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CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. Yves Bot

présentées le 5 septembre 2013 (1)

Affaire C‑388/12

Comune di Ancona

contre

Regione Marche

[demande de décision préjudicielle formée par le Tribunale amministrativo regionale per le Marche (Italie)]

«Fonds structurels – Participation financière desdits fonds – Critères d’éligibilité des dépenses – Principe de compatibilité de l’opération avec le droit de l’Union au sens de l’article 12 du règlement (CE) no 1260/1999 – Principe de pérennité de l’opération au sens de l’article 30, paragraphe 4, du règlement (CE) no 1260/1999 – Notion de ‘modification importante’ d’une opération – Attribution d’un contrat de concession sans publicité ni mise en concurrence préalables – Corrections financières au sens de l’article 39 du règlement (CE) no 1260/1999»





1.        Par le présent renvoi préjudiciel, le Tribunale amministrativo regionale per le Marche (Italie) s’interroge sur la portée des règles gouvernant l’éligibilité d’un projet à un financement européen énoncées dans le cadre du règlement (CE) nº 1260/1999 du Conseil, du 21 juin 1999, portant dispositions générales sur les Fonds structurels (2).

2.        En particulier, la Cour est invitée à préciser le sens et la portée des principes de compatibilité et de pérennité du projet avec le droit de l’Union énoncés aux articles 12 et 30 du règlement.

3.        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le Comune di Ancona, qui est le bénéficiaire final d’une subvention versée par le Fonds européen de développement régional (FEDER), à la Regione Marche, qui est l’autorité en charge de gérer et de contrôler au niveau régional l’utilisation de cette subvention. La Regione Marche a, en effet, décidé de retirer et de recouvrer les concours financiers versés au Comune di Ancona pour la réalisation d’une cale de halage et l’achat d’une grue sur porteur en raison des irrégularités constatées dans le cadre de la gestion de cette infrastructure portuaire (3). En particulier, il est reproché au Comune di Ancona d’avoir concédé la gestion de ladite infrastructure à un prestataire extérieur sans que soit organisée une mise en concurrence préalable.

I –    Le droit de l’Union

4.        Le FEDER constitue l’un des quatre fonds à finalité structurelle mis en place par la Commission européenne afin de renforcer la cohésion économique, sociale et territoriale dans l’Union européenne, conformément à l’objectif visé à l’article 174 TFUE. Ce fonds contribue essentiellement à réduire les disparités économiques, sociales et territoriales qui se sont créées en particulier dans les régions en retard de développement, celles en reconversion économique et en difficultés structurelles (4).

5.        Le FEDER est issu du budget européen, dont la mise en œuvre relève de la responsabilité de la Commission. Ce budget étant très encadré et limité, le Conseil de l’Union européenne a souhaité, à travers les règles de mise en œuvre qu’il a définies, pouvoir vérifier que ce fonds est utilisé de manière régulière et à bon escient. À cette fin, pour s’assurer de la bonne utilisation dudit fonds, la Commission n’intervient qu’en remboursement de dépenses qui ont été au préalable réalisées dans le cadre de projets, justifiées par les porteurs de ces projets et contrôlées par les autorités nationales compétentes, ce qui crée, pour les bénéficiaires, des obligations renforcées en termes de suivi et de justification des réalisations effectuées et des dépenses encourues.

6.        Chaque opération doit respecter des principes communs d’éligibilité (5).

7.        Parmi ceux-ci figure le principe de compatibilité énoncé comme suit à l’article 12 du règlement:

«Les opérations faisant l’objet d’un financement par les Fonds […] doivent être conformes aux dispositions du traité et des actes arrêtées en vertu de celui-ci, ainsi qu’aux politiques et actions communautaires, y compris celles concernant les règles de concurrence, la passation des marchés publics […]» (6).

8.        Par ailleurs, l’éligibilité d’une opération à un financement européen doit répondre au principe de pérennité visé à l’article 30, paragraphe 4, du règlement (7). Cette disposition est libellée comme suit:

«Les États membres s’assurent que la participation des Fonds reste acquise à une opération uniquement si celle-ci ne connaît pas, dans un délai de cinq ans à compter de la décision de l’autorité nationale compétente ou de l’autorité de gestion sur la participation des Fonds, de modification importante:

a)      affectant sa nature ou ses conditions de mise en œuvre ou procurant un avantage indu à une entreprise ou à une collectivité publique

et

b)      résultant soit d’un changement dans la nature de la propriété d’une infrastructure, soit de l’arrêt ou du changement de localisation d’une activité productive.

Les États membres informent la Commission de toute modification de ce type; s’il y a une telle modification les dispositions de l’article 39 s’appliquent.»

9.        L’article 39, paragraphe 1, du règlement dispose ce qui suit:

«Il incombe en premier lieu aux États membres de poursuivre les irrégularités et d’agir lorsqu[e] est constatée une modification importante qui affecte la nature ou les conditions de mise en œuvre ou de contrôle d’une intervention, et d’effectuer les corrections financières nécessaires.

Les États membres procèdent aux corrections financières requises en liaison avec l’irrégularité individuelle ou systémique. Les corrections auxquelles procède l’État membre consistent en une suppression totale ou partielle de la participation communautaire. […]»

II – Le litige au principal

10.      La Regione Marche, qui est l’autorité de gestion du document unique de programmation (ci-après le «DOCUP») pour les interventions structurelles de l’Union dans cette région, a publié un appel à différents projets d’infrastructure dans les zones portuaires locales pour la période de programmation 2002-2006.

11.      Répondant à cet appel, le Comune di Ancona a présenté une demande de financement pour trois projets, à savoir la réalisation d’une cale de halage, l’achat d’une grue sur porteur et la réalisation de travaux d’aménagement. Ces trois projets ont été favorablement accueillis.

12.      À la suite des travaux de réalisation de la cale de halage et après l’installation de la grue sur porteur, le Comune di Ancona, en tant qu’autorité bénéficiaire du financement en cause, a interpellé la Regione Marche sur la possibilité de concéder à un tiers la gestion de l’ouvrage et du service. La Regione Marche a estimé que rien ne s’y opposait, tout en rappelant la nécessité de respecter la réglementation en vigueur en matière d’attribution de concession de services publics (8).

13.      Le Comune di Ancona a confié la gestion de la cale de halage à la Cooperativa Pescatori e Motopescherecci di Ancona arl (ci-après la «coopérative»). Il ressort de la décision de renvoi que le contrat de concession serait conçu de telle manière que ni le Comune di Ancona ni le concessionnaire ne peuvent dégager de bénéfices quant à la gestion de la cale de halage. En outre, le concessionnaire serait tenu de respecter la législation de l’Union applicable et se verrait dans l’impossibilité de modifier les conditions de mise en œuvre de l’opération. Enfin, le contrat de concession prévoirait que l’ouvrage reste la propriété du Comune di Ancona.

14.      Néanmoins, la Regione Marche a constaté un certain nombre d’irrégularités dans la gestion de la cale de halage à la suite d’un contrôle effectué par la Guardia di Finanza au mois de juin 2010:

–        premièrement et à titre principal, le Comune di Ancona aurait concédé la gestion de l’ouvrage sans recourir à une procédure d’appel d’offres public, ce qui constituerait une méconnaissance des règles relatives aux procédures de passation des marchés publics et justifierait le retrait total du financement;

–        deuxièmement, une partie de l’ouvrage (le déshuileur et l’une des deux rampes) resterait inutilisée, ce qui justifierait un retrait partiel de 325 000 euros sur les fonds octroyés au titre de l’appel à projets de 2002, et

–        troisièmement, la cale de halage serait également utilisée par des bateaux de plaisance dans une proportion estimée à 18 %. Ce motif justifierait un retrait partiel de 39 000 euros sur les fonds octroyés au titre de l’appel à projets de 2006.

15.      C’est sur le fondement de ces constatations que la Regione Marche a ordonné, par décret du 1er juillet 2011, le retrait et le recouvrement du financement accordé au Comune di Ancona. Ce dernier a alors introduit un recours en annulation contre cette décision devant la juridiction de renvoi.

16.      À l’appui de son recours, le Comune di Ancona a fait valoir les moyens suivants:

–        premièrement, il estime que l’absence de mise en concurrence ne constituerait pas une cause de déchéance du concours. En effet, le Comune di Ancona soutient que l’obligation de respecter la procédure d’appel d’offres n’avait été expressément prévue que pour la phase d’attribution des travaux et non pour la phase de gestion de la cale de halage. Il indique également que les autres conditions visées à l’article 30 du règlement ne sont pas réunies, dans la mesure où l’ouvrage est toujours resté sa propriété et où la destination de celui-ci n’a pas été modifiée;

–        deuxièmement, le Comune di Ancona soutient qu’il n’était pas nécessaire de procéder à un appel d’offres pour attribuer la gestion de l’infrastructure, dans la mesure où il n’existait aucun autre opérateur intéressé par cette concession;

–        troisièmement, le Comune di Ancona estime que le décret du 1er juillet 2011 porte atteinte à sa confiance légitime, dans la mesure où la Regione Marche n’aurait jamais adressé de griefs contre lui, alors qu’elle était informée de l’intention du Comune di Ancona d’attribuer la gestion de la cale de halage à un tiers;

–        quatrièmement, il soutient que le retrait partiel de 39 000 euros sur les fonds octroyés au titre de l’appel à projets de 2006 est illégal au motif que le pourcentage de 18 % a été fixé arbitrairement et que l’utilisation de la cale de halage par des bateaux de plaisance ne serait pas contraire à la philosophie du FEDER, le secteur de la navigation de plaisance étant un secteur économique voisin de celui de la pêche, et

–        cinquièmement, le Comune di Ancona estime que la Regione Marche n’a pas motivé le décret du 1er juillet 2011 et, en particulier, n’a pas apprécié les conséquences du retrait de ce financement, violant ainsi les règles relatives au pouvoir de l’administration de retirer, de suspendre ou de modifier ses propres actes.

III – Les questions préjudicielles

17.      En raison de ses doutes quant à l’interprétation à retenir de l’article 30, paragraphe 4, du règlement, le Tribunale amministrativo regionale per le Marche, saisi du litige au principal, a décidé de surseoir à statuer et a adressé à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

1)      L’article 30, paragraphe 4, du règlement doit-il être interprété en ce sens que, pour pouvoir apprécier si l’octroi de la concession ne génère pas de recettes substantielles pour le concédant ou d’avantage indu pour le concessionnaire, il faut d’abord avoir vérifié si l’ouvrage a subi une modification importante?

2)      En cas de réponse affirmative à la première question, qu’entend-on par «modification importante», à savoir la norme ne vise-t-elle qu’une modification physique – en ce sens que l’ouvrage réalisé n’est pas conforme à celui qui était prévu dans le projet admis au financement – ou vise-t-elle aussi une modification fonctionnelle et, dans ce cas, y a-t-il «modification importante» lorsque l’ouvrage est utilisé «aussi» – mais non principalement – pour des activités autres que celles qui étaient prévues dans l’appel à projets ou dans la demande de participation à celui-ci?

3)      En cas de réponse négative à la première question, l’article 30, paragraphe 4, du règlement, dans le cas où le financement public serait utilisé pour exécuter des ouvrages susceptibles de faire l’objet d’une gestion présentant un intérêt économique, s’applique-t-il à la seule phase de la réalisation de l’ouvrage ou l’obligation de respecter les règles en matière d’appel d’offres subsiste-t-elle pour ce qui concerne l’octroi d’une concession de gestion?

4)      L’article 30, paragraphe 4, du règlement doit-il être interprété en ce sens que la vérification du fait que la concession de la gestion à un tiers ne génère pas de rentrées nettes importantes ni ne procure d’avantage indu à une entreprise ou à une collectivité publique se situe logiquement et juridiquement en aval de la question préjudicielle (à savoir l’obligation de respecter les procédures d’appel d’offres) ou l’existence de l’obligation de mettre en œuvre une procédure de mise en concurrence doit-elle aussi être vérifiée en tenant compte du régime concret de la relation de concession?

18.      Des observations écrites et orales ont été fournies par le Comune di Ancona ainsi que par le gouvernement portugais et la Commission.

IV – Notre analyse

A –    L’objet des questions

19.      Les questions que nous pose la juridiction de renvoi portent sur l’interprétation de l’article 30, paragraphe 4, du règlement, lequel énonce un principe fondamental de la mise en œuvre des Fonds structurels européens, à savoir le principe de pérennité de l’opération cofinancée.

20.      En vertu de ce principe, les fonds affectés à une opération ne seront définitivement acquis à cette opération que si celle-ci ne connaît pas de modification importante dans un délai de cinq ans à compter de la décision de l’autorité nationale compétente ou de l’autorité de gestion sur la participation de ces fonds. Si les États membres constatent une telle modification, ces derniers sont alors tenus de mettre en œuvre les corrections financières nécessaires, conformément à l’article 39, paragraphe 1, du règlement.

21.      Au regard de ces dispositions législatives, la juridiction de renvoi est appelée à déterminer si l’opération de réalisation d’une cale de halage par le Comune di Ancona, lequel a bénéficié du soutien du FEDER, doit être regardée, dans les circonstances de l’affaire au principal, comme ayant subi une «modification importante» au sens de l’article 30, paragraphe 4, du règlement. En effet, il est constant entre les parties que le Comune di Ancona a concédé la gestion de la cale de halage à un prestataire extérieur sans recourir au préalable à une procédure de mise en concurrence. Par conséquent, deux questions se posent. Premièrement, la concession en cause a-t-elle entraîné une «modification importante» de l’opération au sens de l’article 30, paragraphe 4, du règlement? Deuxièmement, la violation des règles relatives à l’attribution des contrats de concession entraîne-t-elle des conséquences quant au financement européen?

22.      Pour répondre à ces questions, nous pensons qu’il est nécessaire de prendre en considération d’autres normes de droit que celles expressément visées par le Tribunale amministrativo regionale per le Marche dans sa décision de renvoi. Si celui-ci axe l’ensemble de ses questions sur l’interprétation de l’article 30, paragraphe 4, du règlement, nous sommes d’avis qu’il faut, en revanche, évoquer l’article 12 du règlement relatif au principe de compatibilité de l’opération avec le droit de l’Union.

23.      Nous estimons également qu’il est nécessaire de reformuler les questions posées par la juridiction de renvoi dans la mesure où celles-ci sont parfois, et à notre sens, formulées de manière ambiguë (9).

24.      Au vu de ces éléments, nous proposons donc d’examiner ensemble les première et deuxième questions ainsi que la première partie de la troisième question (10). En effet, ces questions portent toutes sur l’interprétation de la notion de «modification importante» d’une opération au sens de l’article 30, paragraphe 4, du règlement et s’inscrivent dans le cadre d’une situation où la gestion de l’opération cofinancée est déléguée à un prestataire extérieur.

25.      Ensuite, nous traiterons la seconde partie de la troisième question. En effet, celle-ci concerne davantage la portée du principe de compatibilité de l’opération avec le droit de l’Union énoncée à l’article 12 du règlement. La juridiction de renvoi cherche à savoir si le respect de ce principe, et en particulier l’obligation de procéder à un appel d’offres, s’impose au bénéficiaire des fonds lorsque celui-ci, agissant comme pouvoir adjudicateur, attribue un contrat de concession relatif à la gestion d’un service cofinancé par les Fonds structurels.

26.      Enfin, nous examinerons la quatrième question relative, à notre sens, aux tempéraments que nous pouvons apporter au respect de l’obligation de transparence. La juridiction de renvoi demande, en effet, si le respect de cette obligation s’impose dans une situation où la concession en cause ne permet de dégager aucun bénéfice et où il n’existe qu’un seul opérateur économique intéressé et susceptible de prendre en charge la gestion du service.

27.      Au vu de ces éléments, nous proposons donc à la Cour de reformuler les questions posées par le Tribunale amministrativo regionale per le Marche comme suit:

1)      Au sens de l’article 30, paragraphe 4, du règlement:

a)      L’appréciation relative à l’existence d’une modification importante concerne-t-elle seulement la phase de la réalisation de l’ouvrage ou couvre-t-elle également la phase de gestion de celui-ci?

b)      La notion de modification importante de l’opération recouvre-t-elle seulement les modifications physiques ou matérielles de l’ouvrage réalisé ou englobe-t-elle également les modifications de type fonctionnel, telles que l’utilisation de l’ouvrage à des fins autres que celles prévues originairement?

c)      L’autorité nationale compétente doit-elle, au préalable, vérifier l’existence d’une modification importante de l’opération avant d’apprécier l’existence d’un avantage indu au bénéfice du concédant ou du concessionnaire?

2)      Le principe de compatibilité de l’opération avec le droit de l’Union énoncé à l’article 12 du règlement, et en particulier l’obligation de respecter les règles en matière d’appel d’offres qui en découle, implique-t-il que le bénéficiaire des fonds procède à une publicité et à une mise en concurrence préalables lorsque celui-ci, agissant comme pouvoir adjudicateur, attribue la concession d’un service cofinancé par les Fonds structurels à un prestataire extérieur?

3)      Dans des circonstances telles que celles du litige au principal, le principe de compatibilité de l’opération avec le droit de l’Union énoncé à l’article 12 du règlement, et en particulier l’obligation de respecter les règles en matière d’appel d’offres, s’oppose-t-il à l’attribution directe par un pouvoir adjudicateur d’une concession lorsque le service en cause ne permet de dégager aucun bénéfice conformément aux dispositions du contrat de concession et qu’il n’existe, dans le secteur considéré, qu’un seul opérateur économique intéressé et susceptible de prendre en charge la gestion du service?

B –    Sur la première question, relative au sens et à la portée de la notion de «modification importante» de l’opération au sens de l’article 30, paragraphe 4, du règlement

28.      La première question, telle que nous l’avons reformulée, regroupe plusieurs interrogations relatives à la portée de l’article 30, paragraphe 4, du règlement et au sens que recouvre la notion de modification importante d’une opération.

29.      Si la réponse à ces interrogations se dégage des termes de cette disposition ainsi que de l’économie dans laquelle celle-ci s’insère, elle s’impose surtout compte tenu des objectifs que le législateur de l’Union entend poursuivre.

30.      Nous rappelons que, aux termes de l’article 30, paragraphe 4, du règlement:

«[…] la participation des Fonds reste acquise à une opération uniquement si celle-ci ne connaît pas, dans un délai de cinq ans à compter de la décision de l’autorité nationale compétente ou de l’autorité de gestion sur la participation des Fonds, de modification importante:

a)      affectant sa nature ou ses conditions de mise en œuvre ou procurant un avantage indu à une entreprise ou à une collectivité publique

et

b)      résultant soit d’un changement dans la nature de la propriété d’une infrastructure, soit de l’arrêt ou du changement de localisation d’une activité productive.

[…]» (11).

31.      L’article 30, paragraphe 4, du règlement énonce un principe fondamental de la mise en œuvre des Fonds structurels, à savoir le principe de pérennité des projets et des actions réalisés par le bénéficiaire des fonds.

32.      En vertu de ce principe, les États membres doivent veiller à ce que les investissements que réalise l’Union dans les entreprises et les infrastructures régionales soient efficaces, employés à bon escient et puissent être amortis sur une durée suffisamment longue (12). Par conséquent, ils doivent s’assurer, par un contrôle qui doit, à notre sens, être particulièrement strict, que le bénéficiaire des fonds n’apporte pas de modifications à l’opération qui soient susceptibles de la dénaturer, de la détourner des objectifs initialement visés dans le programme opérationnel et dans le DOCUP ou encore de constituer un détournement de fonds (13).

33.      Le législateur de l’Union tend donc à garantir que, au cours des cinq années suivant la décision d’approbation du financement, chaque projet et chaque dépense cofinancés par les Fonds structurels continuent de répondre aux principes d’éligibilité matérielle et géographique visés, notamment, à l’article 30, paragraphe 1, du règlement (14) ainsi qu’aux objectifs de cohésion économique et sociale visés par le financement européen.

34.      Pour autant, le législateur de l’Union n’entend pas couvrir toutes les modifications dont une opération peut faire l’objet au cours de sa réalisation. En effet, celle-ci peut connaître des évolutions imprévues, liées, par exemple, au contexte socio-économique, ainsi que des incidents d’exécution qui sont inévitables dans les investissements de longue durée. Or, il n’est pas question de paralyser la réalisation de l’opération et l’action des autorités en exigeant le contrôle de toutes les modifications, même les plus mineures. Le législateur de l’Union ne vise donc que les modifications substantielles de l’opération. Au sens de l’article 30, paragraphe 4, du règlement, l’importance de ces modifications s’apprécie au regard des conséquences que celles-ci entraînent sur l’éligibilité de l’opération au financement.

35.      En effet, à l’article 30, paragraphe 4, sous a), du règlement, le législateur de l’Union vise les modifications substantielles qui altèrent la nature de l’opération ou qui affectent ses conditions de mise en œuvre ou bien encore qui procurent un avantage indu à la collectivité publique ou à l’entreprise. Il est évident que de telles circonstances modifient substantiellement la réalisation du projet par rapport à ce qui était prévu et sont susceptibles de remettre en cause l’éligibilité même de l’opération à un financement européen.

36.      En outre, à l’article 30, paragraphe 4, sous b), du règlement, le législateur de l’Union circonscrit le cercle de ces modifications à celles qui ont pour origine soit un changement dans la nature de la propriété de l’infrastructure, soit l’arrêt ou un changement de localisation de l’activité productive.

37.      Ces dispositions énoncent très clairement les éléments constitutifs d’une modification importante de l’opération et, ainsi qu’il ressort de l’emploi de la conjonction de coordination «et», les conditions qu’elles énoncent respectivement sont cumulatives.

38.      Ces éléments étant posés, il convient, à présent, de répondre à chacune des interrogations de la juridiction de renvoi.

39.      En premier lieu, nous pensons que le contrôle que l’État membre est tenu d’exercer au titre de l’article 30, paragraphe 4, du règlement doit porter non seulement sur la phase de la réalisation de l’ouvrage, mais également sur les conditions dans lesquelles celui-ci est géré et utilisé.

40.      Nous sommes donc en désaccord avec la position que la Commission a exprimée, à cet égard, lors de l’audience.

41.      En effet, même si le financement européen ne devait couvrir que la réalisation de travaux, nous pensons que l’interdiction énoncée dans le cadre de l’article 30, paragraphe 4, du règlement a un champ d’application beaucoup plus large et s’étend aux conditions de gestion et d’utilisation de l’infrastructure en cause.

42.      Cette interprétation s’impose au titre du principe de pérennité, qui, en soi, serait privé d’effet utile si son application était limitée à la seule phase de la réalisation de travaux.

43.      Elle s’impose également au titre des objectifs que le législateur de l’Union entend poursuivre.

44.      En effet, l’Union ne finance pas seulement la construction d’un ouvrage, même le plus ambitieux, elle subventionne une opération sur la base d’un objectif défini et de long terme. La gestion de cette opération doit permettre de remédier aux problèmes socio-économiques structurels d’un territoire, en créant, par exemple, des emplois lorsque le taux de chômage est supérieur à la moyenne de l’Union, en concourant à l’innovation dans les secteurs en restructuration ou bien encore en participant à la protection de l’environnement dans les zones particulièrement dégradées. Or, ces objectifs ne sont réalisables que si le financement européen et le contrôle qui s’y attache portent sur l’intégralité des actes et des dépenses liés à la réalisation de l’opération, laquelle inclut nécessairement les modalités de mise en œuvre et de gestion de celle-ci. C’est également la seule façon d’assurer l’efficacité du financement en évitant le détournement des fonds au profit d’un projet qui ne participerait plus aux objectifs du FEDER, en raison des modifications affectant sa mise en œuvre ou sa gestion, telle que la vente à un opérateur privé.

45.      Par ailleurs, cette interprétation est confortée par les termes de l’article 30, paragraphe 4, du règlement.

46.      D’une part, le législateur de l’Union vise les modifications dont une opération peut faire l’objet «dans un délai de cinq ans» à compter de la décision d’octroi du financement. Cela implique nécessairement que les modifications visées concernent non seulement la phase de réalisation de l’ouvrage, mais également ses modalités de mise en œuvre et de gestion. D’autre part, le législateur de l’Union se réfère expressément, à l’article 30, paragraphe 4, sous a), du règlement, aux modifications susceptibles d’affecter la «nature» ou les «conditions de mise en œuvre» de l’opération, ce qui suppose un champ d’application matériel extrêmement large.

47.      Dans ces conditions, le contrôle que l’autorité nationale compétente doit mettre en œuvre au titre de l’article 30, paragraphe 4, du règlement doit porter non seulement sur la réalité et la conformité physique de l’opération par rapport au projet, mais également sur le respect des modalités de mise en œuvre et de gestion comme décrites dans le contrat de financement.

48.      Dans la ligne de ce raisonnement, nous estimons que le législateur de l’Union n’entend donc pas viser les seules modifications matérielles ou techniques affectant, par exemple, la construction d’une infrastructure, mais également toutes celles relatives à son fonctionnement (15).

49.      La notion de modification doit être entendue au sens large et recouvrir tous les types de modifications dont une opération peut faire l’objet au cours de sa réalisation.

50.      Celles-ci peuvent donc être de nature matérielle ou technique, le bénéficiaire réalisant, par exemple, l’opération selon un échéancier autre que celui prévu initialement ou choisissant des matériaux ou des prestations différents de ceux visés dans le cadre du contrat de financement. Les modifications peuvent aussi être de nature financière, le bénéficiaire n’engageant pas les dépenses prévues ou réduisant le nombre de créations d’emplois et les frais de personnel qui s’y rattachent. Elles peuvent aussi être de nature fonctionnelle, le bénéficiaire utilisant l’ouvrage à des fins autres que celles prévues originairement, telle que dans l’affaire au principal.

51.      Enfin, les termes et l’articulation de l’article 30, paragraphe 4, du règlement nous permettent de répondre à la dernière interrogation de la juridiction de renvoi.

52.      Celle-ci cherche à savoir si l’autorité nationale compétente est, au préalable, tenue de vérifier l’existence d’une modification importante de l’opération en cause avant d’examiner si l’octroi de la concession génère des avantages indus pour le concédant ou le concessionnaire.

53.      L’octroi d’un avantage indu peut effectivement découler d’une modification importante de l’opération, tenant, par exemple, à un élargissement du périmètre des activités offert par le bénéficiaire. Pour autant, au sens de l’article 30, paragraphe 4, du règlement, le contrôle relatif à l’existence d’un avantage indu ne dépend pas de la constatation préalable d’une modification importante de l’opération. L’existence d’un tel avantage est, au contraire, un élément constitutif de la modification importante de l’opération.

54.      L’autorité nationale de contrôle n’est donc pas tenue de vérifier si l’opération a subi une modification importante pour apprécier l’existence d’un avantage indu au profit du concédant ou du concessionnaire. Ainsi, il lui suffit de constater l’existence d’un tel avantage et de vérifier que celui-ci trouve son origine dans l’un des motifs exposés à l’article 30, paragraphe 4, sous b), du règlement pour conclure à une modification importante de l’opération.

55.      L’application des principes que nous venons de dégager à l’affaire au principal pose, à notre niveau, un certain nombre de difficultés compte tenu du peu d’éléments dont nous disposons. Par ailleurs, l’audience a soulevé un certain nombre de doutes que nous ne sommes pas en mesure de dissiper. Il appartiendra donc à la juridiction nationale compétente de vérifier, conformément aux principes dégagés et au vu de l’ensemble des éléments du dossier, si le bénéficiaire des fonds, à savoir le Comune di Ancona, n’a pas modifié d’une manière contraire à l’article 30, paragraphe 4, du règlement la nature et les conditions de mise en œuvre de l’opération cofinancée par le FEDER.

56.      Dans l’affaire au principal, il est constant que le Comune di Ancona a concédé la gestion de la cale de halage à un prestataire extérieur dans des circonstances qui non seulement restent floues, mais semblent également contraires à la légalité. Nous savons que ce mode de gestion n’était pas expressément prévu dans les termes du contrat de financement, mais que la Regione Marche, en tant qu’autorité de gestion du DOCUP, a donné son accord. Nous savons également que cette gestion a été concédée à la coopérative à titre provisoire (douze mois) et en l’absence de procédure d’appel d’offres. À l’époque, le Comune di Ancona a justifié cette décision par l’existence d’une urgence particulière tenant au risque de détérioration des infrastructures. Nous constatons, néanmoins, que le provisoire est devenu définitif, puisque, après huit ans d’exploitation, la gestion de la cale de halage relève encore de la responsabilité de la coopérative.

57.      Il est également admis que la cale de halage réalisée par le Comune di Ancona est utilisée par des bateaux de plaisance dans une proportion estimée à 18 %, alors qu’une telle utilisation n’était pas visée dans le cadre du contrat de financement de 2006.

58.      Il appartiendra à la juridiction nationale compétente de se demander si ces modifications sont d’une intensité telle qu’elles ont altéré l’éligibilité de l’opération au financement européen au sens de l’article 30, paragraphe 4, du règlement.

59.      Nous souhaitons, néanmoins, formuler les observations suivantes.

60.      En ce qui concerne les conditions fixées à l’article 30, paragraphe 4, sous a), du règlement, il nous semble que le contrat conclu entre le Comune di Ancona et la coopérative limite l’incidence de la concession sur les conditions de mise en œuvre et d’utilisation de la cale de halage ainsi que sur les bénéfices dégagés dans le cadre de celle-ci.

61.      Il ressort de la décision de renvoi que le contrat de concession serait conçu de telle manière que ni le Comune di Ancona ni le concessionnaire ne peuvent dégager de bénéfices quant à la gestion de la cale de halage. En ce qui concerne les tarifs de la prestation, ceux-ci semblent être alignés sur les tarifs les plus bas pratiqués dans les ports de la Regione Marche et ne couvriraient que les coûts d’exploitation de la cale. S’agissant de la redevance annuelle versée par le concessionnaire, celle-ci serait proportionnelle aux frais exposés par le Comune di Ancona pour réaliser les travaux et calculée de manière à ne générer de recettes nettes importantes ni pour le concédant ni pour le concessionnaire (16). En outre, en vertu du contrat de concession, le concessionnaire serait tenu de respecter la législation de l’Union applicable, de maintenir le caractère public et la destination de l’ouvrage et d’en permettre l’utilisation sur demande par tout navire de pêche et devrait également présenter chaque semestre un compte-rendu détaillé de la gestion, démontrant le respect des articles 29 et 30 du règlement. Par ailleurs, celui-ci se verrait dans l’impossibilité de modifier les conditions de mise en œuvre de l’opération et d’exercer une activité lucrative.

62.      Cela étant dit, nous pensons, néanmoins, que le juge national devra être attentif aux avantages dont la coopérative a pu indirectement bénéficier en raison de l’absence d’une procédure d’appel d’offres et du renouvellement tacite de la concession depuis plus de huit ans.

63.      En ce qui concerne, à présent, l’ouverture de la cale de halage aux bateaux de plaisance, il est possible qu’une telle initiative réponde à un souci de bonne gestion financière. Le juge national devra, néanmoins, s’assurer que cette activité fait l’objet d’une comptabilité distincte et reste dans des proportions raisonnables. En effet, il n’est pas exclu que l’élargissement de ce champ d’activité puisse affecter la nature ainsi que les modalités de mise en œuvre de l’opération. Il peut également générer des recettes qui n’étaient pas prévues initialement dans le cadre du contrat de financement. À cet égard, il est intéressant de relever que, dans le cadre de l’appel à projets de 2006 (17), les actes et les dépenses attachés à l’utilisation de la cale de halage pour les bateaux de plaisance sont exclus du financement européen. L’appel à projets de 2006 prévoit expressément que, lorsque l’infrastructure financée est au service d’autres secteurs, le bénéficiaire des fonds est tenu de distinguer les coûts imputables au secteur de la pêche et ceux relevant des autres secteurs d’activités, seules les dépenses engagées dans le cadre du secteur de la pêche, lesquelles doivent constituer au moins 50 % de l’activité, étant financées.

64.      En ce qui concerne les conditions énoncées à l’article 30, paragraphe 4, sous b), du règlement, seul le motif lié à un changement de la nature de la propriété est susceptible de soulever des difficultés, car nous pouvons écarter d’emblée les motifs liés à l’arrêt ou à la délocalisation de l’activité productive. Certes, le contrat de concession semble stipuler que l’ouvrage reste la propriété du Comune di Ancona. Pour autant, il existe différentes manières d’exercer les prérogatives attachées au droit de propriété. Or, si le Comune di Ancona a acquis la propriété des infrastructures en cause grâce, en partie, au financement européen, le droit attaché à cette propriété doit, à notre sens, s’exercer conformément à l’utilité sociale recherchée par le FEDER. Il nous semble, par conséquent, que le juge national devra apprécier la manière dont le Comune di Ancona exerce les prérogatives qui s’attachent à son droit de propriété en s’assurant que les objectifs poursuivis sont bien les mêmes que ceux visés dans le cadre du contrat de financement.

65.      Au vu de l’ensemble de ces éléments, nous estimons, par conséquent, que l’article 30, paragraphe 4, du règlement doit être interprété en ce sens que:

–        le contrôle relatif à l’existence d’une modification importante de l’opération porte sur l’intégralité des actes liés à la réalisation de l’opération, laquelle inclut nécessairement la réalisation des travaux ainsi que les modalités de mise en œuvre et de gestion de cette opération;

–        la notion de modification de l’opération recouvre toutes les modifications dont une opération peut faire l’objet au cours de sa réalisation, qu’elles soient de nature matérielle, technique, financière ou bien encore fonctionnelle, et

–        l’autorité nationale de contrôle n’est pas tenue de vérifier si l’opération a subi une modification importante afin d’apprécier l’existence d’un avantage indu au profit de la collectivité publique ou de l’entreprise, l’existence d’un tel avantage étant un élément constitutif d’une modification importante.

C –    Sur les deuxième et troisième questions, relatives à la portée du principe de compatibilité de l’opération avec le droit de l’Union

66.      Par ses deuxième et troisième questions, la juridiction de renvoi demande, en substance, à la Cour si le principe de compatibilité de l’opération avec le droit de l’Union énoncé à l’article 12 du règlement, et en particulier l’obligation de respecter les règles en matière d’appel d’offres, implique que le bénéficiaire des fonds, agissant comme pouvoir adjudicateur, respecte l’obligation de transparence qui en découle lorsqu’il attribue un contrat de concession relatif à la gestion d’un service cofinancé par les Fonds structurels.

67.      Pour répondre à ces questions, il convient, tout d’abord, de déterminer, dans le cadre du règlement, la portée du principe de compatibilité de l’opération avec le droit de l’Union, et en particulier de l’obligation de transparence qui en découle.

68.      Il y a lieu, tout d’abord, de rappeler que le principe de compatibilité de l’opération avec le droit de l’Union est un principe fondamental gouvernant l’éligibilité de l’opération à un financement européen.

69.      Ce principe est énoncé à l’article 12 du règlement, lequel est inséré dans le titre I du règlement, intitulé «Principes généraux».

70.      Il est retranscrit à l’article 11 de la convention type d’attribution du FEDER (18) et, dans la mesure où il constitue un élément clé d’une demande de subvention, dans tous les guides de renseignements destinés aux porteurs de projets (19) ainsi que dans l’ensemble des conventions de financement conclues avec le bénéficiaire final des fonds. Ledit principe figure également dans les réglementations nationales et, le cas échéant, régionales, comme cela ressort de l’article 5 de la loi régionale no 14 (legge regionale n. 14), du 2 octobre 2006 (20).

71.      Conformément à l’article 12 du règlement (21), chaque projet faisant l’objet d’un financement par les Fonds structurels et donc chaque dépense qui s’y rattache doivent être conformes à la législation de l’Union et être compatibles avec les politiques et les actions engagées par le législateur de l’Union. Ce principe de compatibilité tend à empêcher que l’Union ne finance des projets qui contreviennent aux dispositions des traités et aux politiques défendues par le législateur de l’Union.

72.      Le législateur de l’Union met l’accent, en particulier, sur le respect des règles de concurrence, des règles relatives à la passation des marchés publics et de celles tendant à assurer la promotion de l’égalité entre les hommes et les femmes ainsi que la protection de l’environnement.

73.      Nous pensons que le législateur de l’Union exige du bénéficiaire des fonds qu’il respecte ces obligations pendant toute la durée de vie de l’opération. En effet, c’est par une expression très large qu’il vise la conformité au droit de l’Union «[d]es opérations faisant l’objet d’un financement». Or, la conception de l’ouvrage, la réalisation de travaux de construction ou de rénovation, l’achat de matériaux ou de fournitures, l’organisation et la gestion du service y afférent, le recrutement ou bien encore les qualifications du personnel participent à la même opération bénéficiant du cofinancement.

74.      Cette interprétation s’impose afin de garantir l’effet utile de l’article 12 du règlement.

75.      En effet, comment assurer la promotion de l’égalité entre les hommes et les femmes visée à l’article 23 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne si le principe de compatibilité ne s’impose pas aux conditions d’emploi, de travail et de rémunération prévues dans le cadre de l’opération? En outre, comment garantir la protection de l’environnement au sens de l’article 191 TFUE si nous excluons du champ d’application de l’article 12 du règlement les dispositions relatives au traitement des déchets ou aux méthodes de production de l’entreprise?

76.      Nous sommes donc d’avis que le bénéficiaire final des fonds, agissant comme pouvoir adjudicateur, est tenu de respecter les règles de concurrence ainsi que les règles relatives aux procédures de passation des marchés publics lorsqu’il décide de recourir à un prestataire extérieur, que ce soit pour la réalisation de travaux, pour l’achat de fournitures ou bien encore pour la gestion d’un service (22).

77.      Qu’en est-il lorsque le bénéficiaire final des fonds décide d’attribuer une concession pour la gestion d’un service cofinancé?

78.      Si l’article 12 du règlement vise expressément le respect des règles relatives à la passation des marchés publics, cela ne signifie pas pour autant que le respect des règles relatives à l’attribution des contrats de concession en est exclu.

79.      D’une part, cette disposition impose expressément le respect des règles de concurrence, ce qui implique pour le pouvoir adjudicateur de procéder à un appel d’offres, que ce soit dans le domaine des marchés publics ou dans le cadre de l’attribution d’une concession de services.

80.      D’autre part, s’il est vrai que, en l’état actuel du droit de l’Union, les contrats de concession de services ne sont régis par aucune réglementation dérivée (23), il n’en reste pas moins que, comme tout acte étatique fixant les conditions auxquelles une prestation d’activités économiques est subordonnée, l’octroi d’une concession doit respecter les principes consacrés par le traité et se soumettre aux exigences qui en découlent, telles qu’elles ont été précisées par la jurisprudence de la Cour.

81.      Ainsi, il ressort d’une jurisprudence constante que les autorités publiques qui concluent de tels contrats sont tenues de respecter les principes de la liberté d’établissement et de la libre prestation de services respectivement énoncés aux articles 49 TFUE et 56 TFUE ainsi que l’obligation de transparence qui en découle (24).

82.      L’obligation de transparence constitue une expression concrète et spécifique du principe d’égalité de traitement. Ce principe constitue un principe fondamental du droit de l’Union (25) dont le respect s’impose aux États membres dès lors qu’ils agissent dans le champ d’application du droit de l’Union (26).

83.      L’obligation de transparence qui incombe aux autorités publiques lorsqu’elles concluent un contrat de concession implique que soit garanti, en faveur de tous les soumissionnaires potentiels, un degré de publicité adéquat de la procédure d’attribution (27). Cela doit permettre une ouverture de la concession de services à la concurrence, que ce soit à l’échelle locale, nationale ou européenne, les entreprises situées dans d’autres États membres étant alors en mesure de manifester leur intérêt. Cette obligation doit également permettre de garantir une égalité de traitement entre tous les soumissionnaires et, notamment, une sélection transparente du candidat, l’objectif étant de prévenir non seulement le favoritisme, mais également la corruption et l’arbitraire dans le cadre de l’attribution de la concession.

84.      Au vu de ces éléments, nous sommes donc d’avis que le principe de compatibilité de l’opération avec le droit de l’Union énoncé à l’article 12 du règlement implique que le bénéficiaire des fonds, agissant comme pouvoir adjudicateur, respecte l’obligation de transparence ainsi que les obligations de publicité et de mise en concurrence qui en découlent, préalablement à l’attribution d’un contrat de concession relatif à la gestion d’un service cofinancé par les Fonds structurels.

85.      Dans l’affaire au principal, nous sommes donc enclin à penser que l’attribution directe de la concession par le Comune di Ancona à la coopérative, sans appel d’offres ni mise en concurrence préalables est constitutive d’une violation des règles et des principes susmentionnés.

86.      Dans sa décision, la juridiction de renvoi demande, néanmoins, à la Cour si le Comune di Ancona peut légitimement se dispenser de procéder à un appel d’offres, dans la mesure où la concession de la cale de halage ne permet de dégager aucun bénéfice et où il n’existe, dans le secteur considéré, qu’un seul opérateur économique intéressé et susceptible de prendre en charge la gestion du service.

87.      Pour répondre à cette dernière question, il importe d’examiner les situations dans lesquelles la Cour et le législateur de l’Union ont introduit quelques tempéraments au respect de l’obligation de transparence.

88.      En premier lieu, il ressort d’une jurisprudence constante que l’obligation de transparence s’applique lorsque la concession de services est susceptible d’intéresser une entreprise située dans un État membre autre que celui dans lequel la concession est attribuée (28). L’obligation de transparence n’implique donc pas nécessairement une obligation de procéder à un appel d’offres lorsqu’il est démontré, sur la base de circonstances objectives, que la concession n’est pas susceptible d’intéresser les entreprises situées dans un autre État membre, ces dernières ayant néanmoins été informées et mises en mesure de manifester leur intérêt. Dans une telle hypothèse, la Cour estime que les effets sur les libertés fondamentales concernées seraient trop aléatoires et trop indirects pour pouvoir conclure à une éventuelle violation du traité (29).

89.      En vertu de cette jurisprudence, il appartient donc aux autorités nationales compétentes de s’assurer que la procédure d’attribution en question, sans nécessairement impliquer une obligation de procéder à un appel d’offres, peut permettre aux entreprises du secteur d’avoir accès aux informations adéquates relatives à la concession et de manifester leur intérêt si elles le souhaitent. Conformément à ladite jurisprudence, il leur incombe également d’examiner s’il existe des circonstances objectives, telles qu’un enjeu économique réduit, permettant de soutenir que les entreprises situées dans les autres États membres ne seraient pas intéressées.

90.      En second lieu, il faut évoquer les textes que le législateur de l’Union a adoptés dans le domaine des marchés publics et des concessions de services.

91.      S’agissant des marchés publics de services, il ressort de l’article 31, point 1, de la directive 2004/18 que le pouvoir adjudicateur peut attribuer un marché sans la publication d’un avis de marché et sans mise en concurrence préalables lorsque aucune offre ou aucune offre appropriée n’a été déposée en réponse à une procédure ouverte ou restreinte ou lorsque, pour des raisons techniques, le marché ne peut être confié qu’à un opérateur déterminé (30).

92.      S’agissant des concessions de services, la Commission introduit une dérogation à l’obligation de publication et de mise en concurrence préalables dans sa proposition de directive susmentionnée. Ainsi, aux termes de l’article 26, paragraphe 5, sous b), de cette proposition, le pouvoir adjudicateur n’est pas tenu de publier un avis de concession lorsque les services ne peuvent être fournis que par un opérateur économique particulier en raison de l’absence de concurrence pour des raisons techniques et lorsqu’il n’existe aucune alternative ou aucun substitut raisonnable et que l’absence de concurrence ne résulte pas d’une restriction artificielle des paramètres de l’attribution de la concession.

93.      Ainsi qu’il ressort du considérant 19 de ladite proposition, la Commission vise les situations dans lesquelles il est clair, dès le départ, qu’une publication de l’avis de concession ne susciterait pas davantage de concurrence, notamment parce qu’il n’existe objectivement qu’un seul opérateur économique capable d’exploiter la concession. Pour autant, la Commission précise que l’attribution d’une concession à un opérateur économique sans publication ne peut se justifier que dans une situation d’exclusivité objective, c’est-à-dire lorsque l’exclusivité n’a pas été créée par le pouvoir adjudicateur lui-même en vue de cette attribution et qu’il apparaît, à l’issue d’une évaluation approfondie, qu’il n’existe pas de substituts adéquats.

94.      Dans le cadre de l’affaire au principal, nous pensons que ces textes doivent être lus à la lumière des contraintes découlant de l’intervention des Fonds structurels. En effet, dans la mesure où la concession en cause concerne un service cofinancé par le FEDER, il convient de tenir compte des obligations incombant au pouvoir adjudicateur quant au choix du concessionnaire.

95.      Il ressort des pièces du dossier (31) que le financement en question doit contribuer à la réalisation de l’objectif no 2, lequel vise à soutenir la reconversion économique et sociale des zones en difficulté structurelle, et en particulier des zones en crise dépendant de la pêche, comme la zone portuaire du Comune di Ancona (32). Ces dernières sont définies comme étant les zones côtières dont la part des emplois du secteur de la pêche dans l’emploi total atteint un niveau significatif et qui, confrontées à des problèmes socio-économiques structurels liés à la restructuration du secteur de la pêche, souffrent d’une diminution significative du nombre d’emplois dans ce secteur (33).

96.      Dans l’affaire au principal, le financement en question doit donc permettre non seulement de moderniser les infrastructures portuaires et de développer les activités de production et de commercialisation des produits de la mer, mais également de stimuler l’économie locale et la compétitivité régionale en mettant l’accent sur l’emploi dans la région. Il ressort d’ailleurs clairement des termes de l’appel à projets de 2006 que la priorité a été donnée aux projets qui présentent le meilleur rapport entre les investissements réalisés et la création de nouveaux emplois dans la région (34). Le périmètre de l’opération que cofinance le FEDER se situe donc à l’échelle communale et régionale. Dans ces conditions, nous pensons que le cercle des entreprises susceptibles de prendre en charge la gestion de la cale de halage se réduit donc d’autant et doit, pour répondre aux priorités et aux critères d’éligibilité définis dans le cadre du programme opérationnel et du DOCUP, se concentrer à l’échelle de la région. L’avis de concession doit donc tenir compte de cette spécificité et le choix du concessionnaire dépendre des particularités locales du marché concerné de façon à préserver les objectifs visés par le FEDER.

97.      C’est au vu de ces éléments que nous invitons la juridiction nationale compétente à apprécier si, compte tenu des circonstances de l’affaire au principal, le Comune di Ancona pouvait légitimement se dispenser de procéder à un appel d’offres préalablement à l’attribution de la concession en cause. Dans la mesure où cette dispense constitue une dérogation à l’obligation de transparence que le législateur de l’Union n’a pas encore encadrée, sa mise en œuvre doit faire l’objet d’un contrôle particulièrement strict de la part du juge national.

98.      Premièrement, celui-ci doit vérifier que la procédure répond à un minimum de transparence qui, sans nécessairement impliquer une obligation de procéder à un appel d’offres, a pu permettre aux entreprises du secteur de prendre connaissance du projet de concession et de manifester leur intérêt si elles l’avaient souhaité.

99.      Deuxièmement, le juge national doit examiner si l’absence d’appel d’offres peut être justifiée en raison de circonstances objectives liées à la nature de la concession et des compétences techniques requises, au nombre et à la localisation des prestataires susceptibles d’y répondre, ainsi que des circonstances entourant la gestion du service, et en particulier des contraintes découlant de l’intervention du FEDER.

100. En ce qui concerne la transparence de la procédure, nous pensons que celle-ci ne répond pas au minimum requis. Les éléments d’ordre factuel du dossier tendent à démontrer les circonstances relativement floues dans lesquelles cette concession a été accordée. Ils appellent de la part du juge national un contrôle particulièrement étroit si nous voulons éviter que des pratiques locales, telles que celles en cause au principal, ne mettent en péril les financements européens.

101. En l’espèce, aucun élément du dossier ne démontre que cette attribution par voie négociée est la résultante d’une consultation préalable des différents opérateurs économiques du secteur. En réalité, il semble qu’aucune démarche n’ait été entreprise pour dénombrer et informer les entreprises susceptibles d’être intéressées par la gestion de l’infrastructure, que ce soit au niveau local, régional ou bien encore national. Par ailleurs, les motifs invoqués par le Comune di Ancona pour justifier l’absence de procédure d’appel d’offres et le caractère provisoire de la concession divergent. Dans sa délibération no 192, du 19 avril 2005, le Comune di Ancona invoque l’urgence tenant au risque de détérioration des infrastructures (35). Lors de l’audience, celui-ci se fonde sur l’absence de répertoire des entreprises du secteur. Dans ces conditions, il nous semble évidemment difficile de partager l’affirmation selon laquelle il n’existait aucun autre opérateur économique intéressé et capable de gérer la cale de halage et d’y voir une circonstance objective de nature à dispenser le Comune di Ancona de procéder à un appel d’offres.

102. Certes, la gestion de la cale de halage nécessite des compétences techniques particulières, le Comune di Ancona insistant d’ailleurs sur l’expérience requise pour gérer cette infrastructure dans des conditions d’efficacité et de sécurité (36). Il est également vrai que le secteur considéré est caractérisé par un faible degré de concurrence, puisque la quasi-totalité des entreprises pratiquant la pêche dans la circonscription maritime d’Ancône seraient regroupées au sein de la coopérative. Pour autant, cela ne dispense pas le Comune di Ancona de s’adresser aux quelques entreprises qui ne sont pas membres de la coopérative pour leur faire connaître son intention d’attribuer une concession et pour qu’elles puissent éventuellement communiquer leurs offres.

103. En ce qui concerne l’existence de circonstances objectives, nous ne pensons pas que l’absence de bénéfices dégagés dans le cadre de la concession soit de nature à dispenser le pouvoir adjudicateur de procéder à un appel d’offres préalablement à l’attribution de la concession.

104. En effet, la concession de services implique en soi des recettes limitées. Ce contrat est un mode de gestion déléguée d’un service public, par laquelle la personne publique confie à un prestataire extérieur la gestion d’une activité d’intérêt général. Certes, le service concédé doit être organisé pour permettre la couverture de ses coûts réels, le concessionnaire percevant une redevance versée par les usagers du service. Néanmoins, le concessionnaire exploite le service à ses frais et prend en charge les risques d’exploitation y afférents. Les activités d’intérêt général étant susceptibles de soulever des difficultés de gestion et de rentabilité, la concession implique toujours le transfert au concessionnaire d’un risque économique, avec la possibilité qu’il ne recouvre pas les investissements effectués et les coûts supportés lors de l’exploitation des travaux ou des services effectués (37).

105. En outre, nous estimons que l’enjeu économique du contrat de concession ne se limite pas aux bénéfices dégagés dans le cadre du service concédé. En effet, si les recettes sont limitées, il n’en reste pas moins que le contrat de concession peut présenter un enjeu économique important compte tenu de la nature et de l’objet même de la concession. La concession en cause, par exemple, concerne la gestion d’une infrastructure indispensable à l’activité portuaire, localisée dans un port relativement important de la mer Adriatique. Par conséquent, l’octroi d’une telle concession peut, à notre sens, représenter un enjeu économique majeur susceptible d’intéresser des entreprises établies dans d’autres États membres.

106. Dans ces conditions, il nous semble que l’absence de bénéfices dégagés dans le cadre de la concession ne peut, à elle seule, justifier l’absence d’une procédure d’appel d’offres.

107. Au vu de l’ensemble de ces éléments et compte tenu des circonstances particulièrement floues dans lesquelles la concession de la cale de halage a été accordée, nous avons le sentiment que l’attribution directe de la concession par le Comune di Ancona à la coopérative n’est pas conforme aux exigences de transparence.

108. Si la juridiction nationale compétente devait partager ce point de vue, il conviendrait alors de constater que le Comune di Ancona a manqué aux obligations qui lui incombent au titre de l’article 12 du règlement en ne respectant pas la législation de l’Union applicable.

109. Il appartiendrait alors à l’autorité nationale de contrôle de procéder aux corrections financières requises au titre de l’article 39, paragraphe 1, du règlement (38).

110. En effet, nous rappelons que, aux termes de cette disposition, les États membres sont tenus de poursuivre les irrégularités relevées dans le cadre de leur contrôle lorsqu’ils constatent une modification importante affectant la nature du financement européen ou les conditions de mise en œuvre ou le contrôle de celui-ci. L’objectif des corrections financières est de mettre un terme à la «chasse aux subventions» en «[rétablissant] une situation où 100 % des dépenses faisant l’objet d’une demande de cofinancement des Fonds structurels soit en conformité avec la réglementation nationale et communautaire applicable en la matière» (39). Les États membres sont donc tenus de supprimer tout ou partie du financement européen lorsqu’ils constatent une irrégularité dans l’application de la réglementation de l’Union (40), la compatibilité de l’opération avec le droit de l’Union étant, nous l’avons vu, une condition d’éligibilité de l’opération au financement. Si, en l’état actuel du droit de l’Union, les contrats de concession de services ne sont régis par aucune réglementation dérivée, nous avons vu, néanmoins, que les autorités publiques qui concluent de tels contrats sont tenues de respecter les règles fondamentales du traité FUE, notamment les articles 49 TFUE et 56 TFUE ainsi que l’obligation de transparence qui en découle (41).

V –    Conclusion

111. Eu égard aux considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de répondre de la manière suivante au Tribunale amministrativo regionale per le Marche:

1)      L’article 30, paragraphe 4, du règlement (CE) nº 1260/1999 du Conseil, du 21 juin 1999, portant dispositions générales sur les Fonds structurels, doit être interprété en ce sens que:

–        le contrôle relatif à l’existence d’une modification importante de l’opération porte sur l’intégralité des actes liés à la réalisation de l’opération, laquelle inclut nécessairement la réalisation des travaux ainsi que les modalités de mise en œuvre et de gestion de cette opération;

–        la notion de modification de l’opération recouvre toutes les modifications dont une opération peut faire l’objet au cours de sa réalisation, qu’elles soient de nature matérielle, technique, financière ou bien encore fonctionnelle, et

–        l’autorité nationale de contrôle n’est pas tenue de vérifier si l’opération a subi une modification importante afin d’apprécier l’existence d’un avantage indu au profit de la collectivité publique ou de l’entreprise, l’existence d’un tel avantage étant un élément constitutif d’une modification importante.

2)      Le principe de compatibilité de l’opération avec le droit de l’Union énoncé à l’article 12 du règlement no 1260/1999 implique que le bénéficiaire final des fonds, agissant comme pouvoir adjudicateur, respecte les obligations de transparence ainsi que les obligations de publicité et de mise en concurrence qui en découlent lorsque celui-ci attribue une concession relative à la gestion d’un service cofinancé par les Fonds structurels.

3)      Dans des circonstances telles que celles du litige au principal où le bénéficiaire des fonds, agissant comme pouvoir adjudicateur, a concédé la gestion d’un service cofinancé par les Fonds structurels sans procéder à un appel d’offres préalable, il appartient à la juridiction nationale compétente d’examiner, d’une part, si cette procédure a pu permettre aux entreprises du secteur concerné d’être informées du projet de concession et de manifester leur intérêt et, d’autre part, si l’absence d’appel d’offres est justifiée en raison de circonstances objectives liées à la nature de la concession et des compétences techniques requises, au nombre et à la localisation des prestataires susceptibles d’y répondre ainsi qu’aux contraintes découlant de l’intervention du Fonds européen de développement régional.


1 –      Langue originale: le français.


2 – JO L 161, p. 1, ci-après le «règlement».


3 –      Une cale de halage désigne un plan incliné sur lequel on hale un bateau pour l’entretenir ou le réparer.


4 –      Considérant 1 du règlement.


5 – Au sens de l’article 9, sous k), du règlement, il faut entendre par «opération» «tout projet ou action réalisé par les bénéficiaires finals des interventions».


6 –      Voir, également, considérant 30 du règlement.


7 –      Voir, également, considérant 41 du règlement, dans lequel le législateur de l’Union précise que, «pour assurer l’efficacité et un effet durable de l’action des Fonds, une aide des Fonds ne devrait rester acquise, en tout ou en partie, à une opération qu’à la condition que ni sa nature, ni ses conditions de mise en œuvre ne connaissent de modification importante, qui détournerait l’opération aidée de son objectif initial».


8 – L’article 1er, paragraphe 4, de la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services (JO L 134, p. 114), définit la notion de concession de services. Aux termes de cette disposition, il s’agit d’un «contrat présentant les mêmes caractéristiques qu’un marché public de services, à l’exception du fait que la contrepartie de la prestation des services consiste soit uniquement dans le droit d’exploiter le service, soit dans ce droit assorti d’un prix».


9 – Nous rappelons qu’il ressort d’une jurisprudence constante que, dans le cadre de la procédure de coopération avec les juridictions nationales instituée à l’article 267 TFUE, il appartient à la Cour de donner au juge de renvoi une réponse utile qui lui permette de trancher le litige dont il est saisi. Dans cette optique, la Cour peut reformuler la question qui lui est posée. Elle peut également prendre en considération des normes de droit de l’Union auxquelles le juge national n’a pas fait référence dans ses questions préjudicielles dans la mesure où celles-ci sont nécessaires aux fins de l’examen du litige au principal (voir, notamment, arrêt du 8 décembre 2011, Banco Bilbao Vizcaya Argentaria, C‑157/10, Rec. p. I‑13023, points 18 à 20 et jurisprudence citée).


10 – La troisième question est formulée de manière ambiguë. Nous comprenons qu’elle comporte deux interrogations, la seconde étant, à notre sens, davantage en lien avec la quatrième question que nous pose la juridiction de renvoi.


11 –      Il est intéressant de relever que les règles fixées à l’article 30, paragraphe 4, du règlement figurent désormais à l’article 57, paragraphe 1, du règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil, du 11 juillet 2006, portant dispositions générales sur le Fonds européen de développement régional, le Fonds social européen et le Fonds de cohésion, et abrogeant le règlement (CE) no 1260/1999 (JO L 210, p. 25), tel que modifié par le règlement (UE) no 539/2010 du Parlement européen et du Conseil, du 16 juin 2010 (JO L 158, p. 1), intitulé «Pérennité des opérations». Cette disposition est libellée comme suit (italique ajouté par nos soins):


      «L’État membre ou l’autorité de gestion s’assure que la contribution des Fonds reste acquise à l’opération comprenant un investissement dans une infrastructure ou un investissement productif uniquement si, dans un délai de cinq ans à compter de son achèvement, l’opération cofinancée ne connaît pas de modification importante causée par un changement dans la nature de la propriété d’un élément d’infrastructure ou l’arrêt d’une activité de production et affectant sa nature ou les conditions de sa mise en œuvre ou procurant un avantage indu à une entreprise ou à un organisme public.


      […]»


12 –      Voir considérant 41 du règlement.


13 – En effet, en signant le contrat de financement, le bénéficiaire final s’engage à mettre en œuvre son projet tel qu’il est décrit dans les annexes techniques et financières de ce contrat. C’est, en effet, sur cette base que les autorités nationales et celles de l’Union ont évalué l’éligibilité du projet et adopté la décision de financement. Par conséquent, toute dépense déclarée par le porteur du projet dans ses demandes de remboursement ne respectant pas les conditions dudit contrat ne pourra faire l’objet d’un remboursement.


14 –      L’éligibilité matérielle et géographique du projet signifie que l’opération doit être rattachée à un programme opérationnel concernant des zones territoriales spécifiques, qu’elle a été sélectionnée à partir d’une procédure validée et qu’elle contribue aux objectifs de cohésion économique et sociale.


15 –      À cet égard, notons que, dans certaines circonstances, certaines modifications fonctionnelles ne seront possibles qu’après la réalisation de modifications matérielles.


16 –      Il ressort, en outre, de la décision de renvoi que le Comune di Ancona percevrait de la coopérative une redevance, laquelle serait alignée sur celle qu’elle doit elle-même verser à l’autorité portuaire au titre de redevance domaniale.


17 –      Point 3 de la délibération no 44 de la Giunta regionale (deliberazione n. 44 della Giunta regionale), du 13 février 2006.


18 –      L’article 11 de cette convention évoque les irrégularités susceptibles d’aboutir à un reversement partiel ou total de la subvention à l’issue du contrôle et parmi celles-ci figure la violation des obligations européennes.


19 – Voir, par exemple, guide de renseignement d’un dossier de demande de subvention FEDER, disponible sur le site Internet de la région Centre (France) à l’adresse suivante: http://www.europe-centre.eu/fr/53/PO_FEDER_Centre.html.


20 –      Disposizioni sulla partecipazione della Regione Marche al processo normativo comunitario e sulle procedure relative all’attuazione della politiche comunitarie (Bollettino ufficiale della Regione Marche no 99, du 12 octobre 2006).


21 –      Voir, également, considérant 30 du règlement.


22 –      En ce qui concerne le nécessaire respect des procédures de mise en concurrence, celui-ci figure, en outre, au chapitre 8.5, intitulé «Respect des politiques communautaires», du DOCUP pour les interventions structurelles communautaires dans la région des Marches relevant de l’objectif no 2 en Italie, pour les années 2000-2006.


23 –      Le 20 décembre 2011, la Commission a formulé une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur l’attribution de contrats de concession [COM(2011) 897 final]. Voir, également, communication interprétative de la Commission sur les concessions en droit communautaire (JO 2000, C 121, p. 2).


24 – Arrêt du 13 avril 2010, Wall (C‑91/08, Rec. p. I‑2815, point 33 et jurisprudence citée).


25 – Arrêt du 19 octobre 1977, Ruckdeschel e.a. (117/76 et 16/77, Rec. p. 1753, point 7).


26 –      Ce principe exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente, à moins qu’une différenciation ne soit objectivement justifiée [voir, notamment, arrêts du 25 novembre 1986, Klensch e.a. (201/85 et 202/85, Rec. p. 3477, point 9), ainsi que du 12 décembre 2002, Rodríguez Caballero (C‑442/00, Rec. p. I‑11915, point 32 et jurisprudence citée)]. La Cour a eu l’occasion de préciser la portée du principe d’égalité de traitement dans le cadre des marchés publics dans les arrêts du 22 juin 1993, Commission/Danemark (C‑243/89, Rec. p. I‑3353, points 37 à 39), et du 25 avril 1996, Commission/Belgique (C‑87/94, Rec. p. I‑2043, points 51 à 56), ainsi que la portée de l’obligation de transparence dans l’arrêt du 7 décembre 2000, Telaustria et Telefonadress (C‑324/98, Rec. p. I‑10745). Cette jurisprudence a ensuite été transposée aux concessions de services publics dans l’arrêt du 13 octobre 2005, Parking Brixen (C‑458/03, Rec. p. I‑8585, point 48).


27 – Arrêt Wall, précité (point 36 et jurisprudence citée).


28 – Ibidem (point 34 et jurisprudence citée).


29 – Arrêt du 21 juillet 2005, Coname (C‑231/03, Rec. p. I‑7287, points 19 à 21 et jurisprudence citée).


30 –      Il nous semble opportun de nous inspirer des règles énoncées par le législateur de l’Union dans le domaine des marchés publics, puisque ces dernières ont été élaborées à partir des principes même du traité.


31 –      Lettre du Ministero dello Sviluppo economico (ministère du Développement économique), du 21 février 2011.


32 –      Articles 1er, point 2, et 4, paragraphe 1, du règlement.


33 –      Article 4, paragraphe 8, du règlement.


34 –      Point 8 de la délibération no 44 de la Giunta regionale, du 13 février 2006, susmentionnée.


35 –      Pages 2 et 3.


36 –      Délibération no 192 du Comune di Ancona, du 19 avril 2005, susmentionnée.


37 – Arrêt du 26 avril 1994, Commission/Italie (C‑272/91, Rec. p. I‑1409).


38 –      Au point 3.2 de sa décision, la juridiction de renvoi s’interroge sur la nature de la sanction qu’encourt le Comune di Ancona en raison des irrégularités constatées.


39 –      Voir orientations définissant les principes, les critères et les barèmes indicatifs à appliquer par les services de la Commission pour la détermination des corrections financières visées à l’article 39, paragraphe 3, du règlement (CE) no 1260/99 [C(2001) 476].


40 – Voir, également, article 38, paragraphe 1, sous c) et e), du règlement.


41 –      Pour les aider dans cette tâche, la Commission a élaboré des orientations pour la détermination des corrections financières à appliquer aux dépenses cofinancées par les Fonds structurels et le Fonds de cohésion lors du non-respect des règles en matière de marchés publics (COCOF 07/0037/03).