Language of document : ECLI:EU:T:2004:74

Ordonnance du Tribunal

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
15 mars 2004 (1)

Fonds structurels – Cadre communautaire d'appui – Programme opérationnel – Demande de modification – Recours en carence – Prise de position mettant fin à la carence – Non-lieu à statuer

Dans l'affaire T-66/02,

Idiotiko Institouto Epaggelmatikis Katartisis N. Avgerinopoulou Anagnorismenes Technikes Idiotikes Epaggelmatikes Scholes AE, établie à Athènes (Grèce),

Panellinia Enosi Idiotikon Institouton Epaggelmatikis Katartisis, établie à Athènes,

Panellinia Enosi Idiotikis Technikis Epaggelmatikis Ekpaidefsis kai Katartisis, établie à Athènes,

représentées par Mes T. Antoniou et C. Tsiliotis, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme M. Condou-Durande et M. L. Flynn, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours en carence fondé sur l'article 232 CE et visant à constater que la Commission a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du règlement (CE) n° 1260/1999 du Conseil, du 21 juin 1999, portant dispositions générales sur les fonds structurels (JO L 161, p. 1), et du traité CE, en s'abstenant de supprimer la discrimination illégale entre instituts privés et instituts publics de formation professionnelle en Grèce, résultant de ce que seuls ces derniers sont financés par le troisième cadre communautaire d'appui et, en particulier, par le programme opérationnel «Éducation et formation professionnelle initiale»,



LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre)



composé de M. H. Legal, président, Mme V. Tiili et M. M. Vilaras, juges,

greffier: M. H. Jung,

rend la présente



Ordonnance




Antécédents du litige

1
La première requérante, la société anonyme Idiotiko Institouto Epaggelmatikis Katartisis N. Avgerinopoulou Anagnorismenes Technikes Idiotikes Epaggelmatikes Scholes AE, est un institut privé de formation professionnelle en Grèce. Elle est membre de la deuxième requérante, la Panellinia Enosi Idiotikon Institouton Epaggelmatikis Katartisis, association qui regroupe les instituts privés de formation professionnelle en Grèce. La troisième requérante, la Panellinia Enosi Idiotikis Technikis Epaggelmatikis Ekpaidefsis kai Katartisis, est une association regroupant des instituts privés de formation professionnelle technique en Grèce.

2
En Grèce, la participation financière des fonds structurels pour la création et le fonctionnement d’un réseau public d’instituts de formation professionnelle (ci-après les «IEK») a débuté avec l’adoption de la décision 90/203/CEE de la Commission, du 30 mars 1990, concernant l’établissement du cadre communautaire d’appui pour les interventions structurelles communautaires dans les régions grecques concernées par l’objectif nº 1, à savoir la totalité du territoire grec (JO L 106 p. 26). Ce premier cadre communautaire d’appui a été approuvé pour la période allant du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1993.

3
La participation des fonds structurels s’est poursuivie, au cours de la période allant du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1999, par la décision 94/627/CE de la Commission, du 13 juillet 1994, concernant l’établissement du cadre communautaire d’appui pour les interventions structurelles communautaires dans les régions de la Grèce concernées par l’objectif nº 1, à savoir la totalité du territoire (JO L 250, p. 15). Dans le cadre de ce deuxième cadre communautaire d’appui, la Commission a, également, approuvé le programme opérationnel pour l’éducation et la formation professionnelle initiale (EPEAEK I).

4
Le 29 septembre 1999, le gouvernement hellénique a présenté à la Commission un plan de développement régional pour la totalité du pays relevant de l’objectif nº 1, en application de l’article 3, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1260/1999 du Conseil, du 21 juin 1999, portant dispositions générales sur les fonds structurels (JO L 161, p. 1, ci-après le «règlement sur les fonds structurels»).

5
Sur la base de ce plan, présenté par la République hellénique dans le cadre du partenariat défini à l’article 8 du règlement sur les fonds structurels, la Commission a établi, en vertu de l’article 15, paragraphe 4, premier alinéa, dudit règlement, et en accord avec cet État membre, le cadre communautaire d’appui pour les interventions structurelles communautaires en Grèce.

6
Le cadre communautaire d’appui ainsi établi a été approuvé par la décision 2002/322/CE de la Commission, du 28 novembre 2000, portant approbation du cadre communautaire d’appui pour les interventions structurelles communautaires dans les régions relevant de l’objectif nº 1 en Grèce (JO 2002, L 122, p. 7, ci-après le «troisième CCA»), pour la période allant du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2006. Conformément à l’article 2, paragraphe 1, sous a), i), de cette décision, parmi les axes prioritaires retenus pour l’action conjointe des fonds structurels communautaires et de l’État membre concerné figurent le «développement des ressources humaines et [la] promotion de l’emploi».

7
Le 31 mars 2000, le gouvernement hellénique a soumis à la Commission le projet de programme opérationnel intitulé «Éducation et formation professionnelle initiale» (ci-après l’«EPEAEK II»).

8
En application de l’article 15, paragraphe 4, deuxième alinéa, du règlement sur les fonds structurels, la Commission a examiné le contenu de l’EPEAEK II en vue de vérifier sa cohérence avec les objectifs du cadre communautaire d’appui correspondant et sa compatibilité avec les politiques communautaires. Elle a constaté que le projet relevait de l’objectif n° 1, conformément à l’article 3, paragraphe 1, du règlement sur les fonds structurels, et qu’il comportait les objectifs énoncés à l’article 18 dudit règlement et, notamment, une description des axes prioritaires du programme, un plan de financement indicatif précisant, pour chaque axe prioritaire et pour chaque année, le montant de l’enveloppe financière envisagée pour la participation du Fonds social européen et du Fonds européen de développement régional, ainsi que le montant total des financements publics éligibles et des financements privés estimés de l’État membre.

9
Par lettre du 27 février 2001, la deuxième requérante a demandé à la Commission de ne pas approuver l’EPEAEK II.

10
L’EPEAEK II a été approuvé par la décision de la Commission, du 16 mars 2001, portant approbation de l’EPEAEK II, qui s’inscrit dans le troisième CCA, pour les interventions structurelles communautaires dans les régions relevant de l’objectif nº 1 en Grèce pour la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2006 (ci-après la «décision portant approbation de l’EPEAEK II»).

11
Conformément à l’article 2, paragraphe 1, sous a), 2), de cette décision, les axes prioritaires de l’EPEAEK II comprennent la «promotion et [l’]amélioration de l’éducation et de la formation professionnelle initiale dans le cadre de l’apprentissage tout au long de la vie».

12
Parmi les mesures et actions envisagées dans ce cadre par l’EPEAEK II figurent, notamment, les mesures 2.3 (éducation et formation professionnelle initiale) et 2.4 (orientation professionnelle et liaison avec le marché du travail).

13
S’agissant, en particulier, du financement des actions à mener par les IEK en vue de l’amélioration de la formation professionnelle initiale, l’EPEAEK II indique qu’ «une première phase verra le financement des actions des instituts publics de formation professionnelle» (mesure 2.3, point C). Par ailleurs, dans l’optique d’une participation des IEK privés aux projets de formation professionnelle initiale, il prévoit l’élaboration d’une étude qui en déterminera les modalités (mesure 2.3, point D).

14
Par courrier du 26 avril 2001, la Commission, en réponse à la lettre de la deuxième requérante du 27 février 2001, précitée, a indiqué à celle-ci que les interventions communautaires étaient complémentaires de celles menées au niveau national ou visaient à y contribuer. La Commission y ajoutait que, dans le secteur de la formation professionnelle initiale, l’EPEAEK II prévoyait la réalisation d’une étude, dans le cadre de l’évaluation intermédiaire, sur la participation future des IEK privés à des actions cofinancées et qu’il avait été décidé de réduire progressivement l’aide directe aux IEK publics afin de favoriser la transition progressive vers des procédures ouvertes sans pour autant mettre en péril le travail réalisé dans ce domaine. La Commission concluait que l’EPEAEK II était conforme à l’esprit du troisème CCA et allait apporter une contribution importante aux efforts de modernisation du système éducatif entrepris par les autorités helléniques.

15
En mai 2001, les autorités helléniques ont élaboré un complément de programmation au sens de l’article 9 du règlement sur les fonds structurels. Il ressort de ce complément que les personnes morales de droit privé figurent parmi les bénéficiaires finals potentiels tant de la mesure «éducation et formation professionnelle initiale» (mesure 2.3, point F) que de la mesure «orientation professionnelle et liaison avec le marché du travail» (mesure 2.4, point F).

16
Le complément de programmation a été approuvé, après quelques adaptations, modifications et ajouts, par le comité de suivi de l’EPEAEK II lors de sa première réunion du 29 mai 2001 et a été transmis à la Commission pour information, en application de l’article 9, sous m), et de l’article 34, paragraphe 3, du règlement sur les fonds structurels. Au point 5.4 de ses «conclusions-décisions», adoptées le même jour, le comité de suivi a remplacé, pour toutes les mesures, l’expression «bénéficiaires finals potentiels» par l’expression «catégories de bénéficiaires finals» et a indiqué que les personnes morales de droit privé relevaient des catégories de bénéficiaires finals. Toutefois, s’agissant, en particulier, de l’action visant les «autres organismes de formation professionnelle initiale» (action 2.3.3 de la mesure 2.3) soumis à la tutelle d’autres ministères que le ministère de l’Éducation nationale, les personnes morales de droit privé ne figurent pas parmi ces bénéficiaires. Enfin, il a été prévu que, en cas de besoin, d’autres catégories de bénéficiaires finals pouvaient être définies pour chaque mesure, après examen par le service spécial de gestion de l’EPEAEK II.

17
La légalité de l’EPEAEK II, du complément de programmation, de la décision du comité de suivi ainsi que de diverses mesures nationales d’exécution de ces actes a été contestée dans le cadre de plusieurs recours introduits par les requérantes devant le Symvoulio tis Epikrateias (Conseil d’État, Grèce). Ces recours sont actuellement pendants.

18
Par courrier du 17 octobre 2001, parvenu à la Commission le 25 octobre suivant, les requérantes ont adressé à la Commission une invitation à agir, en vertu de l’article 232, deuxième alinéa, première phrase, CE. Dans cette invitation, elles ont demandé à la Commission que:

«1.
elle mette fin à leur exclusion illégale des financements du [troisième CCA] et, que,

2.
s’appuyant sur le partenariat visé à l’article 8, paragraphe 2, du [règlement sur les fonds structurels] qui porte sur la préparation, le financement, le suivi et l’évaluation des interventions, elle intervienne auprès de l’autorité nationale en vue de la modification [de l’EPEAEK II] ainsi que du complément du programme opérationnel de mai 2001, de façon à étendre le cofinancement aux organismes privés de formation professionnelle;

3.
elle modifie la [décision portant approbation de l’EPEAEK II] pour faire bénéficier les organismes privés d’éducation du financement au titre de ce programme […];

4.
elle attire l’attention de l’autorité grecque chargée du suivi sur l’omission illégale commise par cette dernière dans sa décision du 29 mai 2001 en n’incluant pas les organismes privés de formation professionnelle dans le financement;

5.
elle suspende l’application de la décision de participation des fonds à la mise en œuvre [de l’EPEAEK II] jusqu’à l’adoption d’une nouvelle décision portant sur les modalités et le montant du financement».


Procédure

19
Par requête déposée au greffe du Tribunal le 25 février 2002, les requérantes ont introduit le présent recours.

20
Par lettre du directeur général de la direction générale «Emploi et affaires sociales», du 27 février 2002, la Commission a répondu à l’invitation à agir, susvisée. Cette lettre est libellée comme suit:

«[...]

Les fonds structurels, parmi leurs domaines d’intervention en Grèce, ont financé la création et appuyé le fonctionnement d’un important réseau public d’instituts de formation professionnelle (IEK). La participation des fonds structurels dans ce domaine a commencé avec le premier CCA applicable à la Grèce (1989‑1993) et s’est poursuivie avec le deuxième CCA (1994‑1999).

Lors des négociations sur le troisième CCA 2000‑2006, les services de la Commission européenne ont souligné l’importance que revêt l’application progressive des procédures ouvertes pour l’attribution des projets cofinancés par les fonds structurels.

Ainsi, et afin de ne pas compromettre le travail réalisé dans ce secteur, il a été convenu avec les autorités nationales dans le cadre [de l’EPEAEK II] (cf. à ce propos le complément de programmation) de financer de manière dégressive les actions des IEK publics pour atteindre un financement zéro, selon les modalités actuelles, après 2003. À partir de cette date, seulement un certain type, très limité, de projets, tels que des actions innovantes, la formation des enseignants, etc., mis en oeuvre par les IEK publics ou, éventuellement, privés, pourront être cofinancés et en suivant des procédures de sélection ouvertes. Par ailleurs, dans l’optique d’une éventuelle participation des IEK privés à ces projets, il est prévu dans [l’EPEAEK II] l’élaboration d’une étude qui en déterminera les modalités.

Compte tenu de ce qui précède, il est clair que l’objectif des fonds structurels consiste en fait à aider la Grèce à se doter d’un système de formation professionnelle, contribuant à sa promotion et à son amélioration, dans le cadre des politiques actives de l’emploi et en application des lignes directrices de la stratégie européenne de l’emploi.

Après l’adoption [de l’EPEAEK II], proposé par l’État membre, en vertu de l’article 8, paragraphe 3, du règlement sur les fonds structurels, il est prévu que, ‘en application du principe de subsidiarité, la mise en oeuvre des interventions relève de la responsabilité des États membres au niveau territorial approprié en fonction de la situation spécifique de chaque État membre, sans préjudice des compétences de la Commission, en particulier en matière d’exécution du budget général des Communautés européennes’.

En ce qui concerne le caractère d’aide d’État du financement des instituts de formation professionnelle publics, la Commission tient compte du fait que les activités de formation professionnelle de ces instituts sont régies par la loi nº 2009/1992. Ladite loi définit le cadre juridique unique et organisationnel du régime national d’éducation et de formation professionnelle en Grèce. L’article 5 de la loi prévoit que les instituts de formation professionnelle publics sont créés par arrêté conjoint des ministres de l’Éducation et des Finances (et dans certains cas, d’autres ministres également). Tous les instituts de formation professionnelle sont placés sous la tutelle du ministre de l’Éducation. La loi instaure également un organe public (l’organisme d’éducation et de formation professionnelle − OEEK) qui est chargé du contenu, de la programmation et de l’organisation des cours de formation dispensés par les instituts de formation professionnelle: l’OEEK est également chargé de superviser les instituts de formation professionnelle privés.

Il ressort de ce qui précède que les activités des instituts de formation professionnelle publics font partie intégrante du système national grec d’éducation, conformément à la législation grecque, et qu’elles ne peuvent pas être considérées comme des activités économiques lucratives. La Commission estime donc que le financement public de ces activités ne constitue pas une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, comme le confirme l’arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes selon lequel, ‘en maintenant un tel système, l’État n’entend pas s’engager dans des activités rémunérées, mais accomplit sa mission dans les domaines social, culturel et éducatif [...] [Le] système en cause est, en règle générale, financé par le budget public’ [arrêts de la Cour du 27 septembre 1988, Humbel, 263/86, Rec. p. 5365, et du 7 décembre 1993, Wirth, C‑109/92, Rec. p. I‑6447]. En de nombreuses occasions, la Commission a adopté la même position en ce qui concerne l’application des dispositions en matière d’aides d’État au financement public d’instituts relevant du système national d’éducation.

En conclusion et en prenant en considération les éléments susmentionnés, les services de la Commission européenne estiment que l’appui apporté aux IEK publics ne pourrait constituer une distorsion de concurrence et affecter le commerce entre les États membres, et, par conséquent, il ne semble pas revêtir un caractère d’aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité CE.»

21
Par requête déposée au greffe du Tribunal le 29 avril 2002, enregistrée sous le numéro T‑139/02, les requérantes ont introduit un recours en annulation contre la décision de la Commission contenue dans la lettre précitée.

22
Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 4 juin 2002, la Commission a formulé, dans le cadre du présent recours, à titre principal, une demande de non-lieu à statuer et, à titre subsidiaire, a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. Les requérantes ont déposé leurs observations sur la demande de non-lieu à statuer et sur l’exception d’irrecevabilité le 12 août 2002.


Conclusions des parties

23
Dans leur requête, les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal faire droit au recours et déclarer nul le fait que la Commission n’a pas supprimé la distinction illégale entre IEK privés et IEK publics en ce qui concerne le financement par le troisième CCA et, en particulier, par l’EPEAEK II.

24
Dans sa demande de non-lieu à statuer et dans son exception d’irrecevabilité, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

à titre principal, constater le non-lieu à statuer;

à titre subsidiaire, rejeter le recours comme manifestement irrecevable;

condamner les requérantes aux dépens.

25
Dans leurs observations sur la demande de non-lieu à statuer et sur l’exception d’irrecevabilité, les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal:

rejeter la demande de non-lieu à statuer;

rejeter l’exception d’irrecevabilité.


En droit

Arguments des parties

26
À titre principal, la Commission fait valoir que le présent recours est devenu sans objet à la suite de la prise de position contenue dans sa lettre du 27 février 2002. En effet, selon une jurisprudence constante, lorsque la Commission prend position sur les griefs du requérant, même tardivement, l’objet du recours en carence disparaît. En outre, le fait que la position adoptée par l’institution communautaire ne satisfait pas le requérant n’aurait aucune importance, l’article 232 CE visant la carence de l’institution résultant de l’abstention de statuer ou de prendre position et non l’adoption d’un acte différent de celui que le requérant aurait souhaité ou estimerait nécessaire (arrêt du Tribunal du 17 février 1998, Pantochim/Commission, T‑107/96, Rec. p. II‑311, points 28 à 30).

27
À titre subsidiaire, la Commission soutient que le recours doit être rejeté comme manifestement irrecevable au motif que son objet ne correspond pas à celui de l’invitation à agir adressée par les requérantes. D’une part, le présent recours ressemblerait à un recours en annulation et, d’autre part, il ne viserait pas à constater que la Commission s’est abstenue de prendre position sur les demandes particulières formulées dans l’invitation à agir mais à constater qu’elle s’est abstenue de supprimer la distinction prétendument illégale entre IEK publics et IEK privés en ce qui concerne le cofinancement au titre de l’EPEAEK II. Or, cette demande serait large et vague en ce qu’elle porterait sur l’ouverture d’une procédure au titre de l’article 226 CE, ou de l’article 88, paragraphe 2, CE ou, encore, de l’article 86, paragraphe 3, CE. En tout état de cause, les requérantes ne sauraient être considérées comme les destinataires des actes dont elles ont demandé l’adoption par la Commission ni comme étant directement et individuellement concernées par ces actes.

28
Les requérantes, en substance, contestent que la Commission ait statué sur leurs demandes dans sa lettre du 27 février 2002. À cet égard, elles soutiennent que, contrairement à ce qui a été le cas dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Pantochim/Commission, point 26 supra, dans laquelle la Commission avait adopté une décision concrète après l’introduction du recours, dans le cas d’espèce, la question de savoir si la réponse de la Commission contenue dans sa lettre du 27 février 2002 constitue une décision ou une prise de position au sens de l’article 232 CE n’est pas a priori claire.

29
Dans ce contexte, elles font valoir que, dans leur invitation à agir, elles ont formulé des griefs en relation avec des événements postérieurs à la décision portant approbation de l’EPEAEK II, tels que le complément de programmation de mai 2001 et la décision du comité de suivi du 29 mai 2001. La Commission aurait également été invitée à intervenir auprès des autorités nationales en vue de la modification de l’EPEAEK II et du complément de programmation, à signaler au comité de suivi son omission illégale de mentionner les IEK privés dans sa décision du 29 mai 2001 et à surseoir à l’exécution de sa décision portant approbation de l’EPEAEK II jusqu’à l’adoption d’une nouvelle décision sur les modalités et le montant du financement. La Commission n’ayant pas pris position, dans la lettre du 27 février 2002, dans le sens demandé, la carence subsisterait.

30
Les requérantes contestent, également, la position de la Commission relative à l’absence de concordance entre les demandes présentées dans l’invitation à agir et les conclusions du présent recours. Par ailleurs, bien que les mesures réclamées dans l’invitation à agir n’aient pas eu pour destinataires les requérantes mais la République hellénique, elles seraient néanmoins directement et individuellement concernées par ces mesures.

Appréciation du Tribunal

31
Il est de jurisprudence constante que la voie de recours prévue à l’article 232 CE est fondée sur l’idée que l’inaction illégale de l’institution mise en cause permet de saisir la Cour afin que celle‑ci déclare que l’abstention d’agir est contraire au traité, lorsque l’institution concernée n’a pas remédié à cette abstention. Cette déclaration a pour effet, aux termes de l’article 233 CE, que l’institution défenderesse est tenue de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt de la Cour ou du Tribunal, sans préjudice des actions en responsabilité non contractuelle pouvant découler de la même déclaration. Dans le cas où l’acte dont l’omission fait l’objet du litige a été adopté après l’introduction du recours, mais avant le prononcé de l’arrêt, une déclaration du juge communautaire constatant l’illégalité de l’abstention initiale ne peut plus conduire aux conséquences prévues par l’article 233 CE. Il en résulte que, dans un tel cas, tout comme dans celui où l’institution défenderesse a réagi à l’invitation à agir dans le délai de deux mois, l’objet du recours a disparu, de sorte qu’il n’y a plus lieu de statuer (ordonnance de la Cour du 13 décembre 2000, Sodima/Commission, C‑44/00 P, Rec. p. I‑11231, point 83, et la jurisprudence citée).

32
En l’espèce, il y a lieu de constater que les requérantes, dans l’invitation à agir adressée à la Commission le 25 octobre 2001, ont, en substance, invité cette dernière à modifier la décision portant approbation de l’EPEAEK II, afin que les IEK privés soient inclus parmi les bénéficiaires de ce programme. Dans ce contexte, elles ont, en outre, demandé à la Commission d’intervenir auprès des autorités helléniques afin de les inclure parmi les bénéficiaires du cofinancement au titre de l’EPEAEK II.

33
Postérieurement à l’introduction du présent recours, la Commission a, dans sa lettre du 27 février 2002 adressée aux requérantes, exposé les raisons l’ayant conduite à approuver l’EPEAEK II. Il ressort clairement de cette lettre que, selon la Commission, l’EPEAEK II étant conforme aux objectifs du troisième CCA pour la Grèce et aux politiques communautaires, aucune raison ne justifiait, à ce stade, la modification de la décision de la Commission portant approbation de l’EPEAEK II, réclamée par les requérantes. En outre, dans cette lettre, la Commission a expliqué les raisons pour lesquelles elle estimait que devaient être écartés les arguments des requérantes tirés de ce que le financement prioritaire des IEK publics dans une première phase constituerait une distorsion de concurrence et affecterait le commerce entre les États membres. Enfin, quant aux mesures que la Commission a été invitée à prendre à l’égard des autorités helléniques afin d’aboutir à une extension en faveur des IEK privés du cofinancement au titre de l’EPEAEK II, la Commission a clairement affirmé dans la même lettre du 27 février 2002 que, en application du principe de subsidiarité, la mise en oeuvre des interventions relevait de la responsabilité des États membres au niveau territorial approprié en fonction de la situation spécifique de chaque État membre.

34
Il est ainsi établi que la Commission a, dans sa lettre du 27 février 2002, pris position sur les demandes des requérantes, de sorte que le présent recours est devenu sans objet. Le fait que la prise de position de la Commission ne donne pas satisfaction aux requérantes est, à cet égard, indifférent. En effet, selon la jurisprudence, l’article 232 CE vise la carence résultant de l’abstention de statuer ou de prendre position et non l’adoption d’un acte autre que celui que le requérant aurait souhaité ou estimé nécessaire (ordonnance Sodima/Commission, point 31 supra, point 83, et la jurisprudence citée).

35
Dans ces conditions, et sans qu’il soit besoin dルexaminer les arguments de la Commission tirés de l’irrecevabilité du recours, il convient de constater qu’il n’y a plus lieu de statuer sur le présent recours en carence (ordonnance de la Cour du 10 juin 1993, The Liberal Democrats/Parlement, C‑41/92, Rec. p. I‑3153, point 4, et arrêt de la Cour du 12 juillet 2001, Commission et France/TF1, C‑302/99 P et C‑308/99 P, Rec. p. I‑5603, point 28).


Sur les dépens

36
En cas de non-lieu à statuer, l’article 87, paragraphe 6, du règlement de procédure prévoit que le Tribunal règle librement les dépens. En l’espèce, s’il est vrai que la Commission a pris position sur l’invitation à agir des requérantes après l’introduction du présent recours, il n’en reste pas moins que les requérantes n’ont pas formulé de conclusions relatives aux dépens. Dans ces circonstances, le Tribunal estime qu’il y a lieu d’ordonner que chaque partie supporte ses propres dépens.


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)



ordonne:

1)
Il n’y a plus lieu de statuer sur le présent recours.

2)
Chaque partie supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 15 mars 2004.

Le greffier

Le président

H. Jung

H. Legal


1
Langue de procédure: le grec.