Language of document : ECLI:EU:T:2023:857

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

20 décembre 2023 (*)

« Accès aux documents – Règlement (CE) n° 1049/2001 – Documents concernant l’adoption par le CRU d’un dispositif de résolution à l’égard de Banco Popular Español – Décision du comité d’appel du CRU relative à une décision confirmative du CRU de refus d’accès – Droit d’accès au dossier – Article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux »

Dans l’affaire T‑496/18,

Organización de Consumidores y Usuarios (OCU), établie à Madrid (Espagne), représentée par Mes E. Martínez Martínez et C. López-Mélida de Ramón, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de résolution unique (CRU), représenté par Mmes A. Lapresta Bienz, H. Ehlers, M. Fernández Rupérez et M. J. Rius Riu, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par

Banco Santander, SA, établie à Santander (Espagne), représentée par Mes J. Rodríguez Cárcamo et A. Rodríguez Conde, avocats,

et par

Commission européenne, représentée par Mmes C. Ehrbar, A. Steiblytė et P. Němečková, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. A. Kornezov, président, G. De Baere (rapporteur) et K. Kecsmár, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Organización de Consumidores y Usuarios (OCU), demande l’annulation de la décision finale du comité d’appel du Conseil de résolution unique (CRU) (ci-après le « comité d’appel ») du 19 juin 2018 relative à l’affaire 54/2017 (ci-après la « décision attaquée »), concernant un refus d’accès à des documents relatifs à l’adoption d’un dispositif de résolution à l’égard de Banco Popular Español, SA (ci-après « Banco Popular »).

 Antécédents du litige

2        La requérante est une association de droit privé à but non lucratif ayant comme objet social, notamment, la défense des droits des consommateurs et des usagers auprès de l’administration générale de l’État espagnol.

3        Le 7 juin 2017, la session exécutive du CRU a adopté la décision SRB/EES/2017/08 concernant l’adoption d’un dispositif de résolution à l’égard de Banco Popular (ci-après le « dispositif de résolution »), sur le fondement du règlement (UE) no 806/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 15 juillet 2014, établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) no 1093/2010 (JO 2014, L 225, p. 1). Le même jour, la Commission européenne a adopté la décision (UE) 2017/1246, approuvant le dispositif de résolution à l’égard de Banco Popular (JO 2017, L 178, p. 15).

4        Par lettres des 29 juin et 28 juillet 2017, la requérante a présenté au CRU des demandes d’accès à différents documents figurant dans le dossier de la procédure de résolution de Banco Popular sur le fondement de l’article 42 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), de l’article 15, paragraphe 3, TFUE et du règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43) (ci-après les « demandes initiales »).

5        Par décision SRB/CM/ARES(2017)4720249 du 25 août 2017 (ci-après la « décision initiale »), le CRU a identifié 19 documents visés par les demandes initiales. Il a communiqué à la requérante les liens vers les sites Internet permettant d’accéder à certains de ces documents déjà rendus publics et lui a refusé l’accès aux autres documents demandés.

6        Le 14 septembre 2017, la requérante a présenté au CRU une demande confirmative d’accès à la version intégrale de tous les documents visés dans ses demandes initiales, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 1049/2001 (ci-après la « demande confirmative »).

7        Par décision SRB/CM01/ARES(2017)5848453 du 23 octobre 2017 (ci-après la « décision confirmative initiale »), le CRU a confirmé son refus de donner accès aux documents demandés.

8        Le 4 décembre 2017, la requérante a formé un recours devant le comité d’appel contre la décision confirmative initiale conformément à l’article 85, paragraphe 3, et à l’article 90, paragraphe 3, du règlement n° 806/2014.

9        Par courriel du 6 février 2018, le comité d’appel a communiqué à la requérante sa lettre du 5 février 2018, par laquelle il lui notifiait que le CRU avait publié sur son site Internet, le 2 février 2018, différents documents relatifs à la résolution de Banco Popular, afin de se conformer à des décisions du comité d’appel dans des affaires similaires. Il lui a accordé un délai de deux semaines pour décider si elle souhaitait poursuivre la procédure.

10      Par lettre du 20 février 2018, la requérante a informé le comité d’appel qu’elle entendait poursuivre la procédure.

11      Le 13 mars 2018, à la lumière de décisions du comité d’appel du 28 novembre 2017 intervenues dans des affaires similaires, le CRU a adopté la décision confirmative SRB/CM01/ARES(2018)1512818 modifiant sa décision confirmative initiale (ci-après la « décision confirmative révisée »). Le CRU a identifié 23 documents comme étant visés par les demandes de la requérante. Il a accordé l’accès à certains de ces documents et refusé l’accès à d’autres sur le fondement des exceptions prévues à l’article 4 du règlement n° 1049/2001.

12      Le 27 mars 2018, le comité d’appel a invité la requérante à indiquer si son recours était également dirigé contre la décision confirmative révisée, ce qu’elle a confirmé.

13      Dans la décision attaquée, pour chacun des documents demandés auxquels le CRU avait refusé l’accès dans leur intégralité, le comité d’appel a examiné si ce dernier avait correctement appliqué les exceptions à l’accès aux documents prévues par l’article 4 du règlement n° 1049/2001. D’une part, pour certains des documents demandés, le comité d’appel a confirmé l’appréciation du CRU refusant d’en divulguer les parties expurgées. D’autre part, pour les autres documents demandés, il a considéré que les expurgations décidées par le CRU n’étaient pas suffisamment justifiées et il a renvoyé l’affaire au CRU pour qu’il modifie sa décision confirmative révisée en application de l’article 85, paragraphe 8, du règlement n° 806/2014.

14      Par ailleurs, par requêtes déposées au greffe du Tribunal les 7 août et 5 octobre 2017, la requérante a introduit deux recours en annulation contre le dispositif de résolution qui ont été enregistrés respectivement sous les numéros T‑512/17 et T‑701/17.

 Conclusions des parties

15      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner le CRU aux dépens.

16      Le CRU conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme étant irrecevable et, à titre subsidiaire, comme étant non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

17      La Commission et Banco Santander, SA concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

18      À l’appui de son recours, la requérante soulève trois moyens. Le premier moyen est tiré de la violation du droit d’accès au dossier consacré par l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte et des droits de la défense. Le deuxième moyen est tiré de la violation des dispositions relatives à la confidentialité et au secret professionnel prévues par l’article 88 du règlement n° 806/2014, l’article 84 de la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) n° 1093/2010 et (UE) n° 648/2012 (JO 2014, L 173, p. 190), et l’article 53 de la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE (JO 2013, L 176, p. 338). Le troisième moyen est tiré de la violation de l’obligation de motivation consacrée par l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la Charte.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation du droit d’accès au dossier consacré par l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte et des droits de la défense

19      La requérante fait valoir que le comité d’appel, en ne lui reconnaissant pas un droit d’accès à l’intégralité des documents demandés, a violé, d’une part, le droit à une bonne administration consacré par l’article 41 de la Charte, en ce qu’il inclut, dans son paragraphe 2, sous b), le droit d’accès au dossier et, d’autre part, les droits de la défense.

20      La requérante reproche au comité d’appel d’avoir appliqué uniquement le règlement n° 1049/2001, régissant le droit d’accès du public aux documents consacré par l’article 42 de la Charte, et de ne pas lui avoir reconnu un droit d’accès au dossier sur le fondement de l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte.

21      Elle fait valoir que le droit d’accès aux documents, consacré par l’article 42 de la Charte et régi par le règlement n° 1049/2001, concerne l’accès aux documents de « tout citoyen de l’Union ». En revanche, en qualité de représentante de nombreuses personnes lésées par le dispositif de résolution, elle disposerait d’un droit d’accès à l’intégralité des documents qui le soutiennent sur le fondement de l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte. Le droit d’accès au dossier consacré par cette disposition garantirait à toute personne affectée par une décision d’une institution ou d’un organe de l’Union d’avoir accès à l’intégralité du dossier étayant cette décision afin d’en connaître la motivation, de pouvoir introduire un recours contre celle-ci et d’exercer ses droits de la défense.

22      Le CRU, soutenu par Banco Santander, fait valoir que la requérante n’a pas présenté de demande d’accès au dossier sur le fondement de l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte ou de l’article 90, paragraphe 4, du règlement n° 806/2014, mais s’est exclusivement fondée sur le droit d’accès public aux documents en vertu de l’article 42 de la Charte et du règlement n° 1049/2001. Il soutient que le comité d’appel n’est pas compétent pour statuer sur les demandes d’accès au dossier, que la requérante ne disposait pas d’un droit d’accès au dossier et que l’accès du public aux documents, d’une part, et l’accès au dossier, d’autre part, constituent deux régimes distincts soumis à des procédures distinctes.

23      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que l’article 41 de la Charte, relatif au droit à une bonne administration, indique dans son paragraphe 2, que ce droit comporte notamment :

« b)       le droit d’accès de toute personne au dossier qui la concerne, dans le respect des intérêts légitimes de la confidentialité et du secret professionnel et des affaires ».

24      L’article 42 de la Charte, relatif au droit d’accès aux documents, prévoit :

« Tout citoyen de l’Union ainsi que toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un État membre a un droit d’accès aux documents des institutions, organes et organismes de l’Union, quel que soit leur support. »

25      Selon l’article 85, paragraphe 3, du règlement n° 806/2014, le comité d’appel est compétent pour statuer sur les recours formés par toute personne physique ou morale, y compris les autorités de résolution, contre « une décision du CRU visée à l’article 10, paragraphe 10, à l’article 11, à l’article 12, paragraphe 1, aux articles 38 à 41, à l’article 65, paragraphe 3, à l’article 71 et à l’article 90, paragraphe 3, qui lui est adressée ou qui la concerne directement et individuellement. »

26      L’article 90 du règlement n° 806/2014, relatif à l’accès aux documents, prévoit :

« 1. Le règlement n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil […] s’applique aux documents détenus par le CRU.

[…]

3. Les décisions prises par le CRU au titre de l’article 8 du règlement n° 1049/2001 peuvent faire l’objet d’une plainte auprès du Médiateur européen ou faire l’objet d’une procédure devant la Cour de justice, le cas échéant après un recours auprès du comité d’appel visé à l’article 85 du présent règlement, dans les conditions prévues respectivement aux articles 228 et 263 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

4. Les personnes qui font l’objet de décisions du CRU ont le droit d’avoir accès au dossier de celui-ci, sous réserve de l’intérêt légitime d’autres personnes à ce que leurs secrets d’affaires ne soient pas divulgués. Le droit d’accès au dossier ne s’étend pas aux informations confidentielles ni aux documents internes préparatoires du CRU. »

27      En l’espèce, il convient de relever que les demandes initiales et la demande confirmative étaient fondées uniquement sur le droit d’accès du public aux documents au titre de l’article 42 de la Charte, de l’article 15, paragraphe 3, TFUE et du règlement n° 1049/2001.

28      De plus, tant dans la décision initiale que dans la décision confirmative initiale et la décision confirmative révisée (ci-après, prises ensemble, les « décisions confirmatives »), le CRU a traité les demandes de la requérante comme étant des demandes d’accès public aux documents au titre de l’article 90, paragraphe 1, du règlement n° 806/2014 et du règlement n° 1049/2001.

29      En outre, le recours de la requérante devant le comité d’appel contre les décisions confirmatives était fondé explicitement sur l’article 85, paragraphe 3, et l’article 90, paragraphe 3, du règlement n° 806/2014.

30      Dans la décision attaquée, en réponse aux arguments de la requérante selon lesquels le refus du CRU de lui accorder l’accès à l’intégralité des documents demandés constituait notamment une violation du droit d’accès au dossier consacré à l’article 41, paragraphe 2, de la Charte, le comité d’appel a rappelé que le régime d’accès aux documents prévu par l’article 90, paragraphe 1, du règlement n° 806/2014 et par le règlement n° 1049/2001 s’appliquait. Il a indiqué que, en application de l’article 85, paragraphe 3, du règlement n° 806/2014, il n’était pas compétent pour statuer sur un recours introduit contre une décision du CRU adoptée au titre de l’article 90, paragraphe 4, du règlement n° 806/2014. Il a estimé que la requérante ne pouvait pas invoquer, dans le cadre de son recours, un droit d’accès au dossier du CRU sur le fondement de cette disposition. Il a considéré que, dès lors, il devait déterminer si la requérante disposait d’un droit d’accès aux documents demandés, intégralement ou partiellement, uniquement au regard du régime d’accès du public aux documents prévu par le règlement n° 1049/2001 et par la décision SRB/ES/2017/01 du CRU, du 9 février 2017, sur l’accès du public aux documents du CRU.

31      En premier lieu, il convient de considérer que, par son premier moyen, la requérante reproche, en substance, au comité d’appel de ne pas lui avoir reconnu un droit d’accès au dossier sur le fondement de l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte.

32      À cet égard, il y a lieu de relever, à l’instar du CRU, que la requérante, en présentant une demande confirmative et en introduisant un recours devant le comité d’appel, a suivi la procédure spécifique aux demandes d’accès public aux documents prévue par le règlement n° 1049/2001.

33      Il ressort du fondement des demandes de la requérante et de la procédure suivie par celle-ci, qu’elle a présenté au CRU non pas une demande d’accès au dossier sur le fondement de l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte, mais des demandes d’accès aux documents sur le fondement du règlement n° 1049/2001.

34      En outre, il y a lieu de constater que, conformément à l’article 85, paragraphe 3, et à l’article 90, paragraphe 3, du règlement n° 806/2014, le comité d’appel est compétent pour connaître de recours formés contre des décisions du CRU relatives à des demandes confirmatives d’accès à des documents adoptées au titre de l’article 8 du règlement n° 1049/2001. En revanche, le comité d’appel n’est pas compétent pour statuer sur un recours contre une décision de refus d’accès au dossier sur le fondement de l’article 90, paragraphe 4, du règlement n° 806/2014.

35      Ainsi, en l’espèce, le comité d’appel, dans le cadre du recours contre les décisions confirmatives adoptées sur le fondement du règlement n° 1049/2001, était compétent uniquement pour examiner si le CRU avait fait une application correcte des exceptions prévues par ce règlement en refusant à la requérante l’accès à l’intégralité des documents demandés.

36      En tout état de cause, s’agissant du respect des droits de la défense tel qu’il est consacré à l’article 41, paragraphe 2, de la Charte, il y a lieu de rappeler que celui-ci comporte le droit d’être entendu et le droit d’accès au dossier dans le respect des intérêts légitimes de la confidentialité. Ainsi, le droit d’accès au dossier consacré à l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte a trait à des personnes ou à des entreprises faisant l’objet de procédures ouvertes ou de décisions prises à leur encontre (arrêt du 1er juin 2022, Del Valle Ruíz e.a./Commission et CRU, T‑510/17, EU:T:2022:312, points 461 et 463).

37      Il ressort de l’article 90, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 que le droit d’accès au dossier concerne l’entité faisant l’objet du dispositif de résolution, à savoir Banco Popular, et non ses anciens actionnaires ou ses créanciers (arrêt du 1er juin 2022, Del Valle Ruíz e.a./Commission et CRU, T‑510/17, EU:T:2022:312, point 464). Ainsi, la requérante, en tant qu’association représentant d’anciens actionnaires de Banco Popular, ne saurait valablement soutenir qu’elle disposait d’un droit d’accès au dossier ni, partant, invoquer une violation de celui-ci.

38      Partant, la requérante ne saurait valablement reprocher au comité d’appel, dans le cadre d’un recours contre les décisions confirmatives concernant l’accès du public aux documents sur le fondement de l’article 42 de la Charte et du règlement n° 1049/2001, de ne pas lui avoir reconnu un droit d’accès au dossier sur le fondement de l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte.

39      En second lieu, il convient de considérer que, par son premier moyen, la requérante reproche également, en substance, au comité d’appel de ne pas lui avoir reconnu un droit d’accès à l’intégralité des documents demandés, compte tenu du fait que, en tant que représentante de personnes lésées par le dispositif de résolution, elle disposait d’un droit d’accès à l’ensemble de ces documents afin d’exercer ses droits de la défense dans le cadre de recours visant ce dispositif.

40      Il y a lieu de relever que, certes, dans sa seconde demande initiale du 28 juillet 2017, la requérante a mentionné le fait qu’elle demandait l’accès au dispositif de résolution et aux documents qui le soutiennent « afin de pouvoir le contester au nom de [ses] affiliés devant le Tribunal, c’est-à-dire dans le cadre de l’exercice légitime des droits fondamentaux à une bonne administration, des droits de la défense et du droit à la protection juridictionnelle effective de [ses] affiliés consacrés par les articles 41 et 47 de la Charte ». Dans la demande confirmative, la requérante a fait valoir que le refus du CRU de lui donner accès aux documents demandés constituait une violation du droit à une bonne administration consacré par l’article 41 de la Charte, en tant qu’il incluait les droits de la défense et le droit d’accès aux documents.

41      Toutefois, les considérations relatives à l’objectif poursuivi par les demandes d’accès aux documents ainsi que l’affirmation de la requérante selon laquelle le refus du CRU de lui donner accès aux documents demandés dans la décision initiale constituait une violation de l’article 41 de la Charte ne sont pas pertinentes dans le cadre d’une demande d’accès public aux documents au titre du règlement n° 1049/2001.

42      En effet, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, s’agissant de l’intérêt spécifique qu’aurait la requérante à prendre connaissance des documents dont la communication était demandée, il convient de souligner que le règlement n° 1049/2001 a pour objet d’ouvrir un droit d’accès du public en général aux documents des institutions et non d’édicter des règles destinées à protéger l’intérêt spécifique que telle ou telle personne pourrait avoir à accéder à l’un de ceux‑ci (arrêt du 1er février 2007, Sison/Conseil, C‑266/05 P, EU:C:2007:75, point 43 ; voir également, par analogie, arrêts du 27 avril 2023, Aeris Invest/BCE, C‑782/21 P, non publié, EU:C:2023:345, point 37, et du 6 octobre 2021, OCU/BCE, T‑15/18, non publié, EU:T:2021:661, point 104).

43      En outre, selon l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001, le demandeur d’accès n’est pas tenu de justifier sa demande et n’a donc pas à démontrer un quelconque intérêt pour avoir accès aux documents demandés. Il s’ensuit que la demande de la requérante doit être examinée de la même façon que le serait une demande émanant de toute autre personne (arrêt du 6 juillet 2006, Franchet et Byk/Commission, T‑391/03 et T‑70/04, EU:T:2006:190, point 82 ; voir également, par analogie, arrêt du 6 octobre 2021, OCU/BCE, T‑15/18, non publié, EU:T:2021:661, point 105).

44      Partant, lorsqu’il décide sur une demande d’accès à des documents qui lui est soumise sur le fondement du règlement n° 1049/2001, le CRU n’est pas tenu, contrairement à ce que soutient la requérante, de tenir compte du fait que le demandeur d’accès puisse avoir besoin de ces documents aux fins de la préparation d’une procédure judiciaire, notamment d’un recours en annulation (voir, par analogie, arrêt du 27 avril 2023, Aeris Invest/BCE, C‑782/21 P, non publié, EU:C:2023:345, point 38).

45      Dans ces conditions, à supposer même que la requérante ait le droit d’accéder à un document détenu par le CRU, qui lui serait nécessaire pour préparer au mieux son recours en annulation de la décision concernant le dispositif de résolution, un tel droit ne saurait s’exercer spécifiquement par le recours aux mécanismes d’accès du public aux documents mis en place par le règlement n° 1049/2001 (arrêt du 1er février 2007, Sison/Conseil, C‑266/05 P, EU:C:2007:75, point 48 ; voir également, par analogie, arrêt du 27 avril 2023, Aeris Invest/BCE, C‑782/21 P, non publié, EU:C:2023:345, point 39).

46      Il s’ensuit que la méconnaissance éventuelle d’un tel droit ne saurait résulter d’une décision de refus d’accès adoptée au titre du règlement n° 1049/2001 ni, dès lors, donner lieu à censure juridictionnelle, à la faveur d’un recours en annulation dirigé contre ladite décision de refus (arrêt du 1er février 2007, Sison/Conseil, C‑266/05 P, EU:C:2007:75, point 52 ; voir également, par analogie, arrêt du 27 avril 2023, Aeris Invest/BCE, C‑782/21 P, non publié, EU:C:2023:345, point 40).

47      Partant, à supposer même que les documents demandés s’avèrent nécessaires à la défense de la requérante dans le cadre de ses recours en annulation du dispositif de résolution, question qui relève de l’examen de ces affaires, cette circonstance n’est pas pertinente pour apprécier la validité de la décision attaquée (voir, par analogie, arrêt du 6 octobre 2021, OCU/BCE, T‑15/18, non publié, EU:T:2021:661, point 106).

48      Par ailleurs, dans la réplique, la requérante soutient que, même dans l’hypothèse dans laquelle elle n’aurait pas fondé sa demande d’accès aux documents sur le droit d’accès au dossier consacré par l’article 41, paragraphe 2, de la Charte, le CRU aurait eu l’obligation de répondre à sa demande sur le fondement de cette disposition. Le fait qu’elle ait indiqué que l’accès aux documents était nécessaire pour faire valoir ses droits de la défense dans une procédure judiciaire impliquerait que sa demande était fondée sur l’article 41, paragraphe 2, de la Charte.

49      Or, dans l’hypothèse même où le CRU aurait été tenu d’interpréter la demande présentée par la requérante comme étant une demande d’accès au dossier fondée implicitement sur l’article 41, paragraphe 2, de la Charte et de l’article 90, paragraphe 4, du règlement n° 806/2014, il suffit de rappeler que le comité d’appel n’est pas compétent pour statuer sur les recours concernant des décisions de refus d’accès au dossier. Il s’ensuit que cet argument est inopérant.

50      Il ressort de l’ensemble de ce qui précède que la requérante ne saurait valablement soutenir que le comité d’appel a violé l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte et que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation des dispositions relatives à la confidentialité et au secret professionnel prévues par l’article 88 du règlement n° 806/2014, l’article 84 de la directive 2014/59 et l’article 53 de la directive 2013/36

51      La requérante fait valoir que le comité d’appel, en ne lui octroyant pas l’accès à l’intégralité des documents demandés, a fait une application erronée des exceptions à l’accès aux documents prévues par l’article 88 du règlement n° 806/2014, l’article 84 de la directive 2014/59 et l’article 53 de la directive 2013/36, étant donné que cet accès était demandé dans le cadre de l’exercice des droits de la défense et du droit à une protection juridictionnelle effective.

52      Elle considère que les personnes directement affectées par les décisions du CRU disposent d’un droit spécifique d’accès au dossier en vertu de l’article 41 de la Charte. Dans ce cas, comme en l’espèce, les exceptions à l’accès aux documents relatives à la confidentialité et au secret professionnel invoquées par le comité d’appel, ne seraient pas applicables. Elle relève que l’article 88 du règlement n° 806/2014, l’article 84 de la directive 2014/59 et l’article 53 de la directive 2013/36 contiennent tous la même limite au respect de la confidentialité, à savoir l’existence d’une procédure judiciaire. Selon la requérante, les obligations de confidentialité et de secret professionnel incombant aux institutions et aux organes de l’Union ne prévalent pas lorsqu’elles se heurtent au droit à une bonne administration en ce qu’il prévoit le droit d’accès au dossier consacré par l’article 41, paragraphe 2, de la Charte et à la protection juridictionnelle effective.

53      Le CRU soutient que ce moyen est irrecevable sur le fondement de l’article 76, sous d), du règlement de procédure.

54      Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, la requête introductive d’instance doit contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autre information à l’appui. La requête doit, de ce fait, expliciter en quoi consiste le moyen sur lequel le recours est fondé, de sorte que sa seule énonciation abstraite ne répond pas aux exigences du règlement de procédure (voir arrêts du 12 mars 2020, Elche Club de Fútbol/Commission, T‑901/16, EU:T:2020:97, point 79 et jurisprudence citée, et du 6 octobre 2021, Aeris Invest/BCE, T‑827/17, EU:T:2021:660, point 213 et jurisprudence citée).

55      La sécurité juridique et une bonne administration de la justice exigent, pour qu’un recours ou, plus spécifiquement, un moyen du recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent de façon cohérente et compréhensible du texte même de la requête (voir arrêts du 6 octobre 2021, OCU/BCE, T‑15/18, non publié, EU:T:2021:661, point 67 et jurisprudence citée, et du 1er juin 2022, Del Valle Ruíz e.a./Commission et CRU, T‑510/17, EU:T:2022:312, point 562 et jurisprudence citée).

56      Force est de constater que, par son deuxième moyen, la requérante se borne à faire valoir de façon abstraite que le comité d’appel aurait commis des erreurs en appliquant certaines dispositions relatives à la confidentialité. Cependant, la requérante ne fait aucune référence à la décision attaquée ni au raisonnement suivi par le comité d’appel consistant à apprécier si le CRU, dans les décisions confirmatives, avait effectué une application correcte des exceptions prévues à l’article 4 du règlement n° 1049/2001. De plus, comme le relève le CRU, la requérante n’identifie pas quel document demandé serait concerné. Ainsi, la requête ne permet pas de comprendre en quoi auraient consisté les prétendues erreurs commises par le comité d’appel.

57      Partant, le deuxième moyen ne répond pas aux exigences de l’article 76, sous d), du règlement de procédure et doit être rejeté comme étant irrecevable.

58      En tout état de cause, pour autant que la requérante soutient que les dispositions relatives à la confidentialité et au secret professionnel n’étaient pas applicables dans le cadre d’une demande d’accès au dossier au titre de l’article 41, paragraphe 2, de la Charte et dans la mesure où les documents demandés étaient nécessaires à l’exercice de ses droits de la défense dans le cadre d’une procédure juridictionnelle, il suffit de constater qu’il ressort de l’analyse du premier moyen, notamment des points 38 et 47 ci-dessus, que cet argument s’appuie sur une prémisse erronée.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation consacrée par l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la Charte

59      La requérante fait valoir que le rejet partiel de sa demande d’accès aux documents par le CRU et la transmission de la version non confidentielle des documents demandés violent le droit à une bonne administration consacré par l’article 41 de la Charte, en ce qu’il inclut, dans son paragraphe 2, sous c), l’obligation de motivation, étant donné que ces documents sont incomplets et dépourvus de la motivation requise. La requérante ne pourrait pas connaître la motivation du dispositif de résolution de Banco Popular et des documents sur lesquels celle-ci s’appuie et ne pourrait la contester dans le cadre de l’exercice de ses droits de la défense. Elle soutient que la décision attaquée, par laquelle le comité d’appel lui a donné partiellement accès à ces documents, constitue également une violation de l’obligation de motivation des actes consacrée par l’article 41 de la Charte.

60      Le CRU, soutenu par Banco Santander, fait notamment valoir que, par ce moyen, la requérante invoque un prétendu défaut de motivation des documents demandés et non de la décision attaquée.

61      Il y a lieu de constater que, par ce moyen, la requérante soutient, en substance, qu’un accès à des versions non confidentielles des documents demandés ne lui permet pas de connaître la motivation complète de ces documents.

62      Or, il convient de rappeler que le présent recours n’a pas pour objet une demande d’annulation des documents demandés, dans le cadre de laquelle une éventuelle insuffisance de motivation de ceux-ci pourrait être invoquée, mais vise au contrôle de légalité de la décision du comité d’appel en ce qu’il a confirmé le refus du CRU de donner accès à l’intégralité de ces documents.

63      À cet égard, la requérante ne prétend pas que le raisonnement du comité d’appel n’était pas clair ni compréhensible en ce sens qu’il n’expliquerait pas suffisamment les raisons qui l’ont amené à confirmer le refus du CRU, dans les décisions confirmatives, de ne pas lui donner accès à l’intégralité des documents demandés. Ainsi, la requérante ne soulève aucun argument visant à reprocher au comité d’appel de ne pas avoir suffisamment motivé la décision attaquée.

64      Il en ressort que les arguments de la requérante relatifs à l’insuffisance de motivation des documents demandés ne sont pas susceptibles d’entraîner l’annulation de la décision attaquée et doivent donc être rejetés comme étant inopérants.

65      Partant, le troisième moyen doit être rejeté.

 Sur la demande de mesure d’instruction

66      La requérante demande au Tribunal, d’ordonner, au titre d’une mesure d’instruction, la production par le comité d’appel d’une copie de l’enregistrement de l’audience qui s’est tenue devant lui le 16 avril 2018 dans le cadre de la procédure de recours contre les décisions confirmatives.

67      S’agissant de demandes de mesures d’organisation de la procédure ou d’instruction soumises par une partie à un litige, il y a lieu de rappeler que le Tribunal est seul juge de la nécessité éventuelle de compléter les éléments d’information dont il dispose sur les affaires dont il est saisi (voir arrêts du 28 avril 2022, Changmao Biochemical Engineering/Commission, C‑666/19 P, EU:C:2022:323, point 156 et jurisprudence citée, et du 1er juin 2022, Del Valle Ruíz e.a./Commission et CRU, T‑510/17, EU:T:2022:312, point 571 et jurisprudence citée).

68      Il importe de rappeler à cet égard que, pour permettre au Tribunal de juger de l’utilité de mesures d’organisation de la procédure, la partie qui en fait la demande doit identifier les documents sollicités et fournir au Tribunal au moins un minimum d’éléments accréditant l’utilité de ces documents pour les besoins de l’instance (voir arrêt du 1er juin 2022, Del Valle Ruíz e.a./Commission et CRU, T‑510/17, EU:T:2022:312, point 572 et jurisprudence citée).

69      Or, il y a lieu de constater que la requérante n’a présenté aucun indice précis et pertinent de nature à expliquer de quelle manière le document dont elle demande la production pouvait présenter un intérêt pour la solution du litige.

70      Il s’ensuit que la demande de mesure d’instruction de la requérante doit être rejetée.

71      Il ressort de l’ensemble de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

72      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il convient de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le CRU et par Banco Santander, conformément aux conclusions de ces derniers.

73      En vertu de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. La Commission supportera donc ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Organización de Consumidores y Usuarios (OCU) est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le Conseil de résolution unique (CRU) et par Banco Santander, SA.

3)      La Commission européennesupportera ses propres dépens.

Kornezov

De Baere

Kecsmár

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 décembre 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’espagnol.