Language of document : ECLI:EU:T:2022:2

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

12 janvier 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de déchéance – Marque verbale APIRETAL – Déclaration de déchéance – Absence d’usage sérieux – Absence de justes motifs pour le non-usage – Article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑160/21,

Laboratorios Ern, SA, établie à Barcelone (Espagne), représentée par Me T. González Martínez, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. T. Frydendahl et D. Gája, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Ingrid Malpricht, demeurant à Ludwigshafen-sur-le-Rhin (Allemagne), représentée par Me M.-C. Simon, avocate,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 20 janvier 2021 (affaire R 1004/2020‑4), relative à une procédure de déchéance entre Mme Malpricht et Laboratorios Ern,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli (rapporteure), présidente, MM. S. Frimodt Nielsen et C. Iliopoulos, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 25 mars 2021,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 15 juin 2021,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 14 juin 2021,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 3 janvier 2006, la requérante, Laboratorios Ern, SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié, lui-même remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé, qui est contestée en l’espèce, est le signe verbal APIRETAL.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques et vétérinaires ; substances diététiques à usage médical, aliments pour bébés ; emplâtres, matériel pour pansements ; produits pour les soins de la bouche (à caractère médicinal) ; matières pour plomber les dents et pour empreintes dentaires ; désinfectants à usage médical ; produits pour la destruction des animaux nuisibles ; fongicides, herbicides ».

4        Le 29 novembre 2017, l’intervenante, Mme Ingrid Malpricht, a déposé une demande de déchéance de la marque contestée sur le fondement de l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001 pour l’ensemble des produits pour lesquels ladite marque était enregistrée à l’exception des produits pharmaceutiques, au motif que cette dernière n’avait pas fait l’objet d’un usage sérieux pour les produits en cause pendant une période ininterrompue de cinq ans précédant la date de ladite demande.

5        Par décision du 20 mars 2020, la division d’annulation a accueilli la demande de déchéance et a déclaré la requérante déchue de ses droits relatifs à la marque contestée pour l’ensemble des produits en cause, au motif qu’aucune preuve de l’usage n’avait été produite pour ces produits et qu’aucune raison valable justifiant le non-usage n’avait été fournie.

6        Le 20 mai 2020, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des a articles 66 à 71 du règlement 2017/1001 contre la décision de la division d’annulation.

7        Par décision du 20 janvier 2021, la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours (ci-après la « décision attaquée »). En particulier, elle a, tout d’abord, rejeté l’argument de la requérante selon lequel les preuves produites devant la division d’annulation étaient pertinentes pour l’ensemble des produits en cause, dès lors qu’elles concernaient exclusivement l’usage de la marque contestée pour des produits pharmaceutiques à usage humain. Elle a, ensuite, considéré que la requérante n’avait pas démontré qu’il existait de justes motifs pour le non-usage de ladite marque. En effet, selon elle, les restrictions légales ne constituaient pas un obstacle à l’usage de cette marque pour les produits en cause qui justifierait le non-usage de cette marque pour ces produits. Dès lors, elle a conclu que la requérante n’avait pas prouvé à suffisance l’usage de la marque en question, et a confirmé la déchéance de la même marque pour ces produits à compter de la date de dépôt de la demande de déchéance.

 Conclusions des parties

8        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler la décision de la division d’annulation ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

9        L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

10      Compte tenu de la date d’introduction de la demande de déchéance, à savoir le 29 novembre 2017, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement 2017/1001 (voir, par analogie, arrêt du 3 juillet 2019, Viridis Pharmaceutical/EUIPO, C‑668/17 P, EU:C:2019:557, points 3 et 25).

11      La requérante invoque, en substance, un moyen unique tiré de la violation de l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001 selon lequel le titulaire de la marque de l’Union européenne est déclaré déchu de ses droits si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union européenne pour les produits ou les services pour lesquels elle a été enregistrée, et qu’il n’existe pas de justes motifs pour le non-usage. Ce moyen se divise en deux branches, tirées, la première, de l’erreur commise par la chambre de recours dans l’interprétation de la notion d’usage sérieux d’une marque de l’Union européenne et, la seconde, de l’erreur commise par la chambre de recours dans l’appréciation des justes motifs pour le non-usage invoqués.

 Sur la première branche, tirée de l’erreur commise par la chambre de recours dans l’interprétation de la notion d’usage sérieux

12      La requérante soutient que la notion d’usage sérieux contenue à l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, doit être interprétée dans le même sens que celle contenue à l’article 47, paragraphe 2, dudit règlement.

13      Selon la requérante, l’usage et la renommée de la marque contestée pour les produits pharmaceutiques sont suffisants pour qu’il soit également considéré que cette marque a été utilisée pour les autres produits pour lesquels elle a été enregistrée. En effet, ces derniers produits, relevant également de la classe 5, auraient la même destination que les produits pharmaceutiques, à savoir protéger ou guérir les humains et les animaux de maladies, avec lesquels, ils constitueraient une catégorie suffisamment restreinte, qui ne pourrait être divisée que de manière arbitraire. Partant, la preuve de l’usage sérieux de ladite marque contestée pour certains des produits de cette catégorie suffirait pour rejeter la demande de déchéance.

14      De plus, selon la requérante, le fait qu’elle n’a utilisé la marque contestée que pour certains produits de la classe 5 n’exclut pas un usage futur pour l’ensemble des produits visés par cette marque qui relèvent de cette classe, comme cela a été le cas pour d’autres de ses marques.

15      L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments.

16      À cet égard, il convient de rappeler que la ratio legis de l’exigence selon laquelle une marque doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux pour être protégée au titre du droit de l’Union réside dans le fait que le registre de l’EUIPO ne saurait être assimilé à un dépôt stratégique et statique conférant à un détenteur inactif un monopole légal d’une durée indéterminée. Au contraire, ledit registre devrait refléter fidèlement les indications que les entreprises utilisent effectivement sur le marché pour distinguer leurs produits et services dans la vie économique [voir arrêt du 15 juillet 2015, Deutsche Rockwool Mineralwoll/OHMI – Recticel (λ), T‑215/13, non publié, EU:T:2015:518, point 20 et jurisprudence citée].

17      Ainsi, une marque de l’Union européenne qui n’est pas utilisée pourrait faire obstacle à la concurrence en limitant l’éventail des signes qui peuvent être enregistrés par d’autres en tant que marque et en privant les concurrents de la possibilité d’utiliser cette marque ou une marque similaire lors de la mise sur le marché intérieur de produits ou de services identiques ou semblables à ceux qui sont visés par la marque en cause. Par conséquent, le non-usage d’une marque de l’Union européenne risque également de restreindre la libre circulation des marchandises et la libre prestation des services [voir arrêt du 13 avril 2016, Facchinello/EUIPO – Olimpia Splendid (Synthesis), T‑81/15, non publié, EU:T:2016:215, point 36 et jurisprudence citée].

18      Il ressort d’une jurisprudence constante qu’une marque fait l’objet d’un « usage sérieux » lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et ces services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43).

19      En effet, pour examiner, dans un cas d’espèce, le caractère sérieux de l’usage d’une marque, il convient de réaliser une appréciation globale des éléments versés au dossier, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de la marque, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque (arrêts du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 37, et du 19 décembre 2012, Leno Merken, C‑149/11, EU:C:2012:816, point 29).

20      Concernant plus particulièrement le domaine pharmaceutique, il a été jugé, d’une part, que, dans la mesure où le consommateur recherchait avant tout un produit ou un service qui pourrait répondre à ses besoins spécifiques, la finalité ou la destination du produit ou du service en cause revêtait un caractère essentiel dans l’orientation de son choix et, d’autre part, que la finalité et la destination d’un produit thérapeutique étaient exprimées par son indication thérapeutique [arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, points 29 et 30].

21      Par ailleurs, l’usage sérieux d’une marque ne peut pas être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné [voir arrêt du 7 juillet 2016, Fruit of the Loom/EUIPO – Takko (FRUIT), T‑431/15, non publié, EU:T:2016:395, point 24 et jurisprudence citée].

22      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les arguments de la requérante dans le cadre de la première branche.

23      D’emblée, il convient de relever que, comme le souligne à juste titre l’EUIPO, la requérante ne conteste pas que les éléments de preuve qu’elle a fournis n’ont porté que sur l’usage de la marque contestée pour un produit pharmaceutique à usage humain, à savoir un médicament pédiatrique antipyrétique et analgésique. Ainsi, lesdits éléments de preuve ne concernaient aucun des produits visés par la demande de déchéance, c’est-à-dire des produits vétérinaires, des substances diététiques à usage médical, des aliments pour bébés, des emplâtres, du matériel pour pansements, des produits pour les soins de la bouche (à caractère médicinal), des matières pour plomber les dents et pour empreintes dentaires, des désinfectants à usage médical, des produits pour la destruction des animaux nuisibles, des fongicides et des herbicides.

24      Or, d’une part, certains des produits visés par la demande de déchéance n’apparaissent pas susceptibles d’appartenir à la catégorie des produits pharmaceutiques. D’autre part, et en tout état de cause, bien que certains des produits visés par la demande de déchéance puissent avoir des attributs similaires aux produits pharmaceutiques en tant qu’ils visent à protéger ou guérir les humains ou les animaux, ils présentent un éventail très large et diversifié de caractéristiques déterminantes. Ainsi, certains sont spécifiquement destinés aux animaux, d’autres sont des substances diététiques, des produits destinés au traitement physique des blessures, des produits spécifiquement destinés au traitement d’une série de pathologies orales, des désinfectants ou encore des produits destinés à détruire les animaux nuisibles, les champignons ou les végétaux indésirables. Il en découle que leurs indications thérapeutiques ou, à tout le moins, leur finalité et leur destination sont substantiellement différentes, et qu’ils forment des catégories suffisamment autonomes, justifiant donc l’exigence de preuves pour chaque produit protégé conformément à la jurisprudence mentionnée au point 19 ci-dessus. Ainsi, contrairement à ce que relève la requérante en s’appuyant sur l’arrêt du 16 juillet 2020, ACTC/EUIPO (C‑714/18 P, EU:C:2020:573), les produits visés par la demande de déchéance ne sont pas définis de façon tellement précise et circonscrite qu’il n’est pas possible d’opérer des divisions significatives entre leurs finalités, et ils ne constituent pas non plus des variantes imaginables des produits pharmaceutiques. Partant, la requérante n’est pas fondée à soutenir que, s’agissant de l’exigence de la preuve de l’usage sérieux, les produits visés par la demande de déchéance forment, avec les produits pharmaceutiques, une catégorie homogène de produits ne pouvant être divisée que de manière arbitraire, et que la seule preuve de l’usage sérieux d’un produit pharmaceutique peut suffire à prouver l’usage de la marque contestée pour l’ensemble des produits visés par la demande de déchéance.

25      En outre, il convient de préciser que l’argument de la requérante sur l’éventuel usage futur de la marque contestée pour les produits visés par la demande de déchéance est dénué de pertinence pour le présent litige, dans la mesure où l’usage sérieux d’une marque pour un certain type de produits ne saurait être démontré par la probabilité d’une utilisation future, ainsi que l’expose la jurisprudence visée au point 21 ci-dessus.

26      Il résulte de l’ensemble de ces considérations que la requérante n’a prouvé l’usage sérieux de la marque contestée pour aucun des produits visés par la demande de déchéance. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a rejeté l’argument de la requérante, réitéré dans le cadre du présent recours, consistant à soutenir que les preuves concernant un seul produit pour lequel la marque contestée est enregistrée suffisaient à démontrer l’usage sérieux de ladite marque pour l’ensemble des autres produits, relevant de la même classe, à savoir la classe 5, pour lesquels la déchéance de cette marque a été demandée.

27      La première branche du moyen unique doit donc être écartée.

 Sur la seconde branche, tirée de l’erreur commise par la chambre de recours dans l’appréciation des justes motifs pour le non-usage

28      La requérante soulève qu’il existe des motifs juridiques indépendants de sa volonté qui justifient le non-usage pour les produits visés par la demande de déchéance, qui découlent des nombreuses réglementations auxquelles les produits couverts par la marque contestée, en tant qu’ils affectent directement la santé des personnes et des animaux, sont soumis. Selon elle, le libellé des produits de la classe 5 devrait se conformer à une réglementation spécifique relative à la protection de la santé des personnes ou des animaux. En particulier, elle soutient que la commercialisation, sous ladite marque, d’un produit relevant de la classe 5 autre qu’un produit pharmaceutique aurait été refusée par l’administration espagnole compétente étant donné qu’il existait une autorisation de mise sur le marché d’un médicament à usage humain du même nom.

29      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

30      Il ressort de la jurisprudence que, pour être qualifiés de justes motifs, des obstacles à l’usage d’une marque doivent remplir deux conditions cumulatives, à savoir, d’une part, présenter une relation suffisamment directe avec une marque rendant impossible ou déraisonnable l’usage de celle-ci et, d’autre part, être indépendants de la volonté du titulaire de cette marque (voir arrêt du 17 mars 2016, Naazneen Investments/OHMI, C‑252/15 P, non publié, EU:C:2016:178, point 96 et jurisprudence citée).

31      De plus, la notion de justes motifs ne doit pas être interprétée de manière large, afin de s’assurer que les marques enregistrées sont effectivement utilisées sous peine de déchéance (voir, par analogie, arrêt du 14 juin 2007, Häupl, C‑246/05, EU:C:2007:340, point 51).

32      En substance, la requérante allègue que la loi espagnole lui interdit d’utiliser la marque contestée pour des produits tels que ceux visés par la demande de déchéance, dans la mesure où elle a déjà commercialisé un produit pharmaceutique sous cette marque. Cependant, selon la jurisprudence, le seul fait qu’un obstacle à l’usage d’une marque existe, tel que la nécessité de se conformer à une législation pour commercialiser les produits visés par cette marque, ne suffit pas pour justifier le non-usage de cette marque [voir, en ce sens, arrêt du 8 juin 2017, Kaane American International Tobacco/EUIPO – Global Tobacco (GOLD MOUNT), T‑294/16, non publié, EU:T:2017:382, point 42]. Plus précisément, comme le fait valoir la chambre de recours à juste titre, le respect de la législation relève de la sphère d’influence et de responsabilité du détenteur de la marque, et ne constitue pas un obstacle indépendant de sa volonté. En effet, force est de constater que toute activité commerciale doit être exercée conformément à une législation spécifique. La requérante ne saurait donc se prévaloir de l’existence d’un encadrement règlementaire précis qui a pour but de protéger le consommateur, afin de justifier le non-usage d’une marque qu’elle a délibérément enregistrée pour un large éventail de produits.

33      À cet égard, il y a également lieu de relever qu’aucun élément du dossier ne permet de conclure que la requérante a entrepris une quelconque démarche pour tenter de commercialiser sous la marque contestée des produits visés par la demande de déchéance, soit en tant que produit pharmaceutique, soit le cas échéant en renonçant à commercialiser son produit pharmaceutique. En outre, la requérante n’a pas démontré qu’il existait un obstacle à l’utilisation de ladite marque pour les produits visés par la demande de déchéance dans d’autres États membres de l’Union européenne que le Royaume d’Espagne. En effet, elle se réfère à la seule réglementation espagnole sans établir que l’interdiction de commercialisation s’appliquerait à l’ensemble du territoire de l’Union ou même à celui d’autres États membres compte tenu des réglementations applicables et de l’éventuelle commercialisation de son produit pharmaceutique dans ces États.

34      Par conséquent, les conditions retenues par la jurisprudence concernant la notion de justes motifs pour le non-usage ne sont pas remplies en l’espèce.

35      Il en résulte que, contrairement à ce qu’affirme la requérante, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur dans l’appréciation des motifs pour le non-usage invoqués. Il y a donc lieu d’écarter la seconde branche du moyen unique.

36      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le moyen unique doit être rejeté et, partant, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

37      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

38      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Laboratorios Ern, SA est condamnée aux dépens.

Marcoulli

Frimodt Nielsen

Iliopoulos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 janvier 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.