Language of document : ECLI:EU:T:2018:925

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

13 décembre 2018 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Affectation – Décision avec effet rétroactif – Article 22 bis du statut – Autorité incompétente – Responsabilité – Réparation des dommages matériels et moraux »

Dans l’affaire T‑689/16,

Nikolaos Pipiliagkas, fonctionnaire de la Commission européenne, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté initialement par Mes J.‑N. Louis et N. de Montigny, puis par Me Louis, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par Mme C. Berardis-Kayser et M. G. Gattinara, puis par M. Gattinara et Mme L. Radu Bouyon, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant, d’une part, à l’annulation de la décision du 22 décembre 2015 du chef de l’unité « Gestion de la carrière et de la performance » de la direction générale « Ressources humaines et sécurité » de la Commission, portant sur la réaffectation rétroactive du requérant, et, d’autre part, à la réparation des préjudices matériels et moraux qu’il aurait prétendument subis,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mme V. Tomljenović (rapporteur), président, M. E. Bieliūnas et Mme A. Marcoulli, juges,

greffier : Mme M. Marescaux, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 13 septembre 2018,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Par l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne a notamment annulé la décision de la Commission européenne du 19 décembre 2012 réaffectant le requérant, M. Nikolaos Pipiliagkas, à la direction « Ressources communes » de la direction générale (DG) « Mobilité et transports », à Bruxelles (Belgique), avec effet au 1er janvier 2013 (ci-après la « décision du 19 décembre 2012 ») du fait que les droits de la défense de celui-ci avaient été violés.

2        Aux points 2 à 17 de l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), le Tribunal de la fonction publique a notamment décrit les faits de ce litige de la façon suivante :

« 2      Le requérant est fonctionnaire à la Commission. À l’époque des faits, il était classé au grade AD 11 et était initialement affecté à l’unité “Ressources financières” de la direction “Ressources communes” de la DG “Mobilité”. Par décision de l’[autorité investie du pouvoir de nomination] du 16 janvier 2012, il a été transféré à l’unité “Finances, contrats, audit” de la direction “[Politique de v]oisinage” de la DG “Développement et coopération – EuropeAid” (ci-après la “DG ‘Développement et coopération’”) et affecté comme chef de section à la délégation de la Commission en Cisjordanie et dans la bande de Gaza à Jérusalem-Est (ci-après la “délégation”), avec effet au 16 février 2012.

3      Alors qu’il exerçait ses fonctions à la tête de la section “Finances, contrats et audit” de la délégation, cette dernière a fait l’objet d’une mission d’audit de la Cour des comptes de l’Union européenne ayant pour objet le programme dénommé “Pégase DFS”. À la fin de leur mission, les auditeurs de la Cour des comptes ont signalé des inadéquations dans la gestion de ce programme. Durant la même période, le requérant a fait part à divers intervenants de ses préoccupations quant à de prétendues irrégularités dans la gestion dudit programme, de ses inquiétudes concernant les activités d’une organisation internationale titulaire de plusieurs contrats conclus avec la DG “Développement et coopération”, de ses interrogations au sujet d’un risque de conflit d’intérêts résultant des liens de certains agents locaux de la délégation avec cette organisation internationale et de ses soupçons de corruption dans le cadre de la mise en œuvre, par ladite organisation, d’un projet de l’Union européenne dénommé “Kerem Shalom”. Par ailleurs, la section “Finances, contrats et audit” de la délégation, qui gère le programme Pégase DFS, a fait l’objet d’enquêtes de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) ouvertes en 2011 et en 2013.

4      Le 15 octobre 2012, Mme K., le représentant du personnel de la délégation (ci-après le “représentant du personnel”), a adressé au chef de la délégation une note, signée par 21 membres de la délégation (ci-après la “note du 15 octobre 2012”), dénonçant la frustration d’une partie du personnel à la suite d’un changement d’approche dans la manière de procéder au sein de la section “Finances, contrats et audit” de la délégation au cours des sept mois durant lesquels le requérant en avait assuré la direction. Ce changement d’approche aurait causé de forts retards dans la gestion des projets, voire le blocage de certains d’entre eux, ainsi qu’une perte de crédibilité vis-à-vis des partenaires de l’Union. Le représentant du personnel faisait aussi état dans cette note de ce que des comportements inappropriés compromettant l’intégrité professionnelle de membres du personnel avaient été rapportés durant les sept mois précédents et que ceux-ci continuaient à se produire. La note se terminait par un appel à la hiérarchie pour que celle-ci trouve rapidement une solution à cette situation décrite comme étant devenue insupportable.

5      Les 22 et 23 octobre 2012, le chef de l’unité “Finances, contrats et audit” de la direction “[Politique de v]oisinage” de la DG “Coopération et développement” dont relevait le requérant (ci-après le “chef d’unité du requérant”) s’est rendu en mission à la délégation et s’est entretenu avec les collègues de l’intéressé, celui-ci étant absent.

6      Une réunion tenue à Bruxelles le 25 octobre 2012, en présence notamment du chef d’unité du requérant et du requérant, a été consacrée au comportement de ce dernier et aux problèmes de communication opposant les sections “Finances, contrats et audit” et “Opérations” au sein de la délégation.

7      Le 9 novembre 2012, le représentant du personnel a adressé un courriel au chef d’unité du requérant afin de se plaindre de ce que le comportement de celui-ci s’était encore aggravé. Selon le représentant du personnel, le requérant reprochait désormais au personnel d’avoir parlé au chef d’unité lors de la mission des 22 et 23 octobre 2012. Dans le même courriel, le représentant du personnel demandait qu’une mesure préventive soit prise pour protéger le personnel de tout harcèlement.

8      Par la voie de courriels du chef de la délégation et du directeur général adjoint de la DG “Développement et coopération” du 12 novembre 2012, ainsi que de son chef d’unité du 13 novembre suivant, le requérant a été mis en garde quant au caractère inapproprié de son comportement et quant aux problèmes de communication que sa section et lui-même suscitaient. Selon les supérieurs hiérarchiques du requérant, ces difficultés affectaient le travail de la délégation et les relations politiques que l’Union entretenait dans la région.

9      Le 20 novembre 2012, le requérant a été informé téléphoniquement de sa réaffectation au siège et a reçu un courriel du chef de l’unité “Ressources humaines dans les délégations” de la DG “Développement et coopération” lui “confirm[ant sa] réaffectation au siège, à [sa] DG d’origine[, la DG ‘Mobilité’]”. Le même courriel précisait que, “[d]ans quelques jours, le temps de finaliser les procédures [,] [il] recevr[ait] une notification officielle” et l’invitait à prendre le solde de ses congés avant la fin de l’année, ce qui allait le “conduire à quitter prochainement la délégation”.

10      Par courriels des 28 et 29 novembre 2012, le requérant a demandé, respectivement, à son chef de délégation et à son chef d’unité de lui communiquer une liste précise des faits auxquels ils faisaient allusion dans leurs courriels des 12 et 13 novembre précédents afin de pouvoir y répondre.

11      Le 4 décembre 2012, le requérant a informé le chef de l’unité “Ressources humaines dans les délégations” de la DG “Développement et coopération” qu’il préparait son départ, mais qu’il n’avait pas encore reçu la notification officielle de la décision de réaffectation mentionnée dans son courriel du 20 novembre 2012, alors qu’il devait accomplir les formalités de déménagement.

12      Le 6 décembre 2012, le chef de délégation a répondu au courriel du requérant du 28 novembre précédent en lui faisant savoir que les problèmes qu’il avait évoqués étaient récurrents et qu’il ne pouvait en prendre note chaque fois qu’il recevait une plainte le concernant.

13      Le 10 décembre 2012, le requérant a, de nouveau, demandé au chef de la délégation de lui fournir des preuves étayant les reproches qu’il lui faisait. Le 12 décembre suivant, le chef de la délégation l’a invité, pour toute autre communication, à s’adresser au service des ressources humaines compétent.

14      Le 20 décembre 2012, un agent de l’unité “Gestion de la carrière et de la performance” de la DG “Ressources humaines et sécurité” a adressé un courriel au requérant l’informant que sa réaffectation vers les “DG [et] unité : MOVE.SRD (Bruxelles)”, c’est-à-dire vers la DG “Mobilité”, “a[vait] été approuvée” par le chef d’équipe “Mouvements du personnel” de l’unité “Gestion de la carrière et de la performance” en sa qualité d’[autorité investie du pouvoir de nomination] en date du 19 décembre 2012, avec prise d’effet au 1er janvier 2013. L’auteur du courriel précisait aussi que cette réaffectation avait pour base légale l’article 7, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne dans sa version alors applicable (ci-après le “statut”), que “ce mouvement [était] enregistré et p[ouvait] être consulté [via le système informatique de gestion du personnel appelé] ‘SysPer 2’”, qu’une copie dudit courriel serait versée dans le dossier du requérant et qu’“aucun acte papier ne sera[it] établi”.

15      À compter du 1er janvier 2013, le requérant a été promu au grade AD 12 dans le cadre de l’exercice de promotion 2013.

16      Un acte intitulé “Mutation”, daté du 25 janvier 2013, a été notifié au requérant via le système informatique SysPer 2. Cet acte est fondé sur l’article 7, paragraphe 1, du statut. Il dispose que, “[d]ans l’intérêt du service”, le requérant est “réaffecté auprès de la [DG ‘Mobilité’], [d]irection ‘Ressources commune[s] […]’ (MOVE.SRD) à B[ruxelles]”, avec effet au 1er janvier 2013.

17      Le 12 février 2013, le requérant a introduit une réclamation contre la décision faisant l’objet de l’acte susvisé du 25 janvier 2013. L’[autorité investie du pouvoir de nomination] l’a rejetée le 11 juin 2013. »

3        L’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), n’ayant pas fait l’objet d’un pourvoi, est devenu définitif.

4        Le 16 janvier 2015, le requérant a été affecté à la représentation de la Commission à Londres (Royaume-Uni).

5        Par lettre du 20 avril 2015, le requérant a demandé aux agents ayant représenté la Commission dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), de lui indiquer les mesures d’exécution que la Commission avait l’intention d’adopter. Par courriel du 21 mai 2015, lesdits agents ont répondu au requérant que les mesures d’exécution de l’arrêt ne dépendaient pas du service juridique, mais de « l’administration », qu’ils étaient en contact avec les services concernés et qu’ils l’informeraient dès que possible des mesures prises.

6        Par note du 22 mai 2015, le chef de l’unité « Ressources humaines » de la DG « Voisinage et négociations d’élargissement » a informé le requérant qu’il était du ressort de sa direction générale, en collaboration avec la DG « Développement et coopération », de procéder à l’exécution de l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29). Par conséquent, le requérant a été invité à fournir par écrit ses commentaires concernant les faits ayant eu lieu en 2012 et « la décision de la Commission de le réaffecter à [la DG “Mobilité et transports”] au 1er janvier 2013 ».

7        Par lettre du 10 juin 2015 adressée au directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité, le requérant a notamment indiqué qu’il ne lui était plus possible de faire valoir utilement son point de vue sur des griefs qui n’étaient toujours pas clairement identifiés, sur « une décision qui a[vait] déjà été exécutée depuis près de deux ans et demi ». Il a ajouté qu’il lui était interdit de faire des commentaires concernant des faits sous investigation de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) et qu’il fallait, dans le respect de l’article 266 TFUE, ouvrir un dialogue afin d’examiner les mesures d’exécution de l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), de nature à éliminer le préjudice qu’il aurait subi en raison de l’adoption de la décision du 19 décembre 2012.

8        Par lettre du 23 juin 2015, le chef de l’unité « Gestion de la carrière et de la performance » de la DG « Ressources humaines et sécurité » (ci-après le « chef d’unité DG HR.B4 ») a notamment répondu au requérant que l’exécution de l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), exigeait que lui soit donnée la possibilité d’exprimer utilement son point de vue au sujet de la décision de le réaffecter au siège et à la DG « Mobilité et transports » et qu’il n’était pas attendu de lui qu’il dévoilât la nature et la substance des dénonciations portées à la connaissance de l’OLAF. Partant, le requérant a été invité à fournir ses observations et ses commentaires « portant sur la décision du 19 décembre 2012 », dans un délai de trois semaines. Il serait alors, selon ledit chef d’unité, procédé à une analyse approfondie des observations et des commentaires du requérant avant d’arrêter une nouvelle décision relative à son affectation.

9        Par lettre du 24 juillet 2015 adressée au directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité, le requérant a soulevé plusieurs griefs tirés des modalités d’exécution de l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), du service compétent pour l’exécution dudit arrêt, de l’utilisation du terme « dénonciation », de l’obligation de la Commission de verser l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), à son dossier personnel, des allégations de harcèlement et de la compensation à hauteur de 250 000 euros du préjudice subi en raison des fautes de service commises par la Commission.

10      Par lettre du 4 août 2015, le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité a répondu à la lettre du requérant du 24 juillet 2015. Le directeur général a notamment rejeté l’argument du requérant selon lequel il appartiendrait au collège des commissaires de mettre en œuvre l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29). D’ailleurs, il a constaté que les allégations du requérant concernant un harcèlement au cours des années 2013 et 2014 avaient été rejetées dans le cadre d’une réclamation antérieure qui n’a pas été contestée devant le Tribunal de la fonction publique. Dès lors, l’autorité de la force jugée excluait tout nouveaux contentieux sur ce point. S’agissant de la demande visant à l’indemnisation des préjudices que le requérant aurait prétendument subis à hauteur de 250 000 euros, le directeur général a expliqué que le Tribunal de la fonction publique s’était déjà prononcé à ce sujet en rejetant les conclusions indemnitaires et que cette décision était devenue désormais définitive. De plus, le directeur général a invité le requérant à fournir des commentaires au sujet de la décision de sa réaffectation à la DG « Mobilité et transports » à partir du 1er janvier 2013.

11      Le 15 octobre 2015, une réunion entre le requérant et des représentants des services de la Commission a eu lieu.

12      Par lettre du 16 novembre 2015, le requérant a introduit auprès de la Commission une réclamation en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») demandant que celle-ci adopte des mesures d’exécution de l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), qu’elle le réintègre dans des fonctions d’encadrement correspondant à son grade et à son expérience professionnelle, qu’elle lui présente des excuses publiques et qu’elle lui alloue une somme forfaitaire de 250 000 euros en indemnisation.

13      Par décision du 22 décembre 2015 (ci-après la « décision du 22 décembre 2015 »), le chef d’unité DG HR.B4 a informé le requérant qu’il avait été réaffecté, dans l’intérêt du service de la délégation de l’Union européenne en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, à la DG « Mobilité et transports » à Bruxelles avec effet au 1er janvier 2013. Cette décision n’altérait, selon lui, en rien l’affectation du requérant à Londres, intervenue entretemps.

14      Par décision du 23 février 2016, l’autorité investie du pouvoir de nomination de la Commission (ci-après l’« AIPN ») a rejeté la réclamation introduite par le requérant le 16 novembre 2015. Dans cette décision, l’AIPN a notamment considéré que, dans la mesure où le requérant avait demandé, en tant que mesures d’exécution de l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), que l’AIPN le réintègre dans des fonctions d’encadrement correspondant à son grade et à son expérience professionnelle, qu’elle lui présente des excuses publiques et qu’elle lui verse la somme de 250 000 euros en compensation du préjudice subi, de telles mesures ne ressortaient nullement dudit arrêt. La Commission aurait mis à exécution ledit arrêt à partir du 22 mai 2015. Au moment de l’introduction de la réclamation du 16 novembre 2015, l’acte faisant grief au requérant, à savoir la décision du 22 décembre 2015, était encore en cours d’adoption et, dès lors, ses griefs portant sur l’inexécution de l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), étaient prématurés et, par conséquent, irrecevables. De plus, selon l’AIPN, les griefs du requérant n’auraient pas permis de déceler un comportement fautif de la part de la Commission concernant la prétendue inexécution dudit arrêt. S’agissant de la décision du 23 février 2016, aucun recours au titre de l’article 91 du statut n’a été introduit auprès du Tribunal de la fonction publique.

15      Par lettre du 22 mars 2016, le requérant a introduit auprès de l’AIPN une réclamation en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut (ci-après la « réclamation du 22 mars 2016 ») lui demandant de retirer la décision du 22 décembre 2015, de constater que ladite décision avait déjà été exécutée et qu’il ne pouvait plus exercer utilement ses droits de la défense et d’ouvrir un dialogue avec lui afin de le rétablir dans sa réputation et sa crédibilité professionnelles.

16      Par requête déposée au greffe du Tribunal de la fonction publique le 2 juin 2016, le requérant a introduit un recours fondé sur l’article 270 TFUE et tendant à l’annulation, d’une part, de la décision de la Commission de ne pas arrêter les mesures d’exécution de l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), et, d’autre part, de la décision du 22 décembre 2015. Ce recours a été enregistré sous le numéro d’affaire F‑28/16. En application de l’article 3 du règlement (UE, Euratom) 2016/1192 du Parlement européen et du Conseil, du 6 juillet 2016, relatif au transfert au Tribunal de la compétence pour statuer, en première instance, sur les litiges entre l’Union européenne et ses agents (JO 2016, L 200, p. 137), ladite affaire a été transférée au Tribunal et enregistrée sous le numéro T‑598/16.

17      Par décision du 16 juin 2016, le directeur de la direction « Affaires juridiques et partenariats » de la DG « Ressources humaines et sécurité » en tant qu’AIPN a décidé de supprimer la décision du 19 décembre 2012 du dossier personnel du requérant et a rejeté la réclamation du 22 mars 2016 pour le surplus.

 Procédure et conclusions des parties

18      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 24 septembre 2016, le requérant a introduit le présent recours.

19      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le même jour, le requérant a demandé, d’une part, le bénéfice de l’anonymat dans la présente affaire et, d’autre part, la jonction de l’affaire T‑598/16 et de la présente affaire pour cause de connexité.

20      Le 16 novembre 2016, le requérant a été informé que le Tribunal avait décidé de ne pas faire droit à sa demande d’anonymat et que le président de la septième chambre du Tribunal avait décidé de ne pas joindre les affaires T‑598/16 et T‑689/16 à ce stade de la procédure.

21      Par ordonnance du 13 février 2017, Pipiliagkas/Commission (T‑598/16, non publiée, EU:T:2017:111), le Tribunal a rejeté le recours introduit le 2 juin 2016 comme étant irrecevable au motif, d’une part, que la procédure précontentieuse concernant la décision du 22 décembre 2015 n’avait pas été respectée et, d’autre part, qu’il n’existait aucune décision de la Commission portant sur un refus d’exécuter l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29). Cette ordonnance n’ayant pas fait l’objet d’un pourvoi, elle est devenue définitive.

22      Par actes déposés au greffe du Tribunal les 8 mars, 25 avril, 1er juin et 4 août 2017, le requérant a soumis des demandes de mesures d’organisation de la procédure en vertu de l’article 89 du règlement de procédure du Tribunal.

23      Les 8 mars, 25 avril et 4 août 2017 ainsi que les 9 mars et 1er mai 2018, le requérant a fourni au Tribunal des documents supplémentaires.

24      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 1er juin 2017, le requérant a demandé au Tribunal d’entendre des témoins dans le cadre d’une mesure d’instruction en vertu de l’article 91 du règlement de procédure.

25      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (septième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, a invité la Commission à déposer certains documents et lui a posé une question écrite. La Commission a répondu dans le délai imparti.

26      Le 29 août 2018, le requérant a fourni au Tribunal des documents supplémentaires.

27      Le 7 septembre 2018, la Commission a fourni au Tribunal un document supplémentaire.

28      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 13 septembre 2018.

29      Dans la requête, le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision du 22 décembre 2015 ;

–        annuler la décision implicite du 20 août 2015 de rejet de sa demande d’être informé des mesures prises par la Commission en exécution de l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29) ;

–        condamner la Commission à lui payer la somme de 250 000 euros en indemnisation des préjudices matériels et moraux subis ;

–        condamner la Commission aux dépens.

30      Dans la réplique, le requérant a énoncé qu’il se désistait du recours en tant qu’il était dirigé contre la décision implicite de rejet de sa demande d’être informé des mesures prises par la Commission en exécution de l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29). Il s’ensuit que le deuxième chef de conclusions exposé au point 29 ci-dessus a été retiré par le requérant.

31      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

32      Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE, le requérant demande, d’une part, l’annulation de la décision du 22 décembre 2015 et, d’autre part, la réparation des préjudices matériels et moraux subis par lui.

 Sur la demande d’annulation de la décision du 22 décembre 2015

33      À l’appui de la demande en annulation, le requérant soulève trois moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 266 TFUE. Le deuxième moyen est tiré d’un détournement de pouvoir. Le troisième moyen est tiré de la violation de l’article 22 bis du statut.

34      Il convient de commencer l’examen de la demande en annulation par le troisième moyen.

35      D’une part, le requérant fait valoir, en substance, que le 25 février 2014, l’OLAF lui a octroyé le statut d’informateur, en vertu de l’article 22 bis du statut, et que, par conséquent, la décision du 22 décembre 2015 aurait dû être adoptée par le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité ou le directeur général chargé du développement et de la coopération, et non par le chef d’unité DG HR.B4. D’autre part, selon le requérant, la Commission aurait été obligée de respecter scrupuleusement les garanties qui lui étaient conférées par l’article 22 bis du statut et de prendre toutes les mesures pour éviter qu’il ne subisse un préjudice quelconque à la suite de la communication de certaines informations à sa hiérarchie.

36      D’abord, la Commission soutient que le troisième moyen est manifestement irrecevable du fait que la règle de concordance entre la réclamation administrative et le présent recours n’a pas été respectée. Ensuite, la Commission fait valoir que le requérant ne peut se prévaloir des garanties offertes par le statut d’informateur étant donné que, au moment de sa réaffectation, en janvier 2013, il n’avait pas le statut d’informateur, mais simplement celui de témoin dans le cadre d’une enquête de l’OLAF. De ce fait, selon la Commission, les informations fournies par le requérant à sa hiérarchie ne relevaient pas du domaine de l’application de l’article 22 bis du statut. De surcroît, la Commission estime que, lors de l’adoption de la décision du 22 décembre 2015, l’AIPN n’était pas tenue de prendre en considération le statut d’informateur octroyé à partir du 25 février 2014 en faisant adopter cette décision par le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité. En effet, il n’existerait pas de lien entre l’objet des enquêtes diligentées par l’OLAF et la raison de la réaffectation du requérant, qui était liée exclusivement au contexte de communication tendu créé par celui-ci au sein de la délégation et au préjudice porté à l’image et à la réputation de l’Union dont il a été la cause pendant les mois de son affectation au sein de la délégation. Enfin, la Commission considère que, en tout état de cause, par la lettre du 4 août 2015, le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité était déjà intervenu dans la procédure, en invitant le requérant à faire valoir ses observations devant les services compétents. Dans ces circonstances, la Commission est d’avis que le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité ne pouvait parvenir à un résultat différent de celui contenu dans la décision du 22 décembre 2015, étant donné que « les observations du requérant n’[avaie]nt aucunement convaincu les services [et qu’]elles n’auraient pas pu convaincre davantage » ledit directeur général.

37      S’agissant de la première branche du présent moyen, en substance, les parties sont en désaccord quant à la question de savoir si le chef d’unité DG HR.B4 était compétent pour adopter la décision du 22 décembre 2015.

38      En premier lieu, concernant la fin de non-recevoir de la Commission tirée du non-respect de la règle de concordance entre la réclamation administrative et le présent recours, il suffit de rappeler que, aux points 40 à 42 de la réclamation du 22 mars 2016, le requérant a bien fait valoir que seul le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité était compétent pour l’adoption d’une décision telle que celle du 22 décembre 2015. Il convient donc d’écarter la présente fin de non-recevoir.

39      De plus, il importe de rappeler que, en tout état de cause, l’incompétence de l’auteur d’un acte faisant grief constitue un moyen d’ordre public (voir arrêt du 8 juillet 2010, Commission/Putterie-De-Beukelaer, T‑160/08 P, EU:T:2010:294, point 61 et jurisprudence citée) qu’il faut examiner d’office.

40      En deuxième lieu, il y a lieu d’examiner l’argument de la Commission selon lequel le chef d’unité DG HR.B4 était compétent pour l’adoption de la décision du 22 décembre 2015 au motif que, au 1er janvier 2013, le requérant n’avait pas le statut d’informateur.

41      Il a été jugé que, si le respect des principes gouvernant l’application de la loi dans le temps ainsi que les exigences relatives aux principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime imposent l’application des règles matérielles en vigueur à la date des faits en cause quand bien même ces règles ne sont plus en vigueur à la date de l’adoption d’un acte par l’institution de l’Union, en revanche, la disposition constituant la base juridique d’un acte et habilitant l’institution de l’Union à adopter l’acte en cause doit être en vigueur à la date de l’adoption de celui-ci. De même, la procédure d’adoption de cet acte doit être conduite conformément aux règles en vigueur à la date de cette adoption (voir arrêt du 14 juin 2016, Commission/McBride e.a., C‑361/14 P, EU:C:2016:434, point 40 et jurisprudence citée).

42      À cet égard, il convient de rappeler que, s’agissant de l’application dans le temps d’une règle de droit en l’absence de dispositions transitoires, il importe de distinguer les règles de compétence, qui sont de nature procédurale, des règles de droit matériel (voir, en ce sens, arrêt du 3 février 2011, Cantiere navale De Poli/Commission, T‑584/08, EU:T:2011:26, points 32 et 33). Il s’ensuit que la détermination de l’autorité au sein de la DG « Ressources humaines et sécurité » qui était compétente pour l’exercice des compétences de l’AIPN concernant l’adoption de la décision du 22 décembre 2015 relève des règles procédurales. Par conséquent, cette question doit être analysée au regard des règles en vigueur au moment de l’adoption de la décision du 22 décembre 2015 ainsi qu’au regard de la situation factuelle qui se présentait à ce moment.

43      En revanche, en l’espèce, en l’absence de dispositions spécifiques concernant l’application dans le temps, les questions matérielles, telle que celle des conditions matérielles pertinentes pour la réaffectation du requérant, doivent, en principe, être examinées selon les dispositions matérielles qui étaient en vigueur au moment de l’entrée en vigueur de l’acte en question, à savoir le 1er janvier 2013, ainsi qu’au regard de la situation factuelle qui se présentait à ce moment.

44      Dès lors, la question de savoir quelle était l’autorité qui était compétente pour l’exercice des compétences de l’AIPN concernant l’adoption de la décision du 22 décembre 2015 doit être analysée au regard de la situation factuelle applicable au 22 décembre 2015.

45      Dans ce contexte, il est constant entre les parties que la décision du 22 décembre 2015 porte sur la réaffectation du requérant dans l’intérêt du service entre différentes directions générales de la Commission sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, du statut (voir également point 2 ci-dessus). En effet, il est constant que, par ladite décision, le requérant, qui avait été fonctionnaire au sein de la DG « Développement et coopération », affecté à la délégation de l’Union en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, a été réaffecté à la DG « Mobilité et transports » à Bruxelles.

46      L’article 2, paragraphe 1, du statut prévoit que chaque institution détermine les autorités qui exercent en son sein les pouvoirs dévolus par le statut à l’AIPN.

47      Selon le point 2.5 du tableau I.A de l’annexe I de la décision C(2013) 3288 final de la Commission, du 4 juin 2013, relative à l’exercice des pouvoirs dévolus par le statut à l’AIPN et par le régime applicable aux autres agents (RAA) à l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (AHCC), tel que modifiée par la décision C(2014) 9864 de la Commission, du 16 décembre 2014, qui était d’application entre le 17 décembre 2014 et le 11 avril 2016, le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité exerçait les pouvoirs dévolus à l’AIPN quant à la mutation entre des directions générales (réaffectation dans l’intérêt du service) conformément à l’article 7, paragraphe 1, du statut. De plus, la note en bas de page no 10 au point 2.5 dudit tableau prévoit que, dans le cas d’un fonctionnaire ayant dénoncé des dysfonctionnements conformément aux procédures prévues à cet égard et qui n’est pas « membre » de la DG « Ressources humaines et sécurité », la décision de transfert est arrêtée par le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité.

48      Selon le point 2.5 du tableau I.A de l’annexe de la décision du directeur général des ressources humaines et de la sécurité de la Commission, du 13 septembre 2013, relative à l’exercice des pouvoirs de l’AIPN ainsi que de l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (AHCC), tel que modifié par la décision du directeur général des ressources humaines et de la sécurité de la Commission, du 18 décembre 2014 (ci-après la « décision du 13 septembre 2013 »), qui était d’application entre le 19 décembre 2014 et le 31 décembre 2015, les pouvoirs dévolus à l’AIPN quant à la mutation d’un administrateur entre des directions générales (réaffectation dans l’intérêt du service) conformément à l’article 7, paragraphe 1, du statut, exercés par le directeur général des ressources humaines et de la sécurité, étaient subdélégués au chef d’unité DG HR.B4. Toutefois, la note en bas de page no 5 au point 2.5 dudit tableau, lue conjointement avec la légende de la même annexe, prévoit que, dans le cas d’un fonctionnaire ayant dénoncé des dysfonctionnements conformément aux procédures prévues à cet égard et qui n’est pas « membre » de la DG « Ressources humaines et sécurité », la décision de transfert est arrêtée par le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité lui-même.

49      Il découle de ces dispositions que, à condition que, au 22 décembre 2015, le requérant ait été un « fonctionnaire ayant dénoncé des dysfonctionnements conformément aux procédures prévues à cet égard », la décision de sa mutation entre deux directions générales aurait dû être adoptée par le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité. Dans ce contexte, il y a lieu de faire observer que les dispositions de l’article 22 bis du statut établissent des procédures à l’égard de la dénonciation de tels dysfonctionnements.

50      À cet égard, il importe de rappeler que, par lettre du 5 novembre 2014, adressée au requérant, la Commission a pris acte du fait que le statut d’informateur avait été octroyé au requérant par l’OLAF le 25 février 2014 dans le cadre des enquêtes OF/2011/1002 et OF/2013/0948. À ce titre, selon la Commission, le requérant pouvait prétendre à la protection visée aux articles 22 bis et 22 ter du statut, ajoutant qu’« il [allait] de soi que la [DG “Ressources humaines et sécurité”] se conformera[it] à la décision de l’OLAF ». Cette déclaration suffit à elle seule pour rejeter l’argument de la Commission selon lequel les informations fournies par le requérant à sa hiérarchie ne relevaient pas du domaine de l’application de l’article 22 bis du statut.

51      De plus, il ressort de la lettre du 31 mars 2017 de l’OLAF, adressée au requérant, que l’enquête OF/2013/0948 a été clôturée en décembre 2016. Or, rien dans le dossier devant le Tribunal n’indique que le statut d’informateur du requérant aurait été révoqué entretemps.

52      Il s’ensuit que, entre le 25 février 2014 et décembre 2016 à tout le moins, le requérant disposait du statut d’informateur, visé à l’article 22 bis du statut. Au 22 décembre 2015, le requérant était donc un « fonctionnaire ayant dénoncé des dysfonctionnements conformément aux procédures prévues à cet égard ». Par conséquent, la décision du 22 décembre 2015 aurait dû être prise par le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité, et non par le chef d’unité DG HR.B4.

53      Au regard de ce qui précède, il convient de conclure que la décision du 22 décembre 2015 a été adoptée par une autorité incompétente.

54      En troisième lieu, il convient de remarquer que, dans la partie introductive de la décision du 22 décembre 2015, le chef d’unité DG HR.B4 mentionne notamment que le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité lui a demandé de répondre au courriel du requérant du 16 décembre 2015.

55      Toutefois, force est de constater que cette affirmation ne peut pas être interprétée comme une subdélégation dudit directeur général de la compétence d’adopter la décision du 22 décembre 2015 au chef d’unité DG HR.B4. En effet, d’une part, il ressort également de la décision du 22 décembre 2015 que le chef d’unité DG HR.B4 avait déjà, le 15 octobre 2015, indiqué au requérant « son » intention d’adopter ladite décision.

56      D’autre part, selon une jurisprudence constante, l’autorité délégante, même habilitée à déléguer ses pouvoirs, doit prendre une décision explicite les transférant et la délégation ne peut porter que sur des pouvoirs d’exécution, exactement définis (arrêts du 13 juin 1958, Meroni/Haute Autorité, 9/56, EU:C:1958:7, p. 42 à 44, 46 et 47 ; du 26 mai 2005, Tralli/BCE, C‑301/02 P, EU:C:2005:306, point 43, et du 9 juillet 2008, Kuchta/BCE, F‑89/07, EU:F:2008:97, point 54), ce qui n’a pas été démontré en l’espèce.

57      En quatrième lieu, dans la mesure où la Commission soutient que, par la lettre du 4 août 2015, le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité était déjà intervenu dans la procédure, en invitant le requérant à faire valoir ses observations devant les services compétents, il suffit de constater qu’une telle participation à la procédure administrative ne vaut pas subdélégation de la compétence d’adopter la décision du 22 décembre 2015 au chef d’unité DG HR.B4. Ce constat n’est pas remis en cause par l’argument de la Commission selon lequel les griefs soulevés par le requérant ont été tous rejetés dans la lettre du 4 août 2015, ce qui avait pour conséquence, selon elle, que le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité ne pouvait parvenir à un résultat autre que celui contenu dans la décision faisant l’objet du présent litige. Dans ce contexte, la Commission considère elle-même que, à la suite de l’audition du requérant, un éventuel résultat différent de la décision du 22 décembre 2015, dans l’hypothèse où elle aurait été adoptée par ledit directeur général, aurait été « peu probable », ce qui signifie qu’un tel résultat différent aurait été possible.

58      En cinquième lieu, s’agissant de l’argument de la Commission selon lequel il n’existerait pas de lien entre l’objet des enquêtes diligentées par l’OLAF et la raison de la réaffectation du requérant, l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut vise non seulement à protéger l’informateur de l’ouverture d’une procédure administrative injustifiée, mais aussi à le protéger de tout préjudice, matériel ou moral, subi lors d’une enquête, quand bien même l’ouverture de ladite procédure administrative serait justifiée. Le fait qu’une telle procédure n’ait pas à son origine une demande d’assistance d’un fonctionnaire n’est pas susceptible de remettre en cause ce constat (voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2014, AN/Commission, T‑512/13 P, EU:T:2014:1073, point 34).

59      Toutefois, le présent moyen ne concerne pas l’interprétation de l’article 22 bis du statut, mais porte sur l’article 2, paragraphe 1, du statut ainsi que sur les actes d’exécution de ce dernier. À cet égard, il importe d’observer que le point 2.5 du tableau I.A de l’annexe de la décision du 13 septembre 2013 prévoyait que toute décision portant sur la mutation entre des directions générales (réaffectation dans l’intérêt du service) conformément à l’article 7, paragraphe 1, du statut d’un administrateur ayant dénoncé des dysfonctionnements conformément aux procédures prévues à cet égard devait être arrêtée par le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité lui-même. En effet, la décision du 13 septembre 2013 n’exige nullement l’existence d’un lien entre l’objet des enquêtes en question et la raison de la réaffectation du requérant afin de déclencher la compétence dudit directeur général pour l’adoption d’une décision telle que la décision du 22 décembre 2015.

60      Il convient donc de rejeter également l’argument de la Commission selon lequel, en l’espèce, il n’existait pas de lien entre l’objet des enquêtes diligentées par l’OLAF et la raison de la réaffectation du requérant.

61      En sixième lieu, il y a lieu de rejeter comme étant non fondé l’argument du requérant selon lequel la DG « Développement et coopération » était l’AIPN compétente pour l’adoption de la décision du 22 décembre 2015. En effet, l’article 3, paragraphe 1, de la décision C(2012) 7200 de la Commission du 10 octobre 2012 relative à la gestion des ressources de la Commission dans les délégations de l’Union, à laquelle le requérant fait référence dans ce contexte, prévoit que les directions générales d’affectation, c’est-à-dire en l’espèce la DG « Développement et coopération », exercent les pouvoirs d’AIPN à l’égard de leur personnel en poste dans les délégations, comme il est précisé dans les décisions de la Commission déterminant l’AIPN. Il s’ensuit que les pouvoirs de la DG « Développement et coopération » au regard du requérant étaient limités aux pouvoirs expressément confiés à celle-ci par les décisions de la Commission adoptées en vertu de l’article 2, paragraphe 1, du statut, telles que la décision C(2013) 3288 de la Commission. Toutefois, ce sont les règles exposées aux points 47 et 48 ci-dessus qui sont d’application en l’espèce afin de déterminer l’AIPN compétente pour l’adoption de la décision du 22 décembre 2015.

62      Partant, il y a lieu d’accueillir la première branche du troisième moyen et d’annuler la décision du 22 décembre 2015 au motif que celle-ci a été adoptée par une autorité incompétente, sans qu’il soit utile d’examiner la seconde branche de ce moyen, selon laquelle la Commission n’a pas scrupuleusement respecté les garanties conférées au requérant par l’article 22 bis du statut.

63      Ce constat n’est pas remis en cause même à considérer pertinente la jurisprudence selon laquelle une décision prise par une autorité incompétente en raison du non-respect des règles de répartition des pouvoirs qui lui sont dévolus, telle que la décision du 22 décembre 2015, ne peut cependant être annulée que si le non-respect desdites règles porte atteinte à l’une des garanties accordées aux fonctionnaires par le statut ou aux règles d’une bonne administration en matière de gestion du personnel (arrêts du 30 mai 1973, Drescig/Commission, 49/72, EU:C:1973:58, point 13, et du 7 février 2007, Caló/Commission, T‑118/04 et T‑134/04, EU:T:2007:37, point 68).

64      En effet, il suffit de rappeler que la règle selon laquelle, dans le cas d’un fonctionnaire ayant dénoncé des dysfonctionnements conformément aux procédures prévues à cet égard, une décision de transfert doit être arrêtée par le directeur général chargé des ressources humaines et de la sécurité vise à garantir que ledit fonctionnaire ne subisse aucun préjudice de la part de l’institution concernée.

 Sur la demande en indemnisation

65      La demande en indemnisation comporte trois chefs de préjudice. Premièrement, le requérant fait valoir que, en 2013 et 2014, il a été victime d’un harcèlement moral. Deuxièmement, le requérant estime que certains documents ont été insérés dans son dossier personnel qui ont donné de lui une « image inexacte de procédurier ». Par conséquent, l’accès à ces documents par d’autres fonctionnaires a été susceptible de lui porter grief dans le cadre des procédures de sélection auxquelles il a participé. Troisièmement, le requérant soutient que la Commission lui a causé un préjudice en refusant d’exécuter de bonne foi l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), et en commettant une série de « fautes de service » lors de la procédure de réaffectation. Le requérant demande que la Commission soit condamnée à lui payer une indemnité de 250 000 euros.

66      Dans le cadre de la réplique, le requérant fait valoir, d’une part, qu’il a subi une atteinte à sa réputation et à sa crédibilité professionnelles et, d’autre part, que la Commission l’a maintenu dans une situation irrégulière.

67      La Commission conteste ces arguments.

68      Selon une jurisprudence constante, l’engagement de la responsabilité de l’administration, au titre de l’article 270 TFUE, suppose la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué (arrêts du 1er juin 1994, Commission/Brazzelli Lualdi e.a., C‑136/92 P, EU:C:1994:211, point 42, et du 21 février 2008, Commission/Girardot, C‑348/06 P, EU:C:2008:107, point 52). Ces trois conditions sont cumulatives. L’absence de l’une d’entre elles suffit pour rejeter un recours indemnitaire (arrêt du 13 décembre 2017, CJ/ECDC, T‑703/16 RENV, non publié, EU:T:2017:892, point 29). C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner les trois branches de la demande en indemnisation.

69      En premier lieu, s’agissant du premier chef de préjudice de la demande en indemnisation, portant sur la responsabilité de la Commission en raison d’un harcèlement moral que le requérant aurait subi en 2013 et 2014, force est de constater que les points 148 à 154 de la requête, qui contiennent les arguments du requérant à cet égard, sont, en substance, identiques aux arguments qu’il a soulevés dans sa réclamation du 16 novembre 2015 (voir point 12 ci-dessus). Ces arguments ont été rejetés dans leur ensemble par la décision de l’AIPN du 23 février 2016 (voir point 14 ci-dessus). De plus, cette décision du 23 février 2016 n’a pas fait l’objet d’un recours en vertu de l’article 91 du statut devant le Tribunal de la fonction publique.

70      Il s’ensuit que l’intégralité des arguments relatifs au premier chef de préjudice a été effectivement tranchée par la décision du 23 février 2016 et que le rejet de ce chef de préjudice par l’AIPN est devenu définitif. En tant qu’elle est fondée sur le premier chef de préjudice, la demande en indemnisation doit donc être rejetée dans son intégralité comme étant non fondée.

71      En deuxième lieu, par le deuxième chef de préjudice de la demande en indemnisation, le requérant estime que certains documents ont été insérés dans son dossier personnel qui auraient donné une image inexacte de lui et l’auraient présenté comme un « procédurier ». Selon lui, l’accès à ces documents par d’autres fonctionnaires a été susceptible de lui porter grief dans le cadre des procédures de sélection pour d’autres postes auxquelles il avait participé à l’époque des faits.

72      Il a été jugé que, s’agissant de la condition relative à la réalité du dommage, la responsabilité de l’Union ne saurait être engagée que si le requérant a effectivement subi un préjudice réel et certain ainsi qu’évaluable (arrêt du 16 janvier 1996, Candiotte/Conseil, T‑108/94, EU:T:1996:5, point 54). Il incombe au requérant d’apporter des éléments de preuve au juge de l’Union afin d’établir l’existence et l’ampleur d’un tel préjudice (arrêts du 21 mai 1976, Roquette frères/Commission, 26/74, EU:C:1976:69, points 22 à 24, et du 9 janvier 1996, Koelman/Commission, T‑575/93, EU:T:1996:1, point 97).

73      Il convient de constater que, par ses arguments, le requérant n’a pas démontré la réalité d’un quelconque préjudice. En effet, le requérant se borne à indiquer, dans sa demande aux fins d’ordonner des mesures d’organisation de la procédure du 8 mars 2017, qu’« il s’est porté candidat à de nombreuses vacances d’emplois au siège » et que, « [b]ien qu’habituellement [présélectionné], toutes ses candidatures ont été rejetées ». Toutefois, le requérant n’a fourni aucun élément démontrant qu’il avait effectivement participé à une procédure de sélection et qu’il n’avait pas été sélectionné pour un poste spécifique pour lequel il avait prétendument postulé. En tant qu’elle est fondée sur le deuxième chef de préjudice, il y a donc lieu de rejeter la demande en indemnisation comme étant non fondée.

74      Certes, il est constant entre les parties que, en 2015, le requérant a été réaffecté à Londres. Or, lors de l’audience, le requérant a confirmé ne pas avoir participé à une quelconque procédure de sélection dans ce contexte. En tout état de cause, même à supposer qu’il ait participé à une telle procédure, il suffirait de constater qu’il n’avait pas été démontré de la façon requise qu’il avait subi un quelconque préjudice à cette occasion, étant donné qu’il avait été choisi pour le poste pour lequel il avait postulé.

75      Il y a donc lieu de rejeter la demande en indemnisation en tant qu’elle est fondée sur le deuxième chef de préjudice comme étant non fondée au motif que la réalité du préjudice allégué n’a pas été démontrée.

76      En troisième lieu, par le troisième chef de préjudice de la demande en indemnisation, le requérant soutient que la Commission lui a causé un préjudice en refusant d’exécuter de bonne foi l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), et en commettant une série de « fautes de service » lors de la procédure de réaffectation.

77      S’agissant de la réalité du dommage, le requérant se borne à invoquer l’existence d’une « atteinte aux principes essentiels de la démocratie, qui impliquent non seulement le droit pour toute personne d’avoir accès à un juge, mais aussi celui de voir exécutée la décision de celui-ci », ainsi que de l’« atteinte portée [à ses] intérêts moraux et [à ses] perspectives d’avenir […] mais surtout [de] la gravité des fautes commises par la Commission et [du] préjudice subi […] depuis près de 4 ans ». Force est de constater que, par ces arguments, le requérant n’est pas parvenu à établir dûment un préjudice suffisamment certain au sens de la jurisprudence exposée au point 72 ci-dessus.

78      En effet, les « fautes de service » alléguées par le requérant, dans la mesure où elles ne se rattachent pas aux premier et deuxième chefs de préjudice de la demande en indemnisation, résident dans le fait que la Commission aurait dû prendre en considération le statut d’informateur pour déterminer l’autorité compétente pour l’adoption d’une décision de réaffectation le concernant ainsi que dans le fait que l’AIPN aurait dû le réaffecter dans sa direction générale d’origine. Toutefois, le requérant n’explique pas en quoi ces agissement lui auraient causé un quelconque préjudice réel et certain.

79      En quatrième lieu, dans le cadre de la réplique, le requérant fait valoir que l’argumentation développée par la Commission au rejet du recours en annulation a causé une atteinte à sa réputation et à sa crédibilité professionnelles. À cet égard, il y a lieu de constater que le requérant n’a apporté aucun élément concret qui démontrerait que les affirmations faites par la Commission dans le cadre du présent litige, et notamment dans son mémoire en défense, auraient porté une quelconque atteinte à sa réputation ou à sa crédibilité professionnelles. Il convient donc de rejeter également cet argument comme étant non fondé.

80      En cinquième lieu, le requérant soutient également dans la réplique qu’il a subi un préjudice du fait que la Commission l’a maintenu dans une situation irrégulière. Toutefois, il y a lieu de constater que le requérant n’explique pas en quoi consistait exactement cette « situation irrégulière » et quel était exactement le préjudice causé par celle-ci. Dans la mesure où le requérant semble indiquer qu’il se trouvait dans un état d’inquiétude et d’incertitude quant à son avenir professionnel, il suffit de constater qu’il ressortait clairement de la lettre du chef d’unité DG HR.B4 du 23 juin 2015 que la Commission avait l’intention d’adopter une nouvelle décision relative à son affectation (voir point 8 ci-dessus). Le requérant était donc pleinement averti de l’intention de la Commission d’adopter une décision telle que la décision du 22 décembre 2015. Dans les circonstances de l’espèce, le délai entre le prononcé de l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29), et la communication de l’intention d’adopter une nouvelle décision portant sur sa réaffectation ne peut être considéré comme étant déraisonnable. L’affirmation du requérant concernant son prétendu état d’inquiétude et d’incertitude quant à son avenir professionnel n’est donc pas susceptible de démontrer un quelconque préjudice subi par lui.

81      Partant, il y a lieu de rejeter les conclusions indemnitaires comme étant non fondées.

 Sur les demandes visant à l’adoption de mesures d’organisation de la procédure et d’une mesure d’instruction

82      En premier lieu, par actes déposés au greffe du Tribunal les 8 mars, 25 avril, 1er juin et 4 août 2017, le requérant a soumis une demande de mesures d’organisation de la procédure en vertu de l’article 89 du règlement de procédure. En substance, il demande au Tribunal d’ordonner à l’OLAF de produire ses rapports d’enquête dans les affaires OF/2013/0948, OF/2011/1002 et OF/2014/0617 ainsi que ses rapports de 2005 et 2008 dans les enquêtes menées sur la mise en œuvre du programme Pegase DFS et sur l’attribution de contrats de gré à gré à la soi-disant organisation internationale I. ainsi que les rapports relatifs à la mise en œuvre des autres programmes gérés directement ou indirectement par la délégation de la Commission à Jérusalem-Est depuis 2005. De plus, le requérant demande au Tribunal d’inviter la Commission, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, à expliquer les raisons pour lesquelles la DG « Ressources humaines et sécurité », à la suite de l’audition du requérant par l’OLAF sur la mise en œuvre par la délégation de l’Union à Jérusalem-Est du programme Pegase DFS, a fourni des informations inexactes à l’OLAF quant à la demande formelle d’assistance du requérant au titre des articles 22 bis et 24 du statut et quant à ses interrogations légitimes, auprès de sa hiérarchie et du Service européen pour l’action extérieure (SEAE), au sujet du statut juridique d’I., et plus particulièrement au sujet du statut d’organisation internationale de cette entreprise, statut qui fonde les huit contrats successifs passés par la Commission avec I. en gestion indirecte, et donc sans recours à la concurrence par la procédure obligatoire d’appels d’offres.

83      Selon la jurisprudence, pour permettre au Tribunal de déterminer s’il est utile au bon déroulement de la procédure d’ordonner la production de certains documents, la partie qui en fait la demande doit non seulement identifier les documents sollicités, mais aussi fournir un minimum d’éléments accréditant l’utilité de ces documents pour les besoins de l’instance (voir arrêt du 6 juillet 2017, Bodson e.a./BEI, T‑508/16, non publié, EU:T:2017:469, point 249 et jurisprudence citée).

84      En l’espèce, il y a lieu de faire observer que le requérant n’indique pas en quoi la production des documents en question serait utile dans le cadre de sa demande en indemnisation.

85      Partant, et sans qu’il soit nécessaire de trancher l’argument de la Commission quant à l’irrecevabilité des demandes répétées transmises postérieurement au 8 mars 2017, il convient de conclure qu’il n’est pas nécessaire d’adopter les mesures d’organisation de la procédure proposées par le requérant.

86      En second lieu, par acte déposé au greffe du Tribunal le 1er juin 2017, le requérant a demandé au Tribunal d’entendre deux témoins dans le cadre d’une mesure d’instruction en vertu de l’article 91 du règlement de procédure. Plus spécifiquement, le requérant demande que le Tribunal entende comme témoin le chef d’unité DG HR.B4 afin de lui demander, premièrement, de se munir de la « décision d’habilitation de la Commission », deuxièmement, de se prononcer sur les explications « fournies au requérant suivant lesquelles [le chef d’unité DG HR.B4] ne disposait que d’un pouvoir de simple entérinement administratif », troisièmement, « de préciser la décision entérinée, son auteur [et] sa date » et, quatrièmement, de « produire la décision que l’AIPN subdéléguée a entérinée ». De plus, le requérant demande que le Tribunal entende en tant que témoin le chef d’équipe qui a adopté la décision annulée par l’arrêt du 15 avril 2015, Pipiliagkas/Commission (F‑96/13, EU:F:2015:29).

87      À cet égard, il y a lieu de rappeler que le Tribunal est seul juge de la nécessité éventuelle de compléter les éléments d’information dont il dispose sur les affaires dont il est saisi (voir arrêt du 22 novembre 2007, Sniace/Commission, C‑260/05 P, EU:C:2007:700, point 77 et jurisprudence citée).

88      Dans ce contexte, lorsqu’une demande d’audition de témoins, formulée dans la requête, indique avec précision les faits sur lesquels il y a lieu d’entendre le ou les témoins et les motifs de nature à justifier leur audition, il appartient au Tribunal d’apprécier la pertinence de cette demande au regard de l’objet du litige et de la nécessité de procéder à l’audition des témoins cités (voir arrêt du 26 janvier 2017, Duravit e.a./Commission, C‑609/13 P, EU:C:2017:46, point 109 et jurisprudence citée).

89      En l’espèce, il convient de constater que le requérant ne demande pas que les témoins qu’il désigne soient entendus dans le cadre de sa demande en indemnisation. Il y a donc lieu de conclure qu’il n’est pas nécessaire d’entendre les témoins en question.

90      Il découle de tout ce qui précède qu’il y a lieu d’annuler la décision du 22 décembre 2015 et de rejeter le recours pour le surplus.

 Sur les dépens

91      Aux termes de l’article 134, paragraphes 1 et 3, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens. Toutefois, si cela apparaît justifié au vu des circonstances de l’espèce, le Tribunal peut décider que, outre ses propres dépens, une partie supporte une fraction des dépens de l’autre partie.

92      En l’espèce, le requérant et la Commission ayant succombé partiellement sur leurs chefs de conclusions respectifs, il convient de condamner la Commission à supporter ses propres dépens. De plus, il y a lieu, au vu des circonstances de l’espèce, de condamner la Commission et le requérant à supporter chacun la moitié des dépens de ce dernier.

93      Dans ce contexte, la Commission fait observer que le requérant a introduit à quatre reprises une demande visant à l’adoption de mesures d’organisation de la procédure afin d’obtenir la production de certains rapports de l’OLAF (voir point 82 ci-dessus). Selon la Commission, les frais engendrés par les significations supplémentaires auraient pu être évités si le requérant n’avait pas fait preuve de « méconnaissances répétées des prescriptions » du règlement de procédure au sens de l’article 139, sous a) et c), de celui-ci.

94      À cet égard, il convient de noter que l’argument de la Commission est fondé sur l’article 139 du règlement de procédure concernant les frais du Tribunal et non sur l’article 135 du règlement de procédure portant sur les dépens vexatoires encourus par la Commission. En l’espèce, il n’est pas opportun de condamner le requérant à rembourser des frais éventuels du Tribunal sur le fondement de l’article 139 du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision du 22 décembre 2015 du chef de l’unité « Gestion de la carrière et de la performance » de la direction générale « Ressources humaines et sécurité » de la Commission européenne, portant sur la réaffectation de M. Nikolaos Pipiliagkas avec effet au 1er janvier 2013, est annulée.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La Commission supportera ses propres dépens ainsi que la moitié de ceux de M. Pipiliagkas.


4)      M. Pipiliagkas supportera la moitié de ses propres dépens.

Tomljenović

Bieliūnas

Marcoulli

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 décembre 2018.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

V. Tomljenović


*      Langue de procédure : le français.