Language of document : ECLI:EU:C:2023:729

ORDONNANCE DU VICE-PRÉSIDENT DE LA COUR

29 septembre 2023 (*)

« Référé – Articles 278 et 279 TFUE – Pourvoi – Demande de sursis à exécution et d’autres mesures provisoires – Article 160, paragraphe 7, du règlement de procédure de la Cour – Mesures restrictives prises au regard de la situation en Ukraine – Gel de fonds et de ressources économiques »

Dans l’affaire C‑585/23 P(R)‑R,

ayant pour objet une demande de sursis à exécution et d’autres mesures provisoires au titre des articles 278 et 279 TFUE, introduite le 22 septembre 2023,

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme P. Mahnič, MM. R. Meyer et J. Rurarz, en qualité d’agents,

partie requérante,

les autre parties à la procédure étant :

Nikita Dmitrievich Mazepin,

partie demanderesse en première instance,

République de Lettonie,

partie intervenante en première instance,

LE VICE-PRÉSIDENT DE LA COUR,

l’avocat général, M. M. Szpunar, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par sa demande en référé, le Conseil de l’Union européenne demande à la Cour, en application des articles 278 et 279 TFUE ainsi que de l’article 160, paragraphe 7, du règlement de procédure de la Cour de suspendre les effets de l’ordonnance du président du Tribunal de l’Union européenne du 19 septembre 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RIII, ci-après l’« ordonnance attaquée »), par laquelle celui-ci a, d’une part, prononcé plusieurs mesures provisoires et, d’autre part, rapporté l’ordonnance du président du Tribunal du 7 septembre 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RIII).

2        Cette demande a été présentée parallèlement à l’introduction, le 22 septembre 2023, par le Conseil, d’un pourvoi, au titre de l’article 57, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, tendant à l’annulation de l’ordonnance attaquée.

3        Conformément à l’article 160, paragraphe 7, du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 190, paragraphe 1, de celui-ci, le juge des référés peut faire droit à la demande en référé avant même que l’autre partie ait présenté ses observations et cette mesure peut être ultérieurement modifiée ou rapportée, même d’office.

4        Il ressort de la jurisprudence de la Cour que l’article 160, paragraphe 7, du règlement de procédure de la Cour autorise le juge connaissant d’une demande de mesures provisoires à arrêter de telles mesures, à titre conservatoire, soit jusqu’au prononcé de l’ordonnance mettant fin à l’instance en référé, soit jusqu’à la clôture de la procédure principale, si celle-ci a lieu plus tôt, lorsque le prononcé de ces mesures est dans l’intérêt de la bonne administration de la justice, en particulier en vue de garantir l’effectivité de la procédure en référé [ordonnance du vice‑président de la Cour du 27 juillet 2023, VC/EU-OSHA, C‑456/23 P(R)‑R, EU:C:2023:612, point 4 et jurisprudence citée].

5        Lorsqu’il examine la nécessité de rendre une telle ordonnance, ce juge doit examiner les circonstances du cas d’espèce [ordonnances du vice‑président de la Cour du 4 octobre 2017, Wall Street Systems UK/BCE, C‑576/17 P(R)–R, EU:C:2017:735, point 5, et du 22 juillet 2022, Telefónica de España/Commission, C‑478/22 P(R)–R, EU:C:2022:598, point 5].

6        En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que M. Nikita Dmitrievich Mazepin a été ajouté, puis maintenu par le Conseil sur la liste des personnes, des entités et des organismes faisant l’objet de mesures restrictives figurant à l’annexe de la décision 2014/145/PESC du Conseil, du 17 mars 2014, concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (JO 2014, L 78, p. 16), ainsi que sur la liste des personnes physiques et morales, des entités et des organismes figurant à l’annexe I du règlement (UE) no 269/2014 du Conseil, du 17 mars 2014, concernant des mesures restrictives eu égard aux actions compromettant ou menaçant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine (JO 2014, L 78, p. 6).

7        M. Mazepin a introduit un recours en annulation contre des actes du Conseil le maintenant sur ces listes. Il a, par la suite, adapté ce recours, de sorte que celui-ci vise également à l’annulation de nouveaux actes ayant le même effet. Par les ordonnances du 1er mars 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 R, EU:T:2023:102), et du 19 juillet 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RII, EU:T:2023:406), le président du Tribunal fait droit à deux demandes en référé successives introduites par M. Mazepin et a ordonné, pour partie, le sursis à l’exécution des actes du Conseil visés par ledit recours.

8        Par un acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 7 septembre 2023, M. Mazepin a introduit une troisième demande en référé.

9        Par l’ordonnance du 7 septembre 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RIII), adoptée sur le fondement de l’article 157, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, le président du Tribunal a fait droit à cette troisième demande en référé.

10      Le 14 septembre 2023, M. Mazepin a introduit, en application de l’article 164 du règlement de procédure du Tribunal, une demande de rectification de cette ordonnance.

11      Par l’ordonnance attaquée, le président du Tribunal a, sur le fondement de l’article 157, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, ordonné, en substance :

–        au point 1 du dispositif de cette ordonnance, le sursis à l’exécution du « relistage » annoncé de M. Mazepin en soumettant ce sursis à exécution à certaines conditions ;

–        au point 2 de ce dispositif, la publication au Journal officiel de l’Union européenne d’une notice indiquant clairement qu’il est sursis à l’exécution de ce « relistage » annoncé ;

–        au point 3 dudit dispositif, au Conseil de prendre les mesures nécessaires pour assurer que les États membres se conforment, de manière effective et complète, à l’ordonnance du président du Tribunal du 19 juillet 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RII, EU:T:2023:406), et, en particulier, pour assurer que le visa délivré à M. Mazepin le 7 août 2023 ou tout autre visa qui pourrait devenir nécessaire couvre au moins le territoire des États membres de l’espace Schengen et demeure valide durant la période nécessaire pour permettre à M. Mazepin d’exercer effectivement les droits octroyés par cette ordonnance, et

–        au point 4 du même dispositif, au Conseil d’informer le président du Tribunal des mesures adoptées.

12      En outre, au point 5 du dispositif de l’ordonnance attaquée, le président du Tribunal a rapporté son ordonnance du 7 septembre 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RIII).

13      Selon le Conseil, il convient que la Cour fasse droit à la présente demande en référé et suspende les effets de l’ordonnance attaquée afin d’éviter la survenance d’un préjudice grave et irréparable.

14      À cet égard, le Conseil fait valoir, en particulier, que, en l’absence de suspension des effets de l’ordonnance attaquée, il serait obligé de prendre immédiatement les décisions que comporte l’exécution des mesures provisoires qui figurent au dispositif de celle-ci. Ainsi, ces mesures provisoires produiraient leurs effets avant que la demande en référé ou le pourvoi ne soient examinés par la Cour, de sorte que ces derniers seraient largement privés de leur effectivité. De surcroît, l’adoption de telles décisions, dont certaines ne relèveraient pas de la compétence du Conseil, serait de nature à saper la crédibilité des actions menées par celui-ci en matière de politique étrangère et de sécurité commune ainsi qu’à porter gravement atteinte à sa réputation.

15      En l’espèce, il importe de relever, d’une part, que l’ordonnance du président du Tribunal du 7 septembre 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RIII), ordonnait des mesures provisoires qui apparaissent comme étant largement analogues, en substance, à celles qui sont ordonnées par l’ordonnance attaquée. Or, cette ordonnance du 7 septembre 2023 a été annulée dans son intégralité par l’ordonnance du vice-président de la Cour du 28 septembre 2023, Mazepin/Conseil [C-564/23 P(R)], au motif que les mesures provisoires qu’elle ordonnait dépassaient l’office du juge des référés.

16      D’autre part, il ne saurait être exclu, au vu des éléments avancés par le Conseil, que l’application intégrale de l’ordonnance attaquée serait susceptible de lui causer un préjudice grave et irréparable avant la date à laquelle la Cour adoptera soit l’ordonnance mettant fin à la présente procédure en référé, soit celle se prononçant sur le pourvoi dans l’affaire C‑585/23 P(R).

17      Cela étant, l’application du point 4 du dispositif de l’ordonnance attaquée, qui se borne à enjoindre au Conseil d’informer le président du Tribunal des mesures adoptées, n’est pas de nature, en tant que telle, à causer un tel préjudice au Conseil.

18      Par ailleurs, dans la mesure où l’ordonnance du président du Tribunal du 7 septembre 2023, Mazepin/Conseil (T‑743/22 RIII), a été annulée par l’ordonnance du vice-président de la Cour du 28 septembre 2023, Mazepin/Conseil [C‑564/23 P(R)], le point 5 de l’ordonnance attaquée n’est pas susceptible de modifier la situation juridique des parties avant la date mentionnée au point 16 de la présente ordonnance.

19      En conséquence, il est dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice d’ordonner, avant même que l’autre partie ait présenté ses observations, le sursis à l’exécution des points 1 à 3 du dispositif de l’ordonnance attaquée jusqu’à l’adoption de l’ordonnance qui interviendra le plus tôt entre celle mettant fin à la présente procédure en référé et celle se prononçant sur le pourvoi dans l’affaire C‑585/23 P(R).

Par ces motifs, le vice-président de la Cour ordonne :

1)      Il est sursis à l’exécution des points 1 à 3 du dispositif de l’ordonnance du président du Tribunal de l’Union européenne du 19 septembre 2023, Mazepin/Conseil (T743/22 RIII), jusqu’à l’adoption de l’ordonnance qui interviendra le plus tôt entre celle mettant fin à la présente procédure en référé et celle se prononçant sur le pourvoi dans l’affaire C585/23 P(R).

2)      Les dépens sont réservés.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.