Language of document : ECLI:EU:T:2020:195

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

13 mai 2020 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Enregistrement international désignant l’Union européenne – Marque figurative РОШЕН – Marque internationale figurative antérieure ромашки – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑63/19,

Rot Front OAO, établie à Moscou (Russie), représentée par Mes M. Geitz et J. Stock, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. M. Fischer et H. O’Neill, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Dochirnie pidpryiemstvo Kondyterska korporatsiia « Roshen », établie à Kiev (Ukraine), représentée par Me I. Lukauskienė, avocate,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 16 novembre 2018 (affaire R 1872/2018-2), relative à une procédure d’opposition entre Rot Front et Dochirnie pidpryiemstvo Kondyterska korporatsiia « Roshen »,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mmes V. Tomljenović, présidente, A. Marcoulli (rapporteure) et M. A. Kornezov, juges,

greffier : Mme R. Ūkelytė, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 31 janvier 2019,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 26 mars 2019,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 25 avril 2019,

à la suite de l’audience du 28 novembre 2019, à laquelle l’intervenante n’a pas participé,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 12 décembre 2016, l’intervenante, Dochirnie pidpryiemstvo Kondyterska korporatsiia « Roshen », a demandé la protection dans l’Union européenne de l’enregistrement international no 1233784. Cet enregistrement a été notifié le 4 mai 2017 à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        L’enregistrement international pour lequel la protection dans l’Union a été demandée est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels la protection a été demandée relèvent de la classe 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Bonbons, bonbons au chocolat ».

4        Le 18 juillet 2017, la requérante, Rot Front OAO, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001) à l’enregistrement de la marque demandée.

5        L’opposition était fondée sur la marque internationale antérieure no 1194309, désignant l’Allemagne, l’Espagne, la France, la Grèce, la Lettonie et la Lituanie, enregistrée le 13 novembre 2013 pour les produits relevant de la classe 30 et correspondant à la description suivante : « Friandises (bonbons) », hormis pour la Lettonie, pour laquelle les produits correspondent à la description limitée suivante : « Friandises (bonbons), à l’exception de bonbons à base de lait », reproduite ci-après :

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6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

7        Le 24 juillet 2018, la division d’opposition a accueilli l’opposition et a rejeté la demande d’enregistrement.

8        Le 24 septembre 2018, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

9        Par décision du 16 novembre 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’opposition et rejeté l’opposition dans son intégralité, en considérant qu’il n’existait pas de risque de confusion entre les marques en conflit.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

12      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      À l’appui du recours, la requérante invoque six moyens, tirés, respectivement :

–        le premier, de l’application erronée de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et du droit d’être entendu, en ce que la chambre de recours a fondé sa décision sur des faits qui n’ont été présentés par aucune des parties ;

–        le deuxième, de l’application erronée de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et du droit d’être entendu, en ce que la chambre de recours n’a pas fondé sa décision sur des faits présentés par la requérante ;

–        le troisième, de l’application erronée de l’article 47, paragraphe 5, et de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, s’agissant de l’appréciation du caractère distinctif de la marque antérieure ;

–        le quatrième, de l’application erronée de l’article 47, paragraphe 5, et de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, s’agissant de l’appréciation de la similitude des signes ;

–        le cinquième, de l’application erronée de l’article 47, paragraphe 5, et de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, s’agissant de l’appréciation du risque de confusion ;

–        le sixième, de l’application erronée de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et du droit d’être entendu, s’agissant de l’appréciation du risque de confusion.

14      Ainsi, en substance, la requérante invoque, d’une part, la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), et de l’article 47, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 (troisième, quatrième et cinquième moyens), et, d’autre part, la violation de l’article 94, paragraphe 1, du même règlement et du droit d’être entendu (premier, deuxième et sixième moyens).

15      Dans ce cadre, il convient d’examiner, d’abord, les troisième, quatrième et cinquième moyens, tirés de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), et de l’article 47, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

16      À titre liminaire, il y a lieu de relever que l’article 47, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 se limite à prévoir que, « [s]’il résulte de l’examen de l’opposition que la marque est exclue de l’enregistrement pour tout ou partie des produits ou des services pour lesquels la marque de l’Union européenne est demandée, la demande est rejetée pour les produits ou les services concernés » et que, « [d]ans le cas contraire, l’opposition est rejetée ». Or, si la requérante invoque une prétendue violation de ladite disposition, force est de constater que, dans les développements opérés dans le cadre de ses troisième, quatrième et cinquième moyens, la requérante ne fait pas valoir d’arguments visant spécifiquement le contenu de ladite disposition, mais que ses arguments visent plutôt les conditions matérielles d’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

17      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), iii), du règlement 2017/1001, il convient d’entendre par marques antérieures les marques qui ont fait l’objet d’un enregistrement international ayant effet dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque de l’Union européenne.

18      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

19      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

 Observations liminaires

20      S’agissant, tout d’abord, du territoire pertinent, au point 15 de la décision attaquée, la chambre de recours a, en substance, relevé que le territoire pertinent était celui de la Grèce, de la France, de l’Espagne, de l’Allemagne, de la Lettonie et de la Lituanie, dès lors que la marque antérieure était protégée dans ces États membres. Eu égard aux faits de l’espèce, il n’y a pas lieu de remettre en cause une telle constatation, au demeurant non contestée par la requérante.

21      S’agissant, ensuite, du public pertinent, au point 16 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que le public pertinent se composait du grand public dans les territoires pertinents. La chambre de recours a ajouté que le niveau d’attention du public était inférieur à la moyenne, dès lors que les marques en conflit portaient sur des produits tels que les bonbons bon marché, comme les caramels ou les bonbons à sucer, et que cela n’était pas affecté par l’argument de l’intervenante selon lequel le niveau d’attention pourrait être élevé en ce qui concerne les produits de luxe.

22      Il n’y a pas lieu de remettre non plus en cause la définition du public pertinent, au demeurant non contestée par les parties. En effet, selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée]. En outre, il convient de rappeler que, en ce qui concerne l’appréciation du risque de confusion, le public ayant le niveau d’attention le moins élevé doit être pris en considération [voir arrêt du 15 juillet 2011, Ergo Versicherungsgruppe/OHMI – Société de développement et de recherche industrielle (ERGO), T‑220/09, non publié, EU:T:2011:392, point 21 et jurisprudence citée]. Ainsi, en l’espèce, le risque de confusion doit être apprécié en prenant en considération un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, mais dont le niveau d’attention est inférieur à la moyenne au regard des bonbons, lesquels sont communément des produits peu onéreux, destinés à la grande consommation et vendus en libre-service.

23      S’agissant, enfin, de la comparaison des produits, au point 17 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que les produits visés par les marques en conflit étaient identiques, dès lors que ceux visés par la marque demandée, à savoir les « bonbons, bonbons au chocolat », étaient identiques à ceux visés par la marque antérieure, à savoir les « friandises (bonbons) », et ce indépendamment même de la limitation concernant le territoire letton, concernant les « friandises (bonbons), à l’exception de bonbons à base de lait ». Eu égard aux faits de l’espèce, il n’y a pas lieu de remettre en cause une telle appréciation, au demeurant non contestée par la requérante.

 Sur la comparaison des signes

24      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

25      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en conflit, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

26      Un éventuel caractère distinctif faible d’un élément d’une marque complexe n’implique pas nécessairement que celui-ci ne saurait constituer un élément dominant, dès lors que, en raison, notamment, de sa position dans le signe ou de sa dimension, il est susceptible de s’imposer à la perception du consommateur et d’être gardé en mémoire par celui-ci [voir arrêt du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, EU:T:2007:387, point 54 et jurisprudence citée].

 Sur les éléments distinctifs et dominants

27      En l’espèce, au point 20 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, dans les signes en conflit, les éléments verbaux étaient de taille réduite et n’avaient donc qu’une incidence limitée sur l’impression d’ensemble. Elle a relevé que l’attention du public était plutôt attirée par l’agencement des fleurs et par le motif dans son ensemble, éléments qui devaient être considérés comme la partie « la plus dominante » des signes en conflit.

28      Dans cette perspective, aux points 21 et 22 de la décision attaquée, la chambre de recours a ajouté que, en général, les mots écrits dans l’alphabet cyrillique n’étaient pas compris par les consommateurs grecs, français, espagnols ou allemands. Elle a relevé, s’agissant de la marque antérieure, d’une part, qu’une « grande partie » du public lituanien et letton pouvait comprendre le mot « ромашки », lequel, pour ce public, signifiait « camomille » ou « marguerite » et était susceptible d’évoquer les fleurs représentées dans la marque ou la saveur de la confiserie, et, d’autre part, que le mot « конфетти », répété par intermittence sur les bords verticaux de la marque et signifiant « confetti », était à peine lisible, de sorte qu’il « a[vait] peu de conséquences » sur la comparaison des signes. S’agissant de la marque demandée, la chambre de recours a indiqué que le mot « рошен » n’avait aucune signification dans les langues parlées dans les territoires pertinents ou en russe.

29      Au point 23 de la décision attaquée, la chambre de recours a également indiqué que, s’agissant des confiseries, les représentations de fleurs sur un fond vert ne possédaient pas un caractère distinctif très élevé, étant donné qu’elles véhiculaient généralement l’idée selon laquelle les produits étaient naturels, purs, exempts de substances chimiques ou autres. Elle a ajouté que les consommateurs russophones qui comprenaient le mot « ромашки » comme renvoyant à la « camomille » ou les consommateurs qui reconnaissaient la représentation de la fleur de camomille dans les marques pouvaient considérer que la confiserie avait la saveur de la camomille. Ainsi, selon la chambre de recours, le motif de fleur en tant que tel était faiblement distinctif.

30      La requérante, premièrement, dans le cadre du troisième moyen, conteste certaines appréciations de la chambre de recours contenues aux points 20 à 23 de la décision attaquée relatives à la comparaison des signes en conflit et, plus spécifiquement, à leurs éléments distinctifs et dominants. En particulier, la requérante critique spécifiquement le point 23 de la décision attaquée et fait valoir que la chambre de recours n’a pas pris en considération le fait que la représentation de fleurs blanches à centre jaune sur un fond vert possède un caractère distinctif très élevé pour les produits en cause. L’appréciation de la chambre de recours selon laquelle la représentation desdites fleurs n’aurait pas un caractère distinctif très élevé, puisqu’elle véhiculerait l’image d’un produit naturel ou ferait allusion à la saveur du produit, serait erronée et dépourvue de fondement. La requérante invoque également, dans ce cadre, une application erronée de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001. Le public pertinent n’attribuerait aucune signification aux fleurs représentées dans les marques en conflit et, quand bien même l’appréciation de la chambre de recours serait correcte pour le public russophone, elle ne vaudrait pas pour le public non russophone.

31      Deuxièmement, dans le cadre du quatrième moyen, la requérante fait valoir que les éléments verbaux sont soit dépourvus d’importance, soit décoratifs. Selon la requérante, les signes en conflit sont dominés par l’élément figuratif d’arcs essentiellement formés par trois fleurs blanches, disposés l’un sous l’autre dans la partie du milieu des signes. Elle ajoute que la structure et les éléments des signes en conflit sont distinctifs pour les produits en cause.

32      L’EUIPO et l’intervenante réfutent ces arguments.

33      À titre liminaire, il convient de relever que, d’une part, la marque antérieure est composée par un fond de forme carrée et de couleur verte, au centre duquel plusieurs fleurs ayant des pétales blancs allongés et un centre jaune sont représentées de manière stylisée. Ces fleurs sont juxtaposées de façon à composer cinq arcs parallèles horizontaux, chacun étant constitué de trois fleurs, incurvé vers le bas et placé à une hauteur différente. Par ailleurs, trois de ces arcs sont placés au centre du signe et sont entièrement visibles, tandis que deux de ces arcs sont placés à cheval sur les bords horizontaux du signe et ne sont que partiellement visibles, une partie sortant du fond du signe. Dans les espaces entre lesdits arcs, toujours au centre du signe, l’élément verbal constitué par le mot « ромашки » est représenté quatre fois en petits caractères majuscules jaunes. Après la dernière lettre dudit mot figure un très petit cercle dont le contenu n’est pas clairement visible, mais qui évoque le symbole habituellement utilisé pour indiquer une marque déposée. Sur les deux côtés du signe, à proximité de ses bords verticaux, est représenté un motif constitué par des formes triangulaires ou coniques horizontales identiques et parallèles dans des nuances de blanc et de jaune. En correspondance avec ces motifs verticaux, l’élément verbal constitué par le mot « конфетти » est représenté six fois verticalement en très petits caractères jaunes.

34      D’autre part, la marque demandée est composée par un fond de forme rectangulaire divisé en trois bandes verticales, à savoir deux bandes externes de couleur verte et une bande centrale de couleur jaune, dont la séparation n’est pas nette, mais s’opère à travers un dégradé de couleurs. Au centre de la bande centrale jaune, plusieurs fleurs ayant des pétales blancs allongés et un centre jaune (dont la teinte est plus foncée que celle du fond et tend vers le jaune orangé à proximité des contours) sont représentées de manière stylisée. Ces fleurs sont juxtaposées de façon à composer trois arcs parallèles horizontaux, chacun étant constitué de trois fleurs ayant un contour noir, incurvé vers le haut et placé à différentes hauteurs, à savoir, respectivement, un tout en haut, un vers le milieu et un vers le bas du rectangle. Dans les espaces entre lesdits arcs, en contrebas de chaque arc, toujours au centre du rectangle, mais légèrement décalé sur la droite, l’élément verbal constitué par le mot « рошен » est représenté trois fois en petits caractères majuscules noirs. À gauche et à droite de chaque arc, est représenté un autre arc, toujours composé des mêmes trois fleurs, mais sans contour noir et incurvé vers l’intérieur du rectangle. Sur les deux côtés verts du fond rectangulaire, à proximité de ses bords verticaux, est représenté un motif constitué de six paires horizontales et parallèles des mêmes fleurs à pétales blancs et centre jaune et sans contour noir. En correspondance avec ces motifs verticaux, l’élément verbal constitué par le mot « roshen » est représenté trois fois verticalement en petits caractères noirs et encadré par une fine ligne noire.

35      Dans ce cadre, en premier lieu, en ce qui concerne les éléments dominants des signes en conflit, il convient d’observer que la requérante ne semble pas contester l’appréciation de la chambre de recours, contenue au point 20 de la décision attaquée, selon laquelle « l’agencement des fleurs » et « le motif dans son ensemble » constituent les éléments « l[es] plus dominant[s] » des signes en conflit et que les éléments verbaux ont une incidence limitée sur l’impression d’ensemble. Elle semble même confirmer une telle appréciation, laquelle, au demeurant, ne doit pas être remise en cause dans les circonstances du cas d’espèce.

36      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, aux fins d’apprécier le caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre, et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe [arrêt du 27 septembre 2018, TenneT Holding/EUIPO – Ngrid Intellectual Property (NorthSeaGrid), T‑70/17, non publié, EU:T:2018:611, point 66].

37      En l’espèce, force est de constater que, s’agissant de la marque antérieure, si les éléments verbaux constitués par les mots « ромашки » et « конфетти » ne passent pas inaperçus, l’attention du public ne converge toutefois pas vers ces éléments. En effet, eu égard tant à leur petite taille – voire même très petite taille, en ce qui concerne le second mot, qui n’est pas clairement lisible – qu’à leur couleur jaune, lesdits éléments verbaux ne tranchent pas sur le fond vert et n’attirent pas l’attention du public. En revanche, l’attention du public converge immédiatement sur les trois arcs de fleurs entièrement visibles, représentés au centre du signe, lesquels ont une taille (tant en largeur qu’en hauteur) bien plus grande que l’élément verbal « ромашки » et sont mis en exergue par leur contour net ainsi que par la couleur blanche des pétales. L’attention est ensuite attirée par les motifs décoratifs répétés sur les côtés, lesquels, s’ils ont des contours moins nets et des couleurs plus nuancées, occupent tout de même toute la hauteur du fond carré du signe. De même, s’agissant de la marque demandée, si les éléments verbaux constitués par le mot « рошен » et le mot « roshen » ne passent non plus inaperçus, force est de constater que l’attention du public est attirée par les éléments figuratifs, eu égard tant à leur nombre élevé qu’à leur taille bien plus grande que celle des éléments verbaux. En particulier, l’attention du public converge sur les fleurs blanches à centre jaune constituant trois arcs horizontaux de trois fleurs au centre du signe, dont les fleurs sont mises en exergue par un dessin précis et un contour noir plus appuyé. L’attention est ensuite attirée par les autres fleurs constituant des arcs verticaux et des paires sur les côtés de la marque, dont le dessin est moins précis et le contour moins appuyé.

38      Il en résulte que tant dans la marque antérieure que dans la marque demandée, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours, la perception du public est attirée par les fleurs et par la structure globale du motif figuratif représenté dans les marques.

39      Cela étant, si les éléments figuratifs constituent la partie « la plus dominante » des signes en conflit, les éléments verbaux écrits horizontalement au centre des signes, ainsi qu’il a été observé au point 37 ci-dessus, ne passent pas inaperçus et ne sauraient être considérés comme étant négligeables, dès lors que, bien que de taille plus petite par rapport aux éléments figuratifs, ils sont clairement lisibles et répétés plusieurs fois. En revanche, si les éléments verbaux écrits verticalement sur les côtés des signes sont aussi perceptibles, ils sont plus difficilement lisibles eu égard tant à leur orientation verticale qu’à la taille de leurs caractères. Ainsi que l’a relevé la chambre de recours, ces derniers ont donc moins d’impact dans la perception des signes et n’ont donc que peu de conséquences lors de leur comparaison.

40      En deuxième lieu, en ce qui concerne le caractère distinctif des éléments composant les signes en conflit, premièrement, s’agissant des éléments verbaux, d’une part, il est constant que le mot « ромашки » de la marque antérieure signifie « camomille » ou « marguerite » en russe. Par conséquent, dès lors qu’il est susceptible d’évoquer la saveur ou la composition des produits, ledit élément est faiblement distinctif pour la partie russophone du public pertinent. D’autre part, il est aussi constant que la partie non russophone du public pertinent n’attribue aucune signification audit élément verbal, tout comme à l’élément verbal « рошен » de la marque demandée, lequel n’a pas non plus de signification en russe. Par conséquent, le mot « рошен » a un certain caractère distinctif pour le public pertinent, tout comme le mot « ромашки » pour la partie non russophone de ce public.

41      Deuxièmement, en revanche, les parties s’opposent quant au degré de caractère distinctif qu’il convient de reconnaître, pour des produits tels que des bonbons, à l’élément figuratif consistant en la représentation de fleurs blanches à centre jaune sur un fond vert. En particulier, selon la requérante, lesdits éléments figuratifs ont un caractère distinctif très élevé, tandis que l’EUIPO et l’intervenante défendent la position de la chambre de recours selon laquelle lesdits éléments ne possèdent pas un caractère distinctif très élevé et le motif de fleur est faiblement distinctif.

42      À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, pour déterminer le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’apprécier l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée [ordonnance du 3 mai 2018, Siberian Vodka/EUIPO – Schwarze und Schlichte (DIAMOND ICE), T‑234/17, non publiée, EU:T:2018:259, point 38].

43      À cet égard, il convient de relever que des petites fleurs à pétales blancs et centre jaune, telles que celles représentées dans les signes en conflit, peuvent évoquer, dans la perception du public pertinent, des fleurs des champs communes, telles que des pâquerettes ou des marguerites, ou encore les fleurs d’une plante officinale tout aussi commune comme la camomille. D’ailleurs, en ce qui concerne la marque antérieure, une telle perception est d’autant plus plausible pour la partie russophone du public pertinent, dès lors que le mot « ромашки » signifie effectivement « camomille » ou « marguerite » en russe, ce qui n’est pas contesté par les parties. Or, il ne saurait être exclu que la représentation de petites fleurs pour des produits tels que des bonbons soit susceptible d’évoquer, dans l’esprit du public pertinent, la saveur ou le contenu des bonbons, leur caractère naturel ou, encore, leurs propriétés, telles que des vertus rafraîchissantes ou adoucissantes. Il peut précisément en aller ainsi en l’espèce, et ce de surcroît pour la partie du public pertinent qui perçoit dans les signes en conflit la représentation de fleurs de camomille, lesquelles peuvent faire allusion à certaines caractéristiques des produits en cause, telles que leur saveur ou leur composition.

44      L’argument de la requérante selon lequel le public pertinent n’attribue aucune signification aux fleurs illustrées dans les signes en conflit ne saurait donc être retenu. En effet, à supposer même que le public pertinent ne reconnaisse pas une typologie précise de fleur (pâquerettes, marguerites, fleurs de camomille ou autre) dans les éléments figuratifs représentés dans les signes en conflit, il est tout de même en mesure de percevoir, en tant que telle, la représentation de fleurs plutôt simples, lesquelles, indépendamment de leur nom, demeurent aptes à faire allusion au caractère naturel du produit, et ce indépendamment du fait que ce public soit russophone on non russophone.

45      Il en découle que, en l’espèce, la représentation de fleurs simples et communes, sans aucune originalité particulière, ne saurait être considérée comme étant particulièrement distinctive pour des bonbons et que c’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que leur caractère distinctif n’était pas très élevé, y compris lorsque lesdites fleurs sont juxtaposées de façon à former des petits arcs de trois fleurs ou des paires horizontales de deux fleurs, lesquels ne présentent pas non plus d’originalité particulière, tout comme les formes triangulaires ou coniques figurant sur les côtés de la marque antérieure, lesquelles ont plutôt une fonction décorative.

46      Cela étant, le faible caractère distinctif desdits éléments figuratifs ne remet pas en cause le fait qu’ils constituent la partie « la plus dominante » des signes en conflit. En effet, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, il y a lieu de rappeler que le faible caractère distinctif d’un élément d’une marque complexe n’implique pas nécessairement que celui-ci ne saurait constituer un élément dominant, dès lors que, en raison, notamment, de sa position dans le signe ou de sa dimension, il est susceptible de s’imposer à la perception du consommateur et d’être gardé en mémoire par celui-ci [arrêt du 12 juin 2018, Cotécnica/EUIPO – Mignini & Petrini (cotecnica MAXIMA), T‑136/17, non publié, EU:T:2018:339, point 52]. Compte tenu des constatations opérées aux points 37 et 38 ci-dessus, force est de constater que, malgré leur caractère faiblement distinctif, lesdits éléments figuratifs constituent la partie « la plus dominante » des signes en conflit.

47      Par ailleurs, en ce qui concerne l’argument de la requérante tiré d’une violation de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, il y a lieu de relever qu’une violation de ladite disposition, laquelle vise le droit d’être entendu, ne saurait être constatée à cause du seul fait que la chambre de recours n’a pas mis la requérante à même de se prononcer sur son appréciation des caractéristiques intrinsèques des éléments figuratifs des marques en conflit. En effet, il y a lieu de rappeler que l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 dispose que les décisions de l’EUIPO ne peuvent être fondées que sur des motifs ou des preuves au sujet desquels les parties ont pu prendre position. Cette disposition consacre, dans le cadre du droit des marques de l’Union européenne, le principe général de protection des droits de la défense. En vertu de ce principe, qui inclut le droit d’être entendu, toute personne à qui une décision d’une autorité publique fait grief doit avoir été mise en mesure de faire connaître utilement son point de vue avant l’adoption de ladite décision. Le droit d’être entendu s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de ladite décision, mais non à la position finale que l’autorité publique entend adopter [arrêt du 20 mars 2019, Prim/EUIPO – Primed Halberstadt Medizintechnik (PRIMED), T‑138/17, non publié, EU:T:2019:174, points 25 et 26].

 Sur la comparaison visuelle

48      En l’espèce, au point 24 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, s’il était vrai que les signes en conflit présentaient au centre trois fleurs reliées formant une sorte d’arc et que ces fleurs présentaient des pétales blancs, « la similitude s’arrêt[ait] là ». À cet effet, tout d’abord, au point 24 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que, dans la marque antérieure, les pétales étaient disposés de manière égale autour du centre, la fleur était représentée de manière très stylisée et les fleurs reliées entre elles prenaient la forme d’un « u » peu profond, tandis que, dans la marque demandée, les pétales étaient rassemblés par groupes de deux ou trois, la fleur était une représentation fidèle de son apparence dans la nature et les fleurs reliées entre elles semblaient représenter une couronne de fleurs vue de face. Ensuite, au point 25 de la décision attaquée, la chambre de recours a ajouté que « d’autres différences notables » tenaient au fait que, dans la marque antérieure, les fleurs étaient représentées sur un fond vert et les bords verticaux étaient décorés d’un motif répétitif d’éléments coniques jaunes, tandis que, dans la marque demandée, les fleurs étaient représentées sur un fond jaune et les bords verticaux étaient décorés des mêmes fleurs disposées par paires. En outre, au point 26 de la décision attaquée, elle a considéré que l’élément verbal « ромашки » contenu dans la marque antérieure ne présentait aucun lien évident avec l’élément verbal « рошен » contenu dans la marque demandée. Enfin, au point 27 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que, s’il y avait certaines similitudes entre les signes, elles n’étaient guère frappantes, étant donné qu’elles portaient sur des « éléments marginaux relativement faibles » ou des « éléments dont le caractère distinctif [était] moindre ». Sur la base de ces éléments, au point 27 de la décision attaquée, la chambre de recours a conclu que les signes étaient similaires à un faible degré.

49      La requérante, dans le cadre du quatrième moyen, fait valoir que la chambre de recours est parvenue à tort à la conclusion que la similitude visuelle est d’un faible niveau, en opérant une comparaison erronée, car trop détaillée et fragmentée. Or, selon la requérante, il existe un niveau élevé de similitude visuelle entre les signes en conflit, découlant du fait que la structure des signes est identique : ils sont rectangulaires ; la combinaison des couleurs est la même ; ils contiennent des arcs formés par trois fleurs avec des petits pétales blancs autour d’un cœur jaune et des bords composés d’éléments figuratifs floraux à gauche et à droite desdits arcs, ainsi qu’un fond jaune vert. La requérante argue que ces éléments créent la même impression pour le public pertinent.

50      L’EUIPO fait valoir que, quand bien même les deux signes présentent certaines similitudes, ils se caractérisent également par d’importantes différences dans la représentation des fleurs, dans la palette des couleurs et dans l’agencement de l’arrière-plan ainsi que dans l’élément verbal. En particulier, la marque antérieure serait très stylisée et présenterait des formes florales géométriques et abstraites, tandis que la marque demandée comporterait des fleurs représentées de manière réaliste, dont le nombre serait aussi très important. En outre, les éléments verbaux seraient complétement différents et de longueur distincte. En conclusion, selon l’EUIPO, dès lors que les signes présentent des différences visuelles notables et que les similitudes concernent des éléments dont le caractère distinctif est amoindri, les signes ne seraient similaires qu’à un faible degré.

51      L’intervenante conteste les arguments de la requérante : il n’y aurait pas d’arc dans la marque demandée, car les fleurs formeraient des cercles ; les fleurs seraient différentes et elles seraient présentées différemment ; la structure des marques ne serait pas identique ; il n’y aurait pas de cœurs jaunes dans les fleurs représentées dans la marque demandée ; la couleur du fond serait différente, tout comme le seraient le nombre de fleurs et les éléments verbaux. Ces différences ne permettraient de conclure qu’à un niveau de similitude visuelle faible.

52      À titre liminaire, il y a lieu de relever qu’il est constant que les signes en conflit présentent une similitude visuelle, les parties n’étant en désaccord que sur le degré d’une telle similitude. Selon l’EUIPO et l’intervenante, ainsi que l’a retenu la chambre de recours dans la décision attaquée, ledit degré de similitude serait faible. Selon la requérante, il serait élevé. Par ailleurs, ainsi qu’il ressort du point 5 de la décision attaquée, la division d’opposition, dans la décision du 24 juillet 2018 faisant droit à l’opposition visée au point 7 ci-dessus, avait considéré que lesdits signes étaient similaires à un degré moyen.

53      Dans ces circonstances, afin de déterminer si c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à un degré de similitude faible, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence rappelée au point 25 ci-dessus, la comparaison des marques en conflit doit être opérée en examinant ces marques chacune prise dans son ensemble. En effet, ainsi qu’il a été constaté au point 39 ci-dessus, bien que l’agencement des fleurs et le motif figuratif dans son ensemble constituent « la partie la plus dominante » des signes en conflit, les autres éléments, tels que les éléments verbaux, ne sont pas négligeables, mais, compte tenu de leur position et de leur taille, ont une incidence proportionnellement plus limitée dans l’impression d’ensemble des signes en conflit.

54      En premier lieu, s’agissant de la structure des marques en conflit, il y a lieu de relever que, ainsi que le fait observer la requérante, les deux marques présentent une structure analogue. En effet, tout d’abord, les marques en conflit sont toutes les deux des marques complexes, composées d’éléments verbaux et figuratifs inscrits dans un fond ayant la forme d’un quadrilatère avec ses quatre angles droits, à savoir un carré dans la marque antérieure et un rectangle dans la marque demandée. Ensuite, les éléments figuratifs sont disposés, d’une part, au centre du fond de façon à composer des arcs, lesquels, s’ils sont, certes, orientés différemment dans les deux signes, sont parallèles et composés de trois fleurs dans les deux signes, et, d’autre part, sur les bords du fond de façon à composer, tant à gauche qu’à droite, un motif répétitif occupant toute la hauteur des signes. Enfin, bien que plus petits, les éléments verbaux sont aussi disposés suivant une même logique : certains au centre, écrits à l’horizontale entre les arcs, et d’autres sur les côtés, écrits à la verticale avant le motif répétitif. Par conséquent, même si le nombre des différents éléments n’est pas le même dans les deux signes, eu égard notamment au fait que la marque demandée présente plus de fleurs, mais moins d’éléments verbaux que la marque antérieure, il s’agit, dans les deux cas, d’éléments répétitifs dont l’agencement suit une structure analogue.

55      En deuxième lieu, s’agissant des éléments figuratifs, ainsi qu’il a déjà été relevé aux points 33 et 34 ci-dessus, premièrement, les deux marques représentent toutes les deux des fleurs ayant des pétales blancs allongés et un centre jaune. Par ailleurs, à ce dernier égard, l’argument de l’intervenante selon lequel les fleurs représentées dans la marque demandée n’ont pas de centre jaune manque en fait, dès lors qu’un tel centre y est clairement visible, là où les pétales de chaque fleur convergent, et ce même si, certes, la teinte jaune du centre est plus foncée dans la marque demandée.

56      En ce qui concerne la représentation desdites fleurs dans les deux signes, d’une part, il y a lieu de relever qu’elles sont représentées de la même manière, à savoir comme étant vues de haut, en laissant apparaître seulement les pétales et le centre de la fleur, sans tige, feuilles ou autres éléments. D’autre part, la circonstance que, dans la marque antérieure, les fleurs sont représentées de manière plus géométrique, leur taille est identique et les pétales sont au nombre de douze et à équidistance les uns des autres, tandis que, dans la marque demandée, les fleurs sont représentées de manière un peu plus naturelle, leur taille est légèrement variable et les pétales sont plus irréguliers (parfois unis, parfois plus distants), et donc difficiles à compter, n’est pas susceptible de remettre en cause le fait que, dans les deux signes, ces représentations portent sur une même typologie de fleur, à savoir une fleur plutôt simple, qui combine des pétales blancs allongés et un centre jaune. En d’autres termes, alors qu’il existe un grand nombre de fleurs dont l’aspect, les pétales et le centre peuvent être de forme et de couleur très variables, les deux signes en conflit, bien qu’avec des différences stylistiques perceptibles, représentent manifestement plusieurs fois une même typologie de fleur.

57      Deuxièmement, au centre du fond des signes en conflit, lesdites fleurs sont disposées de façon à composer des petits arcs constitués chacun de trois fleurs. Certes, la marque antérieure contient uniquement cinq arcs horizontaux parallèles incurvés vers le bas, dont trois entièrement visibles et deux partiellement visibles, alors que la marque demandée contient trois arcs horizontaux parallèles incurvés vers le haut ainsi que six arcs verticaux incurvés vers l’intérieur du fond rectangulaire. Toutefois, si le nombre, l’alignement et l’orientation, voire même la profondeur de ces arcs est légèrement différente, il n’en demeure pas moins que, dans les signes en conflit, les fleurs sont disposées de façon à composer le même motif, à savoir plusieurs arcs constitués de trois fleurs et, tout particulièrement, des arcs horizontaux parallèles au centre du signe, là où l’attention du public converge eu égard au dessin précis et au contour net des fleurs composant ces arcs.

58      Dans ce contexte, il y a lieu d’écarter l’argument de l’intervenante selon lequel, dans la marque demandée, les fleurs ne forment pas des arcs, mais des cercles, tout comme l’affirmation de la chambre de recours, contenue au point 24 de la décision attaquée, selon laquelle lesdites fleurs représentent « une couronne de fleurs vue de face ».

59      En effet, il n’apparaît pas que, dans la marque demandée, les fleurs soient agencées de façon à composer le périmètre d’un cercle ou d’un ovale, qui évoquerait notamment l’image d’une couronne de fleurs. À supposer même qu’il soit possible de percevoir dans l’agencement des fleurs contenu dans la marque demandée des lignes courbes évoquant des parties d’un cercle ou d’un ovale, elles correspondraient précisément à des arcs, un arc étant une portion d’une ligne courbe.

60      En outre, à supposer même qu’il soit possible de percevoir, dans la marque demandée, des arcs horizontaux de sept fleurs et donc plus grands que ceux de trois fleurs contenus dans la marque antérieure, d’une part, une telle hypothèse est peu vraisemblable, dès lors qu’elle ne prendrait pas en compte une fleur de chaque côté de chaque arc. D’autre part, dans chaque arc hypothétique de sept fleurs, les trois fleurs centrales demeureraient mises en exergue par rapport aux autres fleurs, dès lors que leur dessin est plus précis et leur contour plus appuyé. Cela mettrait donc en évidence, dans la marque demandée, trois arcs horizontaux parallèles de trois fleurs semblables aux trois arcs horizontaux parallèles de trois fleurs entièrement visibles dans la marque antérieure.

61      Troisièmement, sur les côtés du fond des signes en conflit, un motif répétitif qui occupe toute la hauteur du signe est représenté tant à gauche qu’à droite. Dans la marque antérieure, il s’agit de formes coniques ou triangulaires dans des nuances de blanc et de jaune, lesquelles peuvent évoquer l’image d’un pétale. Dans la marque demandée, il s’agit, de chaque côté, de six pairs de fleurs à pétales blancs et à centre jaune. Or, si, prises individuellement, de telles fleurs figurant dans la marque demandée se distinguent des formes coniques ou triangulaires figurant dans la marque antérieure, toutefois, dans le cadre d’une comparaison d’ensemble des signes en conflit, la présence d’un motif répétitif constitué par des éléments horizontaux blancs et jaunes et remplissant tout la hauteur du fond rectangulaire constitue un élément de similitude visuelle entre les deux signes.

62      En troisième lieu, s’agissant des éléments verbaux, à titre liminaire, ainsi qu’il a déjà été observé au point 52 ci-dessus, il y a lieu de relever qu’ils sont disposés dans les signes en conflit suivant la même logique structurelle : un élément verbal répété au centre, à l’horizontale dans les espaces entre les arcs, et un autre élément verbal répété sur les côtés, à la verticale avant le motif figuratif répétitif. Ces derniers éléments écrits verticalement, toutefois, ainsi qu’il ressort du point 39 ci-dessus, pris individuellement, n’ont que peu d’impact dans la comparaison visuelle des signes en conflit, eu égard à leur orientation et à leur taille.

63      En revanche, s’agissant des éléments verbaux écrits horizontalement entre les arcs, à savoir le mot « ромашки » dans la marque antérieure et le mot « рошен » dans la marque demandée, la chambre de recours a erronément considéré qu’ils n’avaient « aucun lien évident ». En effet, tout d’abord, lesdits éléments verbaux sont tous les deux écrits en caractères majuscules standard, bien que les polices employées soient respectivement de couleur jaune et noire. Ensuite, les deux mots, qui sont respectivement de sept et de cinq lettres, présentent exactement les deux mêmes premières lettres, à savoir les lettres « p » et « o », ainsi qu’une autre lettre commune, à savoir la lettre « ш », laquelle, de surcroît, dans les deux mots, est la troisième lettre en partant de la fin du mot. Enfin, ainsi qu’il est constant entre les parties, ils sont tous écrits en cyrillique. À supposer même que seule la partie russophone du public lituanien et letton soit en mesure de reconnaître qu’il s’agit de mots écrits dans l’alphabet cyrillique, l’autre partie du public pertinent, vu l’identité de certaines lettres, est tout de même en mesure de reconnaître qu’il s’agit de mots écrits dans un même alphabet et qu’il ne s’agit ni de l’alphabet grec (pour le public grec) ni de l’alphabet latin (pour le public français, espagnol et allemand ainsi que pour la partie non russophone du public lituanien et letton).

64      Eu égard à tous ces éléments, il y a lieu d’observer que la chambre de recours a erronément considéré qu’il y avait lieu de modifier la conclusion de la division d’opposition quant au degré de similitude entre les signes en conflit et de retenir un faible degré de similitude visuelle. En effet, au contraire, compte tenu des similitudes inhérentes aux éléments structurels, aux éléments figuratifs et aux éléments verbaux contenus dans les signes en conflit, il y a lieu de conclure que le degré de similitude visuelle entre lesdits signes doit être considéré comme étant moyen.

 Sur la comparaison phonétique

65      En l’espèce, au point 28 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que le seul mot de la marque antérieure susceptible d’être prononcé était le mot « ромашки », lequel était prononcé en trois syllabes, à savoir « ro » « mach » et « ki », par la partie russophone du public pertinent, tandis qu’il était peu probable que le mot « конфетти », signifiant « confetti », fût prononcé compte tenu de sa taille réduite et de sa position excentrée. La chambre de recours a ajouté que le mot « рошен » de la marque demandée était prononcé en deux syllabes, à savoir « ro » et « chen », par ce même public. Au point 29 de la décision attaquée, la chambre de recours en a conclu que, compte tenu de l’identité de la sonorité des deux premières lettres de chaque signe, les signes en conflit devaient être considérés comme similaires à un degré très faible. Enfin, au point 30 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que, pour la partie du public non russophone, il n’était pas possible de procéder à une comparaison phonétique.

66      La requérante fait valoir que c’est à bon droit que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a retenu que, pour le public pertinent non russophone, une comparaison phonétique n’était pas possible et que, pour le public russophone, il existait une similitude phonétique des signes.

67      L’EUIPO indique que la requérante ne conteste pas les conclusions de la chambre de recours. L’intervenante argue que la requérante déforme les conclusions de la chambre de recours, selon lesquelles les signes sont similaires « mais uniquement à un degré très faible ».

68      À titre liminaire, il y a lieu de relever que la chambre de recours a opéré la comparaison phonétique des signes en conflit en prenant uniquement en considération les éléments verbaux écrits horizontalement, à savoir les mots « ромашки » et « рошен ». En effet, ainsi que l’a relevé, en substance, la chambre de recours, il est peu probable que le public pertinent prononce les éléments verbaux écrits verticalement, à savoir les mots « конфетти » et « roshen », eu égard à leur taille très réduite et à leur position excentrée, ainsi que, de surcroît, à leur orientation verticale.

69      Quant à la comparaison phonétique des mots « ромашки » et « рошен », aucun élément du dossier concernant la prononciation desdits mots ne permet de remettre en cause les constats de la chambre de recours selon lesquels, d’une part, la partie russophone du public pertinent prononcera le premier mot en trois syllabes, à savoir « ro », « mach » et « ki », et le second mot en deux syllabes, à savoir « ro » et « chen », de sorte qu’il y a une identité dans la sonorité des deux premières lettres desdits mots, et, d’autre part, la partie non russophone du public pertinent n’est pas en mesure de procéder à une comparaison phonétique des signes.

70      Dans les circonstances du cas d’espèce, c’est donc à juste titre que la chambre de recours, ainsi que le rappelle la requérante, a considéré que, pour la partie russophone du public pertinent, les signes en conflit étaient similaires, et ce, ainsi que le rappelle l’intervenante, à un degré très faible, dès lors que les seuls éléments verbaux susceptibles d’être prononcés sont proportionnellement moins importants que les éléments figuratifs dans le cadre de la comparaison des signes.

 Sur la comparaison conceptuelle

71      En l’espèce, au point 32 de la décision attaquée, s’agissant de la partie russophone du public pertinent, la chambre de recours a estimé qu’il existait une différence conceptuelle entre les signes en conflit, étant donné que cette partie du public interpréterait l’élément verbal « ромашки » de la marque antérieure et associerait ainsi celle-ci aux fleurs de camomille ou aux marguerites, alors que l’élément verbal « рошен » de la marque postérieure « ne lui évoquera[it] rien de précis, hormis la notion générale de motif fleuri ». La chambre de recours a toutefois ajouté que, malgré cette divergence conceptuelle découlant des éléments verbaux, les signes étaient « globalement similaires sur le plan conceptuel », en raison de la présence commune de fleurs à l’apparence assez semblable. Au point 33 de la décision attaquée, s’agissant de la partie non russophone du public pertinent, la chambre de recours a indiqué que, même si les éléments verbaux « ромашки » et « рошен » ne revêtaient pas de signification, les signes en conflit avaient un certain degré de similitude conceptuelle « “en raison de la représentation figurative de fleurs de camomille” ou simplement parce que les deux signes présent[ai]ent des motifs fleuris similaires ». Sur la base de ces éléments, au point 34 de la décision attaquée, la chambre de recours a conclu que, si les signes étaient conceptuellement similaires, le degré d’une telle similitude « n’[était] pas élevé », car il reposait sur des éléments figuratifs et verbaux plutôt banals.

72      La requérante fait valoir que les signes en conflit sont identiques sur le plan conceptuel, en raison des arcs formés par trois fleurs avec des pétales blancs et un cœur jaune, des bords composés d’éléments floraux à gauche et à droite, sur un fond vert et jaune vert. Cela aurait été reconnu dans la décision attaquée. Selon la requérante, c’est toutefois à tort que la chambre de recours a considéré que ladite similitude découlait d’éléments plutôt banals. La similitude conceptuelle aurait dû être à tout le moins reconnue comme étant moyenne.

73      L’EUIPO et l’intervenante réfutent les arguments de la requérante.

74      En premier lieu, il convient de relever que, comme l’indique la chambre de recours sans qu’aucune des parties ne le conteste et qu’aucun élément au dossier ne puisse en faire douter, l’élément verbal « ромашки » signifie « camomille » ou « marguerite » en russe et l’élément verbal « рошен » est dépourvu de toute signification ou n’évoque « rien de précis » en russe. Ainsi, pour la partie russophone du public pertinent, les éléments verbaux sont potentiellement susceptibles d’entraîner une différence conceptuelle entre les signes en conflit. Toutefois, dès lors que ces éléments verbaux sont combinés, dans lesdits signes, avec des éléments figuratifs similaires constitués par des fleurs blanches à centre jaune et évoquent donc un concept analogue, une telle éventuelle différence conceptuelle est compensée par la similitude conceptuelle découlant desdits éléments figuratifs.

75      En particulier, les fleurs blanches à centre jaune représentées dans les deux signes évoquent, dans l’esprit du public pertinent, l’image de fleurs des champ simples et communes, telles que des pâquerettes, des marguerites ou des fleurs de camomille. D’ailleurs, d’une part, la perception de la marque antérieure comme évoquant l’image d’une marguerite ou d’une fleur de camomille n’est que renforcée, pour le public russophone, par la signification du mot « ромашки » répété plusieurs fois dans le signe. D’autre part, une telle perception conceptuelle de la marque demandée n’est pas contrariée par la présence de l’élément verbal « рошен », lequel, loin d’évoquer un concept différent ou opposé à celui desdites fleurs, n’évoque tout simplement aucun concept.

76      En second lieu, la partie non russophone du public pertinent n’opère aucune comparaison conceptuelle à partir des éléments verbaux des signes en conflit, dès lors qu’ils n’ont aucune signification pour ce public. Néanmoins, eu égard au fait que les éléments figuratifs contenus dans les signes en conflit évoquent un concept analogue (voir point 75 ci-dessus), lesdits signes demeurent, dans leur ensemble, conceptuellement similaires aussi pour cette partie du public pertinent.

77      C’est ainsi sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a conclu que les signes en conflit étaient, dans leur ensemble, conceptuellement similaires, similitude qui, toutefois, compte tenu du fait qu’elle découle d’éléments figuratifs qui ne sont pas particulièrement distinctifs, n’est pas élevée, mais tout au plus moyenne.

78      Par ailleurs, à cet égard, contrairement à ce qui est indiqué par l’EUIPO, au point 40 de la décision attaquée, la chambre de recours n’a pas expressément confirmé que la similitude conceptuelle serait faible, mais a uniquement envisagé une telle hypothèse dans le cadre de l’examen du risque de confusion, ainsi qu’il ressort de l’expression « même en admettant qu’il puisse exister un faible degré de similitude conceptuelle entre les signes », laquelle est de nature manifestement hypothétique.

 Sur le risque de confusion

79      En l’espèce, après avoir relevé, au point 37 de la décision attaquée, que les produits désignés par les marques en conflit étaient identiques, la chambre de recours, aux points 38 et 39 de la même décision, a indiqué que, si les signes présentaient certaines similitudes, ces dernières étaient assez banales et étaient contrebalancées par d’autres facteurs. À ce titre, la chambre de recours indique, premièrement, qu’il ne s’agit pas des même fleurs et que, dans la marque antérieure, les fleurs sont plus stylisées, tandis que, dans la marque demandée, les fleurs sont plus naturelles ; deuxièmement, que les signes se caractérisent par des éléments verbaux totalement différents ; troisièmement, que les signes diffèrent pour les éléments décoratifs dans leur première et dernière partie, à savoir des éléments coniques dans la marque antérieure et des fleurs dans la marque demandée ; quatrièmement, que les fleurs reliées sont posées sur un fond vert dans la marque antérieure et sur un fond jaune dans la marque demandée ; et, cinquièmement, que les signes diffèrent par la nature des fleurs. Au point 40 de la décision attaquée, la chambre de recours a ajouté, d’une part, que les éléments similaires des marques en conflit, à savoir la couleur verte et le motif fleuri, ne présentaient pas un caractère distinctif élevé et, d’autre part, que, même en admettant un faible degré de similitude conceptuelle entre les signes en conflit, lorsque la marque antérieure ne jouissait pas d’une notoriété particulière et consistait, comme en l’espèce, en une image ou en un motif présentant peu d’éléments imaginaires, la simple similitude conceptuelle ne suffisait pas pour créer un risque de confusion. La chambre de recours a ainsi conclu, au point 41 de la décision attaquée, que le concept commun de fleurs n’était pas décisif et que les multiples différences entre les marques, mises en balance avec les nombreuses similitudes relativement banales, étaient suffisantes pour éviter tout risque de confusion, et ce même si les marques étaient apposées sur des produits identiques. Par ailleurs, aux points 42 à 46 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué les raisons pour lesquelles, selon elle, les résultats de l’étude de marché invoquée par la requérante ne pouvaient remettre en cause une telle conclusion, la valeur de ladite étude étant « discutable » selon la chambre de recours.

80      La requérante, dans le cadre des troisième et cinquième moyens, premièrement, fait valoir que la chambre de recours a commis une erreur en ne prenant pas en compte le caractère distinctif « très élevé » de la marque antérieure. Elle semble faire découler un tel caractère distinctif de la représentation de fleurs blanches à centre jaune sur un fond vert, laquelle posséderait un caractère distinctif très élevé pour les produits en cause. La requérante argue aussi que la chambre de recours n’a pas contesté le fait que la marque antérieure possédait à tout le moins un caractère distinctif normal. Le fait que la marque antérieure a été enregistrée en tant que marque démontrerait qu’elle possède à tout le moins un tel caractère distinctif, lequel serait en réalité « plutôt élevé ».

81      Deuxièmement, la requérante fait valoir que, compte tenu du fait que les produits en conflit sont identiques, même un faible degré de similitude entre les signes suffit à établir un risque direct de confusion. En l’occurrence, considérant l’identité des produits, le degré de similitude à tout le moins moyen des signes, le caractère distinctif à tout le moins moyen de la marque antérieure, le faible niveau d’attention du public pertinent et le fait que les produits sont généralement achetés à vue, il existerait un risque direct de confusion. La chambre de recours aurait erronément fondé sa décision sur des différences minimes entre les signes et sur le prétendu caractère distinctif faible des éléments similaires, sans considérer l’identité des produits. La requérante ajoute qu’il existe également un risque indirect de confusion, dans la mesure où le public pertinent peut percevoir le signe demandé comme une modernisation du signe antérieur ou comme une sous-marque. Par ailleurs, la requérante fait valoir que l’appréciation de la chambre de recours est en contradiction tant avec ses propres conclusions sur les facteurs pertinents en l’espèce qu’avec les conclusions du Tribunal dans l’affaire similaire opposant les mêmes parties ayant donné lieu à l’arrêt du 7 février 2018, Kondyterska korporatsiia « Roshen »/EUIPO – Krasnyiy oktyabr (Représentation d’une écrevisse) (T‑775/16, non publié, EU:T:2018:74).

82      L’EUIPO, premièrement, indique que la chambre de recours a conclu que le caractère distinctif de la marque antérieure était amoindri eu égard aux produits en question. Selon l’EUIPO, même si la chambre de recours n’a pas explicitement évoqué cette diminution du caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure dans son ensemble, cette conclusion s’impose au vu du contexte global dans lequel s’inscrit le raisonnement exposé dans la décision attaquée. En effet, rien n’indiquerait la façon dont, en l’espèce, un caractère distinctif au moins normal pour la marque antérieure dans son ensemble pourrait résulter de la simple conjonction d’éléments peu distinctifs. Il n’existerait pas de lien automatique entre l’enregistrement d’une marque et la supposée existence d’un caractère distinctif moyen ou élevé.

83      Deuxièmement, l’EUIPO indique qu’il est incontesté que les produits sont identiques, que les signes présentent un certain degré de similitude et que le niveau d’attention du public pertinent peut être inférieur à la moyenne, mais que des désaccords existent quant au degré de similitude entre les signes et au caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure : la chambre de recours aurait conclu à bon droit que la similitude est « (très) faible » et que le caractère distinctif est « affaibli ». Ces éléments auraient permis à la chambre de recours de parvenir à la conclusion de l’absence de risque de confusion. Ce résultat ne serait pas remis en question par le renvoi de la requérante à l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 7 février 2018, Représentation d’une écrevisse (T‑775/16, non publié, EU:T:2018:74), dans le cadre de laquelle, indépendamment même des autres éléments, la marque antérieure possédait un degré normal de caractère distinctif intrinsèque.

84      L’intervenante, premièrement, fait valoir que la requérante n’a pas fait état du caractère distinctif élevé de la marque antérieure durant la procédure d’opposition ou devant la chambre de recours et n’a pas fourni de preuves en ce sens. Deuxièmement, elle argue que les différences entre les signes en conflit ne sont pas minimes et que c’est à bon droit que la chambre de recours a pris en compte la nature banale des fleurs blanches ainsi que la nature descriptive de la couleur verte. Selon l’intervenante, les éléments verbaux en cyrillique ne font que confirmer la différence visuelle et, pour les consommateurs russophones, ils conduisent à une différence phonétique. Enfin, l’intervenante soutient que c’est à tort que la requérante renvoie à l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 7 février 2018, Représentation d’une écrevisse (T‑775/16, non publié, EU:T:2018:74), car les circonstances seraient différentes.

85      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

86      En premier lieu, il convient de relever que, dans le cadre de l’appréciation du risque de confusion opérée aux points 37 à 41 de la décision attaquée, la chambre de recours a omis de prendre en compte certains éléments pertinents ou a erronément pris en compte d’autres éléments.

87      Premièrement, en ce qui concerne les produits visés par les marques en conflit mentionnés au point 37 de la décision attaquée, si c’est à bon droit que la chambre de recours a rappelé que lesdits produits étaient identiques, force est de constater qu’à aucun moment, dans le cadre de l’appréciation du risque de confusion, elle n’a pris en compte le niveau d’attention du public pertinent, alors qu’il constitue un facteur important dans le cadre de ladite appréciation et que, de surcroît, en l’espèce, le public pertinent, qui est le grand public, fait preuve d’un niveau d’attention inférieur à la moyenne pour des produits tels que des bonbons.

88      Deuxièmement, en ce qui concerne les cinq facteurs prétendument susceptibles de contrebalancer les similitudes entre les marques en conflit mentionnés au point 39 de la décision attaquée et rappelés au point 79 ci-dessus, certains de ces facteurs manquent en fait. D’une part, s’agissant des premier et cinquième facteurs, ainsi qu’il a été observé au point 55 ci-dessus, les fleurs représentées dans les deux marques ne sont pas diverses ou de nature différente, dès lors que, au contraire, compte tenu des caractéristiques de leurs pétales et de leur centre, en dépit de certaines différences stylistiques clairement visibles, elles correspondent tout aussi manifestement à une même typologie. D’autre part, s’agissant du deuxième facteur, ainsi qu’il a été observé au point 63 ci-dessus, les éléments verbaux écrits horizontalement figurant dans les signes en conflit ne sont pas « totalement différents », mais, en revanche, présentent des similitudes tant visuelles que phonétiques.

89      Troisièmement, les autres facteurs mentionnés au point 39 de la décision attaquée visent des différences particulières entre aspects pourtant similaires. Ainsi, s’agissant du quatrième facteur, s’il est vrai que, dans la marque antérieure, les fleurs reliées sont disposées sur un fond vert et, dans la marque demandée, sur un fond jaune, cela ne concerne que la partie centrale des deux marques, puisque, en revanche, la marque demandée contient aussi, sur les côtés, des fleurs reliées entre elles et disposées sur un fond vert et que, surtout, les deux marques emploient le même code couleur, à savoir du vert, du jaune et du blanc, ce qui n’est pas remis en cause par la circonstance que leur séquence et leur gradation soit différente, ni par le fait que, dans la marque demandée, les contours de certaines fleurs et les éléments verbaux soient représentés à travers de fins traits noirs. De même, s’agissant du troisième facteur, s’il est vrai que les éléments décoratifs disposés sur les côtés des marques sont différents lorsqu’ils sont pris individuellement, toutefois, dans les deux marques, ils composent des motifs constitués d’éléments horizontaux répétés sur toute la hauteur des signes, lesquels, de surcroît, sont de couleur blanche et jaune sur un fond vert.

90      Quatrièmement, en ce qui concerne la prétendue circonstance que les similitudes entre les marques en conflit seraient « assez banales » ou « relativement banales », mentionnée aux points 39 et 41 de la décision attaquée, d’emblée, il convient de relever que la décision attaquée ne contient pas davantage de précisions sur la signification à attribuer à une telle qualification. Interrogé à cet égard lors de l’audience, l’EUIPO a indiqué que ladite qualification était à entendre, en substance, en ce sens que les éléments similaires contenus dans les signes en conflit étaient descriptifs, notamment compte tenu du caractère naturel ou de la saveur des produits concernés. Or, à supposer même qu’une telle interprétation soit correcte, il convient de relever que la circonstance que certains éléments similaires des signes en conflit puissent être perçus comme faisant allusion aux caractéristiques des produits en cause, et comme étant donc descriptifs ou faiblement distinctifs, n’est pas en elle-même suffisante pour exclure un risque de confusion entre les marques en conflit, dès lors que ces dernières demeurent visuellement, phonétiquement et conceptuellement similaires dans leur ensemble.

91      Cinquièmement, en ce qui concerne le caractère distinctif de la marque antérieure, il convient de relever que, contrairement à ce qui est soutenu par l’EUIPO, la chambre de recours n’a pas expressément qualifié la marque antérieure comme étant faiblement distinctive, mais a insisté uniquement sur le caractère distinctif non élevé des éléments similaires composant les signes en conflit, tels que la couleur verte et le motif fleuri.

92      Or, il y a lieu de distinguer entre le facteur tiré du caractère distinctif de la marque antérieure, qui est lié à la protection accordée à une telle marque, et le caractère distinctif que possède l’élément d’une marque complexe, qui se rattache à la faculté de celui-ci de dominer l’impression d’ensemble produite par cette marque (voir, en ce sens, ordonnance du 27 avril 2006, L’Oréal/OHMI, C‑235/05 P, non publiée, EU:C:2006:271, point 43). S’il est vrai qu’il convient d’examiner le caractère distinctif d’un élément d’une marque complexe dès le stade de l’appréciation de la similitude des signes, afin de déterminer les éventuels éléments dominants du signe, le degré de caractère distinctif de la marque antérieure est l’un des éléments à prendre en considération dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion [arrêt du 25 mars 2010, Nestlé/OHMI – Master Beverage Industries (Golden Eagle et Golden Eagle Deluxe), T‑5/08 à T‑7/08, EU:T:2010:123, point 65].

93      Force est toutefois de constater que la décision attaquée ne contient aucune appréciation relative au caractère distinctif de la marque antérieure.

94      Par ailleurs, à cet égard, il y a lieu d’écarter comme étant inopérants les arguments tirés de la prétendue absence de « notoriété particulière » de la marque antérieure mentionnée incidemment au point 40 de la décision attaquée ainsi que de la prétendue absence d’usage ou de caractère distinctif acquis par l’usage de cette même marque évoquée par l’EUIPO lors de l’audience, dès lors qu’il est constant que, en l’espèce, au cours de la procédure administrative devant les instances de l’EUIPO, la requérante ne s’est pas prévalue d’une notoriété de la marque antérieure ou d’un caractère distinctif accru par l’usage de cette marque, pas plus que l’intervenante n’a demandé que l’usage sérieux de ladite marque fût prouvé.

95      En tout état de cause, à supposer même que, en l’espèce, le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure soit faible, il convient de rappeler que, si le caractère distinctif de la marque antérieure doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion, il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services visés (voir arrêt du 13 décembre 2007, PAGESJAUNES.COM, T‑134/06, EU:T:2007:387, point 70 et jurisprudence citée).

96      En second lieu, il y a lieu de rappeler que l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public doit être appréciée globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (ordonnance du 27 avril 2006, L’Oréal/OHMI, C‑235/05 P, non publiée, EU:C:2006:271, point 44).

97      En l’espèce, dans le cadre d’une telle appréciation d’ensemble, il convient de commencer par rappeler, d’une part, que les produits visés par les marques en conflit sont identiques, que le public pertinent est le grand public et que ce public fait preuve d’un niveau d’attention inférieur à la moyenne pour les produits en cause. D’autre part, il y a lieu de rappeler que les marques en conflit, loin d’être similaires seulement à certains égards, présentent une similitude visuelle, une similitude phonétique et également une similitude conceptuelle. Si la similitude phonétique est, certes, très faible, il n’en demeure pas moins que tant la similitude visuelle que la similitude conceptuelle sont moyennes.

98      Ainsi, à supposer même que la marque antérieure ait un faible caractère distinctif intrinsèque, une telle circonstance ne permettrait pas d’écarter un risque de confusion entre les marques en conflit, au vu de l’identité des produits visés par la marque antérieure et par la marque demandée, à l’égard desquels le public pertinent fait preuve d’un niveau d’attention inférieur à la moyenne, ainsi que de tous les éléments de similitude entre les signes en conflit, et ce même si certains éléments similaires desdits signes ont un faible caractère distinctif. En effet, il ne saurait être exclu que le public pertinent, faisant preuve d’un niveau d’attention inférieur à la moyenne, confronté à des produits identiques tels que des bonbons, vendus sous des marques présentant un motif composé, au centre, d’arcs de trois fleurs blanches à centre jaune ainsi que de mots répétés écrits en cyrillique et, sur chaque côté, de motifs décoratifs répétitifs, le tout sur un quadrilatère entièrement ou partiellement vert, puisse penser qu’il s’agit de marques qui proviennent d’une même entreprise ou qui constituent des variations d’une même marque.

99      Il résulte de tout ce qui précède que c’est à tort que la chambre de recours a conclu à l’absence d’un risque de confusion entre les marques en conflit dans l’esprit du public pertinent.

100    Il s’ensuit que les troisième, quatrième et cinquième moyens doivent être considérés comme étant fondés, en ce qu’ils sont tirés de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

101    Par conséquent, la décision doit être annulée dans son ensemble, sans qu’il y ait lieu d’examiner les premier, deuxième et sixième moyens, tirés de la violation de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et du droit d’être entendu.

 Sur les dépens

102    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

103    L’EUIPO ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

104    L’intervenante ayant succombé en ses conclusions, elle supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 16 novembre 2018 (affaire R 1872/2018-2) est annulée.

2)      L’EUIPO supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par Rot Front OAO.

3)      Dochirnie pidpryiemstvo Kondyterska korporatsiia « Roshen » supportera ses propres dépens.

Tomljenović

Marcoulli

Kornezov

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 mai 2020.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.