Language of document : ECLI:EU:T:2010:137

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

13 avril 2010 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative YoKaNa – Marques communautaire et nationale figuratives antérieures YOKONO – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009] »

Dans l’affaire T‑103/06,

Esotrade, SA, établie à Madrid (Espagne), représentée par MJ. de Rivera Lamo de Espinosa et J. E. Astiz Suárez, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme J. García Murillo et M. O. Montalto, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Antonio Segura Sánchez, demeurant à Alicante (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 10 janvier 2006 (affaire R 217/2004-2), relative à une procédure d’opposition entre M. Antonio Segura Sánchez et Esotrade, SA,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes I. Pelikánová, président, K. Jürimäe et M. S. Soldevila Fragoso (rapporteur), juges,

greffier : Mme B. Pastor, greffier adjoint,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 27 mars 2006,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 14 septembre 2006,

à la suite de l’audience du 27 octobre 2009,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 10 avril 2000, la requérante, Esotrade, SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 14, 18 et 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 14 : « Métaux précieux et leurs alliages et produits en ces matières ou en plaqué non compris dans d’autres classes ; joaillerie, bijouterie, pierres précieuses ; horlogerie et instruments chronométriques » ;

–        classe 18 : « Cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes ; peaux d’animaux ; malles et valises ; parapluies, parasols et cannes ; fouets et sellerie » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 95/2000, du 27 novembre 2000.

5        Le 27 février 2001, M. Antonio Segura Sánchez a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009) à l’enregistrement de la marque demandée, pour les produits relevant des classes 18 et 25 visés au point 3 ci-dessus, en se fondant sur plusieurs droits antérieurs, dont la marque communautaire figurative n° 336.750 suivante :

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6        Cette marque a été enregistrée, le 16 novembre 1998, notamment pour les produits relevant des classes 18 et 25 au sens de l’arrangement de Nice et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 18 : « Cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes ; peaux d’animaux ; malles et valises ; parapluies, parasols et cannes ; fouets et sellerie, y compris sacs et sacs de sport » ;

–        classe 25 : « Vêtements confectionnés et lingerie pour dames, hommes et enfants ; chaussures ; ceintures ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

8        Le 28 janvier 2004, la division d’opposition a fait droit à l’opposition, sur le fondement de la marque communautaire antérieure, pour les produits cités au point 6 ci-dessus, à l’exception des « sacs et sacs de sport » et de la « lingerie pour dames, hommes et enfants »  ainsi que des « ceintures ».

9        Le 26 mars 2004, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009), contre la décision de la division d’opposition, tout en limitant sa demande de marque communautaire aux produits suivants :

–        classe 18 : « Sacs et sacs en cuir, à l’exception de ceux destinés à des usages sportifs » ;

–        classe 25 : « Écharpes, châles, foulards et saris ».

10      Par décision du 10 janvier 2006 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. En particulier, elle a considéré qu’il existait un risque de confusion entre la marque antérieure YOKONO et la marque demandée YoKaNa compte tenu de l’identité des produits en cause et de la similitude des marques en conflit.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        constater le caractère enregistrable de la marque demandée ;

–        condamner l’opposant aux dépens afférents tant à la présente procédure qu’aux procédures antérieures.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

13      En réponse à une question posée par le Tribunal lors de l’audience, la requérante a déclaré renoncer à son deuxième chef de conclusions, ainsi qu’il en a été pris acte au paragraphe 2 de la page 2 du procès-verbal de l’audience du 27 octobre 2009.

 En droit

14      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. La requérante soutient, en substance, qu’il n’existe aucun risque de confusion entre les marques en cause. Ce moyen se divise en trois branches, tirées, premièrement, de l’usage antérieur de la marque demandée, deuxièmement, de l’absence de risque de confusion résultant de la comparaison des signes en conflit, des produits en cause et du public pertinent et, troisièmement, de l’absence de risque de confusion réel sur le marché des territoires pertinents et de l’existence de « précédents administratifs ».

 Sur la première branche du moyen, tirée de l’usage antérieur de la marque demandée

 Arguments des parties

15      La requérante fait valoir que le signe distinctif de la marque demandée est présent sur le marché espagnol depuis plus de douze ans, et ce avant même que la marque antérieure n’ait fait l’objet d’un enregistrement.

16      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

17      Tout d’abord, il convient de relever que le présent recours a pour objet l’annulation de la décision attaquée, en ce que la chambre de recours a conclu à l’impossibilité de procéder à l’enregistrement communautaire de la marque YoKaNa, compte tenu de l’existence d’un risque de confusion entre cette marque et la marque antérieure YOKONO. En aucun cas il n’est fait état d’une éventuelle demande d’annulation de l’enregistrement antérieur de la marque YOKONO par la requérante.

18      Si la requérante utilisait la marque demandée avant que la marque antérieure ne soit enregistrée, il lui incombait d’en rechercher la protection par la voie d’une procédure d’opposition ou d’annulation ou, le cas échéant, devant la juridiction nationale compétente dans le cadre prévu par l’article 106 du règlement n° 40/94 (devenu article 110 du règlement n° 207/2009).

19      Aussi longtemps que la marque communautaire antérieure est effectivement protégée, l’existence d’un enregistrement ou d’un usage national antérieur à cette dernière n’est pas pertinente dans le cadre d’une opposition formée à l’encontre d’une demande de marque communautaire. En effet, seules peuvent être prises en considération la marque communautaire antérieure et la marque communautaire demandée [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 55 ; du 1er mars 2005, Fusco/OHMI – Fusco International (ENZO FUSCO), T‑185/03, Rec. p. II‑715, points 62 et 63, et du 21 avril 2005, PepsiCo/OHMI – Intersnack Knabber-Gebäck (RUFFLES), T‑269/02, Rec. p. II‑1341, points 25 à 27].

20      La première branche du moyen doit donc être rejetée.

 Sur la deuxième branche du moyen, tirée de l’absence de risque de confusion résultant de la comparaison des signes en conflit, des produits en cause et du public pertinent

 Arguments des parties

21      En premier lieu, la requérante considère que, s’agissant de la similitude des signes, même si les deux marques présentent la même structure syllabique, elles se prononcent de manière distincte, car elles sont composées de voyelles différentes.

22      En deuxième lieu, d’un point de vue graphique, les deux signes seraient totalement distincts, l’élément figuratif de la marque demandée étant simple et minimaliste alors que la marque antérieure est formée d’un ensemble graphique complexe, sur lequel se concentre l’attention du consommateur. L’utilisation de la couleur rouge dans la marque demandée ainsi que les choix effectués en matière de polices de caractères, d’utilisation des minuscules et des majuscules et d’agencement des dénominations des deux marques seraient totalement différents. Selon la requérante, les différences graphiques et phonétiques entre les deux marques dégagent une impression globale distincte qui permet d’éviter tout risque de confusion ou d’association sur le marché.

23      En troisième lieu, la requérante souligne que les consommateurs ciblés sont distincts dans les faits. Alors que les consommateurs des produits concernés par la marque demandée seraient des personnes sensibles à l’esthétique et aux tendances de la mode recherchant des produits sophistiqués, ceux des produits concernés par la marque antérieure rechercheraient, quant à eux, plutôt la fonctionnalité et la commodité dans leurs achats. La marque demandée serait d’ailleurs présente dans les foires les plus importantes du secteur de la mode et des accessoires, dont est absente la marque antérieure.

24      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

25      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), i), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 2, sous a), i), du règlement n° 207/2009], il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans la Communauté européenne, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

26      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou des services désignés [voir arrêt de la Cour du 3 septembre 2009, Aceites del Sur-Coosur/Koipe et OHMI, C‑498/07 P, non encore publié au Recueil, point 59, et arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

27      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

28      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de la Communauté, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque communautaire, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 existe dans une partie de la Communauté [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 76, et la jurisprudence citée].

29      En l’espèce, la marque antérieure est une marque communautaire et, partant, le territoire pertinent pour l’appréciation du risque de confusion est constitué de l’ensemble du territoire de la Communauté.

30      Par ailleurs, selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du Tribunal du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec. p. II‑449, point 42, et la jurisprudence citée].

31      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. En l’espèce, à la suite de la limitation des produits en cause désignés dans la demande de marque, opérée par la requérante devant la chambre de recours, il convient de constater que les produits visés par la marque demandée sont inclus dans les produits visés par la marque antérieure.

32      Or, selon la jurisprudence, seule la description des produits pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé est pertinente, l’utilisation envisagée de cette marque ne pouvant être prise en compte dès lors que l’enregistrement ne comporte pas une limitation en ce sens [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 30 juin 2004, M+M/OHMI − Mediametrie (M+M EUROdATA), T‑317/01, Rec. p. II‑1817, point 58, et du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI − LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec. p. II‑4891, point 35].

33      Dès lors, ne sont pas pertinentes les circonstances, indiquées par la requérante, selon lesquelles certains produits haut de gamme, d’un prix relativement élevé ou d’une sophistication particulière, pourraient se trouver parmi les produits désignés par la marque demandée. En effet, rien n’empêche le titulaire de la marque communautaire antérieure de produire des produits de luxe. Les produits en cause doivent donc être considérés comme étant identiques.

34      Par conséquent, la chambre de recours a considéré à juste titre que les produits en cause étaient identiques. Par ailleurs, étant donné qu’il s’agit de produits de consommation courante, c’est également à juste titre que la chambre de recours a constaté que le public pertinent était composé de consommateurs moyens.

35      À la lumière de ce qui précède, il convient de procéder à la comparaison des signes en conflit.

36      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

37      La chambre de recours a considéré qu’il existait une similitude phonétique et une absence de différence visuelle « manifeste » entre les deux marques, et qu’aucune d’entre elles n’avait de signification conceptuelle spécifique.

38      En ce qui concerne la similitude phonétique, il convient de relever que les éléments verbaux des deux marques présentent des similitudes. Les deux marques présentent la même structure syllabique et ne se distinguent que par la prononciation des deux voyelles de leurs deux dernières syllabes, à savoir deux fois la lettre « o » pour la marque antérieure et deux fois la lettre « a » pour la marque demandée. Cependant, comme la chambre de recours l’a constaté à juste titre au point 23 de la décision attaquée, ces différences de prononciation entre les deux marques ne sont pas suffisantes pour éviter tout risque de confusion. En effet, sans être identiques, les deux signes en conflit, à savoir les signes YoKaNa et YOKONO, ne produisent pas une impression phonétique globale différente pour le consommateur. Il convient dès lors de considérer que les marques en cause sont similaires sur le plan phonétique.

39      En ce qui concerne la similitude visuelle des signes en conflit, il y a lieu de relever que la marque antérieure est représentée en noir et blanc et est formée d’une étoile blanche à cinq branches, en dessous de laquelle figure l’élément verbal de la marque antérieure, dans un style particulier et incurvé afin de suivre le contour du signe graphique. La marque demandée est, quant à elle, représentée en rouge vif et se caractérise par la présence d’un globe solide, en dessous duquel apparaît l’élément verbal « yokana » dans un style de caractère différent de celui utilisé dans la marque antérieure, disposé de façon horizontale et alternant les lettres majuscules et minuscules. Il ressort de l’ensemble de ces constatations que, sur un plan visuel, les deux signes en conflit peuvent être différenciés à première vue par les consommateurs malgré l’existence d’éléments de similitude dus à la présence de leurs éléments verbaux.

40      Quant à la similitude conceptuelle des marques en conflit, il n’est pas contesté par la requérante que les mots « yokono » et « yokana » n’ont pas de signification conceptuelle claire pour le public pertinent. Il est cependant probable que le consommateur concerné leur attribue une origine asiatique. En effet, d’une part, la combinaison des lettres « y », « k » et « n » évoque une origine asiatique et, d’autre part, le rond de couleur rouge figurant dans la marque demandée évoque le drapeau japonais et l’étoile figurant dans la marque antérieure le drapeau chinois. Il s’ensuit que les marques en cause présentent un certain degré de similitude sur le plan conceptuel.

41      Aux fins de l’appréciation globale du risque de confusion, il y a lieu de prendre en considération le fait que le consommateur n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite de celles-ci qu’il a gardée en mémoire [arrêt du Tribunal du 15 janvier 2003, Mystery Drinks/OHMI – Karlsberg Brauerei (MYSTERY), T‑99/01, Rec. p. II‑43, point 32].

42      Certes, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, le degré de similitude phonétique entre deux marques est d’une importance réduite dans le cas de produits qui sont commercialisés d’une telle manière que, habituellement, le public pertinent, lors de l’achat, perçoit la marque les désignant de façon visuelle, comme dans le cas de vêtements [arrêts du Tribunal du 14 octobre 2003, Philips-Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, Rec. p. II‑4335, point 55 ; du 3 mars 2004, Mühlens/OHMI – Zirh International (ZIRH), T‑355/02, Rec. p. II‑791, point 51, et du 28 juin 2005, Canali Ireland/OHMI – Canal Jean (CANAL JEAN CO. NEW YORK), T‑301/03, Rec. p. II‑2479, point 55].

43      Cependant, en l’espèce, il y a lieu de considérer que, au regard de l’identité constatée entre les produits visés par les deux marques en cause, l’existence d’une similitude phonétique et d’une certaine similitude conceptuelle est suffisante pour conclure à l’existence d’un risque de confusion entre la marque antérieure et la marque demandée, et cela malgré les différences visuelles existant entre les signes en conflit.

44      La deuxième branche du moyen doit donc être rejetée.

 Sur la troisième branche du moyen, tirée de l’absence de risque de confusion réel sur le marché des territoires pertinents et de l’existence de « précédents administratifs »

 Arguments des parties

45      La requérante fait valoir que les deux marques en conflit « coexistent pacifiquement » sur le marché espagnol. Par ailleurs, le principe d’égalité de traitement et de sécurité juridique ainsi que celui de cohérence administrative conduiraient à considérer que, si les marques YOKANE’S et YOKONO ont pu faire l’objet d’une protection pour les produits relevant de la classe 25 en tant que marques nationales en Espagne, la marque demandée devrait également pouvoir être enregistrée.

46      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

47      En ce qui concerne, premièrement, la « coexistence pacifique » des marques en conflit sur le territoire espagnol, il convient de rappeler que, en l’espèce, la marque antérieure est une marque communautaire et que, partant, le territoire pertinent pour l’appréciation du risque de confusion est constitué par l’ensemble de la Communauté.

48      Par conséquent, l’existence d’une « coexistence pacifique » sur le territoire espagnol entre les marques en conflit n’aurait pas pour effet d’écarter un risque de confusion sur le territoire communautaire.

49      En ce qui concerne, deuxièmement, les décisions nationales invoquées par les parties, il convient de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante que les enregistrements d’ores et déjà effectués dans des États membres ne constituent que des éléments qui, sans être déterminants, peuvent seulement être pris en considération aux fins de l’enregistrement d’une marque communautaire [arrêts du Tribunal du 16 février 2000, Procter & Gamble/OHMI (Forme d’un savon), T‑122/99, Rec. p. II‑265, point 61, et du 19 septembre 2001, Henkel/OHMI (Tablette ronde rouge et blanc), T‑337/99, Rec. p. II‑2597, point 58].

50      Par conséquent, la troisième branche du moyen doit être rejetée.

51      Il résulte de tout ce qui précède que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en cause.

52      Partant, il y a lieu de rejeter le moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, ainsi que le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

53      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La requérante est condamnée aux dépens.

Pelikánová

Jürimäe

Soldevila Fragoso

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 avril 2010.

Signatures


* Langue de procédure : l’espagnol.