Language of document : ECLI:EU:T:2021:741

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

27 octobre 2021 (*)

« Clause compromissoire – Convention de subvention conclue dans le cadre du septième programme-cadre pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration (2007-2013) – Inexécution du contrat – Remboursement des sommes avancées – Intérêts de retard – Procédure par défaut »

Dans l’affaire T‑318/17,

Entreprise commune Clean Sky 2, représentée par M. B. Mastantuono, en qualité d’agent, assisté de Me M. Velardo, avocate,

partie requérante,

contre

Revoind Industriale di Pindaru Gelu Sas, établie à Rome (Italie),

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 272 TFUE et tendant à obtenir la condamnation de Revoind Industriale di Pindaru Gelu à rembourser l’avance versée dans le cadre de la convention de subvention pour partenaires no 325940, majorée d’intérêts de retard,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. J. Svenningsen, président, R. Barents et C. Mac Eochaidh (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        L’article 2, paragraphe 1, du règlement (CE) no 71/2008 du Conseil, du 20 décembre 2007, portant création de l’entreprise commune Clean Sky (JO 2008, L 30, p. 1), prévoit que cette entreprise contribue à la mise en œuvre du septième programme-cadre de la Communauté européenne pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration (2007-2013). En vertu de l’article 1er, paragraphe 2, et de l’article 2 du règlement (UE) no 558/2014 du Conseil, du 6 mai 2014, établissant l’entreprise commune Clean Sky 2 (JO 2014, L 169, p. 77), la requérante, l’entreprise commune Clean Sky 2, s’est substituée et a succédé à l’entreprise commune Clean Sky.

2        Le 29 octobre 2013, l’entreprise commune Clean Sky a conclu avec un consortium regroupant IBK-Innovation GmbH & Co. KG, en qualité de coordinateur du consortium (ci-après le « coordinateur »), ainsi que Revoind Industriale di Pindaru Gelu Sas et NHOE Srl, en qualité de bénéficiaires, la convention de subvention pour partenaires no 325940 (ci-après la « convention de subvention »), relative au projet intitulé « Eulosam-Design and manufacturing of baseline low-speed, low-sweep wind tunnel model » (conception et fabrication d’une maquette de base à faible courbure destinée à être testée en soufflerie basse vitesse, ci-après le « projet Eulosam »).

3        Sur le fondement de l’article 6 de la convention de subvention, l’entreprise commune Clean Sky a versé au coordinateur une avance de 524 647,90 euros, destinée à être répartie entre les bénéficiaires. Par la suite, le coordinateur a versé à Revoind Industriale di Pindaru Gelu la somme de 359 913,75 euros en paiement d’une partie de son préfinancement.

4        Les articles 3 et 4 de la convention de subvention prévoyaient que le projet Eulosam aurait initialement une durée de treize mois à compter du 1er juin 2013 avec une seule période de rapport finale.

5        Par courrier recommandé du 15 février 2016, le coordinateur a informé Revoind Industriale di Pindaru Gelu qu’il avait engagé la procédure administrative, prévue au point II.36 de l’annexe II de la convention de subvention, visant à mettre fin à sa participation à la convention de subvention. Le coordinateur a également invité Revoind Industriale di Pindaru Gelu à formuler ses observations pour le 19 février 2016 au plus tard. Par ailleurs, le coordinateur a demandé à Revoind Industriale di Pindaru Gelu de rembourser, au plus tard le 26 février 2016, la somme de 254 294,47 euros, laquelle correspondait, selon lui, à la part du préfinancement reçu excédant les réclamations de Revoind Industriale di Pindaru Gelu. Sur ce dernier point, le coordinateur a, en outre, indiqué que Revoind Industriale di Pindaru Gelu devrait également rembourser les montants, faisant l’objet de ses réclamations, qui ne seraient pas acceptés par la requérante en tant que coûts éligibles.

6        Par courrier recommandé du 2 mars 2016, Revoind Industriale di Pindaru Gelu a informé le coordinateur de sa volonté de mettre fin à sa participation à la convention de subvention au 31 mars 2016.

7        Par courrier recommandé du 17 mars 2016, le coordinateur a, au nom du consortium, demandé à la requérante qu’elle mette fin, à partir du 31 mars 2016, à la participation de Revoind Industriale di Pindaru Gelu à la convention de subvention. Cette demande était justifiée en raison de l’impossibilité pour Revoind Industriale di Pindaru Gelu d’honorer ses obligations contractuelles et, partant, de la volonté de cette dernière de quitter le consortium le 31 mars 2016. Par ailleurs, le coordinateur a indiqué à la requérante que Revoind Industriale di Pindaru Gelu avait reçu, au titre de la convention de subvention, un préfinancement de 359 913,75 euros et qu’elle ne lui avait pas encore remboursé ce montant.

8        Par courrier recommandé du 29 juin 2016, la requérante a accepté la demande du consortium de mettre fin, à partir du 31 mars 2016, à la participation de Revoind Industriale di Pindaru Gelu à la convention de subvention.

9        Par lettre et par courrier électronique du 23 novembre 2016, la requérante a notifié à Revoind Industriale di Pindaru Gelu l’ordre de recouvrement du préfinancement de 359 913,75 euros, dès lors que cette dernière ne lui avait fourni, pas plus qu’au coordinateur, aucun rapport technique et financier acceptable. La requérante informait également Revoind Industriale di Pindaru Gelu qu’elle lui accordait un délai de quinze jours pour formuler ses éventuelles objections. La requérante indiquait, en outre, que, en cas de retard de paiement, la dette principale serait majorée d’intérêts moratoires au taux indiqué dans la note de débit.

10      Le 19 décembre 2016, la requérante a émis une note de débit pour un montant de 359 913,75 euros avec une date d’échéance fixée au 30 janvier 2017. Cette note de débit informait également Revoind Industriale di Pindaru Gelu que, à défaut de paiement à la date d’échéance, le montant à rembourser porterait des intérêts.

11      À cet égard, le point II.21 2 de l’annexe II de la convention de subvention prévoit que, si l’obligation de remboursement n’est pas honorée à la date fixée par la requérante, la somme due sera majorée d’un intérêt de retard, au taux prévu au point II.5 5 de cette même annexe, soit le taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne (BCE) pour ses opérations principales de refinancement au premier jour du mois durant lequel expire le délai fixé par la requérante, majoré de 3,5 points. Ledit point II.21 2 de l’annexe II de la convention de subvention prévoit également que l’intérêt de retard couvre la période comprise entre la date de défaut de remboursement, laquelle est exclue, et la date de paiement final, qui est incluse.

12      Ainsi qu’il ressort du Journal officiel de l’Union européenne (JO 2017, C 2, p. 2), le taux d’intérêt appliqué par la BCE à ses opérations principales de refinancement était fixé, au 1er janvier 2017, à 0,00 %.

13      Malgré deux courriers de relance envoyés par la requérante les 8 et 16 février 2017, Revoind Industriale di Pindaru Gelu n’a procédé à aucun remboursement.

 Procédure et conclusions de la requérante

14      Par requête rédigée en langue anglaise et déposée au greffe du Tribunal le 19 mai 2017, la requérante a introduit le présent recours.

15      À la suite de plusieurs tentatives infructueuses de signification de la requête par envoi recommandé et par huissier de justice à l’adresse en Italie communiquée par la requérante, celle-ci a, par actes déposés au greffe du Tribunal le 6 juillet 2017 et le 18 décembre 2018, apporté des précisions relatives à la transformation de Revoind Industriale di Pindaru Gelu qui était une société à responsabilité limitée dont la dénomination sociale était Revoind Industriale Srl, ayant son siège statutaire à Oricola (Italie), avant de devenir une société en commandite simple dont la dénomination sociale est Revoind Industriale di Pindaru Gelu Sas, ayant son siège statutaire à Rome (Italie), et dont le « socio accomandatario » (associé commandité) et « rappresentante dell’impresa » (représentant de la société) est M. Gelu Pindaru, ainsi qu’à l’adresse de ce dernier à Bucarest (Roumanie).

16      Par décision du 23 octobre 2019 et à la suite de la modification de la composition des chambres du Tribunal, la présente affaire a été réattribuée à la huitième chambre.

17      À la suite d’une nouvelle tentative de signification de la requête à Revoind Industriale di Pindaru Gelu effectuée par lettre recommandée le 18 décembre 2019 ainsi que des questions adressées à la requérante à la même date, auxquelles celle-ci a répondu le 9 janvier 2020, le greffe du Tribunal a procédé à une nouvelle signification de la requête à Revoind Industriale di Pindaru Gelu, par courrier express du 3 juin 2020 adressé à M. Pindaru, en ses qualités d’associé commandité et de représentant de cette société, à l’adresse de ce dernier en Roumanie. Ce courrier a été réceptionné le 12 juin 2020.

18      Par décision du 16 juillet 2020, le président de la huitième chambre a constaté que la signification de la requête avait été, conformément à l’article 80, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, effectuée le 12 juin 2020.

19      Par lettres adressées aux parties le 10 septembre 2020, le greffe du Tribunal, d’une part, a constaté que la signification de la requête avait été effectuée le 12 juin 2020 et que Revoind Industriale di Pindaru Gelu n’avait pas déposé de mémoire en défense dans le délai prescrit à l’article 81 du règlement de procédure et, d’autre part, a invité la requérante à présenter ses observations sur la suite de la procédure et notamment si, en application de l’article 123, paragraphe 1, de ce même règlement, celle-ci entendait demander au Tribunal de lui adjuger ses conclusions.

20      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 25 septembre 2020 et signifié à Revoind Industriale di Pindaru Gelu le 12 octobre 2020 par l’intermédiaire de M. Pindaru, la requérante a demandé au Tribunal, conformément à l’article 123, paragraphe 1, du règlement de procédure, de lui adjuger le bénéfice de ses conclusions.

21      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        condamner Revoind Industriale di Pindaru Gelu à lui verser la somme de 359 913,75 euros, correspondant au montant dû au principal, majorée de la somme de 2 105,25 euros au titre des intérêts de retard calculés au taux de 3,5 % pour la période comprise entre le 31 janvier 2017 et le 1er avril 2017 ;

–        condamner Revoind Industriale di Pindaru Gelu à lui verser 34,51 euros par jour à titre d’intérêts à compter du 2 avril 2017 et jusqu’à la date du remboursement intégral de la dette ;

–        condamner Revoind Industriale di Pindaru Gelu aux dépens.

 En droit

22      Conformément à l’article 123, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal adjuge à la partie requérante ses conclusions, à moins qu’il ne soit manifestement incompétent pour connaître du recours ou que ce recours ne soit manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

23      Tout d’abord, le Tribunal n’est pas manifestement incompétent pour connaître du présent recours au regard de la présence, à l’article 9, paragraphe 2, de la convention de subvention, d’une clause compromissoire, au sens de l’article 272 TFUE, selon laquelle le Tribunal et, en cas de pourvoi, la Cour sont seuls compétents pour connaître des litiges entre la requérante et tout bénéficiaire quant à l’interprétation, à l’application ou à la validité de ladite convention de subvention, ainsi qu’au regard des dispositions de l’article 10, paragraphe 1, sous b), du règlement no 71/2008, qui ont été reprises, en substance, à l’article 10, paragraphe 1, sous a), du règlement no 558/2014.

24      Ensuite, le recours n’est pas manifestement irrecevable.

25      À cet égard, il convient de relever que la requête déposée par la requérante a certes été rédigée en anglais et, partant, dans une langue différente de celle désignée par l’article 45, paragraphe 1, sous a), du règlement de procédure, compte tenu du fait que Revoind Industriale di Pindaru Gelu était établie en Italie.

26      Toutefois, une telle irrégularité ne saurait, dans les circonstances particulières de l’espèce, conduire à considérer cette requête comme étant manifestement irrecevable au sens de l’article 123, paragraphe 3, du règlement de procédure.

27      En effet, il est constant que, à la suite de multiples tentatives infructueuses de signification de la requête par lettres recommandées avec accusé de réception ainsi que par exploits d’huissier tant à l’adresse de Revoind Industriale di Pindaru Gelu en Italie qu’à l’adresse, à Bucarest, de son représentant légal, ladite requête a néanmoins été signifiée à ce dernier, plus de trois années après l’introduction du recours.

28      Or, ni Revoind Industriale di Pindaru Gelu ni son représentant légal, qui ne pouvaient ignorer que ladite signification était effectuée par le Tribunal, ne se sont manifestés auprès de ce dernier soit pour faire état de leur défaut de compréhension de cette même requête en raison de la langue dans laquelle elle était rédigée, soit pour faire valoir que celle-ci n’était pas conforme aux prescriptions de l’article 45, paragraphe 1, sous a), du règlement de procédure.

29      De plus, il s’avère que l’anglais employé dans la requête est également la langue employée dans la convention de subvention et celle devant être employée, en vertu de l’article 4 de cette convention, pour les communications entre la requérante et Revoind Industriale di Pindaru Gelu ainsi que pour la rédaction des rapports devant être remis par la seconde à la première.

30      Dès lors, il ne saurait être considéré que Revoind Industriale di Pindaru Gelu n’a pas été en mesure de comprendre, à tout le moins, l’objet de la requête qui lui avait été signifiée par l’entremise de son représentant.

31      Par ailleurs, il convient de relever que, conformément à l’article 45, paragraphe 1, sous b), du règlement de procédure, Revoind Industriale di Pindaru Gelu avait la faculté de souscrire à l’emploi d’une langue autre que celle déterminée en application du point a) de ce paragraphe.

32      Enfin, au regard des antécédents du litige rappelés aux points 2 à 13 ci-dessus, correspondant à la description des faits réalisée par la requérante dans le cadre de la requête et étayée par les pièces du dossier, le recours n’est pas non plus manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

33      Il s’ensuit que Revoind Industriale di Pindaru Gelu doit être condamnée à rembourser à la requérante la somme de 359 913,75 euros, majorée des intérêts de retard au taux de 3,5 % l’an – c’est-à-dire 0,00 % majoré de 3,5 points, taux qui correspond à des intérêts de retard s’élevant à 34,51 euros par jour – à compter du 31 janvier 2017 et jusqu’à la date du paiement intégral de la dette.

 Sur les dépens

34      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Revoind Industriale di Pindaru Gelu ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Revoind Industriale di Pindaru Gelu Sas est condamnée à verser à l’entreprise commune Clean Sky 2 la somme de 359 913,75 euros, majorée des intérêts de retard au taux de 3,5 % l’an, à compter du 31 janvier 2017 et jusqu’à la date du paiement intégral de la dette.

2)      Revoind Industriale di Pindaru Gelu est condamnée à supporter les dépens.

Svenningsen

Barents

Mac Eochaidh

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 octobre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.