en mesure d’identifier le mot « blink » à l’intérieur de la marque contestée.

57      À cet égard, il y a lieu de relever que les directives de l’EUIPO ne constituent pas des actes juridiques contraignants pour l’interprétation des dispositions du droit de l’Union (arrêt du 19 décembre 2012, Leno Merken, C‑149/11, EU:C:2012:816, point 48).

58      De plus, dans la mesure où les décisions que les chambres de recours de l’EUIPO sont amenées à prendre, en vertu du règlement 2017/1001, relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non pas d’un pouvoir discrétionnaire, la légalité de ces décisions doit être appréciée uniquement sur la base de ce règlement, tel qu’interprété par le juge de l’Union (arrêt du 19 janvier 2012, OHMI/Nike International, C‑53/11 P, EU:C:2012:27, point 57).

59      Dès lors, il y a lieu de rejeter les arguments de la requérante fondés sur l’application des directives de l’EUIPO.

60      Troisièmement, la requérante soutient avoir effectué une étude de marché auprès des employés du cabinet juridique qui la représente, dont il ressort que les personnes interrogées ont identifié, dans la marque contestée, non seulement la représentation d’un poisson stylisé, mais également les mots « blink » ou « link ».

61      Il convient d’observer que l’étude de marché ainsi présentée par la requérante n’est ni représentative ni fiable. Ainsi que le soutient à bon droit l’EUIPO, cette étude ne remplit pas les conditions d’indépendance et de fiabilité des sources qui doivent présider à la réalisation de telles études. En outre, elle ne repose pas sur un échantillon représentatif du public pertinent ni suffisamment large pour être probante. Dès lors, les résultats de cette étude ne peuvent pas être pris en compte aux fins du traitement de la présente affaire.

62      Quatrièmement, au soutien de sa position, la requérante souligne que l’intention du créateur de la marque contestée était notamment de créer un logo qui combinerait la forme d’un poisson et le mot « blink ».

63      À cet égard, il y a lieu de rappeler que le facteur déterminant au regard de l’étendue de la protection de la marque est la manière dont elle sera perçue, sur le seul fondement du signe tel qu’enregistré [voir, en ce sens, arrêt du 17 janvier 2018, Deichmann/EUIPO – Munich (Représentation d’une croix sur le côté d’une chaussure de sport), T‑68/16, EU:T:2018:7, point 44]. Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 30 ci-dessus, dans le contexte de l’appréciation du risque de confusion, le facteur pertinent est la perception des signes par le public pertinent et non l’intention des créateurs de ces signes. Partant, il convient de rejeter l’argument de la requérante en cause comme étant inopérant.

64      Cinquièmement, la requérante fait valoir que, bien que les lettres « b », « l », « i », « n » et « k » ne soient pas écrites dans une police ordinaire dans la marque contestée, la forme basique de chaque lettre est reconnaissable et n’est pas très stylisée.

65      Même s’il est possible de reconnaître lesdites lettres ou, au moins, la plupart d’entre elles, cet argument de la requérante ne remet pas en cause la conclusion tirée au point 50 ci-dessus, selon laquelle une telle reconnaissance imposerait au consommateur moyen du public pertinent de se livrer à une analyse dépassant de loin ce qui peut être raisonnablement attendu de lui dans une situation d’achat. Dans la mesure où, dans une telle situation, ce consommateur percevra, en principe, la marque contestée uniquement comme la représentation d’un poisson stylisé, le degré de stylisation des lettres cachées dans le corps de celui-ci n’est pas susceptible de changer ladite perception d’une manière significative.

66      Eu égard à ce qui précède, il convient d’effectuer la comparaison des marques en cause sur les plans visuel, phonétique et conceptuel en partant de l’appréciation de la perception de la marque contestée par le public pertinent effectuée par la chambre de recours dans la décision attaquée, telle que rappelée au point 52 ci-dessus.

67      Il y a lieu de constater, d’abord, que c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’absence de similitude visuelle entre les marques en cause, étant donné que ces marques n’ont rien en commun puisque la marque contestée consiste en la représentation d’un poisson stylisé, tandis que la marque antérieure est constituée d’un élément verbal unique, à savoir le mot « blinka ».

68      Ensuite, la chambre de recours a constaté à bon droit que les marques en cause ne pouvaient pas être comparées sur le plan phonétique, en raison de l’impossibilité de prononcer la marque contestée.

69      Il convient par conséquent de confirmer l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle une comparaison conceptuelle entre les marques en cause n’était pas possible dans la mesure où la marque antérieure était dépourvue de signification.

70      Étant donné que la similitude des marques est l’une des conditions cumulatives pour l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, d’une part, et qu’aucune similitude entre les marques en cause n’a été constatée, d’autre part, il convient de conclure à l’absence de risque de confusion au sens dudit article, sans qu’il soit nécessaire d’analyser les autres facteurs pertinents pour l’appréciation de l’existence d’un risque de confusion.

71      En outre, les autres arguments de la requérante, visés au point 27 ci-dessus, étant fondés sur sa position erronée de la perception de la marque contestée, il y a également lieu de les écarter sans qu’il soit besoin de procéder à une analyse plus détaillée de ceux-ci.

72      Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de rejeter le premier moyen et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

73      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

74      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO, l’autre partie n’étant, quant à elle, pas partie à la présente procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Wirtschaftsgesellschaft des Kfz-Gewerbes mbH est condamnée aux dépens.

Tomljenović

Schalin

Škvařilová-Pelzl

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 mars 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.