Language of document : ECLI:EU:T:2004:222

Arrêt du Tribunal

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre élargie)
8 juillet 2004 (1)

« Aide d'État – Recours en annulation – Critère du créancier privé – Aides au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté – Droits de la défense –  Motivation »

Dans l'affaire T-198/01,

Technische Glaswerke Ilmenau GmbH, établie à Ilmenau (Allemagne), représentée initialement par Mes S. Gerrit et C. Arhold, puis par Mes Arhold et N. Wimmer, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. V. Kreuschitz et V. Di Bucci, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

soutenue par

Schott Glas, établie à Mayence (Allemagne), représentée par Me U. Soltész, avocat,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision 2002/185/CE de la Commission, du 12 juin 2001, relative à une aide d'État accordée par la République fédérale d'Allemagne en faveur de Technische Glaswerke Ilmenau GmbH (Allemagne) (JO 2002, L 62, p. 30),



LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre élargie),



composé de M. R. García-Valdecasas, président, Mme P. Lindh, MM. J. D. Cooke, H. Legal et Mme M. E. Martins Ribeiro, juges,

greffier : Mme D. Christensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 11 décembre 2003,

rend le présent



Arrêt




Cadre juridique

1
L’article 87, paragraphe 1, CE déclare incompatibles avec le marché commun, sauf dérogations prévues par le traité, les aides d’État susceptibles d’affecter les échanges entre États membres et de fausser la concurrence.

2
L’article 87, paragraphe 3, CE dispose :

« Peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun :

[…]

c)
les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n’altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun […] »

3
La Commission a publié, le 23 décembre 1994, une communication fixant des lignes directrices communautaires pour les aides d’État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté, applicables en l’espèce (JO C 368, p. 12, ci-après les « lignes directrices pour les aides au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté »). Aux termes de ces lignes directrices :

« 1.2. Dans certaines circonstances […], les aides d’État destinées à sauver des entreprises en difficulté et à encourager leur restructuration peuvent se justifier. Ce peut être le cas, par exemple, pour des raisons de politique sociale ou régionale, ou bien parce qu’il est souhaitable de maintenir une structure de marché concurrentielle lorsque la disparition d’entreprises pourrait aboutir à une situation de monopole ou d’oligopole étroit, ou encore parce qu’il y a lieu de prendre en considération les besoins particuliers du secteur des petites et moyennes entreprises et le rôle bénéfique que jouent ces entreprises d’un point de vue économique plus général.

[…]

3.2.
Aides à la restructuration

[…]

3.2.2. Conditions générales

[…] il faut, pour que la Commission puisse approuver une aide, que le plan de restructuration remplisse toutes les conditions générales suivantes.

A. Retour à la viabilité

La condition sine qua non de tous les plans de restructuration est qu’ils doivent permettre de rétablir dans un délai raisonnable la viabilité à long terme de l’entreprise, sur la base d’hypothèses réalistes en ce qui concerne ses conditions d’exploitation futures. En conséquence, l’aide à la restructuration doit être liée à un programme viable de restructuration ou de redressement, qui doit être présenté à la Commission avec toutes les précisions nécessaires. Ce plan doit permettre de rétablir la compétitivité de l’entreprise dans un délai raisonnable.

[…]

C. Aide proportionnée aux coûts et avantages de la restructuration

Le montant et l’intensité de l’aide doivent être limités au strict minimum nécessaire pour permettre la restructuration et doivent être en rapport avec les avantages escomptés du point de vue communautaire. Pour ces raisons, les bénéficiaires de l’aide doivent normalement contribuer de manière importante au plan de restructuration sur leurs propres ressources ou par un financement extérieur obtenu aux conditions du marché. Pour limiter les distorsions de concurrence, il convient d’éviter que l’aide ne soit accordée sous une forme qui amène l’entreprise à disposer de liquidités excédentaires qu’elle pourrait consacrer à des activités agressives susceptibles de provoquer des distorsions sur le marché et qui ne seraient pas liées au processus de restructuration. L’aide ne doit pas servir non plus à financer de nouveaux investissements qui ne sont pas nécessaires pour la restructuration. L’aide destinée à la restructuration financière ne doit pas réduire de façon excessive les charges financières de l’entreprise.

[…] »

4
En ce qui concerne la procédure de contrôle des aides d’État, le règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [88] du traité CE (JO L 83, p. 1), est entré en vigueur le 16 avril 1999.

5
L’article 4, paragraphe 4, dudit règlement dispose que la Commission ouvre une procédure formelle d’examen à l’égard de la mesure qui lui a été notifiée lorsque sa compatibilité avec le marché commun suscite, après un examen préliminaire, des doutes de sa part. Selon l’article 6, paragraphe 1, dudit règlement, elle invite l’État membre concerné et les autres parties intéressées à présenter leurs observations dans un délai déterminé. Aux termes de l’article 6, paragraphe 2, dudit règlement, les observations reçues sont communiquées à l’État membre concerné, qui a la possibilité d’y répondre.

6
L’article 20, paragraphe 1, du règlement n° 659/1999 prévoit :

« Toute partie intéressée peut présenter des observations conformément à l’article 6 [à la] suite [de la] décision de la Commission d’ouvrir la procédure formelle d’examen. Toute partie intéressée qui a présenté de telles observations et tout bénéficiaire d’une aide individuelle reçoivent une copie de la décision prise par la Commission conformément à l’article 7. »


Antécédents du litige

7
Technische Glaswerke Ilmenau GmbH est une société allemande ayant son siège à Ilmenau dans le land de Thuringe. Elle exerce ses activités dans le domaine de la verrerie.

8
Elle a été constituée en 1994, par les époux Geiß, dans le but de reprendre quatre des douze chaînes de fabrication de verre que comptait l’ancienne société Ilmenauer Glaswerke GmbH (ci-après « IGW »), dont la mise en liquidation avait été effectuée par la Treuhandanstalt (organisme de droit public chargé de restructurer les entreprises de l’ex-République démocratique allemande, devenue ensuite la Bundesanstalt für vereinigungsbedingte Sonderaufgaben, ci-après la « BvS »). Les chaînes de fabrication en question provenaient des biens nationalisés du Volkseigener Betrieb Werk für Technisches Glas Ilmenau, qui, avant la réunification allemande, était le centre de production de verre de l’ex-République démocratique allemande.

9
La vente des quatre chaînes de fabrication par IGW à la requérante s’est effectuée en deux étapes, à savoir par un premier contrat du 26 septembre 1994 [ci-après l’« asset-deal 1 » (accord de cession d’actifs)], agréé par la Treuhandanstalt en décembre 1994, et par un second contrat du 11 décembre 1995 (ci-après l’« asset-deal 2 »), agréé par la BvS le 13 août 1996.

10
Selon l’asset-deal 1, le prix de vente des trois premières chaînes de fabrication s’élevait au total à 5,8 millions de marks allemands (DEM) [2 965 493 euros (EUR)] et devait être payé en trois échéances, le 31 décembre des années 1997, 1998 et 1999. Le paiement était assuré par une garantie hypothécaire de 4 millions de DEM (2 045 168 EUR) et par une garantie bancaire de 1,8 million de DEM (920 325 EUR).

11
Il est constant qu’aucune de ces trois échéances n’a été honorée.

12
En vertu de l’asset-deal 2, la quatrième chaîne de fabrication a également été vendue par IGW à la requérante au prix de 50 000 DEM (25 565 EUR).

13
Il est constant également que la requérante a eu des difficultés de trésorerie en 1997. Compte tenu de ces difficultés, elle a entamé des négociations avec la BvS. Celles-ci ont abouti à la conclusion d’un contrat, en date du 16 février 1998, par lequel la BvS a consenti à réduire de 4 millions de DEM le prix de vente résultant de l’asset-deal 1 (ci-après la « réduction de prix »).

14
Par lettre du 1er décembre 1998, la République fédérale d’Allemagne a notifié à la Commission différentes mesures ayant pour but de renflouer la requérante, dont la réduction de prix. Cette notification portait en partie sur un plan de restructuration pour la période allant de l’année 1998 à l’année 2000, comprenant, notamment, la recherche d’un nouvel investisseur privé à même d’apporter une contribution de 3 850 000 DEM (1 968 474 EUR).

15
Par lettre SG (2000) D/102831, du 4 avril 2000, la Commission a ouvert la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE. Elle a considéré que les autorités allemandes étaient susceptibles d’avoir octroyé dans le cadre de l’asset-deal 1 et de l’asset-deal 2 diverses aides d’État. Ces prétendues aides sont décrites dans la communication publiée au Journal officiel des Communautés européennes du 29 juillet 2000 [Invitation à présenter des observations en application de l’article 88, paragraphe 2, du traité CE concernant l’aide C 19/2000 (ex NN 147/98) − Aides en faveur de Technische Glaswerke Ilmenau GmbH − Allemagne (JO C 217, p. 10)], dans laquelle la Commission estimait provisoirement que deux des mesures en question pouvaient être considérées comme des aides incompatibles avec le marché commun, à savoir la réduction de prix et un prêt de 2 millions de DEM (1 015 677 EUR) de l’Aufbaubank de Thuringe (TAB), accordé le 30 novembre 1998 à la requérante, en vertu du régime d’aide NN 74/95 [approuvé par la décision SG (96) D/1946].

16
La République fédérale d’Allemagne a présenté à la Commission, par lettre reçue le 7 juillet 2000, ses observations relatives à l’ouverture de la procédure formelle d’examen. Selon elle, la réduction de prix ne constituait pas une aide d’État, mais correspondait au comportement d’un créancier privé cherchant à recouvrer sa créance dans une situation où l’exigibilité intégrale du prix de vente aurait probablement entraîné la mise en liquidation de la requérante.

17
Après avoir pris connaissance de la communication du 29 juillet 2000, la requérante a soumis, le 28 août 2000, ses observations à la Commission. Elle a demandé à cette dernière de lui donner accès à la partie non confidentielle du dossier et de lui donner par la suite la possibilité de présenter de nouvelles observations.

18
Par lettre du 11 octobre 2000, la BvS a accordé des délais à la requérante pour le paiement du solde du prix fixé par l’asset-deal 1, à savoir 1,8 million de DEM, ainsi que pour le paiement des intérêts échus entre le 1er janvier 1998 et le 20 juin 2000, s’élevant à 198 800 DEM (101 645 EUR). Sans demander paiement d’intérêts supplémentaires, la BvS a fixé les nouvelles échéances de paiement au 31 décembre des années 2003 à 2005. Il était ainsi prévu que la somme de 666 600 DEM (340 827 EUR) serait remboursée à chacune de ces dates.

19
Par communication du 20 novembre 2000, la République fédérale d’Allemagne a présenté ses observations à la Commission sur les observations de l’entreprise Schott Glas, un concurrent de la requérante, soumises le 28 septembre 2000 à la Commission dans le cadre de la procédure formelle d’examen.

20
Le 27 février 2001, la République fédérale d’Allemagne a transmis à la Commission, en annexe à sa communication, copie d’un rapport en date du 24 novembre 2000, émanant de M. Arnold, expert-comptable, portant sur la situation et les perspectives de rentabilité de la requérante (ci-après le « rapport Arnold »).

21
Le 12 juin 2001, la Commission a adopté la décision 2002/185/CE relative à une aide d’État accordée par la République fédérale d’Allemagne en faveur de Technische Glaswerke Ilmenau GmbH (JO 2002, L 62, p. 30, ci-après la « décision attaquée »). Ayant expressément renoncé à examiner dans le cadre de la même procédure formelle d’examen d’autres aides potentielles, telles que la novation de la garantie bancaire de 1,8 million de DEM, constituée dans le cadre de l’asset-deal 1, en dette foncière de rang inférieur (« nachrangige Grundschuld ») et le report à l’année 2003 du paiement du solde du prix fixé dans ce contrat (considérants 42, 64 et 65 de la décision attaquée), la Commission est parvenue à la conclusion que la réduction de prix n’aurait pas été acceptée par un créancier privé, mais constituait une aide d’État, au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, incompatible avec le marché commun.

22
La Commission a estimé pour trois raisons (considérants 76 à 80 de la décision attaquée) que la BvS, en accordant la réduction de prix, ne s’était pas comportée comme un créancier privé. Même si l’asset-deal 2 était subordonné à la réduction de prix, rien n’indiquait, selon la décision attaquée, que l’opération ainsi réalisée aurait été moins onéreuse que celle consistant à exiger le paiement intégral du prix initialement convenu et à renoncer à l’asset-deal 2 (considérant 81). La Commission a rejeté en outre l’argument présenté par la requérante selon lequel la réduction de prix ne constituait, compte tenu de la réduction par le land de Thuringe des subventions promises, qu’un ajustement du contrat de privatisation. Elle a en effet estimé que la BvS et le land de Thuringe étaient, en tout état de cause, des personnes morales différentes (considérant 82). La Commission en a déduit que la BvS n’avait pas agi afin de préserver ses intérêts financiers, mais avait cherché à assurer la survie de la requérante (considérant 83).

23
Selon la décision attaquée, la réduction de prix ne pouvait bénéficier d’une exemption en tant qu’aide ad hoc à la restructuration, car les conditions fixées par les lignes directrices communautaires pour les aides au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté n’étaient pas remplies. En particulier, le plan de restructuration de la requérante n’aurait pas été fondé sur des hypothèses réalistes et le rétablissement de sa viabilité à long terme aurait été douteux (considérants 92 à 97).

24
La Commission a rappelé la condition imposée aux aides à la restructuration selon laquelle le plan de restructuration doit prévoir des mesures pour atténuer autant que possible les conséquences défavorables susceptibles d’en résulter pour les concurrents (considérants 98 à 101). Nonobstant les observations d’un concurrent de la requérante indiquant « qu’il existait des surcapacités structurelles sur certains marchés de produits sur lesquels [la requérante] poursui[vai]t ses activités », elle a considéré que, d’après les informations dont elle disposait, il n’existait pas de « surcapacités sur l’ensemble du marché » (considérant 101).

25
Enfin, la Commission a estimé que la condition relative à la proportionnalité de l’aide n’était pas remplie dans la mesure où il n’existait aucune contribution d’un investisseur privé au sens des lignes directrices susvisées (considérants 102 à 107). En outre, constatant que, selon le même concurrent, la requérante vendait ses produits systématiquement au-dessous du prix du marché, voire au-dessous du prix de revient, et avait constamment bénéficié d’une injection de liquidités destinée à combler ses pertes, la Commission a relevé qu’il ne pouvait être exclu que la requérante ait consacré les fonds perçus à des activités ayant provoqué des distorsions de concurrence sur le marché et distinctes du processus de restructuration (considérant 103). Elle en a conclu que la réduction de prix n’était donc pas compatible avec le marché commun (considérant 109).

26
Aux termes des articles 1er et 2 de la décision attaquée :

« Article premier

L’aide d’État octroyée par la [République fédérale d’]Allemagne en faveur de Technische Glaswerke Ilmenau GmbH sous forme [d’une réduction de prix] de 4 millions de [DEM] sur le prix d’achat dans le cadre de l’asset-deal 1 conclu le 26 septembre 1994 est incompatible avec le marché commun.

Article 2

1. L[a République fédérale d]’Allemagne prend toutes les mesures qui s’imposent pour obtenir du bénéficiaire le remboursement de l’aide visée à l’article 1er qui [lui] a été octroyée illégalement.

2. Le remboursement de l’aide intervient immédiatement selon les procédures allemandes, pour autant que celles-ci permettent l’exécution immédiate et effective de la présente décision. L’aide à rembourser comprend les intérêts de la [période comprise entre la] date à laquelle le bénéficiaire a eu l’aide illégale à sa disposition jusqu’à la date de son remboursement effectif. Les intérêts sont calculés sur la base du taux de référence utilisé pour le calcul de l’équivalent subvention des aides à finalité régionale. »

27
La requérante reconnaît avoir eu connaissance de la décision attaquée dès le 19 juin 2001, lorsque des représentants de la BvS lui en ont remis copie.

28
Par lettre du 23 août 2001, la République fédérale d’Allemagne a informé la Commission qu’elle avait l’intention, sous réserve de son accord, de différer la récupération de l’aide en cause afin de ne pas compromettre la négociation engagée entre la requérante et un nouvel investisseur potentiel.


Procédure contentieuse

29
Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 août 2001, la requérante a introduit le présent recours.

30
Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 13 novembre 2001, la Commission a introduit une demande de procédure accélérée, en application de l’article 76 bis du règlement de procédure du Tribunal. La requérante s’est opposée à cette demande dans ses observations déposées sur ce point le 11 décembre 2001. La décision de la cinquième chambre élargie du Tribunal de ne pas faire droit à la demande de procédure accélérée déposée par la Commission a été notifiée aux parties le 17 janvier 2002.

31
Par ordonnance du 4 avril 2002 (Technische Glaswerke Ilmenau/Commission, T‑198/01 R, Rec. p. II‑2153), le président du Tribunal a, à la suite de la demande de la requérante, sursis à l’exécution, jusqu’au 17 février 2003, de l’article 2 de la décision attaquée. Ce sursis était assorti de l’exigence faite à la requérante de respecter trois conditions, auxquelles elle a satisfait.

32
Par ordonnance du 15 mai 2002 du président de la cinquième chambre élargie du Tribunal, la société Schott Glas a été admise à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.

33
Le président de la Cour a, par ordonnance du 18 octobre 2002 [Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑232/02 P(R), Rec. p. I‑8977], rejeté le pourvoi introduit par la Commission contre l’ordonnance du 4 avril 2002, Technische Glaswerke Ilmenau/Commission, précitée.

34
Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre élargie) a décidé d’ouvrir la procédure orale et a décidé, le 10 juillet 2003, d’inviter les parties principales à répondre, selon les cas par écrit ou lors de l’audience, à plusieurs questions et à produire certains documents. Elles ont déféré à ces demandes.

35
Par ordonnance du 1er août 2003 (Technische Glaswerke Ilmenau/Commission, T‑198/01 R II, non encore publiée au Recueil), le président du Tribunal a, à la suite d’une nouvelle demande de la requérante, sursis à l’exécution, jusqu’au 17 février 2004, de l’article 2 de la décision attaquée, en soumettant également ce sursis au respect par la requérante de trois conditions.

36
Par lettre du 15 octobre 2003, la requérante a demandé que la Commission produise l’annexe 1 à la communication de la République fédérale d’Allemagne du 27 février 2001, ladite communication ayant été produite par la Commission au titre des mesures d’organisation de la procédure. La requérante a également demandé au Tribunal l’autorisation de répondre par écrit − et non lors de l’audience, comme cela avait été requis par le Tribunal − à une des questions qui lui avait été posée ainsi qu’à la Commission, au motif que cette dernière y avait elle-même répondu par écrit. Il a été fait droit à ces demandes.

37
Le président de la cinquième chambre élargie du Tribunal a, par ordonnance du 12 novembre 2003, accédé aux demandes de confidentialité introduites par la requérante, s’agissant tant des actes de procédure signifiés aux parties que, le cas échéant, de ceux devant l’être, concernant certaines données figurant dans les réponses des parties principales aux questions du Tribunal et à ses demandes de production de documents, tout en se réservant la possibilité de faire droit aux éventuelles objections qui pourraient être formulées à cet égard.

38
Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience qui s’est déroulée le 11 décembre 2003.

39
Par acte déposé le 17 février 2004, la requérante a saisi le président du Tribunal d’une demande visant à obtenir la prorogation du sursis de la décision attaquée jusqu’à ce que le Tribunal ait définitivement statué sur le recours au principal.

40
Par ordonnance du 3 mars 2004, adoptée au titre de l’article 105, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement de procédure, le président du Tribunal a ordonné la prorogation temporaire du sursis à l’exécution de la décision attaquée jusqu’à ce qu’il soit statué sur la demande de prorogation.

41
Par ordonnance adoptée le 12 mai 2004 (Technische Glaswerke Ilmenau/Commission, T‑198/01 R [III], non encore publiée au Recueil), le président du Tribunal a ordonné le sursis de la décision attaquée, jusqu’au prononcé du présent arrêt.


Conclusions des parties

42
La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler la décision attaquée ;

condamner la Commission aux dépens.

43
La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours comme non fondé ;

condamner la requérante aux dépens.

44
La partie intervenante, au soutien de la Commission, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours comme non fondé ;

condamner la requérante aux dépens, y compris ceux afférents à son intervention.


En droit

45
À l’appui de son recours, la requérante invoque, en substance, cinq moyens tirés, premièrement, d’une violation de l’article 87, paragraphe 1, CE et d’un défaut de motivation ; deuxièmement, d’une violation de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE et d’une insuffisance de motivation ; troisièmement, d’une violation des droits de la défense et du principe de bonne administration ; quatrièmement, d’une insuffisance de motivation de la décision attaquée ; cinquièmement, d’une violation de l’article 20, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement n° 659/1999.

Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 87, paragraphe 1, CE et d’un défaut de motivation

46
Dans le cadre de ce premier moyen, la requérante soutient, tout d’abord, que la réduction de prix ne constitue pas une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE. Elle fait, à cet égard, valoir que ladite réduction est une adaptation de l’asset-deal 1 à laquelle elle avait droit, en raison de la rupture d’une promesse de subvention du land de Thuringe couverte par un régime d’aide préalablement approuvé par la Commission. En outre, la décision attaquée serait privée de motivation sur ce point. La requérante allègue ensuite que la Commission a erronément appliqué le critère de l’investisseur privé en économie de marché et que la décision attaquée est, à cet égard, insuffisamment motivée. Elle conteste enfin, à titre subsidiaire, la détermination du montant de l’aide dont la Commission exige la récupération.

En ce qui concerne le droit à l’adaptation de l’asset-deal 1

    Arguments des parties

47
La requérante soutient que la réduction de 4 millions de DEM du prix de 5,8 millions de DEM fixé dans le cadre de l’asset-deal 1 compense l’inexécution par le land de Thuringe d’une promesse de paiement de 4 millions de DEM faite en 1994, dans le cadre des négociations ayant précédé la conclusion de ce contrat.

48
La promesse d’aide du land de Thuringe aurait été couverte par le 23plan-cadre de la tâche d’intérêt commun « Amélioration de la structure économique et régionale », un régime d’aide à l’investissement à finalité régionale approuvé par la Commission en vertu de l’article 87, paragraphe 3, sous a), CE, par décision du 1er août 1994 [N°157/94, SG (94) D/11038]. La requérante fait observer que, selon ce régime, la République fédérale d’Allemagne pouvait accorder une aide à un investisseur rachetant une entreprise à la BvS, à concurrence de 27 % de la somme investie dans cette entreprise. Une aide supplémentaire, à concurrence de 16 % de la somme investie, pouvait être accordée si l’investisseur était une « petite ou moyenne entreprise » (ci-après « PME »). Dans le cadre de l’asset-deal 1, cette aide supplémentaire correspondant à un montant de 4 millions de DEM aurait été promise à la requérante. Le land de Thuringe aurait, toutefois, ultérieurement refusé de la verser, sans indiquer les motifs exacts de ce refus. La requérante et la BvS auraient, dès lors, entamé des négociations à la fin de l’année 1996 en vue d’adapter l’asset-deal 1 et le prix de vente fixé dans le cadre de l’asset-deal 1 aurait, dans ce contexte, été réduit de 4 millions de DEM.

49
Contrairement aux affirmations de la partie intervenante, la promesse d’aide susmentionnée n’aurait pas été contraire aux règles communautaires, car la requérante était, tout au moins jusqu’à la fin de 1995, une PME.

50
En outre, cet argument de la partie intervenante ne serait pas pertinent dès lors que, dans l’asset-deal 1, la requérante et la BvS auraient fixé le prix de vente à 1 million de DEM (511 292 EUR) si elles avaient su que l’aide promise par le land de Thuringe ne serait pas versée. La fixation du prix de vente à 1,8 million de DEM n’aurait d’ailleurs pas été contraire aux règles régissant les aides d’État. En effet, en 1994, ces règles ne se seraient pas opposées à ce que la BvS vende à un prix négatif – c’est-à-dire pour un montant symbolique assorti de promesses d’aides de sa part – des entreprises de moins de 1 000 salariés qu’elle devait privatiser.

51
La requérante rappelle qu’elle avait fait valoir, dans le cadre de la procédure formelle d’examen, qu’elle disposait à l’encontre de la BvS d’un droit à l’adaptation (« zivilrechtlicher Anspruch auf Anpassung ») de l’asset-deal 1, à la suite de l’abandon par le land de Thuringe de sa promesse d’aide. Ce droit découlerait des règles de droit civil allemand concernant l’adaptation du contrat en cas de disparition de son fondement (« Wegfall der Geschäftsgrundlage »), consacrées par la jurisprudence et codifiées à l’article 313 du Bürgerliches Gesetzbuch (code civil allemand). En l’occurrence, un motif déterminant de la conclusion de l’asset-deal 1 aurait résidé dans la promesse susmentionnée. Les deux parties seraient en effet convenues de porter le prix de vente à 5,8 millions de DEM sur la base de leur attente commune de la réalisation de cette promesse. À défaut d’octroi de l’aide promise, ce prix aurait été adapté, conformément à l’article 313, paragraphe 3, du code civil allemand, à la valeur réelle de l’entreprise, laquelle correspondrait au prix dont les parties auraient débattu avant l’intervention de la promesse.

52
Contrairement aux allégations de la Commission, le gouvernement allemand aurait confirmé les affirmations de la requérante en déclarant, dans sa communication du 27 février 2001, qu’il « [se ralliait] à la teneur des développements exposés par [la requérante] dans ses observations sur l’ouverture de la procédure formelle d’examen ».

53
Dans la décision attaquée (considérant 82), la Commission admettrait l’existence possible de la promesse d’aide du land de Thuringe et le droit de la requérante d’obtenir une adaptation du contrat en raison de son abandon. Elle se bornerait toutefois à nier la pertinence juridique de ces faits qui auraient été portés à sa connaissance dans les observations de la requérante du 28 août 2000 et qui auraient été confirmés par le gouvernement allemand dans sa communication à la Commission du 27 février 2001. Cet argument de la Commission étant dépourvu de toute pertinence, la décision attaquée ne serait pas motivée sur ce point.

54
Dans ces circonstances, la Commission et la partie intervenante ne seraient pas fondées à contester ces faits pour la première fois devant le Tribunal afin de justifier la décision attaquée. Conformément à l’article 253 CE, la décision attaquée devrait en effet se suffire à elle-même et sa motivation ne saurait résulter d’explications écrites ou orales données ultérieurement (voir ordonnance du 4 avril 2002, Technische Glaswerke Ilmenau/Commission, précitée, point 75, et la jurisprudence citée).

55
La requérante allègue, à cet égard, qu’il appartenait à la Commission de prouver, dans la décision attaquée, l’existence d’une aide, après avoir vérifié avec soin et impartialité si, dans le contexte factuel et juridique de l’espèce, l’adaptation du prix fixé dans le cadre de l’asset-deal 1 pouvait s’analyser comme une décision qu’un créancier privé raisonnable aurait prise. En l’absence d’une telle analyse, l’existence d’une aide d’État ne serait pas établie et la décision attaquée serait entachée d’un défaut de motivation. Elle devrait donc être annulée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les règles du droit civil allemand.

56
Par ailleurs, si une confirmation des faits qu’elle avance devait néanmoins être jugée nécessaire, la requérante suggère, d’une part, de poser des questions à la BvS et, d’autre part, d’entendre M. Geiß comme témoin, dans la mesure où il aurait participé à l’ensemble des négociations se rapportant à la privatisation.

57
La requérante réfute également l’argument de la Commission contenu au considérant 82 de la décision attaquée, selon lequel l’absence de versement de l’aide promise par le land de Thuringe ne serait pas pertinente en l’espèce, au motif que la BvS et le land de Thuringe sont deux personnes juridiques distinctes. Dans le cadre du contrôle des aides d’État, le comportement des diverses entités territoriales serait, en effet, imputable à l’État membre concerné en tant qu’unité (arrêt du Tribunal du 15 juin 1999, Regione autonoma Friuli-Venezia Giulia/Commission, T‑288/97, Rec. p. II‑1871, point 38). En l’espèce, le land de Thuringe ne serait qu’un organisme payeur. La promesse d’aide du land de Thuringe et la réduction de prix consentie par la BvS ne seraient dès lors pas imputables à des personnes juridiques distinctes.

58
La Commission, soutenue par la partie intervenante, réfute l’ensemble de cette argumentation.

    Appréciation du Tribunal

59
S’agissant, d’une part, du défaut de motivation allégué par la requérante en ce que la Commission n’aurait pas indiqué les véritables motifs justifiant qu’elle n’ait pas tenu compte, dans la décision attaquée, de la prétendue promesse d’aide de 4 millions de DEM du land de Thuringe, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 253 CE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 253 CE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêts de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec. p. I‑1719, point 63, du 19 septembre 2002, Espagne/Commission, C‑113/00, Rec. p. I‑7601, points 47 et 48, et C‑114/00, Rec. p. I‑7657, points 62 et 63 ; arrêt du Tribunal du 26 février 2002, INMA et Itainvest/Commission, T‑323/99, Rec. p. II‑545, point 55).

60
En particulier, la Commission n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés, mais il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (arrêts du Tribunal du 8 juin 1995, Siemens/Commission, T‑459/93, Rec. p. II‑1675, point 31, et du 13 juin 2000, EPAC/Commission, T‑204/97 et T‑270/97, Rec. p. II‑2267, point 35).

61
Aux fins de l’examen de l’exigence de motivation dans le présent contexte, il convient de préciser que la procédure de contrôle des aides d’État est une procédure ouverte vis-à-vis de l’État membre responsable de l’octroi de l’aide et que les intéressés au sens de l’article 88, paragraphe 2, CE, parmi lesquels figure le bénéficiaire de l’aide, ne sauraient prétendre eux-mêmes à un débat contradictoire avec la Commission, tel que celui ouvert au profit dudit État membre (arrêts de la Cour du 10 juillet 1986, Belgique/Commission, 234/84, Rec. p. 2263, point 29, et du 24 septembre 2002, Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, C‑74/00 P et C‑75/00 P, Rec. p. I‑7869, points 81 et 82).

62
En l’espèce, la République fédérale d’Allemagne n’a pas, contrairement à ce que prétend la requérante, fait valoir, lors de la procédure administrative, que l’octroi par la BvS de la réduction de prix tendait à compenser le fait que le land de Thuringe n’avait pas honoré vis-à-vis de la requérante sa promesse d’aide à l’investissement de 4 millions de DEM. Lors de la procédure administrative, la République fédérale d’Allemagne a uniquement avancé que l’octroi de la réduction de prix visait à empêcher la mise en liquidation de la requérante.

63
S’il est vrai que, dans sa communication à la Commission du 27 février 2001, la République fédérale d’Allemagne a indiqué qu’elle « [se ralliait] à la teneur des développements exposés par [la requérante] dans ses observations sur l’ouverture de la procédure formelle d’examen », il convient toutefois de relever que cette déclaration figure dans la partie introductive de ladite communication relative à l’application de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE. En tout état de cause, il demeure que la République fédérale d’Allemagne ne s’est pas explicitement référée à la prétendue promesse d’aide du land de Thuringe à la requérante afin de justifier la réduction du prix consenti par la BvS.

64
Dans ces circonstances, il ne saurait être exigé que la motivation par la Commission du rejet de l’argument pris du droit à l’adaptation de l’asset-deal 1, soulevé par la requérante lors de la procédure administrative, soit d’une exhaustivité comparable à celle que la République fédérale d’Allemagne était en droit d’attendre de la Commission lorsqu’elle a rejeté ses arguments.

65
En l’occurrence, la Commission a répondu à l’argument, soulevé par la requérante lors de la procédure administrative, tiré de son droit à l’adaptation de l’asset-deal 1 en raison de l’existence d’une promesse d’aide non honorée du land de Thuringe.

66
En effet, aux termes du considérant 82 de la décision attaquée :

« [La requérante] indique que l’abandon de créance par la BvS ne constitue pas une aide d’État, mais un ajustement du contrat de privatisation, car l’État libre de Thuringe a accordé moins de subventions à l’investissement que ce qui avait été convenu à propos de la privatisation des trois premières chaînes de fabrication. Mais comme la BvS et l’État libre de Thuringe sont des personnes morales différentes, la Commission ne peut en aucun cas accepter cet argument. Les droits que [la requérante] pourrait éventuellement revendiquer vis-à-vis de l’État libre de Thuringe et de la BvS doivent être traités séparément les uns des autres. »

67
Cette motivation de la Commission a permis à la requérante, en sa qualité d’intéressée, de comprendre la justification du rejet de son argument, justification dont elle conteste d’ailleurs la pertinence et sur laquelle le Tribunal est en mesure d’exercer son contrôle de légalité.

68
Il s’ensuit que le grief pris du défaut de motivation de la décision attaquée sur ce point doit être rejeté.

69
S’agissant, d’autre part, du bien-fondé de l’appréciation de la Commission contenue au considérant 82 de la décision attaquée, il y a lieu de rappeler que, contrairement aux allégations de la requérante, la Commission n’y a pas admis que le land de Thuringe avait promis à la requérante une aide à l’investissement d’un montant de 4 millions de DEM. La Commission s’est uniquement contentée d’envisager l’hypothèse dans laquelle la requérante pourrait se prévaloir de droits de cette nature vis-à-vis du land de Thuringe, comme l’atteste le fait qu’elle s’est référée aux « droits [que la requérante] pourrait éventuellement revendiquer vis-à-vis de l’État libre de Thuringe ».

70
Ainsi, à supposer même que la requérante puisse se prévaloir de tels droits, la Commission a estimé que son argumentation était sans pertinence, dès lors que le land de Thuringe et la BvS sont des personnes juridiques distinctes.

71
Il est vrai que l’interdiction prévue par l’article 87, paragraphe 1, CE vise l’ensemble des aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État, sans faire de distinction entre les aides accordées directement par l’État ou par des organismes publics ou privés qu’il institue ou désigne en vue de gérer l’aide (arrêt de la Cour du 22 mars 1977, Steinike & Weinlig, 78/76, Rec. p. 595, point 21, et arrêt Regione autonoma Friuli-Venezia Giulia/Commission, précité, point 38).

72
Cependant, il ne saurait pour autant être admis, à ce simple titre, que l’octroi de la réduction de prix par la BvS ait visé à compenser l’absence de versement, par le land de Thuringe, d’une prétendue aide à l’investissement.

73
Il importe d’emblée de constater que cette prétendue aide à l’investissement du land de Thuringe n’est pas une des mesures notifiées par la République fédérale d’Allemagne à la Commission le 1er décembre 1998, au nombre desquelles figurait la réduction de prix.

74
En outre, il convient de rappeler que, selon la requérante, le land de Thuringe lui avait promis, en 1994, le versement d’une aide à l’investissement couverte par le 23plan-cadre de la tâche d’intérêt commun « Amélioration de la structure économique et régionale », à savoir un régime d’aide à l’investissement à finalité régionale.

75
Or, ainsi que le soutient la Commission dans ses écrits, la réduction de prix ne relève pas de ce régime d’aide spécifique et ne pouvait donc être appréciée par la Commission au regard des dispositions de ce régime. En effet, cette réduction a été accordée à la requérante par la BvS, établissement fédéral de gestion fiduciaire, afin de lui permettre de faire face aux difficultés financières qu’elle rencontrait et de recouvrer sa viabilité, et non afin de soutenir l’économie régionale du land de Thuringe, objectif poursuivi par le 23e plan-cadre.

76
L’octroi de cette prétendue aide à l’investissement relève, d’ailleurs, des compétences autonomes du land de Thuringe et non de celles de la BvS, ainsi que l’atteste le fait, admis par la requérante lors de l’audience, que ledit land aurait dû accorder cette aide au moyen de ses ressources propres.

77
Dans ces circonstances, il ne saurait être considéré que la Commission a commis une erreur d’appréciation en rejetant l’argument pris du droit à l’adaptation de l’asset-deal 1 au motif que la BvS et le land de Thuringe étaient des personnes morales distinctes, quand bien même le land de Thuringe aurait effectivement promis à la requérante ladite aide à l’investissement.

78
En tout état de cause, il convient de constater que la requérante n’a pas, dans ses écrits, établi à suffisance de droit que le land de Thuringe avait effectivement promis de lui accorder une aide à l’investissement de 4 millions de DEM.

79
Bien que la Commission ne se soit pas fondée, dans la décision attaquée, sur cette considération afin de rejeter l’argument de la requérante tiré de son droit à l’adaptation de l’asset-deal 1, le Tribunal a, au titre des mesures d’organisation de la procédure, demandé la production de diverses pièces susceptibles de faire état de la promesse d’aide du land de Thuringe. Ainsi, la requérante a, tout d’abord, transmis au Tribunal la lettre de la BvS du 18 février 1998, aux termes de laquelle lui avaient été communiqués les éléments essentiels de l’action concertée intervenue entre la BvS, le land de Thuringe et l’investisseur privé, sa lettre à la BvS du 19 février 1998 ainsi que le contrat du 19 février 1999 portant sur la réduction de prix. Ces courriers étaient mentionnés par la requérante dans ses observations à la Commission sur l’ouverture de la procédure administrative du 28 août 2000.

80
Cependant, bien que ces documents concernent précisément l’octroi à la requérante de la réduction de prix, aucun d’eux ne fait état d’une promesse d’aide du land de Thuringe d’un montant de 4 millions de DEM.

81
La requérante a ensuite produit une demande de subvention − mentionnée dans la requête − qu’elle avait adressée au land de Thuringe par lettre du 5 février 2001. Aux termes de cette lettre, « [d]ans le cadre des discussions de privatisation, l’État libre de Thuringe avait promis de soutenir le projet par des subventions à l’investissement à hauteur de 43 % (27 % + 16 % [si l’investisseur était une] PME) = 10,75 millions de DEM, […] dont finalement 6,75 millions seulement ont été autorisés, car, dans l’intervalle, la définition communautaire des PME avait changé en défaveur de [la requérante], de sorte que le land n’était pas en mesure d’honorer ses promesses ». Il ne saurait toutefois être considéré que cette lettre de la requérante établit, à suffisance de droit, l’existence d’une promesse d’aide du land de Thuringe de 4 millions de DEM qui aurait justifié que la BvS consente à la réduction de prix du même montant. En effet, à supposer même que la prétendue promesse de subvention de 16 % à laquelle la requérante se réfère dans cette lettre soit la promesse d’aide en cause de 4 millions de DEM, le land de Thuringe a, de l’aveu même de la requérante, retiré cette promesse.

82
La requérante ayant en outre affirmé que la réduction de prix constituait un élément déterminant ayant conduit à la conclusion de l’asset-deal 1, le Tribunal lui a également demandé de produire ce contrat. Aucun élément contenu dans l’asset-deal 1 ne permet toutefois de considérer que ladite réduction de prix était justifiée par la supposée promesse d’aide non honorée du land de Thuringe.

83
Enfin, la requérante a transmis, à la demande du Tribunal, copie d’une lettre du 15 août 1996 − mentionnée dans ses observations à la Commission du 28 août 2000 − que le land de Thuringe lui a adressée et faisant état de l’octroi par ledit land d’une subvention de 4 680 000 DEM (2 392 846 EUR) à laquelle elle a, de sa propre initiative, joint copie d’une décision de subvention du 19 août 1996 du land de Thuringe. Cependant, interrogée sur la teneur de ces lettres lors de l’audience, la requérante a indiqué que l’aide dont il était question dans ces courriers n’était pas la promesse d’aide de 4 millions de DEM que le land de Thuringe se serait prétendument engagé à lui octroyer dans le cadre de la privatisation en cause.

84
Il résulte de ce qui précède que la requérante n’a pas établi à suffisance de droit que la fixation du prix de vente des trois premières chaînes de fabrication à 5,8 millions de DEM était justifiée par la prétendue promesse d’aide à l’investissement de 4 millions de DEM du land de Thuringe. La requérante a d’ailleurs admis, lors de l’audience, qu’elle ne disposait pas de document attestant formellement de l’existence d’une telle promesse d’aide du land de Thuringe.

85
Le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les mesures d’organisation de la procédure adoptées en application de l’article 64 du règlement de procédure, considère qu’il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de la requérante tendant à ce que soient posées des questions à la BvS ou à ce que M. Geiß soit entendu comme témoin (voir point 56 ci-dessus).

86
Dans ces circonstances, la prémisse du raisonnement de la requérante relatif à l’existence d’une promesse d’aide à l’investissement du land de Thuringe n’étant pas étayée, il n’y a pas lieu d’examiner les arguments de la requérante relatifs à la notion d’adaptation des contrats en raison de la disparition de leur fondement ni de déterminer si cette prétendue promesse d’aide était couverte par le 23e plan-cadre.

87
Il ressort de tout ce qui précède que ce grief, tiré du droit à l’adaptation de l’asset-deal 1, doit être rejeté comme n’étant pas fondé.

En ce qui concerne la mise en œuvre prétendument erronée du critère de l’opérateur privé en économie de marché

    Arguments des parties

88
La requérante allègue que la Commission a interprété le critère de l’investisseur privé de manière trop restrictive. La Commission aurait, en effet, dû considérer la réduction de prix du point de vue d’un holding privé ou d’un groupe privé d’entreprises, motivé par des perspectives de rentabilité à long terme des entreprises bénéficiaires de l’aide et par la crédibilité de sa propre image (ordonnance du 4 avril 2002, Technische Glaswerke Ilmenau/Commission, précitée, point 65).

89
En particulier, en appliquant le critère de l’investisseur privé à la République fédérale d’Allemagne, la Commission aurait dû tenir compte de la promesse d’aide du land de Thuringe de 1994 et constater que la réduction de prix ne représentait qu’une modalité destinée à honorer cette promesse et n’entraînait, de ce fait, aucune perte. En outre, en évitant l’insolvabilité et la mise en liquidation de la requérante, cette mesure lui aurait également évité la perte des aides qui lui avaient été précédemment octroyées.

90
La requérante reproche également à la Commission d’avoir rejeté, dans la décision attaquée (considérants 67 à 85), l’argumentation présentée par la République fédérale d’Allemagne, selon laquelle, du point de vue d’un créancier privé, la renonciation partielle au paiement du prix fixé dans le cadre de l’asset-deal 1 était préférable, afin de permettre la cession de la 4e chaîne de fabrication dans le cadre de l’asset-deal 2. En envisageant l’hypothèse d’une telle cession, même en cas de liquidation de la requérante, la Commission aurait non seulement substitué son appréciation à celle de l’État membre concerné, mais se serait, en outre, située en dehors du champ des considérations raisonnables dont tient compte un investisseur privé.

91
Par ailleurs, la décision attaquée serait insuffisamment motivée, dans la mesure où elle ne mentionnerait pas le rapport d’expertise de la BvS, en date du 30 mai 2000, joint à la communication de la République fédérale d’Allemagne à la Commission du 3 juillet 2000. La Commission aurait, en effet, dû indiquer les motifs pour lesquels elle s’écartait de cette expertise, qui expliquerait pourquoi la République fédérale d’Allemagne était parvenue à la conclusion que la réduction de prix était conforme au comportement d’un investisseur privé.

92
La Commission objecte que la décision attaquée (considérants 78, 79 et 83) se réfère au critère du créancier privé et non à celui de l’investisseur privé, invoqué par la requérante. L’argumentation relative à ce dernier critère serait dès lors privée de pertinence et les arguments relatifs au critère du créancier privé seraient irrecevables à défaut d’avoir été invoqués dans la requête.

93
Elle se défend d’avoir appliqué le critère du créancier privé de manière trop restrictive. La République fédérale d’Allemagne lui ayant indiqué que la requérante était quasiment en état de cessation de paiement et insolvable, un créancier privé se serait efforcé de recouvrer ses créances. Or, les calculs effectués par la Commission montreraient qu’il était moins onéreux pour la République fédérale d’Allemagne de ne pas accorder la réduction de prix.

94
À cet égard, les trois raisons permettant de conclure que la BvS n’avait pas agi comme un créancier privé seraient exposées de manière détaillée dans la décision attaquée (considérants 76 à 80). Concernant plus particulièrement la 4e chaîne de fabrication, objet de l’asset-deal 2, la Commission précise qu’elle n’a jamais considéré que cette chaîne pourrait, en toute hypothèse, être vendue à la requérante. La décision attaquée se fonderait sur l’idée que cette chaîne de fabrication pouvait être vendue à un tiers, avec les autres installations de la requérante, en cas de liquidation de cette dernière. Par ailleurs, rien n’aurait laissé supposer que l’asset-deal 2 n’aurait pas été conclu sans la réduction de prix dès lors que le prix de 50 000 DEM fixé dans ce contrat correspondrait pratiquement à une donation. Enfin, la requérante n’expliquerait pas l’incidence de l’erreur que la Commission aurait prétendument commise sur ses calculs.

95
La partie intervenante fait sienne l’argumentation de la Commission.

    Appréciation du Tribunal

96
S’agissant, en premier lieu, de la recevabilité des arguments de la requérante concernant le critère du créancier privé, il convient de rappeler que l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure interdit la production de nouveaux moyens en cours d’instance, à moins qu’ils ne se fondent sur des éléments de droit ou de fait révélés pendant la procédure. En l’espèce, l’argumentation de la requérante, invoquée dans sa réplique, relative au critère du créancier privé dont la Commission fait état dans la décision attaquée répond à l’argument avancé par la Commission en défense selon lequel le critère de l’investisseur privé, invoqué dans la requête, ne serait pas pertinent en l’espèce. Cette argumentation ne constitue donc pas un moyen nouveau mais le développement du moyen, invoqué dans la requête, tiré de la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE, en ce que la Commission aurait procédé à une application erronée du critère de l’opérateur privé en économie de marché. La fin de non-recevoir opposée par la Commission doit dès lors être rejetée.

97
S’agissant, en deuxième lieu, du bien-fondé de cette argumentation, il convient de rappeler que l’appréciation, par la Commission, de la question de savoir si une mesure satisfait au critère de l’opérateur privé en économie de marché implique une appréciation économique complexe. La Commission, lorsqu’elle adopte un acte impliquant une telle appréciation, jouit d’un large pouvoir d’appréciation et le contrôle juridictionnel, même s’il est en principe entier pour ce qui concerne la question de savoir si une mesure entre dans le champ d’application de l’article 87, paragraphe 1, CE, se limite à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’absence d’erreur de droit, de l’exactitude matérielle des faits retenus et de l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits, ainsi que de l’absence de détournement de pouvoir. En particulier, il n’appartient pas au Tribunal de substituer son appréciation économique à celle de l’auteur de la décision (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 11 juillet 2002, HAMSA/Commission, T‑152/99, Rec. p. II‑3049, points 125 à 127 et 129, et du 17 octobre 2002, Linde/Commission, T‑98/00, Rec. p. II‑3961, point 40).

98
En l’espèce, en vue de déterminer si la réduction d’une partie des dettes de la requérante envers la BvS présente le caractère d’une aide étatique, il est pertinent d’appliquer le critère, indiqué dans la décision attaquée et d’ailleurs non contesté par la requérante, du créancier privé en économie de marché.

99
En effet, en octroyant la réduction de prix, la BvS ne s’est pas comportée comme un investisseur public dont l’intervention devrait être comparée au comportement d’un investisseur privé poursuivant une politique structurelle, globale ou sectorielle, et guidé par des perspectives de rentabilité à long terme des capitaux investis. Cet organisme étatique devait effectivement être comparé à un créancier privé cherchant à obtenir le paiement des sommes qui lui sont dues par un débiteur connaissant des difficultés financières (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 29 avril 1999, Espagne/Commission, C‑342/96, Rec. p. I‑2459, point 46, et du 29 juin 1999, DM Transport, C‑256/97, Rec. p. I‑3913, point 24, et arrêt HAMSA/Commission, précité, point 167).

100
Il importe, dans ce contexte, de relever que, lors de la procédure administrative, la République fédérale d’Allemagne a constaté que la requérante rencontrait, en 1997, de graves difficultés financières. Le maintien par la BvS du prix d’achat fixé dans le cadre de l’asset-deal 1 aurait donc, selon les autorités allemandes, probablement entraîné la mise en liquidation de la requérante et, ce faisant, l’inexécution de l’asset-deal 2. Dans ces conditions, le coût final (1 811 000 DEM) de la réduction de prix de 4 millions de DEM aurait, selon la République fédérale d’Allemagne, été, pour la BvS, plus avantageuse que le maintien du prix d’achat intégral fixé dans le cadre de l’asset-deal 1, lequel aurait occasionné des frais d’un montant de 2 590 000 DEM (considérants 73 à 75 de la décision attaquée).

101
La requérante conteste les motifs qui ont conduit la Commission à rejeter, dans la décision attaquée, la thèse défendue par la République fédérale d’Allemagne au cours de la procédure administrative, selon laquelle la réduction de 4 millions de DEM du prix fixé dans le cadre de l’asset-deal 1 visait à réduire la charge financière de la BvS et était donc la solution la plus avantageuse économiquement.

102
Elle fait à cet égard valoir, dans ses écrits, que la décision attaquée se fonde sur une hypothèse irréaliste, à savoir que l’asset-deal 2 aurait pu être exécuté même si elle avait été mise en liquidation, et affirme que, en tout état de cause, la thèse de la République fédérale d’Allemagne se fondant sur des appréciations économiques rationnelles, la Commission ne devait pas substituer sa propre appréciation à celle de l’État membre concerné.

103
Il y a toutefois lieu de constater que, à l’appui de ce grief, la requérante se contente d’affirmer que la Commission a outrepassé les pouvoirs de contrôle qui lui incombe afin de vérifier si l’État membre concerné s’est comporté comme un créancier privé en considérant que « rien n’indiqu[ait] que l’asset-deal 2 n’aurait pas pris effet si la BvS n’avait pas abandonné une partie de sa créance ».

104
Or, cette affirmation non étayée n’est pas de nature à établir que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en estimant qu’aucun élément ne permettait de considérer que la réduction de prix était une condition préalable à l’exécution de l’asset-deal 2 (considérants 76 à 78 de la décision attaquée).

105
En tout état de cause, il importe de relever que la Commission a également envisagé, dans la décision attaquée, l’hypothèse dans laquelle l’asset-deal 2 n’aurait pas été exécuté si la BvS avait exigé le paiement intégral du prix d’achat des trois premières chaînes de fabrication fixé dans le cadre de l’asset-deal 1. Elle s’est fondée, dans ce contexte, sur deux autres considérations établissant, selon elle, que la République fédérale d’Allemagne ne pouvait pas valablement prétendre que la réduction de prix était la solution économiquement la plus avantageuse.

106
Premièrement, la Commission a considéré que, à supposer que l’asset-deal 2 n’ait pu être exécuté en l’absence de la réduction de prix, il n’avait pas été démontré que la BvS se serait comportée comme un créancier privé en accordant cette réduction (considérant 79 de la décision attaquée). À cet égard, elle a estimé que, dans l’hypothèse où la BvS n’aurait pas octroyé la réduction de prix entraînant ce faisant la mise en liquidation de la requérante, les frais de remise en état du terrain sur lequel se trouve la 4e chaîne de fabrication n’auraient pas dû être pris en considération, contrairement à ce qu’a fait la République fédérale d’Allemagne dans le cadre de ses appréciations économiques au soutien de sa thèse. Cette remise en état aurait, en effet, été nécessaire aux fins de la création d’un pôle technologique. Or, un créancier privé n’aurait pas été tenu de réaliser un tel projet.

107
S’agissant de la remise en état du terrain de la 4e chaîne de fabrication nécessaire à la réalisation d’un pôle technologique, il importe de relever que la requérante n’a pas, dans ses écrits, contesté les allégations de la Commission sur ce point. Dans le cadre de ses réponses au Tribunal, la requérante a toutefois fait valoir que la BvS était légalement tenue de remettre en état ce terrain et que le projet de création d’un pôle technologique était largement subventionné.

108
Hormis le fait que la requérante n’a pas étayé cet argument, il y a lieu de constater qu’il n’est nullement de nature à remettre en cause l’affirmation de la Commission selon laquelle un créancier privé n’aurait pas été tenu par l’obligation liée à la création d’un pôle technologique. En effet, un tel projet ne présentant pas de lien avec l’objectif de restructuration de la requérante, la Commission a pu, à juste titre, estimer qu’il s’agissait d’une obligation ne relevant pas du comportement d’un créancier privé, mais de l’exercice de prérogatives de puissance publique relevant de l’autorité de l’État.

109
La Commission a, à cet égard, également constaté que les autorités allemandes avaient fixé le montant du prix de vente de ce terrain à la requérante à 1 047 000 DEM (535 323 EUR), dans l’hypothèse d’une réduction de 4 millions de DEM du prix fixé dans l’asset-deal 1. En revanche, la République fédérale d’Allemagne l’a évalué à seulement 470 000 DEM (240 307 EUR) dans l’hypothèse où la BvS n’aurait pas accordé la réduction de prix, provoquant de ce fait la mise en liquidation de la requérante. La Commission a relevé que cette réduction du prix de vente dudit terrain n’avait pas fait l’objet de plus amples explications (considérant 79 de la décision attaquée).

110
Bien que n’ayant pas contesté cette appréciation de la Commission dans ses écrits, la requérante a fait valoir, dans le cadre de ses réponses aux questions du Tribunal, que cette réduction du prix de vente du terrain aurait été justifiée par la nécessité de le remettre en état. Cependant, à supposer même que la BvS ait été tenue de procéder à la remise en état du terrain sur lequel se trouve la 4e chaîne de fabrication, il ne saurait être admis que soient concomitamment prises en considération cette remise en état pour un montant de 2 200 000 DEM (1 124 842 EUR) et la diminution de son prix de vente de 1 047 000 DEM à 470 000 DEM.

111
Il ressort de ce qui précède que la Commission a pu, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, écarter la prise en considération des frais de remise en état du terrain sur lequel se trouvait la 4e chaîne de fabrication dans le calcul des coûts ayant incombé à la BvS dans l’hypothèse où elle aurait exigé le paiement intégral du prix fixé dans le cadre de l’asset-deal 1.

112
Cette circonstance permet, à elle seule, de considérer que la Commission a, à juste titre, estimé que les coûts résultant pour la BvS de l’octroi de la réduction de prix sont, contrairement aux informations transmises sur ce point par la République fédérale d’Allemagne, supérieurs à ceux qui auraient dû être exposés en l’absence de ladite réduction.

113
Deuxièmement, la Commission a fait également valoir, dans la décision attaquée (considérant 80), que, dans le calcul comparatif des charges financières à supporter par la BvS, d’une part, dans l’hypothèse de l’octroi de la réduction de prix et, d’autre part, dans l’hypothèse du paiement du prix initialement fixé dans le cadre de l’asset-deal 1, la République fédérale d’Allemagne aurait omis de prendre en considération une subvention à l’investissement de 1 million de DEM accordée par la BvS dans le cadre de l’asset-deal 2. Or, la prise en considération de ce montant permettrait de constater que les frais incombant à la BvS auraient été plus élevés dans l’hypothèse où cette dernière aurait accordé la réduction de prix.

114
À cet égard, la requérante a soutenu, en réponse à une question du Tribunal, que cette subvention de 1 million de DEM, prévue à l’article 5 de l’asset-deal 2, était un coût irrécupérable (« sunk cost »). En effet, selon la requérante, la 4e chaîne de fabrication ne pouvant fonctionner que si ses composantes étaient renouvelées, la BvS s’était engagée à rembourser à la requérante des frais de maintien de cette ligne à hauteur de 1 million de DEM lesquels, du fait de leur affectation, ne pouvaient être récupérés et ne produiraient pas de droits à la faillite.

115
Il convient toutefois de constater que la requérante s’est contentée d’affirmer, dans sa réponse à la question du Tribunal, que la subvention engagée par la BvS de 1 million de DEM était un coût irrécupérable sans apporter à cet égard d’éléments de preuve dont la Commission aurait disposé lors de la procédure administrative.

116
De surcroît, une telle circonstance ne saurait justifier que le montant de cette subvention soit omis du calcul des coûts résultant pour la BvS de l’exécution de l’asset-deal 2. En effet, à supposer même que cette subvention constitue pour la BvS un coût irrécupérable dans l’hypothèse de la liquidation de la requérante et de la non-exécution subséquente de l’asset-deal 2, il demeure que la BvS a accordé cette subvention liée à l’exécution de l’asset-deal 2. Dès lors, elle devait être prise en considération dans le calcul des coûts résultant pour la BvS de l’exécution de l’asset-deal 2, consécutivement à l’octroi de la réduction de prix.

117
Il s’ensuit que la requérante n’a pas démontré que la Commission ait commis une erreur manifeste dans l’analyse exposée au considérant 80 de la décision attaquée.

118
Dans la mesure où il a été précédemment constaté que la réduction de prix constituait déjà l’option la plus onéreuse (voir point 112 ci-dessus), il en aurait à plus forte raison été de même si la BvS avait dû verser une subvention additionnelle de 1 million de DEM.

119
Dans ces circonstances, l’argument par lequel la requérante reproche à la Commission de ne pas avoir tenu compte du fait que la réduction de prix pouvait être motivée par le souci d’éviter la perte des aides qui lui avaient été précédemment versées en vue de conclure l’asset-deal 1 ne saurait davantage être accueilli.

120
Par ailleurs, la requérante allègue, dans ses écrits, que le souci de préserver la crédibilité de la BvS et de promouvoir son image de marque était susceptible de relever des éléments qui peuvent raisonnablement être pris en considération par un opérateur privé. Or, la Commission aurait dû tenir compte de la promesse d’aide du land de Thuringe de 1994 et constater que la réduction de prix ne représentait qu’une modalité destinée à honorer cette promesse.

121
Cependant, comme il a été précédemment constaté, la requérante n’a pas démontré que la Commission avait commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que la requérante ne pouvait pas se prévaloir d’un droit à l’adaptation de l’asset-deal 1. Dès lors, il ne saurait être considéré que la crédibilité de la BvS ait pu être affectée par le maintien à 5,8 millions de DEM du prix de vente des trois premières chaînes de fabrication fixé dans le cadre de l’asset-deal 1.

122
Il ressort de ce qui précède que c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission a estimé que la BvS ne s’était pas comportée comme un créancier privé opérant dans des conditions normales de marché et qu’elle n’a pas fait une application erronée de ce critère.

123
En troisième lieu, enfin, s’agissant de l’insuffisance de motivation de la décision attaquée en ce que la Commission n’aurait pas expliqué les raisons pour lesquelles elle n’avait pas pris en considération le rapport d’expertise de la BvS du 30 mai 2000, il convient de rappeler que, dans sa motivation, la Commission pouvait se contenter d’exposer les faits et considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de sa décision (voir point 60 ci-dessus).

124
Or, cette expertise, établie deux ans après l’octroi de la réduction de prix, indique ce qui suit :

« Sur le plan économique, la meilleure des solutions, tant pour la BvS que pour [la requérante], serait que celle-ci réussisse, comme elle l’envisage, à trouver un investisseur en 2000, qui puisse mettre à sa disposition un capital de 3 850 000 DEM, et que la créance de prix d’achat de BvS de 5 800 000 DEM soit éteinte par le paiement de 1 800 000 DEM plus les intérêts. »

125
Cette expertise subordonnait donc la poursuite de l’activité de la requérante non seulement à la réduction de prix, mais également au nouvel apport d’un investisseur, d’un montant de 3 850 000 DEM. Or, le plan de restructuration de 1998 prévoyait déjà la nécessité d’un tel apport. Il est toutefois constant qu’aucun nouvel investisseur privé n’a pu être trouvé (considérant 95 de la décision attaquée).

126
De surcroît, dans sa communication à la Commission du 27 février 2001, la République fédérale d’Allemagne a indiqué que l’expertise de la BvS du 30 mai 2000 ne constituait qu’une première approche ne tenant pas compte, aux fins de l’adaptation du plan de restructuration de 1998, de certains des trimestres de récession des années 1998 et 1999.

127
Dans ce contexte, la Commission a pu, à juste titre, considérer que cette expertise ne constituait pas un fait pertinent auquel il convenait de se référer dans la décision attaquée. La décision attaquée n’est donc pas entachée d’une insuffisance de motivation à cet égard.

128
Eu égard à tout ce qui précède, ce grief doit également être écarté.

En ce qui concerne la détermination prétendument erronée du montant de l’aide

129
La requérante soutient, à titre subsidiaire, que la Commission a erronément déterminé le montant de l’aide soumis à obligation de restitution en vertu de l’article 2 de la décision attaquée. La Commission aurait, en effet, omis d’apporter la preuve que cette aide s’élevait effectivement à 4 millions de DEM. L’article 87, paragraphe 1, CE visant les aides accordées « au moyen de ressources d’État », le montant de l’aide déclarée incompatible avec le marché commun serait égal à celui de la perte de revenus subie par la BvS en accordant la réduction de prix.

130
La Commission ne contesterait pas que la requérante aurait été mise en liquidation si la BvS avait exigé le paiement du prix fixé dans le cadre de l’asset-deal 1. Elle supposerait toutefois que, dans cette hypothèse, l’asset-deal 2 aurait néanmoins été exécuté, ce qui, de l’avis de la requérante, est irréaliste. La Commission ne tiendrait donc pas compte, pour déterminer le montant de l’aide alléguée, des pertes supplémentaires qui auraient découlé, pour la BvS, de l’absence de mise en œuvre de ce second contrat. En outre, d’après le calcul figurant dans la décision attaquée, la perte de revenus de la BvS, en cas de liquidation de la requérante, aurait seulement été égale à la provision accordée aux créanciers dans la masse, et non aux 4 millions de DEM. La Commission ayant chiffré le montant de l’aide en cause à un montant contredisant ses propres constatations, la décision attaquée devrait être annulée.

131
La Commission, soutenue par la partie intervenante, conteste l’argumentation de la requérante.

132
Le Tribunal rappelle que, selon une jurisprudence constante, l’objectif poursuivi par la Commission lorsqu’elle exige la récupération d’une aide illégale est de faire perdre à son bénéficiaire l’avantage dont il avait bénéficié sur le marché par rapport à ses concurrents et de rétablir la situation antérieure au versement de ladite aide (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 21 mars 1990, Belgique/Commission, C‑142/87, Rec. p. I‑959, point 66, et du 4 avril 1995, Commission/Italie, C‑348/93, Rec. p. I‑673, point 27). Cet objectif ne saurait d’ailleurs dépendre de la forme dans laquelle l’aide a été octroyée (arrêt de la Cour du 10 juin 1993, Commission/Grèce, C‑183/91, Rec. p. I‑3131, point 16).

133
Il a, en outre, été jugé (voir, notamment, arrêt de la Cour du 24 février 1987, Deufil/Commission, 310/85, Rec. p. 901) que la suppression d’une aide illégale par voie de récupération est la conséquence logique de la constatation de son illégalité. Par conséquent, la récupération d’une aide étatique illégalement accordée, en vue du rétablissement de la situation antérieure, ne saurait, en principe, être considérée comme une mesure disproportionnée par rapport aux objectifs des dispositions du traité en matière d’aides d’État (arrêt de la Cour du 21 mars 1990, Belgique/Commission, précité, point 66).

134
Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, de la décision attaquée, il est indiqué ce qui suit :

« L[a République fédérale d]’Allemagne prend toutes les mesures qui s’imposent pour obtenir du bénéficiaire le remboursement de l’aide visée à l’article 1er qui a été octroyée illégalement. »

135
S’agissant, comme en l’espèce, d’une aide illégale octroyée sous forme de réduction du prix fixé dans le cadre d’un contrat de vente, il est inexact de soutenir, comme le fait la requérante, que le montant de l’aide à récupérer est inférieur au montant de cette réduction.

136
En effet, aux termes de l’asset-deal 1, le montant de la vente par la BvS des trois premières chaînes de fabrication s’élevait à 5,8 millions de DEM. En accordant la réduction de prix, la requérante a reçu un avantage économique de 4 millions de DEM dont n’ont pas bénéficié ses concurrents.

137
À cet égard, la requérante ne peut valablement prétendre que, du point de vue d’un créancier privé, l’élément constitutif de l’aide d’État aurait été inférieur au montant de la réduction de prix et que le paiement intégral du prix fixé dans le cadre de l’asset-deal 1 aurait entraîné des pertes supplémentaires pour la République fédérale d’Allemagne dès lors qu’il a été précédemment jugé qu’un tel créancier, opérant dans des conditions normales de marché, n’aurait pas accordé ladite réduction (voir point 122 ci-dessus).

138
La requérante considère, en tout état de cause, que la perte subie par la République fédérale d’Allemagne ne serait pas de 4 millions de DEM, mais serait constituée par la provision correspondant à ce montant accordée à la masse des créanciers dans le cadre de la liquidation qui serait intervenue si la BvS n’avait pas octroyé la réduction de prix.

139
Cependant, l’objectif de la récupération d’une aide illégalement octroyée étant le rétablissement de la situation antérieure au versement de cette aide, la Commission était fondée à ordonner le remboursement de ladite aide. En effet, en exigeant le remboursement de la réduction de prix, lequel est susceptible d’entraîner la mise en liquidation de la requérante, cette dernière se trouvera dans une situation comparable à celle qui aurait prévalu si la réduction de prix n’avait pas été accordée, à savoir, selon la requérante, sa mise en liquidation. Il appartiendra, à cet égard, à la République fédérale d’Allemagne, si la requérante est effectivement mise en liquidation, de s’assurer, selon les modalités prévues dans un tel contexte par le droit national, que l’aide en cause soit effectivement récupérée sans que cette mise en liquidation ne s’oppose à l’exécution de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 15 janvier 1986, Commission/Belgique, 52/84, Rec. p. 89, points 16 et 17).

140
Il s’ensuit que ce grief ainsi que le premier moyen dans son entièreté doivent être rejetés comme n’étant pas fondés.

Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE et d’une insuffisance de motivation

Arguments des parties

141
La requérante rappelle, en premier lieu, que la Commission doit tenir compte de la structure du marché lors de l’examen de la proportionnalité de l’aide au titre de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE (arrêts du Tribunal du 6 octobre 1999, Salomon/Commission, T‑123/97, Rec. p. II‑2925, point 79, et du 30 janvier 2002, Keller et Keller Meccanica/Commission, T‑35/99, Rec. p. II‑261, point 88). Elle se fonde, à cet égard, sur les lignes directrices pour les aides au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté. Ces lignes directrices mentionneraient, à titre d’exemple, le cas dans lequel la disparition d’entreprises pourrait aboutir à la création d’une situation de monopole ou d’oligopole. La requérante ajoute que la Commission est tenue de vérifier que l’octroi de l’aide ne s’accompagne pas de la violation d’autres dispositions du droit communautaire, telles que l’article 82 CE et l’article 2 du règlement (CEE) n° 4064/89 du Conseil, du 21 décembre 1989, relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (JO 1990, L 257, p. 13) (arrêts de la Cour du 19 septembre 2000, Allemagne/Commission, C‑156/98, Rec. p. I‑6857, point 78 ; du 3 mai 2001, Portugal/Commission, C‑204/97, Rec. p. I‑3175, points 41 et suivants, et du Tribunal du 31 janvier 2001, RJB Mining/Commission, T‑156/98, Rec. p. II‑337, points 112 et suivants).

142
En l’espèce, la Commission aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en omettant de prendre en considération, parmi l’ensemble des éléments mis en balance aux fins de son appréciation de la proportionnalité de l’aide au titre de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, le fait que, en cas de disparition de la requérante, le groupe Schott Glas acquerrait ou renforcerait une position dominante dans certains domaines de la production du verre.

143
La requérante reproche plus particulièrement à la Commission d’avoir ignoré ses explications sur la structure du marché et de ne pas avoir vérifié si sa disparition était de nature à entraîner la constitution d’un oligopole étroit, comme l’aurait démontré le gouvernement allemand dans sa communication du 20 novembre 2000. Elle reprend un certain nombre de chiffres relatifs aux parts de marché figurant dans cette communication et relève que leur contestation par la partie intervenante ne serait pas étayée, alors que celle-ci est la principale entreprise du secteur. La partie intervenante n’aurait notamment pas réfuté l’argument selon lequel il existe un marché du matériau brut pour « verre regard » sur lequel elle se trouverait en situation de quasi-monopole si la requérante disparaissait.

144
Enfin, la décision attaquée serait insuffisamment motivée, dans la mesure où elle ne permettrait pas d’établir si, lors de l’évaluation de la réduction de prix au titre de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, la Commission a tenu compte de la modification de la structure du marché à la suite de la disparition de la requérante, dans l’hypothèse où le prix d’achat serait intégralement maintenu.

145
En second lieu, la requérante fait grief à la Commission d’avoir fondé son appréciation au titre de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE sur des faits inexacts, à savoir sur le plan de restructuration qui lui avait été transmis le 1er décembre 1998. En effet, ce plan ne concorderait pas avec le projet de restructuration de la requérante au moment de l’adoption de la décision attaquée, le 12 juin 2001, lequel aurait été déterminant en l’espèce (arrêt du Tribunal du 5 juin 2001, ESF Elbe-Stahlwerke Feralpi/Commission, T‑6/99, Rec. p. II‑1523, point 93). À cet égard, la Commission aurait donné l’assurance aux autorités allemandes qu’elle les informerait avant d’adopter une décision finale, afin que celles-ci soient en mesure de lui transmettre le nouveau plan de restructuration qu’elles avaient proposé de lui transmettre dans leur communication du 27 février 2001. La requérante estime que, dans ces conditions, la Commission ne devait pas se fonder, dans la décision attaquée, sur le plan de restructuration de 1998.

146
Enfin, la décision attaquée serait insuffisamment motivée, dans la mesure où elle ne mentionnerait pas l’expertise Arnold établie à l’initiative du land de Thuringe et jointe à la communication de la République fédérale d’Allemagne à la Commission du 27 février 2001. Il s’agirait de la seule pièce du dossier administratif comportant une analyse systématique de la situation économique de la requérante. Elle démontrerait que celle-ci était en voie d’assainissement en 2000. Or, dans la décision attaquée (considérants 96 et 97), la Commission aurait conclu, en totale contradiction avec cette expertise, que le plan de restructuration n’avait pas permis de rétablir la viabilité de la requérante. Cette appréciation de la Commission aurait d’ailleurs entre-temps été infirmée par l’expertise Pfizenmayer du 10 décembre 2001.

147
La Commission, soutenue par la partie intervenante, réfute l’argumentation de la requérante.

Appréciation de Tribunal

148
Il convient de rappeler que la Commission dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans le domaine de l’article 87, paragraphe 3, CE (arrêts de la Cour du 21 mars 1990, Belgique/Commission, précité, point 56, et du 11 juillet 1996, SFEI e.a., C‑39/94, Rec. p. I‑3547, point 36). Le contrôle exercé par le juge communautaire doit donc se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de l’obligation de motivation, ainsi que de l’exactitude matérielle des faits, de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir (arrêt du Tribunal du 22 octobre 1996, Skibsværftsforeningen e.a./Commission, T‑266/94, Rec. p. II‑1399, point 170). Il n’appartient pas au juge communautaire de substituer son appréciation économique à celle de la Commission (arrêts du Tribunal du 12 décembre 1996, AIUFFASS et AKT/Commission, T‑380/94, Rec. p. II‑2169, point 56, et HAMSA/Commission, précité, point 48).

149
Toutefois, d’une part, la Commission est tenue par les encadrements ou communications qu’elle adopte en matière de contrôle des aides d’État dans la mesure où ils ne s’écartent pas des normes du traité et où ils sont acceptés par les États membres (arrêts de la Cour Deufil/Commission, précité, point 22 ; du 24 mars 1993, CIRFS e.a./Commission, C‑313/90, Rec. p. I‑1125, point 36 ; du 15 octobre 1996, IJssel-Vliet, C‑311/94, Rec. p. I‑5023, point 43, et du 26 septembre 2002, Espagne/Commission, C‑351/98, Rec. p. I‑8031, point 53). D’autre part, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 253 CE, elle doit motiver ses décisions, y compris celles portant refus de déclarer des aides compatibles avec le marché commun sur le fondement de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE.

150
En premier lieu, il convient d’examiner l’argument de la requérante aux termes duquel elle reproche à la Commission d’avoir fondé la décision attaquée sur le plan de restructuration de décembre 1998 et non sur le plan de restructuration du 19 avril 2001, ainsi que d’avoir omis de prendre en considération le rapport Arnold du 24 novembre 2000.

151
S’agissant, d’une part, du plan de restructuration sur lequel la Commission a fondé sa décision, il convient de rappeler que, aux termes du point 3.2.2 des lignes directrices communautaires pour les aides d’État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté, il est notamment indiqué que l’aide à la restructuration doit être liée à un programme viable de restructuration ou de redressement, qui doit être présenté à la Commission avec toutes les précisions nécessaires, et que ce plan doit permettre de rétablir la compétitivité de l’entreprise dans un délai raisonnable.

152
En l’espèce, premièrement, la réduction de 4 millions de DEM du prix fixé dans le cadre de l’asset-deal 1 a été accordée à la requérante par la BvS avant sa notification à la Commission le 1er décembre 1998. Il est constant que les autorités allemandes ont transmis, dans le cadre de la notification de la réduction de prix, le plan de restructuration de décembre 1998, lequel concernait les années 1998 à 2000. Il est également constant que le plan de restructuration du 19 avril 2001 n’a pas été transmis à la Commission lors de la procédure administrative.

153
En réponse à une question du Tribunal, la requérante a, à cet égard, fait valoir que c’est afin d’éviter la présentation concomitante de différents plans alternatifs que ce dernier plan n’a, dans un premier temps, pas été transmis à la Commission.

154
Deuxièmement, il ressort de la communication de la République fédérale d’Allemagne à la Commission du 27 février 2001 que la nécessité d’adapter le plan de restructuration de 1998 résulte, d’une part, du défaut de contribution d’un investisseur privé prévue dans ce plan et, d’autre part, de la conjoncture extrêmement faible du premier semestre de 1999 qui a contribué à la dégradation de la situation financière de la requérante. La nécessité d’adopter, en 2001, un nouveau plan de restructuration atteste donc de l’échec du plan de restructuration établi en 1998, en ce que ce dernier n’a pas permis de rétablir la viabilité de la requérante dans un délai raisonnable.

155
Troisièmement, il convient de constater qu’aucun élément du dossier ne permet d’établir que la Commission se soit effectivement engagée à informer les autorités allemandes de l’imminence de l’adoption de la décision attaquée, ce que prétend la requérante.

156
À cet égard, il a été jugé que l’obligation pour la Commission de prévenir l’État membre en cause de l’imminence de l’adoption d’une décision négative serait susceptible de constituer un procédé dilatoire en l’empêchant de clore la procédure administrative en cours (arrêt du Tribunal du 21 janvier 1999, Neue Maxhütte Stahlwerke et Lech-Stahlwerke/Commission, T‑129/95, T‑2/96 et T‑97/96, Rec. p. II‑17, point 231).

157
D’ailleurs, aux termes de leur communication du 27 février 2001, les autorités allemandes ont uniquement indiqué que « [l]e gouvernement fédéral informera prochainement la Commission, dans la mesure où celle-ci le juge nécessaire, du résultat définitif de la décision sur l’adaptation du plan de restructuration ». La requérante ne saurait donc valablement prétendre que le gouvernement allemand avait, dans ladite communication du 27 février 2001, proposé de transmettre un nouveau plan de restructuration, un tel plan n’étant en effet pas disponible à cette date.

158
De surcroît, dans le cadre de cette même communication, bien qu’ayant fait mention de la nécessité de procéder à une adaptation du plan de restructuration de 1998, les autorités allemandes ont indiqué ce qui suit :

« Toutefois, le gouvernement fédéral part de l’idée que, sur la base du comportement caractéristique de marché de la BvS, la Commission peut clore la procédure sans examiner les modifications du plan de restructuration dont il faut encore convenir en détail. »

159
Quatrièmement, enfin, ainsi que le souligne la Commission, la requérante n’a pas estimé utile de transmettre ce plan à la Commission entre le 19 avril 2001, date de son adoption, et le 12 juin 2001, date d’adoption de la décision attaquée.

160
Il résulte de l’ensemble de ces considérations que la requérante est mal fondée à faire valoir que la République fédérale d’Allemagne avait formellement demandé à la Commission l’autorisation de soumettre un plan de restructuration actualisé. Il ne saurait ainsi être considéré que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en fondant la décision attaquée sur le plan de restructuration de décembre 1998.

161
S’agissant, d’autre part, du rapport Arnold du 24 novembre 2000, il y est indiqué, en introduction, qu’il a été commandé par le land de Thuringe afin que soit examiné le risque lié à l’octroi d’aides supplémentaires.

162
En outre, en conclusion de ce rapport, il est indiqué ce qui suit :

« L’état des résultats de la société de 1997 à 2002 montre que la société connaît une évolution positive.

Grâce, d’une part, à des hausses de chiffre d’affaires et, d’autre part, à des réductions des coûts, l’état des résultats s’est continûment amélioré depuis 1997, exception faite de l’année 1999. En 2000, en prenant en compte les recettes extraordinaires, il sera possible d’obtenir un résultat équilibré. Le seuil de rentabilité sera atteint en 2002, avec un chiffre d’affaires de 40 millions de DEM.

Cela suppose qu’il n’y ait pas de facteurs exceptionnels qui affectent cette évolution.

La condition de l’évolution ainsi supposée est toutefois la réalisation des investissements nécessaires, estimés selon les prévisions à 11 500 000 DEM. En 2000, il n’a été possible de réaliser des investissements qu’à concurrence de 1 000 000 DEM.

L’état des liquidités de la société est très inquiétant. Outre les moyens destinés aux investissements de remplacement et de rénovation, s’élevant à 11 500 000 DEM, il y a des anciens crédits à résorber, s’élevant à 20 538 000 DEM.

Selon les calculs que nous avons effectués, la société connaîtra en 2001 un manque de liquidités de l’ordre de 7 842 000 DEM et en 2002 un manque de liquidités de l’ordre de 2 215 000 DEM.

Selon nos estimations, la société ne sera pas en mesure de pourvoir à son financement grâce à ses moyens propres futurs. Si l’issue de la procédure de notification à l’Union européenne devait s’avérer négative, il conviendrait d’apporter de nouveaux moyens financiers, à concurrence de 6 000 000 DEM.

La société n’est pas en mesure de le faire.

À notre avis, pour assurer le site de production, un complément de subventions et d’aides ou alors de remise d’anciens crédits en cours seraient indispensables. »

163
Eu égard à ce qui précède, il ne ressort pas du rapport Arnold que la requérante ait présenté des perspectives de rentabilité à long terme.

164
De surcroît, dans sa demande de subvention au land de Thuringe du 5 février 2001, dont la production avait été demandée par le Tribunal, la requérante a indiqué que les investissements prévus par le rapport Arnold étaient « contraires à la réglementation sur les aides dans l’état actuel de l’entreprise » et qu’il convenait donc de s’écarter des conclusions dudit rapport sur ce point.

165
Il ne saurait, dès lors, être considéré, comme le prétend la requérante dans ses écrits, que l’adaptation du plan de restructuration de 1998 était fondé sur le rapport Arnold, dès lors qu’elle a elle-même considéré qu’il convenait de se départir de ses conclusions.

166
Dans ce contexte et, plus particulièrement, au vu des conclusions du rapport Arnold et de l’appréciation portée par la requérante sur celles-ci, la Commission a pu légitimement considérer qu’il n’y avait pas lieu d’y faire référence dans la décision attaquée. Il convient donc de rejeter l’argument de la requérante tiré de l’insuffisance de la motivation de la décision attaquée à cet égard.

167
Quant à l’invocation, par la requérante, de l’expertise Pfizenmayer du 10 décembre 2001, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la légalité d’une décision en matière d’aides doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée (arrêt du 10 juillet 1986, Belgique/Commission, précité, point 16). Or, il suffit de constater que l’expertise Pfizenmayer, produite par la requérante aux fins de la procédure de référé afin d’évaluer ses possibilités de survie économique dans l’hypothèse où le présent recours serait rejeté, étant postérieure à l’adoption de la décision attaquée, la Commission n’en avait pas disposé lors de la procédure administrative.

168
Il s’ensuit que la requérante n’a pas établi que la Commission a fondé son appréciation, au regard de l’article 87, paragraphe 3, CE, sur des faits inexacts ou que la décision attaquée est, à cet égard, entachée d’une insuffisance de motivation.

169
En second lieu, il convient de vérifier, au vu des indications fournies par les lignes directrices pour les aides au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté, si la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en refusant de déclarer compatible avec le marché commun, en application de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, la réduction de prix sans tenir compte de la création d’une situation d’oligopole qui résulterait de la disparition de la requérante.

170
À cet égard, il importe de constater que, aux termes du point 1.2 des lignes directrices susmentionnées (voir point 3 ci-dessus), figurant en introduction desdites lignes, il est indiqué, à titre indicatif, certaines circonstances dans lesquelles une aide au sauvetage ou à la restructuration d’une entreprise en difficulté peut se justifier, par dérogation au principe énoncé au point 1.1 desdites lignes selon lequel il n’est pas souhaitable que les États membres accordent des subventions à des entreprises qui, dans la nouvelle situation de marché, devraient disparaître ou procéder à des restructurations. Il ne saurait toutefois être considéré que la réalisation de l’une de ces circonstances suffise, à elle seule, à justifier l’octroi d’une exonération. En effet, une de ces circonstances ne serait de nature à justifier l’octroi d’une aide d’État destinée à sauver des entreprises en difficulté et à encourager leur restructuration que si les conditions générales d’autorisation des aides au sauvetage et à la restructuration, telles que définies dans les lignes directrices, sont remplies.

171
Or, la requérante n’a pas établi que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que le plan de restructuration de 1998 n’était pas, contrairement à ce qu’exigent lesdites lignes directrices, en mesure de lui permettre de recouvrer sa viabilité (voir point 154 ci-dessus).

172
De surcroît et contrairement à ce que soutient la requérante, il ne découle ni des règles du traité ni des lignes directrices susmentionnées que les aides illégales au sauvetage et à la restructuration doivent être autorisées lorsque la disparition de l’entreprise bénéficiaire aboutit à la création d’une situation de monopole ou d’oligopole étroit sur un marché déterminé.

173
La jurisprudence invoquée par la requérante à l’appui de son argumentation ne saurait d’ailleurs infirmer la conclusion visée au point précédent. En effet, dans son arrêt Salomon/Commission, précité (point 79), le Tribunal s’est borné à constater que la Commission n’avait pas, dans la décision attaquée dans cette affaire, conclu à la compatibilité de l’aide au vu du seul caractère oligopolistique attribué aux marchés en cause, la structure des marchés en cause n’ayant été retenue par la Commission qu’afin de conforter son argumentation selon laquelle le montant de l’aide n’était pas susceptible d’engendrer des distorsions de concurrence indues, contraires à l’intérêt commun au sens de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE. Quant à l’arrêt Keller et Keller Meccanica/Commission, précité (point 88), le Tribunal s’est limité à y constater que le marché pertinent sur lequel opéraient les requérantes ne présentait pas de structure oligopolistique.

174
Par ailleurs, s’agissant de l’insuffisance de motivation alléguée par la requérante sur ce point, il convient de constater que la Commission a, dans la décision attaquée, estimé que la réduction du prix fixé dans le cadre de l’asset-deal 1 ne relevait pas de la dérogation prévue à l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE. En outre, la requérante n’a pas invoqué, lors de la procédure administrative, à l’appui de sa demande subsidiaire d’exonération de la mesure litigieuse au titre de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, l’argument relatif aux conséquences de son éventuelle disparition du marché sur la structure de celui-ci.

175
Dès lors, au vu des exigences relatives à la motivation reprises aux points 59 et 60 ci-dessus, il y a lieu de considérer que, dans les circonstances de l’espèce, la Commission n’était pas tenue d’examiner davantage le risque de création d’une situation oligopolistique sur le marché en cause et le grief tiré de l’insuffisance de motivation de la décision attaquée à cet égard doit être rejeté.

176
Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le présent moyen.

Sur le troisième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense et du principe de bonne administration

Arguments des parties

177
La requérante soutient que, dans la procédure formelle d’examen d’une aide d’État, les principes généraux de la procédure confèrent au bénéficiaire de l’aide des garanties allant au-delà du droit de présenter des observations après l’ouverture de la procédure, tel que cela est prévu en faveur des intéressés par l’article 88, paragraphe 2, CE. La reconnaissance de droits supplémentaires serait compatible avec la jurisprudence invoquée par la Commission aux termes de laquelle le bénéficiaire serait uniquement une « partie intéressée » au sens de la disposition précitée.

178
La situation du bénéficiaire de l’aide se différencierait de celle des tiers intéressés par le fait que, bien qu’il ne soit pas directement partie à la procédure, le bénéficiaire est susceptible d’être menacé dans son existence par la décision finale ordonnant la récupération de l’aide. Cette circonstance justifierait la reconnaissance de davantage de droits.

179
Plus précisément, le droit à un procès équitable (arrêt du Tribunal du 20 février 2001, Mannesmannröhren-Werke/Commission, T‑112/98, Rec. p. II‑729, point 77) ainsi que les droits de la défense imposeraient à la Commission de mettre le bénéficiaire de l’aide en mesure de faire valoir efficacement son point de vue à propos des éléments de fait et de droit qui se dégagent lors de la procédure formelle d’examen et sur lesquels cette institution entend fonder sa décision. Cette garantie découlerait de la jurisprudence consacrant la protection des droits de la défense de toute personne à l’encontre de laquelle un acte faisant grief peut être pris (arrêt du Tribunal du 10 mai 2001, Kaufring e.a./Commission, T‑186/97, T‑187/97, T‑190/97 à T‑192/97, T‑210/97, T‑211/97, T‑216/97 à T‑218/97, T‑279/97, T‑280/97, T‑293/97 et T‑147/99, Rec. p. II‑1337, point 153). Le droit d’être ainsi entendu et le principe de bonne administration impliqueraient le droit d’accès au dossier (arrêt du Tribunal du 19 février 1998, Eyckeler & Malt/Commission, T‑42/96, Rec. p. II‑401, points 75 et suivants). Enfin, la limitation des droits du bénéficiaire de l’aide à celui de présenter ses observations au titre de l’article 88, paragraphe 2, CE irait aussi à l’encontre des règles relatives à l’audition des entreprises concernées, consacrées dans les procédures de mise en œuvre des articles 81 CE et 82 CE et de contrôle des opérations de concentration.

180
En outre, le respect du principe de bonne administration exigerait un examen diligent et impartial (arrêt Commission/Sytraval et Brink’s France, précité, point 62, et arrêt du Tribunal du 30 janvier 2002, max.mobil/Commission, T‑54/99, Rec. p. II‑313, point 48). Il incomberait, dès lors, à la Commission de rechercher, de sa propre initiative, tous les points de vue nécessaires, en demandant notamment des informations aux bénéficiaires, en vue de statuer en pleine connaissance des éléments de fait pertinents à la date d’adoption de sa décision (arrêt ESF Elbe-Stahlwerke Feralpi/Commission, précité, points 93, 126, 128 et 130).

181
Eu égard au pouvoir d’appréciation revendiqué par la Commission dans le contrôle des aides d’État, notamment lors de l’application de l’article 87, paragraphe 3, CE, le respect du droit du bénéficiaire de l’aide à être entendu devrait d’autant plus être garanti (arrêt de la Cour du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, Rec. p. I‑5469, points 13 et suivants, et arrêts du Tribunal du 2 juillet 1992, Dansk Pelsdyravlerforening/Commission, T‑61/89, Rec. p. II‑1931, point 129, et Kaufring e.a./Commission, précité, point 152). Si ce droit se limitait, dans la procédure administrative, à celui de présenter des observations au titre de l’article 88, paragraphe 2, CE, le bénéficiaire de l’aide, pourtant habilité à prendre pleinement position devant le Tribunal, ne se verrait accorder qu’une protection juridictionnelle partielle.

182
En l’espèce, la Commission aurait méconnu les droits procéduraux de la requérante à trois égards. Premièrement, elle n’aurait pas accueilli la demande présentée par la requérante, dans ses observations du 28 août 2000, formulées au titre de l’article 88, paragraphe 2, CE, visant à accéder à, et à présenter sa position sur, la partie non confidentielle du dossier de la Commission.

183
Deuxièmement, la Commission n’aurait pas accepté l’offre du gouvernement allemand, figurant dans sa communication du 27 février 2001, de lui transmettre le plan le plus récent de restructuration de la requérante aux fins de l’examen de la mesure en cause au titre de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, au cas où la Commission estimerait que, contrairement à la thèse de ce gouvernement, cette mesure constituait une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE. En particulier, la Commission n’aurait pas respecté son engagement envers le gouvernement allemand de l’informer préalablement à l’adoption de sa décision, ce qui aurait permis à ce dernier de lui fournir immédiatement le nouveau plan de restructuration.

184
En outre, l’exigence du respect des droits de la défense de la requérante aurait été d’autant plus importante que la Commission entendait écarter la thèse de l’État membre concerné, relative à l’absence d’aide d’État (arrêt Kaufring e.a./Commission, précité, point 152 in fine). En particulier, contrairement à la thèse de la partie intervenante, la position de cet État membre ne prévaudrait pas sur celle du bénéficiaire de l’aide, et il n’aurait pas, dès lors, été superflu d’entendre ce dernier.

185
Dans ces conditions, la requérante reproche à la Commission, d’une part, d’avoir négligé d’examiner sérieusement son argument relatif à son droit à l’adaptation de l’asset-deal 1. D’autre part, la Commission aurait été tenue d’informer la requérante qu’elle envisageait de qualifier d’aide d’État la réduction de prix. Son obligation de procéder à un contrôle minutieux et impartial lui aurait, en outre, imposé de demander directement à la requérante de lui communiquer le nouveau plan de restructuration ou, à défaut, ses grandes lignes et la date à laquelle il serait disponible.

186
En effet, dans sa communication du 27 février 2001, susmentionnée, la République fédérale d’Allemagne aurait indiqué en substance que l’expertise Arnold du 24 novembre 2000, transmise à la Commission, constituait la base de l’adaptation du plan de restructuration. Cette adaptation aurait été rendue nécessaire en raison de l’absence d’investisseur privé et de l’insuffisance de liquidités liée à la récession ayant affecté la période 1998/1999. Or, d’après le rapport Arnold, la requérante aurait atteint le seuil de rentabilité en 2002. Ainsi informée de l’assainissement de la situation financière de la requérante au début de l’année 2001 par rapport à sa situation en 1998, la Commission ne pouvait pas, selon la requérante, se fonder sur le plan de restructuration de 1998, comme elle l’a fait dans la décision attaquée (considérants 34 et 108).

187
Troisièmement, la Commission n’aurait communiqué ni au gouvernement allemand ni à la requérante, avant la fin de la procédure administrative, les questions qu’elle avait posées au groupe Schott Glas à la suite des observations de ce dernier du 28 septembre 2000 et les observations additionnelles de celui-ci du 23 janvier 2001, afin de leur donner la possibilité de faire valoir leur position. En s’informant ainsi de manière unilatérale auprès du principal concurrent de la requérante – sur des points qu’elle estimait importants comme le montrerait le fait même qu’elle a posé ces questions (voir les conclusions du juge M. Vesterdorf faisant fonction d’avocat général sous l’arrêt du Tribunal du 24 octobre 1991, Rhône-Poulenc/Commission, T‑1/89, Rec. p. II‑867, II‑869) –, la Commission aurait méconnu son devoir d’impartialité à l’égard de tous les intéressés, ainsi que le principe de non-discrimination entre ces derniers, le principe de bonne administration et le droit de la requérante à une procédure équitable. En outre, elle aurait réduit considérablement l’effet utile du droit de la requérante à être entendue (ordonnance du 4 avril 2002, Technische Glaswerke Ilmenau/Commission, précitée, point 85).

188
De surcroît, en procédant de la sorte, la Commission aurait également violé les droits de la défense du gouvernement allemand. Contrairement aux allégations de la partie intervenante, la requérante pourrait, en effet, invoquer cette violation à titre de preuve de la méconnaissance de ses droits propres. En effet, l’État membre concerné apparaîtrait comme le « fondé de pouvoir » du bénéficiaire de l’aide, dans la mesure où la Commission a considéré ce dernier comme une simple source d’information. Or, le bénéficiaire ne pourrait pas contraindre l’État membre à former un recours.

189
Ces irrégularités justifieraient l’annulation de la décision attaquée, car, en leur absence, la procédure formelle d’examen aurait pu aboutir à un résultat différent (arrêt de la Cour du 5 octobre 2000, Allemagne/Commission, C‑288/96, Rec. p. I‑8237, point 101). En particulier, la présentation d’observations par le gouvernement allemand et par la requérante sur les observations additionnelles de Schott Glas aurait pu influer sur le sens de la décision attaquée. En effet, dans ladite décision (considérants 35 et 36), la Commission aurait procédé à l’analyse du marché sur la base notamment des observations additionnelles susvisées, réfutant l’idée – avancée par le gouvernement allemand dans sa communication du 20 novembre 2000 – que la disparition de la requérante conduirait à une situation d’oligopole. De surcroît, elle se serait fondée sur ces observations additionnelles relatives notamment à l’existence de capacités excédentaires et à une politique de prix prétendument agressive de la requérante pour conclure que la mesure en cause ne répondait pas au critère de proportionnalité (considérants 102 et 103 de la décision attaquée).

190
La Commission ainsi que la partie intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

Appréciation du Tribunal

191
Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la procédure de contrôle des aides d’État est, compte tenu de son économie générale, une procédure ouverte vis-à-vis de l’État membre responsable, au regard de ses obligations communautaires, de l’octroi de l’aide (arrêts du 10 juillet 1986, Belgique/Commission, précité, point 29, et Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, précité, point 81).

192
Dans le cadre de cette procédure, les intéressés autres que l’État membre responsable de l’octroi de l’aide ne sauraient donc prétendre eux-mêmes à un débat contradictoire avec la Commission, tel que celui ouvert au profit dudit État (arrêts Commission/Sytraval et Brink’s France, précité, point 59, et Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, précité, point 82). Ils ont donc pour l’essentiel un rôle de source d’information pour la Commission (arrêts du Tribunal Skibsværftsforeningen e.a./Commission, précité, point 256, et du 25 juin 1998, British Airways e.a./Commission, T‑371/94 et T‑394/94, Rec. p. II‑2405, point 59).

193
À cet égard, aucune disposition de la procédure de contrôle des aides d’État ne réserve, parmi les intéressés, un rôle particulier au bénéficiaire de l’aide. Il y a d’ailleurs lieu de rappeler que la procédure de contrôle des aides d’État n’est pas une procédure ouverte « à l’encontre » du bénéficiaire des aides qui impliquerait que ce dernier puisse se prévaloir de droits aussi étendus que les droits de la défense en tant que tels (arrêt Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, précité, point 83).

194
Il convient, dans ce contexte, de relever que les principes généraux de droit, tels que ceux du droit à un procès équitable, du droit d’être entendu, de bonne administration ou de non-discrimination, invoqués par la requérante, ne sauraient permettre au juge communautaire d’étendre les droits procéduraux conférés aux intéressés, dans le cadre des procédures de contrôle des aides d’État, par le traité et le droit dérivé. De même, il n’est pas pertinent de se référer à la jurisprudence relative, notamment, à l’application des articles 81 CE et 82 CE et au contrôle des concentrations, lesquels concernent des procédures ouvertes à l’encontre d’entreprises bénéficiant, à ce titre, de droits procéduraux spécifiques, et non à l’encontre d’un État membre.

195
Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter l’allégation de la requérante selon laquelle la situation du bénéficiaire de l’aide est différente de celle des tiers intéressés.

196
En l’espèce, il est constant que la requérante a été invitée à présenter des observations, conformément à l’article 88, paragraphe 2, CE et à l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 659/1999, et qu’elle a fait usage de cette possibilité en soumettant, le 28 août 2000, ses observations à la Commission. D’ailleurs, ainsi qu’il ressort du huitième considérant du règlement n° 659/1999, le respect de la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE offre le meilleur moyen de garantir les droits des parties intéressées.

197
Ainsi, les intéressés autres que l’État membre concerné ne pouvant se prévaloir du droit à une procédure contradictoire avec la Commission, il n’y a pas lieu de considérer que la requérante aurait dû pouvoir accéder à la partie non confidentielle du dossier de la procédure administrative ou que la Commission devait nécessairement lui transmettre les observations ou réponses aux questions de la Commission présentées par Schott Glas.

198
Il a d’ailleurs été jugé, à cet égard, qu’il ne ressort d’aucune disposition relative aux aides d’État ni de la jurisprudence que la Commission serait tenue d’entendre le bénéficiaire de ressources étatiques sur l’appréciation juridique qu’elle porte sur la mesure en cause ou serait tenue d’informer l’État membre concerné − et, a fortiori, le bénéficiaire de l’aide − de sa position avant d’adopter sa décision dès lors que les intéressés et l’État membre ont été mis en demeure de présenter leurs observations (voir, en ce sens, arrêt Neue Maxhütte Stahlwerke et Lech-Stahlwerke/Commission, précité, points 230 et 231).

199
Quant à l’argument soulevé par la requérante lors de la procédure administrative concernant son droit à l’adaptation de l’asset-deal 1 en raison de l’existence d’une promesse d’aide à l’investissement non honorée du land de Thuringe, il suffit de rappeler que la Commission l’a rejeté et que sa motivation sur ce point est suffisante (voir points 67 et 77 ci-dessus). La requérante n’est, dès lors, pas fondée à prétendre que la Commission a négligé d’examiner avec diligence son argumentation sur cette question.

200
S’agissant, enfin, de la violation des droits de la défense de la République fédérale d’Allemagne, la requérante reproche à la Commission de ne pas avoir accepté la proposition dudit État à lui transmettre le plan de restructuration du 19 avril 2001. Elle reproche également à la Commission de ne pas avoir transmis à la République fédérale d’Allemagne les réponses de Schott Glas du 23 janvier 2001 aux questions qu’elle lui avait posées consécutivement à la présentation de ses observations du 28 septembre 2000 sur l’ouverture de la procédure formelle.

201
Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le principe du respect des droits de la défense exige que l’État membre en cause soit mis en mesure de faire connaître utilement son point de vue sur les observations présentées par des tiers intéressés, conformément à l’article 88, paragraphe 2, CE et sur lesquelles la Commission entend fonder sa décision, et que, dans la mesure où l’État membre n’a pas été mis en mesure de commenter de telles observations, la Commission ne peut pas les retenir dans sa décision contre cet État. Cependant, pour qu’une telle violation des droits de la défense entraîne une annulation, il faut que, en l’absence de cette irrégularité, la procédure ait pu aboutir à un résultat différent (arrêts de la Cour du 11 novembre 1987, France/Commission, 259/85, Rec. p. 4393, points 12 et 13 ; du 14 février 1990, France/Commission, C‑301/87, Rec. p. I‑307, points 29 à 31 ; du 21 mars 1990, Belgique/Commission, précité, points 46 à 48, et du 5 octobre 2000, Allemagne/Commission, précité, points 100 et 101).

202
En l’espèce, conformément aux exigences de l’article 88, paragraphe 2, CE et de l’article 6, paragraphe 2, du règlement n° 659/1999, la République fédérale d’Allemagne a été mise en mesure de présenter ses observations sur la décision d’ouverture de la procédure et les observations formulées dans ce contexte par les intéressées, à savoir la requérante et Schott Glas, lui ont été communiquées. Il est en revanche constant que la Commission a omis de transmettre à la République fédérale d’Allemagne les réponses de Schott Glas, du 23 janvier 2001, aux questions qu’elle lui avait posées consécutivement à ses observations initiales sur l’ouverture de la procédure.

203
Cependant, une telle violation des droits de la défense ne revêt pas une importance telle que son inobservation entraîne, en elle-même, l’annulation de l’acte attaqué. Cette violation constitue, dès lors, un vice de forme exigeant que soit invoqué par l’État membre concerné l’effet négatif particulier de cette méconnaissance sur ses droits subjectifs et que soient appréciées les conséquences de l’irrégularité de la procédure sur le contenu de l’acte litigieux. Or, tel n’a pas été le cas en l’espèce.

204
Dans ces circonstances, l’argument de la requérante tiré de la violation des droits de la défense de la République fédérale d’Allemagne est inopérant.

205
En tout état de cause, s’agissant de la production dudit plan de restructuration, il a été précédemment constaté que les autorités allemandes n’avaient pas formellement proposé à la Commission de lui transmettre le plan de restructuration du 19 avril 2001 et qu’elles avaient d’ailleurs estimé que la Commission pouvait statuer sur la base des éléments d’information dont elle disposait déjà (voir point 160 ci-dessus). La Commission n’a, par conséquent, pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en ne demandant ni à la République fédérale d’Allemagne ni, a fortiori, à la requérante de produire ledit plan.

206
Quant au fait que la Commission a, ainsi qu’elle l’admet, omis de transmettre aux autorités allemandes les réponses de Schott Glas du 23 janvier 2001 à ses questions, le Tribunal souligne que cette seule circonstance ne saurait, en tout état de cause, être de nature à conduire à l’annulation de la décision attaquée.

207
Il y a en effet lieu, d’une part, de relever que la Commission n’a pas, dans la décision attaquée, considéré, contrairement aux allégations de Schott Glas dans lesdites réponses, qu’il existait des surcapacités structurelles sur certains marchés de produits où la requérante était active (considérant 101).

208
D’autre part, s’agissant des allégations de Schott Glas relatives à la politique de prix prétendument agressive pratiquée par la requérante, la Commission a, au titre de l’examen de la condition relative à la proportionnalité de l’aide en cause dans la décision attaquée, fait valoir ce qui suit (considérant 103) :

« Dans ses observations relatives à l’ouverture de la procédure, un concurrent de [la requérante] a fait valoir que [la requérante] vendait ses produits systématiquement au-dessous du prix du marché, voire au-dessous du prix de revient, et que [la requérante] avait constamment bénéficié d’une résorption de ses pertes. Étant donné qu’aucun plan de restructuration réaliste n’a été présenté, la Commission ne peut exclure que l’entreprise ait consacré les fonds perçus à des activités ayant provoqué des distorsions sur le marché et qui n’étaient pas liées avec le processus de restructuration. »

209
Or, à supposer même que, contrairement à ce qui ressort de ce point, la Commission ait fondé son raisonnement non seulement sur les observations de Schott Glas, mais également sur ses réponses du 23 janvier 2001 aux questions de la Commission, afin de considérer que la condition relative à la proportionnalité de l’aide n’était pas satisfaite, cette circonstance ne saurait conduire à l’annulation de la décision attaquée. En effet, comme il a été précédemment constaté, la Commission a, à juste titre, estimé que le retour à la viabilité de la requérante ne pouvait être escompté en l’absence d’un plan de restructuration adéquat. Cette constatation était, à elle seule, de nature à justifier l’appréciation d’incompatibilité de l’aide en cause.

210
Il s’ensuit que, même si la République fédérale d’Allemagne avait disposé des réponses de Schott Glas du 23 janvier 2001, la décision n’aurait pu avoir un contenu différent.

211
Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le présent moyen.

Sur le quatrième moyen, tiré d’une insuffisance de motivation

Arguments des parties

212
Outre les insuffisances de motivation qu’elle invoque en relation avec les autres moyens, la requérante reproche à la Commission de ne pas avoir suffisamment motivé la décision attaquée en ce qui concerne, d’une part, l’affectation des échanges entre les États membres au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE et, d’autre part, l’altération des conditions des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun, au sens de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE. La Commission se serait limitée à constater la présence de concurrents et l’existence d’échanges sur le marché des produits concernés (considérant 51). Or, elle aurait dû définir ce marché au moins dans ses grandes lignes, désigner les principaux concurrents de la requérante dans les autres États membres, ainsi que caractériser les courants d’échanges essentiels dans la Communauté, et préciser les conséquences de la disparition de la requérante du marché, alors que dans certains domaines le groupe Schott Glas serait son seul concurrent (arrêt British Airways e.a./Commission, précité, point 273).

213
Par ailleurs, la motivation de la décision attaquée ne prendrait pas en considération le contexte de la mesure en cause (arrêt de la Cour du 15 mai 1997, TWD/Commission, C‑355/95 P, Rec. p. I‑2549, point 26). Lors de l’application du critère de l’investisseur privé, la Commission aurait dû en effet examiner la mesure en cause dans le contexte des aides précédentes, soumises à une procédure de contrôle séparée (considérants 37, 42, 63, 65, 85 et 110).

214
La Commission et la partie requérante réfutent les arguments avancés par la requérante dans le cadre du présent moyen.

Appréciation du Tribunal

215
Il y a lieu de rappeler que, s’il est constant que la Commission est tenue d’évoquer, dans les motifs de sa décision, à tout le moins les circonstances dans lesquelles une aide a été accordée, lorsqu’elles permettent de démontrer que l’aide est de nature à affecter les échanges entre États membres, elle n’est pas tenue de faire la démonstration de l’effet réel d’aides déjà accordées. Si tel était le cas, en effet, cette exigence aboutirait à favoriser les États membres qui versent des aides illégales au détriment de ceux qui notifient les aides à l’état de projet (voir, en ce sens, arrêt du 19 septembre 2002, Espagne/Commission, C‑113/00, précité, point 54, et la jurisprudence citée).

216
Au regard de cette jurisprudence, il n’apparaît pas que la Commission ait manqué, en l’occurrence, à l’obligation qui lui incombe de motiver de manière suffisante la décision attaquée.

217
En effet, la Commission a, aux considérants 35 et 36 de la décision attaquée, défini le marché de produits en cause, à savoir le verre spécial, et constaté que la requérante était l’une des dix entreprises de la Communauté présente sur ce marché. En outre, le considérant 51 de la décision attaquée comporte un exposé adéquat et suffisant des faits et considérations juridiques pris en compte dans l’appréciation de la condition relative à l’affectation des échanges entre États membres, à savoir que des concurrents de la requérante établis dans la Communauté étaient présents sur le marché de produits en cause, que des échanges étaient effectués sur ce marché et que ces concurrents n’avaient pas bénéficié d’un avantage financier tel que celui dont avait bénéficié la requérante.

218
Il s’ensuit que ce moyen doit également être rejeté.

Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation de l’article 20, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement n° 659/1999

219
La requérante estime que la Commission a méconnu une règle essentielle de procédure en omettant de lui transmettre d’office copie de la décision attaquée, conformément à l’article 20, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement n° 659/1999. L’objectif de cette disposition serait de donner au bénéficiaire de l’aide, dont l’implication est nettement plus importante que celle des autres intéressés, la certitude absolue qu’il est bien en possession du texte adopté par le collège des commissaires. Le principe de sécurité juridique imposerait à la Commission de s’acquitter de cette obligation dans un délai de deux mois à compter de la date de la décision.

220
À cet égard, le Tribunal estime que la Commission fait valoir, à juste titre, que l’article 20, paragraphe 1, deuxième phrase, dudit règlement ne fait naître, à son égard, une obligation de transmission de la décision mettant fin à la procédure de contrôle que postérieurement à son adoption et à sa notification à l’État membre concerné. Or, la légalité d’un acte devant être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date de son adoption, la violation de la disposition susmentionnée ne saurait conduire au constat de l’illégalité de la décision attaquée et, partant, à son annulation.

221
Il convient dès lors de rejeter le cinquième moyen ainsi que le présent recours dans son entièreté.


Sur les dépens

222
Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé en ses conclusions et moyens, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux de la Commission, en ce compris ceux afférents à la procédure de référé, conformément aux conclusions de cette dernière.

223
La requérante supportera également les dépens de la partie intervenante, conformément aux conclusions de cette dernière.


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)
Le recours est rejeté.

2)
La partie requérante supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission et la partie intervenante dans l’affaire au principal et dans la procédure en référé.

García-Valdecasas

Lindh

Cooke

Legal

Martins Ribeiro

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 juillet 2004.

Le greffier

Le président

H. Jung

R. García-Valdecasas


1
Langue de procédure : l'allemand.