Language of document : ECLI:EU:T:2013:662

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (septième chambre)

28 novembre 2013 (1)

« Recours en carence – Absence d’engagement d’une procédure en manquement – Irrecevabilité manifeste – Recours manifestement dépourvu de tout fondement en droit – Incompétence manifeste»

Dans l’affaire T-474/13,

ADUGI Onlus – Associazione a difesa degli utenti della giustizia internazionale Onlus et Confomef – Confederazione Organismi di Mediazione – Enti di Formazione e Associazioni Culturali, établies à Latina et Rome (Italie), représentées par Me L. Di Muro, avocat,

parties requérantes,

contre

Conseil de l’Union européenne,

Commission européenne,

République italienne,

parties défenderesses,

ayant pour objet, d’une part, une demande visant à faire constater que le Conseil et la Commission se sont illégalement abstenus d’agir et, d’autre part, une demande visant à obtenir réparation du préjudice prétendument subi du fait de cette carence,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. M. van der Woude (rapporteur), président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. I. Ulloa Rubio, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Procédure et conclusions de la partie requérante 

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 septembre 2013, les parties requérantes ont introduit le présent recours.

2        En substance, les parties requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater que le Conseil et la Commission se sont illégalement abstenues d’adopter les mesures de nature à mettre fin à la non-transposition en droit italien de la directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil, du 21 mai 2008, sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale (JO L 136, p. 3);

–        condamner le Conseil et la Commission à réparer le préjudice prétendument subi du fait de cette carence;

–        renvoyer la présente affaire devant la Cour de justice, afin que soit constatée l’éventuelle responsabilité de la République italienne.

 En droit

3        Aux termes de l’article 111 du règlement de procédure, lorsque le recours est manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

4        En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

5        Dans la présente affaire, les parties requérantes tendent à obtenir du Tribunal, en premier lieu, qu’il constate la carence de la Commission et du Conseil en ce que ces institutions se sont illégalement abstenues d’adopter les mesures de nature à mettre fin à la non-transposition en droit italien de la directive 2008/52/CE. En substance, les parties requérantes reprochent donc au Conseil et à la Commission de ne pas avoir engagé la procédure prévue à l’article 258 TFUE à l’encontre de la République italienne.

6        Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, est irrecevable le recours en carence intenté par une personne physique ou morale et visant à faire constater que, en n’engageant pas contre un État membre une procédure en constatation de manquement, la Commission s’est abstenue de statuer en violation du traité (arrêt de la Cour du 14 février 1989, Star Fruit/Commission, 247/87, Rec. p. 291, et ordonnance du Tribunal du 12 novembre 1996, SDDDA/Commission, T‑47/96, Rec. p. II-1559, point 41). En effet, les personnes physiques ou morales ne peuvent se prévaloir de l’article 265, troisième alinéa, TFUE qu’en vue de faire constater qu’une institution, un organe ou un organisme de l’Union s’est abstenu d’adopter, en violation du traité, des actes, autres que des recommandations ou des avis, dont elles sont les destinataires potentiels ou qui les concerneraient soit de manière directe, soit, selon le cas, de manière directe et individuelle (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 26 novembre 1996, T. Port, C‑68/95, Rec. p. I‑6065, points 58 et 59).

7        Or, dans le cadre de la procédure en constatation de manquement régie par l’article 258 TFUE, les seuls actes que la Commission peut être amenée à prendre sont adressés aux États membres (ordonnances du Tribunal du 29 novembre 1994, Bernardi/Commission, T‑479/93 et T‑559/93, Rec. p. II‑1115, point 31, et du 19 février 1997, Intertronic/Commission, T‑117/96, Rec. p. II‑141, point 32). En outre, il résulte du système prévu par l’article 258 TFUE que ni l’avis motivé, qui ne constitue qu’une phase préalable au dépôt éventuel d’un recours en constatation de manquement devant la Cour, ni la saisine de la Cour par le dépôt effectif d’un tel recours ne sauraient constituer des actes concernant de manière directe les personnes physiques ou morales.

8        Il s’ensuit que la demande de la partie requérante visant à faire constater que la Commission s’est abstenue de statuer en violation du traité en n’engageant pas contre un État membre une procédure en constatation de manquement doit être rejetée comme étant manifestement irrecevable, sans qu’il soit nécessaire de signifier le recours à la Commission. Par ailleurs, l’article 258 TFUE n’attribue aucune compétence au Conseil pour engager une procédure en manquement à l’égard d’un État membre.

9        En second lieu, le recours vise à obtenir réparation du préjudice que les parties requérantes auraient subi du fait de la prétendue carence de la Commission et du Conseil.

10      À cet égard, il y a lieu de constater que, dans la mesure où la Commission n’est pas tenue d’engager une procédure en manquement au titre de l’article 258 TFUE et que cette disposition n’attribue aucune compétence au Conseil pour engager une telle procédure, l’abstention d’engager une telle procédure n’est pas constitutive d’une illégalité, de sorte qu’elle n’est pas de nature à engager la responsabilité non contractuelle de l’Union européenne (voir, en ce sens, ordonnance de la Cour du 23 mai 1990, Asia Motor France/Commission, C-72/90, Rec. p. I-2181, point 13, et ordonnances du Tribunal du 14 janvier 2004, Makedoniko Metro et Michaniki/Commission, T‑202/02, Rec. p. II-182, point 43, et 16 novembre 2009, Goldman Management Inc./Commission et Bulgarie, non publiée au Recueil, point 10).

11      En conséquence, la demande des parties requérantes doit être rejetée comme manifestement dépourvue de tout fondement en droit.

12      En troisième lieu, les parties requérantes demandent que l’affaire soit renvoyée devant la Cour de justice, afin que soit constatée l’éventuelle responsabilité de la République italienne.

13      Il y a lieu de rappeler que les seuls cas dans lesquels le Tribunal peut saisir la Cour d’une requête déposée devant lui sont ceux visés à l’article 54 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. Or, la demande des parties requérantes visant à ce que la présente affaire soit renvoyée devant la Cour de justice ne relève manifestement pas d’un de ces cas.

14      Il convient d’ajouter que la compétence du Tribunal en matière de responsabilité non contractuelle est prévue par l’article 268 TFUE et l’article 340, deuxième et troisième alinéas, TFUE ainsi que par l’article 188, deuxième alinéa, EA. Conformément à ces dispositions, le Tribunal est uniquement compétent pour connaître des recours en réparation de dommages causés par les institutions, les organes et les organismes de l’Union ou par leurs agents dans l’exercice de leurs fonctions (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 23 mars 2004, Médiateur/Lamberts, C-234/02 P, Rec. p. I-2803, points 49 et 59).

15      La République italienne n’étant ni une institution ni un organe ou organisme de l’Union, le Tribunal n’est, en tout état de cause, pas compétent pour connaître d’un recours en responsabilité non-contractuelle de cet État membre.

16      Il résulte des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de rejeter le présent recours comme étant, en partie, manifestement irrecevable, en partie, manifestement dénué de tout fondement en droit et, en partie, pour cause d’incompétence manifeste.

 Sur les dépens

17      La présente ordonnance étant adoptée avant la notification de la requête à la Commission et au Conseil et avant que ces parties n’aient pu exposer des dépens, il suffit de décider que les parties requérantes supporteront leurs propres dépens, conformément à l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Les parties requérantes supporteront leurs propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 28 novembre 2013.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

      M. van der Woude      

 


1 Langue de procédure : l’italien.