Language of document : ECLI:EU:T:2011:209

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

12 mai 2011 (*)

« Aides d’État – Construction de matériel ferroviaire – Avances remboursables – Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché commun et ordonnant sa récupération – Adaptation des conclusions – Droits de la défense – Obligation de motivation – Ressources d’État – Imputabilité à l’État – Critère de l’investisseur privé – Entreprise en difficulté »

Dans les affaires jointes T‑267/08 et T‑279/08,

Région Nord-Pas-de-Calais (France), représentée par Mes M. Cliquennois et F. Cavedon, avocats,

partie requérante dans l’affaire T‑267/08,

Communauté d’agglomération du Douaisis (France), représentée par Mes M.Y. Benjamin et D. Rombi, avocats,

partie requérante dans l’affaire T‑279/08,

contre

Commission européenne, représentée par MM. C. Giolito et B. Stromsky, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, initialement, une demande d’annulation de la décision C (2008) 1 089 final de la Commission, du 2 avril 2008, concernant l’aide d’État C 38/2007 (ex NN 45/2007) mise à exécution par la France en faveur d’Arbel Fauvet Rail SA, puis une demande d’annulation de la décision C (2010) 4112 final de la Commission, du 23 juin 2010, concernant l’aide d’État C 38/2007 (ex NN 45/2007) mise à exécution par la France en faveur d’Arbel Fauvet Rail,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. L. Truchot (rapporteur), président, Mme M. E. Martins Ribeiro et M. H. Kanninen, juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 11 novembre 2010,

rend le présent

Arrêt

 Faits à l’origine des litiges

1        Arbel Fauvet Rail (ci-après « AFR ») est un constructeur de matériel ferroviaire roulant à usage industriel établi à Douai, en France.

2        Le 4 juillet 2005, cette société a obtenu de la Région Nord-Pas-de Calais (ci-après la « région NPDC ») et de la communauté d’agglomération du Douaisis (ci-après la « CAD ») deux avances, d’un montant de un million d’euros chacune, au taux d’intérêt annuel de 4,08 % et remboursables par versements semestriels sur une durée de trois ans à partir du 1er janvier 2006.

3        À la suite d’une plainte, la Commission des Communautés européennes a sollicité des autorités françaises la communication d’informations sur ces mesures. Les autorités françaises ont répondu à ces demandes par des communications en date respectivement des 27 avril et 24 octobre 2006, 30 janvier et 6 juin 2007.

4        Par lettre du 12 septembre 2007, la Commission a informé la République française de sa décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE (ci-après la « décision d’ouverture »).

5        La décision d’ouverture a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne du 24 octobre 2007 (JO C 249, p. 17). La Commission a invité les parties intéressées à présenter leurs observations sur les mesures en cause.

6        La Commission a reçu les observations des autorités françaises par des lettres des 12 octobre, 18 et 19 décembre 2007. Elle n’a pas reçu d’observations des parties intéressées.

7        Par décision C (2008) 1 089 final, du 2 avril 2008, concernant l’aide d’État C 38/2007 (ex NN 45/2007) mise à exécution par la France en faveur d’AFR (JO L 238, p. 27, ci-après la « décision originelle »), la Commission a décidé que les avances accordées par la région NPDC et la CAD étaient constitutives d’une aide d’État. S’agissant d’un crédit octroyé à une entreprise en difficulté dont le remboursement n’a été garanti par aucune sûreté, la Commission a estimé que le montant de cette aide était égal à la différence entre l’intérêt qui a effectivement été appliqué et l’intérêt auquel l’entreprise bénéficiaire aurait pu obtenir le même crédit sur le marché privé.

8        La Commission a considéré que l’aide d’État mise à exécution par la République française en faveur d’AFR était incompatible avec le marché commun. Elle a donc ordonné sa récupération par la République française, avec intérêts, auprès du bénéficiaire.

 Procédure et nouveaux développements en cours d’instance

9        Par requêtes déposées au greffe du Tribunal, respectivement, les 11 et 17 juillet 2008, la région NPDC et la CAD ont introduit, respectivement, les recours T‑267/08 et T‑279/08, qui avaient pour objet initial une demande en annulation de la décision originelle.

10      La région NPDC a demandé, dans la réplique, la jonction des affaires T‑267/08 et T‑279/08. La Commission n’a formulé aucune objection à l’égard de cette demande et la CAD s’y est déclarée favorable.

11      Par ordonnance en date du 19 février 2009, le président de la sixième chambre du Tribunal a ordonné, en vertu de l’article 50, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, la jonction des affaires T‑267/08 et T‑279/08 aux fins de la procédure orale et de l’arrêt.

12      Le 23 juin 2010, la Commission a retiré la décision originelle, au motif qu’elle n’était pas motivée à suffisance de droit en ce qui concerne le calcul du montant de l’aide, à la lumière de l’arrêt du Tribunal du 3 mars 2010, Freistaat Sachsen e.a./Commission (T‑102/07 et T‑120/07, non encore publié au Recueil, ci-après l’« arrêt Biria »).

13      La décision originelle a été remplacée par la décision C (2010) 4112 final de la Commission, du 23 juin 2010, concernant l’aide d’État C 38/2007 (ex NN 45/2007) mise à exécution par la France en faveur d’AFR (ci-après la « décision attaquée »), par laquelle la Commission a, d’une part, confirmé l’incompatibilité de cette aide avec le marché commun et, d’autre part, ordonné la récupération de ladite aide par la République française, avec intérêts, auprès du bénéficiaire.

14      Le 23 août 2010, dans leurs observations présentées à la suite de l’adoption de la décision attaquée, la région NPDC et la CAD, d’une part, ont précisé que, nonobstant le retrait de la décision originelle, elles n’entendaient pas se désister des conclusions initiales des recours et, d’autre part, ont demandé à pouvoir adapter leurs conclusions de façon que les recours visent également la décision attaquée.

15      Le 27 septembre 2010, la Commission a répondu aux observations présentées par les requérantes du 23 août 2010. Elle a renoncé à son chef de conclusions visant à ce que les requérantes soient condamnées aux dépens et a demandé que chaque partie supporte ses propres dépens.

16      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la huitième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

17      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (huitième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure, a posé des questions écrites aux requérantes et à la Commission. Celles-ci y ont répondu dans le délai imparti.

18      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal lors de l’audience du 11 novembre 2010.

 Conclusions des parties

19      Dans l’affaire T‑267/08, la région NPDC conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

20      Dans l’affaire T‑279/08, la CAD conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

21      Dans les affaires T‑267/08 et T‑279/08, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter les recours comme étant non fondés ;

–        condamner chaque partie à supporter ses propres dépens.

 En droit

A –  Sur les conséquences procédurales du retrait de la décision originelle et de son remplacement par la décision attaquée

22      Ainsi qu’il ressort des points 12 et 13 ci-dessus, la décision originelle a été retirée et remplacée, depuis le dépôt des requêtes, par la décision attaquée. Les requérantes ont demandé à pouvoir adapter leurs conclusions initiales de façon que leurs recours visent à l’annulation de la décision attaquée.

23      À cet égard, il convient de rappeler que, lorsqu’une décision est, en cours de procédure, remplacée par une décision ayant le même objet, celle-ci doit être considérée comme un élément nouveau permettant au requérant d’adapter ses conclusions et moyens. Il serait, en effet, contraire à une bonne administration de la justice et à une exigence d’économie de procédure d’obliger le requérant à introduire un nouveau recours. Il serait, en outre, injuste que l’institution en cause puisse, pour faire face aux critiques contenues dans une requête présentée au juge de l’Union contre une décision, adapter la décision attaquée ou lui en substituer une autre et se prévaloir, en cours d’instance, de cette modification ou de cette substitution pour priver l’autre partie de la possibilité d’étendre ses conclusions et ses moyens initiaux à la décision ultérieure ou de présenter des conclusions et moyens supplémentaires contre celle-ci (voir arrêt du Tribunal du 12 décembre 2006, Organisation des Modjahedines du peuple d’Iran/Conseil, T‑228/02, Rec. p. II‑4665, point 28, et la jurisprudence citée).

24      Il convient donc, en l’espèce, d’une part, de considérer que les demandes initiales des requérantes tendant à l’annulation de la décision originelle sont devenues sans objet, du fait du retrait de cette décision par la décision attaquée, de sorte qu’il n’y a plus lieu de statuer sur lesdites demandes, et, d’autre part, de faire droit aux demandes nouvelles des requérantes visées au point 14 ci-dessus, de considérer que leurs recours tendent à l’annulation de la décision attaquée et de permettre aux parties de reformuler leurs conclusions, moyens et arguments à la lumière de cet élément nouveau, ce qui implique, pour elles, le droit de présenter des conclusions, des moyens et des arguments supplémentaires.

B –  Sur la demande en annulation de la décision attaquée

25      Le recours T‑267/08 comporte sept moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l’obligation de motivation. Le deuxième moyen est tiré de la violation des droits de la défense et des principes du contradictoire, d’égalité, de bonne administration, de respect de l’identité constitutionnelle des États membres et de protection de la confiance légitime. Le troisième moyen est tiré d’une erreur manifeste d’appréciation concernant l’absence de prise en considération de la particularité juridique de l’auteur de l’aide. Le quatrième moyen est tiré de la violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Il comporte deux branches qui concernent, respectivement, une erreur d’appréciation quant à l’origine des fonds et une erreur de qualification d’AFR d’entreprise en difficulté. Le cinquième moyen est tiré d’une erreur d’appréciation quant au prétendu avantage qu’AFR aurait retiré des avances remboursables. Le sixième moyen est tiré d’une erreur d’appréciation du montant de l’aide. Le septième moyen est tiré d’une violation des droits de la défense dans le cadre de la procédure contentieuse et d’un détournement de pouvoir.

26      Le recours T‑279/08 comporte quatre moyens. Le premier moyen est tiré de la violation des droits de la défense et du principe du contradictoire. Le deuxième moyen est tiré de la violation de l’obligation de motivation. Le troisième moyen est tiré d’une erreur d’appréciation concernant la notion d’entreprise en difficulté. Le quatrième moyen est tiré d’une erreur d’appréciation concernant la notion de ressources d’État.

27      Par ailleurs, la CAD a soulevé, lors de l’audience, un cinquième moyen, tiré de l’erreur manifeste d’appréciation de la Commission concernant l’absence de sûretés garantissant le remboursement des avances.

1.     Sur la recevabilité du cinquième moyen du recours T‑279/08

a)     Arguments des parties

28      Lors de l’audience, la CAD a fait valoir que la Commission avait commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que les avances remboursables litigieuses avaient été octroyées sans qu’aucune sûreté garantisse leur remboursement. Le versement de l’avance par la CAD aurait en effet été conditionné par la fusion irrévocable d’AFR et de Lormafer, une société contrôlée par la société Arbel SA. Cette fusion serait constitutive d’une garantie compte tenu de l’agrandissement du périmètre de récupération des dettes pour les créanciers en résultant.

29      La Commission a soutenu, lors de l’audience, que ce moyen, ayant été soulevé tardivement, devait être déclaré irrecevable. À titre subsidiaire, elle a avancé que la condition du versement de l’aide invoquée par la CAD ne saurait être juridiquement assimilée à une garantie et que le versement des avances litigieuses n’avait été subordonné à la constitution d’aucune sûreté.

30      En réponse à l’irrecevabilité soulevée par la Commission, la CAD a affirmé que l’argument en cause figurait au point 30 de sa requête et que la condition invoquée était précisée dans le compte rendu de la délibération du conseil de la CAD du 24 juin 2005 constituant l’annexe A.2 de sa requête.

b)     Appréciation du Tribunal

31      Il convient de rappeler que, en vertu des dispositions combinées de l’article 44, paragraphe 1, sous c), et de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure, la requête doit contenir l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués et que la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite, à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure.

32      En l’espèce, il convient de constater que la requérante, contrairement à ses allégations, n’a pas soulevé le présent moyen dans sa requête. En effet, le point 30 de la requête ne fait que mentionner que l’avance litigieuse a été accordée par la CAD « sous certaines conditions », sans prétendre que, parmi ces conditions, la fusion irrévocable d’AFR et de Lormafer constituerait une garantie et que la Commission aurait donc commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant qu’aucune sûreté ne garantissait le remboursement des avances. Le compte rendu de la délibération du conseil de la CAD figurant en annexe A.2 à la requête ne fait par ailleurs que préciser à quelles conditions le versement de l’avance a été soumis, sans évoquer une quelconque sûreté garantissant le remboursement de ladite avance, et ne saurait, en tout état de cause, être interprété comme formulant le présent moyen. Il y a lieu d’ajouter que ce moyen n’est pas davantage invoqué par la requérante dans sa demande d’adaptation de ses conclusions et moyens visée au point 14 ci-dessus.

33      Par ailleurs, la requérante n’allègue pas que ledit moyen se fonde sur des éléments de droit et de fait qui se seraient révélés pendant la procédure.

34      Partant, conformément aux dispositions du règlement de procédure visées au point 31 ci-dessus, le moyen pris d’une erreur manifeste d’appréciation concernant l’absence de sûretés garantissant le remboursement des avances, soulevé lors de l’audience, doit être rejeté comme irrecevable.

35      À titre surabondant et à supposer même que cet argument puisse être considéré comme constituant l’ampliation d’un moyen soulevé précédemment et, comme tel, recevable (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 19 mai 1983, Verros/Parlement, 306/81, Rec. p. 1755, point 9, et du 22 novembre 2001, Pays-Bas/Conseil, C‑301/97, Rec. p. I‑8853, point 169), il doit, en tout état de cause, être rejeté. En effet, la condition à laquelle était subordonnée le versement de l’avance accordée par la CAD, à savoir la fusion entre les sociétés AFR et Lormafer, ne confère pas une situation privilégiée à la CAD par rapport aux autres créanciers d’AFR. Elle ne constitue ni un engagement pris envers la CAD par un tiers ni l’affectation d’un bien au paiement préférentiel de la CAD. Elle ne saurait donc être considérée comme constituant une sûreté garantissant le remboursement de ladite avance. La Commission n’a donc pas commis d’erreur manifeste d’appréciation sur ce point.

2.     Sur le premier moyen du recours T‑267/08 et sur le deuxième moyen du recours T‑279/08, tirés de la violation de l’obligation de motivation

a)     Arguments des parties

36      La région NPDC soutient que la décision attaquée souffre d’un défaut de motivation. Elle relève, à titre liminaire, que la Commission a procédé à un examen global et solidaire de l’aide accordée à AFR, qu’elle a considéré comme constituant une aide unique, et non comme deux aides distinctes, accordées par la région NPDC, d’une part, et par la CAD, d’autre part.

37      Elle affirme que la motivation est erronée en ce qui concerne l’aide accordée par la CAD, dès lors que, au considérant 18 de la décision originelle, la Commission a énoncé que cette aide avait été octroyée par les communes de la CAD. Or, la CAD serait un établissement public autonome, sur les plans administratif et budgétaire, juridiquement distinct des communes qui le composent, avec lequel des relations contractuelles peuvent être établies, et qui est doté de compétences et d’une fiscalité propres. La motivation relative à la prétendue aide accordée par lesdites communes serait donc inopérante, ce qui rendrait la motivation concernant l’aide octroyée par la CAD inexistante. La rectification de l’erreur figurant au considérant 18 de la décision originelle, opérée par la Commission au considérant 27 de la décision attaquée, n’aurait pas fait disparaître ce vice de forme, la Commission ne s’expliquant pas sur ce changement de qualification.

38      Dès lors, la motivation concernant la part régionale de l’aide devrait aussi être considérée comme inexistante, par application d’un principe d’indivisibilité de la motivation.

39      À titre subsidiaire, si le Tribunal devait considérer que la motivation était divisible, il en résulterait une insuffisance de motivation pour la part régionale de l’aide, l’appréciation de la situation d’AFR ayant été opérée sur la base d’une aide totale de deux millions d’euros. L’appréciation de la notion d’avantage pour l’entreprise aurait donc reposé sur des bases erronées.

40      La CAD fait valoir que la décision attaquée est entachée, comme l’était la décision originelle, d’une insuffisance de motivation en ce qui concerne la méthode utilisée pour le calcul du montant de l’aide, reposant sur une majoration de 800 points de base du taux d’intérêt de référence (ci-après la « prime de risque »). En effet, la Commission se contenterait de renvoyer, d’une part, à la décision originelle et, d’autre part, à sa communication 2008/C 14/02 relative à la révision de la méthode de calcul des taux de référence et d’actualisation (JO C 14, p. 6, ci-après la « communication de 2008 sur les taux de référence »). Or, d’une part, la décision originelle aurait été retirée au motif que le calcul de ladite prime de risque était insuffisamment motivé et, d’autre part, le simple renvoi aux textes applicables, en l’absence de toute précision propre à la situation en cause permettant de vérifier la pertinence de l’analyse, serait, selon la jurisprudence, insuffisant, car il ne permettrait pas au Tribunal de contrôler la validité de la méthode de calcul de la majoration d’intérêts retenue.

41      Dans la réplique, la CAD soutient en outre que la Commission a procédé à une analyse globale et solidaire du mécanisme des avances remboursables accordées à AFR, alors qu’il existerait en réalité deux avances distinctes.

42      La Commission conclut au rejet des présents moyens.

b)     Appréciation du Tribunal

43      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la portée de l’obligation de motivation dépend de la nature de l’acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté. La motivation doit faire apparaître de manière claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, de façon, d’une part, à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de pouvoir défendre leurs droits et de vérifier si la décision est ou non bien fondée et, d’autre part, à permettre au juge de l’Union d’exercer son contrôle de légalité. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En particulier, la Commission n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés, mais il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (voir arrêt du Tribunal du 15 juin 2005, Corsica Ferries France/Commission, T‑349/03, Rec. p. II‑2197, points 62 à 64, et la jurisprudence citée).

44      En outre, lorsqu’une décision a été adoptée dans un contexte bien connu de l’intéressé, elle peut être motivée de manière sommaire (arrêts de la Cour du 26 novembre 1975, Groupement des fabricants de papiers peints de Belgique e.a./Commission, 73/74, Rec. p. 1491, point 31, et du 30 septembre 2003, Allemagne/Commission, C‑301/96, Rec. p. I‑9919, points 89 et 92).

45      Il y a également lieu de rappeler la jurisprudence selon laquelle l’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé de la motivation, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux (arrêt de la Cour du 22 mars 2001, France/Commission, C‑17/99, Rec. p. I‑2481, point 35 ; arrêts du Tribunal du 12 novembre 2008, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑406/06, non publié au Recueil, point 47, et du 20 mai 2009, VIP Car Solutions/Parlement, T‑89/07, Rec. p. II‑1403, point 63). Les griefs et arguments visant à contester le bien-fondé de cet acte sont dès lors dénués de pertinence dans le cadre d’un moyen tiré du défaut ou de l’insuffisance de la motivation (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 12 septembre 2007, Olympiaki Aeroporia Ypiresies/Commission, T‑68/03, Rec. p. II‑2911, point 79, et Biria, point 12 supra, point 210).

 Sur le premier moyen du recours T‑267/08

46      La région NPDC avance, en substance, que la décision attaquée souffrirait d’un défaut de motivation parce qu’elle ferait ressortir que la Commission a considéré que l’avance remboursable accordée par la CAD aurait été octroyée par les communes de la CAD.

47      Il convient toutefois de considérer que la décision originelle ayant été retirée, la région NPDC ne saurait utilement se prévaloir d’un prétendu défaut de motivation de celle-ci à l’encontre de la décision attaquée. Par ailleurs, les considérants 16, 17 et 27 de cette dernière identifient de manière claire et non équivoque la CAD, et non les communes qui la composent, comme la collectivité ayant octroyé l’une des deux avances remboursables litigieuses, de sorte que le présent moyen doit être écarté comme manquant en fait.

 Sur le deuxième moyen du recours T‑279/08

48      Le moyen se divise en deux branches. La première branche concerne une insuffisance de motivation relative à la méthode de calcul du montant de l’aide. La seconde branche a trait à un défaut de motivation découlant d’un examen global et solidaire de l’aide accordée à AFR.

–       Sur la première branche, tirée d’une insuffisance de motivation relative à la méthode de calcul du montant de l’aide

49      Dans la décision attaquée, la Commission a exposé sa méthode de calcul du montant de l’aide dans les termes suivants :

« (49) Dans le cas d’aides octroyées sous la forme de crédits à des entreprises en difficulté, l’élément d’aide est constitué par la différence entre l’intérêt effectivement appliqué et l’intérêt auquel l’entreprise bénéficiaire aurait pu obtenir le même crédit sur le marché privé.

(50) Conformément à la communication de 1997 sur les taux de référence, la Commission établit des taux de référence qui sont supposés refléter le niveau des taux d’intérêt moyen requis sur le marché pour des prêts à moyen et long termes, ces prêts étant assortis de sûretés normales. Ladite communication souligne aussi que le taux de référence est un taux plancher qui peut être majoré dans des situations impliquant un risque particulier, par exemple lorsque l’entreprise est en difficulté ou lorsque les sûretés normalement requises par les banques ne sont pas présentes. Dans de tels cas, la majoration peut être de 400 points de base ou plus. La Communication de 1997 sur les taux de référence ne précise pas si différentes primes de risques peuvent être cumulées si l’on prend en compte différents risques. Bien que ce cumul ne soit pas exclu, la Commission doit motiver dans sa décision la méthode utilisée en vue de cumuler les différentes primes de risque en recourant à une analyse de la pratique des marchés financiers. […]

(51) En 2004, [un] cabinet d’audit […] a mené une étude […] pour le compte de la Commission (ci-après ‘l’étude’). Sur la base d’une recherche empirique, l’étude identifie les primes observables sur le marché pour différentes catégories de risques relatifs à des entreprises ou à des transactions (dotées de sûretés variables). L’étude montre clairement que la présence simultanée de différents aspects de risques (solvabilité de l’emprunteur, sûretés) se matérialise sous forme de majorations devant être ajoutées au taux de base.

(52) Consécutivement à l’étude, l’approche de la Commission concernant le calcul de l’élément d’aide dans les prêts a été affinée et précisée dans sa communication de 2008 relative à la révision de la méthode de calcul des taux de référence et d’actualisation […] (ci-après ‘la communication de 2008 sur les taux de référence’). Cette communication reflète la méthode préconisée par l’étude et prévoit l’ajout de différentes majorations aux taux de base, tant en fonction de la solvabilité de l’entreprise que des sûretés offertes.

(53) Or, il y a lieu de constater que la détermination de l’élément d’aide dans les mesures se réfère à la notion d’aide d’État et, comme l’indique de manière constante la jurisprudence de la Cour de justice, ‘la notion d’aide d’État répond à une situation objective qui s’apprécie à la date à laquelle la Commission prend sa décision’.

[…]

(54) En conséquence, la Commission considère que la méthode appropriée pour déterminer l’élément d’aide est celle contenue dans la communication de 2008 sur les taux de référence et entend examiner les mesures en question au regard de cette communication.

(55) La communication de 2008 relative aux taux de référence prévoit que la majoration permettant d’exclure la présence d’une aide d’État dans le cas d’une entreprise en difficulté offrant un bas niveau de sûretés équivaut à 1 000 points de base.

(56) Comme il a été montré à la section 5.1.3, la Commission considère que AFR était une entreprise en difficulté au moment où les mesures (d’aide) ont été octroyées. La Commission observe de surcroît qu’aucune sûreté n’avait été offerte au soutien des avances remboursables et que le niveau de sûretés peut donc être considéré comme bas.

(57) Dès lors, l’élément d’aide équivaut, en principe, à la différence entre le taux de base majoré de 1 000 points et le taux auquel la mesure a été octroyée. Prenant en compte, cependant, qu’elle a considéré dans sa décision originelle du 2 avril 2008 que la majoration applicable est de 800 points de base, que le bénéficiaire de l’aide n’a pas attaqué cette décision, qu’aucun concurrent du bénéficiaire n’a non plus mis en doute la légalité de la décision initiale et compte tenu de l’ensemble des circonstances de la présente espèce, la Commission est d’avis qu’il n’y a pas lieu d’accroître cette majoration dans le cas présent.

(58) La Commission conclut que l’élément d’aide équivaut à la différence entre le taux d’intérêt de référence applicable majoré de 800 points de base et le taux d’intérêt auquel la mesure a été octroyée. »

50      Il convient de constater que la motivation de la méthode de calcul du montant de l’aide retenue par la Commission ne se limite pas, contrairement aux affirmations de la CAD, à un simple renvoi à la communication de 2008 sur les taux de référence et à la décision originelle. En effet, la décision attaquée comporte une description détaillée de la méthode de calcul choisie, à savoir l’utilisation d’un taux de référence associé à une majoration forfaitaire liée à la situation difficile d’AFR et à l’absence de sûretés garantissant les avances remboursables.

51      En premier lieu, la méthode de calcul exposée par la Commission fait référence à la communication 97/C 273/03 concernant la méthode de fixation des taux de référence et d’actualisation (JO C 273, p. 3, ci-après la « communication de 1997 sur les taux de référence ») ainsi qu’à la communication de 2008 sur les taux de référence.

52      En deuxième lieu, la décision attaquée est motivée par une analyse approfondie de la situation financière d’AFR – dont le bien-fondé constitue une question distincte de celle du respect de l’obligation de motivation – et de l’absence de sûretés.

53      En troisième lieu, s’agissant de la motivation de la majoration du taux de référence applicable, compte tenu du cumul de risques résultant de la situation financière d’AFR et de l’absence de sûretés, la décision attaquée fait état, en application de la jurisprudence du Tribunal (arrêt Biria, point 12 supra, point 218), d’une analyse de la pratique sur les marchés financiers, opérée en octobre 2004 par un cabinet d’audit pour le compte de la Commission, sur la base d’une recherche empirique des primes observables sur le marché pour différentes catégories de risques relatifs à des entreprises ou à des transactions.

54      La référence à la décision originelle opérée au considérant 57 de la décision attaquée visait seulement, en complément de la mention d’une prise en compte des autres circonstances de l’espèce, à motiver la fixation par la Commission de la prime de risque à 800 points de base. Le Tribunal estime que la fixation de la prime de risque à un tel niveau est suffisamment motivée. 

55      Il résulte de ce qui précède que la première branche du présent moyen doit être rejetée comme non fondée.

–       Sur la seconde branche, tirée d’un défaut de motivation découlant de l’examen « global et solidaire » des avances accordées à AFR

56      En premier lieu, il y a lieu de relever que, dans la décision attaquée, la Commission a bien distingué, lors de la présentation des mesures de soutien en cause opérée au considérant 17, les deux avances remboursables accordées, d’une part, par la région NPDC et, d’autre part, par la CAD.

57      En deuxième lieu, il convient de constater que, si le considérant 16 de la décision attaquée se référait à une « avance remboursable conjointe », cette circonstance ne saurait être considérée comme étant constitutive d’un défaut de motivation. En effet, il était également précisé, au considérant 17 de la décision attaquée, que l’avance accordée par la CAD était subordonnée, selon les informations transmises par les autorités françaises à la Commission, à la condition qu’une avance remboursable similaire soit accordée, dans les mêmes termes, par la région NPDC.

58      En troisième lieu, si, dans la décision attaquée, la Commission s’est livrée à un examen conjoint de la qualification d’aides d’État des avances en cause, de la détermination de leur montant et de leur compatibilité avec le marché commun, cette circonstance ne saurait constituer per se une violation de l’obligation de motivation. En effet, dès lors que les avances avaient été accordées, d’une part, aux mêmes conditions, s’agissant du taux d’intérêt, des modalités de remboursement et de l’absence de sûretés, et, d’autre part, au même bénéficiaire, une motivation conjointe répondait, en l’espèce, à la finalité de l’obligation de motivation, c’est-à-dire à la nécessité de faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle.

59      Il convient donc de rejeter la seconde branche du présent moyen.

60      Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter dans sa totalité le deuxième moyen du recours T‑279/08, tiré de la violation de l’obligation de motivation.

3.     Sur le deuxième moyen du recours T‑267/08, tiré de la violation des droits de la défense et des principes du contradictoire, d’égalité, de bonne administration, de respect de l’identité constitutionnelle des États membres et de protection de la confiance légitime, et sur le premier moyen du recours T‑279/08, tiré de la violation des droits de la défense et du principe du contradictoire

a)     Arguments des parties

61      La région NPDC fait valoir que le respect des droits de la défense, applicable dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci, s’impose dans le cadre des procédures relatives aux aides d’État non seulement au profit du destinataire de la décision, mais également au profit de la collectivité ayant attribué l’aide. Or, la Commission n’aurait sollicité ni la commission permanente du conseil régional du NPDC, qui a décidé de l’attribution de l’aide, ni le président dudit conseil régional, compétent pour procéder à son exécution. La République française n’aurait pas non plus adressé de demande d’explications à ces autorités élues du conseil régional, des contacts ayant été établis uniquement avec les autorités administratives de ce dernier. De plus, les autorités décisionnelles ou administratives de la région NPDC n’auraient pas eu accès au dossier et n’auraient pas été destinataires des pièces de la procédure, des observations de la République française ou des interrogations formulées par la Commission à propos de l’aide litigieuse. La Commission aurait dû soit s’adresser directement à la région NPDC, soit demander à la République française de saisir officiellement son représentant légal, c’est-à-dire le président du conseil régional, afin qu’il lui fasse part de ses observations.

62      En procédant ainsi, la Commission aurait violé les principes de bonne administration et de respect de l’identité constitutionnelle des États membres, en portant atteinte à la libre administration des collectivités territoriales garantie par la Constitution française du 4 octobre 1958.

63      L’absence de réouverture de la procédure formelle d’examen préalable à l’adoption de la décision attaquée, alors que celle-ci s’appuie sur une méthode de calcul du montant de l’aide différente de celle utilisée dans la décision originelle, serait également constitutive d’une violation des droits de la défense, du droit à l’information de la région NPDC en tant que personne intéressée ainsi que de son droit à être entendue. Les droits de la défense de la République française auraient également été méconnus.

64      Par ailleurs, la Commission, en se fondant, dans la décision attaquée, non seulement sur des éléments nouveaux, mais également sur une prétendue insuffisance des documents qui lui auraient été transmis par les autorités françaises en ce qui concerne le plan de redressement mis en œuvre par AFR, aurait violé le principe de protection de la confiance légitime. Ce principe supposerait, selon la jurisprudence, que la décision finale de la Commission ne soit pas fondée sur l’absence d’éléments que les parties n’ont pu, au vu des indications données dans la décision provisoire, estimer devoir lui fournir. En l’espèce, il n’y aurait même pas eu de décision provisoire, la Commission s’étant bornée à substituer la décision attaquée à la décision originelle, sans le moindre formalisme et dans le secret le plus total. Dès lors, la région NPDC pas plus que la République française n’auraient été en mesure de produire des éléments qui auraient pu leur apparaître comme devant être fournis.

65      La Commission aurait également violé le principe d’égalité entre les parties concernées par l’aide, le plaignant à l’origine de l’ouverture de la procédure étant considéré comme une partie intéressée au titre de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, tandis que la collectivité territoriale ayant octroyé l’aide visée par la plainte n’est considérée que comme un tiers intéressé, n’ayant pas vocation à participer à la procédure.

66      La CAD reproche à la Commission de n’avoir consulté ni elle, ni la région NPDC, ni la société AFR, alors que, selon la jurisprudence, le respect des droits de la défense impose que les intéressés soient mis en situation de faire valoir leur point de vue et de prendre position sur les documents remis par l’administration de l’Union, même en l’absence de toute réglementation concernant la procédure en cause. La seule consultation de la République française serait insuffisante.

67      Elle soutient également qu’il convient de vérifier que l’exposé des griefs a été libellé dans des termes suffisamment clairs pour permettre aux intéressés de prendre effectivement connaissance des comportements qui leur sont reprochés.

68      La CAD ajoute que l’absence de réouverture d’une procédure formelle d’examen préalable à l’adoption de la décision attaquée est constitutive d’une violation des droits de la défense, du principe du contradictoire et du droit d’être entendu par la Commission. Elle n’aurait pas été mise en mesure de faire connaître son point de vue, la Commission ne l’ayant pas informée du réexamen des avances litigieuses et de l’utilisation d’une méthode de calcul de l’aide différente de celle retenue pour motiver la décision originelle.

69      La Commission conteste le bien-fondé des arguments des requérantes.

b)     Appréciation du Tribunal

70      Selon une jurisprudence bien établie, le respect des droits de la défense dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci constitue un principe fondamental du droit de l’Union et doit être assuré même en l’absence d’une réglementation spécifique. Ce principe exige que la personne concernée ait été mise en mesure, dès le stade de la procédure administrative, de faire connaître utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits, griefs et circonstances allégués par la Commission (arrêt de la Cour du 10 juillet 1986, Belgique/Commission, 234/84, Rec. p. 2263, point 27, et arrêt du Tribunal du 30 mars 2000, Kish Glass/Commission, T‑65/96, Rec. p. II‑1885, point 32).

71      S’agissant des droits des entités infra-étatiques ayant octroyé les aides d’État, il convient de relever que la procédure administrative en matière d’aides d’État est seulement ouverte à l’encontre de l’État membre concerné. Seul l’État membre concerné, en tant que destinataire de la décision attaquée, peut donc se prévaloir de véritables droits de la défense (arrêt du Tribunal du 1er juillet 2009, Operator ARP/Commission, T‑291/06, Rec. p. II‑2275, point 35). Les entités infra-étatiques qui octroient les aides, telles que les requérantes, tout comme les entreprises bénéficiaires des aides et leurs concurrents sont uniquement considérés comme étant des intéressés dans cette procédure, au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 décembre 1999, Acciaierie di Bolzano/Commission, T‑158/96, Rec. p. II‑3927, point 42).

72      En outre, il est de jurisprudence constante que, lors de la phase d’examen visée à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, la Commission a le devoir de mettre en demeure les intéressés de présenter leurs observations (arrêts de la Cour du 19 mai 1993, Cook/Commission, C‑198/91, Rec. p. I‑2487, point 22 ; du 15 juin 1993, Matra/Commission, C‑225/91, Rec. p. I‑3203, point 16, et du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec. p. I‑1719, point 59).

73      En ce qui concerne cette obligation, la Cour a jugé que la publication d’un avis au Journal officiel constitue un moyen adéquat en vue de faire connaître à tous les intéressés l’ouverture d’une procédure (arrêt de la Cour du 14 novembre 1984, Intermills/Commission, 323/82, Rec. p. 3809, point 17) et que cette communication vise exclusivement à obtenir, de la part des intéressés, toute information destinée à éclairer la Commission dans son action future (arrêts de la Cour du 12 juillet 1973, Commission/Allemagne, 70/72, Rec. p. 813, point 19, et du Tribunal du 22 octobre 1996, Skibsværftsforeningen e.a./Commission, T‑266/94, Rec. p. II‑1399, point 256).

74      Cette jurisprudence confère essentiellement aux intéressés le rôle de sources d’information pour la Commission dans le cadre de la procédure administrative engagée au titre de l’article 108, paragraphe 2, TFUE. Il s’ensuit que les intéressés, loin de pouvoir se prévaloir des droits de la défense reconnus aux personnes à l’encontre desquelles une procédure est ouverte, disposent du seul droit d’être associés à la procédure administrative dans une mesure adéquate tenant compte des circonstances du cas d’espèce (arrêts du Tribunal du 25 juin 1998, British Airways e.a./Commission, T‑371/94 et T‑394/94, Rec. p. II‑2405, points 59 et 60, et du 6 mars 2003, Westdeutsche Landesbank Girozentrale et Land Nordrhein-Westfalen/Commission, T‑228/99 et T‑233/99, Rec. p. II‑435, point 125).

75      Les intéressés ne sauraient donc invoquer une violation du principe de bonne administration en ce que la Commission n’aurait pas sollicité personnellement leurs observations quant à la procédure d’examen de l’aide [arrêt du Tribunal du 31 mai 2006, Kuwait Petroleum (Nederland)/Commission, T‑354/99, Rec. p. II‑1475, point 82]. La Commission n’a pas non plus l’obligation de transmettre aux intéressés les observations ou les informations qu’elle a reçues de la part du gouvernement de l’État membre concerné.

76      En l’espèce, les requérantes font valoir que la Commission a violé leurs droits de la défense, le principe du contradictoire et le droit à une bonne administration, en premier lieu, en s’abstenant de leur adresser directement une demande d’explication ou de demander à la République française de saisir leur représentant légal afin qu’il présente ses observations, en deuxième lieu, en ne leur accordant pas un accès au dossier et, en troisième lieu, parce qu’elles n’ont pas été destinataires des pièces de la procédure, des observations de la République française ou des interrogations formulées par la Commission à propos des aides litigieuses.

77      La CAD fait également valoir que, outre ses propres droits de la défense, ceux de la région NPDC et du bénéficiaire de l’aide, AFR, ont été violés, leurs observations n’ayant pas été recueillies. Sur ce point, il y a lieu de relever que la CAD ne dispose d’un intérêt à agir que pour obtenir le respect de ses propres droits procéduraux [voir, par analogie, ordonnance du Tribunal du 30 avril 2001, British American Tobacco International (Holdings)/Commission, T‑41/00, Rec. p. II‑1301, points 18 et 19, et arrêt du Tribunal du 8 octobre 2008, Sogelma/AER, T‑411/06, Rec. p. II‑2771, point 101]. La CAD étant dépourvue d’intérêt à agir pour obtenir le respect des droits de la défense de la région NPDC et du bénéficiaire de l’aide, le grief tiré de la violation desdits droits est irrecevable dans la mesure où il est invoqué par la CAD.

78      Il résulte de la jurisprudence citée aux points 70 à 75 ci-dessus que les intéressés, tels que les requérantes, ne peuvent se prévaloir des droits de la défense en tant que tels, mais disposent du seul droit d’être entendus et associés à la procédure dans une mesure adéquate tenant compte des circonstances du cas d’espèce. La violation des droits de la défense, du principe du contradictoire et du droit à une bonne administration invoquée par les requérantes doit donc être examinée uniquement au regard de la violation du droit des requérantes d’être entendues et associées à la procédure.

79      À cet égard, il convient de constater que la Commission, en publiant au Journal officiel du 27 octobre 2007 une invitation à présenter des observations en application de l’article 88, paragraphe 2, CE concernant la procédure relative à l’aide d’État non notifiée mise en œuvre par la République française en faveur d’AFR, consistant en la publication de la décision d’ouverture et d’un résumé de celle-ci, a fait connaître à tous les intéressés l’ouverture d’une procédure.

80      S’agissant du grief de la CAD selon lequel l’exposé des griefs n’aurait pas été libellé dans des termes suffisamment clairs pour permettre aux intéressés de prendre effectivement connaissance des comportements qui leur sont reprochés, il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 6 du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [88 CE] (JO L 83, p. 1), lorsque la Commission décide d’ouvrir la procédure formelle d’examen, la décision d’ouverture peut se limiter à récapituler les éléments pertinents de fait et de droit, à inclure une évaluation provisoire de la mesure étatique en cause visant à déterminer si elle présente le caractère d’une aide et à exposer les raisons qui incitent à douter de sa compatibilité avec le marché commun (arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Diputación Foral de Guipúzcoa e.a./Commission, T‑269/99, T‑271/99 et T‑272/99, Rec. p. II‑4217, point 104, et du 22 octobre 2008, TV 2/Danmark e.a./Commission, T‑309/04, T‑317/04, T‑329/04 et T‑336/04, Rec. p. II‑2935, point 138).

81      La décision d’ouverture doit ainsi mettre les parties intéressées en mesure de participer de manière efficace à la procédure formelle d’examen lors de laquelle elles auront la possibilité de faire valoir leurs arguments. À cette fin, il suffit que les parties intéressées connaissent le raisonnement qui a amené la Commission à considérer provisoirement que la mesure en cause pouvait constituer une aide nouvelle incompatible avec le marché commun (arrêts du Tribunal du 30 avril 2002, Government of Gibraltar/Commission, T‑195/01 et T‑207/01, Rec. p. II‑2309, point 138, et Diputación Foral de Guipúzcoa e.a./Commission, point 80 supra, point 105).

82      En l’espèce, dans la décision d’ouverture, la Commission a exposé clairement les motifs sur le fondement desquels elle a conclu provisoirement que les avances remboursables en cause constituaient des aides d’État (considérants 8 à 15 de la décision d’ouverture) ainsi que les raisons pour lesquelles elle a considéré qu’il existait des doutes quant à la compatibilité de ces aides avec le marché commun (considérants 16 à 20 de ladite décision).

83      Par ailleurs, s’agissant du grief de la région NPDC et de la CAD, tiré de l’absence de réouverture de la procédure formelle d’examen à la suite du retrait de la décision originelle, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, la procédure visant à remplacer un acte illégal peut être reprise au point précis auquel l’illégalité est intervenue, sans que la Commission soit tenue de recommencer la procédure en remontant au-delà de ce point précis (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 3 octobre 2000, Industrie des poudres sphériques/Conseil, C‑458/98 P, Rec. p. I‑8147, point 82, et la jurisprudence citée, et arrêt du Tribunal du 9 juillet 2008, Alitalia/Commission, T‑301/01, Rec. p. II‑1753, points 99 et 142). Or, en l’espèce, l’insuffisance de motivation ayant entraîné le retrait de la décision originelle ne remonte pas à l’ouverture de la procédure, qui n’est entachée d’aucune illégalité. Dès lors qu’elle disposait des éléments nécessaires à la nouvelle analyse requise, en ce qui concerne le calcul de la prime de risque, par l’arrêt Biria, point 12 supra, la Commission n’avait donc pas l’obligation de recommencer l’instruction de l’affaire.

84      Le droit des requérantes d’être entendues et associées à la procédure ayant été respecté lors de l’adoption de la décision originelle, le retrait de cette décision pour insuffisance de motivation et l’adoption d’une nouvelle décision la remplaçant n’imposaient donc pas une réouverture de la procédure formelle d’examen. Par ailleurs, même à supposer que la région NPDC soit recevable à soulever un grief tiré de la violation des droits de la défense de la République française, il convient de constater qu’elle n’a apporté aucun élément de nature à établir que cette absence de réouverture de la procédure formelle d’examen serait constitutive d’une telle violation.

85      L’ajout d’éléments complémentaires dans la décision attaquée, relatifs aux mesures de redressement adoptées par AFR, ne saurait remettre en cause ce constat. Comme le souligne la Commission, un tel ajout vise à répondre de manière plus détaillée aux arguments développés par les requérantes dans le cadre de leurs recours. Il ne peut donc être soutenu que l’ajout d’éléments complémentaires viole le droit des requérantes d’être entendues, cet ajout étant au contraire de nature à en établir le respect. En tout état de cause, les requérantes n’avancent aucun élément dont la prise en compte par la Commission apparaisse de nature à changer la conclusion à laquelle celle-ci est parvenue dans la décision attaquée. Or, pour qu’une telle violation des droits de la défense entraîne une annulation, il faut que, en l’absence de cette irrégularité, la procédure ait pu aboutir à un résultat différent (arrêts de la Cour du 11 novembre 1987, France/Commission, 259/85, Rec. p. 4393, points 12 et 13, et du 14 février 1990, France/Commission, C‑301/87, Rec. p. I‑307, points 30 et 31).

86      Il résulte de ce qui précède que la Commission n’a violé ni le droit des requérantes d’être entendues et associées à la procédure, ni le droit à une bonne administration, ni le principe du contradictoire.

87      Le grief de la région NPDC, tiré de la violation du principe d’égalité, doit également être écarté. En matière de contrôle des aides d’État, les entités territoriales infra-étatiques qui octroient les aides, telles que les requérantes, disposent en effet des mêmes droits procéduraux que les éventuels plaignants. Ces derniers sont uniquement considérés comme étant des intéressés dans cette procédure, avec lesquels la Commission n’est pas tenue d’engager un débat contradictoire (arrêt Commission/Sytraval et Brink’s France, point 72 supra, point 59, et arrêt du Tribunal du 12 décembre 2006, Asociación de Estaciones de Servicio de Madrid et Federación Catalana de Estaciones de Servicio/Commission, T‑95/03, Rec. p. II‑4739, point 140).

88      En outre, s’agissant du grief de la région NPDC tiré du respect de l’identité constitutionnelle des États membres, il y a lieu de rappeler qu’il ne saurait être exclu qu’une entité infra-étatique dispose d’un statut de droit et de fait la rendant suffisamment autonome par rapport au gouvernement central d’un État membre pour que, par les mesures qu’elle adopte, ce soit cette entité, et non le gouvernement central, qui joue un rôle fondamental dans la définition de l’environnement politique et économique dans lequel opèrent les entreprises (arrêts de la Cour du 6 septembre 2006, Portugal/Commission, C‑88/03, Rec. p. I‑7115, point 58, et du 11 septembre 2008, Unión General de Trabajadores de la Rioja e.a., C‑428/06 à C‑434/06, Rec. p. I‑6747, point 48). Toutefois, dans la procédure de contrôle des aides d’État, le rôle des intéressés autres que l’État membre concerné se limite à celui qui est rappelé au point 74 ci-dessus. À cet égard, ceux-ci ne sauraient prétendre eux-mêmes à un débat contradictoire avec la Commission, tel que celui ouvert au profit dudit État membre (arrêt de la Cour du 24 septembre 2002, Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, C‑74/00 P et C‑75/00 P, Rec. p. I‑7869, point 82). Ce grief doit donc être rejeté comme non fondé.

89      Enfin, le grief tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime avancé par la région NPDC (voir point 64 ci-dessus) n’est pas davantage convaincant.

90      Selon la jurisprudence, la Commission doit tenir compte, dans la conduite de la procédure d’examen d’une aide d’État, de la confiance légitime qu’ont pu faire naître les indications contenues dans la décision d’ouverture de la procédure d’examen (arrêt du Tribunal du 5 juin 2001, ESF Elbe-Stahlwerke Feralpi/Commission, T‑6/99, Rec. p. II‑1523, point 126). La Commission ne doit, par conséquent, pas fonder sa décision finale sur un défaut de production d’éléments que les parties intéressées ne pouvaient, au vu des indications contenues dans la décision d’ouverture, estimer utiles de lui fournir (arrêt du Tribunal du 12 septembre 2007, González y Díez/Commission, T‑25/04, Rec. p. II‑3121, point 125).

91      En l’espèce, le considérant 18 de la décision d’ouverture est ainsi rédigé :

« À ce stade, la Commission doute que les conditions de compatibilité d’une aide à la restructuration prévues par les lignes directrices soient remplies. Ainsi, la Commission relève les points suivants :

–        les autorités françaises ne lui ont pas présenté un plan de restructuration conforme aux points 34 à 37 des lignes directrices,

–        la Commission n’est pas informée de mesures compensatoires destinées à prévenir toute distorsion excessive de la concurrence qui serait induite par l’aide (points 38-42 des lignes directrices). »

92      La décision d’ouverture comporte donc des indications démontrant que la Commission doutait de la compatibilité des mesures en cause, compte tenu de l’absence d’un plan de restructuration conforme aux points 34 à 37 de la communication de la Commission sur les lignes directrices communautaires concernant les aides d’État au sauvetage et à la restructuration d’entreprises en difficulté (JO 2004, C 244, p. 2, ci-après les « lignes directrices »).

93      Les parties intéressées et la République française savaient donc qu’il leur appartenait de démontrer l’existence d’un tel plan de restructuration, auquel l’octroi de l’aide était subordonné, afin d’établir la compatibilité de l’aide accordée. Il ne saurait donc y avoir de violation du principe de protection de la confiance légitime sur ce point.

94      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que les présents moyens doivent être rejetés dans leur intégralité.

4.     Sur le troisième moyen du recours T‑267/08, tiré de l’erreur manifeste d’appréciation pour absence de prise en considération de la particularité juridique de l’auteur de l’aide

a)     Arguments des parties

95      La région NPDC fait valoir que l’absence de motivation concernant l’octroi d’une aide à AFR par la CAD en tant qu’établissement public révèle une erreur concernant le bien-fondé des motifs de la décision attaquée. La Commission, en considérant de manière erronée que l’aide a été octroyée par les communes de la CAD, n’aurait pas pris en compte la particularité juridique de l’auteur de l’aide. Elle aurait omis de se prononcer sur la moitié de l’aide accordée, dont le mode de financement spécifique n’aurait pas été examiné, alors que les effets de l’aide seraient indissociables de son mode de financement.

96      La Commission conclut au rejet des arguments de la région NPDC.

b)     Appréciation du Tribunal

97      Il convient tout d’abord de relever que, la décision originelle ayant été retirée, la requérante ne saurait utilement alléguer que celle-ci serait entachée d’une erreur manifeste d’appréciation relative à l’identification de l’un des auteurs des aides. Par ailleurs, à supposer que cet argument soit également soulevé à l’encontre de la décision attaquée, en estimant, notamment aux considérants 16, 17 et 27 de celle-ci, que la CAD était la collectivité ayant octroyé l’une des deux avances remboursables litigieuses, la Commission n’a entaché ladite décision d’aucune erreur manifeste d’appréciation.

98      L’argument, distinct du précédent, selon lequel le mode de financement spécifique de l’aide accordée par la CAD n’aurait pas été pris en compte se confond avec la première branche du quatrième moyen du recours T‑267/08 et sera examiné dans ce cadre.

99      Il s’ensuit que le grief tiré de l’absence de prise en compte de la particularité juridique de la CAD doit être rejeté comme non fondé.

5.     Sur la première branche du quatrième moyen du recours T‑267/08, tirée d’une erreur d’appréciation quant à l’origine des fonds, et le quatrième moyen du recours T-279/08, tiré d’une erreur d’appréciation concernant la notion de ressources d’État

a)     Arguments des parties

100    La région NPDC avance que la Commission a commis une erreur d’appréciation quant à l’origine des fonds en cause, ces fonds ne provenant pas des communes de la CAD, comme l’aurait affirmé la Commission dans la décision originelle, mais de la CAD elle-même, qui constitue un établissement public de coopération intercommunale. Dès lors, la Commission aurait considéré à tort que l’avance accordée par la CAD proviendrait de ressources d’État, alors que les communautés d’agglomération disposeraient de ressources propres. Ces ressources reposeraient pour partie sur des contributions obligatoires de nature fiscale ou parafiscale et proviendraient également de services de nature économique fournis par ces établissements publics.

101    La région NPDC, se fondant sur les articles L. 4331-1 à L. 4331-3 du code général des collectivités territoriales français détaillant les recettes dont disposent les régions, souligne que l’aide qu’elle-même a accordée proviendrait également de ressources qui ne seraient pas exclusivement des ressources fiscales ou parafiscales.

102    La région NPDC reproche également à la Commission d’avoir déduit, dans la décision attaquée, que les avances accordées à AFR étaient imputables à l’État du seul fait qu’elles ont été octroyées par des collectivités territoriales. Or, selon la jurisprudence, la Commission serait tenue d’opérer un examen cas par cas du critère d’imputabilité, ce qu’elle n’aurait pas fait, puisqu’elle a considéré que les avances en cause avaient été accordées par les communes de la CAD.

103    La CAD soutient que les communautés d’agglomération disposent d’une grande variété de ressources, parmi lesquelles figurent des recettes distinctes des taxes et des impôts divers, telles que le revenu de leurs biens, meubles et immeubles, les sommes qu’elles reçoivent des administrations publiques, des associations ou des particuliers, en échange d’un service rendu, et le produit des dons et des legs qui leur sont consentis. Ces recettes, ne résultant pas d’une contribution obligatoire imposée par la législation de l’État, ne seraient pas constitutives de ressources d’État. La Commission aurait dû analyser l’origine des ressources ayant été utilisées pour financer l’avance remboursable, afin de déterminer si cette avance avait été prélevée sur les ressources de l’État ou sur les autres ressources de la CAD.

104    La CAD fait également valoir que l’avance remboursable accordée ne serait pas une charge supplémentaire pour elle, mais une recette future, puisqu’il s’agirait d’un prêt d’argent soumis à un remboursement générateur d’intérêts selon un taux de 4,08 %, correspondant au taux de référence communautaire au moment de l’octroi.

105    La Commission conclut au rejet des présents moyens.

b)     Appréciation du Tribunal

106    À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, la qualification d’une mesure d’aide au sens du traité suppose que chacun des quatre critères cumulatifs visés à l’article 107, paragraphe 1, TFUE soit rempli. Premièrement, il doit s’agir d’une intervention de l’État ou au moyen de ressources d’État, deuxièmement, cette intervention doit être susceptible d’affecter les échanges entre les États membres, troisièmement, elle doit accorder un avantage à son bénéficiaire et, quatrièmement, elle doit fausser ou menacer de fausser la concurrence (voir arrêt de la Cour du 17 novembre 2009, Presidente del Consiglio dei Ministri, C‑169/08, Rec. p. I‑10821, point 52, et la jurisprudence citée).

107    Les requérantes contestent, par leurs présents moyens, que le premier de ces critères, selon lequel, pour que des avantages puissent être qualifiés d’aides au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, ils doivent, d’une part, être accordés directement ou indirectement au moyen de ressources d’État et, d’autre part, être imputables à l’État (voir arrêt de la Cour du 15 juillet 2004, Pearle e.a., C‑345/02, Rec. p. I‑7139, point 35, et la jurisprudence citée, et arrêt du Tribunal du 26 juin 2008, SIC/Commission, T‑442/03, Rec. p. II‑1161, point 93, et la jurisprudence citée), soit rempli.

108    Il y a lieu de souligner qu’une intervention de l’État ou au moyen de ressources d’État ne doit pas nécessairement être une mesure arrêtée par le pouvoir central de l’État concerné. Elle peut tout aussi bien émaner d’une autorité infra-étatique. Selon une jurisprudence constante, une mesure prise par une collectivité territoriale et non par le pouvoir central est susceptible de constituer une aide dès lors que sont remplies les conditions posées à l’article 107, paragraphe 1, TFUE (arrêts de la Cour du 14 octobre 1987, Allemagne/Commission, 248/84, Rec. p. 4013, point 17, et Portugal/Commission, point 88 supra, point 55). En d’autres termes, les mesures prises par des entités intra-étatiques (décentralisées, fédérées, régionales ou autres) des États membres, quels que soient le statut juridique et la désignation de celles-ci, tombent, au même titre que les mesures prises par le pouvoir fédéral ou central, dans le champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, si les conditions de cette disposition sont remplies (arrêt du Tribunal du 6 mars 2002, Diputación Foral de Álava e.a./Commission, T‑103/00 et T‑92/00, Rec. p. II‑1385, point 57).

109    S’agissant de la notion de ressources d’État, il convient de rappeler qu’il découle de la jurisprudence de la Cour que l’article 107, paragraphe 1, TFUE englobe tous les moyens pécuniaires que les autorités publiques peuvent effectivement utiliser pour soutenir des entreprises, sans qu’il soit pertinent que ces moyens appartiennent ou non de manière permanente au patrimoine desdites autorités publiques. En conséquence, même si les sommes correspondant à la mesure en cause ne sont pas de façon permanente en possession des autorités publiques, le fait qu’elles restent constamment sous contrôle public, et donc à la disposition des autorités nationales compétentes, suffit pour qu’elles soient qualifiées de ressources d’État (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 16 mai 2000, France/Ladbroke Racing et Commission, C‑83/98 P, Rec. p. I‑3271, point 50, et du 16 mai 2002, France/Commission, C‑482/99, Rec. p. I‑4397, point 37).

110    Il résulte de la jurisprudence citée au point 108 ci-dessus que le fait que les avances aient été accordées par la région NPDC et par la CAD, donc par des collectivités territoriales et non par le pouvoir central, n’est pas, en lui-même, de nature à faire échapper ces mesures au champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. La condition relative à l’imputabilité des mesures concernées à l’État est dès lors satisfaite.

111    Il résulte par ailleurs de la jurisprudence citée au point 109 ci-dessus que le financement éventuel des mesures litigieuses par des ressources propres de la région NPDC et de la CAD qui ne seraient pas de nature fiscale ou parafiscale ne saurait davantage faire échapper lesdites mesures à la qualification d’aide d’État. En effet, le critère déterminant en matière de ressources d’État est le contrôle public, et l’article 107, paragraphe 1, TFUE englobe tous les moyens pécuniaires, qu’ils résultent de contributions obligatoires ou non, que le secteur public peut effectivement utiliser pour soutenir les entreprises.

112    Par ailleurs, l’argument de la CAD, selon lequel l’avance accordée ne constitue pas une charge, mais une recette future, puisqu’il s’agit d’un prêt d’argent soumis à un remboursement générateur d’intérêts, doit être rejeté. Les intérêts qu’une entreprise peut être amenée à verser en contrepartie d’un prêt ne sont en effet pas susceptibles de faire disparaître entièrement l’avantage dont bénéficie ladite entreprise (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 29 juin 1999, DM Transport, C‑256/97, Rec. p. I‑3913, point 21). Il existe bien une charge pour le budget de la CAD, dès lors que cette dernière aurait pu bénéficier d’un taux de rendement plus avantageux si elle avait prêté cette somme dans les conditions normales du marché ou si elle l’avait placée ou investie autrement. Dans une telle hypothèse, l’aide est constituée par la différence entre les intérêts qui auraient été payés si le taux d’intérêt correspondant aux conditions normales du marché avait été appliqué et ceux qui ont été effectivement versés (arrêt du Tribunal du 30 avril 1998, Cityflyer Express/Commission, T‑16/96, Rec. p. II‑757, point 53). La légalité de l’appréciation portée par la Commission sur l’existence d’un tel avantage pour le bénéficiaire de l’aide, compte tenu du taux d’intérêt pratiqué et de la situation financière d’AFR, sera examinée, pour sa part, dans le cadre du cinquième moyen du recours T‑267/08, tiré d’une erreur d’appréciation quant à l’avantage qu’AFR aurait retiré des avances remboursables.

113    Enfin, il convient de relever que la décision originelle ayant été retirée, la CAD ne saurait utilement soutenir que celle-ci est entachée d’une erreur d’identification de l’un des auteurs des aides. Par ailleurs, à supposer que cet argument soit également soulevé à l’encontre de la décision attaquée, en estimant, notamment aux considérants 16, 17 et 27 de celle-ci, que la CAD était la collectivité ayant octroyé l’une des deux avances remboursables litigieuses, la Commission n’a commis aucune erreur d’analyse du financement de la mesure litigieuse.

114    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter la première branche du quatrième moyen du recours T‑267/08, tirée d’une erreur d’appréciation quant à l’origine des fonds, et le quatrième moyen du recours T-279/08, tiré d’une erreur d’appréciation concernant la notion de ressources d’État.

6.     Sur la seconde branche du quatrième moyen du recours T‑267/08, tirée d’une erreur de qualification d’AFR d’entreprise en difficulté, et sur le troisième moyen du recours T‑279/08, tiré d’une erreur d’appréciation concernant la notion d’entreprise en difficulté

a)     Arguments des parties

115    La région NPDC fait valoir que la Commission a commis une erreur d’appréciation en qualifiant AFR d’entreprise en difficulté au sens du point 10, sous a), des lignes directrices et, à titre subsidiaire, du point 11 desdites lignes directrices.

116    S’agissant de la qualification d’AFR d’entreprise en difficulté au sens du point 10, sous a), des lignes directrices, la Commission aurait limité son analyse aux résultats financiers d’AFR figurant dans le tableau repris au considérant 15 de la décision attaquée et couvrant la période allant du 31 décembre 2001 au 31 décembre 2004, alors que l’aide aurait été accordée le 4 juillet 2005. La Commission n’aurait pas pris en compte les premiers résultats positifs du plan de relance élaboré par AFR, pourtant perceptibles dès le premier semestre de 2005, lors de l’octroi de l’avance. Le chiffre d’affaires serait ainsi de 45 millions d’euros au 31 décembre 2005, soit près du double du chiffre d’affaires de l’exercice précédent, qui était de 22,7 millions d’euros. Les pertes seraient passées de 14,3 millions d’euros au 31 décembre 2003 à 8,1 millions d’euros au 31 décembre 2005. Douze contrats de fournitures auraient été conclus entre le 4 mars 2004 et le 30 juin 2005, pour un montant total de 61 608 790 euros. Le montant cumulé de ces contrats aurait représenté 31 805 650 euros au cours du premier semestre de 2005. La Commission n’aurait tenu aucun compte de cette dynamique de relance et du fait que la baisse du chiffre d’affaires de l’année 2004 résultait d’une stratégie de repositionnement sur le marché des wagons les plus techniques à forte valeur ajoutée.

117    Ce plan de restructuration aurait été présenté de manière détaillée à la Commission par les autorités françaises dans une correspondance du 24 octobre 2006. Si elle ne s’estimait pas suffisamment informée quant à son contenu, la Commission aurait dû solliciter des renseignements complémentaires sur ce point, conformément aux pouvoirs d’investigation dont elle dispose en application du règlement n° 659/1999. La Commission aurait, d’une manière générale, mené une instruction à charge, s’efforçant d’écarter tout élément susceptible d’établir qu’AFR n’était plus, lors de l’octroi des avances remboursables, une entreprise en difficulté.

118    La région NPDC souligne qu’elle-même et la CAD ont accordé les avances remboursables concernées en raison de cette dynamique de relance, comme le démontreraient les débats qui se sont tenus à cette occasion au sein de ses instances. En déclarant les avances litigieuses incompatibles avec les dispositions du traité, alors que lesdites avances viseraient à soutenir la compétitivité d’une entreprise innovante développant des produits d’avenir, la décision attaquée méconnaîtrait les perspectives évoquées par le membre de la Commission chargé de la concurrence lorsqu’il a présenté, le 7 juillet 2008, le texte devenu le règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission, du 6 août 2008, déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché commun en application des articles [107 TFUE et 108 TFUE] (JO L 214, p. 3), (ci-après le « règlement général d’exemption par catégorie »), dont les objectifs seraient de permettre aux États membres d’octroyer des aides en faveur de l’emploi, de la compétitivité et de l’environnement sans aucune intervention de la Commission.

119    La région NPDC affirme que la Commission n’a pas procédé à une analyse du contexte économique et concurrentiel dans lequel évoluait AFR lors de l’octroi des avances remboursables, et notamment des perspectives de développement du secteur du ferroutage. Elle s’appuie, d’une part, sur une étude réalisée par l’association « route roulante 2006 », en date du 8 septembre 2005, qui ferait apparaître qu’AFR pourrait être associée à un projet d’autoroute ferroviaire, en raison notamment du moindre coût de ses produits, et, d’autre part, sur une étude réalisée par AFR qui démontrerait les efforts de cette entreprise en vue d’améliorer la qualité technique et les coûts de fabrication de ses produits.

120    La Commission aurait en outre omis de prendre en compte le fait qu’une subvention d’un montant de 1,5 million d’euros au titre du Fonds européen de développement régional (FEDER) aurait été accordée le 5 novembre 2004 à AFR, le premier versement ayant été opéré en novembre 2005, ce qui n’aurait pu être fait s’il avait été établi qu’AFR présentait les caractéristiques d’une entreprise en difficulté au sens du droit de la concurrence de l’Union.

121    Selon la région NPDC, la Commission aurait également commis une erreur d’appréciation en qualifiant, à titre subsidiaire, AFR d’entreprise en difficulté au sens du point 11 des lignes directrices, tous les indices pertinents n’ayant pas été pris en compte.

122    La région NPDC soutient enfin que la substitution de la décision attaquée à la décision originelle confirmerait que la Commission a procédé, lors de la procédure administrative, à une appréciation incomplète du contexte économique dans lequel les avances remboursables ont été accordées. L’adoption de la décision attaquée ne saurait pallier l’illégalité entachant la décision originelle, la Commission s’étant abstenue de procéder à un nouvel examen suffisamment approfondi et détaillé des éléments de faits pertinents et s’étant bornée à « colmater » les failles d’une analyse lacunaire.

123    La CAD soutient que la Commission n’a pas pris la peine d’analyser le contexte économique général dans lequel s’inscrirait son intervention, caractérisé par la défaillance de nombreuses industries du secteur métallurgique. Elle souligne que la région NPDC a fait l’objet d’un classement en zone d’objectif n°2 par la réglementation applicable aux fonds structurels pour la période allant de 2000 à 2006, ce qui en ferait une zone connaissant des difficultés structurelles nécessitant un soutien par le biais d’aides publiques à la reconversion économique et sociale.

124    La CAD fait également valoir qu’AFR justifiait, lors de l’octroi de l’avance, d’une activité commerciale importante. AFR aurait présenté à la CAD des contrats de fourniture correspondant à un montant de 30 398 301 euros sur cette période. Elle ne répondrait donc pas aux critères d’une entreprise en difficulté.

125    Un plan de restructuration de l’entreprise AFR aurait été mis en place et présenté par les autorités françaises à la Commission dans deux courriers datés respectivement des 27 avril et 24 octobre 2006. Ce plan reposerait notamment sur un repositionnement de la société sur le marché des wagons plus techniques à meilleure valeur ajoutée. Cette stratégie expliquerait la baisse passagère du chiffre d’affaires constatée en 2004. Par ailleurs, ce plan se serait traduit par une réduction du déficit de la société en 2005, par une augmentation du chiffre d’affaires, passé de 22,6 millions d’euros en 2004 à 45 millions d’euros en 2005, et par l’existence d’un carnet de commandes supérieur à 70 millions d’euros en 2006. Si elle ne s’estimait pas suffisamment informée sur cette reprise de l’activité d’AFR, la Commission aurait dû solliciter des renseignements complémentaires sur ce point, conformément aux pouvoirs d’investigation dont elle dispose en application du règlement n° 659/1999. La Commission aurait, d’une manière générale, mené une instruction à charge, s’efforçant d’écarter tout élément susceptible d’établir qu’AFR n’était plus, lors de l’octroi des avances remboursables, une entreprise en difficulté.

126    La décision attaquée devrait par ailleurs être mise en parallèle avec la communication de la Commission sur les lignes directrices communautaires sur les aides d’État aux entreprises ferroviaires (JO 2008, C 184, p. 13, ci-après les « lignes directrices sur les aides d’État aux entreprises ferroviaires »), qui préconiserait certaines mesures destinées à faciliter les aides publiques aux entreprises du secteur ferroviaire.

127    De plus, selon la jurisprudence française, seules les informations mentionnées dans l’extrait du registre du commerce et des sociétés permettraient de déterminer si une entreprise est ou non en situation de difficulté économique.

128    La Commission conteste le bien-fondé des arguments des requérantes.

b)     Appréciation du Tribunal

129    Il convient de rappeler, à titre liminaire, que la Commission jouit, au titre de l’article 107, paragraphe 3, TFUE, d’un large pouvoir d’appréciation (arrêts de la Cour du 17 septembre 1980, Philip Morris Holland/Commission, 730/79, Rec. p. 2671, point 17, et du 29 avril 2004, Italie/Commission, C‑372/97, Rec. p. I‑3679, point 83).

130    Elle peut se doter, aux fins d’exercer celui-ci, de règles indicatives au moyen d’actes tels que les lignes directrices applicables en l’espèce, dans la mesure où ces règles ne s’écartent pas des dispositions du traité. Lorsque la Commission a adopté un tel acte, celui-ci s’impose à elle (voir arrêt du Tribunal du 15 juin 2005, Regione autonoma della Sardegna/Commission, T‑171/02, Rec. p. II‑2123, point 95, et la jurisprudence citée).

131    Il revient donc au juge de vérifier que la Commission a respecté les règles dont elle s’est dotée (arrêt Regione autonoma della Sardegna/Commission, point 130 supra, point 77).

132    Toutefois, dès lors que le large pouvoir d’appréciation conféré à la Commission, explicité le cas échéant par les règles indicatives adoptées par elle, implique des évaluations complexes d’ordre économique et social, le juge exerce sur celles-ci un contrôle restreint. Celui-ci se limite à la vérification du respect des règles de procédure et de l’obligation de motivation, de l’exactitude matérielle des faits, de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir (voir arrêt Regione autonoma della Sardegna/Commission, point 130 supra, point 78, et la jurisprudence citée).

133    Il convient de rappeler que, s’il n’existe pas de définition en droit de l’Union de l’entreprise en difficulté, la Commission considère, au point 9 des lignes directrices, qu’une entreprise est en difficulté « lorsqu’elle est incapable, avec ses ressources propres ou avec les fonds que sont prêts à lui apporter ses propriétaires/actionnaires ou ses créanciers, d’enrayer des pertes qui la conduisent, en l’absence d’une intervention extérieure des pouvoirs publics, vers une mort économique quasi certaine à court ou moyen terme ».

134    Selon le point 10, sous a), des lignes directrices, une entreprise est, « en principe et quelle que soit sa taille », considérée comme étant en difficulté, s’il s’agit d’une société à responsabilité limitée, « lorsque plus de la moitié de son capital social a disparu, plus du quart de ce capital ayant été perdu au cours des douze derniers mois ». En vertu du point 10, sous c), des lignes directrices, il en est de même, pour toutes les formes d’entreprises, lorsque l’entreprise remplit, selon le droit national qui lui est applicable, les conditions de soumission à une procédure collective d’insolvabilité.

135    Selon le point 11 des lignes directrices :

« Même si aucune des conditions énoncées au point 10 n’est remplie, une entreprise peut néanmoins être considérée comme étant en difficulté, en particulier si l’on est en présence des indices habituels d’une entreprise en situation de difficulté, tels que le niveau croissant des pertes, la diminution du chiffre d’affaires, le gonflement des stocks, la surcapacité, la diminution de la marge brute d’autofinancement, l’endettement croissant, la progression des charges financières ainsi que l’affaiblissement ou la disparition de la valeur de l’actif net. Dans les cas les plus graves, l’entreprise peut même être devenue insolvable ou faire l’objet d’une procédure collective relative à son insolvabilité en droit national. Dans ce dernier cas, les lignes directrices s’appliquent aux aides éventuellement accordées dans le contexte d’une telle procédure en vue d’assurer le maintien en activité de l’entreprise. Dans tous les cas, l’entreprise en difficulté n’est éligible qu’après mise en évidence de son incapacité à assurer son redressement avec ses ressources propres, ou avec des fonds obtenus auprès de ses propriétaires/actionnaires ou de sources du marché. »

136    En l’espèce, la Commission s’est fondée, pour qualifier AFR d’entreprise en difficulté, à titre principal, sur le point 10, sous a), des lignes directrices. À cet égard, elle a relevé qu’AFR était en capitaux propres négatifs depuis 2001 et qu’elle n’avait, au moment de l’octroi de l’aide, pas été capable d’enrayer cette tendance et de retrouver des capitaux propres positifs. La Commission s’est appuyée sur les données financières figurant au considérant 15 de la décision attaquée, non contestées par les requérantes, qui font apparaître que les capitaux propres d’AFR étaient négatifs au 31 décembre 2001, à hauteur de 6,6 millions d’euros, au 31 décembre 2002, à hauteur de 8,7 millions d’euros, au 31 décembre 2003, à hauteur de 23 millions d’euros, et au 31 décembre 2004, à hauteur de 21,09 millions d’euros.

137    À titre subsidiaire, la Commission a estimé, aux considérants 38 et 39 de la décision attaquée, qu’AFR répondait, lors de l’octroi de l’aide, à la définition d’une entreprise en difficulté figurant au point 11 des lignes directrices. Elle s’est fondée sur la diminution continue du chiffre d’affaires et sur le niveau persistant des pertes d’AFR. Les données financières figurant au considérant 15 de la décision attaquée, non contestées par les requérantes, font en effet apparaître que le chiffre d’affaires d’AFR, qui était de 70 millions d’euros au 31 décembre 2001, de 42 millions d’euros au 31 décembre 2002 et de 42,7 millions d’euros au 31 décembre 2003, est passé à seulement 22,7 millions d’euros au 31 décembre 2004. Ces données font également apparaître que le résultat net de la société était négatif à hauteur de 10 500 000 euros au 31 décembre 2001, de 2 083 746 euros au 31 décembre 2002, de 14 270 634 euros au 31 décembre 2003 et de 11 589 620 euros au 31 décembre 2004.

138    La Commission a également relevé, au considérant 39 de la décision attaquée, qu’AFR s’était trouvée, en janvier 2004, dans l’incapacité de payer à bonne date des dettes sociales et fiscales à hauteur de 4,3 millions d’euros et qu’elle avait, par conséquent, été obligée de solliciter un moratoire et l’établissement d’un plan d’apurement de ces dettes.

139    La Commission a par ailleurs pris en compte, au considérant 40 de la décision attaquée, les éléments invoqués par les autorités françaises, à savoir, d’une part, les crédits accordés à AFR (augmentation du découvert sur le compte courant accordée par une banque privée et acomptes reçus de ses clients) et, d’autre part, le fait qu’AFR bénéficiait de diverses garanties accordées par une institution financière. La Commission a cependant estimé, en premier lieu, qu’AFR était, compte tenu de ses capitaux propres négatifs, incapable de venir à bout de ses difficultés avec ses ressources propres, en deuxième lieu, que l’actionnaire d’AFR, malgré ses apports au soutien de la société, était dans l’incapacité d’assurer seul le redressement de sa filiale, et, en troisième lieu, que les crédits et les garanties susvisés témoignaient tout au plus d’une capacité à obtenir des crédits pour des montants limités et à court terme, sans permettre de constater qu’AFR aurait pu remédier à ses difficultés grâce à un financement puisé auprès des sources du marché.

140    Enfin, dans la décision attaquée, la Commission a écarté, aux considérants 42 à 43, l’argument selon lequel les mesures de redressement d’AFR mises en œuvre à partir de 2004 auraient commencé à produire des résultats positifs dans les mois ayant précédé l’octroi des avances remboursables. La Commission a en effet estimé que les résultats invoqués étaient modestes, aléatoires, qu’ils portaient sur une période relativement courte et qu’ils ne sauraient être considérés comme des indices sérieux d’un redressement de la situation financière d’AFR, comparé aux éléments démontrant l’existence de graves difficultés, tels que le résultat net négatif et les capitaux propres négatifs depuis 2001.

141    Il convient tout d’abord de constater que c’est à bon droit que la Commission a estimé qu’une entreprise présentant des capitaux propres et un résultat net négatifs était présumée être une entreprise en difficulté au regard des critères définis par le point 11 des lignes directrices.

142    S’agissant des données qui, selon les requérantes, auraient dû être prises en compte par la Commission, il y a lieu de relever que les autorités françaises ont informé la Commission, dans leurs correspondances datées des 27 avril et 24 octobre 2006, de l’adoption de mesures de restructuration d’AFR. Elles ont souligné, dans leur courrier du 24 octobre 2006, que la diminution du chiffre d’affaires en 2004 était liée à la volonté de désengagement du marché des wagons non techniques et que la tendance était encourageante depuis 2005, avec un chiffre d’affaires de 45 millions d’euros en 2005 et un carnet de commandes d’un montant supérieur à 70 millions d’euros à la fin de l’année 2006.

143    Toutefois, le chiffre d’affaires d’AFR au 31 décembre 2005 et le montant de son carnet de commandes à la fin de l’année 2006 sont des éléments postérieurs à l’octroi des avances litigieuses, qui a eu lieu le 4 juillet 2005. Or, la jurisprudence précise clairement que la question de savoir si une mesure constitue une aide au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE doit être résolue à la lumière de la situation existant au moment où cette mesure a été prise. Si la Commission tenait compte d’éléments postérieurs, elle avantagerait, en effet, les États membres qui manquent à leur obligation de notifier les aides à l’état de projet qu’ils envisagent d’octroyer (voir arrêt Biria, point 12 supra, point 120, et la jurisprudence citée).

144    De plus, une amélioration de la situation de l’entreprise bénéficiaire au courant de l’année pendant laquelle les mesures litigieuses ont été accordées ne saurait influencer l’appréciation de sa situation au moment de l’octroi, notamment parce qu’il ne saurait être exclu que l’existence de ces mesures ait pu influencer cette évolution (arrêt Biria, point 12 supra, points 148 et 170).

145    La Commission n’a donc pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en ne prenant pas en compte le montant du chiffre d’affaires d’AFR au 31 décembre 2005 ainsi que l’encours de son carnet de commandes à la fin de l’année 2006.

146    S’agissant des premiers résultats positifs des mesures de redressement d’AFR mises en œuvre à partir de 2004 invoqués par les requérantes, à savoir la hausse du chiffre d’affaires d’AFR au premier semestre de 2005, la diminution de ses pertes et l’encours des contrats conclus au cours de la période comprise entre le 4 mars 2004 et le 30 juin 2005, il y a lieu de constater que c’est à bon droit que la Commission a relevé, dans la décision attaquée et dans ses écritures, qu’aucun de ces éléments, compte tenu de leur caractère modeste et du fait qu’ils portent sur une période relativement courte, n’était de nature à renverser la présomption qu’AFR, présentant des capitaux propres négatifs et connaissant des pertes importantes depuis 2001, était une entreprise en difficulté lors de l’octroi des avances litigieuses, au regard des critères définis par le point 11 des lignes directrices. Il en est de même des perspectives de développement du ferroutage invoquée par la région NPDC, compte tenu de leur caractère aléatoire et incertain. Les niveaux des pertes et des dettes financières sont en effet, à eux seuls, des critères susceptibles d’établir le caractère d’entreprise en difficulté [voir, en ce sens, s’agissant des lignes directrices communautaires pour les aides d’État au sauvetage et à la restructuration d’entreprises en difficulté de 1999 (JO 1999, C 288, p. 2), arrêts du Tribunal du 15 juin 2005, Corsica Ferries France/Commission, T‑349/03, Rec. p. II‑2197, point 191, et Biria, point 12 supra, point 135] .

147    Dans ces conditions, il n’y avait pas lieu pour la Commission, qui était en mesure de se prononcer sur la qualification d’AFR d’entreprise en difficulté sur la base des informations dont elle disposait, de prescrire à la République française de lui fournir d’autres informations (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 22 mars 2001, France/Commission, point 45 supra, point 28).

148    L’argument de la région NPDC selon lequel la Commission aurait omis de prendre en compte la subvention reçue par AFR au titre du FEDER en novembre 2005 doit également être rejeté. L’octroi d’une subvention au titre du FEDER, décidé par les autorités françaises en vertu de la répartition des responsabilités entre la Commission et les États membres résultant notamment du règlement (CE) n° 1260/1999 du Conseil, du 21 juin 1999, portant dispositions générales sur les fonds structurels (JO L 161, p. 1), ne saurait en effet lier la Commission en ce qui concerne la qualification du bénéficiaire de cette subvention d’entreprise en difficulté au regard de la réglementation de l’Union applicable aux aides d’État.

149    S’agissant de l’argument de la CAD fondé sur les lignes directrices sur les aides d’État aux entreprises ferroviaires, il convient de constater que celles-ci ne sont pas applicables à la présente affaire, AFR ne répondant pas à la définition des entreprises ferroviaires donnée par l’article 3 de la directive 91/440/CEE du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au développement de chemins de fer communautaires (JO L 237, p. 25).

150    S’agissant de l’argument de la CAD fondé sur la jurisprudence française relative à la définition d’une entreprise en difficulté, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, l’ordre juridique de l’Union n’entend pas en principe définir ses qualifications en s’inspirant d’un ordre juridique national ou de plusieurs d’entre eux sans précision expresse (voir arrêt de la Cour du 22 mai 2003, Commission/Allemagne, C‑103/01, Rec. p. I‑5369, point 33, et la jurisprudence citée). Or, les lignes directrices ne comportent aucune référence aux ordres juridiques nationaux, sauf en ce qui concerne la définition d’une procédure collective d’insolvabilité, qui n’est pas en cause en l’espèce. Il n’y a donc pas lieu de tenir compte de la jurisprudence française pour apprécier la légalité de la qualification d’AFR d’entreprise en difficulté opérée par la Commission dans la décision attaquée.

151    Par ailleurs, le classement de la région NPDC en zone d’objectif n° 2 par la réglementation applicable aux fonds structurels pour la période allant de 2000 à 2006, invoqué par la CAD, ne constitue pas un élément pertinent qui aurait dû être pris en compte, dans les circonstances de l’espèce, par la Commission pour apprécier si AFR était une entreprise en difficulté. Selon les lignes directrices, le fait qu’une entreprise en difficulté soit située dans une région assistée est un élément dont la Commission doit tenir compte lorsqu’elle apprécie la compatibilité d’une aide à la restructuration. Toutefois, cela ne signifie aucunement que cette circonstance doive être prise en compte lors de la caractérisation de l’entreprise concernée comme étant en difficulté.

152    S’agissant de l’argument de la région NPDC tiré de la violation du règlement général d’exemption par catégorie, il convient de constater que la région NPDC n’indique pas quelle disposition de ce texte la Commission aurait méconnu en adoptant la décision attaquée. Ce grief doit donc être rejeté.

153    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en qualifiant AFR d’entreprise en difficulté.

154    Il y a donc lieu de rejeter la seconde branche du quatrième moyen du recours T‑267/08, tirée d’une erreur de qualification d’AFR d’entreprise en difficulté, et le troisième moyen du recours T‑279/08, tiré d’une erreur d’appréciation concernant la notion d’entreprise en difficulté.

7.     Sur le cinquième moyen du recours T‑267/08, tiré d’une erreur d’appréciation quant au prétendu avantage qu’AFR aurait retiré des avances remboursables

a)     Arguments des parties

155    La région NPDC fait valoir qu’il n’y a aide au sens de l’article 107 TFUE que si le taux pratiqué pour le remboursement d’avances n’aurait pu être obtenu dans des conditions similaires sur le marché du crédit par le bénéficiaire desdites avances. Or, en l’espèce, la Commission aurait écarté les éléments présentés par les autorités françaises, qui étaient de nature à démontrer qu’AFR bénéficiait encore de la confiance des banques et de ses clients au moment de l’octroi des avances litigieuses, au regard de « produits spécifiques proposés par des établissements financiers spécifiques », sans procéder à une analyse du marché du crédit. Elle n’aurait donc pas démontré qu’AFR n’aurait pu obtenir des fonds sur le marché à un taux similaire ou proche de celui consenti par la région NPDC ou la CAD. Il ne serait donc pas démontré que les avances litigieuses aient apporté un avantage à AFR.

156    La région NPDC souligne que la Commission n’a pas démontré en quoi les requérantes ne se seraient pas comportées, en l’espèce, comme des investisseurs privés. Les avances litigieuses auraient été accordées afin d’accompagner le plan de relance d’AFR, compte tenu de ses perspectives de développement et de redressement. AFR bénéficiait de crédits et de garanties, démontrant la confiance de ses partenaires commerciaux, et la Commission ne démontrerait pas en quoi ces crédits et ces garanties n’auraient pas permis à AFR de recourir au marché pour surmonter les difficultés rencontrées.

157    La Commission conteste le bien-fondé des arguments de la région NPDC.

b)     Appréciation du Tribunal

158    Afin d’apprécier si une mesure étatique constitue une aide, il convient de déterminer si l’entreprise bénéficiaire reçoit un avantage économique qu’elle n’aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché (arrêt de la Cour du 11 juillet 1996, SFEI e.a., C‑39/94, Rec. p. I‑3547, point 60 ; arrêts du Tribunal Westdeutsche Landesbank Girozentrale et Land Nordrhein-Westfalen/Commission, point 74 supra, point 243, et du 3 mars 2010, Bundesverband deutscher Banken/Commission, T‑163/05, non encore publié au Recueil, point 35).

159    À cette fin, il est pertinent d’appliquer le critère, indiqué dans la décision attaquée, fondé sur les possibilités pour l’entreprise bénéficiaire d’obtenir les sommes en cause à des conditions similaires sur le marché des capitaux. En particulier, il y a lieu de se demander si un investisseur privé aurait réalisé l’opération en cause aux mêmes conditions (arrêt Cityflyer Express/Commission, point 112 supra, point 51).

160    En l’espèce, il y lieu de relever que la Commission s’est fondée, au considérant 28 de la décision attaquée, sur le constat qu’AFR, compte tenu de sa situation financière, n’aurait pu obtenir sur le marché du crédit des fonds à des conditions aussi avantageuses que celles obtenues de la part des requérantes, les avances litigieuses ayant été accordées sans aucune sûreté garantissant leur remboursement, alors que les taux d’intérêt appliqués correspondaient à des emprunts « assortis de sûretés normales ». Or, il découle de l’analyse de la pratique des marchés financiers, réalisée en 2004 pour le compte de la Commission par un cabinet d’audit (voir points 49 et 53 ci-dessus) et ayant conduit à l’adoption de la communication de 2008 sur les taux de référence, que, dans une situation présentant un risque analogue à celui du cas d’espèce, à savoir une entreprise en difficulté offrant un bas niveau de sûreté, une majoration de 1 000 points de base est ajoutée au taux de référence.

161    C’est, par ailleurs, à bon droit que la Commission a écarté, aux considérants 29 à 32 de la décision attaquée, les éléments avancés par les autorités françaises pour démontrer qu’AFR bénéficiait encore de la confiance de ses banques et de ses clients lors de l’octroi des avances. En effet, l’augmentation du découvert sur le compte courant accordée par une banque privée est un crédit à très court terme, contrairement aux avances litigieuses qui portent sur trois ans, qui ne fait donc pas l’objet des mêmes analyses de risque de la part des créanciers. Le fait qu’un débiteur puisse obtenir un crédit à court terme ne permet donc pas de juger de ses possibilités d’obtenir un prêt à plus longue échéance, dont le remboursement dépendra de sa capacité de survie. Par ailleurs, les acomptes versés par des clients d’AFR faisaient l’objet d’une contre-garantie d’une institution financière, ce qui signifie que ces clients ne couraient pas de risques liés à la situation financière d’AFR et, partant, qu’ils n’avaient pas de raison de soumettre le versement des acomptes en cause à une analyse de la solidité financière de l’entreprise analogue à celle à laquelle aurait procédé un créancier potentiel envisageant d’octroyer un prêt sans sûreté.

162    Dès lors, il ressort de la décision attaquée que la Commission a opéré, comme elle y était tenue, une analyse visant à s’assurer que le bénéficiaire de l’aide n’aurait pu obtenir un prêt dans des conditions similaires sur le marché du crédit. Par ailleurs, la région NPDC n’a apporté aucun élément de nature à démontrer que cette analyse était entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

163    Il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter le cinquième moyen du recours T‑267/08 comme non fondé.

8.     Sur le sixième moyen du recours T‑267/08, tiré d’une erreur d’appréciation du montant de l’aide

a)     Sur la première branche du sixième moyen du recours T‑267/08, tirée de l’absence de fixation du montant de l’aide récupérable

 Arguments des parties

164    La région NPDC soutient que la Commission est tenue, lorsqu’elle décide d’ordonner la récupération d’une aide, de déterminer le montant de l’aide à récupérer. La jurisprudence admettrait que la Commission effectue une évaluation approximative de l’aide, compte tenu de difficultés particulières, mais ces circonstances feraient l’objet d’un contrôle entier du juge de l’Union. En l’espèce, la Commission aurait manqué à toutes ses obligations relatives à la fixation du montant de l’aide, compte tenu de l’absence totale d’évaluation de ce montant dans la décision attaquée.

165    La Commission aurait dû, si elle avait besoin de précisions sur le taux d’intérêt en vigueur au moment de l’attribution de l’aide, solliciter les autorités françaises pour l’obtenir ou adresser une injonction à la République française en ce sens. La Commission n’évoquerait par ailleurs aucune difficulté particulière pour établir la valeur exacte de l’aide. De telles difficultés seraient inexistantes, dès lors, d’une part, qu’un délai de cinq ans ne serait pas un délai excessif pour établir la clarté sur les taux en vigueur lors de l’attribution de l’aide, en juillet 2005, et que, d’autre part, rechercher si un taux d’intérêt est inférieur à la valeur du marché ne représenterait pas une difficulté insurmontable pour la Commission.

166    La Commission conclut au rejet de la présente branche.

 Appréciation du Tribunal

167    Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, aucune disposition du droit de l’Union n’exige que la Commission, lorsqu’elle ordonne la restitution d’une aide déclarée incompatible avec le marché commun, fixe le montant exact de l’aide à restituer. Il suffit, à cet égard, que la décision de la Commission comporte des indications permettant à son destinataire de déterminer lui-même, sans difficultés excessives, ce montant (arrêts de la Cour du 12 octobre 2000, Espagne/Commission, C‑480/98, Rec. p. I‑8717, point 25 ; du 12mai 2005, Commission/Grèce, C‑415/03, Rec. p. I3875, point 39, et du 14 février 2008, Commission/Grèce, C‑419/06, non publié au Recueil, point 44).

168    En l’espèce, la décision attaquée évalue, en son considérant 58, le montant de l’aide d’État constituée par les avances remboursables à la différence entre l’intérêt effectivement dû aux termes des avances remboursables et l’intérêt qui serait dû en application du taux de référence en vigueur au moment de l’octroi de l’aide, majoré de 800 points de base.

169    Ces éléments permettent à la République française de déterminer elle-même, sans difficultés excessives, à partir de l’historique des taux de référence figurant sur le site de la direction générale (DG) « Concurrence » de la Commission, le montant de l’aide déclarée incompatible.

170    Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter la première branche du présent moyen comme non fondée.

b)     Sur la seconde branche du sixième moyen du recours T‑267/08, tirée de l’appréciation erronée de la prime de risque

 Arguments des parties

171    La région NPDC avance que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en ce qui concerne sa méthode de calcul du taux dont AFR aurait pu bénéficier sur le marché du crédit, évalué dans la décision originelle au taux de référence en vigueur lors de l’octroi de l’aide, majoré de 800 points de base.

172    La région NPDC admet que la communication de 1997 sur les taux de référence prévoit que le taux de référence est un taux plancher qui peut être augmenté dans des situations de risque particulier, mais elle estime que la Commission n’a apporté aucun élément justifiant qu’en l’espèce la majoration du taux de référence, qui peut atteindre « 400 points de base et même davantage » selon ladite communication, ait été le double du montant indiqué dans ce texte.

173    Elle conteste le renvoi opéré par la Commission, dans la décision originelle, à la décision 2007/492/CE de la Commission, du 24 janvier 2007, concernant l’aide d’État C 38/2005 (ex NN52/2004) accordée par l’Allemagne au groupe Biria (JO L 183, p.27), afin de justifier la majoration de 800 points de base en cause. Les situations en cause ne seraient, en effet, pas similaires, contrairement à ce que qu’affirme la Commission. Dans l’affaire Biria, l’aide accordée aurait consisté en une participation tacite pour un montant de plus de 2 millions d’euros jusqu’à la fin de 2010, soit une participation à long terme, tandis que, dans les présentes affaires, serait en cause une avance remboursable d’un montant de 2 millions d’euros dont les risques sont partagés entre deux entités distinctes, de surcroît accordée pour une durée de trois ans, soit à court terme, la communication de 1997 sur les taux de référence définissant les prêts à moyen et à long terme comme des prêts de cinq à dix ans. De plus, dans l’affaire Biria, l’entreprise concernée aurait été considérée comme instable, parce qu’elle avait adopté un plan d’insolvabilité, alors qu’AFR, loin d’avoir adopté un tel plan, aurait adopté et mis en œuvre un plan de relance.

174    La région NPDC considère que la Commission ne saurait, en tout état de cause, fonder la détermination du taux dont une entreprise aurait pu bénéficier sur le marché du crédit sur la seule base d’une décision isolée, dont, de surcroît, les éléments de fait diffèrent de la situation d’AFR. Une telle démarche nuirait à la prévisibilité et à la sécurité juridique. Elle rendrait arbitraire la prise de décision de la Commission dans ce domaine. En l’absence de cadre précis, la Commission pourrait abuser du pouvoir discrétionnaire qui lui est reconnu pour fixer le montant des majorations du taux de référence, notamment en appliquant une majoration suffisamment élevée afin que le montant de l’aide ne puisse entrer dans le champ d’application des règles de minimis.

175    Selon la région NPDC, la Commission elle-même aurait reconnu les défauts de sa méthode de calcul du taux de référence et d’actualisation dans sa communication de 2008 sur les taux de référence, qui a abrogé et remplacé la communication sur les taux de référence de 1997.

176    Par ailleurs, la région NPDC a ajouté, en réponse à une question écrite du Tribunal, qu’elle contestait la nouvelle méthode de calcul retenue dans la décision attaquée, au motif que la Commission n’aurait pas précisé si la base de calcul retenue était le taux Euribor à un an, le taux du marché monétaire à trois mois ou toute autre base de calcul.

177    La Commission conteste le bien-fondé des arguments de la région NPDC.

 Appréciation du Tribunal

178    Il convient de relever que, à l’exception de l’argument figurant au point 176 ci-dessus, l’argumentation de la région NPDC développée dans le cadre de cette seconde branche du présent moyen concerne la méthode de calcul exposée par la Commission dans la décision originelle, et non celle figurant dans la décision attaquée. La région NPDC n’a en effet pas reformulé ce moyen lors de l’adaptation de ses conclusions et moyens consécutive au retrait de la décision originelle et à l’adoption de la décision attaquée.

179    Or, la méthode de calcul de la prime de risque employée par la Commission dans la décision attaquée diffère de celle utilisée dans la décision originelle. Ainsi qu’il a été constaté aux points 49 à 55 ci-dessus, cette méthode se fonde notamment, à la différence de la décision originelle, sur une analyse de la pratique des marchés financiers en ce qui concerne les primes de risque en cas de cumul de risques liés à la solvabilité de l’entreprise et aux sûretés offertes.

180    La région NPDC a indiqué, en réponse à une question écrite du Tribunal, maintenir cette seconde branche du présent moyen, « dans la mesure où la Commission ne motive toujours pas de manière concluante le bien-fondé de la méthode de calcul qu’elle utilise pour évaluer les éléments de l’aide ».

181    Il convient de constater que l’argumentation de la région NPDC confond les questions de motivation formelle et l’appréciation quant au fond. L’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question de la légalité au fond de l’acte litigieux, selon la jurisprudence citée au point 45 ci-dessus. Or, il y a lieu de relever que le caractère suffisant de la motivation a été constaté lors de l’examen du premier moyen du recours T‑267/08 et du deuxième moyen du recours T‑279/08.

182    S’agissant de l’argument de la région NPDC figurant au point 176 ci-dessus, selon lequel la base de calcul n’aurait pas été précisée par la décision attaquée, il convient de constater que la base de calcul retenue, à savoir le taux de référence applicable, est déterminée avec clarté et précision par les communications de 1997 et de 2008 sur les taux de référence, toutes deux publiées au Journal officiel, auxquelles la décision attaquée renvoie. La communication de 1997 sur les taux de référence, applicable à la date d’octroi des avances et jusqu’au 1er juillet 2008, précise ainsi que le taux de référence est réputé égal à la moyenne des taux indicateurs enregistrés au cours des mois de septembre, d’octobre et de novembre précédents, qu’il est ajusté en cours d’année lorsqu’il diffère de plus de 15 % de la moyenne des taux indicateurs enregistrés au cours des trois derniers mois connus, le taux indicateur lui-même étant défini, pour la France, comme le taux swap interbancaire à cinq ans, majoré d’une prime de 0,75 point (75 points de base). La communication de 2008 sur les taux de référence, applicable à compter du 1er juillet 2008, précise que le taux de base est fondé sur les taux IBOR à un an et détermine précisément les modalités de mise à jour de ce taux. L’historique des taux de référence figurant, par ailleurs, comme cela a été rappelé au point 169 ci-dessus, sur le site de la DG « Concurrence » de la Commission permet de déterminer aisément quel est le taux de référence applicable en l’espèce. Le présent grief doit donc être rejeté comme non fondé.

183    Il y a donc lieu de rejeter la seconde branche du présent moyen.

184    Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter, dans son intégralité, le sixième moyen du recours T‑267/08, tiré de l’absence de fixation du montant de l’aide récupérable.

9.     Sur le septième moyen du recours T‑267/08, tiré d’une violation des droits de la défense dans le cadre de la procédure contentieuse et d’un détournement de pouvoir

a)     Arguments des parties

185    La région NPDC avance que la Commission aurait profité de l’adoption de la décision attaquée pour étayer son analyse, introduire subrepticement des éléments complémentaires et répondre ainsi aux écritures qu’elle a présentées dans le cadre de la procédure contentieuse. En incluant de nouveaux éléments relatifs aux mesures de redressement envisagées par AFR et à la méthode de calcul du montant de l’aide dans la décision attaquée, la Commission viserait à priver d’effet le recours introduit par la région NPDC, ce qui serait constitutif d’une violation des droits de la défense et d’un détournement de pouvoir.

186    La Commission conclut au rejet du présent moyen.

b)     Appréciation du Tribunal

187    Selon la région NPDC, la Commission, en incluant de nouveaux éléments dans la décision attaquée destinés à répondre à ses écritures, viserait à priver d’effet son recours, ce qui serait constitutif d’une violation des droits de la défense dans le cadre de la procédure contentieuse et d’un détournement de pouvoir.

188    Il convient d’examiner, à titre liminaire, la légalité du retrait opéré par la Commission.

189    A cet égard, il est utile de rappeler la jurisprudence en matière de retrait d’actes administratifs conférant des droits subjectifs ou des avantages similaires en faveur du destinataire. La Cour a reconnu, sous réserve de la protection de la confiance légitime et du principe de sécurité juridique (voir arrêt de la Cour du 24 janvier 2002, Conserve Italia/Commission, C‑500/99 P, Rec. p. I‑867, point 90, et la jurisprudence citée), et à la condition que ce retrait intervienne dans un délai raisonnable (arrêt du Tribunal du 12 septembre 2007, González y Díez/Commission, T‑25/04, Rec. p. II‑3121, point 97), aux institutions de l’Union le droit de retirer, en raison de l’illégalité qui l’affecte, une décision ayant octroyé un bénéfice à son destinataire.

190    Ce droit de retirer une décision illégale doit être a fortiori reconnu aux institutions de l’Union s’agissant d’un acte non créateur de droit entaché d’une illégalité, telle que la décision attaquée. En effet, dans ce cas de figure, des considérations relatives à la protection de la confiance légitime et des droits acquis du destinataire de la décision ne s’opposent pas au retrait (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 10 juillet 1997, AssiDomän Kraft Products e.a./Commission, T‑227/95, Rec. p. II‑1185, point 41). Il y a lieu de relever, par ailleurs, que la Commission a motivé ledit retrait à suffisance de droit aux considérants 8 à 12 de la décision attaquée.

191    La Commission était donc en droit de retirer la décision originelle.

192    S’agissant de l’ajout d’éléments nouveaux dans la décision attaquée, il convient de constater, en ce qui concerne ceux relatifs aux mesures de redressement adoptées par AFR, que cet ajout vise, de la part de la Commission, à répondre de manière plus détaillée que dans la décision originelle à des arguments présentés par les requérantes dans le cadre de leurs recours contentieux. Cette prise en compte d’arguments présentés par les requérantes elles-mêmes ne saurait être constitutive d’une violation des droits de la défense dans le cadre de la procédure contentieuse.

193    En ce qui concerne la nouvelle motivation relative à la méthode de calcul de la prime de risque, il convient de constater que celle-ci n’a, certes, pas fait l’objet d’un débat contradictoire lors de la procédure contentieuse visant la décision originelle. En revanche, elle a fait l’objet d’un débat contradictoire devant le Tribunal, puisque les requérantes ont été invitées à présenter leurs observations sur la décision attaquée. Ce débat a d’ailleurs permis à l’une des deux requérantes, la CAD, de soulever un grief relatif à la légalité de la nouvelle motivation, qui a été examiné aux points 49 à 55 ci-dessus. Le principe du contradictoire devant le Tribunal a donc été respecté.

194    Il s’ensuit que le grief tiré d’une violation des droits de la défense lors de la procédure contentieuse doit être rejeté comme non fondé.

195    La région NPDC avance également que l’introduction de nouveaux éléments dans la décision attaquée viserait à priver d’effet son recours et serait constitutive d’un détournement de pouvoir.

196    Selon la jurisprudence, la notion de détournement de pouvoir se réfère au fait, pour une autorité administrative, d’avoir usé de ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés (arrêts de la Cour du 13 novembre 1990, Fedesa e.a., C‑331/88, Rec. p. I‑4023, point 24, et du 10 mai 2005, Italie/Commission, C‑400/99, Rec. p. I‑3657, point 38). Une décision n’est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été prise à une telle fin (voir arrêt du Tribunal du 9 septembre 2010, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑387/08, non publié au Recueil, point 159, et la jurisprudence citée).

197    En l’espèce, la région NPDC n’a présenté aucun élément susceptible de démontrer que la Commission aurait usé de son pouvoir de retrait et d’adoption d’une nouvelle décision à d’autres fins que celles de corriger une illégalité affectant la décision originelle et de statuer sur l’existence d’une aide d’État et sa compatibilité avec le marché commun.

198    Dès lors, le grief tiré du détournement de pouvoir doit être rejeté.

199    Il s’ensuit que le présent moyen doit être rejeté dans son intégralité.

200    Il résulte de tout ce qui précède que les présents recours doivent être rejetés comme non fondés.

 Sur les dépens

201    L’article 87 du règlement de procédure dispose, en son paragraphe 2, premier alinéa, que toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens, et, en son paragraphe 3, premier alinéa, que le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens pour des motifs exceptionnels.

202    En l’espèce, il convient de relever que la Commission n’a pas demandé de condamner les requérantes aux dépens.

203    En outre, il y a lieu de constater que la Commission a reconnu que la décision originelle, initialement visée par les présents recours, était illégale, car insuffisamment motivée, et qu’elle l’a retirée pour ce motif.

204    Dans ces circonstances, il y a lieu de décider que l’ensemble des dépens sera supporté par la Commission, à l’exception des dépens exposés par les requérantes postérieurement à la notification de la décision de retrait de la décision originelle, qui seront supportés par ces dernières.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Il n’y a plus lieu de statuer sur les demandes d’annulation de la décision C (2008) 1 089 final de la Commission, du 2 avril 2008, concernant l’aide d’État C 38/2007 (ex NN 45/2007) mise à exécution par la France en faveur d’Arbel Fauvet Rail SA.

2)      Les recours sont rejetés.

3)      La Commission européenne est condamnée à supporter les dépens, à l’exception de ceux exposés par la région Nord‑Pas‑de-Calais et la communauté d’agglomération du Douaisis postérieurement à la communication à ces dernières de la décision C (2010) 4112 final de la Commission, du 23 juin 2010, concernant l’aide d’État C 38/2007 (ex NN 45/2007) mise à exécution par la France en faveur d’Arbel Fauvet Rail, qui a retiré la décision C (2008) 1 089 final.

Truchot

Martins Ribeiro

Kanninen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 mai 2011.

Table des matières


Faits à l’origine des litiges

Procédure et nouveaux développements en cours d’instance

Conclusions des parties

En droit

A –  Sur les conséquences procédurales du retrait de la décision originelle et de son remplacement par la décision attaquée

B –  Sur la demande en annulation de la décision attaquée

1.  Sur la recevabilité du cinquième moyen du recours T‑279/08

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

2.  Sur le premier moyen du recours T‑267/08 et sur le deuxième moyen du recours T‑279/08, tirés de la violation de l’obligation de motivation

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

Sur le premier moyen du recours T‑267/08

Sur le deuxième moyen du recours T‑279/08

–  Sur la première branche, tirée d’une insuffisance de motivation relative à la méthode de calcul du montant de l’aide

–  Sur la seconde branche, tirée d’un défaut de motivation découlant de l’examen « global et solidaire » des avances accordées à AFR

3.  Sur le deuxième moyen du recours T‑267/08, tiré de la violation des droits de la défense et des principes du contradictoire, d’égalité, de bonne administration, de respect de l’identité constitutionnelle des États membres et de protection de la confiance légitime, et sur le premier moyen du recours T‑279/08, tiré de la violation des droits de la défense et du principe du contradictoire

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

4.  Sur le troisième moyen du recours T‑267/08, tiré de l’erreur manifeste d’appréciation pour absence de prise en considération de la particularité juridique de l’auteur de l’aide

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

5.  Sur la première branche du quatrième moyen du recours T‑267/08, tirée d’une erreur d’appréciation quant à l’origine des fonds, et le quatrième moyen du recours T-279/08, tiré d’une erreur d’appréciation concernant la notion de ressources d’État

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

6.  Sur la seconde branche du quatrième moyen du recours T‑267/08, tirée d’une erreur de qualification d’AFR d’entreprise en difficulté, et sur le troisième moyen du recours T‑279/08, tiré d’une erreur d’appréciation concernant la notion d’entreprise en difficulté

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

7.  Sur le cinquième moyen du recours T‑267/08, tiré d’une erreur d’appréciation quant au prétendu avantage qu’AFR aurait retiré des avances remboursables

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

8.  Sur le sixième moyen du recours T‑267/08, tiré d’une erreur d’appréciation du montant de l’aide

a)  Sur la première branche du sixième moyen du recours T‑267/08, tirée de l’absence de fixation du montant de l’aide récupérable

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

b)  Sur la seconde branche du sixième moyen du recours T‑267/08, tirée de l’appréciation erronée de la prime de risque

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

9.  Sur le septième moyen du recours T‑267/08, tiré d’une violation des droits de la défense dans le cadre de la procédure contentieuse et d’un détournement de pouvoir

a)  Arguments des parties

b)  Appréciation du Tribunal

Sur les dépens


* Langue de procédure : le français.