Language of document : ECLI:EU:T:2011:492

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

20 septembre 2011(*)

« Recours en annulation – Police sanitaire – Mise sur le marché des produits biocides – Règlement (CE) n° 1451/2007 – Défaut d’affectation individuelle – Irrecevabilité – Procédure par défaut »

Dans l’affaire T‑120/08,

Arch Chemicals, Inc., établie à Norwalk, Connecticut (États-Unis),

Arch Timber Protection Ltd, établie à Castleford, West Yorkshire (Royaume-Uni),

Rhodia UK Ltd, établie à Watford, Hertfordshire (Royaume-Uni),

Sumitomo Chemical (UK) plc, établie à Londres (Royaume-Uni),

Troy Chemical Co. BV, établie à Vlaardingen (Pays-Bas),

représentées par Mes K. Van Maldegem et C. Mereu, avocats,

parties requérantes,

soutenues par

European Chemical Industry Council (CEFIC), établi à Bruxelles (Belgique), représenté initialement par Mes Y. van Gerven et V. Terrien, puis par Me  van Gerven, avocats,

partie intervenante,

contre

Commission européenne, représentée par M. P. Oliver et Mme E. Kružíková, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de l’article 3, paragraphe 2, de l’article 4, de l’article 7, paragraphe 3, de l’article 14, paragraphe 2, second alinéa, de l’article 15, paragraphe 3, de l’article 17 et de l’annexe II du règlement (CE) nº 1451/2007 de la Commission, du 4 décembre 2007, concernant la seconde phase du programme de travail de dix ans visé à l’article 16, paragraphe 2, de la directive 98/8/CE du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché des produits biocides (JO L 325, p. 3),

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood, président, F. Dehousse et J. Schwarcz (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        En vertu de l’article 16, paragraphe 2, de la directive 98/8/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 1998, concernant la mise sur le marché des produits biocides (JO L 123, p. 1), la Commission des Communautés européennes a été chargée d’entamer un programme de travail de dix ans ayant pour objet l’évaluation de toutes les substances actives incluses dans les produits biocides se trouvant déjà sur le marché à la date du 14 mai 2000 (ci-après « les substances actives existantes »). La première phase de ce programme de travail a été mise en place par le règlement (CE) n° 1896/2000 de la Commission, du 7 septembre 2000, concernant la première phase du programme visé à l’article 16, paragraphe 2, de la directive 98/8 (JO L 228, p. 6).

2        En vertu des articles 3 et 4 du règlement n° 1896/2000, les substances actives existantes devaient être identifiées et celles devant être évaluées en vue de leur éventuelle inscription à l’annexe I, I A ou I B de la directive 98/8 pour un ou plusieurs types de produits devaient être notifiées avant le 28 mars 2002. Ce délai a été prorogé ultérieurement s’agissant de certaines substances.

3        Selon les articles 3 et 4 du règlement n° 1896/2000, l’identification et la notification des substances actives existantes consistent en la communication à la Commission des informations visées respectivement aux annexes I et II dudit règlement et sont à effectuer par les producteurs ou les formulateurs des substances concernées ou par les associations de ceux-ci. La Commission accepte une notification si elle a été effectuée dans le délai prévu et si elle respecte les exigences de l’annexe II du règlement n° 1896/2000, parmi lesquelles figure l’obligation d’associer la substance active existante à un ou à plusieurs des 23 types de produits biocides énumérés à l’annexe V de la directive 98/8. L’acceptation d’une notification donne au notifiant la possibilité de fournir à l’autorité d’un État membre désigné comme rapporteur toutes les données et informations nécessaires à l’évaluation de la substance active existante en vue de son éventuelle inscription à l’annexe I ou I A de la directive 98/8 lors de la seconde phase du programme de travail visé à l’article 16, paragraphe 2, de ladite directive (ci-après le « programme de travail »).

4        En vertu de l’article 5 du règlement n° 1896/2000, les États membres peuvent également identifier, dans un certain délai, des substances actives existantes et manifester leur intérêt pour l’inscription éventuelle à l’annexe I ou I A de la directive 98/8 des substances actives existantes pour lesquelles aucune notification n’avait été acceptée par la Commission jusqu’alors.

5        L’article 6 du règlement n° 1896/2000 prévoit qu’un règlement, mettant en œuvre la seconde phase du programme de travail, contiendra, d’une part, une liste exhaustive des substances actives existantes valablement identifiées ou pour lesquelles des informations équivalentes ont été fournies dans le cadre d’une notification et, d’autre part, une liste exhaustive des substances pour lesquelles la Commission a accepté au moins une notification en vertu de l’article 4 du règlement n° 1896/2000 ou pour lesquelles il y a eu manifestation d’intérêt de la part d’un État membre en vertu de l’article 5 dudit règlement.

6        Les listes en question ont été établies en vertu du règlement (CE) n° 2032/2003 de la Commission, du 4 novembre 2003, concernant la seconde phase du programme de travail et modifiant le règlement n° 1896/2000 (JO L 307, p. 1).

7        Le règlement (CE) n° 1451/2007 de la Commission, du 4 décembre 2007, concernant la seconde phase du programme de travail (JO L 325, p. 3), abroge et remplace le règlement n° 2032/2003.

8        Selon son article 1er, le règlement n° 1451/2007 a pour finalité d’établir les modalités de mise en œuvre du programme de travail pour l’examen systématique de toutes les substances actives existantes.

9        L’annexe I du règlement n° 1451/2007 contient la liste exhaustive des substances actives existantes ayant été identifiées dans le cadre de la première phase du programme de travail. L’annexe II du règlement n° 1451/2007 contient une liste exhaustive des substances actives existantes, chacune associée à un ou à plusieurs types de produits, pour lesquelles soit une notification a été acceptée par la Commission, soit un État membre a manifesté son intérêt en vertu du règlement n° 1896/2000, soit un dossier, qui a été accepté en tant que dossier complet, a été présenté à un des États membres avant le 1er mars 2006.

10      En vertu de l’article 4 du règlement n° 1451/2007, les produits biocides contenant des substances actives ne figurant pas à l’annexe II de ce règlement ni à l’annexe I ou I A de la directive 98/8 ne sont plus mis sur le marché. Il en est de même des produits biocides contenant des substances actives existantes énumérées à l’annexe II du règlement n° 1451/2007, mais pour lesquelles aucune notification n’a été acceptée en association avec eux. En outre, une substance active n’ayant pas fait l’objet d’une identification ne peut être considérée comme substance active existante.

11      L’examen de chaque substance active existante figurant à l’annexe II du règlement n° 1451/2007 pour le ou les types de produits biocides en association avec lesquels elle a été notifiée est effectué par un État membre rapporteur. Selon les articles 7, 8 et 9 du règlement n° 1451/2007, cet examen est effectué sur la base d’un dossier complet satisfaisant aux conditions de l’annexe III dudit règlement. Ce dossier est soumis à l’État membre rapporteur dans un délai spécifié à l’article 9 du même règlement par un ou plusieurs producteurs, formulateurs ou associations ayant présenté une notification acceptée par la Commission ou par un État membre ayant manifesté un intérêt, qui sont désignés, aux fins de la suite de la procédure, comme « participants » par l’article 2 de ce règlement.

12      Afin d’éviter les doubles emplois et de réduire les expériences sur les vertébrés, l’article 8 du règlement n° 1451/2007 prévoit que les participants s’efforcent d’éviter la répétition d’essais sur lesdits animaux et d’établir des dossiers complets collectifs, à défaut de quoi ils sont tenus d’expliquer en détail, dans chaque dossier individuel, les démarches entreprises pour mettre en place une coopération ainsi que les raisons pour lesquelles certains participants sont restés à l’écart. En outre, les États membres rapporteurs sont tenus, en vertu de la même disposition, d’informer les participants de l’existence d’autres participants sollicitant l’examen d’une substance active donnée.

13      Dans le même contexte, l’article 10 du règlement n° 1451/2007 prévoit la possibilité pour un producteur, un formulateur ou une association de rejoindre ou de remplacer un participant à la suite d’un accord avec ce dernier.

14      Par ailleurs, l’article 12 du règlement n° 1451/2007 arrête les conditions dans lesquelles un opérateur, voire un État membre, peut assumer le rôle de participant à la place d’un participant qui s’est retiré unilatéralement.

15      L’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 1451/2007 prévoit qu’une personne autre qu’un participant qui sollicite, conformément à l’article 11 de la directive 98/8, l’inscription à l’annexe I, I A ou I B de ladite directive d’une combinaison entre une substance active et un type de produit figurant à l’annexe II du même règlement peut présenter un dossier complet dans les délais spécifiés à l’article 9 dudit règlement pour cette combinaison substance/type de produit. Il est également précisé que cette possibilité existe sans préjudice d’une éventuelle présentation d’un dossier collectif en vertu de l’article 10 du règlement n° 1451/2007 (voir point 13 ci-dessus).

16      Selon l’article 14 du règlement n° 1451/2007, si l’État membre rapporteur estime que le dossier est complet au sens de l’article 9 du même règlement, il procède à son évaluation conformément à l’article 11, paragraphe 2, de la directive 98/8 et prépare un rapport d’évaluation concluant à une recommandation visant à inscrire ou à ne pas inscrire la substance active existante concernée à l’annexe I, I A ou I B de la directive 98/8. La Commission décide en vertu des procédures décrites à l’article 15 du règlement n° 1451/2007 et aux articles 27 et 28 de la directive 98/8.

 Faits à l’origine du litige

17      Arch Chemicals, Inc., Arch Timber Protection Ltd, Bactria Industriehygiene-Service Verwaltungs GmbH & Co. KG, Rhodia UK Ltd, Sumitomo Chemical (UK) plc et Troy Chemical Co. BV sont des producteurs de substances actives utilisées dans des produits biocides et de produits biocides contenant ces substances.

18      Les requérantes ont notifié à la Commission des substances actives en association avec différents types de produits conformément à l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 1896/2000.

19      Les notifications en question ont été acceptées par la Commission et ces substances figurent à l’annexe II du règlement n° 1451/2007, les requérantes étant ainsi devenues des participants pour chacune des combinaisons substance active/type de produit notifiées.

20      Par requêtes distinctes déposées au greffe du Tribunal le 17 février 2004 et enregistrées sous les numéros T‑75/04 à T‑79/04, les requérantes ont introduit, en vertu de l’article 230 CE, un recours visant à l’annulation de l’article 3 et de l’annexe II, de l’article 4, paragraphe 2, de l’article 5, paragraphe 3, de l’article 10, paragraphe 2, deuxième alinéa, de l’article 11, paragraphe 3, de l’article 13 et de l’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 2032/2003, et à l’indemnisation du préjudice subi à la suite de l’adoption dudit règlement.

21      Par lettres du 13 mars 2008, les requérantes ont demandé, dans les affaires T‑75/04 à T‑79/04, d’adapter leurs conclusions et moyens, à la suite de l’adoption du règlement n° 1451/2007, en supprimant leurs demandes tendant à l’annulation partielle du règlement n° 2032/2003 et en les remplaçant par des demandes d’annulation de l’article 3, paragraphe 2, de l’article 4, de l’article 7, paragraphe 3, de l’article 14, paragraphe 2, second alinéa, de l’article 15, paragraphe 3, de l’article 17 et de l’annexe II du règlement n° 1451/2007 (ci-après les « dispositions litigieuses »).

 Procédure et conclusions des parties

22      Par une requête parvenue au greffe du Tribunal le 6 mars 2008, les requérantes ont introduit le présent recours.

23      Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le présent recours recevable et fondé ou, à titre subsidiaire, joindre au fond les questions relatives à sa recevabilité ou réserver la décision sur la qualité pour agir jusqu’au prononcé de l’arrêt au fond ;

–        annuler les dispositions litigieuses ;

–        constater l’illégalité de l’article 9, sous a), de l’article 10, paragraphe 3, de l’article 11 et de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 98/8 ainsi que de l’article 6, paragraphe 2, du règlement nº 1896/2000 ;

–        condamner la Commission aux dépens.

24      La Commission n’a pas produit de mémoire en défense dans le délai qui lui était imparti. Aucune prorogation de ce délai n’a été demandée.

25      Par actes déposés au greffe du Tribunal, respectivement les 29 mai et 7 octobre 2008, le Conseil de l’Union européenne et le Parlement ont demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la Commission.

26      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 15 juillet 2008, l’European Chemical Industry Council (CEFIC) a demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions des requérantes.

27      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 26 septembre 2008, les requérantes ont demandé au Tribunal, conformément à l’article 122, paragraphe 1, de son règlement de procédure, de leur adjuger leurs conclusions.

28      À la suite de l’empêchement du juge rapporteur initialement désigné, en raison de la cessation de ses fonctions, le président du Tribunal a, par décision du 16 octobre 2009, nommé un nouveau juge rapporteur.

29      En réponse à une question posée par le Tribunal, les requérantes ont fait savoir, par acte déposé au greffe du Tribunal le 30 octobre 2009, qu’elles avaient renoncé à adapter leurs conclusions et moyens dans les affaires T‑75/04 et T-77/09 à T‑79/04.

30      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 30 octobre 2009, Bactria Industriehygiene-Service Verwaltungs s’est désistée de son recours dans la présente affaire. Par ordonnance du président de la septième chambre du Tribunal du 12 janvier 2010, cette requérante a été radiée du registre du Tribunal dans la présente affaire.

31      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la deuxième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

32      Par ordonnance du 14 janvier 2011, le président de la deuxième chambre du Tribunal a admis l’intervention du CEFIC et a ordonné que lui soit communiquée une version confidentielle des actes de procédure signifiés aux parties.

33      En vertu de l’article 122, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, il appartient au Tribunal, avant de rendre un arrêt par défaut, d’examiner la recevabilité du recours et si les conclusions du requérant paraissent fondées.

 En droit

34      L’article 230, quatrième alinéa, CE prévoit que toute personne physique ou morale peut former, dans les mêmes conditions, un recours contre les décisions dont elle est le destinataire et contre les décisions qui, bien que prises sous l’apparence d’un règlement ou d’une décision adressée à une autre personne, la concernent directement et individuellement.

35      Selon une jurisprudence constante, l’objectif de cette disposition est, notamment, d’éviter que, par le simple choix de la forme d’un règlement, les institutions de l’Union puissent exclure le recours d’un particulier contre une décision qui le concerne directement et individuellement et de préciser ainsi que le choix de la forme ne peut changer la nature d’un acte (arrêt de la Cour du 17 juin 1980, Calpak et Società Emiliana Lavorazione Frutta/Commission, 789/79 et 790/79, Rec. p. 1949, point 7 ; ordonnances du Tribunal du 8 juillet 1999, Area Cova e.a./Conseil et Commission, T‑12/96, Rec. p. II‑2301, point 24, et du 12 janvier 2007, SPM/Commission, T‑447/05, Rec. p. II‑1, point 61).

36      En outre, un acte de portée générale ne peut concerner individuellement des personnes physiques ou morales que s’il les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et de ce fait les individualise d’une manière analogue à celle d’un destinataire (voir ordonnance de la Cour du 12 décembre 2003, Bactria/Commission, C‑258/02 P, Rec. p. I‑15105, point 34, et la jurisprudence citée).

37      Un acte a une portée générale s’il s’applique à des situations déterminées objectivement et s’il produit des effets juridiques à l’égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite (arrêts du Tribunal du 11 septembre 2002, Pfizer Animal Health/Conseil, T‑13/99, Rec. p. II‑3305, point 82 ; Alpharma/Conseil, T‑70/99, Rec. p. II‑3495, point 74, et du 3 février 2005, Comafrica et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, T‑139/01, Rec. p. II‑409, point 87).

38      Par ailleurs, lorsque l’acte attaqué affecte un groupe de personnes qui étaient identifiées ou identifiables au moment où cet acte a été pris et en fonction de critères propres aux membres du groupe, ces personnes peuvent être individuellement concernées par cet acte en tant qu’elles font partie d’un cercle restreint d’opérateurs économiques (arrêt de la Cour du 22 juin 2006, Belgique et Forum 187/Commission, C‑182/03 et C‑217/03, Rec. p. I‑5479, point 60).

39      En l’espèce, il y a lieu de rappeler que le règlement n° 1451/2007 a pour objet, selon son article 1er, d’établir les modalités de mise en œuvre du programme de travail pour l’examen systématique de toutes les substances actives existantes. Dans ce contexte, le règlement en question contient notamment des dispositions relatives à l’organisation dudit examen, telles que celles régissant la catégorisation de ces substances ainsi que les responsabilités des États membres rapporteurs s’agissant de la vérification de la complétude des dossiers soumis et de l’évaluation des dossiers au fond (voir points 11 et 16 ci-dessus).

40      Dans ce contexte, il est vrai que, conformément à l’article 6, paragraphe 4, du règlement n° 1896/2000 et à l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 1451/2007, à partir de la date d’entrée en vigueur de ce dernier règlement, seules peuvent être considérées comme « existantes » les substances actives figurant à l’annexe I dudit règlement et que, conformément à l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 1451/2007, seules font l’objet d’un examen sur la base d’un dossier complet les substances actives « existantes » figurant à l’annexe II dudit règlement.

41      Néanmoins, ces circonstances n’ont aucunement pour effet d’individualiser les requérantes en tant que membres d’un cercle restreint d’opérateurs économiques auxquels s’appliqueraient les dispositions du règlement n° 1451/2007, y compris les dispositions litigieuses, et ce pour chacune des raisons qui suivent.

42      À cet égard, il y a lieu de rappeler que les articles 10 et 12 du règlement n° 1451/2007 offrent la possibilité pour un producteur, un formulateur ou une association de rejoindre ou de remplacer un participant dans le cadre d’un accord conclu avec celui-ci ou, en l’absence d’un tel accord, lorsqu’un participant se retire unilatéralement et qu’aucun autre participant n’a sollicité l’examen de la même substance active en combinaison avec le ou les mêmes types de produits (voir points 13 et 14 ci-dessus). Il est même prévu que, dans ce cas, les délais pour la présentation d’un dossier complet peuvent être prolongés.

43      Par ailleurs, l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 1451/2007 prévoit la possibilité pour une personne n’ayant pas présenté une notification acceptée par la Commission de présenter à l’État membre rapporteur un dossier complet aux fins de l’évaluation d’une substance active existante en vue de son inscription à l’annexe I, I A ou I B de la directive 98/8 (voir point 15 ci-dessus).

44      Dans ces conditions, force est de constater que les dispositions du règlement n° 1451/2007 relatives aux substances actives existantes ayant fait l’objet d’une notification en association avec un ou plusieurs types de produits biocides, énoncées de manière générale et établissant les modalités de mise en œuvre de la seconde phase du programme de travail, ne concernent pas uniquement les participants au sens de l’article 2 dudit règlement, mais aussi tout opérateur qui s’associerait à ou remplacerait un participant en vertu des articles 10 et 12 du même règlement ou qui participerait à la procédure d’examen en soumettant un dossier complet à l’État membre rapporteur en vertu de l’article 7, paragraphe 3, de celui-ci.

45      En outre, l’article 4 du règlement n° 1451/2007 concerne notamment les producteurs et formulateurs des produits biocides contenant des substances actives identifiées, mais n’ayant fait l’objet ni d’une notification acceptée par la Commission, ni d’une manifestation d’intérêt de la part d’un État membre, ni d’un dossier, accepté en tant que dossier complet, présenté à un des États membres avant le 1er mars 2006, ainsi que les producteurs et formulateurs des types de produits biocides qui n’ont fait l’objet d’aucune notification acceptée par la Commission en combinaison avec une substance active existante.

46      Il résulte des points 42 à 45 ci-dessus que les dispositions du règlement n° 1451/2007 concernent un nombre indéterminé d’opérateurs économiques qui solliciteraient l’inscription à l’annexe I, I A ou I B de la directive 98/8 d’une substance active existante énumérée à l’annexe II de ce règlement ou qui feraient partie d’un des groupes décrits au point précédent. Les dispositions en question ne concernent donc pas les seuls producteurs, formulateurs ou associations qui ont présenté une notification acceptée par la Commission conformément à l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 1896/2000, ni n’affectent les requérantes de manière particulière en raison de leur appartenance à ce groupe d’opérateurs. Le règlement n° 1451/2007 ne saurait donc être analysé ni comme un faisceau de décisions individuelles ni comme un acte affectant, soit dans son ensemble, soit en ce qui concerne les dispositions litigieuses, les requérantes individuellement (voir, en ce sens, ordonnance Bactria/Commission, point 36 supra, points 34 et 36).

47      Le fait que les participants seraient individuellement identifiés à l’annexe II du règlement n° 1451/2007 en vertu d’une note en bas de page renvoyant à un site Internet sur lequel figureraient leurs noms et coordonnées est sans incidence sur la conclusion formulée au point précédent, une telle identification visant à promouvoir la collaboration entre les participants et la présentation de dossiers communs (voir points 12 et 13 ci-dessus).

48      En outre, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, les articles 3 et 4 du règlement n° 1896/2000 ne leur accordent aucune protection particulière de sorte à les individualiser au regard des dispositions litigieuses ou du règlement n° 1451/2007 dans son ensemble. En effet, l’article 4 du règlement n° 1896/2000, seule disposition pertinente en l’espèce, puisque les requérantes font valoir leur affectation individuelle en tant que participants au sens de l’article 2 du règlement n° 1451/2007, ne fait que fixer la procédure permettant aux opérateurs qui souhaitent demander l’inscription d’une substance active existante à l’annexe I ou I A de la directive 98/8 de soumettre, au moyen d’une notification, les données requises à cet effet. L’article 4 du règlement n° 1896/2000 et, à plus forte raison, l’article 3 de celui-ci n’ont donc ni pour objet ni pour effet d’accorder aux requérantes, en tant que futurs participants, une protection particulière de quelque nature que ce soit ni d’obliger la Commission à tenir compte de cette qualité afin de leur accorder un statut particulier dans le cadre du règlement n° 1451/2007 par rapport aux autres opérateurs envisagés à l’article 7, paragraphe 3, et aux articles 10 et 12 dudit règlement.

49      S’agissant du prétendu statut particulier dont bénéficieraient les requérantes au motif que le règlement n° 1451/2007 aurait été arrêté sur la base des substances actives notifiées et acceptées par la Commission, il convient de relever que le fait pour une personne d’intervenir dans le processus d’adoption d’un acte de l’Union n’est de nature à l’individualiser par rapport à l’acte en cause que dans le cas où des garanties de procédure ont été prévues au profit de cette personne par la réglementation de l’Union. Ainsi, dès lors qu’une disposition de droit de l’Union impose, pour adopter une décision, de suivre une procédure dans le cadre de laquelle une personne physique ou morale peut revendiquer d’éventuels droits, dont celui d’être entendue, la position juridique particulière dont bénéficie celle-ci a pour effet de l’individualiser au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE (ordonnance de la Cour du 17 février 2009, Galileo Lebensmittel/Commission, C‑483/07 P, Rec. p. I‑959, point 53).

50      À cet égard, il suffit de relever que la participation des requérantes au processus d’adoption du règlement n° 1451/2007 ne vise aucunement à faire respecter un droit procédural, par l’exercice duquel elles auraient été susceptibles d’affecter le contenu des dispositions substantielles dudit règlement. En effet, conformément au système mis en place par le règlement n° 1896/2000, les notifications effectuées par les requérantes en vertu de son article 4 ont seulement permis de déterminer, conformément à l’article 6, paragraphe 1, dudit règlement, dans quelle annexe du règlement n° 1451/2007 les substances actives devaient être inscrites et, par conséquent, si une des dispositions de l’article 4 de ce règlement allait s’appliquer à elles ou si, en revanche, elles allaient faire partie des substances actives existantes notifiées au sens de l’article 7 de celui-ci. Dans ces conditions, la participation des requérantes au processus d’adoption du règlement n° 1451/2007 n’est pas de nature à les individualiser au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE.

51      S’agissant des autres garanties procédurales invoquées par les requérantes, il y a lieu de relever que l’article 27 de la directive 98/8 concerne le stade suivant la soumission à la Commission du rapport d’évaluation des substances actives par l’État membre rapporteur. Partant, à supposer que cette disposition accorde des garanties procédurales, ces dernières bénéficient à tout demandeur, c’est-à-dire tant aux participants au sens de l’article 2 du règlement n° 1451/2007 qu’aux autres opérateurs s’étant associés à la procédure en vertu de l’article 7, paragraphe 3, ou des articles 10 et 12 du même règlement.

52      Il en est de même des articles 8 et 13 du règlement n° 1451/2007, qui, outre le fait qu’ils n’accordent pas de garanties procédurales dans le cadre de l’élaboration de ce règlement, s’appliquent, de par leur objet, non seulement aux participants au sens de l’article 2 de ce dernier, mais aussi à tout autre demandeur s’étant associé à la procédure en vertu de l’article 7, paragraphe 3, ou des articles 10 et 12 de celui-ci.

53      Ces appréciations sont également valables au regard de la prétendue affectation individuelle en raison de l’article 12 de la directive 98/8, qui fixe des périodes pendant lesquelles il est interdit aux États membres d’utiliser les informations transmises par le demandeur d’une autorisation de produit biocide au profit d’un deuxième demandeur ou de tout demandeur ultérieur, s’agissant notamment des informations relatives aux substances actives existantes. En effet, cette disposition ne limite pas le droit à la protection des données transmises aux seuls participants au sens de l’article 2 du règlement n° 1451/2007, mais le confère également à tout autre demandeur s’étant associé à la procédure en vertu de l’article 7, paragraphe 3, ou des articles 10 et 12 de celui-ci. Par suite, le droit conféré à l’article 12 de la directive n’individualise pas les requérantes en tant que participants au sens de l’article 2 du règlement n° 1451/2007.

54      S’agissant de l’atteinte portée aux prétendus droits de propriété intellectuelle exclusifs et préexistants des requérantes, il convient de rappeler que le règlement n° 1451/2007 a pour objet d’établir les modalités de mise en œuvre du programme de travail. Dès lors, il n’affecte pas, comme tel, la validité des brevets portant sur les substances actives existantes des requérantes, ni les droits qui en découlent.

55      Même si, comme le soulignent les requérantes, une décision de non-inscription d’une substance active existante à l’une des annexes de la directive 98/8 aurait pour conséquence le retrait du marché de cette substance et affecterait ainsi la valeur d’éventuels droits de propriété intellectuelle, de sorte que les demandeurs et titulaires desdits droits seraient, le cas échéant, individuellement concernés par ladite décision, il n’en demeure pas moins que le règlement n° 1451/2007 ne constitue pas une telle décision.

56      Au surplus, ainsi qu’il résulte de l’article 6, paragraphe 1, sous b), et de l’article 6, paragraphe 2, du règlement n° 1896/2000, lus en combinaison avec l’article 3, paragraphe 2, du règlement n° 1451/2007, tous les producteurs d’une substance active figurant à l’annexe II de ce dernier règlement et tous les formulateurs de produits biocides contenant cette substance active peuvent la mettre sur le marché ou continuer à la commercialiser en tant que telle ou dans des produits biocides, pour le ou les types de produits pour lesquels la Commission a accepté au moins une notification. Or, les notifications des requérantes ont toutes été acceptées par la Commission (voir point 18 ci-dessus), si bien que le règlement n° 1451/2007 n’affecte ni leurs prétendus droits établis ni la pérennité des marchés des produits biocides commercialisés par les requérantes, que lesdites notifications sont supposées garantir.

57      Par conséquent, il y a lieu de rejeter le présent recours comme irrecevable pour défaut d’affectation individuelle des requérantes et, dans ces conditions, de constater qu’il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes d’intervention du Parlement et du Conseil au soutien des conclusions de la Commission.

 Sur les dépens

58      La Commission n’ayant pas répondu à la requête dans les formes et les délais prescrits, il suffit de décider que les requérantes, qui succombent en leurs conclusions, supporteront leurs propres dépens, conformément à l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure.

59      Aux termes de l’article 87, paragraphe 4, troisième alinéa, du règlement de procédure, le Tribunal peut ordonner qu’une partie intervenante autre que celles mentionnées à l’article 87, paragraphe 4, deuxième alinéa, dudit règlement supporte ses propres dépens. En l’espèce, il y a lieu de condamner le CEFIC à supporter ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes d’intervention du Parlement européen et du Conseil de l’Union européenne.

3)      Arch Chemicals, Inc., Arch Timber Protection Ltd, Rhodia UK Ltd, Sumitomo Chemical (UK) plc et Troy Chemical Co. BV supporteront leurs propres dépens.

4)      L’European Chemical Industry Council (CEFIC) supportera ses propres dépens.

Forwood

Dehousse

Schwarcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 septembre 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.