Language of document : ECLI:EU:T:2021:402

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

30 juin 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Enregistrement international désignant l’Union européenne – Marque verbale PANTA RHEI – Marque de l’Union européenne verbale antérieure PANTA RHEI – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Similitude des produits – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑501/20,

Stefan Makk, demeurant à Graz (Autriche), représenté par Me I. Hödl, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. V. Ruzek et Mme L. Lapinskaite, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Ubati Luxury Cosmetics, SL, établie à Alcobendas (Espagne), représentée par Me C. Vendrell, avocate,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 9 juin 2020 (affaire R 2337/2019-4), relative à une procédure d’opposition entre Ubati Luxury Cosmetics et M. Makk,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, MM. S. Frimodt Nielsen (rapporteur) et J. Schwarcz, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 10 août 2020,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 19 octobre 2020,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 15 décembre 2020,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le requérant, M. Stefan Makk, a obtenu auprès du bureau international de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), le 4 septembre 2017, l’enregistrement international désignant l’Union européenne de la marque verbale PANTA RHEI.

2        Les produits pour lesquels la protection de la marque verbale PANTA RHEI a été revendiquée dans l’Union relèvent notamment de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Produits pharmaceutiques, compléments alimentaires diététiques à des fins médicales, compléments nutritionnels ; boissons sans alcool conçues à des fins médicales pour la prévention et le traitement curatif de pathologies oculaires ; boissons diététiques sans alcool à des fins médicales ».

3        Le 15 mars 2018, l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) a reçu notification de l’enregistrement international désignant l’Union européenne de la marque verbale PANTA RHEI.

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 53/2018, du 16 mars 2018.

5        Le 27 avril 2018, l’intervenante, Ubati Cosmetics, SL, a formé opposition, au titre de l’article 46 du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), à l’enregistrement de la marque demandée, notamment pour les produits visés au point 2 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure PANTA RHEI, désignant les produits et les services relevant des classes 3, 35 et 44 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Produits de parfumerie ; huiles essentielles ; cosmétiques ; lotions capillaires ; savons » ;

–        classe 35 : « Publicité ; services de gestion commerciale ; administration commerciale ; services de secrétariat » ;

–        classe 44 : « Soins hygiéniques et de beauté ; soins esthétiques ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

8        Le 27 août 2019, la division d’opposition a partiellement accueilli l’opposition, pour les produits mentionnés au point 2 ci-dessus.

9        Le 18 octobre 2019, le requérant a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition en ce qu’elle avait accueilli l’opposition pour les produits mentionnés au point 2 ci-dessus.

10      Par décision du 9 juin 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours du requérant. En particulier, elle a considéré que, en raison du caractère identique des deux signes, la faible similitude entre les produits mentionnés au point 2 ci-dessus et les produits mentionnés au point 6 ci-dessus était à même de provoquer un risque de confusion pour le public pertinent.

11      Afin de parvenir à cette conclusion, tout d’abord, la chambre de recours a considéré, aux points 25 et 26 de la décision attaquée, que, bien que les finalités des produits relevant de la classe 5 et de la classe 3, respectivement médicale et cosmétique, n’étaient a priori pas les mêmes, la destination de certains produits pharmaceutiques relevant de la classe 5, notamment des préparations pour le soin de la peau et des cheveux, coïncidait en partie avec la destination des crèmes ou des lotions cométiques relevant de la classe 3. De plus, selon elle, ces deux types de produits étaient vendus en pharmacie. Ainsi, la chambre de recours a conclu que les produits visés par la marque demandée relevant de la classe 5 et les produits couverts par la marque antérieure relevant de la classe 3 étaient faiblement similaires. Par conséquent, et compte tenu du principe d’interdépendance, la chambre de recours en a conclu que, dès lors que les signes étaient identiques et qu’il existait, ne serait-ce qu’à un faible degré, une similitude entre les produits mentionnés aux points 2 et 6 ci-dessus, un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 était inévitable.

 Conclusions des parties

12      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

13      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

14      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        rejeter la demande d’enregistrement en ce qui concerne les produits relevant de la classe 5 ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

15      À l’appui de son recours, le requérant soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, en ce que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les signes en conflit et, partant, a rejeté son recours. Il avance notamment que les produits désignés par les marques en conflit ne sont pas similaires, de sorte qu’il ne saurait exister aucune similitude susceptible de prêter à confusion entre lesdites marques.

16      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments du requérant et concluent au rejet de ce moyen, et partant, du recours.

17      Selon l’article 196, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, tout enregistrement international désignant l’Union européenne est soumis à la même procédure d’opposition que les demandes de marques de l’Union européenne publiées.

18      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

19      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

20      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

21      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

22      La chambre de recours a considéré que, au regard de la marque demandée, les produits mentionnés au point 2 ci-dessus s’adressaient à la fois au grand public et aux professionnels de la santé et de la nutrition. S’agissant des produits et services mentionnés au point 6 ci-dessus, la chambre de recours a considéré qu’ils s’adressaient au grand public.

23      À ce titre, la chambre de recours a estimé que le grand public faisait preuve d’un niveau d’attention élevé ou accru lors de l’acquisition des produits mentionnés au point 2 ci-dessus, s’agissant de produits liés à la santé, même en ce qui concerne les produits pharmaceutiques achetés sans ordonnance. Au regard des produits et services mentionnés au point 6 ci-dessus, la chambre de recours a conclu que le grand public tendait à faire preuve d’un degré d’attention au moins moyen lors de l’acquisition de tels produits, en raison notamment, de considérations esthétiques ou liées à leurs préférences personnelles, de leur sensibilité, de leurs allergies ou de leur type de peau et de cheveux.

24      En l’espèce, aucun élément du dossier ne permet de remettre en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle le degré d’attention du public pertinent serait au minimum moyen, cette appréciation n’étant, au demeurant, pas contestée par les parties.

 Sur la comparaison des produits

25      La chambre de recours a considéré, au point 31 de la décision attaquée, que les produits visés par la marque demandée mentionnés au point 2 ci-dessus et les produits couverts par la marque antérieure mentionnés au point 6 ci-dessus étaient faiblement similaires.

26      Le requérant soutient qu’il ne peut exister, même à un faible degré, de similitude entre les produits. Notamment, il fait valoir que la destination des produits relevant de la classe 5 ne saurait coïncider avec les cosmétiques, les lotions pour les cheveux et les savons relevant de la classe 3.

27      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments du requérant.

28      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés (voir arrêt du 11 juillet 2007, PiraÑAM diseño original Juan Bolaños, T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée).

29      En l’espèce, la chambre de recours a, en substance, retenu trois facteurs de similitude entre les produits visés par les marques en conflit, à savoir, premièrement, leur destination et leurs avantages communs, deuxièmement, leur complémentarité et, troisièmement, la coïncidence de leurs canaux de distribution. Il convient d’examiner la similitude des produits pharmaceutiques, compléments alimentaires diététiques à usage médical et compléments nutritionnels, boissons diététiques sans alcool à des fins médicales et boissons sans alcool adaptées à la prévention et au traitement curatif de pathologies oculaires avec les produits de la marque antérieure au regard des facteurs retenus par la chambre de recours.

 Sur les produits pharmaceutiques relevant de la classe 5

30      La chambre de recours a considéré que, de manière générale, la destination des produits concernés relevant des classes 3 et 5 n’était pas la même, les produits visés par la marque demandée ayant une finalité médicale, tandis que les produits pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée auraient une finalité cosmétique. Néanmoins, selon la chambre de recours, il n’est pas impossible qu’un produit, bien qu’ayant une destination médicale, ait également des effets cosmétiques.

31      À cet égard, le requérant soutient que les produits pharmaceutiques visés par la marque demandée sont définis de manière plus restrictive que les produits cosmétiques couverts par la marque antérieure. En effet, leur finalité, à savoir prévenir les maladies, serait plus spécifique que celle des cosmétiques en général.

32      Le Tribunal a admis que les produits pharmaceutiques présentaient un faible degré de similitude avec les cosmétiques, dès lors que, d’une part, la finalité de certains produits pharmaceutiques, comme les produits de soins pour la peau ou les cheveux dotés de propriétés médicales, les dentifrices médicinaux et les savons médicinaux, coïncidait avec la finalité des crèmes ou des lotions cosmétiques, des dentifrices et des savons à usage non médical, et, d’autre part, ces deux types de produits étaient vendus dans des pharmacies [voir, en ce sens, arrêt du 13 mai 2016, Market Watch/EUIPO – El Corte Inglés (MITOCHRON), T‑62/15, non publié, EU:T:2016:304, point 27].

33      En l’espèce, la catégorie des produits pharmaceutiques est une catégorie large regroupant des produits dont la destination ou les avantages peuvent présenter une similitude avec ceux des cosmétiques. En effet, et ainsi que l’EUIPO l’avance, les produits pharmaceutiques peuvent avoir à la fois des propriétés médicales et cosmétiques. Ainsi, une crème médicamenteuse peut avoir des effets sur l’apparence de la peau en l’hydratant ou en calmant une inflammation, à l’instar d’une crème cosmétique.

34      En outre, un recoupement même partiel des points de vente est susceptible de constituer un facteur de similitude entre les produits concernés, étant donné qu’il existe de nombreux points de vente, à savoir les pharmacies, où les produits visés par la marque demandée et ceux couverts par la marque antérieure sont commercialisés [voir, en ce sens, arrêt du 26 novembre 2015, Bionecs/OHMI – Fidia farmaceutici (BIONECS), T‑262/14, non publié, EU:T:2015:888, point 31].

35      Par ailleurs, le requérant soutient que les produits ayant un effet cosmétique et les préparations pour la peau ou les cheveux ne sont pas visés par sa demande d’enregistrement. Cet argument doit être écarté. En effet, ainsi que l’EUIPO et l’intervenante le soutiennent, dans le cadre d’une procédure d’opposition, seule peut être prise en compte la liste des produits telle qu’elle figure dans la demande d’enregistrement, sous la seule réserve des éventuelles modifications de cette dernière, conformément à l’article 49 du règlement 2017/1001. En conséquence, le requérant n’ayant pas modifié la liste des produits visés par sa demande d’enregistrement, ses allégations manquent en fait. À cet égard, toute argumentation qui serait fondée sur les intentions du requérant quant à l’utilisation de la marque demandée serait dépourvue de toute pertinence [voir, en ce sens, arrêt du 24 janvier 2013, Yordanov/OHMI – Distribuidora comercial del frio (DISCO DESIGNER), T‑189/11, non publié, EU:T:2013:34, point 43 et jurisprudence citée].

36      À la lumière de la jurisprudence citée aux points 32 et 34 ci-dessus, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a pris en compte, pour apprécier la similitude des produits en cause, leur destination et leurs canaux de distribution et a considéré que les produits pharmaceutiques mentionnés au point 2 ci-dessus et les cosmétiques mentionnés au point 6 ci-dessus étaient faiblement similaires.

 Sur les compléments alimentaires diététiques à usage médical et les compléments nutritionnels

37      La chambre de recours a considéré que les compléments alimentaires diététiques à usage médical et les compléments nutritionnels relevant de la classe 5 pouvaient également avoir un effet cosmétique et qu’ils pouvaient être vendus en pharmacie, à l’instar des produits relevant de la classe 3.

38      Sur ce point, le requérant fait valoir que, bien qu’il soit possible que ces compléments aient un effet cosmétique, ils ont surtout pour finalité de prévenir des maladies et que leur méthode d’utilisation diffère de manière significative de celle des produits couverts par la marque antérieure.

39      En l’espèce, bien que l’objectif principal de ces compléments soit d’équilibrer des déficiences nutritionnelles, il peut résulter de leur utilisation différents effets sur l’apparence de la peau. En effet, selon la jurisprudence, les compléments vitaminés qui visent à retrouver ou à conserver une apparence saine et à rendre le teint éclatant présentent un facteur de similitude avec les cosmétiques, tous deux poursuivant un objectif commun de soin et de beauté de la peau [voir, en ce sens, arrêt du 28 mai 2020, Aurea Biolabs/EUIPO – Avizel (AUREA BIOLABS), T‑724/18 et T‑184/19, EU:T:2020:227, point 68].

40      La chambre de recours, en considérant que ces compléments pouvaient avoir des effets similaires, n’a donc pas commis d’erreur d’appréciation, contrairement à ce qu’affirme le requérant.

41      Par ailleurs, le requérant soutient que le mode d’utilisation des produits mentionnés au point 2 ci-dessus diffère de celui des produits mentionnés au point 6 ci-dessus. Toutefois, ainsi que l’EUIPO le soutient, à bon droit, selon la jurisprudence, lorsque la différence entre les produits tient à leur mode d’administration, une telle différence ne suffit pas en soi pour empêcher de constater la similitude des produits [arrêt du 11 novembre 2009, Bayer Healthcare/OHMI – Uriach-Aquilea OTC (CITRACAL), T‑277/08, non publié, EU:T:2009:433, point 45 ; voir également, en ce sens, arrêt du 17 octobre 2006, Armour Pharmaceutical/OHMI – Teva Pharmaceutical Industries (GALZIN), T‑483/04, EU:T:2006:323, points 69 à 71]. En outre, les produits couverts par la marque antérieure et les compléments alimentaires diététiques à usage médical ainsi que les compléments nutritionnels visés par la marque demandée peuvent être distribués via les mêmes canaux, notamment en pharmacie.

42      C’est donc à bon droit que la chambre de recours a conclu que les compléments alimentaires diététiques à usage médical et les compléments nutritionnels, d’une part, et les cosmétiques, d’autre part, étaient faiblement similaires.

 Sur les boissons diététiques sans alcool à des fins médicales

43      Selon le requérant, les boissons diététiques sans alcool à des fins médicales diffèrent des cosmétiques par leur nature, leur objectif et leur utilisation. Le requérant considère notamment qu’il s’agit de médicaments constitués d’un mélange liquide spécifique de substances actives préalablement approuvé par les autorités de la santé.

44      Comme indiqué par le requérant, les boissons diététiques à usage médical ont pour effet de prévenir ou de traiter certains problèmes de santé. Ces produits peuvent, comme les compléments alimentaires diététiques à usage médical, avoir comme finalité d’améliorer l’apparence physique de leur utilisateur. Les cosmétiques relevant de la classe 3 peuvent également avoir pour effet d’améliorer l’apparence du corps.

45      Ainsi qu’il a été rappelé au point 44 ci-dessus, si la différence ne tient qu’au mode d’utilisation des produits, cette dernière ne suffit pas pour empêcher de constater entre eux une similitude. Par ailleurs, les produits couverts par la marque antérieure et les produits visés par la marque demandée sont tous deux vendus dans des pharmacies.

46      Comme pour les compléments alimentaires diététiques à usage médical et les compléments nutritionnels, les boissons diététiques sans alcool à des fins médicales et les produits mentionnés au point 6 ci-dessus peuvent avoir des effets similaires. C’est donc à bon droit que la chambre de recours a considéré que les produits visés par la marque demandée et les cosmétiques étaient faiblement similaires.

 Sur les boissons sans alcool adaptées à la prévention et au traitement curatif de pathologies oculaires

47      La chambre de recours a considéré que les cosmétiques constituaient une large catégorie pouvant contenir des produits spécifiquement destinés aux soins des yeux. Ainsi, il y aurait un chevauchement entre les boissons sans alcool adaptées à la prévention et au traitement curatif de pathologies oculaires et cette large catégorie de produits. Il existerait également un chevauchement des points de vente.

48      Le requérant considère que c’est à tort que la chambre de recours a considéré que les boissons sans alcool adaptées à la prévention et au traitement curatif de pathologies oculaires présentaient une similitude avec les cosmétiques. En effet, selon le requérant, ces produits sont différents de par leur nature, leur composition, leur finalité et leur utilisation.

49      Ainsi qu’il a été rappelé au point 44 ci-dessus, une différence dans le mode d’utilisation des produits en cause ne suffit pas, en soi, pour empêcher de constater une similitude entre eux. L’argument du requérant tenant à la différence d’utilisation doit donc être écarté.

50      Le requérant soutient à juste titre que les boissons sans alcool adaptées à la prévention et au traitement curatif de pathologies oculaires diffèrent des cosmétiques par leur finalité. En effet, comme l’a indiqué le requérant, il s’agit d’une catégorie très étroite qui ne saurait être incluse dans celle des cosmétiques.

51      À cet égard, l’EUIPO ne remet pas en cause le fait que les boissons sans alcool adaptées à la prévention et au traitement curatif de pathologies oculaires et les cosmétiques poursuivent en général une finalité différente. Mais il soutient que les produits relevant de ces catégories peuvent présenter in fine les mêmes avantages, à savoir améliorer l’apparence physique et apporter des bienfaits pour la santé.

52      La finalité des boissons sans alcool adaptées à la prévention et au traitement curatif de pathologies oculaires diffère, certes, de celle des cosmétiques. Néanmoins, le fait que ces produits sont vendus via les mêmes canaux de distribution peut constituer un facteur de similitude, à moins que lesdits canaux ne constituent des points de vente non spécialisés tels que les supermarchés ou les grands magasins, où il est possible de trouver des produits de natures très diverses, de telle sorte que les consommateurs ne puissent leur attribuer automatiquement une même origine [voir, en ce sens, arrêt du 2 juillet 2015, BH Stores/OHMI – Alex Toys (ALEX), T‑657/13, EU:T:2015:449, point 83 et jurisprudence citée]. Or, en l’espèce, les produits visés par la marque demandée et les produits couverts par la marque antérieure seront proposés dans des pharmacies, qui, contrairement aux supermarchés ou aux grands magasins, ne proposent pas des produits de nature si diverse, de telle sorte que les consommateurs ne puissent leur attribuer une même origine. À cet égard, il convient de relever que le requérant n’a pas établi que les boissons sans alcool adaptées à la prévention et au traitement curatif de pathologies oculaires ne pouvaient être présentées sur les mêmes rayons que les cosmétiques. En particulier, le requérant n’a pas non plus établi que les boissons sans alcool adaptées à la prévention et au traitement curatif de pathologies oculaires étaient des médicaments ne pouvant être délivrés que sur ordonnance.

53      Ainsi, bien que les produits en cause présentent des différences notamment quant à leurs finalités, la similitude des canaux de distribution est telle que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant que les boissons sans alcool adaptées à la prévention et au traitement curatif de pathologies oculaires, d’une part, et les cosmétiques, d’autre part, étaient faiblement similaires.

 Sur la comparaison des signes

54      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

55      En l’espèce, les parties s’accordent sur le fait que les signes sont identiques et ne contestent pas la décision de la chambre de recours sur ce point.

 Sur le risque de confusion

56      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

57      Le requérant soutient qu’il ne peut y avoir de risque de confusion en raison de l’absence de similitude des produits. En outre, il fait valoir que la marque antérieure bénéficie tout au plus d’un faible caractère distinctif, étant donné que l’intervenante n’a pas revendiqué le fait qu’elle bénéficierait d’un caractère distinctif accru.

58      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments du requérant.

59      En premier lieu, au regard de l’argument avancé par le requérant selon lequel le caractère distinctif de la marque antérieure est tout au plus faible, il convient de considérer, à l’instar de la chambre de recours, que la marque antérieure n’a pas de signification particulière par rapport aux produits relevant de la classe 3 et, donc, qu’elle possède un caractère distinctif intrinsèque normal.

60      En outre et en tout état de cause, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, la reconnaissance d’un caractère faiblement distinctif à la marque antérieure n’empêche pas de constater l’existence d’un risque de confusion. En effet, si le caractère distinctif de la marque antérieure doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion, il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services visés [voir arrêt du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, EU:T:2007:387, point 70 et jurisprudence citée].

61      En second lieu, en ce qui concerne l’appréciation globale du risque de confusion, il ressort de ce qui précède que les signes sont identiques et les produits faiblement similaires. C’est donc à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion quant à l’origine commerciale des produits en cause. En effet, il ne sera pas aisé pour le public pertinent de distinguer une origine commerciale différente entre les produits couverts par la marque antérieure et les produits visés par la marque demandée, dès lors que les signes sont identiques et que l’ensemble des produits concernés présente une similitude, ne serait-ce que faible, en raison notamment de leurs canaux de commercialisation et, le cas échéant, de leur finalité. 

62      Il résulte de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté ainsi que, par voie de conséquence, le chef de conclusions de l’intervenante tendant au rejet de la demande d’enregistrement.

 Sur les dépens

63      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

64      Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Stefan Makk est condamné aux dépens.

Marcoulli

Frimodt Nielsen

Schwarcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 juin 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.