Language of document : ECLI:EU:T:2021:821

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

24 novembre 2021 (*) (1)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises à l’encontre de la Syrie – Gel des fonds – Erreur d’appréciation – Proportionnalité – Droit de propriété – Droit d’exercer une activité économique – Détournement de pouvoir – Obligation de motivation – Droits de la défense – Droit à un procès équitable – Droit à une protection juridictionnelle effective »

Dans l’affaire T‑259/19,

Aman Dimashq JSC, établie à Damas (Syrie), représentée par Mes L. Cloquet et J.-P. Buyle, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme S. Kyriakopoulou et M. V. Piessevaux, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision d’exécution (PESC) 2019/87 du Conseil, du 21 janvier 2019, mettant en œuvre la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2019, L 18 I, p. 13), du règlement d’exécution (UE) 2019/85 du Conseil, du 21 janvier 2019, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2019, L 18 I, p. 4), de la décision (PESC) 2019/806 du Conseil, du 17 mai 2019, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2019, L 132, p. 36), du règlement d’exécution (UE) 2019/798 du Conseil, du 17 mai 2019, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2019, L 132, p. 1), de la décision (PESC) 2020/719 du Conseil, du 28 mai 2020, modifiant la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2020, L 168, p. 66), et du règlement d’exécution (UE) 2020/716 du Conseil, du 28 mai 2020, mettant en œuvre le règlement (UE) no 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2020, L 168, p. 1), en tant que ces actes visent la requérante,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. S. Gervasoni, président, L. Madise et J. Martín y Pérez de Nanclares (rapporteur), juges,

greffier : M. B. Lefebvre, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 21 octobre 2020,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige et faits postérieurs à l’introduction du recours

1        La requérante, Aman Dimashq JSC, également nommée Aman Damascus JSC, est une personne morale de droit syrien créée le 7 octobre 2017 et inscrite au registre du commerce syrien sous le numéro 18 196. Son siège social se situe à Damas (Syrie). Elle est active dans le domaine de la construction de bâtiments résidentiels, commerciaux et récréatifs.

2        Condamnant fermement la répression violente des manifestations pacifiques en Syrie et lançant un appel aux autorités syriennes pour qu’elles s’abstiennent de recourir à la force, le Conseil de l’Union européenne a adopté, sur le fondement de l’article 29 TUE, la décision 2011/273/PESC, du 9 mai 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2011, L 121, p. 11). Compte tenu de la gravité de la situation, le Conseil a institué un embargo sur les armes, une interdiction des exportations de matériel susceptible d’être utilisé à des fins de répression interne, des restrictions à l’admission dans l’Union européenne ainsi que le gel des fonds et des ressources économiques de certaines personnes et entités responsables de la répression violente exercée contre la population civile syrienne.

3        Les noms des personnes responsables de la répression violente exercée contre la population civile en Syrie ainsi que ceux des personnes, physiques ou morales, et des entités qui leur sont liées sont mentionnés dans l’annexe de la décision 2011/273. En vertu de l’article 5, paragraphe 1, de cette décision, le Conseil, statuant sur proposition d’un État membre ou du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, peut modifier ladite annexe. Le nom de la requérante n’y figurait pas lors de l’adoption de ladite décision.

4        Étant donné que certaines des mesures restrictives prises à l’encontre de la République arabe syrienne entrent dans le champ d’application du traité FUE, le Conseil a adopté, sur le fondement de l’article 215, paragraphe 2, TFUE, le règlement (UE) no 442/2011, du 9 mai 2011, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2011, L 121, p. 1). La teneur de ce règlement est, pour l’essentiel, identique à celle de la décision 2011/273, mais il prévoit des possibilités de déblocage des fonds gelés. La liste des personnes, des entités et des organismes reconnus comme étant soit responsables de la répression en cause, soit associés auxdits responsables, figurant à l’annexe II dudit règlement, est identique à celle figurant à l’annexe de la décision 2011/273. En vertu de l’article 14, paragraphes 1 et 4, du règlement no 442/2011, lorsque le Conseil décide d’appliquer à une personne, physique ou morale, à une entité ou à un organisme les mesures restrictives visées, il modifie l’annexe II en conséquence et, par ailleurs, examine la liste qui y figure à intervalles réguliers et au moins tous les douze mois.

5        Par la décision 2011/782/PESC, du 1er décembre 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/273 (JO 2011, L 319, p. 56), le Conseil a estimé, compte tenu de la gravité de la situation en Syrie, qu’il était nécessaire d’instituer des mesures restrictives supplémentaires. Par souci de clarté, les mesures imposées par la décision 2011/273 et les mesures supplémentaires ont été regroupées dans un instrument juridique unique. La décision 2011/782 prévoit, à son article 18, des restrictions en matière d’admission sur le territoire de l’Union des personnes dont la liste figure à l’annexe I et, à son article 19, le gel des fonds et des ressources économiques des personnes et des entités dont le nom figure aux annexes I et II.

6        Le règlement no 442/2011 a été remplacé par le règlement (UE) no 36/2012 du Conseil, du 18 janvier 2012, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO 2012, L 16, p. 1).

7        La décision 2011/782 a été remplacée par la décision 2012/739/PESC du Conseil, du 29 novembre 2012, concernant des mesures restrictives à l'encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/782 (JO 2012, L 330, p. 21), elle-même remplacée par la décision 2013/255/PESC du Conseil, du 31 mai 2013, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO 2013, L 147, p. 14).

8        Le 12 octobre 2015, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2015/1836, modifiant la décision 2013/255 (JO 2015, L 266, p. 75). Le même jour, il a adopté le règlement (UE) 2015/1828, modifiant le règlement no 36/2012 (JO 2015, L 266, p. 1).

9        Par la décision d’exécution (PESC) 2019/87 du Conseil, du 21 janvier 2019, mettant en œuvre la décision 2013/255 (JO 2019, L 18 I, p. 13), et par le règlement d’exécution (UE) 2019/85 du Conseil, du 21 janvier 2019, mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2019, L 18 I, p. 4) (ci-après, dénommés ensemble, les « actes initiaux »), le nom de la requérante a été inséré à la ligne 73 du tableau B des listes des noms des personnes, entités et organismes visés par les mesures restrictives qui figurent à l’annexe I de la décision 2013/255 et à l’annexe II du règlement no 36/2012 (ci-après, prises ensemble, les « listes en cause »), avec mention des motifs suivants :

« Aman Dimashq est une coentreprise d’une valeur de 18,9 millions de dollars des États-Unis entre Damascus Cham Holding et Aman [Holding]. Du fait de sa participation à la construction de Marota City, un projet immobilier haut de gamme appuyé par le régime, Aman Dimashq soutient le régime syrien et/ou en tire avantage. »

10      Le 22 janvier 2019, le Conseil a procédé à la publication au Journal officiel de l’Union européenne de l’avis à l’attention des personnes faisant l’objet des mesures restrictives prévues par la décision 2013/255 et par le règlement no 36/2012 (JO 2019, C 27, p. 3).

11      Par lettre du 26 mars 2019, les représentants de la requérante se sont opposés à l’inscription du nom de celle-ci sur les listes en cause et ont demandé au Conseil de leur communiquer les documents étayant ladite inscription. Par lettres des 2 et 12 avril 2019, les représentants de la requérante ont réitéré leur demande auprès du Conseil afin d’avoir accès aux documents étayant l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause avant le dépôt de la requête, dans le cas d’espèce.

12      Par lettre du 13 mai 2019, d’une part, le Conseil a indiqué aux représentants de la requérante que, en substance, ses observations n’étaient pas de nature à remettre en cause la décision d’inscrire son nom sur les listes en cause. D’autre part, le Conseil leur a communiqué le document portant la référence WK 54/2019 INIT, daté du 28 février 2019, comprenant les éléments de preuve venant au soutien des motifs de ladite inscription.

13      Le 17 mai 2019, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2019/806, modifiant la décision 2013/255 (JO 2019, L 132, p. 36), qui a prorogé l’application de cette dernière décision jusqu’au 1er juin 2020 ; le même jour, le Conseil a également adopté le règlement d’exécution (UE) 2019/798, mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2019, L 132, p. 1) (ci-après, dénommés ensemble, les « actes de maintien de 2019 »).

14      Par lettre du 20 mai 2019, le Conseil a informé les représentants de la requérante de l’adoption des actes de maintien de 2019 ainsi que de la possibilité de solliciter un réexamen de la décision de maintien de l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause avant le 28 février 2020.

15      Par lettre du 28 février 2020, la requérante, par l’intermédiaire de ses représentants, s’est opposée au maintien de son nom sur les listes en cause.

16      Le 28 mai 2020, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2020/719, modifiant la décision 2013/255 (JO 2020, L 168, p. 66), qui a prorogé l’application de cette dernière décision jusqu’au 1er juin 2021, et le règlement d’exécution (UE) 2020/716, mettant en œuvre le règlement no 36/2012 (JO 2020, L 168, p. 1) (ci-après, dénommés ensemble, les « actes de maintien de 2020 »).

17      Par lettre du 2 juin 2020, le Conseil a informé les représentants de la requérante de l’adoption des actes de maintien de 2020 ainsi que de la possibilité de solliciter un réexamen desdits actes avant le 1er mars 2021. Le Conseil a également informé la requérante que, en substance, les observations transmises dans sa lettre du 28 février 2020 n’étaient pas de nature à remettre en cause la décision de maintenir son nom sur les listes en cause.

 Procédure et conclusions des parties

18      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 15 avril 2019, la requérante a introduit le présent recours, tendant à l’annulation des actes initiaux, en tant que ces actes la concernent.

19      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 30 juillet 2019, la requérante a, sur le fondement de l’article 86 du règlement de procédure du Tribunal, adapté la requête, de sorte que celle-ci tend également à l’annulation des actes de maintien de 2019, en tant que ces actes la concernent. La requérante a également réitéré les chefs de conclusions qui figuraient dans la requête.

20      Le 8 août 2019, le Conseil a déposé au greffe du Tribunal le mémoire en défense et les observations sur le premier mémoire en adaptation.

21      La réplique a été déposée le 1er octobre 2019.

22      Par décision du 17 octobre 2019, le président du Tribunal a, en application de l’article 27, paragraphe 3, du règlement de procédure, réattribué l’affaire à un nouveau juge rapporteur, affecté à la quatrième chambre.

23      La duplique a été déposée le 8 janvier 2020.

24      La phase écrite de la procédure a été close le 8 janvier 2020.

25      Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89, paragraphe 3, sous a) et d), du règlement de procédure, le Tribunal a, le 23 juillet 2020, demandé aux parties de répondre à une série de questions et de produire certains documents. Les parties ont répondu aux questions et ont déféré à la demande de production de documents dans le délai imparti.

26      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 13 août 2020, la requérante a, sur le fondement de l’article 86 du règlement de procédure, adapté une seconde fois la requête, de sorte que celle-ci tend également à l’annulation des actes de maintien de 2020 en tant que ces actes la concernent. La requérante a également réitéré les chefs de conclusions qui figuraient dans la requête ainsi que dans le premier mémoire en adaptation et a présenté de nouveaux arguments.

27      Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89, paragraphe 3, sous d), du règlement de procédure, le Tribunal a, le 30 septembre 2020, demandé au Conseil de produire un document. Le Conseil a déféré à la demande de production de document dans le délai imparti. La requérante n’a pas soumis d’observations sur la réponse du Conseil à cette mesure d’organisation de la procédure.

28      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal au cours de l’audience qui s’est déroulée le 21 octobre 2020, lors de laquelle le Conseil a également présenté ses observations sur le second mémoire en adaptation. En particulier, le Conseil a renvoyé aux moyens et arguments contenus dans la défense et la duplique.

29      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les actes initiaux, les actes de maintien de 2019 et les actes de maintien de 2020 (ci-après, dénommés ensemble, les « actes attaqués ») en tant qu’ils la concernent ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

30      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens ;

–        à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où le Tribunal annulerait les actes attaqués en tant qu’ils concernent la requérante, ordonner le maintien des effets de la décision d’exécution 2019/87 ainsi que des décisions 2019/806 et 2020/719 en tant que celles-ci concernent la requérante, jusqu’à la prise d’effet de l’annulation des règlements d’exécution 2019/85, 2019/798 et 2020/716 en tant qu’ils concernent la requérante.

 En droit

31      Au soutien de son recours, la requérante invoque six moyens, tirés, le premier, d’une erreur d’appréciation, le deuxième, d’une violation du principe de proportionnalité, le troisième, d’une violation du droit de propriété et de la liberté d’exercer une activité économique, le quatrième, d’un « abus de pouvoir », le cinquième, d’une violation de l’obligation de motivation et, enfin, le sixième, d’une violation des droits de la défense, du droit à un procès équitable et du droit à une protection juridictionnelle effective.

32      Il convient d’examiner, tout d’abord, le cinquième moyen, puis le sixième moyen, avant d’examiner le premier moyen, le quatrième moyen et, enfin, les deuxième et troisième moyens pris ensemble.

 Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

33      La requérante soutient que la motivation fournie par le Conseil ne satisfait pas à l’obligation qui incombe aux institutions de l’Union en vertu de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE. Plus précisément, la requérante fait valoir que la motivation retenue dans les actes attaqués ne lui permet pas de déterminer quelles seraient les transactions litigieuses. En outre, elle ajoute que le Conseil n’a pas examiné avec soin la motivation adoptée et que celle-ci est purement formelle, n’ayant pas fait l’objet d’une réflexion de la part du Conseil.

34      Le Conseil conteste les arguments de la requérante.

35      Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver un acte faisant grief, qui constitue le corollaire du principe du respect des droits de la défense, a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si l’acte est bien fondé ou s’il est éventuellement entaché d’un vice permettant d’en contester la validité devant le juge de l’Union et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de cet acte (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 60 et jurisprudence citée).

36      Il convient également de rappeler que la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 61 et jurisprudence citée).

37      La motivation d’un acte du Conseil imposant une mesure de gel de fonds doit permettre que soient identifiées les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles celui-ci considère, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire d’appréciation, que l’intéressé doit faire l’objet d’une telle mesure (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 63 et jurisprudence citée).

38      Cependant, l’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires peuvent avoir à recevoir des explications (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 64 et jurisprudence citée).

39      Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 65 et jurisprudence citée).

40      En particulier, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 66 et jurisprudence citée).

41      Enfin, il y a lieu de rappeler que l’obligation de motiver un acte constitue une forme substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. En effet, la motivation d’un acte consiste à exprimer formellement les motifs sur lesquels repose cet acte. Si ces motifs sont entachés d’erreurs, celles-ci entachent la légalité au fond dudit acte, mais non la motivation de celui-ci, qui peut être suffisante tout en exprimant des motifs erronés (voir arrêt du 5 novembre 2014, Mayaleh/Conseil, T‑307/12 et T‑408/13, EU:T:2014:926, point 96 et jurisprudence citée).

42      En l’espèce, en premier lieu, il convient de relever que l’argument de la requérante selon lequel le Conseil n’a pas examiné avec soin la motivation adoptée vise, en réalité, à contester les éléments factuels qui ont été retenus par le Conseil. Dès lors que cet argument ne tend pas à remettre spécifiquement en cause le caractère suffisant de la motivation des actes attaqués, mais plutôt l’existence de liens entre la requérante et le régime syrien, il doit être examiné dans le cadre du premier moyen, tiré d’une erreur d’appréciation.

43      En second lieu, en ce qui concerne les raisons pour lesquelles des mesures restrictives visant la requérante ont été adoptées et maintenues, il convient de relever que les motifs d’inscription du nom de la requérante sont restés inchangés depuis l’adoption des actes initiaux, puisqu’ils n’ont pas été modifiés lors de l’adoption des actes de maintien de 2019, ni lors de celle des actes de maintien de 2020. Ainsi, le Conseil a motivé l’inscription de son nom sur les listes en cause de la manière suivante :

« Aman Dimashq est une coentreprise d’une valeur de 18, 9 millions de dollars des États-Unis entre Damascus Cham [Holding] et Aman [Holding]. Du fait de sa participation à la construction de Marota City, un projet immobilier haut de gamme appuyé par le régime, Aman [Dimashq] soutient le régime syrien et/ou en tire avantage. »

44      Tout d’abord, il convient de rappeler que le critère général d’inscription énoncé à l’article 27, paragraphe 1, et à l’article 28, paragraphe 1, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, repris, en ce qui concerne le gel des fonds, à l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828, prévoit que les personnes et entités bénéficiant des politiques menées par le régime syrien ou soutenant celui-ci font l’objet de mesures restrictives.

45      Il y a lieu de déduire des motifs d’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause, mentionnés aux points 9 et 43 ci-dessus, que cette dernière a vu son nom être inscrit et maintenu sur les listes en cause en raison de son lien avec le régime syrien. Autrement dit, l’inscription du nom de la requérante est fondée sur le critère défini au paragraphe 1 de l’article 27 et de l’article 28 de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, et au paragraphe 1, sous a), de l’article 15 du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828 (critère de l’association avec le régime).

46      Ensuite, il convient de constater que les raisons, spécifiques et concrètes, ayant conduit le Conseil à procéder à l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause et à l’y maintenir sont indiquées de manière suffisamment claire pour permettre à la requérante de les comprendre. En effet, lesdits motifs portent sur des faits clairs concernant la requérante, à savoir, premièrement, son statut de coentreprise créée par Damascus Cham Holding et Aman Holding, deuxièmement, sa participation à la construction du projet Marota City, appuyé par le régime syrien et, troisièmement, le fait qu’elle soutient le régime syrien.

47      De surcroît, les moyens et les arguments soulevés par la requérante dans ses écritures indiquent, d’une part, qu’elle a été mise en mesure de connaître les justifications des mesures prises à son égard afin de pouvoir les contester utilement devant le juge de l’Union et, d’autre part, que le contexte dans lequel s’inscrivent les mesures était connu d’elle.

48      Enfin, le fait que le Conseil n’ait pas exposé de manière détaillée les transactions litigieuses qui seraient à l’origine de l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause ne saurait conduire à constater une violation de l’obligation de motivation qui lui incombe, dès lors que, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 39 et 40 ci-dessus, le Conseil n’est pas tenu de spécifier tous les éléments de fait et de droit pertinents et que la requérante a été mise en mesure de comprendre la portée des mesures prises à son égard.

49      Il convient d’en conclure que la motivation des actes attaqués est compréhensible et suffisamment précise pour permettre à la requérante de connaître les raisons ayant conduit le Conseil à considérer que l’inscription et le maintien de son nom sur les listes en cause étaient justifiés et d’en contester la légalité devant le juge de l’Union et pour permettre à ce dernier d’exercer son contrôle.

50      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le cinquième moyen.

 Sur le sixième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense, du droit à un procès équitable et du droit à une protection juridictionnelle effective

51      La requérante soutient, en substance, que les actes attaqués violent ses droits de la défense et son droit à un procès équitable, tels que prévus à l’article 48, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») et à l’article 6, paragraphe 3, de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, dans la mesure où le Conseil ne l’a pas entendue avant l’adoption desdits actes, ainsi que son droit à une protection juridictionnelle effective, tel que consacré à l’article 47 de la Charte.

52      Premièrement, la requérante fait valoir, à cet égard, que, compte tenu du fait qu’elle n’a pas été entendue préalablement à l’adoption des actes attaqués, ses droits de la défense n’auraient pas pu être exercés utilement. Plus particulièrement, la requérante prétend que le droit d’être entendu requiert qu’elle puisse faire connaître son point de vue quant à la réalité et à la pertinence des faits allégués ainsi que sur les éléments de preuve retenus contre elle avant que la mesure litigieuse ne soit adoptée. En outre, selon la requérante, il n’existerait aucune urgence ni aucun risque qu’elle compromette l’efficacité de la mesure en étant auditionnée préalablement à l’adoption des actes attaqués alors que la perte causée après l’adoption desdits actes pour la requérante était certaine et prévisible. Le Conseil aurait volontairement refusé à la requérante l’accès au dossier de preuves visant à étayer l’inscription de son nom sur les listes en cause et, partant, aurait violé ses droits de la défense.

53      Deuxièmement, la requérante soutient, en substance, que, en vertu de son droit à une protection juridictionnelle effective, elle a demandé au Conseil de lui accorder au plus tôt l’accès à toutes les informations et à tous les documents fondant l’adoption des actes initiaux à son égard. Elle n’aurait pas reçu, avant d’introduire le présent recours, le dossier de preuves la concernant, alors qu’elle en aurait fait la demande auprès du Conseil le 26 mars 2019, réitérée à deux reprises le 2 et le 12 avril 2019. À cet égard, elle prétend que le défaut de communication du dossier de preuves la concernant démontrerait que, avant l’adoption des actes initiaux, le Conseil ne disposait d’aucun document ou d’aucune preuve matérielle étayant la motivation contenue dans ces actes alors qu’il est tenu de constituer un dossier avant de décider d’imposer des mesures restrictives. Elle ajoute que le fait que le document WK 54/2019 INIT lui a été communiqué postérieurement à l’introduction du présent recours témoignerait de ce qu’il aurait été artificiellement constitué pour les besoins dudit litige. Dès lors, les motifs d’inscription de son nom sur les listes en cause ne seraient pas fondés et, partant, seraient illégaux. Lors de l’audience, la requérante a soutenu que le Conseil avait transmis le document WK 54/2019 INIT tardivement, et ce même si la requête en l’espèce avait déjà été déposée.

54      Le Conseil conteste les arguments de la requérante.

55      Il y a lieu de rappeler que le respect des droits de la défense comporte notamment le droit d’être entendu et le droit d’accès au dossier dans le respect des intérêts légitimes de la confidentialité qui sont consacrés à l’article 41, paragraphe 2, sous a) et b), de la Charte (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 99 et jurisprudence citée).

56      Par ailleurs, le droit à une protection juridictionnelle effective, affirmé à l’article 47 de la Charte, exige que l’intéressé puisse connaître les motifs sur lesquels est fondée la décision prise à son égard soit par la lecture de la décision elle-même, soit par une communication de ces motifs faite à sa demande, sans préjudice du pouvoir du juge compétent d’exiger de l’autorité en cause qu’elle les communique, afin de lui permettre de défendre ses droits dans les meilleures conditions possibles et de décider en pleine connaissance de cause s’il est utile de saisir le juge compétent, ainsi que pour mettre ce dernier pleinement en mesure d’exercer le contrôle de la légalité de la décision en cause (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 100 et jurisprudence citée ; arrêt du 21 janvier 2016, Makhlouf/Conseil, T‑443/13, non publié, EU:T:2016:27, point 38).

57      L’article 52, paragraphe 1, de la Charte admet toutefois des limitations à l’exercice des droits consacrés par celle-ci, pour autant que la limitation concernée respecte le contenu essentiel du droit fondamental en cause et que, dans le respect du principe de proportionnalité, elle soit nécessaire et réponde effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 101 et jurisprudence citée).

58      Enfin, l’existence d’une violation des droits de la défense et du droit à une protection juridictionnelle effective doit être appréciée en fonction des circonstances spécifiques de chaque cas d’espèce, notamment de la nature de l’acte en cause, du contexte de son adoption et des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 102 et jurisprudence citée).

59      C’est à la lumière de cette jurisprudence qu’il convient d’analyser le sixième moyen.

60      En premier lieu, concernant le premier grief tiré de ce que la requérante n’a pas été entendue préalablement à l’adoption des actes attaqués et de ce que ses droits de la défense n’ont pas pu être exercés utilement, il convient de rappeler que le juge de l’Union distingue, d’une part, l’inscription initiale du nom d’une entité sur les listes imposant des mesures restrictives et, d’autre part, le maintien du nom de cette entité sur lesdites listes (arrêt du 30 avril 2015, Al-Chihabi/Conseil, T‑593/11, EU:T:2015:249, point 40).

61      Premièrement, en ce qui concerne les actes initiaux, inscrivant le nom de la requérante sur les listes en cause, il ne saurait être requis des autorités de l’Union qu’elles communiquent les motifs desdites mesures préalablement à l’inscription initiale du nom d’une personne ou d’une entité sur les listes imposant des mesures restrictives (voir, en ce sens, arrêt du 21 janvier 2015, Makhlouf/Conseil, T‑509/11, non publié, EU:T:2015:33, point 34 et jurisprudence citée).

62      En effet, une telle mesure, afin de ne pas compromettre son efficacité, doit, par sa nature même, pouvoir bénéficier d’un effet de surprise et s’appliquer immédiatement. Dans un tel cas, il suffit, en principe, que l’institution procède à la communication des motifs à la personne ou à l’entité concernée et ouvre le droit à l’audition de celle-ci concomitamment avec ou immédiatement après l’adoption de la décision (arrêt du 21 décembre 2011, France/People’s Mojahedin Organization of Iran, C‑27/09 P, EU:C:2011:853, point 61).

63      En l’espèce, la communication des motifs de l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause a fait l’objet d’un avis publié au Journal officiel de l’Union européenne du 22 janvier 2019.

64      En outre, par lettre du 26 mars 2019, les représentants de la requérante, en substance, ont demandé au Conseil de leur communiquer les documents visant à étayer l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause, ce que le Conseil a fait par lettre du 13 mai 2019.

65      Dès lors, il y a lieu de constater que, en l’espèce, le fait que la requérante n’a pas été entendue préalablement à l’inscription initiale de son nom sur les listes en cause constitue une limitation justifiée de ses droits de la défense au sens de la jurisprudence citée au point 57 ci-dessus.

66      Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’argument, non étayé, de la requérante, tiré de ce qu’il n’existait aucune urgence ni aucun risque qu’elle compromette l’efficacité des actes initiaux en étant auditionnée préalablement à leur adoption, alors que la possibilité d’être entendue a posteriori ne lui aurait pas permis d’éviter des pertes.

67      Deuxièmement, s’agissant des actes de maintien de 2019 et des actes de maintien de 2020, il convient de rappeler que, dans le cas des actes par lesquels le nom d’une personne ou d’une entité figurant déjà dans les listes imposant des mesures restrictives est maintenu, un effet de surprise n’est plus nécessaire afin d’assurer l’efficacité desdites mesures, de sorte que l’adoption de tels actes doit, en principe, être précédée d’une communication des éléments retenus à charge ainsi que de l’opportunité conférée à la personne ou à l’entité concernée d’être entendue (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2011, France/People’s Mojahedin Organization of Iran, C‑27/09 P, EU:C:2011:853, point 62).

68      À cet égard, la Cour a souligné que l’élément de protection qu’offraient l’exigence de communication des éléments à charge et le droit de présenter des observations avant l’adoption d’actes qui maintiennent le nom d’une personne ou d’une entité sur une liste de personnes ou d’entités visées par des mesures restrictives était fondamental et essentiel aux droits de la défense. Cela est d’autant plus vrai que les mesures restrictives en question ont une incidence importante sur les droits et les libertés des personnes et des groupes visés (arrêt du 21 décembre 2011, France/People’s Mojahedin Organization of Iran, C‑27/09 P, EU:C:2011:853, point 64).

69      En effet, la règle selon laquelle le destinataire d’une décision faisant grief doit être mis en mesure de faire valoir ses observations avant que celle-ci soit prise a pour but que l’autorité concernée soit à même de tenir utilement compte de l’ensemble des éléments pertinents. Afin d’assurer une protection effective dudit destinataire, elle a notamment pour objet que celui-ci puisse corriger une erreur ou faire valoir tels éléments relatifs à sa situation personnelle qui milite dans le sens que la décision soit prise, ne soit pas prise ou qu’elle ait tel ou tel contenu (arrêt du 21 décembre 2011, France/People’s Mojahedin Organization of Iran, C‑27/09 P, EU:C:2011:853, point 65).

70      Toutefois, lorsque le maintien du nom de la personne ou de l’entité concernée sur une liste de personnes ou d’entités visées par des mesures restrictives est fondé sur les mêmes motifs que ceux qui ont justifié l’adoption de l’acte initial sans que de nouveaux éléments aient été retenus à son égard, le Conseil n’est pas tenu, pour respecter son droit d’être entendu, de lui communiquer à nouveau les éléments retenus à charge (voir, en ce sens, arrêt du 7 avril 2016, Central Bank of Iran/Conseil, C‑266/15 P, EU:C:2016:208, points 32 et 33 et jurisprudence citée). La communication des éléments à charge s’impose, en revanche, lorsqu’il existe des éléments nouveaux par lesquels le Conseil réactualise les informations concernant la situation personnelle de la personne ou de l’entité concernée ou la situation politique et sécuritaire du pays à l’encontre duquel le régime de mesures restrictives a été adopté (voir, en ce sens, arrêt du 12 février 2020, Kande Mupompa/Conseil, T‑170/18, EU:T:2020:60, point 72).

71      En l’espèce, d’une part, s’agissant des actes de maintien de 2019, il convient de rappeler, ainsi qu’il a été signalé au point 67 ci-dessus, que l’adoption de ces actes devait, en principe, être précédée d’une communication des éléments retenus à charge ainsi que de l’opportunité conférée à la requérante d’être entendue.

72      À cet égard, il convient de relever que, par lettre du 26 mars 2019, la requérante a présenté une première demande d’accès au document contenant les éléments de preuve étayant les motifs d’inscription de son nom sur les listes en cause. Elle a réitéré sa demande les 2 et 12 avril 2019. Le Conseil a fait droit à cette demande le 13 mai 2019, soit dans un délai d’un mois et trois semaines après la première demande d’accès et quatre jours avant l’adoption des actes de maintien de 2019.

73      Or, il y a lieu de rappeler que, sur demande de l’intéressé, le Conseil est tenu de donner accès à tous les documents administratifs non confidentiels, et ce dans un délai raisonnable (voir, en ce sens, arrêt du 16 septembre 2013, Bank Kargoshaei e.a./Conseil, T‑8/11, non publié, EU:T:2013:470, points 68 et 93).

74      Il convient de considérer que, dans les circonstances de l’espèce, le Conseil n’a pas transmis le document WK 54/2019 INIT dans un délai raisonnable. En effet, en transmettant à la requérante ledit document seulement quatre jours avant l’adoption des actes de maintien de 2019, le Conseil lui a laissé un laps de temps trop court pour lui permettre de présenter utilement ses éventuelles observations. Ainsi, il n’a pas garanti une audition utile de la requérante. De surcroît, même à considérer que la requérante ait eu le temps de soumettre ses observations au Conseil dans le temps qui lui restait avant l’adoption desdits actes, il restait trop peu de temps au Conseil pour analyser avec la diligence requise lesdites observations. Ainsi, l’élément de protection fondamental et essentiel aux droits de la défense que constituent la communication des éléments à charge et le droit de présenter des observations sur ces derniers avant l’adoption des actes de maintien de 2019, tel que rappelé par la jurisprudence citée aux points 67 et 69 ci-dessus, a été mis à mal par la transmission tardive du dossier contenant lesdits éléments à la requérante.

75      Il s’ensuit que la transmission du document contenant les éléments de preuve visant à étayer les motifs d’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause est intervenue trop tardivement compte tenu de la date d’adoption des actes de maintien de 2019, de sorte que ses droits de la défense ont été violés à cet égard.

76      Cela étant, il ne saurait être déduit de tout ce qui précède que la communication tardive par le Conseil à la requérante des éléments de preuve rappelés au point 74 ci-dessus, avant que le Conseil adopte les actes de maintien de 2019, emporte l’annulation de ces derniers. En effet, il incombe au juge de l’Union de vérifier, lorsqu’il est en présence d’une irrégularité affectant les droits de la défense, si, en fonction des circonstances de fait et de droit spécifiques de l’espèce, la procédure en cause aurait pu aboutir à un résultat différent dans la mesure où la requérante aurait pu mieux assurer sa défense en l’absence de cette irrégularité (voir, en ce sens, arrêts du 22 septembre 2015, First Islamic Investment Bank/Conseil, T‑161/13, EU:T:2015:667, point 84 ; du 15 juin 2017, Kiselev/Conseil, T‑262/15, EU:T:2017:392, point 153, et du 13 septembre 2018, VTB Bank/Conseil, T‑734/14, non publié, EU:T:2018:542, points 120 et 121).

77      En l’espèce, la requérante reste en défaut d’expliquer quels sont les arguments ou les éléments qu’elle aurait pu faire valoir si elle avait reçu les documents en cause plus tôt et n’a pas non plus démontré que ces arguments ou ces éléments auraient pu conduire à un résultat différent dans son cas.

78      Dès lors, la violation des droits de la défense de la requérante n’entraîne pas, dans les circonstances de l’espèce, l’annulation des actes de maintien de 2019.

79      D’autre part, concernant les actes de maintien de 2020, conformément à la jurisprudence citée au point 70 ci-dessus, le Conseil n’était pas tenu, pour respecter le droit de la requérante d’être entendue, de lui communiquer, préalablement et à nouveau, les éléments retenus à charge. En effet, les motifs d’inscription du nom de la requérante sont restés inchangés et les éléments retenus à charge sont identiques à ceux pris en compte dans le cadre de l’adoption des actes initiaux et des actes de maintien de 2019.

80      Dès lors il ressort de ce qui précède que le Conseil n’a pas porté aux droits de la défense de la requérante une atteinte qui justifierait l’annulation des actes de maintien de 2020 pour autant que ces actes la concernent.

81      Partant, le premier grief de la requérante doit être rejeté.

82      En second lieu, la requérante se prévaut, en substance, d’un second grief, tiré de ce que le Conseil, en ne lui permettant pas d’accéder « au plus tôt » au dossier contenant les informations et les éléments de preuve fondant l’inscription de son nom sur les actes initiaux et sur les actes de maintien de 2019, aurait violé son droit à une protection juridictionnelle effective.

83      Tout d’abord, la requérante prétend que le défaut de communication du dossier contenant les informations et les éléments de preuve venant au soutien de l’inscription et du maintien de son nom sur les listes en cause en temps utile démontrerait que, avant l’adoption des actes initiaux, le Conseil ne disposait d’aucun document ou d’aucune preuve matérielle étayant la motivation des motifs d’inscription.

84      En l’espèce, la première page du document WK 54/2019 INIT, qui contient les éléments de preuve visant à étayer les motifs d’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause, indique la date du 28 février 2019, alors que les actes initiaux, inscrivant pour la première fois le nom de la requérante sur lesdites listes, ont été adoptés le 21 janvier 2019. Autrement dit, la première page du document WK 54/2019 INIT porte une date postérieure à la date d’adoption des actes initiaux.

85      En réponse aux mesures d’organisation de la procédure adoptées par le Tribunal visant à confirmer l’existence d’un dossier de preuves lors de l’adoption des actes initiaux, le Conseil soutient que le document WK 54/2019 INIT indique la date du 28 février 2019 en raison d’un problème technique, lié au fait que ledit document a été déposé dans les archives électroniques à cette date. Le Conseil a indiqué que les éléments de preuve figurant dans le document WK 54/2019 INIT faisaient partie de la proposition d’inscription du nom de la requérante sur les listes annexées aux actes initiaux. Le Conseil a produit à cet effet le document ST 10250/20, du 15 septembre 2020, contenant la proposition d’inscription du nom de la requérante, portant la référence COREU CFSP/0195/18, du 4 décembre 2018, sur laquelle il s’est fondé pour adopter les actes initiaux. Lors de l’audience, la requérante a contesté que ce document ait été utilisé pour fonder l’inscription initiale de son nom sur les listes en cause, en raison de ce que le format du document et la matérialisation des preuves sous forme d’hyperliens n’auraient pas rendu le document, dépourvu de tout raisonnement articulé, accessible et intelligible.

86      Toutefois, il convient de constater que, d’une part, la proposition d’inscription COREU CFSP/0195/18 est datée du 4 décembre 2018, c’est-à-dire qu’elle est antérieure à la date d’adoption des actes initiaux. D’autre part, la proposition d’inscription COREU CFSP/0195/18 liste un ensemble de liens hypertextes se rapportant aux preuves produites dans le document WK 54/2019 INIT, à l’exception de la pièce relative à un article du site Internet « The Syria Report », intitulé « Samer Foz, l’homme d’affaires syrien le plus puissant », publié le 19 avril 2018 (voir point 111 ci-après). Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, le Conseil a démontré qu’il disposait d’un ensemble de preuves avant l’adoption des actes initiaux permettant d’étayer les motifs d’inscription figurant dans ces actes. L’argument de la requérante selon lequel la communication du document WK 54/2019 INIT, postérieure à l’introduction du présent recours, témoignerait de ce que ledit document aurait été artificiellement constitué pour les besoins du présent litige doit, dès lors, être rejeté comme étant non fondé. Par ailleurs, l’argument de la requérante relatif au caractère inintelligible et inaccessible du document manque en fait, puisque les liens hypertextes renvoient aux articles qui ont été reproduits dans le document WK 54/2019 INIT.

87      Ensuite, la requérante soutient que l’absence de communication des éléments de preuve visant à étayer l’inscription de son nom sur les listes en cause, alors qu’elle aurait demandé à y accéder en temps utile, soit avant d’introduire le présent recours, entraînerait la violation de son droit à une protection juridictionnelle effective.

88      Ainsi qu’il a été rappelé au point 73 ci-dessus, sur demande de l’intéressé, le Conseil est tenu de donner accès à tous les documents administratifs non confidentiels, et ce dans un délai raisonnable.

89      Lors de l’appréciation du caractère raisonnable du délai de communication, il convient de tenir compte du fait que, dans la mesure où la personne ou l’entité concernée ne dispose pas d’un droit d’audition préalable à l’inscription initiale de son nom sur les listes en cause, l’accès au dossier visé ci‑dessus constitue la première opportunité pour elle de prendre connaissance des documents retenus par le Conseil au soutien de ladite inscription et que, partant, il revêt un intérêt particulier pour sa défense (voir, en ce sens, arrêt du 22 septembre 2015, First Islamic Investment Bank/Conseil, T‑161/13, EU:T:2015:667, point 80 et jurisprudence citée).

90      En l’espèce, ainsi qu’il a été rappelé au point 72 ci-dessus, la requérante a demandé au Conseil, le 26 mars 2019, l’accès au dossier de preuves étayant les motifs de son inscription initiale sur les listes en cause. La requérante a réitéré à deux reprises sa demande d’accès en invoquant la nécessité de disposer de ces documents le plus rapidement possible afin de prendre une décision relative à l’exercice de ses droits devant le Tribunal. Le document WK 54/2019 INIT a été transmis à la requérante le 13 mai 2019, soit après l’introduction du présent recours. Dans la réplique, la requérante confirme la réception du document WK 54/2019 INIT.

91      Il importe de relever que le document WK 54/2019 INIT, visant à étayer les motifs d’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause, constitue, en substance, un complément de la motivation figurant dans les actes initiaux, mais n’a été communiqué qu’au terme d’un délai d’un mois et trois semaines à la requérante, ce qui ne saurait être considéré comme une période de temps négligeable. À cet égard, contrairement à ce que fait valoir le Conseil, le délai écoulé entre la date d’adoption des actes initiaux et la date de la demande d’accès de la requérante ne saurait justifier l’absence de réponse du Conseil dans un délai raisonnable. En effet, le Conseil ne peut se prévaloir du temps écoulé avant que la requérante demande l’accès aux documents la concernant afin de justifier le délai dans lequel il a lui-même effectivement fait droit à la demande d’accès. Toutefois, ainsi que le Conseil l’a rappelé lors de l’audience, il existe au sein du Conseil des délais internes nécessaires afin d’obtenir l’approbation des différentes instances pour transmettre des documents. Ces délais internes doivent, certes, être compatibles avec la jurisprudence rappelée aux points 73 et 89 ci-dessus, afin que les éléments de preuve fournis et visant à étayer des mesures restrictives concernant une personne ou une entité lui soient communiqués en temps utile pour qu’elle puisse faire valoir ses droits devant le juge de l’Union.

92      Néanmoins, il convient de relever que la requérante a attendu vingt et un jours avant l’expiration du délai pour l’introduction du présent recours pour envoyer, le 26 mars 2019, la première demande d’accès au dossier. Ainsi, la requérante a contribué à réduire le laps de temps laissé au Conseil pour qu’il lui communique le document WK 54/2019 INIT avant l’expiration dudit délai.

93      Par conséquent, le fait que le Conseil n’a pas été en mesure de communiquer le document WK 54/2019 INIT à la requérante avant l’introduction de son recours ne saurait lui être entièrement imputable.

94      En tout état de cause, force est de constater que la requérante a eu accès au document WK 54/2019 INIT le 13 mai 2019, soit avant que le Conseil ne dépose le mémoire en défense. Ainsi, elle a pu prendre position sur les éléments de preuve figurant dans ledit document tant dans le cadre du mémoire en réplique que lors de l’audience.

95      Dès lors, il y a lieu de considérer que la communication du document WK 54/2019 INIT le 13 mai 2019 était suffisante pour permettre à la requérante d’exercer son droit à un recours juridictionnel effectif.

96      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le second grief et, partant, le sixième moyen dans son ensemble.

 Sur le premier moyen, tiré d’une erreur d’appréciation

97      En premier lieu, la requérante ne conteste pas les éléments factuels décrits dans les motifs d’inscription de son nom sur les listes en cause. En revanche, dans le cadre d’un premier grief, elle fait valoir qu’elle n’est pas une coentreprise soutenue par le régime syrien et, plus particulièrement, elle reproche au Conseil de n’avoir apporté aucune preuve de son lien avec le régime syrien ou du fait qu’elle soutiendrait ou tirerait avantage de ce dernier. Par un second grief, la requérante prétend que le projet Marota City auquel elle contribue ne saurait être considéré comme un projet appuyé par le régime. Dans le cadre de ce projet, elle n’aurait pas exploité des terrains expropriés appartenant à des personnes déplacées par le conflit en Syrie, ce qui les aurait empêchées de regagner leur foyer. Dans la réplique, elle fait valoir que les terrains sur lesquels le projet Marota City va être développé n’ont pas été le théâtre d’affrontements entre les forces de l’opposition et le régime syrien et que les quartiers de Damas situés dans cette zone n’ont jamais été détruits pendant le conflit armé qui a eu cours en Syrie.

98      En second lieu, dans le second mémoire en adaptation, la requérante soutient que M. Bashar Assi, lui-même inscrit à tort sur les listes en cause, n’est plus membre de son conseil d’administration et n’est donc plus son président. Aussi, l’accusation antérieure du Conseil selon laquelle la requérante est liée à M. Assi n’aurait plus lieu d’être et l’allégation du Conseil selon laquelle un tel lien passé justifie les sanctions imposées à la requérante serait inexacte.

99      Le Conseil conteste les arguments de la requérante.

 Considérations liminaires

100    Il convient de rappeler que l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la Charte exige notamment que le juge de l’Union s’assure que la décision par laquelle des mesures restrictives ont été adoptées ou maintenues, qui revêt une portée individuelle pour la personne ou l’entité concernée, repose sur une base factuelle suffisamment solide. Cela implique une vérification des faits allégués dans l’exposé des motifs qui sous-tend ladite décision, de sorte que le contrôle juridictionnel ne soit pas limité à l’appréciation de la vraisemblance abstraite des motifs invoqués, mais porte sur la question de savoir si ces motifs, ou, à tout le moins, l’un d’eux considéré comme suffisant en soi pour soutenir cette même décision, sont étayés (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 119).

101    Il incombe au juge de l’Union de procéder à cet examen en demandant, le cas échéant, à l’autorité compétente de l’Union de produire des informations ou des éléments de preuve, confidentiels ou non, pertinents aux fins d’un tel examen (voir arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 120 et jurisprudence citée).

102    C’est en effet à l’autorité compétente de l’Union qu’il appartient, en cas de contestation, d’établir le bien-fondé des motifs retenus à l’encontre de la personne ou de l’entité concernée, et non à ces dernières d’apporter la preuve négative de l’absence de bien-fondé desdits motifs (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 121).

103    À cette fin, il n’est pas requis que ladite autorité produise devant le juge de l’Union l’ensemble des informations et des éléments de preuve inhérents aux motifs allégués dans l’acte dont il est demandé l’annulation. Il importe toutefois que les informations ou les éléments produits étaient les motifs retenus à l’encontre de la personne ou de l’entité concernée (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 122).

104    Si l’autorité compétente de l’Union fournit des informations ou des éléments de preuve pertinents, le juge de l’Union doit vérifier l’exactitude matérielle des faits allégués au regard de ces informations ou éléments et apprécier la force probante de ces derniers en fonction des circonstances de l’espèce et à la lumière des éventuelles observations présentées, notamment, par la personne ou l’entité concernée à leur sujet (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 124).

105    Conformément à la jurisprudence de la Cour, l’appréciation du bien-fondé d’une inscription doit être effectuée en examinant les éléments de preuve non pas de manière isolée, mais dans le contexte dans lequel ils s’insèrent (voir, en ce sens, arrêts du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑630/13 P, EU:C:2015:247, point 51, et du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 50).

106    Enfin, dans le cadre de l’appréciation de la gravité de l’enjeu, qui fait partie du contrôle de la proportionnalité des mesures restrictives en cause, il peut être tenu compte du contexte dans lequel s’inscrivent ces mesures, du fait qu’il était urgent d’adopter de telles mesures ayant pour objet de faire pression sur le régime syrien afin qu’il arrête la répression violente dirigée contre la population et de la difficulté d’obtenir des preuves plus précises dans un État en situation de guerre civile doté d’un régime de nature autoritaire (arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 46).

107    Il convient de rappeler, ainsi qu’il ressort des points 44 et 45 ci-dessus, que l’inscription du nom de la requérante est fondée sur le critère défini au paragraphe 1 de l’article 27 et de l’article 28 de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, et au paragraphe 1, sous a), de l’article 15 du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828 (critère de l’association avec le régime).

108    C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner le premier moyen soulevé par la requérante et les arguments de cette dernière qui visent, en substance, à remettre en cause le motif unique d’inscription, à savoir celui relatif à l’association avec le régime syrien.

 Sur les éléments de preuve soumis par le Conseil

109    Pour justifier l’inscription et le maintien du nom de la requérante sur les listes en cause, le Conseil a fourni le document WK 54/2019 INIT comportant des éléments d’information publiquement accessibles, à savoir des liens vers des sites Internet, des articles de presse et des captures d’écran provenant :

–        du site Internet « The Syria Report », lequel contient un premier article, publié le 19 avril 2018, intitulé « Factsheet : Samer Foz, Syria’s Most Powerful Businessman » (Résumé : Samer Foz, l’homme d’affaires syrien le plus puissant), qui mentionne que M. Samer Foz est devenu l’un des plus puissants acteurs de l’économie syrienne ; il est soupçonné d’avoir des liens étroits avec le président Bashar Al-Assad et d’avoir servi d’intermédiaire entre le parti de l’union démocratique (Kurdistan syrien) (PYD) et l’État islamique pour échanger du blé ; cet article indique également que M. Foz est chargé de la gestion quotidienne d’Aman Holding, qui a été fondée en 1988 par le père de M. Foz ; selon cet article, Aman Holding a créé, avec Damascus Cham Holding, une coentreprise dénommée Aman Dimashq, dotée d’un capital de 10 milliards de livres syriennes (SYP) [environ 18, 9 millions de dollars des États-Unis (USD) et environ 16,8 millions d’euros] ; la requérante a été chargée de développer des projets de construction, dont le projet « Basateen Al-Razi », dans le quartier de Mazzeh, à Damas, qui est désormais désigné sous le terme de « projet Marota City », sur des terrains expropriés et sur lesquels vivaient des personnes qui étaient en faveur de l’opposition au régime syrien ; en outre, le projet Marota City est controversé, car il est fondé, d’une part, sur le décret no 66/2012, qui autorise l’expropriation d’habitants de deux zones situées à Damas et, d’autre part, sur le décret no 19/2015, qui autorise les gouvernorats et les municipalités, dans le cadre de leurs prérogatives administratives, à établir des coentreprises détenant des sociétés anonymes de droit privé ; enfin, selon cet article, en septembre 2017, Damascus Cham holding, qui est l’entité du gouvernorat de Damas chargée des investissements, a accordé à la requérante le droit de construire trois gratte-ciel, chacun de 70 étages, et cinq bâtiments résidentiels, d’une valeur de 312 millions d’USD (environ 278,1 millions d’euros) ;

–        du site Internet « The Syria Report », qui contient un article du 16 janvier 2018, intitulé « Syrian Investor Signs Deal Over [Basateen] Al-Razi Project » (Un investisseur syrien conclut un marché concernant le projet de [Basateen] Al-Razi), et un second article du 1er juin 2018, intitulé « Factsheet : Marota City, Syria’s Most Controversial Investment Project » (Résumé : Marota City, le projet d’investissement syrien le plus controversé), où il est indiqué que le projet de construction de la cité de luxe dénommé « Marota City » est un projet soutenu par le régime syrien dans le cadre du décret no 66/2012, ce dernier ayant permis l’expropriation et l’exploitation de certains terrains au statut socio-économique inférieur, dont le quartier de Mazzeh, dénommé Basateen Al-Razi, situé à Damas ; Marota City est le nouveau nom donné au quartier d’une superficie de 2,15 millions de mètres carrés ; cette zone est située à l’entrée sud-ouest de la capitale de Damas et est proche du centre-ville et des ambassades ainsi que des services de sécurité, ce qui la rend attractive aux yeux des promoteurs immobiliers ; ces articles indiquent également que la société de droit privé Damascus Cham Holding est détenue par le gouvernorat de Damas et a créé, avec M. Foz en juillet 2017, la coentreprise Aman Dimashq, dotée d’un capital de 10 milliards de SYP (18,9 millions d’USD) ; ces articles ajoutent qu’Aman Holding détient la majorité des parts de cette coentreprise et nomme trois représentants au sein de son conseil d’administration ; en outre, il est indiqué que, en septembre 2017, Damascus Cham Holding a accordé à la requérante le droit de construire trois gratte-ciel devant compter jusqu’à 70 étages et cinq bâtiments résidentiels d’une valeur de 312 millions d’USD ; enfin, selon ces articles, M. Foz est devenu l’un des acteurs économiques les plus puissants et son influence sur les plus hautes sphères de l’élite syrienne résulte de ses liens étroits avec le président Bashar Al-Assad ;

–        du site Internet « The Syria Report », qui présente, dans un dernier article, dans une liste des coentreprises créées par Damascus Cham Holding avec des investisseurs privés, publiée le 17 avril 2018, la requérante, créée en septembre 2017 par, d’une part, M. Foz, à titre d’actionnaire individuel dans cette dernière par l’intermédiaire de sa société Aman Holding et, d’autre part, la société détenue par le gouvernorat de Damas, Damascus Cham Holding, afin de développer le projet Marota City ; il y est indiqué que M. Foz détient la majorité des parts de cette coentreprise ; cette dernière est dotée d’un capital de 18,9 millions d’USD, la liste les projets développés par cette coentreprise est détaillée et il est fait mention du développement de trois gratte-ciel et de cinq bâtiments résidentiels, d’une valeur de 150 milliards de SYP (environ 312 millions d’USD) en termes de coûts d’investissement ;

–        du site Internet « Damacham.sy », de la société Damascus Cham Holding, dont la page est datée du 5 septembre 2017 et a été consultée le 20 septembre 2018, selon laquelle la première assemblée générale de la requérante s’est tenue le 7 octobre 2017 au siège de Damascus Cham Holding, qui se situe sur le site du projet Marota City ; selon ce site, les présidents du conseil d’administration de Damascus Cham Holding et d’Aman Holding, un certain nombre de directeurs exécutifs de ces deux sociétés et un représentant de la chambre du commerce et de la protection des consommateurs syrienne étaient présents ; de surcroît, le projet réalisé par la requérante est, au vu de son ampleur, l’un des plus importants et des plus grands du projet Marota City et la valeur de l’investissement est supérieure à 150 milliards de SYP ;

–        du site Internet du gouvernement syrien « 66.damascus.gov.sy », qui, sur une page datée du 18 septembre 2012, reproduit la partie du décret no 66/2012 indiquant que le quartier sud-est de Mazzeh, à Damas, est l’une des deux zones désignées afin d’y réaliser un projet de développement résidentiel et commercial ;

–        du site Internet « Eqtsad News », qui, dans un article publié le 14 janvier 2018 intitulé « You know them… Big businessmen are sharing a project behind Al-Razi » (Vous les connaissez, ces hommes d’affaires partagent un projet situé derrière Al-Razi), décrit le projet Marota City comme un projet soutenu par le régime syrien au moyen duquel ce dernier soutient les hommes et femmes d’affaires qui lui sont loyaux ; en outre, Damascus Cham Holding administre le projet, signe les contrats et alloue des parts en partenariat aux hommes d’affaires et cette fonction lui a été confiée par le gouvernorat de Damas ; selon cet article, M. Foz a signé un contrat avec la région de Damas impliquant un investissement d’un montant de 150 milliards de SYP dans la construction de plusieurs immeubles ;

–        du site Internet « The Foundation for Strategic Research », qui, dans un article publié en avril 2018, énonce les circonstances ayant guidé l’adoption du décret no 66/2012 ; cette source mentionne que, selon les autorités syriennes, le décret no 66/2012 visait à améliorer les conditions de vie des habitants en remplaçant les habitations mal construites par des constructions plus modernes et confortables ; selon cet article, seules deux zones d’habitation de Damas, dont les habitants ont appuyé l’opposition, ont été désignées dans ce décret tandis que ledit décret a laissé intacts des quartiers de Damas où les habitants vivent dans des conditions similaires, mais où, à l’inverse, ils ont soutenu le régime syrien ; enfin, l’article indique que le décret va, d’une part, faciliter le développement rapide d’importants projets de construction favorisant l’enrichissement d’hommes et de femmes d’affaires proches du régime et, d’autre part, servir d’instrument punitif à l’encontre des franges de la population opposées au régime syrien ;

–        du site Internet « The Syrian Observer », qui, dans un article publié le 6 avril 2018, intitulé « Alliance Companies Monopolizes New Damascus Development Organizations » (L’alliance des sociétés monopolise les nouvelles organisations de développement de Damas), indique que des hommes et des femmes d’affaires proches du régime syrien investissent dans les nouveaux projets de reconstruction impulsés par ce dernier à Damas ainsi que dans la banlieue de Damas ; selon cette source, ces hommes et femmes d’affaires seraient choisis par le régime syrien en fonction de leur soumission, de leur loyauté et de leurs liens avec les marchés étrangers ;

–        du site Internet « Brookings Institution », qui a publié un rapport, daté du mois de juin 2018 et intitulé « Beyond Fragility : Syria and the challenges of reconstruction in fierce states » (Au-delà de la fragilité : la Syrie et les défis de la reconstruction dans les États violents), qui mentionne les actes adoptés par le régime syrien, dont le décret no 66/2012, afin de faire saisir des terrains et des biens, de punir les opposants, de récompenser les personnes proches du régime syrien et les gouverneurs, de réimposer son autorité sur le territoire, de renforcer le contrôle sur l’économie syrienne et d’« aménager » la démographie syrienne pour atteindre, selon les termes de M. Bashar Al-Assad, une « société plus saine et homogène » ; selon ce rapport, le régime syrien, se fondant sur une réglementation nouvelle et préexistante, a exproprié des quartiers de Damas connus pour être des zones favorables à l’opposition et des biens appartenant à des personnes déplacées et suspectées d’être en faveur de l’opposition pour en faire profiter certains hommes d’affaires ; enfin, selon cet article, le projet de construction de la cité de luxe « Marota City » est cité, dans ce rapport, comme l’exemple le plus saillant de cette politique ;

–        du site Internet « Open Democracy », qui, dans un article publié le 5 septembre 2017 et intitulé « Militias and crony capitalism to hamper Syria reconstruction » (Les milices et les affairistes entravent la reconstruction de la Syrie), mentionne les bénéfices que le régime syrien tire du décret no 66/2012, notamment comme instrument d’investissement pour les projets de développement rapide et de grande ampleur bénéficiant aux alliés du régime qui permet, en même temps, d’opérer comme instrument punitif à l’encontre des populations opposées à ce régime ; selon cet article, le développement de projets résidentiels sera conduit par des holdings détenues par les gouvernorats ou les municipalités, mais la construction et l’organisation desdits projets seront attribuées à des entreprises du secteur privé détenues par des investisseurs liés au régime ; en outre, cet article mentionne que, en août 2017, Aman Holding, dirigée par M. Foz, qui a des liens étroits avec le régime syrien, annonce sa participation à la reconstruction du quartier Basateen Al-Razi, dans le quartier de Mazzeh à Damas, en partenariat avec le gouvernorat de Damas par l’intermédiaire de sa société Damascus Cham Holding ; selon l’article, la requérante, coentreprise établie par Aman Holding, a été créée afin de mener à bien ce projet et dispose d’un capital de 18,9 millions d’USD ;

du site Internet « Reuters », qui indique, dans un article publié sur une page consultée le 14 novembre 2013, qu’Aman Holding agit pour le compte du régime syrien dans le commerce de graines ; en particulier, selon cet article, le groupe Aman Holding, dirigé par la famille Foz, originaire de la ville côtière de Lattaquié (Syrie), mène une activité de courtage de graines au profit de la société Hoboob détenue par l’État syrien ;

du site Internet « Zaman al-Wasl », qui, dans une page datée du 25 mars 2016, décrit M. Foz comme l’acteur de l’économie syrienne le plus puissant du pays ; en outre, selon cet article, M. Foz investit dans une société titulaire d’une licence exclusive de production de sucre ; il est également indiqué que M. Foz a bénéficié de la vente aux enchères des propriétés des opposants au régime syrien ainsi que de l’acquisition de celles appartenant à des hommes d’affaires marginalisés par le régime syrien ; il résulte aussi de cet article que M. Foz importe et distribue des biens selon les demandes du régime syrien ; enfin, cet article désigne M. Foz comme étant le fondateur d’un groupe appelé « Military Security Shield Forces » (Forces militaires de bouclier de sécurité) qui lutterait aux côtés du président Bashar Al-Assad à Lattaquié ;

–        du site Internet « Sasa Post », qui, dans un article publié le 7 avril 2018, mentionne que M. Foz a financé les forces militaires de bouclier de sécurité, décrites comme un groupe paramilitaire qui appartient à la « Division de l’intelligence militaire ».

110    Au préalable, il convient de rappeler que la légalité d’un acte de l’Union doit être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date où l’acte a été adopté (voir arrêts du 3 septembre 2015, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Commission, C‑398/13 P, EU:C:2015:535, point 22 et jurisprudence citée, et du 4 septembre 2015, NIOC e.a./Conseil, T‑577/12, non publié, EU:T:2015:596, point 112 et jurisprudence citée). Par conséquent, il incombe au Tribunal de ne tenir compte que des éléments de fait qui existaient au moment de l’adoption des actes attaqués et sur lesquels le Conseil s’est fondé à cette date (voir, en ce sens, arrêts du 30 novembre 2016, Rotenberg/Conseil, T‑720/14, EU:T:2016:689, point 127, et du 15 juin 2017, Kiselev/Conseil, T‑262/15, EU:T:2017:392, points 102 à 104).

111    Or, d’une part, il importe de noter que l’article issu du site Internet « The Syria Report », du 19 avril 2018, intitulé « Factsheet : Samer Foz, Syria’s Most Powerful Businessman », présent dans le document WK 54/2019 INIT, ne correspond à aucun des liens hypertextes cités dans la proposition d’inscription COREU CFSP/0195/18 qui renvoient aux pièces figurant dans le document WK 54/2019 INIT. En réponse à une question posée par le Tribunal lors de l’audience, le Conseil a confirmé que l’article du 19 avril 2018, issu du site Internet « The Syria Report », n’était pas à sa disposition au moment de l’adoption des actes initiaux. Ainsi, compte tenu des explications données par le Conseil lors de l’audience, il convient de déduire que cet article ne faisait pas partie des preuves sur lesquelles il s’est fondé pour adopter les actes initiaux. Dès lors, il y a lieu d’écarter ledit article dans l’examen de la légalité des actes initiaux.

112    En revanche, l’article du site Internet « The Syria Report », du 19 avril 2018, étant mentionné dans le document WK 54/2019 INIT et ayant servi de base au Conseil pour adopter les actes de maintien de 2019 et les actes de maintien de 2020, il conviendra d’en tenir compte dans l’analyse de la légalité des actes susvisés.

113    D’autre part, il convient d’écarter de l’analyse de la légalité de l’ensemble des actes attaqués l’article du site Internet « Syrian Law Journal », mentionné erronément par le Conseil dans le mémoire en défense comme faisant partie du document WK 54/2019 INIT.

114    En effet, cet article ne fait partie ni de la proposition d’inscription COREU CFSP/0195/18 ni du document WK 54/2019 INIT, de sorte que, ne faisant pas partie des éléments de preuve sur lesquels s’est fondé le Conseil pour adopter les actes attaqués, il doit être écarté, conformément à la jurisprudence rappelée au point 110 ci-dessus. En tout état de cause, même à admettre, ainsi que l’indique le Conseil en réponse aux mesures d’organisation de la procédure adoptées le 23 juillet 2020, que cet article contienne seulement des informations d’ordre général portant sur le contexte général en Syrie, il convient de constater que le Conseil ne l’a pas produit en annexe au mémoire en défense, dans le corps duquel il y a pourtant fait référence, ou à la duplique et ne l’a pas joint non plus en annexe auxdites réponses. Par conséquent, l’article du site Internet « Syrian Law Journal » ne saurait être retenu dans l’examen de la légalité des actes attaqués.

 Sur la fiabilité des éléments de preuve produits par le Conseil

115    La requérante conteste la fiabilité des éléments de preuve soumis par le Conseil dans le document WK 54/2019 INIT en faisant valoir que ce dernier n’est qu’une simple compilation de captures d’écran de sites Internet et d’articles de presse partiaux, dénués de toute valeur probante, sans indication de leurs sources.

116    Plus spécifiquement et premièrement, en ce qui concerne le site Internet « The Syrian Observer », la requérante relève, tout d’abord, qu’il s’agit d’une société syrienne de publication d’informations qui prétend être « indépendante sur les plans éditorial et politique ». Ensuite, la requérante signale que ce site Internet est consacré, principalement, à la traduction en anglais d’articles provenant de publications en Syrie sans que, pour autant, un travail de vérification du contenu de ces publications soit réalisé. Ce site précise d’ailleurs qu’il ne se rallierait pas aux points de vue exprimés dans les publications susmentionnées. En outre, selon ce site Internet, la sélection d’articles serait opérée sur la base de deux paramètres, à savoir, d’une part, le sérieux de la publication et, d’autre part, la mesure dans laquelle l’article reflète les positions politiques des auteurs.

117    Deuxièmement, s’agissant du site Internet « The Syria Report », la requérante signale, tout d’abord, que ce site Internet d’informations syrien s’organise autour d’une « vaste base d’informations, de données et de statistiques, incluant une base de données d’institutions syriennes ». Il s’agirait, principalement, d’un bulletin d’informations économiques. Ensuite, la requérante souligne que A est, d’une part, le fondateur et le rédacteur en chef du site Internet « The Syria Report » ainsi que, d’autre part, le co-fondateur du site Internet « The Syrian Observer ». Cette circonstance explique, selon la requérante, que les sites Internet « The Syria Report » et « The Syrian Observer » publient souvent les mêmes informations et opinions sous différentes formes et dans différentes publications. Ce faisant, ces sites Internet donnent l’impression que les informations publiées sont largement partagées par différents médias et peuvent donc être considérées comme objectives. Par ailleurs, la requérante émet des doutes sur l’intégrité de A, qui selon elle est, en sa qualité d’intervenant extérieur auprès du European Council on Foreign Relations (Conseil européen des relations internationales), amené à collaborer avec les institutions de l’Union, en ce compris le Conseil, sur des questions concernant la Syrie, notamment au vu du fait qu’il a publié des rapports portant sur l’économie de guerre syrienne et sur la décentralisation de cet État durant la guerre. Dans ce contexte, la requérante allègue, en substance, que le Conseil utilise ses liens avec A pour obtenir des articles appuyant la politique que celui-ci entend appliquer avant leur publication sur ces sites Internet, afin de servir, par la suite, de justification concernant des mesures restrictives amenées à être adoptées ou nouvellement adoptées. À l’appui de cette allégation, la requérante fournit une page extraite du site Internet « News Deeply », contenant une brève présentation de A et un article intitulé « Analyse : pas de fonds pour le projet de loi de reconstruction de la Syrie ». Enfin, la requérante souligne que le site Internet « The Syria Report » n’a pas respecté les règles professionnelles journalistiques, dans la mesure où il ne l’a jamais contactée afin de vérifier le contenu des informations publiées sur son site ou de solliciter son point de vue sur ces dernières.

118    Dans le cadre de la réponse aux mesures d’organisation de la procédure, adoptées par le Tribunal le 23 juillet 2020, le Conseil soutient qu’il ne dispose pas d’autres informations concernant les sources d’informations sur lesquelles il s’est fondé que ce qui peut être déduit du document WK 54/2019 INIT. Ensuite, il reproduit des informations publiquement accessibles sur Internet concernant les sites Internet « The Syria Report », « Reuters », « The Foundation for Strategic Research », « The Syrian Observer », « Brookings Institution », « Eqtsad News », « Open Democracy » et « Zaman al-Wasl ». Lors de l’audience, dans le cadre de ses observations sur le second mémoire en adaptation, le Conseil conteste les arguments de la requérante et fait valoir que ses allégations ne remettent pas en cause la fiabilité de ces sources.

119    Il convient de rappeler que, d’une part, dans le cadre de l’appréciation de la gravité de l’enjeu, qui fait partie du contrôle de la proportionnalité des mesures restrictives en cause, il peut être tenu compte du contexte dans lequel s’inscrivent ces mesures, du fait qu’il était urgent d’adopter de telles mesures ayant pour objet de faire pression sur le régime syrien afin qu’il arrête la répression violente dirigée contre la population et de la difficulté d’obtenir des preuves plus précises dans un État en situation de guerre civile doté d’un régime de nature autoritaire (arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 46).

120    D’autre part, conformément à une jurisprudence constante, l’activité de la Cour et du Tribunal est régie par le principe de libre appréciation des preuves et le seul critère pour apprécier la valeur des preuves produites réside dans leur crédibilité. En outre, pour apprécier la valeur probante d’un document, il faut vérifier la vraisemblance de l’information qui y est contenue et tenir compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration ainsi que de son destinataire, et se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable [voir, en ce sens, arrêts du 14 mars 2018, Kim e.a./Conseil et Commission, T‑533/15 et T‑264/16, EU:T:2018:138, point 224, et du 12 février 2020, Kande Mupompa/Conseil, T‑170/18, EU:T:2020:60, point 107 (non publié)].

121    En l’espèce, s’agissant de l’argument de la requérante relatif au fait qu’il s’agirait principalement d’articles de presse manquant « cruellement de sources », il importe de relever que la situation de guerre en Syrie rend en pratique difficile, voire impossible, le recueil de témoignages de la part de personnes acceptant d’être identifiées et les difficultés d’investigation qui s’ensuivent et le danger auquel s’exposent ceux qui livrent des renseignements font obstacle à ce que des sources précises de comportements personnels de soutien au régime soient apportées (voir, en ce sens, arrêt du 21 avril 2015, Anbouba/Conseil, C‑605/13 P, EU:C:2015:248, point 46, et conclusions de l’avocat général Bot dans les affaires Anbouba/Conseil, C‑605/13 P et C‑630/13 P, EU:C:2015:2, point 204).

122    Par ailleurs, il convient de relever, tout d’abord, que les éléments de preuve figurant dans le document WK 54/2019 INIT et dont la force probante est contestée par la requérante émanent de sources d’informations numériques d’origines variées, non seulement locales, mais également étrangères. Ainsi, parmi les sources d’informations locales, il peut être mentionné « The Syria Report », la première source d’informations économiques, d’affaires et financières sur la Syrie, indépendante et ne se rattachant à aucune organisation religieuse, sociale ou politique ; « The Syrian Observer », un service d’informations en ligne qui, pour l’essentiel, collecte et traduit en anglais des contenus informatifs produits par la presse officielle syrienne, des groupes d’opposition au régime ou encore la société civile et qui est financé par des donateurs dont, notamment, la Fondation Konrad Adenauer et le Département fédéral des affaires étrangères suisse ; « Zaman al-Wasl », un site d’actualité syrien ; « Eqtsad News », un organe de presse, faisant partie de « Zaman al-Wasl », qui appartient au plus important média indépendant du régime syrien. Parmi les sources d’informations d’origine étrangère, peuvent être cités « Reuters », une agence de presse réputée ; « Open Democracy », un site Internet pour l’analyse des questions sociales et politiques dont les fondateurs sont actifs dans des médias bien établis et dans le domaine du militantisme politique et qui compte, parmi ses contributeurs, des personnalités connues sur le plan international ; « Brookings Institution », un groupe de réflexion réputé aux États-Unis, ou encore « The Foundation for Strategic Research », une organisation indépendante à but non lucratif, reconnue en France comme une fondation d’utilité publique. En outre, le Conseil a produit des pages provenant des sites Internet de Damascus Cham Holding et du gouvernement syrien. Or, ces différentes sources relaient des éléments d’information qui se corroborent, de sorte que la requérante ne saurait uniquement se prévaloir du fait qu’il s’agit de captures d’écran de sites Internet et d’articles de presse pour en contester le caractère sensé et fiable.

123    De plus, concernant les arguments de la requérante relatifs au site Internet « The Syrian Observer », il convient de constater, tout d’abord, que la description faite de cette source d’information ne contient pas d’éléments permettant de douter de sa fiabilité. Au contraire, en indiquant, de manière transparente, le fait que le contenu des articles qui y sont publiés n’est pas systématiquement vérifié, cette source avertit ses lecteurs de ce qu’il peut être nécessaire de croiser les informations transmises par les articles publiés pour en apprécier la véracité. C’est pourquoi il apparaît également utile que ce site Internet publie des articles provenant de différentes sources, certaines proches du régime syrien et d’autres s’opposant à celui-ci. Partant, il y a lieu de rejeter cet argument.

124    Il en va de même pour les arguments de la requérante concernant le site Internet « The Syria Report ». Plus précisément, s’agissant de l’allégation selon laquelle cette publication ne respecte pas les règles professionnelles journalistiques, force est de constater, tout d’abord, que la requérante ne précise pas au regard de quelles règles elle aurait dû être contactée par ce site Internet. En outre, il ne ressort aucunement du dossier que la requérante a réagi à ce prétendu manque de respect de telles règles, notamment, en entreprenant une action en diffamation. Enfin, en tout état de cause, il convient de relever que le fait que la requérante n’aurait pas été contactée afin de vérifier les informations relayées, à le supposer avéré, n’est pas, en tant que tel, suffisant pour dénier toute fiabilité aux informations publiées sur ce site Internet. Il convient donc d’écarter cet argument.

125    Ensuite, concernant, d’une part, l’allégation de la requérante selon laquelle les sites Internet « The Syrian Observer » et « The Syria Report » publient, en substance, les mêmes informations afin de doter ces dernières d’une objectivité apparente, force est de constater, tout d’abord, que la requérante ne produit aucune preuve illustrant la collusion alléguée. En outre, il ne ressort pas davantage du document WK 54/2019 INIT que les informations publiées sur ces deux sites Internet sont similaires au point de témoigner d’une telle collusion. Lors de l’audience, à l’appui de son allégation, la requérante a fait valoir que les articles dont la fiabilité est contestée étaient des références croisées et se recoupaient du fait de leur unique source d’informations. À cet égard, il convient de relever que, indépendamment de la circonstance que A est le directeur de publication du site Internet « The Syrian Observer » et le co-fondateur du site Internet « The Syria Report », le fait que deux sources publient les mêmes informations ne saurait être suffisant pour remettre en cause leur fiabilité dès lors qu’il est courant, dans le milieu journalistique, que différents journaux ou sites d’informations relaient les mêmes faits. Enfin, au cours de l’audience, force est de constater que la requérante a reconnu que certains des éléments relatés par le site Internet de Damascus Cham Holding, figurant également dans l’article de « The Syria Report », étaient corrects, de sorte que, même à supposer qu’ils fassent l’objet d’une présentation subjective de la part de leur auteur, ils n’en demeurent pas moins fiables. Dès lors, cet argument doit être rejeté.

126    Concernant, d’autre part, les doutes exprimés par la requérante quant à l’intégrité de A, force est de constater qu’elle n’a avancé aucun élément au soutien de cette allégation. En effet, la brève présentation de A, apportée par la requérante, ne mentionne pas l’existence de relations entre ce dernier et le Conseil. Cette circonstance ne peut pas non plus être déduite de l’article intitulé « Analyse : pas de fonds pour le projet de loi de reconstruction de la Syrie », dont A est l’auteur. Enfin, la requérante n’explique pas non plus quel serait l’intérêt pour A de publier des articles appuyant la politique que le Conseil entend appliquer, afin de servir, par la suite, de justification concernant des mesures restrictives amenées à être adoptées ou nouvellement adoptées. Dès lors, il y a lieu de rejeter cet argument.

127    Au vu de ce qui précède, le Tribunal estime, en l’absence d’élément dans le dossier susceptible de remettre en cause la fiabilité des sources utilisées par le Conseil, qu’il convient de leur reconnaître un caractère sensé et fiable, au sens de la jurisprudence rappelée au point 120 ci-dessus.

 Sur l’association avec le régime syrien

128    Il y a lieu de rappeler que, selon le motif unique d’inscription, la requérante profite du régime syrien et soutient ce dernier du fait de sa participation à la construction du projet Marota City, un projet immobilier haut de gamme appuyé par ledit régime, et de son statut de coentreprise entre Damascus Cham Holding et Aman Holding.

129    Il convient de vérifier si l’ensemble des éléments de preuve soumis par le Conseil satisfait à la charge de la preuve qui lui incombe en vertu de la jurisprudence rappelée au point 102 ci-dessus et constitue ainsi un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants pour étayer l’unique motif d’inscription.

130    À titre liminaire, il y a lieu de rejeter l’argument de la requérante relatif à la disparition de son lien avec M. Assi, rappelé au point 98 ci-dessus, comme étant inopérant, dès lors qu’il ne ressort pas des motifs d’inscription que le Conseil s’est appuyé sur ledit lien afin de justifier l’inscription et le maintien de son nom sur les listes en cause.

131    Ensuite, il convient de relever que, d’une part, la requérante admet, dans la requête, être une coentreprise qui a été créée conjointement par les sociétés Foz Trading, Damascus Cham Holding et Aman Holding, qui en sont actionnaires. L’article 8 de ses statuts d’entreprise, datés du 5 octobre 2018 et produits par la requérante, confirme l’identité de ses actionnaires. À ce titre, Foz Trading détient 11 % des parts, Aman Holding en détient 40 % et Damascus Cham Holding en détient 49 %. Il ressort également dudit article que la valeur totale du capital de cette coentreprise est de 18,9 millions d’USD, ainsi que cela est indiqué dans les motifs d’inscription. Dans les actes attaqués, le Conseil a identifié la requérante comme ayant son siège à Damas, ce qu’elle a également confirmé dans la requête.

132    D’autre part, la requérante reconnaît, dans la requête, que son objet social consiste à construire de nouveaux bâtiments résidentiels, commerciaux et récréatifs sur une partie (environ 3,1 % de la superficie) des terrains du projet Marota City apportés en nature au capital de Damascus Cham Holding, qui supervise les droits de 30 % des terrains du projet Marota City. En outre, la requérante confirme son implication dans le projet Marota City en fournissant, en annexe à la réplique, une présentation dudit projet dans laquelle son rôle est décrit. Ainsi, la requérante reconnaît être impliquée dans le projet Marota City.

133    En revanche, la requérante conteste avoir un lien avec le régime syrien du fait de sa participation à la construction du projet Marota City. À cet égard, elle fait valoir, dans un premier grief, qu’elle n’est pas une coentreprise soutenue par le régime syrien et, à ce titre, qu’elle n’est ni personnellement ni de quelque manière que ce soit liée au régime syrien. Dans un second grief, elle soutient que, dans le contexte du projet Marota City, elle n’a pas exploité des terrains expropriés appartenant à des personnes déplacées en raison du conflit en Syrie, ce qui les aurait empêchées de regagner leur foyer. En outre, les terrains sur lesquels le projet Marota City va être développé n’auraient pas été le théâtre d’affrontements entre les forces de l’opposition et le régime syrien et les quartiers de Damas situés dans cette zone n’auraient jamais été détruits pendant le conflit armé qui a eu cours en Syrie.

134    En premier lieu, aux fins de l’analyse du premier grief, il convient de vérifier si la requérante a des liens avec le régime syrien. À ce titre, il y a lieu de s’intéresser à ses actionnaires.

135    Premièrement, s’agissant d’Aman Holding, il ressort de nombreux éléments de preuve, issus notamment des sites Internet « The Syria Report », « Eqtsad News » et « Open Democracy », que M. Foz en est le directeur. Or, ainsi qu’il ressort des sites Internet « Open Democracy », « Zaman al-Wasl », « Sasa post » et « Reuters », M. Foz est devenu l’un des acteurs économiques les plus puissants de Syrie et son ascension aux échelons les plus élevés de l’élite économique syrienne est due à ses liens étroits avec le président syrien. En outre, dans le cadre de l’analyse de la légalité des actes de maintien de 2019 et des actes de maintien de 2020, il convient de relever qu’il ressort de l’article du 19 avril 2018, issu du site Internet « The Syria Report », que M. Foz est chargé de la gestion quotidienne d’Aman Holding, incluant ses filiales comme Foz Trading, également actionnaire de la requérante. Ainsi qu’il résulte de cet article, Aman Holding a été fondée en 1988 par le père de M. Foz. La requérante n’a pas contesté les éléments de preuve fournis par le Conseil sur ce point.

136    Deuxièmement, s’agissant de Damascus Cham Holding, les articles provenant des sites Internet « The Syria Report », « Open Democracy » et « Eqtsad News » démontrent que cette société a été créée par le gouvernorat de Damas. En effet, les articles de « The Syria Report », publiés les 17 avril et 1er juin 2018, mentionnent que Damascus Cham Holding est détenue par le gouvernorat de Damas. Ces circonstances sont confirmées par les statuts de cette société, produits par la requérante dans le cadre des réponses aux mesures d’organisation de la procédure adoptées le 23 juillet 2020. Le site Internet « Open Democracy » évoque un lien de partenariat entre Aman Holding et le régime syrien, par l’intermédiaire de sa société Damascus Cham Holding, pour la construction du projet situé à Basateen Al-Razi. Par ailleurs, le site Internet de Damascus Cham Holding précise que, lors de la première assemblée générale de la requérante, un représentant de la chambre du commerce et de la protection des consommateurs syrienne était présent. En outre, la fonction de Damascus Cham Holding relative à l’administration du projet Marota City, à la signature de contrats et à l’allocation de parts aux hommes d’affaires lui a été confiée par le gouvernorat de Damas, ainsi qu’il ressort du site Internet « Eqtsad News ». Ainsi, le site Internet « Open Democracy » indique que le développement de projets résidentiels dans le cadre du décret no 66/2012 sera conduit par des holdings détenues par les gouvernorats ou les municipalités, mais que la construction et l’organisation desdits projets seront attribuées à des entreprises du secteur privé détenues par des investisseurs liés au régime. Enfin, dans le cadre de l’analyse de la légalité des actes de maintien de 2019 et des actes de maintien de 2020, il convient de relever que l’article « The Syria Report », publié le 19 avril 2018, désigne Damascus Cham Holding comme l’entité du gouvernorat de Damas chargée des investissements.

137    Par ailleurs, il ressort du décret no 19/2015 que la réglementation syrienne autorise l’établissement par les gouvernorats de sociétés anonymes de droit privé, telle que Damascus Cham Holding, actionnaire de la requérante.

138    Il résulte de ce qui précède que les actionnaires de la requérante, à savoir Aman Holding et Foz Trading, d’une part, et Damascus Cham Holding, d’autre part, ont des liens avec le régime syrien en raison de l’implication en leur sein, respectivement, de M. Foz et du gouvernorat de Damas, ce qui implique que la requérante a elle-même de tels liens. De plus, compte tenu des circonstances de la création de la requérante, il y a lieu de conclure qu’elle constitue une coentreprise soutenue par le régime syrien. Il convient, dès lors, de rejeter le premier grief de la requérante.

139    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les autres arguments de la requérante.

140    Tout d’abord, la requérante prétend que le gouvernorat de Damas, qui a constitué Damascus Cham Holding, est une entité distincte de l’État syrien. Or, compte tenu de la nature autoritaire du régime syrien, le Conseil pouvait considérer, à juste titre, comme constituant une règle d’expérience commune le fait que les activités du gouvernorat de Damas n’avaient pas pu prospérer à moins que celui-ci ait bénéficié des faveurs dudit régime et lui ait apporté en retour un certain soutien (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2013, Anbouba/Conseil, T‑592/11, non publié, EU:T:2013:427, point 48). De surcroît, l’argument de la requérante est une allégation générale, qui n’est pas étayée par un élément de preuve concret illustrant, par exemple, l’organisation institutionnelle décentralisée du régime syrien au sein duquel les gouvernorats jouiraient d’une autonomie vis-à-vis du président ou du régime syriens. Il convient, dès lors, de rejeter cet argument.

141    Ensuite, la requérante soutient que le décret no 66/2012 a seulement enjoint au gouvernorat de Damas de permettre la création de sociétés privées. Cependant, il convient de constater que, à l’appui de cette allégation, la requérante n’étaye pas son propos, en citant, par exemple, l’article du décret qui contiendrait la prétendue injonction, ni n’explique en quoi cela serait de nature à remettre en cause l’existence d’un lien entre elle et le régime syrien. Au demeurant, l’existence d’une telle injonction constituerait un indice que le projet Marota City et l’implication de Damascus Cham Holding et, par suite, de la requérante dans celui-ci sont clairement soutenus par le régime syrien.

142    En outre, la requérante fait valoir que le gouvernorat de Damas se serait limité à autoriser la constitution de Damascus Cham Holding sans participer aux activités de la société. Néanmoins, cette allégation est contredite par l’affirmation, figurant dans la requête, selon laquelle Damascus Cham Holding a été constituée « en vue de centraliser et de coordonner la participation des promoteurs immobiliers désireux de prendre part au développement des 30 % des parts détenues par le gouvernorat de Damas dans le projet Marota City “par la conclusion de partenariats” ». De plus, l’article 2, sous D, intitulé « Objectifs de la société », des statuts de Damascus Cham Holding, produits par la requérante en réponse aux mesures d’organisation de la procédure adoptées le 23 juillet 2020, indique que Damascus Cham Holding effectue différentes tâches en faveur du gouvernorat de Damas et sous sa supervision. Par conséquent, le gouvernorat de Damas ne saurait être considéré comme ayant seulement constitué Damascus Cham Holding et être totalement étranger à son activité. Au contraire, par les éléments de preuve produits et les arguments avancés, la requérante confirme ce qui ressort des éléments de preuve produits par le Conseil, à savoir que Damascus Cham Holding est la société du gouvernorat de Damas par l’intermédiaire de laquelle celui-ci participe à des partenariats avec des entreprises privées. Ces circonstances sont confirmées par les statuts de cette société, produits par la requérante dans le cadre de ses réponses aux mesures d’organisation de la procédure adoptées par le Tribunal le 23 juillet 2020. Il en ressort également que, parmi les huit membres qui, en plus du gouverneur de Damas, composent le conseil d’administration de ladite société, quatre doivent être des experts dans les domaines commercial, juridique et financier, ne faisant pas partie du gouvernorat de Damas, mais nommés par ce dernier. Il y est également précisé que le gouverneur de Damas, en tant que président du conseil d’administration de ladite société, jouit d’une voix prépondérante en son sein. Ainsi, il résulte de l’ensemble de ces éléments que Damascus Cham Holding a été créée par le gouvernorat de Damas et constitue un instrument contrôlé par ce dernier afin de mener à bien sa participation dans le projet Marota City. Cette conclusion ne saurait être infirmée par le fait que cette société est une société de droit privé.

143    Il convient, dès lors, de rejeter également l’argument de la requérante selon lequel aucun organe public ne détiendrait d’actions dans son capital. En effet, par l’intermédiaire de Damascus Cham Holding, le gouvernorat de Damas, organe public, détient bien indirectement des actions dans son capital.

144    Enfin, la requérante soutient que Damascus Cham Holding ne dispose pas de la majorité au sein de son conseil d’administration, ce qui impliquerait clairement que les procédures juridiques et opérationnelles menées par la requérante émanent du secteur privé et non du secteur public.

145    Certes, au sein de la requérante, Aman Holding est l’actionnaire majoritaire, puisque Damascus Cham Holding ne dispose que de deux membres au sein du conseil d’administration alors qu’Aman Holding y a, quant à elle, trois représentants, selon les articles publiés le 17 avril et le 1er juin 2018 sur le site Internet « The Syria Report ». Cette composition du conseil d’administration de la requérante est confirmée par l’article 13 de ses statuts.

146    Toutefois, en faisant valoir que Damascus Cham Holding ne possède pas la majorité, et donc de pouvoir décisionnel au sein de son conseil d’administration, la requérante reconnaît, cependant, que celle-ci dispose d’un accès privilégié audit conseil d’administration. De plus, il ressort du contenu de l’article du site Internet « The Syria Report », du 1er juin 2018, que c’est Damascus Cham Holding qui a accordé à la requérante le droit de construire trois gratte-ciel, chacun comptant jusqu’à 70 étages, et cinq bâtiments résidentiels, dans le cadre du projet Marota City, ce qui n’est pas contesté par la requérante. Ainsi, outre la détention des actions de la requérante, Damascus Cham Holding dispose bien d’un certain pouvoir décisionnel au sein du conseil d’administration de celle-ci.

147    Au demeurant, il convient de relever que, même à admettre, ainsi que le soutient la requérante, que ses procédures juridiques et opérationnelles émanent du secteur privé et non du secteur public, cela n’aurait aucune incidence sur le fait que la requérante a des liens avec le régime syrien.

148    En deuxième lieu, s’agissant du second grief qui porte, en substance, sur le projet Marota City tel que rappelé au point 133 ci-dessus, il convient de relever ce qui suit.

149    Premièrement, il importe de rappeler que la requérante a reconnu participer à la construction du projet Marota City. À cet égard, les articles provenant du site Internet « The Syria Report », publiés le 16 janvier et le 1er juin 2018, mentionnent même que la requérante a été créée, en particulier, afin de mener le projet Marota City. En outre, il ressort des articles du 16 janvier, du 17 avril et du 1er juin 2018 du site Internet « The Syria Report » ainsi que du site Internet de Damascus Cham Holding que ce projet est de grande ampleur. Cela a été confirmé par la requérante, par le biais de la présentation du projet Marota City qu’elle a produite dans le présent recours, et de laquelle il ressort que le projet dont elle est en charge vise, notamment, la construction de complexes commerciaux, de bâtiments résidentiels et de loisirs sur une surface représentant une partie (environ 3,1 % de la superficie) des terrains apportés en nature au capital de Damascus Cham Holding, qui supervise les droits de 30 % des terrains du projet Marota City, dont la superficie totale s’étend sur 2,15 millions de mètres carrés.

150    En outre, les éléments de preuve produits par le Conseil, notamment les articles issus du site Internet « The Syria Report », du 1er juin 2018, ainsi que la liste des coentreprises créées par Damascus Cham Holding, publiée le 17 avril 2018, détaillent les projets développés par la requérante, à savoir la construction de trois gratte-ciel, comptant jusqu’à 70 étages chacun, et de cinq bâtiments résidentiels. Selon les articles provenant du site Internet « The Syria Report », publiés le 16 janvier, le 17 avril et le 1er juin 2018, et le site Internet de Damascus Cham Holding, cet investissement serait d’une valeur de 312 millions d’USD en termes de coûts d’investissement, ce qui équivaut à 150 milliards de SYP. Le site Internet de Damascus Cham Holding décrit le projet réalisé par la requérante comme étant, au vu de son ampleur, l’un des plus importants et des plus grands du projet Marota City. Enfin, le rapport de « Brookings Institution » qualifie le projet général Marota City de projet de construction de cité de luxe. Ainsi, il ressort des éléments de preuve fournis par le Conseil que, tant par son ampleur que par la valeur de ses investissements, la partie du projet Marota City confiée à la requérante est conséquente.

151    Deuxièmement, la localisation précise du projet Marota City permet de fournir des indices quant à son lien avec le régime syrien. En effet, le projet Marota City se situe dans le quartier Basateen Al-Razi, à Mazzeh, à l’entrée sud-ouest de Damas, ainsi qu’il ressort de la lecture croisée du site Internet « Open Democracy » et des articles publiés les 16 janvier et 1er juin 2018 et issus du site Internet « The Syria Report ». Selon l’article de ce dernier, publié le 1er juin 2018, cette zone est proche du centre-ville, des ambassades et des services de sécurité. Cette localisation la rend attractive aux yeux des promoteurs immobiliers. Dans la requête, la requérante confirme ladite localisation et apporte, en annexe à la réplique, un ensemble de cartes et de photographies satellites confirmant la localisation géographique du projet Marota City.

152    À cet égard, il convient de relever qu’il ressort d’une lecture d’ensemble des éléments d’information produits par le Conseil et provenant des sites Internet de Damascus Cham Holding, du gouvernement syrien, « The Foundation for Strategic Research », « Brookings Institution » et de l’article publié le 1er juin 2018 issu du site Internet « The Syria Report » que le régime syrien a adopté le décret no°66/2012 dans la perspective de développer des projets immobiliers de grande envergure, dont le projet Marota City, sur des terrains expropriés. Plus précisément, les sites Internet du gouvernement syrien et « The Foundation for Strategic Research » indiquent que le quartier sud-est de Mazzeh, à Damas, est l’une des deux zones désignées par le décret no 66/2012 pour y réaliser des réaménagements résidentiels et commerciaux.

153    Il résulte de ce qui précède que, en participant au projet Marota City, la requérante profite du régime syrien, mais le soutient également. En effet, d’une part, elle bénéficie d’un partenariat dont la valeur des investissements a été évaluée à hauteur de 312 millions d’USD, ce qui constitue une somme significative et, d’autre part, elle participe à la mise en œuvre de la politique que le régime syrien entend mettre en place par le biais de projets de reconstruction de grande ampleur.

154    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les autres arguments de la requérante.

155    Tout d’abord, la requérante soutient que le projet Marota City ne serait pas construit sur des terrains expropriés ayant appartenu à des personnes déplacées par le conflit en Syrie. Elle fait valoir, en ce sens, que les terrains sur lesquels est bâti le projet Marota City n’ont jamais fait l’objet d’une expropriation forcée, mais bien d’une négociation avec les propriétaires de logements non conformes situés sur ces terrains. En outre, elle ajoute, en substance, qu’une indemnité locative aurait été versée aux propriétaires de logements non conformes qui n’ont pas désiré vendre leur bien. Il convient de relever que ces arguments sont dénués de pertinence, dans la mesure où ils ne remettent pas en cause le bénéfice que la requérante tire du régime syrien et le soutien apporté par ce régime au projet Marota City.

156    Ensuite, l’argument de la requérante selon lequel, d’une part, les terrains sur lesquels le projet Marota City doit être construit n’ont pas été le théâtre d’affrontements entre les forces de l’opposition et le régime syrien et, d’autre part, les quartiers de Damas situés dans cette zone n’ont jamais été détruits pendant le conflit armé qui a eu cours en Syrie est inopérant, dès lors que le Conseil n’a pas soutenu que ces terrains auraient été le théâtre de tels affrontements.

157    Enfin, la requérante conteste l’importance de sa participation au projet Marota City. En ce sens, la requérante avance qu’elle n’aurait pas réalisé d’importants investissements. En effet, le pourcentage détenu par la requérante dans le projet Marota City ne représenterait que 0,00445 % de ce projet. Cet argument doit toutefois être rejeté. En effet, l’appui du régime syrien au projet Marota City a été établi. Dès lors, le taux de participation de la requérante dans le projet Marota City n’est pas, en lui-même, décisif afin d’évaluer le lien qu’elle a et maintient avec le régime syrien. L’argument de la requérante ne prive pas de base factuelle le motif de l’inscription et du maintien de son nom sur les listes en cause, à savoir qu’elle soutient et tire un bénéfice du régime syrien.

158    Au vu de ce qui précède, il convient de constater que le Conseil a démontré que la requérante est une entreprise qui a été créée conjointement par Damascus Cham Holding et Aman Holding et qu’elle est dotée d’un capital de 18,9 millions d’USD. En outre, elle est effectivement engagée dans le projet Marota City, à savoir un projet de construction de grande ampleur appuyé par le régime syrien aux fins d’asseoir sa politique dans les quartiers qui lui étaient politiquement opposés tout en en faisant profiter certaines entités de même que des femmes et des hommes d’affaires qui lui sont proches.

159    Ainsi, il convient de conclure que le Conseil a apporté un faisceau d’indices concrets, précis et concordants susceptible de mettre en évidence le fait que la requérante soutient le régime syrien et/ou en tire avantage. Dès lors, le motif unique d’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause en raison de son association avec le régime syrien est suffisamment étayé, de sorte que ladite inscription est bien fondée.

160    Partant, il y a lieu de rejeter le premier moyen comme non fondé.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’un « abus de pouvoir »

161    À l’appui de son moyen, la requérante fait valoir que le Conseil a adopté les actes attaqués pour cibler non le régime syrien, mais elle-même, alors qu’elle a toujours, d’une part, respecté les sanctions décrétées par l’Union et la communauté internationale et, d’autre part, conservé son indépendance vis-à-vis du régime syrien. Ainsi, la requérante serait exclue du marché afin de favoriser d’autres acteurs commerciaux. Ce faisant, la requérante doit être regardée comme invoquant un détournement de pouvoir.

162    Le Conseil conteste les arguments de la requérante.

163    Il y a lieu de rappeler qu’un acte n’est entaché de détournement de pouvoir que s’il apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été pris dans le but exclusif, ou à tout le moins déterminant, d’atteindre des fins autres que celles excipées ou d’éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’espèce (voir arrêt du 25 novembre 2014, Safa Nicu Sepahan/Conseil, T‑384/11, EU:T:2014:986, point 30 et jurisprudence citée).

164    En l’espèce, la requérante se borne à émettre des soupçons quant à l’existence d’un « abus de pouvoir » et n’explique pas en quoi le Conseil aurait poursuivi un autre objectif que l’exercice d’une pression sur le régime syrien afin qu’il modifie sa politique de répression. En effet, la requérante n’a aucunement étayé ladite allégation ni apporté le moindre indice ou argument au soutien de celle-ci.

165    Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le quatrième moyen.

 Sur les deuxième et troisième moyens, pris ensemble, tirés d’une violation du principe de proportionnalité, du droit de propriété et de la liberté d’exercer une activité économique

166    Premièrement, la requérante fait valoir que les mesures restrictives adoptées à son égard sont disproportionnées. En effet, compte tenu du fait qu’une partie substantielle de ses affaires seraient menées avec des fournisseurs et des clients européens et internationaux et qu’elle serait de ce fait exclue du commerce international, une partie des nombreux contrats qu’elle a conclus seraient nuls et non avenus, ce qui serait de nature à engager sa responsabilité vis-à-vis de ses clients et de ses cocontractants.

167    Deuxièmement, elle estime, en substance, que les actes attaqués violent son droit de propriété ainsi que sa liberté d’exercer une activité économique, ce qui constituerait également une violation du premier protocole additionnel de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

168    Troisièmement, la requérante fait valoir, dans les premier et second mémoires en adaptation, que la prorogation des mesures restrictives adoptées à son égard en vertu, respectivement, des actes de maintien de 2019 et des actes de maintien de 2020 aggrave les conséquences disproportionnées desdites mesures pour elle.

169    Le Conseil conteste les arguments de la requérante.

170    Il convient de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence que les droits fondamentaux invoqués par la requérante, à savoir le droit de propriété, consacré à l’article 17 de la Charte, et la liberté d’exercer une activité économique, consacré aux articles 15 et 16 de la Charte, ne sont pas des prérogatives absolues et que leur exercice peut faire l’objet de restrictions justifiées par des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union. Ainsi, toute mesure restrictive économique ou financière comporte, par définition, des effets qui affectent les droits de propriété et le libre exercice des activités professionnelles de la personne ou de l’entité qu’elle vise, causant ainsi des préjudices à cette dernière. L’importance des objectifs poursuivis par les mesures restrictives en cause est toutefois de nature à justifier des conséquences négatives, même considérables, pour les personnes ou les entités concernées (voir, en ce sens, arrêt du 25 mars 2015, Central Bank of Iran/Conseil, T‑563/12, EU:T:2015:187, point 115).

171    De plus, si le respect des droits fondamentaux constitue une condition de la légalité des actes de l’Union, selon une jurisprudence constante, ces droits fondamentaux ne jouissent pas, en droit de l’Union, d’une protection absolue, mais doivent être pris en considération par rapport à leur fonction dans la société. Par conséquent, des restrictions peuvent être apportées à l’usage de ces droits, à condition qu’elles répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union et ne constituent pas, au regard du but poursuivi, une intervention démesurée et intolérable qui porterait atteinte à la substance même des droits ainsi garantis (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 97 et jurisprudence citée).

172    En outre, il résulte d’une jurisprudence constante que le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union et qui est repris à l’article 5, paragraphe 4, TUE, exige que les moyens mis en œuvre par une disposition du droit de l’Union soient de nature à permettre que soient atteints les objectifs légitimes poursuivis par la réglementation concernée et n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre lesdits objectifs [voir, en ce sens, arrêts du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 122 ; du 25 juin 2015, Iranian Offshore Engineering & Construction/Conseil, T‑95/14, EU:T:2015:433, point 60 (non publié), et du 14 mars 2017, Bank Tejarat/Conseil, T‑346/15, non publié, EU:T:2017:164, point 149].

173    En ce qui concerne le droit de propriété et la liberté d’exercer une activité économique de la requérante, il convient, certes, de relever que ces droits sont restreints du fait des mesures restrictives prises à son égard, dès lors qu’elle ne peut pas, notamment, disposer de ses fonds éventuellement situés sur le territoire de l’Union, ni les transférer vers l’Union, sauf en vertu d’autorisations particulières.

174    Cependant, en l’occurrence, l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de la requérante revêt un caractère adéquat, dans la mesure où elle s’inscrit dans un objectif d’intérêt général aussi fondamental pour la communauté internationale que la protection des populations civiles. En effet, le gel de fonds, d’avoirs financiers et d’autres ressources économiques ne saurait, en tant que tel, passer pour inadéquat (voir arrêt du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, EU:T:2013:431, point 100 et jurisprudence citée).

175    Quant au caractère prétendument disproportionné de l’inscription du nom de la requérante sur les listes en cause, il convient de rappeler que l’article 28, paragraphe 6, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, ainsi que l’article 16 du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828, prévoient la possibilité, d’une part, d’autoriser l’utilisation de fonds gelés pour faire face à des besoins essentiels ou satisfaire à certains engagements et, d’autre part, d’accorder des autorisations spécifiques permettant de dégeler des fonds, d’autres avoirs financiers ou d’autres ressources économiques (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 364, et du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, EU:C:2012:711, point 127).

176    Il en résulte que, étant donné l’importance primordiale de la protection des populations civiles en Syrie, les restrictions aux droits de la requérante éventuellement causées par les actes attaqués sont justifiées par un objectif d’intérêt général et ne sont pas disproportionnées au regard des buts visés.

177    Enfin, concernant la prolongation de l’application dans le temps des mesures restrictives adoptées à l’égard de la requérante, en vertu des actes de maintien de 2019 et des actes de maintien de 2020, qui aggraverait les conséquences disproportionnées desdites mesures pour cette dernière, il y a lieu de constater que, dans le cadre de telles mesures restrictives, le Conseil est appelé à procéder à un réexamen périodique, conformément à l’article 34, deuxième et troisième phrases, de la décision 2013/255, telle que modifiée par la décision 2015/1836, ainsi qu’à l’article 32, paragraphe 4, du règlement no 36/2012, tel que modifié par le règlement 2015/1828, qui comporte à chaque fois la possibilité pour la personne ou l’entité concernée d’opposer ses arguments et de soumettre des éléments factuels corroborant ses allégations (voir, en ce sens, arrêt du 9 juillet 2020, Haswani/Conseil, C‑241/19 P, EU:C:2020:545, points 106 et 107).

178    Dès lors, c’est à bon droit, sur la base d’un réexamen du maintien du nom de la requérante sur les listes en cause, que le Conseil a décidé de proroger ces mesures restrictives jusqu’au 1er juin 2020, puis jusqu’au 1er juin 2021.

179    Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter les deuxième et troisième moyens, pris ensemble, et, partant, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

180    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

181    En l’espèce, la requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions du Conseil.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Aman Dimashq JSC est condamnée aux dépens.

Gervasoni

Madise

Martín y Pérez de Nanclares

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 novembre 2021.

Signatures


Table des matières


Antécédents du litige et faits postérieurs à l’introduction du recours

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

Sur le sixième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense, du droit à un procès équitable et du droit à une protection juridictionnelle effective

Sur le premier moyen, tiré d’une erreur d’appréciation

Considérations liminaires

Sur les éléments de preuve soumis par le Conseil

Sur la fiabilité des éléments de preuve produits par le Conseil

Sur l’association avec le régime syrien

Sur le quatrième moyen, tiré d’un « abus de pouvoir »

Sur les deuxième et troisième moyens, pris ensemble, tirés d’une violation du principe de proportionnalité, du droit de propriété et de la liberté d’exercer une activité économique

Sur les dépens



*      Langue de procédure : l’anglais.


1      Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.