Language of document : ECLI:EU:T:2016:55

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

2 février 2016 (*)

« Marque communautaire – Procédure de déchéance – Marque communautaire verbale MOTOBI – Usage sérieux de la marque – Article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑170/13,

Benelli Q. J. Srl, établie à Pesaro (Italie), représentée par Mes P. Lukácsi et B. Bozóki, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par M. F. Mattina, puis par M. P. Bullock, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Demharter GmbH, établie à Dillingen (Allemagne), représentée par Me A. Kohn, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 16 janvier 2013 (affaire R 2080/2011‑2), relative à une procédure de déchéance entre Demharter GmbH et Benelli Q. J. Srl,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro (rapporteur), président, MM. S. Gervasoni et L. Madise, juges,

greffier : M. I. Dragan, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 21 mars 2013,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 20 juin 2013,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 17 juin 2013,

vu la décision de réattribution de l’affaire à la deuxième chambre,

à la suite de l’audience du 7 juillet 2015,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 27 mai 1998, la requérante, Benelli Q. J. Srl, anciennement Benelli SpA, revendiquant une priorité italienne en date du 27 novembre 1997, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal MOTOBI pour les produits suivants relevant de la classe 12 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant à la description suivante : « Véhicules ; appareils de locomotion par terre, par air, ou par eau ; vélomoteurs ; motocyclettes ; scooters ; pièces et parties constitutives et accessoires des articles précités compris dans cette classe ».

3        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 47/1999, du 14 juin 1999, et la marque demandée a été enregistrée le 17 décembre 1999. L’enregistrement a été dûment renouvelé.

4        Par lettre du 18 novembre 2009, l’intervenante, Demharter GmbH, a demandé à la requérante de procéder au retrait de la marque contestée en raison d’une absence d’utilisation de cette dernière dans les cinq années précédentes, à défaut de quoi elle introduirait une demande de déchéance devant l’OHMI.

5        Le 22 décembre 2009, l’intervenante a formé une demande de déchéance, au titre de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, à l’encontre de l’enregistrement de la marque contestée pour l’ensemble des produits visés au point 2 ci-dessus, en invoquant une absence d’usage sérieux pendant une période continue de cinq ans précédant l’introduction de la demande de déchéance, même si, à sa connaissance, ladite marque avait été utilisée entre 1950 et 1974 pour des motos.

6        Le 6 avril 2010, la requérante a présenté des observations et des preuves de l’usage dans le délai imparti. Les 28 juillet, 29 octobre 2010 et 16 mars 2011, elle a, à la suite des observations formulées par l’intervenante, joint de nouveaux éléments de preuve.

7        Par décision du 11 août 2011, la division d’annulation a considéré que la preuve de l’usage sérieux de la marque contestée n’avait pas été rapportée, en sorte qu’elle a déclaré la requérante déchue de ses droits à compter du 22 décembre 2009.

8        Le 5 octobre 2011, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’annulation. Le 9 décembre 2011, la requérante a déposé le mémoire exposant les motifs du recours, qui était accompagné, le 14 décembre 2011, de nouveaux éléments de preuve.

9        Par décision du 16 janvier 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. En premier lieu, s’agissant des preuves produites devant la division d’annulation, la chambre de recours, après avoir, d’une part, rappelé l’ensemble des pièces que la requérante avait produites dans le cadre de la procédure administrative et, d’autre part, relevé que la requérante avait, à quatre reprises déjà, présenté des preuves de l’usage, a, au point 34 de ladite décision, déclaré partager la conclusion de la décision de la division d’annulation en ce qui concerne l’évidente insuffisance des pièces produites par la requérante aux fins d’établir l’usage sérieux de la marque contestée. Aux points 35 à 42 de cette décision, la chambre de recours a développé sa propre argumentation selon laquelle les preuves produites étaient insuffisantes à cet effet.

10      En second lieu, s’agissant des preuves présentées pour la première fois devant elle, la chambre de recours a, tout d’abord, rappelé, au point 44 de la décision attaquée, que l’article 76 du règlement n° 207/2009 investissait l’OHMI d’un pouvoir d’appréciation à l’effet de décider s’il y avait lieu ou non de prendre en compte les faits et preuves produits tardivement et a ajouté, au point 45 de cette décision, que la Cour avait jugé que, en règle générale et sauf disposition contraire, la présentation de faits et de preuves par les parties demeurait possible après l’expiration des délais auxquels se trouvait subordonnée une telle présentation en application des dispositions dudit règlement et qu’il n’était nullement interdit à l’OHMI de tenir compte de faits et de preuves ainsi tardivement invoqués ou produits.

11      La chambre de recours a considéré, au point 48 de la décision attaquée, qu’il existait, en l’espèce, une disposition contraire s’opposant à une prise en considération des preuves présentées tardivement, à savoir l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, tel qu’appliqué par la règle 40, paragraphe 5, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO L 303, p. 1), tel que résultant de sa version modifiée par le règlement (CE) n° 1041/2005 de la Commission, du 29 juin 2005 (JO L 172, p. 4), en sorte que la présentation de preuves d’usage de la marque communautaire après l’expiration du délai entraînait la déchéance de ladite marque.

12      Néanmoins, la chambre de recours a énoncé, au point 49 de la décision attaquée, que la règle 40, paragraphe 5, du règlement n° 2868/95 ne saurait être interprétée en ce sens qu’elle s’opposait à la prise en considération d’éléments de preuve supplémentaires, eu égard à l’existence d’éléments nouveaux, même s’ils étaient fournis après l’expiration de ce délai péremptoire. Après avoir rappelé, aux points 50 à 52 de ladite décision, les conditions dans lesquelles les preuves pouvaient être considérées comme supplémentaires et recevables, la chambre de recours a estimé, au point 53 de cette décision, que la condition pour la prise en compte de preuves produites tardivement avait été effectivement remplie, en sorte que lesdites preuves devaient être considérées comme « supplémentaires », puisqu’elles visaient simplement à « compléter » les preuves principales.

13      Toutefois, au point 54 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que la division d’annulation avait déjà exercé son pouvoir discrétionnaire en acceptant les preuves d’usage supplémentaires présentées par la requérante avec ses observations en réponse à l’intervenante. Par conséquent, selon la chambre de recours, la requérante avait déjà eu plusieurs fois l’occasion de produire des éléments de preuve pertinents devant la division d’annulation et, de ce fait, avait eu tout le temps de les réunir et de les préparer afin de satisfaire aux exigences légales. Dès lors, la chambre de recours a déclaré que les circonstances ne plaidaient pas en faveur de l’acceptation des documents supplémentaires.

14      Au point 55 de la décision attaquée, la chambre de recours a ajouté que, en tout état de cause, que ces documents soient ou non pris en compte, ils ne démontraient pas l’usage sérieux de la marque contestée pendant la période qui s’écoulait du 22 décembre 2004 au 21 décembre 2009 (ci-après la « période pertinente ») pour les motifs qu’elle avait développés aux points 56 à 64 de ladite décision, s’agissant de chacun des documents produits par la requérante devant elle.

 Conclusions des parties

15      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        réformer la décision attaquée et rejeter la demande de déchéance déposée par l’intervenante ;

–        à défaut, annuler la décision attaquée et renvoyer l’affaire devant l’OHMI afin qu’il la réexamine et statue à nouveau ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

16      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité du renvoi global par la requérante aux arguments présentés par écrit lors de la procédure devant l’OHMI

17      L’OHMI fait valoir que le renvoi par la requérante de manière générale à l’ensemble des arguments présentés par écrit lors de la procédure administrative est irrecevable.

18      En vertu de l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, la requête doit contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Selon une jurisprudence bien établie, si le corps de la requête peut être étayé et complété, sur des points spécifiques, par des renvois à des extraits de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit, qui, en vertu des dispositions rappelées ci-dessus, doivent figurer dans la requête elle-même [voir arrêt du 8 juillet 2010, Engelhorn/OHMI – The Outdoor Group (peerstorm), T‑30/09, Rec, EU:T:2010:298, point 18 et jurisprudence citée].

19      Lors de l’audience, la requérante a précisé, en réponse à une question du Tribunal, que le renvoi qu’elle faisait à certaines occurrences de la requête ne devait pas être interprété comme étant un renvoi global, mais que son argumentation était seulement limitée aux points spécifiques développés dans la requête. À la lumière de ces précisions, il y a lieu de considérer que la fin de non-recevoir soulevée par l’OHMI doit être rejetée.

 Sur la recevabilité des griefs dirigés à l’encontre de la décision de la division d’annulation

20      L’OHMI soutient que les contestations de la requérante à l’encontre des constatations effectuées par la division d’annulation devraient être déclarées irrecevables.

21      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 65, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, le recours devant le juge de l’Union européenne n’est ouvert qu’à l’encontre des seules décisions des chambres de recours, en sorte que, dans le cadre d’un tel recours, ne sont recevables que des moyens dirigés contre la décision de la chambre de recours même [arrêt du 7 juin 2005, Lidl Stiftung/OHMI – REWE-Zentral (Salvita), T‑303/03, Rec, EU:T:2005:200, point 59].

22      Lors de l’audience, la requérante a précisé, en réponse à une question du Tribunal, que la requête devait être interprétée en ce sens que les griefs qui y étaient énoncés étaient uniquement dirigés à l’encontre de la décision attaquée. Il s’ensuit que, dans cette mesure, la fin de non-recevoir soulevée par l’OHMI doit être rejetée.

 Sur la recevabilité des nouveaux éléments de preuve soumis par la requérante devant le Tribunal

23      La requérante a joint à la requête devant le Tribunal un nouvel élément de preuve consistant en une déclaration écrite faite sous serment du maire de la commune de Pesaro (Italie), déclaration qui serait, selon l’OHMI, irrecevable.

24      À cet égard, il convient de rappeler que le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 65 du règlement n° 207/2009. Dès lors, la fonction du Tribunal n’est pas celle de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui [arrêts du 19 novembre 2008, Rautaruukki/OHMI (RAUTARUUKKI), T‑269/06, EU:T:2008:512, point 20, et du 25 juin 2010, MIP Metro/OHMI – CBT Comunicación Multimedia (Metromeet), T‑407/08, Rec, EU:T:2010:256, point 16]. Il s’ensuit que des faits non invoqués par les parties devant les instances de l’OHMI ne peuvent plus l’être au stade du recours introduit devant le Tribunal (voir arrêt du 13 mars 2007, OHMI/Kaul, C‑29/05 P, Rec, EU:C:2007:162, point 54 et jurisprudence citée).

25      Au demeurant, il y a lieu de constater que, en réponse à une question posée par le Tribunal, la requérante n’a pas contesté que le maire de Pesaro, qui était maire depuis 2004, aurait pu établir, lors de la procédure administrative, à la demande de la requérante, une attestation, laquelle, bien que différente en raison des dates qui y sont mentionnées et qui sont postérieures à la date de la procédure administrative, aurait néanmoins été analogue à celle établie dans le cadre du présent recours.

26      Dans ces conditions, il convient, ainsi que le fait valoir l’OHMI, de déclarer irrecevable l’annexe mentionnée au point 23 ci-dessus qui n’a pas été produite par la requérante dans le cadre de la procédure administrative.

 Sur le fond

27      La requérante invoque, en substance, deux moyens à l’encontre de la décision attaquée : le premier moyen est tiré de la violation de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 et le second de la violation de la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement n° 2868/95.

28      Il y a lieu d’examiner, d’abord, le moyen tiré de la violation de la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement n° 2868/95.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement n° 2868/95

29      La requérante fait grief à la chambre de recours de ne pas avoir pris en considération les éléments de preuve soumis, au motif que cette dernière a déclaré, au point 54 de la décision attaquée, que les circonstances ne plaidaient pas en faveur de l’acceptation des documents supplémentaires.

30      À cet égard, il suffit de relever que, en l’espèce, nonobstant la constatation de la chambre de recours énoncée au point 29 ci-dessus, cette dernière a néanmoins considéré, au point 53 de la décision attaquée, que la condition d’admission des preuves tardivement produites était effectivement remplie, puisque ces dernières étaient des éléments de preuve supplémentaires, preuves qu’elle a, aux points 56 à 63 de cette décision, expressément énoncées, prises en considération et analysées, pour enfin indiquer les raisons pour lesquelles celles-ci n’apportaient aucune information complémentaire pertinente concernant l’étendue de l’usage de la marque contestée au cours de la période pertinente.

31      En outre, lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, la requérante a reconnu que les preuves supplémentaires n’avaient pas été ignorées par la chambre de recours. Elle a, toutefois, déclaré qu’elle contestait l’évaluation qui avait été faite, laquelle est examinée dans le cadre du premier moyen.

32      Il s’ensuit que la chambre de recours ayant examiné la pertinence des documents, le grief de la requérante est inopérant.

33      Il résulte des considérations qui précèdent que le second moyen doit être rejeté.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009

34      La requérante fait, en substance, grief à la chambre de recours d’avoir considéré que les éléments de preuve qu’elle avait soumis à l’appréciation de celle-ci étaient insuffisants aux fins de démontrer l’usage sérieux de la marque contestée.

35      Il convient de rappeler qu’il résulte du considérant 10 du règlement n° 207/2009 que le législateur a considéré que la protection de la marque communautaire n’était justifiée que dans la mesure où celle-ci était effectivement utilisée. En conformité avec ce considérant, l’article 51, paragraphe 1, sous a), dudit règlement prévoit que le titulaire de la marque communautaire est déclaré déchu de ses droits, notamment sur demande présentée auprès de l’OHMI, si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits et les services pour lesquels elle est enregistrée, et qu’il n’existe pas de juste motifs pour le non-usage. Cette disposition ajoute que le commencement ou la reprise d’usage fait dans un délai de trois mois avant la présentation de la demande, ce délai commençant à courir au plus tôt à l’expiration de la période ininterrompue de cinq ans de non-usage, n’est pas pris en considération lorsque des préparatifs pour le commencement ou la reprise de l’usage interviennent seulement après que le titulaire a appris que la demande pourrait être présentée.

36      La règle 22, paragraphe 3, du règlement n° 2868/95, qui est applicable aux demandes en déchéance en vertu de la règle 40, paragraphe 5, du même règlement, dispose que la preuve de l’usage de la marque doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque contestée [arrêts du 10 septembre 2008, Boston Scientific/OHMI – Terumo (CAPIO), T‑325/06, EU:T:2008:338, point 27, et du 24 mai 2012, TMS Trademark-Schutzrechtsverwertungsgesellschaft/OHMI – Comercial Jacinto Parera (MAD), T‑152/11, EU:T:2012:263, point 17].

37      La ratio legis de l’exigence selon laquelle une marque doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux pour être protégée au titre du droit de l’Union réside dans le fait que le registre de l’OHMI ne saurait être assimilé à un dépôt stratégique et statique conférant à un détenteur inactif un monopole légal d’une durée indéterminée. Au contraire, et conformément au considérant 10 du règlement n° 207/2009, ledit registre devrait refléter fidèlement les indications que les entreprises utilisent effectivement sur le marché pour distinguer leurs produits et services dans la vie économique (voir, en ce sens, ordonnance du 27 janvier 2004, La Mer Technology, C‑259/02, Rec, EU:C:2004:50, points 18 à 22).

38      Dans l’interprétation de la notion d’« usage sérieux », il convient de prendre en compte le fait que la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque contestée doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux ne vise ni à évaluer la réussite commerciale, ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes (voir arrêt MAD, point 36 supra, EU:T:2012:263, point 18 et jurisprudence citée).

39      Ainsi qu’il ressort du point 43 de l’arrêt du 11 mars 2003, Ansul (C‑40/01, Rec, EU:C:2003:145), une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque. De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur (voir arrêt MAD, point 36 supra, EU:T:2012:263, point 19 et jurisprudence citée ; voir également, par analogie, arrêt Ansul, précité, EU:C:2003:145, point 37).

40      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque (voir arrêt MAD, point 36 supra, EU:T:2012:263, point 20 et jurisprudence citée ; voir également, par analogie, arrêt Ansul, point 39 supra, EU:C:2003:145, point 43).

41      Quant à l’importance de l’usage qui a été fait de la marque contestée, il convient de tenir compte, notamment, du volume commercial de l’ensemble des actes d’usage, d’une part, et de la durée de la période pendant laquelle des actes d’usage ont été accomplis ainsi que de la fréquence de ces actes, d’autre part (voir arrêt MAD, point 36 supra, EU:T:2012:263, point 21 et jurisprudence citée).

42      Pour examiner, dans un cas d’espèce, le caractère sérieux de l’usage d’une marque communautaire, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte. Ainsi, un faible volume de produits commercialisés sous ladite marque peut être compensé par une forte intensité ou une grande constance dans le temps de l’usage de cette marque et inversement. En outre, le chiffre d’affaires réalisé ainsi que la quantité de ventes de produits sous la marque contestée ne sauraient être appréciés dans l’absolu, mais doivent l’être par rapport à d’autres facteurs pertinents, tels que le volume de l’activité commerciale, les capacités de production ou de commercialisation ou le degré de diversification de l’entreprise exploitant la marque ainsi que les caractéristiques des produits ou des services sur le marché concerné. De ce fait, la Cour a précisé qu’il n’est pas nécessaire que l’usage de la marque contestée soit toujours quantitativement important pour être qualifié de sérieux. Un usage même minime peut donc être suffisant pour être qualifié de sérieux, à condition qu’il soit considéré comme justifié, dans le secteur économique concerné, pour maintenir ou créer des parts de marché pour les produits ou services protégés par la marque (voir arrêt MAD, point 36 supra, EU:T:2012:263, point 22 et jurisprudence citée).

43      La Cour a également ajouté, au point 72 de l’arrêt du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI (C‑416/04 P, Rec, EU:C:2006:310), qu’il n’était pas possible de déterminer a priori, de façon abstraite, quel seuil quantitatif devait être retenu pour déterminer si l’usage avait ou non un caractère sérieux, en sorte qu’une règle de minimis, qui ne permettrait pas à l’OHMI ou, sur recours, au Tribunal d’apprécier l’ensemble des circonstances du litige qui leur était soumis, ne saurait, dès lors, être fixée. Ainsi, la Cour a jugé que, lorsqu’il répond à une réelle justification commerciale, un usage même minime peut être suffisant pour établir l’existence d’un caractère sérieux (voir arrêt MAD, point 36 supra, EU:T:2012:263, point 23 et jurisprudence citée).

44      Toutefois, plus le volume commercial de l’exploitation de la marque est limité, plus il est nécessaire que le détenteur de la marque apporte des indications supplémentaires permettant d’écarter d’éventuels doutes quant au caractère sérieux de l’usage de la marque concernée [arrêt du 18 janvier 2011, Advance Magazine Publishers/OHMI – Capela & Irmãos (VOGUE), T‑382/08, EU:T:2011:9, point 31].

45      Par ailleurs, le Tribunal a précisé que l’usage sérieux d’une marque ne peut pas être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné (voir arrêt MAD, point 36 supra, EU:T:2012:263, point 24 et jurisprudence citée).

46      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a, en entérinant la décision de la division d’annulation, conclu à l’absence d’usage sérieux de la marque contestée au cours des cinq années précédant la date de la demande de déchéance de ladite marque.

47      La demande de déchéance de la marque contestée ayant été déposée le 22 décembre 2009, la période de cinq années visée à l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, qui a été rappelée au point 14 ci-dessus, s’étend, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 32 de la décision attaquée, du 22 décembre 2004 au 21 décembre 2009.

48      Il y a lieu de relever que les preuves fournies par la requérante dans le cadre de la procédure administrative devant la division d’annulation concernant l’usage de la marque contestée sont les suivantes :

« –      participation au salon EICMA (2003) :

–        extrait du site web www.cyberscooter.it avec une référence aux motos MOTOBI au salon EICMA 2003 ;

–        extrait du site www.eicma.it contenant des informations sur le salon EICMA 2010. Le salon EICMA est une exposition de motos qui se tient à Milan. Il n’y a aucune référence à MOTOBI.

–        extraits de sites web sur les motos MOTOBI (2004) :

–        extrait du site www.pakautocar.com avec deux images de motos. D’après le titre de ce site, il s’agit d’‘images de motos Motobi pour fonds d’écran’ ;

–        extrait du site www.motorcyclespecifications.info/Motobi_Velvet 400.html avec des informations techniques sur un scooter MOTOBI (2004) ; et

–        extrait du site www.bikez.com avec des informations techniques sur un scooter ‘Motobi Adiva 150’ (2004) et un scooter ‘Motobi Adiva 125’ (2004).

–        commande (15 octobre 2009) :

–        commande de Keeway France SAS. adressée à Benelli Q. J. Srl, pour 26 unités de scooters Pepe 50 portant la marque MOTOBI pour le marché français. La commande est signée par le ‘directeur général’. Le document est daté du 15 octobre 2009. Lettre de M. PAN, de Keeway France SAS, indiquant que la commande de Keeway a été signée par lui ;

–        lettre du 25 novembre 2009 de Benelli Q. J. Srl (signée par le représentant légal et directeur général de Benelli) en réponse à la commande, indiquant que l’entreprise serait en mesure de livrer les scooters avant la fin du mois de juillet 2010.

–        factures (2010) :

–        facture de Benelli Q. J. Srl adressée à Keeway France, en date du 20 juillet 2010, pour la vente d’un ‘Velvet 125 cc black Motobi’, pour un montant de 680 EUR, accompagnée d’un document de transport ;

–        facture de Benelli Q. J. Srl à Motor Show Center Sport Srl., à Milan, en date du 30 juin 2010, pour la vente de trois motos pour un montant de 3 448 EUR, accompagnée de deux documents de transport, l’un daté du 2 juillet 2010 pour deux ‘Velvet 125 nero Motobi’, et l’autre du 30 juin 2010 pour trois ‘49x on road nero – Motobi’.

–        images (non datées) :

–        quatre images de motos portant la marque ‘MOTOBI’ :

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–        extraits d’images de ‘Velvet Motobi’ obtenues sur Google.

–        revente de pièces détachées ‘MOTOBI’ (non datées) :

–        extrait du site web webcache.googleusercontent.com avec des informations sur les pièces détachées MOTOBI. Il est indiqué que ‘Motobi a été fondé, en 1950, par l’un des six frères Benelli, qui fabriquait des motos depuis un peu plus de vingt ans avant que l’usine ne ferme ses portes’ ;

–        autres extraits de sites web (eBay, motorcycles.shop, webcache.googleusercontent.com, justgastanks.com) impliquant des tiers vendant des pièces détachées MOTOBI d’époque ou d’anciennes motos MOTOBI. Les pages ont été imprimées le 29 octobre 2010.

–        catalogues :

–        catalogues de motos Benelli montrant des images de produits désignés sous les noms de Velvet et Adiva. Selon le titulaire de la marque communautaire, les catalogues datent de 2004. Toutefois, cette date n’est pas visible sur les catalogues. Il a également avancé que les catalogues démontrent le co-branding de MOTOBI avec Velvet et Adiva. Le signe suivant apparaît sur la première page :

Image not found

–        catalogue d’accessoires et d’habillement Benelli 2008/2009 énumérant des pièces détachées et des vêtements. Il n’y a aucune référence à MOTOBI.

–         sur la société :

–        extraits du site web webcache.googleusercontent.com contenant des informations sur ‘Benelli Adiva 150’ et sur l’histoire de Benelli, et, plus particulièrement, sur ‘la gamme de motos Benelli 2005’. Les extraits contiennent quelques images, mais il n’y a aucune information sur la marque MOTOBI – hormis une référence au fait que MOTOBI et Benelli ont produit près de 300 motos par jour en 1962. Selon le titulaire de la marque communautaire, ces extraits démontrent que Benelli fabrique des motos Adiva, qui sont également co-brandées avec MOTOBI ;

–        communiqué de presse en ligne, en date du 15 septembre 2005, indiquant que Benelli a été rachetée par une entreprise chinoise, et extrait du site web www.twowheelsblog.com contenant un article intitulé ‘Benelli en crise : l’entreprise réduit sa production et envisage de se délocaliser en Chine’ (date illisible) ;

–        extrait du site web www.benelliclubgb.net contenant des informations sur le Benelli Motobi Club GB, imprimé le 29 octobre 2010 ;

–        extraits de sites web à propos du musée Benelli, qui contient des motos MOTOBI, imprimés le 29 octobre 2010. »

49      Par ailleurs, d’autres éléments de preuve ont été produits par la requérante devant la chambre de recours, lesquels ont été examinés par cette dernière aux points 56 à 63 de la décision attaquée et ont fait l’objet des observations ci-après.

50      La chambre de recours a constaté que la facture, qui était jointe en annexe 1 du mémoire exposant les motifs du recours, était datée du 2 août 2010, soit hors de la période pertinente, et faisait état de la vente de trois scooters au prix unitaire de 680 euros, soit une faible quantité. Elle a ensuite considéré que les déclarations jointes en annexe 2 dudit mémoire étaient vagues et n’indiquaient nullement que les produits avaient été vendus, mais seulement fabriqués. L’annexe 3 de ce mémoire ne se rapporterait pas aux produits MOTOBI. L’annexe 4 du même mémoire se référerait au droit d’utiliser les logos « Benelli » et « MotoBi » dans le cadre d’expositions programmées en 2005, sans que la preuve de leur utilisation soit démontrée. Les annexes 5 à 7 dudit mémoire comporteraient des images de motos MOTOBI qui n’étaient pas datées. L’annexe 8 de ce mémoire montrerait les spécifications de deux modèles MOTOBI de 2004. L’annexe 9 du même mémoire serait un article sur l’histoire de MOTOBI dont la dernière date mentionnée était 1972. Enfin, les annexes 10 et 11 du mémoire susmentionné seraient des articles de presse et des photographies de motos dites « benelli », sans que la marque MOTOBI soit mentionnée.

51      Force est de constater que, tant pour les raisons mentionnées par la division d’annulation, qui sont reprises au point 16 de la décision attaquée, que pour celles mentionnées par la chambre de recours, qui figurent aux points 56 à 64 de ladite décision, l’ensemble des éléments produits par la requérante dans le cadre de la procédure administrative sont manifestement insuffisants aux fins de démontrer l’usage sérieux de la marque contestée.

52      Ainsi que le relève à juste titre l’OHMI, la plupart des documents produits par la requérante aux fins de démontrer l’usage sérieux de la marque contestée sont dépourvus de valeur probante, dans la mesure où soit ils ne sont pas datés ou sont revêtus d’une date postérieure ou antérieure à la période pertinente, soit ils ne comportent aucune référence à la marque contestée ou sont des photographies non datées et ne pouvant être recoupées avec d’autres documents tels que des catalogues de produits ou des listes de références. Aucun document ne contient de données quant au chiffre d’affaires ou au nombre de ventes des produits revêtus de la marque au cours de la période pertinente.

53      En effet, les seuls éléments soumis par la requérante à la chambre de recours et comportant une date à l’intérieur de la période pertinente rappelée au point 47 ci-dessus sont : une commande du 15 octobre 2009 pour 26 scooters de la marque MOTOBI, accompagnée d’une réponse en date du 25 novembre 2009, et qui a donné lieu à une seule facture, en date du 20 juillet 2010, qui est postérieure à la période pertinente et qui ne concerne qu’un seul scooter et non 26.

54      À cet égard, il convient de relever que, si la commande du 15 octobre 2009 pour 26 scooters de la marque MOTOBI s’inscrit dans la période pertinente aux fins de la preuve de l’usage sérieux de la marque, il y a lieu, néanmoins, de constater que la réponse de la requérante à ladite commande est revêtue d’une date à laquelle elle venait d’être informée de l’imminence de l’introduction d’une procédure de déchéance par l’intervenante (voir point 4 ci-dessus) et que, conformément à l’article 51, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, ces éléments sont compris dans la période de trois mois précédant la date de dépôt de la demande de déchéance.

55      Par ailleurs, s’agissant, en premier lieu, de l’argument de la requérante selon lequel elle aurait fourni de nombreux éléments de preuve, il convient de constater que le seul fait que la requérante a fait parvenir dans le cadre de la procédure administrative, ainsi qu’elle l’affirme elle-même, de « nombreux éléments de preuve », est indifférent aux fins de la démonstration du caractère sérieux de l’usage de la marque contestée, cette preuve dépendant non pas du volume des documents annexés, d’autant plus lorsque ces documents ne font aucune référence à ladite marque figurative contestée ou sont, dans leur quasi-totalité, antérieurs ou postérieurs à la période pertinente, mais de la qualité et de la pertinence des documents qui doivent permettre à la requérante de prouver cet usage sérieux, ce dernier ne pouvant être présumé sur la base d’éléments fragmentaires et insuffisants.

56      En outre, en se prévalant de documents antérieurs ou postérieurs à la période pertinente et en indiquant qu’« il faut supposer que ces documents ont aussi un effet sur la période pertinente », la requérante commet manifestement deux erreurs, d’une part, prétendant que des documents qui ne se rapportent pas à la période pertinente doivent être pris en considération aux fins de la preuve du caractère sérieux de l’usage de la marque contestée et, d’autre part, en considérant qu’une telle preuve puisse être rapportée par de simples présomptions ou suppositions, contrairement à la jurisprudence rappelée au point 45 ci-dessus.

57      Certes, la Cour a jugé, au point 31 de l’ordonnance La Mer Technology, point 37 supra (EU:C:2004:50), que des circonstances postérieures à la présentation de la demande de déchéance pouvaient être prises en considération. Toutefois, elle a précisé que de telles circonstances peuvent permettre de confirmer ou de mieux apprécier la portée de l’utilisation de la marque au cours de la période pertinente ainsi que les intentions réelles du titulaire au cours de la même période.

58      En outre, la preuve du caractère sérieux de l’usage de la marque contestée ne saurait être rapportée par des éléments qui ne se rapportent pas à la période pertinente.

59      Or, force est de constater que, en l’occurrence, les documents postérieurs soumis par la requérante tant devant la division d’annulation que devant la chambre de recours ne permettent pas de mieux apprécier la portée de l’utilisation de la marque au cours de la période pertinente, puisqu’ils ne confirment aucune information relative à ladite période.

60      S’agissant, en deuxième lieu, de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’a pas pris en considération « l’importance de sa participation au salon mondialement connu EICMA », qui a lieu, selon la requérante elle-même, au mois de novembre de chaque année, celle-ci invoquant sa présence en 2003 et 2004, il convient de rappeler que la période pertinente commence le 22 décembre 2004, en sorte que, à supposer même que la requérante ait participé à ce salon, sa participation serait antérieure à la période au cours de laquelle l’usage sérieux de la marque contestée devait être rapporté.

61      Le fait que, selon la requérante, la marque contestée aurait, en raison de cette participation en 2003 et en 2004 audit salon, été présente sur le marché durant les années suivantes n’est nullement étayé et il ne saurait être déduit de cette seule participation que la requérante aurait démontré avoir fait un usage sérieux de ladite marque, ce d’autant plus qu’il convient de rappeler, conformément à la jurisprudence mentionnée au point 45 ci-dessus, qu’une telle preuve ne saurait être rapportée par de simples présomptions ou suppositions.

62      S’agissant, en troisième lieu, de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’a pas dûment pris en considération le fait que des produits portant des sous-marques de MOTOBI, à savoir Adiva et Velvet, avaient été notamment fabriqués en 2004, il convient de préciser que, en tout état de cause, les éléments de preuve concernant ces sous-marques sont insuffisants pour démontrer l’usage sérieux de la marque verbale MOTOBI.

63      En réponse à une question posée par le Tribunal lors de l’audience, la requérante s’est référée, en particulier, aux annexes 1 et 8 du mémoire exposant les motifs du recours pour démontrer que ces documents mettaient en exergue l’usage sérieux de la marque contestée.

64      Or, l’annexe 1 du mémoire exposant les motifs du recours, qui est une facture en date du 2 août 2010 au profit de Keeway France SAS, qui a donc été établie à une date postérieure à celle de la demande en déchéance, est relative à la vente de deux modèles « velvet 125 c. nero ‑ motobi » et d’un modèle « velvet 125 c. grigio ‑ motobi ». Par ailleurs, l’annexe 8 dudit mémoire contient les spécifications techniques de deux modèles « motobi velvet ».

65      Force est de constater que, ainsi que l’a soutenu l’OHMI lors de l’audience, ces éléments, même appréciés globalement avec ceux déposés par la requérante devant la division d’annulation, sont également insuffisants pour démontrer la preuve de l’usage sérieux de la marque contestée en raison, d’une part, de la date de la facture établie postérieurement à la date d’introduction de la demande en déchéance et, d’autre part, à supposer même que cet élément postérieur puisse être pris en considération, du caractère symbolique des ventes intervenues.

66      S’agissant, en quatrième lieu, de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours a omis de tenir compte du fait que les produits relevant de la classe 12, à savoir des scooters, ne sont pas des articles vendus quotidiennement en grande quantité, il suffit de relever que les documents produits par la requérante et qui se rapportent à la période pertinente ne font état d’aucune vente de scooter, la seule vente qui apparaît dans les documents versés au dossier, et qui est mentionnée au point 37 de la décision attaquée, étant postérieure à ladite période.

67      Dès lors, à supposer même que le marché des scooters ne soit pas, ainsi que le prétend la requérante, un marché qui se caractérise par un nombre élevé de ventes, la requérante n’a démontré aucune vente au cours de la période pertinente, mais une commande de 26 scooters concrétisée par une seule vente, en sorte que, même si cette vente unique avait été prise en considération aux fins de la preuve de l’usage sérieux de la marque contestée, force aurait été de constater que cette vente était manifestement insuffisante aux fins d’une telle preuve. Par ailleurs, la facture supplémentaire établie le 30 juin 2010 à l’ordre de Motor Show Center Sport Srl à Pesaro pour la vente de trois scooters pour un montant de 3 448,14 euros est également postérieure à cette période et, à supposer même qu’elle doive être prise en considération, ne démontre qu’un usage effectué à titre symbolique de cette dernière marque.

68      Or, ainsi que l’a jugé la Cour, l’usage sérieux doit s’entendre d’un usage qui n’est pas effectué à titre symbolique, aux seules fins du maintien des droits conférés par la marque (arrêt Ansul, point 39 supra, EU:C:2003:145, point 36).

69      S’agissant, en cinquième lieu, des attestations des employés de la requérante déposées devant la chambre de recours (voir point 57 de la décision attaquée), qui sont des documents émanant de l’entreprise elle-même, le Tribunal a jugé que, pour apprécier leur valeur probante, il fallait d’abord vérifier la vraisemblance de l’information qui y était contenue. Il a ajouté qu’il fallait alors tenir compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration et de son destinataire et se demander si, d’après son contenu, il semblait sensé et fiable [arrêts Salvita, point 21 supra, EU:T:2005:200, point 42, et du 16 novembre 2011, Dorma/OHMI – Puertas Doorsa (doorsa FÁBRICA DE PUERTAS AUTOMÁTICAS), T‑500/10, EU:T:2011:679, point 49].

70      En l’espèce, il convient de constater que les diverses attestations, toutes écrites d’une manière identique, mentionnant que des véhicules revêtus de la marque MOTOBI représentés dans les photographies annexées avaient été développés, préparés et promus par la requérante au cours des années 2004 et 2005, qui émanent de la requérante elle-même, ne peuvent, étant donné cette provenance, dès lors, à elles-seules, constituer une preuve suffisante de l’usage sérieux de la marque contestée. Les indications qui y sont contenues ne constituent donc que des indices nécessitant d’être corroborés par d’autres éléments probants [voir, en ce sens, arrêt du 15 décembre 2005, BIC/OHMI (Forme d’un briquet à pierre), T‑262/04, Rec, EU:T:2005:463, point 79].

71      Ainsi, en l’absence de toute autre pièce étayant les informations contenues dans ces attestations, qui pourraient corroborer la production et la vente de produits revêtus de la marque contestée, lesdites attestations, examinées à l’aune de l’ensemble des autres éléments soumis par la requérante dans le cadre de la procédure administrative, ne sauraient démontrer que ladite marque a fait l’objet d’un usage sérieux au cours de la période pertinente.

72      S’agissant, en dernier lieu, de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’a pas effectué une appréciation globale, mais a séparé les divers éléments soumis à son appréciation, il est exact qu’il ne peut être exclu qu’un faisceau d’éléments de preuve permette d’établir les faits à démontrer, alors même que chacun de ces éléments, pris isolément, serait impuissant à rapporter la preuve de l’exactitude de ces faits (arrêt du 17 avril 2008, Ferrero Deutschland/OHMI, C‑108/07 P, EU:C:2008:234, point 36).

73      Force est, toutefois, de constater que, en l’espèce, l’appréciation globale de l’ensemble des éléments de preuve soumis par la requérante ne permet pas davantage de considérer que, au cours de la période pertinente, des ventes effectives de scooters ont été réalisées, en sorte qu’il est impossible de déterminer la part de marché de la requérante ou l’activité économique effective de cette dernière.

74      Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté ainsi que le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

75      Il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Benelli Q. J. Srl est condamnée aux dépens.

Martins Ribeiro

Gervasoni

Madise

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 2 février 2016.

Signatures


** Langue de procédure : l’anglais.