Language of document : ECLI:EU:T:2016:56

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

2 février 2016 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative MOTO B – Marques nationales figuratives non enregistrées antérieures MOTOBI – Motif relatif de refus – Preuve de la notoriété des marques non enregistrées antérieures – Article 8, paragraphe 2, sous c), du règlement (CE) n° 207/2009 – Article 6 bis de la convention de Paris – Preuves présentées à l’appui de l’opposition après l’expiration du délai imparti – Absence de prise en considération – Pouvoir d’appréciation de la chambre de recours – Disposition contraire – Circonstances s’opposant à la prise en compte de preuves nouvelles ou supplémentaires – Article 76, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 – Règles 19 et 20 du règlement (CE) n° 2868/95 – Règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement n° 2868/95 – Article 75, première phrase, du règlement n° 207/2009 – Obligation de motivation »

Dans l’affaire T‑169/13,

Benelli Q. J. Srl, établie à Pesaro (Italie), représentée par Mes P. Lukácsi et B. Bozóki, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par M. F. Mattina, puis par M. P. Bullock, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Demharter GmbH, établie à Dillingen (Allemagne), représentée par Me A. Kohn, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 16 janvier 2013 (affaire R 95/2012‑2), relative à une procédure d’opposition entre Benelli Q. J. Srl et Demharter GmbH,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro (rapporteur), président, MM. S. Gervasoni et L. Madise, juges,

greffier : Mme A. Lamote, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 21 mars 2013,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 20 juin 2013,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 17 juin 2013,

vu la décision de réattribution de l’affaire à la deuxième chambre,

à la suite de l’audience du 7 juillet 2015,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 23 décembre 2009, l’intervenante, Demharter GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant, avec revendication des couleurs noir, blanc, rouge, or, vert, marron et gris :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 9, 12 et 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante :

–        classe 9 : « Casques antichoc pour motocyclistes » ;

–        classe 12 : « Véhicules ; appareils de locomotion par terre, par air ou par eau » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, coiffures textiles, en particulier pour les motards ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 53/2010, du 22 mars 2010.

5        Le 22 juin 2010, la requérante, Benelli Q. J. Srl, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée, au titre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), et de l’article 8, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 207/2009, sur les droits antérieurs suivants :

–        la marque italienne non enregistrée et notoirement connue pour des « motocycles » suivante :

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–        la marque italienne non enregistrée et notoirement connue pour des « vêtements » suivante :

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–        la marque italienne non enregistrée et notoirement connue pour des « motocycles » suivante :

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7        Le 29 juin 2010, l’OHMI a informé la requérante du fait que le délai pour étayer ses droits antérieurs expirait le 30 octobre 2010. Ce délai a été reporté, à la demande de la requérante, au 30 décembre 2010. Le 3 janvier 2011, la requérante a demandé une deuxième prolongation du délai, mais sa demande a été rejetée, au motif qu’elle n’avait pas justifié de l’existence de circonstances exceptionnelles. Néanmoins, pour des raisons liées à l’équité, l’OHMI a accordé un délai de six jours supplémentaires. Le 10 janvier 2011, la requérante a produit des éléments destinés à prouver la notoriété de ses marques antérieures non enregistrées en Italie. Elle a présenté de nouveaux éléments de preuve les 22 avril et 11 octobre 2011.

8        Par décision du 15 novembre 2011, la division d’opposition a rejeté l’opposition, au motif que les preuves apportées par la requérante n’étaient pas suffisantes pour démontrer la notoriété des marques antérieures non enregistrées en Italie.

9        Le 11 janvier 2012, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 60 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition. Le 14 mars 2012, la requérante a déposé le mémoire exposant les motifs du recours, accompagné de nouveaux éléments de preuve.

10      Par décision du 16 janvier 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. En premier lieu, s’agissant des preuves produites devant la division d’opposition, la chambre de recours, après avoir rappelé l’ensemble des pièces que la requérante avait produites dans le cadre de la procédure administrative, a, au point 28 de ladite décision, déclaré partager la conclusion de la décision de la division d’opposition en ce qui concerne l’insuffisance des pièces produites par la requérante aux fins d’établir la notoriété de ses marques antérieures non enregistrées et, au point 29 de la décision attaquée, s’est référée au raisonnement de la division d’opposition. Aux points 30 à 35 de la même décision, la chambre de recours a développé son raisonnement selon lequel les preuves étaient insuffisantes à cet effet.

11      En second lieu, s’agissant des preuves présentées pour la première fois devant elle, la chambre de recours a, tout d’abord, rappelé, au point 37 de la décision attaquée, que la Cour avait jugé, s’agissant de l’application de l’article 76 du règlement n° 207/2009, que, en règle générale et sauf disposition contraire, la présentation de faits et de preuves par les parties demeurait possible après l’expiration des délais auxquels se trouvait subordonnée une telle présentation en application des dispositions dudit règlement et qu’il n’était nullement interdit à l’OHMI de tenir compte de faits et de preuves ainsi tardivement invoqués ou produits : en revanche, l’OHMI disposait d’un pouvoir d’appréciation à l’effet de décider s’il y avait lieu ou non de prendre ceux-ci en compte.

12      La chambre de recours a, toutefois, considéré, au point 39 de la décision attaquée, que le délai prévu à la règle 19, paragraphe 4, et à la règle 20, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO L 303, p. 1), tel que résultant de sa version modifiée par le règlement (CE) n° 1041/2005 de la Commission, du 29 juin 2005 (JO L 172, p. 4), présentait un caractère péremptoire, qui excluait la prise en compte par l’OHMI de toute preuve produite tardivement. Lesdites pièces ont ainsi été déclarées irrecevables.

13      La chambre de recours a, néanmoins, indiqué, au point 41 de la décision attaquée, que, en tout état de cause, aucun des documents produits tardivement devant elle ne fournissait d’informations sur la part de marché détenue par les marques antérieures non enregistrées ou sur la partie de la section pertinente du public qui, en raison des marques, identifiait les produits en cause comme provenant de l’entreprise de la requérante avant la date de dépôt de la demande de marque communautaire contestée. Elle a déclaré qu’aucun chiffre n’avait été apporté concernant les ventes ou les dépenses de publicité et que les preuves produites par la requérante ne contenaient aucune indication quant au degré de connaissance ou de reconnaissance de la marque dans le secteur pertinent du public.

 Conclusions des parties

14      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens ou, dans le cas où l’autre partie à la procédure interviendrait au litige au soutien de l’OHMI, condamner solidairement l’OHMI et l’intervenante aux dépens.

15      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité du renvoi global par la requérante aux arguments présentés par écrit lors de la procédure devant l’OHMI

16      L’OHMI fait valoir que le renvoi par la requérante de manière générale à l’ensemble des arguments qu’elle avait présentés par écrit lors de la procédure administrative est irrecevable.

17      En vertu de l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, la requête doit contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Selon une jurisprudence bien établie, si le corps de la requête peut être étayé et complété, sur des points spécifiques, par des renvois à des extraits de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit, qui, en vertu des dispositions rappelées ci-dessus, doivent figurer dans la requête elle-même [voir arrêt du 8 juillet 2010, Engelhorn/OHMI – The Outdoor Group (peerstorm), T‑30/09, Rec, EU:T:2010:298, point 18 et jurisprudence citée].

18      Lors de l’audience, la requérante a précisé, en réponse à une question du Tribunal, que le renvoi qu’elle faisait à certaines occurrences de la requête ne devait pas être interprété comme étant un renvoi global, mais que son argumentation était seulement limitée aux points spécifiques développés dans la requête. À la lumière de ces précisions, il y a lieu de considérer que la fin de non-recevoir soulevée par l’OHMI doit être rejetée.

 Sur la recevabilité des griefs dirigés à l’encontre de la décision de la division d’opposition

19      L’OHMI soutient que les contestations de la requérante à l’encontre des constatations effectuées par la division d’opposition devraient être déclarées irrecevables.

20      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 65, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, le recours devant le juge de l’Union européenne n’est ouvert qu’à l’encontre des seules décisions des chambres de recours, en sorte que, dans le cadre d’un tel recours, ne sont recevables que des moyens dirigés contre la décision de la chambre de recours même [arrêt du 7 juin 2005, Lidl Stiftung/OHMI – REWE-Zentral (Salvita), T‑303/03, Rec, EU:T:2005:200, point 59].

21      Lors de l’audience, la requérante a précisé, en réponse à une question du Tribunal, que la requête devait être interprétée en ce sens que les griefs qui y étaient énoncés étaient uniquement dirigés à l’encontre de la décision attaquée. Il s’ensuit que, dans cette mesure, la fin de non-recevoir soulevée par l’OHMI doit être rejetée.

 Sur la recevabilité des nouveaux éléments de preuve soumis par la requérante devant le Tribunal

22      La requérante a joint à la requête devant le Tribunal un nouvel élément de preuve consistant en une déclaration écrite sous serment du maire de la commune de Pesaro (Italie), déclaration qui serait, selon l’OHMI, irrecevable.

23      À cet égard, il convient de rappeler que le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 65 du règlement n° 207/2009. Dès lors, la fonction du Tribunal n’est pas celle de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui [arrêts du 19 novembre 2008, Rautaruukki/OHMI (RAUTARUUKKI), T‑269/06, EU:T:2008:512, point 20, et du 25 juin 2010, MIP Metro/OHMI – CBT Comunicación Multimedia (Metromeet), T‑407/08, Rec, EU:T:2010:256, point 16]. Il s’ensuit que des faits non invoqués par les parties devant les instances de l’OHMI ne peuvent plus l’être au stade du recours introduit devant le Tribunal (voir arrêt du 13 mars 2007, OHMI/Kaul, C‑29/05 P, Rec, EU:C:2007:162, point 54 et jurisprudence citée).

24      Au demeurant, il y a lieu de constater que, en réponse à une question posée par le Tribunal, la requérante n’a pas contesté que le maire de Pesaro, qui était maire depuis 2004, aurait pu établir, lors de la procédure administrative, à la demande de la requérante, une attestation, laquelle, bien que différente en raison des dates qui y sont mentionnées et qui sont postérieures à la date de la procédure administrative, aurait néanmoins été analogue à celle établie dans le cadre du présent recours.

25      Dans ces conditions, il convient, ainsi que le fait valoir l’OHMI, de déclarer irrecevable l’annexe mentionnée au point 22 ci-dessus qui n’a pas été produite par la requérante dans le cadre de la procédure administrative.

 Sur le fond

26      La requérante invoque, en substance, deux moyens à l’encontre de la décision attaquée : le premier moyen est tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 207/2009, lu en combinaison avec l’article 6 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, du 20 mars 1883, révisée en dernier lieu à Stockholm le 14 juillet 1967 et modifiée le 28 septembre 1979 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 828, n° 11847, p. 108, ci-après la « convention de Paris »), et le second moyen est tiré de la violation de la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement n° 2868/95.

27      Lors de l’audience, la requérante a soulevé un nouveau moyen, tiré de l’absence de motivation concernant l’insuffisance des preuves déposées devant la chambre de recours et relatives à la notoriété des marques antérieures non enregistrées en Italie, en sorte qu’elle aurait été dans l’incapacité de connaître les raisons pour lesquelles ces pièces supplémentaires ne permettaient pas de démontrer ladite notoriété.

28      Il y a lieu d’examiner, en premier lieu, le moyen nouveau, tiré de la violation de l’obligation de motivation, en deuxième lieu, le moyen tiré de la violation de la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement n° 2868/95 et, en troisième lieu, le moyen tiré de de la violation de l’article 8, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 207/2009, lu en combinaison avec l’article 6 bis de la convention de Paris.

 Sur le moyen nouveau, tiré de la prétendue violation de l’obligation de motivation

29      Lors de l’audience, la requérante a prétendu que la chambre de recours avait violé l’obligation de motivation en n’indiquant pas précisément les raisons pour lesquelles les pièces déposées devant ladite chambre étaient insuffisantes aux fins de démontrer la notoriété des marques antérieures non enregistrées en Italie.

30      Bien que ce moyen nouveau ait été soulevé lors de l’audience, il convient de rappeler, d’une part, qu’une insuffisance de motivation de nature à méconnaître l’article 296, deuxième alinéa, TFUE relève de la violation des formes substantielles au sens de l’article 263 TFUE et constitue d’ailleurs un moyen pouvant, voire devant, être soulevé d’office par le juge de l’Union (voir arrêt du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, C‑413/06 P, Rec, EU:C:2008:392, point 174 et jurisprudence citée ; arrêt du 27 septembre 2012, J/Parlement, T‑160/10, EU:T:2012:503, point 17).

31      D’autre part, en vertu de l’article 75, première phrase, du règlement n° 207/2009, les décisions de l’OHMI doivent être motivées. Selon la jurisprudence, cette obligation a la même portée que celle consacrée par l’article 296, deuxième alinéa, TFUE et son objectif est de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision [arrêts du 6 septembre 2012, Storck/OHMI, C‑96/11 P, EU:C:2012:537, point 86, et du 15 juillet 2014, Łaszkiewicz/OHMI – Capital Safety Group EMEA (PROTEKT), T‑576/12, EU:T:2014:667, point 76].

32      Par ailleurs, il ne saurait être exigé des chambres de recours qu’elles fournissent un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés par les parties devant elles. La motivation peut donc être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (voir arrêt PROTEKT, point 31 supra, EU:T:2014:667, point 77 et jurisprudence citée).

33      En outre, il convient de relever que la chambre de recours n’est pas obligée de prendre position sur tous les arguments avancés par les parties. Il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision. Il s’ensuit que la circonstance que la chambre de recours n’a pas repris l’ensemble des arguments d’une partie ou n’a pas répondu à chacun de ces arguments ne permet pas, à elle seule, de conclure que la chambre de recours a refusé de les prendre en considération (voir arrêt PROTEKT, point 31 supra, EU:T:2014:667, point 78 et jurisprudence citée).

34      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, au point 41 de la décision attaquée (voir point 13 ci-dessus), tout d’abord, que les nouvelles preuves ne fournissaient aucune information sur la part de marché détenue par les marques en cause ou sur la partie de la section pertinente du public qui, en raison des marques, identifiait les produits en cause comme provenant de l’entreprise de la requérante avant la date de dépôt de la demande de marque contestée, ensuite, qu’aucun chiffre n’avait été apporté concernant les ventes ou les dépenses de publicité et, enfin, que les preuves produites ne contenaient aucune indication du degré de connaissance ou de reconnaissance de la marque dans le secteur pertinent du public.

35      Force est de constater que, sans préjudice du bien-fondé des motifs énoncés au point 41 de la décision attaquée, qui seront examinés dans le cadre de l’examen du premier moyen, ces considérations sont suffisamment précises pour permettre à la requérante de comprendre les raisons pour lesquelles les pièces déposées devant la chambre de recours étaient insuffisantes aux fins de démontrer la notoriété des marques antérieures non enregistrées en Italie et au Tribunal d’exercer son contrôle de légalité à l’égard de la décision attaquée.

36      Il s’ensuit que le moyen nouveau tiré de la violation de l’obligation de motivation doit être rejeté.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement n° 2868/95

37      La requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir déclaré irrecevables les documents qu’elle avait déposés devant elle le 14 mars 2012, au motif qu’ils avaient été transmis hors des délais péremptoires prévus par les règles 19, paragraphe 4, et 20, paragraphe 1, du règlement n° 2868/95, alors que ces documents auraient dû être considérés comme des preuves supplémentaires au sens de la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, dudit règlement.

38      À cet égard, il convient de relever que la chambre de recours a rappelé, au point 37 de la décision attaquée, que, s’agissant de l’article 76 du règlement n° 207/2009, la Cour avait jugé que, en règle générale et sauf disposition contraire, la présentation de faits et de preuves par les parties demeurait possible après l’expiration des délais auxquels se trouvait subordonnée une telle présentation en application des dispositions de ce même règlement et qu’il n’était nullement interdit à l’OHMI de tenir compte de faits et de preuves ainsi tardivement invoqués ou produits, en sorte que celui-ci jouissait d’un large pouvoir d’appréciation à l’effet de décider s’il y avait lieu ou non de prendre ceux-ci en compte.

39      La chambre de recours a considéré, au point 38 de la décision attaquée, que la règle 19, paragraphe 4, et la règle 20, paragraphe 1, du règlement n° 2868/95 étaient précisément des dispositions contraires qui faisaient donc obstacle à ce que l’OHMI dispose d’un pouvoir d’appréciation. Au point 39 de ladite décision, la chambre de recours a déduit de l’interprétation desdites règles que ces dernières excluaient la prise en compte de toute preuve produite tardivement. La chambre de recours a donc conclu, au point 40 de cette décision, que les documents qui avaient été présentés devant elle par la requérante étaient irrecevables.

40      Force est de constater que cette interprétation de la règle 19, paragraphe 4, et de la règle 20, paragraphe 1, du règlement n° 2868/95 est erronée.

41      Il est, certes, exact que l’article 76, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 dispose que l’OHMI peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile.

42      Ainsi que l’a jugé la Cour, il découle du libellé de cette disposition que, en règle générale et sauf disposition contraire, la présentation de faits et de preuves par les parties demeure possible après l’expiration des délais auxquels se trouve subordonnée une telle présentation, en application des dispositions dudit règlement, et qu’il n’est nullement interdit à l’OHMI de tenir compte de faits et de preuves ainsi tardivement invoqués ou produits (arrêts OHMI/Kaul, point 23 supra, EU:C:2007:162, point 42 ; du 18 juillet 2013, New Yorker SHK Jeans/OHMI, C‑621/11 P, Rec, EU:C:2013:484, point 22, et du 3 octobre 2013, Rintisch/OHMI, C‑122/12 P, Rec, EU:C:2013:628, point 23).

43      En outre, si la règle 50, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 2868/95 prévoit également que, sauf disposition contraire, les dispositions relatives aux procédures devant l’instance qui a rendu la décision attaquée sont applicables mutatis mutandis à la procédure de recours, le troisième alinéa de cette même disposition constitue une règle spéciale dérogeant à ce principe. Cette règle spéciale est propre à la procédure de recours contre la décision de la division d’opposition et précise le régime, devant la chambre de recours, des faits et des preuves présentés après l’expiration des délais fixés ou précisés en première instance (arrêt Rintisch/OHMI, point 42 supra, EU:C:2013:628, point 29).

44      Ainsi, la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement n° 2868/95 doit donc être appliquée, sur ce point particulier de la procédure de recours contre la décision de la division d’opposition, en lieu et place des dispositions relatives à la procédure devant ladite division, au nombre desquelles figurent la règle 19, paragraphe 4, et la règle 20, paragraphe 1, du règlement n° 2868/95 (voir, en ce sens, arrêt Rintisch/OHMI, point 42 supra, EU:C:2013:628, point 30).

45      Par ailleurs, ainsi que la Cour l’a rappelé au point 31 de l’arrêt Rintisch/OHMI, point 42 supra (EU:C:2013:628), la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement n° 2868/95 a été introduite dans ce dernier règlement lors de la modification de celui-ci par le règlement (CE) n° 1041/2005 de la Commission, du 29 juin 2005 (JO L 172, p. 4), qui, selon son considérant 7, vise notamment à clarifier les conséquences juridiques des irrégularités procédurales intervenues au cours des procédures d’opposition. Ce constat confirme que les conséquences attachées, devant la chambre de recours, au retard observé dans l’administration de la preuve devant la division d’opposition doivent être déterminées sur la base de ladite règle.

46      La Cour a, en outre, poursuivi, aux points 32 à 34 de l’arrêt Rintisch/OHMI, point 42 supra (EU:C:2013:628), en ces termes :

« 32      Or, aux termes de la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement [n° 2868/95], lorsque le recours est dirigé contre une décision d’une division d’opposition, la chambre de recours limite l’examen du recours aux faits et aux preuves présentés dans les délais fixés ou précisés par la division d’opposition, à moins qu’elle ne considère que des faits et des preuves nouveaux ou supplémentaires doivent être pris en compte conformément à l’article [76], paragraphe 2, du règlement n° [207/2009].

33      Le règlement [n° 2868/95] prévoit donc, expressément, que la chambre de recours dispose, lors de l’examen d’un recours dirigé contre une décision d’une division d’opposition, du pouvoir d’appréciation découlant de la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement [n° 2868/95] et de l’article [76], paragraphe 2, du règlement n° [207/2009] à l’effet de décider s’il y a lieu ou non de prendre en compte des faits et des preuves nouveaux ou supplémentaires qui n’ont pas été présentés dans les délais fixés ou précisés par la division d’opposition.

34      Par conséquent, en jugeant, au point 42 de l’arrêt attaqué, que la règle 20, paragraphe 1, du règlement [n° 2868/95] constituait une disposition contraire s’opposant à la prise en compte, par la chambre de recours, des éléments présentés tardivement par le requérant devant l’OHMI, avec pour conséquence que cette chambre ne disposait d’aucune marge d’appréciation fondée sur l’article [76], paragraphe 2, du règlement n° [207/2009] aux fins de la prise en compte de ces éléments, le Tribunal a entaché son arrêt d’une erreur de droit. »

47      Il résulte ainsi des considérations qui précèdent que la chambre de recours a commis une erreur en considérant, au point 38 de la décision attaquée, qu’elle ne disposait d’aucun pouvoir d’appréciation quant à la prise en compte de faits et de preuves présentés tardivement.

48      Toutefois, il ressort clairement du point 41 de la décision attaquée que la chambre de recours n’a pas seulement recherché si, en l’occurrence, elle pouvait exercer son pouvoir d’appréciation, à savoir, ainsi qu’il résulte, notamment du point 39 de l’arrêt Rintisch/OHMI, point 42 supra (EU:C:2013:628), considérer que les éléments tardivement produits sont de prime abord susceptibles de revêtir une réelle pertinence en ce qui concerne le sort de l’opposition formée devant elle ainsi que le stade de la procédure auquel intervient cette production tardive et les circonstances qui l’entourent. La chambre de recours a également procédé à l’examen de la pertinence de l’ensemble des éléments produits par la requérante, y compris ceux déposés devant elle, pour conclure à l’absence de preuve quant à la notoriété des marques antérieures non enregistrées.

49      En effet, la chambre de recours a indiqué, au point 41 de la décision attaquée, que, « [e]n tout état de cause, aucun des documents produits tardivement devant la chambre ne [fournissait] d’informations sur la part de marché détenue par les marques en question ou sur la partie de la section pertinente du public qui, en raison des marques, [identifiait] les produits en cause comme provenant de l’entreprise de [la requérante] avant la date de dépôt de la demande de marque communautaire contestée », qu’« [a]ucun chiffre n’[avait] été apporté concernant les ventes ou les dépenses de publicité » et que « [l]es preuves produites par [la requérante] ne [contenaient] aucune indication du degré de connaissance ou de reconnaissance de la marque dans le secteur pertinent du public ».

50      Il s’ensuit que la chambre de recours, ayant examiné la pertinence des documents, le grief de la requérante est inopérant.

51      Il résulte des considérations qui précèdent que le second moyen doit être rejeté.

 Sur le premier moyen, tiré de de la violation de l’article 8, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 207/2009, lu en combinaison avec l’article 6 bis de la convention de Paris

52      L’article 8, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 207/2009 inclut dans la notion de marque antérieure les marques notoirement connues au sens de l’article 6 bis de la convention de Paris.

53      L’article 6 bis, paragraphe 1, de la convention de Paris est rédigé ainsi :

« Les pays de l’Union [pour la protection de la propriété industrielle] s’engagent, soit d’office si la législation du pays le permet, soit à la requête de l’intéressé, à refuser ou à invalider l’enregistrement et à interdire l’usage d’une marque de fabrique ou de commerce qui constitue la reproduction, l’imitation ou la traduction, susceptibles de créer une confusion, d’une marque que l’autorité compétente du pays de l’enregistrement ou de l’usage estimera y être notoirement connue comme étant déjà la marque d’une personne admise à bénéficier de la présente Convention et utilisée pour des produits identiques ou similaires […] »

54      Il résulte de cette disposition que les marques notoirement connues au sens de l’article 6 de la convention de Paris sont des marques qui bénéficient d’une protection contre le risque de confusion, et ce sur le fondement de leur notoriété dans le ressort territorial en cause et indépendamment de la production, ou non, d’une preuve d’enregistrement [arrêt du 11 juillet 2007, Mülhens/OHMI – Minoronzoni (TOSCA BLU), T‑150/04, Rec, EU:T:2007:214, point 51].

55      Dès lors que l’article 8, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 207/2009 renvoie aux marques « notoirement connues dans un État membre au sens de l’article 6 bis de la convention de Paris », il y a lieu, afin de déterminer comment la preuve de l’existence d’une marque notoirement connue peut être rapportée, de se référer aux directives d’interprétation de cet article 6 bis [arrêt du 17 juin 2008, El Corte Inglés/OHMI – Abril Sánchez et Ricote Saugar (BoomerangTV), T‑420/03, Rec, EU:T:2008:203, point 79].

56      Selon l’article 2 de la recommandation commune concernant les dispositions relatives à la protection des marques notoires, adoptée par l’assemblée de l’Union de Paris et l’assemblée générale de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) à la 34e série de réunions des assemblées des États membres de l’OMPI (du 20 au 29 septembre 1999, ci-après la « recommandation commune »), pour déterminer si une marque est notoire au sens de la convention de Paris, l’autorité compétente peut prendre en compte toute circonstance permettant de déduire la notoriété, dont notamment le degré de connaissance ou de reconnaissance de la marque dans le secteur concerné du public ; la durée, l’étendue et l’aire géographique de toute utilisation de la marque ; la durée, l’étendue et l’aire géographique de toute promotion de la marque, y compris la publicité et la présentation, lors de foires ou d’expositions, des produits ou des services auxquels la marque s’applique ; la durée et l’aire géographique de tout enregistrement, ou demande d’enregistrement, de la marque dans la mesure où elles reflètent l’utilisation ou la reconnaissance de la marque ; la sanction efficace des droits sur la marque, en particulier la mesure dans laquelle la marque a été reconnue comme notoire par les autorités compétentes ; la valeur associée à la marque (arrêt BoomerangTV, point 55 supra, EU:T:2008:203, point 79).

57      L’article 2, paragraphe 1, sous c), de la recommandation commune précise que les facteurs énumérés au point 56 ci-dessus sont des « indications visant à aider l’autorité compétente à déterminer si la marque est notoire et [que ces facteurs] ne sont pas des conditions prédéfinies permettant de parvenir à une conclusion », que « [l]a conclusion dépendra des circonstances de l’espèce », que « [d]ans certains cas, tous ces facteurs pourront être pertinents », que « [d]ans d’autres cas encore, aucun des facteurs énumérés ne sera pertinent et la décision pourra être fondée sur d’autres facteurs qui ne sont pas énumérés [au point 56] ci-dessus » et que « [c]es autres facteurs pourront être pertinents en soi ou en association avec un ou plusieurs des facteurs énumérés [au point 56] ci-dessus ».

58      Par ailleurs, la Cour ayant considéré, dans l’arrêt du 22 novembre 2007, Nieto Nuño (C‑328/06, Rec, EU:C:2007:704, point 17), que la notoriété était une notion voisine de celle de renommée, il y a lieu de prendre en considération les critères d’appréciation énoncés par la Cour et qui sont relatifs à la renommée, notion qui figure à l’article 5, paragraphe 2, de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO L299, p. 25), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

59      À cet égard, il convient de déduire de l’arrêt du 14 septembre 1999, General Motors (C‑375/97, Rec, EU:C:1999:408), que ni la lettre ni l’esprit de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 n’autorisent à exiger que la marque soit connue d’un pourcentage déterminé du public ainsi défini. Le degré de connaissance requis doit être considéré comme atteint lorsque la marque antérieure est connue d’une partie significative du public concerné par les produits ou services couverts par cette marque. Dans l’examen de cette condition, le juge national doit prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, à savoir, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de son usage, ainsi que l’importance des investissements réalisés par l’entreprise pour la promouvoir. Par ailleurs, au plan territorial, la condition est remplie lorsque, conformément aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, la marque jouit d’une renommée « dans l’État membre ». En l’absence de précision en ce sens de cette dernière disposition, il ne peut être exigé que la renommée existe dans « tout » le territoire de l’État membre. Il suffit qu’elle existe dans une partie substantielle de celui-ci (voir, en ce sens, arrêt General Motors, précité, EU:C:1999:408, points 25 à 28).

60      Par ailleurs, si, conformément à la recommandation commune, ainsi que le fait valoir la requérante, l’usage de la marque non enregistrée ne doit pas être démontrée sur le territoire sur lequel la protection est invoquée, en revanche, il ne saurait être valablement contesté que la marque non enregistrée doit bénéficier d’une notoriété sur le territoire de l’État membre dont le droit national est invoqué au soutien de l’opposition.

61      C’est donc dans ce cadre qu’il convient de déterminer si c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les marques antérieures non enregistrées n’étaient pas notoirement connues en Italie.

62      À cet égard, il convient de vérifier si, avant le dépôt de la demande d’enregistrement de la marque, soit avant le 29 décembre 2009, les marques antérieures non enregistrées étaient notoirement connues en Italie, c’est-à-dire, conformément à la jurisprudence mentionnée au point 59 ci-dessus, qu’elles étaient connues d’une partie significative du public concerné par les produits ou services couverts par lesdites marques.

63      Ainsi que le relève à juste titre l’OHMI, la connaissance d’une marque sur un marché considéré est généralement démontrée par des études de marché quant à la perception de ladite marque par le public pertinent. En l’occurrence, le dossier présenté par la requérante ne comporte aucune étude de marché permettant de déduire la perception dudit public.

64      Il ne saurait, toutefois, être déduit de la seule absence de toute étude de marché que la requérante ne peut pas démontrer par un autre moyen la notoriété des marques antérieures non enregistrées.

65      Or, la requérante a versé au dossier différents documents qui, selon elle, seraient de nature à démontrer la notoriété des marques antérieures non enregistrées.

66      Il convient donc d’examiner ces documents afin de déterminer si la preuve de la notoriété desdites marques non enregistrées a été rapportée par la requérante.

67      À titre liminaire, il convient d’écarter, aux fins de la preuve du caractère notoire desdites marques, les éléments de preuve qui sont postérieurs à la date de la demande d’enregistrement de la marque communautaire et qui ne se rapportent pas à des événements qui se situent avant ladite date.

68      Par ailleurs, s’agissant des éléments de preuve qui sont rédigés dans une langue autre que la langue de procédure, il convient de rappeler les observations que le Tribunal a déjà effectuées dans l’arrêt du 27 juin 2012, Interkobo/OHMI – XXXLutz Marken (my baby) (T‑523/10, Rec, EU:T:2012:326).

69      Il résulte de la règle 20, paragraphe 1, de la règle 19 et de la règle 98, paragraphe 1, du règlement n° 2868/95 que, lorsque les informations et les preuves visées à la règle 19, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 2868/95 sont présentées dans une langue autre que celle de procédure, l’opposant est tenu de produire, au stade de la procédure d’opposition, dans le délai imparti pour la production de ces informations et preuves, une traduction de celles‑ci, laquelle doit répondre à des exigences précises quant à sa forme et à son contenu (arrêt my baby, point 68 supra, EU:T:2012:326, point 23).

70      En premier lieu, la règle 19, paragraphe 3, du règlement n° 2868/95 dispose que les informations et preuves n’ayant pas été présentées dans la langue de procédure sont « accompagnées » d’une traduction. Quant à la règle 98, paragraphe 1, de ce règlement, elle prévoit que la traduction « identifie » le document auquel elle se réfère et en reproduit notamment la « structure ». Combinées, ces deux règles indiquent, en particulier, que la traduction d’une des informations ou preuves visées à la règle 19, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 2868/95 doit être présentée sous la forme, non de simples annotations dans le document original, mais d’un ou plusieurs écrits distincts de celui-ci. Dans l’hypothèse où cette exigence formelle ne serait pas respectée, les informations et les preuves susmentionnées, produites par l’opposant, ne sauraient être prises en compte dans le cadre de la procédure d’opposition (arrêt my baby, point 68 supra, EU:T:2012:326, point 24).

71      Ladite exigence formelle vise, d’une part, à ce que l’autre partie à la procédure d’opposition, de même que les instances de l’OHMI, puissent faire aisément le départ entre le document original et sa traduction, d’autre part, à ce que cette dernière présente un degré suffisant de clarté. Autrement dit, l’objectif est, notamment, de permettre que le débat entre les parties à la procédure d’opposition s’engage sur des fondements assurés, conformément au principe du contradictoire et de l’égalité des armes (voir arrêt my baby, point 68 supra, EU:T:2012:326, point 25 et jurisprudence citée).

72      En second lieu, il ressort de la règle 98, paragraphe 1, du règlement n° 2868/95, interprétée à la lumière des considérations énoncées au point précédent, que la traduction, présentée ainsi qu’il vient d’être dit sous la forme d’un écrit distinct, doit reproduire fidèlement le contenu du document original. En cas de doute quant à son caractère fidèle, les instances de l’OHMI sont en droit d’exiger de la partie intéressée la production d’une attestation de conformité de la traduction au texte original (arrêt my baby, point 68 supra, EU:T:2012:326, point 26).

73      Il résulte des considérations figurant aux points 69 à 72 ci-dessus que les éléments de preuve qui sont rédigés dans une langue autre que la langue de procédure ne sauraient être pris en considération.

74      S’agissant des autres documents produits dans le cadre de la procédure administrative, il convient de constater que, nonobstant le nombre important de documents fournis, ceux-ci ne démontrent pas que les marques antérieures non enregistrées sont notoirement connues en Italie.

75      À supposer même, ainsi que le prétend la requérante, qu’il ne saurait être exigé, aux fins de la preuve de la notoriété des marques antérieures non enregistrées, la preuve d’un usage de ces dernières, il n’empêche que les éléments de preuve fournis par la requérante dans le cadre de la procédure administrative ne permettent nullement de déterminer si lesdites marques sont notoirement connues du public pertinent.

76      À titre liminaire, il y a lieu de relever que le point 2.3 des notes explicatives relatives à l’article 2 de la recommandation commune précise :

« Le degré de connaissance ou de reconnaissance d’une marque peut être déterminé au moyen d’enquêtes auprès des consommateurs et de sondages d’opinion. Le point à l’examen vise ce genre de procédé, sans fixer de normes quant aux méthodes à utiliser ou aux résultats quantitatifs à obtenir ».

77      Or, aucun des documents que la requérante a déposés dans le cadre de la procédure administrative ne permettent de connaître le degré de connaissance des marques antérieures non enregistrées par le public pertinent.

78      À cet égard, les observations faites tant par la division d’opposition, et qui figurent au point 14 de la décision attaquée, que par la chambre de recours et qui figurent aux points 30 à 35 et 40 de ladite décision, ne peuvent qu’être entérinées. Or, la requérante n’a pas jugé utile de préciser les raisons pour lesquelles les éléments de preuve auraient été, à tort, considérés par la chambre de recours comme étant en eux-mêmes insuffisants. Ainsi, elle n’a pas indiqué les raisons pour lesquelles la chambre de recours aurait commis une erreur en refusant de prendre en considération les éléments de preuve postérieurs au 29 décembre 2009, date de la demande d’enregistrement de la marque communautaire, les éléments de preuve rédigés dans une langue autre que la langue de procédure, les éléments de preuve non datés ainsi que ceux qui ne contenaient aucune information sur les marques figuratives antérieures non enregistrées.

79      Ainsi, force est de constater que le seul fait que la requérante a fait parvenir dans le cadre de la procédure administrative, ainsi qu’elle l’affirme elle-même, plus de 40 pièces en annexe, est indifférent aux fins de la démonstration du caractère notoire des marques antérieures non enregistrées, cette preuve dépendant non du volume des documents annexés, d’autant plus lorsque ces documents ne font aucune référence à l’une quelconque desdites marques antérieures figuratives (mais à la marque Benelli), mais de la qualité et de la pertinence des documents qui doivent permettre à la requérante de prouver cette notoriété, le caractère notoire d’une marque non enregistrée ne pouvant être uniquement présumé sur la base d’éléments fragmentaires et insuffisants.

80      Au demeurant, s’agissant, en particulier, de la prétendue participation de la requérante au salon annuel EICMA, qui serait extrêmement connu, s’il est vrai que cette participation est un élément important dans le cadre de la notoriété, force est de constater que le document que la requérante a annexé en tant que preuve de sa participation audit salon est, ainsi que l’a relevé la division d’opposition et qui a été entériné par la chambre de recours, une publicité pour l’édition 2010 dudit salon, donc postérieur à la demande d’enregistrement de la marque communautaire, publicité qui ne comporte, en outre, aucune indication des marques antérieures non enregistrées pas plus d’ailleurs que de la marque verbale Motobi.

81      Si, effectivement, l’annexe suivante, qui concerne apparemment un article sur le salon EICMA, mentionne tant Benelli que Motobi, elle date également de 2010, donc postérieure à la date de la demande d’enregistrement de la marque communautaire et ne mentionne nullement les marques antérieures non enregistrées prétendument notoires, qui sont des marques figuratives.

82      S’agissant, enfin, de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’a pas effectué une appréciation globale, mais a séparé les divers éléments soumis à son appréciation, il est exact qu’il ne peut être exclu qu’un faisceau d’éléments de preuve permette d’établir les faits à démontrer, alors même que chacun de ces éléments, pris isolément, serait impuissant à rapporter la preuve de l’exactitude de ces faits (arrêt du 17 avril 2008, Ferrero Deutschland/OHMI, C‑108/07 P, EU:C:2008:234, point 36).

83      Force est, toutefois, de constater que, en l’espèce, l’appréciation globale de l’ensemble des éléments de preuve soumis par la requérante ne permet pas davantage de considérer que la preuve de la notoriété des marques antérieures non enregistrées a été rapportée.

84      Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté ainsi que le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

85      Il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête:

1)      Le recours est rejeté.

2)      Benelli Q. J. Srl est condamnée aux dépens.

Martins Ribeiro

Gervasoni

Madise

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 2 février 2016.

Signatures


** Langue de procédure : l’anglais.