Language of document : ECLI:EU:T:2016:250

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

28 avril 2016 (*)

« Marque de l’Union européenne – Demande de marque de l’Union européenne figurative Liiga – Motifs absolus de refus – Caractère descriptif – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b) et c), et paragraphe 2, du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑54/15,

Jääkiekon SM-liiga Oy, établie à Helsinki (Finlande), représentée par Me L. Laaksonen, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. A. Schifko et Mme E. Śliwińska, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 1er décembre 2014 (affaire R 576/2014-2), concernant une demande d’enregistrement du signe figuratif Liiga comme marque de l’Union européenne,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. D. Gratsias (rapporteur), président, Mme M. Kancheva et M. C. Wetter, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 2 février 2015,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 20 mai 2015,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 9 août 2013, la requérante, Jääkiekon SM-liiga Oy, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’ l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 9, 16, 25, 28, 29, 30, 32, 33, 39, 41 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

4        Par décision du 3 janvier 2014, l’examinateur a partiellement rejeté la demande d’enregistrement de la marque demandée, motif pris de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), et paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, pour autant que cette marque visait les « jeux, jouets ; articles de gymnastique et de sport non compris dans d’autres classes », relevant de la classe 28, ainsi que les « activités sportives », relevant de la classe 41.

5        Le 19 février 2014, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, contre la décision de l’examinateur.

6        Par décision du 1er décembre 2014, la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté ce recours (ci-après la « décision attaquée ») au motif que la marque demandée tombait sous le coup des interdictions visées à l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), et paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 (points 11 à 18 de la décision attaquée).

7        À l’appui de cette conclusion, tout d’abord, la chambre de recours a souligné que l’élément verbal de la marque demandée serait lu par le public pertinent, composé des consommateurs moyens finnophones, comme « liiga » en finnois, à savoir une division de sport de compétition. La marque demandée présenterait donc un rapport clair et direct avec la « catégorie, la qualité et la destination » des produits et des services litigieux. Ensuite, la chambre de recours a observé que les éléments figuratifs de la marque demandée, à savoir la légère stylisation des lettres et le fond circulaire foncé, étaient banals et incapables de détourner l’attention du consommateur du message descriptif émis par l’élément verbal, de sorte qu’ils étaient dépourvus de caractère distinctif. Dans ce contexte, ils seraient perçus comme le fond de ce message, si bien que la marque demandée devrait être considérée comme descriptive et, de ce fait, dépourvue de caractère distinctif pour les produits et les services litigieux au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 207/2009. Enfin, la chambre de recours a rejeté les arguments de la requérante tirés de l’enregistrement d’autres marques par le passé.

 Conclusions des parties

8        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée et permettre l’enregistrement de la marque demandée pour les services à l’égard desquels elle a été rejetée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

9        L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

10      À l’appui de recours, la requérante soulève, en substance, un moyen unique, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 207/2009.

11      L’EUIPO fait valoir que la conclusion relative à l’enregistrement de la marque demandée est irrecevable et conteste, au demeurant, le bien-fondé du recours.

12      Dans ce cadre, la requérante fait valoir que, si la marque fait apparaître le mot « liiga », ce dernier est fortement stylisé, de manière à rappeler une écriture manuscrite en partie grisée sur un fond noir. En outre, les lettres basculeraient en diagonal, la lettre « g » serait dotée d’un jambage se prolongeant horizontalement, la lettre « l » serait stylisée de manière à pouvoir être perçue comme le chiffre 1 ou comme un « l » et, enfin, la diphtongue « ii » pourrait être perçue comme la lettre « ü ». La marque serait donc susceptible d’être lue comme « liiga », « lüga », « 1iiga » ou bien « 1üga ». Ainsi, bien que la marque demandée puisse être perçue, au premier chef, comme étant descriptive, la stylisation de son élément verbal ainsi que les éléments figuratifs ajoutés lui conféreraient un caractère distinctif et la rendraient apte à exercer la fonction essentielle d’une marque.

13      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation de services, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci.

14      L’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 énonce, pour sa part, que le paragraphe 1 de ce même article est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union européenne.

15      Selon la jurisprudence, l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 empêche que les signes ou les indications visés par lui soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque. Cette disposition poursuit ainsi un but d’intérêt général, lequel exige que de tels signes ou indications puissent être librement utilisés par tous (arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, Rec, EU:C:2003:579, point 31).

16      En outre, des signes ou des indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques du produit ou du service pour lequel l’enregistrement est demandé sont, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix, si l’expérience s’avère positive, ou de faire un autre choix, si elle s’avère négative (arrêt OHMI/Wrigley, point 15 supra, EU:C:2003:579, point 30).

17      L’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport à la perception qu’en a le public concerné et, d’autre part, par rapport aux produits ou aux services concernés [arrêt du 7 juillet 2011, Cree/OHMI (TRUEWHITE), T‑208/10, EU:T:2011:340, point 17].

18      Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par cette disposition, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques (arrêt TRUEWHITE, point 17 supra, EU:T:2011:340, point 18).

19      En l’espèce, il n’est pas contesté que le public pertinent est composé du consommateur moyen finnophone.

20      En outre, la requérante ne conteste pas que la langue finnoise ne connaît pas la lettre « ü », si bien qu’il est très improbable pour le consommateur finlandais de lire la marque demandée comme « lüga ».

21      Dans ce contexte, ainsi que l’admet par ailleurs la requérante, l’interprétation que retiendra au premier chef le consommateur relevant du public ciblé est celle de la division d’un sport de compétition, à savoir un championnat, qui est le sens du mot « liiga » en finnois. En revanche, il est bien moins probable que le même consommateur lise ce mot d’une manière qui ne lui attribue aucun sens. Par conséquent, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a estimé, aux points 13 et 14 de la décision attaquée, que la marque demandée transmettait un message clair et direct se rapportant à tout le moins à la destination des produits et des services litigieux. En effet, tant les jeux et les jouets que, à plus forte raison, les articles de gymnastique et de sport peuvent être en rapport direct avec une division d’un sport de compétition, un championnat. Il en est, de toute évidence, de même des services relatifs aux activités sportives.

22      C’est également sans commettre d’erreur que la chambre de recours a estimé, aux points 15 et 16 de la décision attaquée, que les éléments de stylisation de la marque demandée n’infirmaient pas son caractère descriptif. En effet, s’agissant de la stylisation de l’élément verbal de la marque, celle-ci se limite à attribuer une apparence manuscrite au mot « liiga », qui reste pourtant facilement lisible. En outre, compte tenu de sa configuration simple et abstraite, la forme circulaire noire placée derrière l’élément verbal de la marque est perçue comme un fond, même si, comme le fait valoir la requérante, l’imagination du consommateur peut aller jusqu’à y voir un ballon ou un palet de hockey. Dans ce dernier cas, en effet, le fond ne fera que renforcer le lien de l’élément verbal de la marque demandée avec un sport particulier. Par conséquent, ainsi que l’a observé la chambre de recours, les divers éléments composant la marque demandée n’interagissent pas de manière à éclipser le rapport entre cette dernière et les caractéristiques des produits et des services au regard desquels l’enregistrement a été refusé.

23      Ainsi, appréciée dans sa globalité, la marque demandée présente un rapport suffisamment direct et concret avec les jeux, les jouets, les articles de gymnastique et de sport ainsi que les services relatifs aux activités sportives permettant au public concerné de percevoir immédiatement la destination, à tout le moins, de ces produits et de ces services lorsqu’ils sont commercialisés sous ce signe.

24      Au demeurant, une marque verbale qui est descriptive des caractéristiques de produits ou de services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, est, de ce fait, nécessairement dépourvue de caractère distinctif au regard de ces mêmes produits ou services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement [arrêt du 14 juin 2007, Europig/OHMI (EUROPIG), T‑207/06, Rec, EU:T:2007:179, point 47].

25      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a conclu, au point 18 de la décision attaquée, que, étant donné son caractère descriptif, la marque demandée était dénuée de caractère distinctif au regard des produits et des services pour lesquels l’enregistrement a été refusé. Aussi, les arguments de la requérante remettant en cause cette appréciation doivent être rejetés, dès lors qu’ils consistent en une répétition des arguments relatifs à la prétendue absence de caractère descriptif de la marque demandée.

26      Quant à l’argument tiré de ce que les chambres de recours seraient arrivées à une conclusion différente dans d’autres affaires impliquant d’autres marques, il suffit de relever que l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. Cet examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus (arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, Rec, EU:C:2011:139, point 77).

27      Or, en l’espèce, il ressort des appréciations figurant aux points 18 à 21 et 23 ci-dessus que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que la marque demandée était descriptive des produits et des services mentionnés dans ces points. Il y a donc lieu d’écarter cet argument.

28      Il ressort de ce qui précède que le recours doit être rejeté sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir soulevée par l’EUIPO.

 Sur les dépens

29      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

30      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Jääkiekon SM-liiga Oy est condamnée aux dépens.

Gratsias

Kancheva

Wetter

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 avril 2016.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.