Language of document : ECLI:EU:T:2013:423

Affaire T‑566/08

Total Raffinage Marketing

contre

Commission européenne

« Concurrence – Ententes – Marché des cires de paraffine – Marché du gatsch – Décision constatant une infraction à l’article 81 CE – Fixation des prix et répartition des marchés – Preuve de l’existence de l’entente – Notion d’infraction unique et continue – Durée de l’infraction – Interruption de l’infraction – Lignes directrices de 2006 pour le calcul du montant des amendes – Égalité de traitement – Présomption d’innocence – Imputabilité du comportement infractionnel – Responsabilité d’une société mère pour les infractions aux règles de la concurrence commises par ses filiales – Influence déterminante exercée par la société mère – Présomption en cas de détention d’une participation de 100 % – Proportionnalité – Méthode d’arrondissage – Pleine juridiction »

Sommaire – Arrêt du Tribunal (quatrième chambre) du 13 septembre 2013

1.      Ententes – Accords entre entreprises – Notion – Concours de volontés quant au comportement à adopter sur le marché – Accord de fixation de prix – Inclusion – Conditions – Comportement dérogatoire d’un ou plusieurs participants – Absence d’incidence – Preuve de l’absence de mise en œuvre d’une entente par un participant – Distanciation publique

(Art. 81, § 1, CE)

2.      Ententes – Pratique concertée – Notion – Coordination et coopération incompatibles avec l’obligation pour chaque entreprise de déterminer de manière autonome son comportement sur le marché – Échange d’informations entre concurrents – Présomption de l’utilisation des informations pour déterminer le comportement sur le marché – Conditions

(Art. 81, § 1, CE)

3.      Concurrence – Procédure administrative – Décision de la Commission constatant une infraction – Preuve – Preuve apportée par un certain nombre de manifestations différentes de l’infraction – Admissibilité – Recours à un faisceau d’indices – Degré de force probante requis s’agissant des indices pris individuellement – Preuves documentaires – Critères – Crédibilité des preuves produites – Obligations probatoires des entreprises contestant la réalité de l’infraction

(Art. 81, § 1, CE)

4.      Droit de l’Union européenne – Principes – Droits fondamentaux – Présomption d’innocence – Procédure en matière de concurrence – Applicabilité – Portée – Conséquences

(Art. 81, § 1, CE)

5.      Concurrence – Procédure administrative – Décision de la Commission constatant une infraction – Preuve de l’infraction et de sa durée à la charge de la Commission – Force probante de dépositions volontaires effectuées à charge contre une entreprise par les principaux participants à une entente en vue de bénéficier de l’application de la communication sur la coopération – Déclarations allant à l’encontre des intérêts de ladite entreprise – Valeur probante élevée

(Art. 81, § 1, CE ; communication de la Commission 2002/C 45/03)

6.      Ententes – Accords entre entreprises – Preuve – Réponse d’une entreprise à une demande de renseignements de la Commission – Déclaration d’une entreprise contestée par d’autres entreprises – Obligation de compléter une telle preuve par d’autres éléments fiables

(Art. 81 CE)

7.      Ententes – Accords et pratiques concertées constitutifs d’une infraction unique – Participation d’une entreprise à une entente globale – Critères d’appréciation – Absence de participation directe – Absence d’incidence

(Art. 81 CE)

8.      Ententes – Accords entre entreprises – Notion – Participation à des réunions ayant un objet anticoncurrentiel – Inclusion – Condition – Absence de distanciation par rapport aux décisions prises – Critères d’appréciation

(Art. 81, § 1, CE)

9.      Actes des institutions – Motivation – Obligation – Portée – Appréciation de l’exigence de l’obligation de motivation en fonction des circonstances de l’espèce

(Art. 253 CE)

10.    Procédure juridictionnelle – Requête introductive d’instance – Exigences de forme – Exposé sommaire des moyens invoqués – Renvoi global à d’autres écrits annexés à la requête – Irrecevabilité – Production de moyens nouveaux en cours d’instance – Moyen soulevé pour la première fois à l’audience – Irrecevabilité

[Règlement de procédure du Tribunal, art. 44, § 1, c), et 48, § 2]

11.    Ententes – Accords et pratiques concertées constitutifs d’une infraction unique – Notion – Critères – Objectif unique et plan global – Liens de complémentarité entre les accords – Lien vertical entre les marchés concernés et chevauchement important entre les participants

(Art. 81, § 1, CE)

12.    Ententes – Accords et pratiques concertées constitutifs d’une infraction unique – Notion – Absence d’identité entre les participants aux différents volets de l’infraction – Durées distinctes des différents volets de l’infraction – Absence d’incidence

(Art. 81, § 1, CE)

13.    Concurrence – Procédure administrative – Décision de la Commission constatant une infraction – Éléments de preuve pouvant être retenus – Focalisation de l’enquête sur certains aspects des pratiques anticoncurrentielles – Circonstance n’excluant pas l’utilisation de tous les éléments de preuve à la disposition de la Commission au moment de l’adoption de la décision

(Art. 81, § 1, CE)

14.    Concurrence – Amendes – Montant – Détermination – Chiffre d’affaires pris en considération – Année de référence – Dernière année complète de l’infraction – Caractère exceptionnel de celle-ci à l’égard de certains participants – Prise en compte d’une période plus large de la même manière pour tous les participants – Admissibilité – Violation des principes de sécurité juridique et d’égalité de traitement – Absence – Erreur d’appréciation – Absence

(Communication de la Commission 2006/C 210/02, point 13)

15.    Concurrence – Amendes – Montant – Détermination – Critères – Gravité et durée de l’infraction – Infraction commise par plusieurs entreprises – Gravité relative de la participation de chacune d’entre elles – Application d’un coefficient multiplicateur – Appréciation – Impossibilité pour une entreprise d’invoquer le principe d’égalité de traitement pour se voir octroyer une réduction illégale

(Communication de la Commission 2006/C 210/02, points 20 et 21)

16.    Concurrence – Amendes – Montant – Détermination – Pouvoir d’appréciation de la Commission – Inclusion automatique d’un montant additionnel en vertu des lignes directrices pour le calcul des amendes – Violation du principe d’individualité des peines et des sanctions – Absence – Prise en considération de l’objectif de prévention générale – Admissibilité – Prise en considération de l’objectif de dissuasion à plusieurs étapes du processus de détermination du montant de l’amende – Admissibilité

(Règlement du Conseil no 1/2003, art. 23, § 2 ; communication de la Commission 2006/C 210/02, point 25)

17.    Concurrence – Amendes – Montant – Détermination – Critères – Durée de l’infraction – Caractère dissuasif du montant de l’amende – Respect du principe de proportionnalité – Obligation d’établir un montant d’amende proportionné à la valeur des ventes annuelles sur les marchés concernés – Absence

(Règlement du Conseil no 1/2003, art. 23, § 2 et 3)

18.    Concurrence – Amendes – Montant – Détermination – Critères – Chiffre d’affaires global de l’entreprise concernée – Chiffre d’affaires réalisé avec les marchandises faisant l’objet de l’infraction – Prise en considération respective – Limites – Respect du principe de proportionnalité – Obligation de la Commission de se tenir à sa pratique décisionnelle antérieure – Absence

(Règlement du Conseil no 1/2003, art. 23, § 2 et 3 ; communication de la Commission 2006/C 210/02, point 30)

19.    Concurrence – Règles de l’Union – Infractions – Imputation – Société mère et filiales – Unité économique – Critères d’appréciation – Présomption d’une influence déterminante exercée par la société mère sur les filiales détenues à 100 % par celle-ci – Présomption réfragable – Violation du principe de la présomption d’innocence – Absence – Violation du principe d’individualité des peines et des sanctions – Absence

(Art. 81, § 1, CE)

20.    Concurrence – Règles de l’Union – Infractions – Imputation – Société mère et filiales – Unité économique – Critères d’appréciation – Présomption d’une influence déterminante exercée par la société mère sur les filiales détenues à 100 % par celle-ci – Obligations probatoires de la société désirant renverser cette présomption – Éléments insuffisants pour renverser la présomption

(Art. 81, § 1, CE)

21.    Concurrence – Amendes – Montant – Détermination – Pouvoir d’appréciation de la Commission – Contrôle juridictionnel – Compétence de pleine juridiction du juge de l’Union – Portée – Prise en compte des lignes directrices pour le calcul des amendes – Limites – Respect des principes généraux du droit – Calcul de la durée de participation à l’infraction – Arrondissage du nombre de mois de participation – Montant ne reflétant pas la durée réelle de la participation – Violation des principes d’égalité de traitement et de proportionnalité

(Art. 81, § 1, CE et 226 CE ; règlement du Conseil no 1/2003, art. 23 ; communication de la Commission 2006/C 210/02, point 24)

22.    Concurrence – Amendes – Montant – Pouvoir d’appréciation de la Commission – Contrôle juridictionnel – Compétence de pleine juridiction – Effet

(Art. 229 CE ; règlement du Conseil no 1/2003, art. 31)

23.    Procédure juridictionnelle – Dépens – Charge – Taille de la requête dépassant le nombre de pages maximal fixé pour les mémoires – Appréciation

(Règlement de procédure du Tribunal, art. 87, § 3 ; instructions pratiques aux parties, point 15)

1.      Pour qu’il y ait accord au sens de l’article 81, paragraphe 1, CE, il suffit que les entreprises en cause aient exprimé leur volonté commune de se comporter sur le marché d’une manière déterminée. Il peut être considéré qu’un accord au sens de l’article 81, paragraphe 1, CE est conclu dès lors qu’il y a une concordance, même si les éléments spécifiques de la restriction envisagée font encore l’objet de négociations.

En particulier, un accord sur le maintien des prix est également un accord de fixation de prix, dès lors qu’il existe un concours de volontés des participants sur l’application d’un niveau de prix qu’ils ont fixé ensemble. Ce constat n’implique pas l’application effective d’un prix unique pour tous les participants. En effet, le fait d’avoir comme objectif commun de s’entendre sur le niveau des prix constitue déjà un accord au sens de l’article 81, paragraphe 1, CE, dès lors qu’une concordance des volontés sur le principe même de la restriction de concurrence existe. De même, le fait que les entreprises ont effectivement annoncé les augmentations de prix convenues et que les prix ainsi annoncés ont servi de base pour la fixation des prix de transaction individuels suffit, en soi, pour constater que la collusion sur les prix a eu tant pour objet que pour effet une grave restriction de la concurrence. Dans un tel cas, la Commission n’est pas tenue d’examiner le détail de l’argumentation des parties – et notamment une analyse économique présentée par celles-ci – visant à établir que les accords en cause n’ont pas eu pour effet d’augmenter les prix au-delà de ce qui aurait été observé dans des conditions normales de concurrence et d’y répondre point par point.

Par ailleurs, une infraction n’est pas éliminée par le simple fait que certains participants ne respectent pas l’entente ou trompent d’autres participants. En effet, d’une part, une entreprise qui poursuit, malgré la concertation avec ses concurrents, une politique plus ou moins indépendante sur le marché peut simplement tenter d’utiliser l’entente à son profit. D’autre part, les cas sporadiques et isolés de tricherie ou de non-application de l’entente par un participant particulier, surtout lorsqu’elles concernent une entente de longue durée, ne sauraient en soi démontrer l’absence de mise en œuvre de l’entente par ce participant, ou l’adoption, par celui-ci, d’un comportement concurrentiel. À cet égard, il ne peut être conclu à la cessation définitive de l’appartenance d’une entreprise à l’entente que si elle s’est distanciée publiquement du contenu de cette dernière.

(cf. points 30-32, 89, 99, 147, 184, 236, 238, 243, 254, 372)

2.      Voir le texte de la décision.

(cf. points 33, 34, 154, 187, 188, 255, 256)

3.      Voir le texte de la décision.

(cf. points 33-35, 39-48, 79-83, 177, 201, 214, 224-226, 323)

4.      Voir le texte de la décision.

(cf. points 36-38)

5.      Voir le texte de la décision.

(cf. points 63-71, 322)

6.      Voir le texte de la décision.

(cf. points 73, 74)

7.      Une entreprise peut être tenue pour responsable d’une entente globale même s’il est établi qu’elle n’a participé directement qu’à un ou à plusieurs des éléments constitutifs de celle-ci, dès lors, d’une part, qu’elle savait, ou devait nécessairement savoir, que la collusion à laquelle elle participait, en particulier au travers de réunions régulières organisées pendant plusieurs années, s’inscrivait dans un dispositif d’ensemble destiné à fausser le jeu normal de la concurrence et, d’autre part, que ce dispositif recouvrait l’ensemble des éléments constitutifs de l’entente.

(cf. points 108, 187)

8.      Une infraction à l’article 81 CE est constituée lorsque des réunions d’entreprises concurrentes ont pour objet de restreindre, d’empêcher ou de fausser le jeu de la concurrence et visent, ainsi, à organiser artificiellement le fonctionnement du marché. Dans un tel cas, il suffit que la Commission démontre que l’entreprise concernée a participé à des réunions au cours desquelles des accords de nature anticoncurrentielle ont été conclus, pour prouver la participation de ladite entreprise à l’entente. Lorsque la participation à de telles réunions a été établie, il incombe à cette entreprise d’avancer des indices de nature à établir que sa participation auxdites réunions était dépourvue de tout esprit anticoncurrentiel, en démontrant qu’elle avait indiqué à ses concurrents qu’elle participait à ces réunions dans une optique différente de la leur. La raison qui sous-tend cette règle est que, ayant participé à ladite réunion sans se distancier publiquement de son contenu, l’entreprise a donné à penser aux autres participants qu’elle souscrivait à son résultat et qu’elle s’y conformerait.

(cf. points 156, 157, 184, 242-244, 254, 372-374, 384, 387, 388)

9.      Voir le texte de la décision.

(cf. points 239, 447)

10.    Voir le texte de la décision.

(cf. points 247, 536)

11.    La notion d’infraction unique aux dispositions de l’article 81 CE, suppose un ensemble de comportements adoptés par différentes parties poursuivant un même but économique anticoncurrentiel. Le fait que les différentes actions des entreprises s’inscrivent dans un plan d’ensemble, en raison de leur objet identique faussant le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché commun, est déterminant pour retenir l’existence d’une infraction unique. À cet égard, lors de l’appréciation du caractère unique de l’infraction et de l’existence d’un plan d’ensemble, l’identité au moins partielle des entreprises concernées et le fait qu’elles sont conscientes de participer à l’objet commun des comportements infractionnels peuvent être pris en compte.

De même, aux fins de qualifier différents agissements en tant qu’infraction unique et continue, il y a lieu de vérifier s’ils présentent un lien de complémentarité en ce sens que chacun d’entre eux est destiné à faire face à une ou à plusieurs conséquences du jeu normal de la concurrence et contribuent, par le biais d’une interaction, à la réalisation de l’ensemble des effets anticoncurrentiels voulus par leurs auteurs, dans le cadre d’un plan global visant un objectif unique.

Dans ce contexte, le fait que les pratiques anticoncurrentielles concernent deux marchés de produits séparés ne saurait empêcher la Commission de conclure à l’existence d’une infraction unique, pourvu que les agissements concernant divers marchés s’insèrent dans un plan global dont les participants sont conscients. Tel est notamment le cas des marchés verticalement liés dès lors que l’accord conclu à l’égard des matières premières vise à renforcer l’accord principal concernant les produits dérivés. Ainsi, les hausses artificielles du prix de la matière première peuvent servir à assurer l’exécution des augmentations de prix concernant les produits dérivés, ce qui permet d’établir l’existence d’un lien de complémentarité entre les deux volets d’une infraction unique. Cette conclusion ne saurait être exclue par le fait que les pratiques anticoncurrentielles concernant la matière première se sont limitées au territoire d’un seul État membre dès lors qu’il est constant que le volet de l’infraction concernant les produits dérivés s’est étendu à l’ensemble de l’espace économique européen.

(cf. points 265-267, 271, 272, 281, 283, 303, 312)

12.    La qualification d’infraction unique et continue d’une violation de l’article 81, paragraphe 1, CE n’est pas exclue d’emblée par le fait que les participants à des pratiques anticoncurrentielles ne sont pas identiques et lesdits agissements concernent des marchés différents. Aux fins d’une telle appréciation, il y a lieu de tenir compte de l’étendue du chevauchement entre les entreprises participant auxdites pratiques. En revanche, dans un cas où tous les participants à des pratiques concernant un certain marché participent également à des pratiques concernant un produit verticalement lié à ce premier marché, l’absence d’identité totale entre les participants aux deux volets de l’infraction ne s’oppose pas à la qualification d’infraction unique.

Dans la mesure où des pratiques concernant deux produits différents s’inscrivent dans un même plan d’ensemble, cette conclusion ne saurait pas davantage être remise en cause par une différence de durée entre ces pratiques.

(cf. points 296-300, 306-309)

13.    Voir le texte de la décision.

(cf. point 339)

14.    Voir le texte de la décision.

(cf. points 409-419)

15.    Voir le texte de la décision.

(cf. points 431-435)

16.    Il ressort clairement du libellé et de l’économie des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement no 1/2003 que la Commission utilise, lors de la détermination du montant de l’amende, tant des facteurs dont le taux est commun pour tous les participants, afin de refléter le fait que ces entreprises ont participé aux mêmes pratiques infractionnelles et en respectant ainsi le principe d’égalité de traitement, que les facteurs dont le taux ou le coefficient est ajusté eu égard à la situation particulière de chaque participant, afin de se conformer au principe d’individualité des peines et des sanctions. Dès lors, pour respecter le principe d’individualité des peines et des sanctions, il suffit que le montant final de l’amende reflète les différences dans la situation des divers participants, sans qu’il soit nécessaire que la Commission procède lors de chaque étape du calcul du montant de l’amende à un traitement différencié des participants.

Il ressort, par ailleurs, du libellé et de l’économie de ces mêmes lignes directrices que la disposition, au paragraphe 25 de celles-ci, concernant l’inclusion dans le montant de base de l’amende d’un montant additionnel au titre de l’effet dissuasif, reflète la participation aux pratiques anticoncurrentielles les plus graves. Le montant additionnel inclus à ce titre fait état des caractéristiques des pratiques de l’ensemble des participants, et non de la situation individuelle de chacun d’entre eux. Dès lors, la légalité de cette disposition et de son application ne saurait être remise en cause sur la base dudit principe.

Par ailleurs, l’effet dissuasif de l’amende ne vise pas uniquement à détourner l’entreprise en cause de la récidive. La Commission a le pouvoir de décider du niveau des amendes en vue de renforcer leur effet dissuasif à titre général. Dès lors, un requérant ne saurait utilement invoquer le fait qu’il n’est plus présent sur le marché en cause et que son code de conduite prévoit le respect des règles de la concurrence. Enfin, les exigences de dissuasion ne font pas l’objet d’une appréciation ponctuelle à effectuer lors d’une étape spécifique du calcul du montant des amendes, mais doivent sous-tendre l’ensemble du processus de détermination du montant de l’amende.

(cf. points 453-456, 460, 461, 463, 464)

17.    Voir le texte de la décision.

(cf. points 466-473)

18.    Il est loisible, en vue de la détermination du montant de l’amende, de tenir compte aussi bien du chiffre d’affaires global de l’entreprise qui constitue une indication, fût-elle approximative et imparfaite, de la taille de celle-ci et de sa puissance économique que de la part de ce chiffre qui provient des marchandises faisant l’objet de l’infraction et qui est donc de nature à donner une indication de l’ampleur de celle-ci. Il ne faut attribuer ni à l’un ni à l’autre de ces chiffres une importance disproportionnée par rapport aux autres éléments d’appréciation et, par conséquent, la fixation du montant d’une amende appropriée ne peut être le résultat d’un simple calcul basé sur le chiffre d’affaires global. Il en est particulièrement ainsi lorsque les marchandises concernées ne représentent qu’une faible fraction de ce chiffre. En revanche, le droit de l’Union ne contient pas de principe d’application générale selon lequel la sanction doit être proportionnée à l’importance de l’entreprise sur le marché des produits faisant l’objet de l’infraction.

(cf. points 475, 477, 478, 481, 482)

19.    Voir le texte de la décision.

(cf. points 487-508)

20.    S’agissant de la présomption d’exercice effectif par la société mère d’une influence déterminante sur le comportement commercial d’une filiale détenue à 100 %, le fait qu’une filiale dispose de sa propre direction locale et de ses propres moyens ne prouve pas, en soi, qu’elle définisse son comportement sur le marché de manière autonome par rapport à sa société mère. Dans le cas de la détention de la totalité ou de la quasi-totalité du capital de la filiale directement impliquée dans une infraction aux règles de concurrence de l’Union, les éléments de preuve apportés en ce qui concerne la division des tâches entre les filiales et leurs sociétés mères, et, en particulier, le fait de confier la gestion des activités courantes à la direction locale d’une filiale à 100 %, qui est une pratique habituelle des entreprises de grande taille et composées d’une multitude de filiales détenues, ultimement, par la même société faîtière, ne sont pas susceptibles de renverser la présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante sur le comportement de la filiale par la société mère et par la société faîtière.

De même, le fait que la société mère gère des questions telles que la politique applicable aux ressources humaines, la tenue des comptes consolidés, la détermination de la politique fiscale du groupe, et certaines autres tâches opérationnelles horizontales, telles que la sécurité industrielle, l’environnement, la gestion des fonds dans des conditions respectueuses de l’éthique, les activités de financement, se trouvant dans les mains de la filiale pour le compte de l’ensemble du groupe indiquent encore davantage l’absence d’une autonomie organisationnelle complète de celle-ci au sein du groupe.

Enfin, le fait que le domaine ou l’activité affectée par l’infraction ne représente qu’un faible pourcentage de l’ensemble des activités du groupe ou de la société mère n’est pas de nature à prouver l’autonomie de ladite filiale à l’égard de sa société mère et, dès lors, est sans incidence sur l’application de la présomption d’exercice effectif par la société mère d’une influence déterminante sur le comportement commercial de la filiale sur le marché.

(cf. points 518-520, 522)

21.    Dans le domaine de la fixation du montant des amendes infligées au titre d’une infraction aux règles de la concurrence, l’autolimitation du pouvoir d’appréciation de la Commission résultant de l’adoption des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a) du règlement no 1/2003, n’est pas incompatible avec le maintien d’une marge d’appréciation substantielle pour la Commission. Cependant, lors de l’exercice de ce pouvoir d’appréciation, la Commission est tenue de respecter les principes généraux du droit, tout particulièrement les principes d’égalité de traitement et de proportionnalité. De même, la marge d’appréciation de la Commission et les limites qu’elle y a apportées dans ces lignes directrices ne préjugent pas, en principe, de l’exercice, par le juge de l’Union, de sa compétence de pleine juridiction.

À cet égard, la Commission viole le principe de proportionnalité en mettant à la charge d’une entreprise un nombre considérable de jours, pour lesquels aucune participation à l’infraction n’a été établie, puisque le montant de l’amende ainsi calculé ne reflète pas la durée de l’infraction d’une manière appropriée.

De même, la Commission viole le principe d’égalité de traitement, sans justification objective, lorsqu’elle met à la charge d’une telle entreprise, au titre de sa participation à une telle infraction, un temps de participation pendant lequel aucun comportement infractionnel n’a été établi à l’égard de cette entreprise, tandis que, pour d’autres entreprises impliquées dans la même infraction, un temps nettement inférieur a été ajouté à la durée effective de participation à l’infraction aux fins du calcul du montant de l’amende.

(cf. points 543-545, 548, 551, 553, 554, 559, 560)

22.    Le contrôle de légalité des décisions adoptées par la Commission est complété par la compétence de pleine juridiction, qui est reconnue au juge de l’Union à l’article 31 du règlement no 1/2003, conformément à l’article 229 CE. Cette compétence habilite le juge, au-delà du simple contrôle de légalité de la sanction, à substituer son appréciation à celle de la Commission et, en conséquence, à supprimer, à réduire ou à majorer l’amende ou l’astreinte infligée. Toutefois, l’exercice de la compétence de pleine juridiction n’équivaut pas à un contrôle d’office et la procédure devant les juridictions de l’Union est contradictoire.

(cf. points 562, 564)

23.    S’agissant de la répartition des dépens par le Tribunal dans un cas où les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, il y a lieu de tenir compte du nombre des moyens accueillis et de la taille de la requête introductive d’instance. Ainsi, dans un cas où un seul moyen de la requérante sur onze a été accueilli et la taille de la requête a dépassé de plus de 40 % le nombre de pages maximal des mémoires, il est fait une juste appréciation des circonstances de la cause en faisant supporter à la requérante neuf dixièmes de ses propres dépens et neuf dixièmes de ceux de la Commission.

(cf. points 569, 570)