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DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (huitième chambre)

10 décembre 2021 (*)

« Recours en annulation – Délai de recours – Tardiveté – Irrecevabilité manifeste »

Dans l’affaire T‑657/21,

Mario Chesini, demeurant à Montichiari (Italie), et les autres parties requérantes dont les noms figurent en annexe (1), représentés par Mes V. De Michele, A. Carbonelli et A. Riccabella, avocats,

parties requérantes,

contre

Parlement européen,

et

Conseil de l’Union européenne,

parties défenderesses,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation partielle du considérant 36 du règlement (UE) 2021/953 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2021, relatif à un cadre pour la délivrance, la vérification et l’acceptation de certificats COVID‑19 interopérables de vaccination, de test et de rétablissement (certificat COVID numérique de l’UE) afin de faciliter la libre circulation pendant la pandémie de COVID-19 (JO 2021, L 211, p. 1),

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. J. Svenningsen (rapporteur), président, C. Mac Eochaidh et J. Laitenberger, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Procédure et conclusions des parties requérantes

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 12 octobre 2021, les requérants, M. Mario Chesini et les autres personnes physiques dont les noms figurent en annexe, ont introduit le présent recours.

2        Les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal d’annuler partiellement le considérant 36 du règlement (UE) 2021/953 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2021, relatif à un cadre pour la délivrance, la vérification et l’acceptation de certificats COVID‑19 interopérables de vaccination, de test et de rétablissement (certificat COVID numérique de l’UE) afin de faciliter la libre circulation pendant la pandémie de COVID-19 (JO 2021, L 211, p. 1), dans sa version en langue italienne publiée au Journal officiel de l’Union européenne et republiée sans modification à la Gazzetta ufficiale della Repubblica italiana (GURI – 2e série spéciale no 63, du 12 août 2021), en ce qu’il n’étend pas l’interdiction de discrimination à l’égard des personnes qui ne souhaitent pas être vaccinées contre la COVID-19.

 En droit

3        À titre liminaire, il y a lieu de relever que, par le présent recours, les requérants font essentiellement valoir que le considérant 36 du règlement 2021/953, dans sa version initiale en langue italienne publiée au Journal officielle 15 juin 2021, ne contient pas, à la fin de sa première phrase, les termes « ou ne souhaitent pas le faire », pourtant présents dans toutes les autres versions linguistiques de ce règlement.

4        Or, en dépit du rectificatif apporté à la version en langue italienne du règlement 2021/953, publié au Journal officiel le 5 juillet 2021 (JO 2021, L 236, p. 86) et ajoutant les termes en cause à son considérant 36, les autorités italiennes auraient, en marge de la publication de la réglementation de cet État membre relative au « certificat vert COVID-19 », procédé à la publication, à la Gazzetta ufficiale della Repubblica italiana du 12 août 2021, du règlement 2021/953 dans sa version initiale.

5        Selon les requérants, l’omission des termes « ou ne souhaitent pas le faire » dans la version initiale en langue italienne du considérant 36 du règlement 2021/953, par la suite publiée dans la Gazzetta ufficiale della Repubblica italiana, a un effet discriminatoire à leur égard, compte tenu de l’obligation qui pèserait sur eux de se faire vacciner afin de poursuivre leurs activités professionnelles.

6        Pour ces motifs, les requérants demandent l’annulation partielle du considérant 36 du règlement 2021/953.

7        Aux termes de l’article 126 du règlement de procédure du Tribunal, lorsqu’un recours est manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

8        En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

9        Aux termes de l’article 263, sixième alinéa, TFUE, le recours en annulation doit être formé dans un délai de deux mois à compter, suivant le cas, de la publication de l’acte attaqué, de sa notification au requérant ou, à défaut, du jour où celui-ci en a eu connaissance. Selon l’article 59 du règlement de procédure, lorsqu’un délai pour l’introduction d’un recours contre un acte d’une institution commence à courir à partir de la publication de cet acte au Journal officiel, le délai est à compter à partir de la fin du quatorzième jour suivant la date de cette publication. Conformément à l’article 60 du même règlement, ce délai doit, en outre, être augmenté d’un délai de distance forfaitaire de dix jours.

10      Selon une jurisprudence constante, ce délai de recours est d’ordre public, ayant été institué en vue d’assurer la clarté et la sécurité des situations juridiques et d’éviter toute discrimination ou traitement arbitraire dans l’administration de la justice, et il appartient au juge de l’Union de vérifier, d’office, s’il a été respecté (arrêts du 23 janvier 1997, Coen, C‑246/95, EU:C:1997:33, point 21, et du 18 septembre 1997, Mutual Aid Administration Services/Commission, T‑121/96 et T‑151/96, EU:T:1997:132, points 38 et 39).

11      En l’espèce, il ressort des éléments du dossier que le règlement 2021/953 a été publié au Journal officiel le 15 juin 2021. Il s’ensuit que le délai d’introduction du recours de deux mois, augmenté du délai de quatorze jours prévu à l’article 59 du règlement de procédure ainsi que du délai de distance forfaitaire de dix jours prévu à l’article 60 de ce règlement, a expiré le 8 septembre à 24 heures.

12      Par conséquent, le présent recours, introduit le 12 octobre 2021, n’a pas été présenté dans le délai imparti et s’avère tardif.

13      Par ailleurs, les requérants n’ont pas établi l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure permettant de déroger au délai en cause sur le fondement de l’article 45, second alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53 dudit statut.

14      À cet égard, le fait, évoqué par les requérants, que les autorités italiennes ont procédé à une nouvelle publication, à la Gazzetta ufficiale della Repubblica italiana du 12 août 2021, de la version originale du règlement 2021/953, en omettant de tenir compte du rectificatif publié le 5 juillet 2021 au Journal officiel, est dépourvu de pertinence.

15      En effet, d’une part, il ressort des termes mêmes de l’article 288 TFUE qu’un règlement est directement applicable dans tout État membre. Par voie de conséquence, il ne nécessite pas de mesure portant réception dans le droit national (arrêt du 10 octobre 1973, Variola, 34/73, EU:C:1973:101, point 10).

16      D’autre part, la seule version d’un règlement de l’Union qui fait foi est, en l’état actuel du droit de l’Union, celle qui est publiée au Journal officiel (arrêt du 11 décembre 2007, Skoma-Lux, C‑161/06, EU:C:2007:773, point 50), éventuellement telle que modifiée par des rectificatifs eux-mêmes publiés au Journal officiel, comme en l’espèce.

17      De même, les requérants ne sauraient à bon droit se prévaloir du fait qu’aucune version consolidée du règlement 2021/953 n’a été rapidement mise à disposition au Journal officiel, à la suite de la publication, le 5 juillet 2021 au même Journal officiel, du rectificatif apporté à la version initiale de ce règlement en langue italienne.

18      En effet, aucune réglementation de l’Union ne met à la charge des institutions, organes ou organismes de l’Union une obligation de publication d’une version consolidée des actes qu’elles adoptent et publient au Journal officiel, à la suite de modifications ou de rectifications de ceux-ci.

19      Ainsi, la circonstance que les autorités italiennes ont uniquement publié, à la Gazzetta ufficiale della Repubblica italiana du 12 août 2021, la version initiale du règlement 2021/953 ou encore celle qu’il n’existe aucune version consolidée du règlement 2021/953 publiée au Journal officiel n’est pas susceptible de justifier un retard dans l’introduction du recours en annulation dirigé exclusivement contre la version initiale de ce règlement.

20      En tout état de cause et indépendamment même du fait que le défaut de mention des termes litigieux dans la version initiale du règlement 2021/953 en langue italienne a donné lieu à une rectification dès avant l’introduction du présent recours, il convient de rappeler que le préambule d’un acte de l’Union n’a pas de valeur juridique contraignante (voir arrêt du 29 septembre 2021, Kočner/Europol, T‑528/20, non publié, EU:T:2021:631, point 95 et jurisprudence citée).

21      Ainsi, aucun recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE ne saurait être valablement introduit, comme en l’espèce, à l’encontre exclusivement d’un considérant d’un acte de l’Union.

22      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le présent recours doit être rejeté comme étant manifestement irrecevable, sans qu’il soit nécessaire de le signifier au Parlement européen et au Conseil de l’Union européenne.

 Sur les dépens

23      La présente ordonnance étant adoptée avant la signification de la requête au Parlement et au Conseil et avant que ceux-ci n’aient pu exposer des dépens, il suffit de décider que les requérants supporteront leurs propres dépens, conformément à l’article 133 du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme manifestement irrecevable.

2)      M. Mario Chesini et les autres parties requérantes dont les noms figurent en annexe supporteront leurs propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 10 décembre 2021.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

J. Svenningsen


*      Langue de procédure : l’italien.


1      La liste des autres parties requérantes n’est annexée qu’à la version notifiée aux parties.