Language of document : ECLI:EU:T:2002:125

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

16 mai 2002 (1)

«Fonctionnaires - Transfert d'une partie de la rémunération dans la monnaie d'un État membre autre que le pays du siège de l'institution - Article 17, paragraphe 2, sous a) et b), de l'annexe VII du statut - Application combinée»

Dans l'affaire T-17/01,

Georgios Rounis, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Me É. Boigelot, avocat, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall et Mme F. Clotuche-Duvieusart, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet, en premier lieu, une demande d'annulation de la décision de la Commission du 24 février 2000 limitant le transfert des émoluments du requérant vers le Royaume-Uni à 19 % de sa rémunération mensuelle nette et de la conclusion n° 102/84 du collège des chefs d'administration relative au transfert des émoluments des fonctionnaires et agents résidents et, en second lieu, une demande en dommages et intérêts pour le préjudice matériel prétendument subi,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de M. M. Vilaras, président, Mme V. Tiili et M. P. Mengozzi, juges,

greffier: M. J. Plingers, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 20 février 2002,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1.
    L'article 17 de l'annexe VII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut») prévoit:

«1. Les sommes dues au fonctionnaire sont payées au lieu et dans la monnaie du pays où le fonctionnaire exerce ses fonctions.

2. Dans les conditions fixées par une réglementation établie d'un commun accord par les institutions des Communautés après avis du comité du statut, le fonctionnaire peut:

a)    faire transférer régulièrement, par l'entremise de l'institution dont il relève, une partie de ses émoluments ne dépassant pas le montant qu'il perçoit au titre de l'indemnité de dépaysement ou d'expatriation:

    -    soit dans la monnaie de l'État membre dont il est ressortissant,

        

    -    soit dans la monnaie de l'État membre dans lequel se trouve situé son domicile propre ou la résidence d'un membre de sa famille à charge,

    -    soit dans la monnaie du pays de son affectation précédente ou du pays du siège de son institution, à condition qu'il s'agisse d'un fonctionnaire affecté en dehors du territoire des Communautés;

b)    faire effectuer des transferts réguliers dépassant le plafond indiqué au point a) in limine pour autant qu'ils soient destinés à couvrir des dépenses résultant notamment de charges régulières et prouvées que l'intéressé aurait à assumer en dehors du pays du siège de son institution ou du pays où il exerce ses fonctions;

c)    être autorisé, à titre tout à fait exceptionnel et pour des cas dûment justifiés, à faire transférer, indépendamment des transferts réguliers précités, les montants dont il désirerait pouvoir disposer dans les monnaies visées au point a).

3. Les transferts prévus au paragraphe 2 s'effectuent aux taux de change visés à l'article 63 deuxième alinéa du statut; les montants transférés sont affectés du coefficient résultant du rapport qui existe entre le coefficient correcteur fixé pour le pays dans la monnaie duquel le transfert est effectué et le coefficient correcteur fixé pour le pays d'affectation du fonctionnaire.»

2.
    La réglementation fixant les modalités relatives aux transferts d'une partie des émoluments des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après la «réglementation commune»), est entrée en vigueur le 1er janvier 1980, avec effet au 1er avril 1979. L'article 1er de la réglementation commune dispose:

«En application de l'article 17 paragraphe 2 point a) de l'annexe VII du statut, le fonctionnaire peut faire transférer régulièrement, sur sa demande et par l'entremise de l'institution, une partie de ses émoluments non supérieure au montant qu'il perçoit au titre de l'indemnité de dépaysement ou d'expatriation, affectée du coefficient correcteur applicable à la rémunération du fonctionnaire au lieu d'affectation.»

3.
    L'article 2 de la réglementation commune prévoit:

«En application de l'article 17 paragraphe 2 point b) de l'annexe VII du statut, le fonctionnaire peut, en outre, faire transférer régulièrement, sur sa demande et par l'entremise de l'institution, une partie de ses émoluments supérieure au montant visé à l'article 1er, pour autant que ces transferts soient destinés à couvrir des dépenses résultant de charges régulières et prouvées hors du pays de son affectation.

Sont à considérer comme des dépenses justifiant de tels transferts:

-    sur présentation d'une attestation scolaire ou universitaire, les frais d'études des enfants qui donnent droit à l'allocation pour enfant à charge, jusqu'à concurrence d'un montant maximal par enfant égal à trois fois le montant de l'allocation simple pour enfant à charge, majoré du montant de l'allocation scolaire effectivement perçu du chef de l'enfant concerné,

    [...]

-    sur présentation de l'acte notarié et du contrat de prêt, le remboursement d'un prêt hypothécaire remboursable pendant sept ans au moins et relatif soit à l'acquisition d'un terrain à bâtir pour maison individuelle, soit à la construction, l'achat ou la transformation d'une première habitation ou, le cas échéant, d'une deuxième habitation dans un pays des Communautés,

    [...]»

4.
    Selon l'article 3 de la réglementation commune, «[l']ensemble des transferts réguliers, tels qu'ils sont définis aux articles 1er et 2, ne peut dépasser 35 % de la rémunération mensuelle nette».

5.
    Enfin, l'article 6, dernier alinéa, de la réglementation commune prévoit que «[l']institution vérifie régulièrement que les conditions qui ont justifié l'autorisation de transfert demeurent toujours remplies. Elle met fin au transfert lorsqu'elle constate que ces conditions ne sont plus remplies».

6.
    Une directive interne établissant les modalités d'application de la réglementation commune a été arrêtée par la Commission le 30 juillet 1993 et publiée le 11 août 1993 dans les Informations administratives n° 815 (ci-après la «directive interne»). La directive interne, entrée en vigueur le 1er août 1993, dispose, en ses paragraphes 1, 2 et 3, notamment ce qui suit:

«1. Dans les conditions fixées par l'article 2 de la [réglementation commune], le fonctionnaire a la possibilité de faire procéder à des transferts réguliers de montants dépassant le plafond y indiqué à l'article 1er.

-    Ces transferts doivent être destinés à couvrir des dépenses prévues à l'article 2 de la [r]églementation.

-    Ils se font dans les monnaies du pays de la Communauté où ces dépenses sont effectuées. À savoir, le pays de destination des fonds, tel que le pays où:

    .    est situé l'établissement scolaire ou universitaire fréquenté;

    [...]

    .    sont ou seront situés les biens immobiliers qui font l'objet des opérations immobilières visées aux deux derniers tirets de l'article 2 de la [r]églementation.

2. Est considéré comme 'contrat d'épargne-logement‘, tout régime d'épargne particulier qui permet à un fonctionnaire d'obtenir, à l'issue d'une période contractuelle d'épargne, un prêt destiné aux opérations immobilières visées aux deux derniers tirets de l'article 2 de la [r]églementation. Un contrat d'épargne-logement reconnu en tant que tel par la législation nationale le régissant est acceptable au terme de la précédente définition.

3. L'intervention du système de transfert par l'entremise de l'institution n'est admise que dans les cas où la localisation des charges et des dépenses y relatives se trouve en dehors du pays d'affectation du fonctionnaire et vise le pays correspondant à la devise du transfert.»

7.
    Lors de leur 149e réunion, du 6 avril 1984, les chefs d'administration ont approuvé la conclusion n° 102/84 relative à l'«[a]pplication de l'article 17 de l'annexe VII du statut» - «[t]ransfert des émoluments des fonctionnaires et agents résidents» (ci-après la «conclusion n° 102/84»), libellée comme suit:

«Les Chefs d'Administration approuvent les deux dispositions suivantes concernant les transferts de rémunérations pour les fonctionnaires et agents résidents:

a. Le fonctionnaire ou l'agent temporaire ne bénéficiant ni de l'indemnité de dépaysement ni de l'indemnité d'expatriation, peut obtenir, dans les conditions et limites prévues à l'article 2 de la [réglementation commune], la possibilité de transférer jusqu'à 19 % de la rémunération mensuelle nette, sur la base de pièces justificatives.

b. Le fonctionnaire et agent temporaire ne bénéficiant ni de l'indemnité de dépaysement, ni de l'indemnité d'expatriation, peut bénéficier de la possibilité de transférer des montants supplémentaires allant au-delà de 19 % et jusqu'à 35 % de sa rémunération mensuelle nette, à titre de cession effectuée par son institution en faveur d'un organisme d'épargne-logement dans les conditions prévues à la [réglementation commune].»

Faits à l'origine du litige

8.
    Le requérant, de nationalité hellénique, est fonctionnaire de grade A 3, échelon 8, à la Commission.

9.
    Depuis septembre 1998, sa fille étudie la médecine au Royaume-Uni. Du fait de ces études et sur la base de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut et de l'article 2, deuxième alinéa, premier tiret, de la réglementation commune, le requérant a bénéficié, depuis le mois de février 1999, d'un transfert de sa rémunération mensuelle nette vers le Royaume-Uni à concurrence d'un montant égal à trois fois lemontant de l'allocation simple pour enfant à charge, majoré du montant de l'allocation scolaire effectivement perçu du chef de l'enfant concerné, soit la somme de 1 022,63 euros et, à dater du mois de janvier 2000, la somme de 1 050,24 euros.

10.
    Le 13 août 1999, le requérant a acquis un immeuble d'habitation à Londres, pour un prix total de 300 000 livres sterling (GBP). À cet effet, il a obtenu un prêt hypothécaire auprès de la Royal Bank of Scotland à hauteur de 224 000 GBP, remboursable sur dix ans. Pour le remboursement du prêt ainsi consenti et la couverture des frais d'études de sa fille, le requérant a bénéficié, à dater du mois de septembre 1999, d'un transfert d'une partie de sa rémunération mensuelle nette à hauteur de 3 283,95 euros et, depuis janvier 2000, d'un transfert à hauteur de 3 273,23 euros.

11.
    Par courrier électronique du 31 janvier 2000, la Commission a informé le requérant que, à la suite d'un contrôle de son dossier, il a été constaté que le transfert correspondant au remboursement du prêt hypothécaire lui avait été accordé à tort, en raison notamment de l'absence dans le dossier de pièces justificatives démontrant la réalité de l'achat immobilier et de l'emprunt, à savoir d'un acte notarié d'achat et d'un plan de remboursement. Par ce même courrier, la Commission a indiqué au requérant que, s'il ne communiquait pas les pièces justificatives pertinentes avant le 16 février 2000, le transfert en question serait suspendu. Enfin, il a été précisé au requérant que, en tout état de cause et indépendamment de la justification du transfert au titre du bien hypothécaire, le transfert global de ses émoluments vers le Royaume-Uni ne pourrait, en vertu de la conclusion n° 102/84, dépasser 19 % de sa rémunération mensuelle nette.

12.
    Par courrier électronique du 16 février 2000, le requérant a demandé à la Commission de ne pas suspendre le transfert correspondant au remboursement du prêt et de lui accorder un délai supplémentaire d'un mois pour obtenir les documents réclamés.

13.
    Par télécopie du 24 février 2000, le requérant a transmis à la Commission les pièces justificatives sollicitées.

14.
    Par une note du même jour, la Commission a informé le requérant que le transfert correspondant au remboursement du prêt serait supprimé à partir du mois de mars 2000, dès lors que le requérant n'avait pas communiqué les pièces justificatives relatives à son acquisition immobilière au Royaume-Uni et que la seule pièce fournie relative à un engagement hypothécaire du requérant, à savoir un document émanant d'un consultant indépendant, ne constituait pas une preuve des charges financières du requérant.

15.
    Par la même note, la Commission a en substance fait savoir au requérant que, pour pouvoir bénéficier d'un transfert de rémunération pouvant s'élever au maximum à 35 % de sa rémunération mensuelle nette, dans le cadre de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, un fonctionnaire qui a souscrit un prêt hypothécaire pour une acquisition immobilière doit remplir une des trois conditions prévues par leparagraphe 2, sous a), de cet article. Or, étant donné que le requérant ne remplit aucune de ces trois conditions, la partie de sa rémunération correspondant à l'indemnité de dépaysement ne peut être transférée au Royaume-Uni. Par conséquent, si le requérant apportait la preuve de ses charges en raison d'une acquisition immobilière, le plafond global de transfert applicable dans son cas serait de 19 %, correspondant à la différence entre le plafond de 35 % repris à l'article 3 de la réglementation commune et le taux de 16 % correspondant à l'indemnité de dépaysement.

16.
    Selon la même note, le plafond de transfert de 19 %, applicable selon la conclusion n° 102/84 aux fonctionnaires dits «résidents» qui n'ont pas droit à l'indemnité de dépaysement, est applicable par analogie aux fonctionnaires qui ne remplissent pas les conditions de l'article 17, paragraphe 2, sous a), de l'annexe VII du statut pour le transfert de l'indemnité de dépaysement.

17.
    Par courrier électronique du 25 février 2000, la Commission a précisé que sa note du 24 février 2000 et la télécopie du requérant du même jour dans laquelle celui-ci communiquait les pièces justificatives sollicitées s'étaient croisées. En outre, la Commission a indiqué que, dans la mesure où la paie du mois de mars 2000 était déjà close, elle ne pourrait intervenir pour ajuster le transfert des émoluments du requérant qu'à partir du mois d'avril 2000, en fonction des pièces justificatives reçues.

18.
    À la suite de ces échanges, le requérant a bénéficié, pour le mois de mars 2000, seulement du transfert relatif aux frais d'études de sa fille au Royaume-Uni, soit 1 050,24 euros. Pour les mois suivants, le transfert global a été plafonné à 19 % de la rémunération mensuelle nette du requérant, soit 2 059,28 euros.

19.
    Par lettre du 15 mai 2000, enregistrée au secrétariat général de la Commission le même jour, le requérant a introduit, contre la note de la Commission du 24 février 2000 (ci-après la «décision attaquée»), une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut. Par cette réclamation, le requérant a contesté la limitation du transfert global de rémunération dont il bénéficie vers le Royaume-Uni à 19 % de sa rémunération mensuelle nette. En outre, il a sollicité l'annulation de la conclusion n° 102/84.

20.
    Par courrier électronique du 6 juillet 2000, la défenderesse a informé le requérant qu'elle allait lui transférer un montant de 5 496,22 euros correspondant, d'une part, au montant du transfert pour le mois d'août 2000 (3 273,23 euros) et, d'autre part, à un montant de 2 222,99 euros visant à régulariser le transfert du mois de mars 2000, qui s'était limité à 1 050,24 euros (2 222,99 + 1 050,24 = 3 273,23). Par le même courrier, la défenderesse précisait que, à partir du mois de septembre 2000, le montant du transfert serait ramené à 3 273,23 euros par mois.

21.
    En outre, par courrier électronique du 15 septembre 2000, la défenderesse a informé le requérant que, en raison d'une erreur d'encodage, elle n'avait pas pu transférer la totalité du montant autorisé pour le mois de septembre 2000. Pour cette raison, elle a précisé qu'une correction, d'un montant de 4 487,18 euros, serait effectuée en octobre2000, correspondant, d'une part, au montant du transfert pour le mois d'octobre (3 273,23 euros) et, d'autre part, à un montant de 1 213,95 euros visant à régulariser le transfert du mois de septembre 2000, qui s'était limité à 2 059,28 euros (1 213,95 + 2 059,28 = 3 273,23). Enfin, elle a rappelé que, par la suite, le transfert mensuel s'élèverait à 3 273,23 euros.

22.
    Par décision du 27 octobre 2000, notifiée au requérant le 6 novembre 2000, l'autorité investie du pouvoir de nomination a rejeté la réclamation du requérant.

Procédure et conclusions des parties

23.
    C'est dans ces circonstances que, par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 janvier 2001, le requérant a introduit le présent recours.

24.
    Après l'introduction du recours, la défenderesse a, par note du 30 mars 2001, informé le requérant que, en raison d'erreurs d'encodage dans la gestion de son dossier, les transferts de ses émoluments opérés à partir du mois d'août 2000 dépassaient le plafond de 19 % autorisé par la décision attaquée. Dès lors, à partir du mois de mai 2001, le montant à verser sur le compte du requérant au Royaume-Uni se limiterait à 19 % de sa rémunération mensuelle nette, soit 1 824,53 GBP. Quant à la période écoulée, la défenderesse précisait qu'il ne serait pas fait application de l'article 85 du statut prévoyant le recouvrement des sommes indûment perçues, du fait qu'il peut raisonnablement être admis que le requérant ne pouvait pas saisir de bonne foi la portée des différents changements dans le montant des transferts opérés par l'administration.

25.
    Par décision du 30 avril 2001, le Tribunal (première chambre) a estimé, conformément à l'article 47, paragraphe 1, du règlement de procédure, tel que modifié le 6 décembre 2000 (JO L 322, p. 4), qu'un deuxième échange de mémoires n'était pas nécessaire, le contenu du dossier étant suffisamment complet pour permettre aux parties de développer leurs moyens et arguments au cours de la procédure orale.

26.
    Par décision du Tribunal du 20 septembre 2001, le juge rapporteur a été affecté à la quatrième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

27.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience qui s'est déroulée le 20 février 2002.

28.
    Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    déclarer le recours recevable;

-    annuler la décision de la Commission du 24 février 2000 limitant le transfert des émoluments du requérant vers le Royaume-Uni à 19 % de sa rémunération mensuelle nette et la décision du 27 octobre 2000 rejetant la réclamation du requérant;

-    annuler la conclusion n° 102/84 en ce qu'elle autoriserait la limitation du transfert de rémunération à 19 % de la rémunération mensuelle nette, en lieu et place des 35 % statutairement prévus, lorsqu'un fonctionnaire, qui sollicite un ou plusieurs transferts de sa rémunération au titre de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, ne remplit pas les conditions prévues par le paragraphe 2, sous a), de cet article;

-    reconnaître au requérant le droit de transférer sa rémunération mensuelle nette jusqu'à hauteur de 35 % de celle-ci;

-    condamner la Commission à verser au requérant une somme provisionnelle de 5 000 GBP, en réparation d'un dommage financier à évaluer ultérieurement, majorée des intérêts de retard;

-    condamner la Commission aux dépens.

29.
    La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours comme non fondé;

-    statuer sur les dépens comme de droit.

Sur la recevabilité

Sur la demande de reconnaissance au requérant d'un droit à transférer jusqu'à 35 % de sa rémunération

30.
    Par son quatrième chef de conclusions, le requérant demande au Tribunal de lui reconnaître le droit de transférer sa rémunération mensuelle nette jusqu'à hauteur de 35 %. À cet égard, il convient de relever que, selon une jurisprudence constante, il n'appartient pas au juge communautaire, dans le cadre du contrôle de légalité, d'adresser des injonctions aux institutions communautaires ou de se substituer à ces dernières (arrêts du Tribunal du 11 juin 1996, Sánchez Mateo/Commission, T-110/94, RecFP p. I-A-275 et II-805, point 36; du 11 juin 1996, Ouzounoff Popoff/Commission, T-111/94, RecFP p. I-A-277 et II-819, point 40; du 2 juillet 1998, Ouzounoff Popoff/Commission, T-236/97, RecFP p. I-A-311 et II-905, point 27, ci-après l'«arrêt Ouzounoff Popoff II»). En effet, en cas d'annulation d'un acte, l'institution concernée est tenue, en vertu de l'article 233 CE, de prendre les mesures que comporte l'exécution de l'arrêt (arrêt du Tribunal du 9 juin 1998, Biedermann e.a./Cour des comptes, T-173/95, RecFP p. I-A-273 et II-831, point 36).

31.
    Dès lors, ce chef de conclusions doit être rejeté comme irrecevable.

Sur l'objet du chef de conclusions tendant à l'annulation de la décision attaquée

32.
    Il convient de constater que, par la décision attaquée, la Commission a décidé de limiter, à partir du mois de mars 2000, le transfert des émoluments du requérant vers le Royaume-Uni à 19 % de sa rémunération mensuelle nette. Toutefois, il ressort du dossier qu'avant l'introduction du présent recours la décision attaquée n'a été correctement appliquée qu'au cours d'une courte période allant d'avril à juillet 2000. Pour le mois de mars 2000 puis à partir du mois d'août 2000 et jusqu'à l'introduction du recours, les montants transférés ont dépassé largement la limite de 19 % fixée par la décision attaquée (voir points 20 et 21 ci-dessus). Ces transferts tenaient compte à la fois des études de la fille du requérant au Royaume-Uni et du prêt hypothécaire souscrit par le requérant pour son acquisition immobilière à Londres. La même situation s'est poursuivie après l'introduction du recours pendant la période allant de janvier à avril 2001.

33.
    Par sa note du 30 mars 2001 (voir point 24 ci-dessus), la Commission a en effet indiqué qu'en raison d'erreurs d'encodage les transferts de rémunération opérés à compter du mois d'août 2000 dépassaient le plafond de 19 % autorisé par la décision attaquée. Tout en faisant savoir au requérant qu'elle n'appliquerait pas, pour la période écoulée, la procédure de l'article 85 du statut prévoyant le recouvrement des montants indûment transférés, la Commission a, par cette note, affirmé que, à partir du mois de mai 2001, elle établirait, conformément à la décision attaquée, le montant du transfert à 19 % environ de la rémunération mensuelle nette du requérant.

34.
    Il s'ensuit que le présent recours, en ce qu'il vise l'annulation de la décision attaquée, n'est pas dépourvu d'objet. Dès lors, le requérant est recevable à poursuivre l'annulation de cette décision.

Sur le fond

Sur la demande en annulation

35.
    Le requérant invoque quatre moyens à l'appui de son recours en annulation. Le premier est tiré d'une violation de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, des articles 1, 2 et 3 de la réglementation commune et de la directive interne. Le deuxième est tiré d'une violation de l'article 17, paragraphe 2, sous a), de l'annexe VII du statut. Le troisième est tiré de l'illégalité de la conclusion n° 102/84 et de la violation du principe d'égalité de traitement. Le quatrième est tiré de la violation du principe de bonne administration, du devoir de sollicitude et du principe de protection de la confiance légitime.

Sur le premier moyen tiré d'une violation de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, des articles 1, 2 et 3 de la réglementation commune et de la directive interne

- Arguments des parties

36.
    Le requérant soutient que la Commission a commis une erreur de droit en lui refusant un transfert de ses émoluments jusqu'à hauteur de 35 % de sa rémunération mensuelle nette, au titre de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, au motif que le requérant ne remplit pas les conditions prévues par le paragraphe 2, sous a), du même article. Selon, le requérant, pour bénéficier d'un transfert en vertu de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, il ne serait pas nécessaire de remplir également les conditions prévues par le paragraphe 2, sous a), de cet article.

37.
    D'une part, les dispositions prévues à l'article 17, paragraphe 2, sous a) et b), de l'annexe VII du statut n'auraient pas les mêmes objectifs et viseraient des hypothèses bien distinctes. En effet, l'article 17, paragraphe 2, sous a), de cette annexe viserait des transferts limités au montant de l'indemnité de dépaysement ou d'expatriation (16 %) et aurait pour but de soutenir le fonctionnaire, déplacé pour l'exercice de ses fonctions au lieu de son affectation, dans la gestion des intérêts personnels et familiaux qu'il pourrait continuer d'avoir, notamment dans l'État membre dont il est ressortissant ou dans celui de son domicile propre ou de la résidence d'un membre de sa famille à charge. En revanche, l'article 17, paragraphe 2, sous b), de la même annexe viserait des transferts mensuels non pas limités à 16 % mais à 35 % et destinés à couvrir des charges régulières et prouvées assumées par le fonctionnaire en dehors du pays du siège de son institution ou du pays où il exerce ses fonctions. Cette disposition viserait donc à permettre au fonctionnaire concerné de poursuivre la gestion de certains intérêts, situés en dehors du pays de son affectation et tenant notamment à sa situation familiale, à sa retraite ou à son habitat (arrêt de la Cour du 11 juillet 1985, Brautigam/Conseil, 236/82, Rec. p. 2401).

38.
    D'autre part, il ressortirait de la jurisprudence que l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut élargit la possibilité prévue par le paragraphe 2, sous a), du même article, en ce sens qu'il permet des transferts réguliers de montants dépassant le plafond indiqué sous a), dans la limite de 35 % fixée par l'article 3 de la réglementation commune (arrêt Brautigam/Conseil, précité). Une telle constatation résulterait également des termes des dispositions précitées. En effet, l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut ferait référence à des transferts dépassant le plafond indiqué par le paragraphe 2, sous a), dudit article. De même, l'article 2 de la réglementation commune, pris en application de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, prévoirait, tout aussi clairement, la possibilité de dépasser le plafond de 16 %, prévu par l'article 1er de la réglementation commune, pour autant, bien entendu, que la limite supérieure de 35 % soit respectée. En outre, l'article 3 de la réglementation commune mentionnerait, sans distinction, que l'ensemble des transferts réguliers prévus par cette réglementation ne peut dépasser 35 %. En d'autres termes, le plafond fixé par l'article 1er de la réglementationcommune serait égal à 16 %, celui fixé par l'article 2 de cette réglementation à 35 % et le plafond fixé par ces deux articles à 35 % également.

39.
    La Commission soutient que le transfert en vertu de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut n'est possible que si le fonctionnaire remplit au préalable les conditions du paragraphe 2, sous a), de cet article. En l'espèce, le requérant ne remplirait aucune de ces conditions, étant donné qu'il n'est ni ressortissant du Royaume-Uni (premier tiret), ni domicilié dans ce pays (deuxième tiret), ni affecté en dehors de la Communauté (troisième tiret). Dès lors, il n'aurait pas droit à un transfert, sur la base de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, jusqu'à hauteur de 35 % de sa rémunération nette.

40.
    La Commission considère que cette interprétation est fondée sur les termes de l'article 17, paragraphe 2, de l'annexe VII du statut, lequel fait référence à des transferts, au titre du paragraphe 2, sous b), de «l'intéressé», à savoir le fonctionnaire percevant l'indemnité de dépaysement ou d'expatriation, «dépassant le plafond indiqué au point a)». De même, l'article 2 de la réglementation commune préciserait que le fonctionnaire peut «en outre» faire transférer «une partie de ses émoluments, supérieure au montant visé à l'article 1er». Ainsi, se voir octroyer le bénéfice d'un transfert dépassant le montant de l'indemnité de dépaysement ou d'expatriation requerrait au préalable que l'on bénéficie d'un transfert dans la même monnaie correspondant au montant de cette indemnité. Selon la Commission, le lien existant entre les transferts au titre de l'article 17, paragraphe 2, sous a) et b), de l'annexe VII du statut serait confirmé par la jurisprudence (arrêt Brautigam/Conseil, précité, points 27 et suivants).

41.
    La Commission ajoute que, dans la mesure où, en suivant la pratique suggérée par la conclusion n° 102/84, elle a accepté d'offrir le bénéfice du transfert aux fonctionnaires et agents «résidents», elle l'a également offert, dans un souci d'égalité de traitement, aux fonctionnaires non-résidents, tels que le requérant, qui ne remplissent pas les conditions de l'article 17, paragraphe 2, sous a), de l'annexe VII du statut mais qui remplissent les conditions du paragraphe 2, sous b), de cet article. Ainsi, le requérant, qui ne remplit pas les conditions du paragraphe 2, sous a), n'aurait droit qu'à un transfert au titre du paragraphe 2, sous b), jusqu'à la limite de 19 % de sa rémunération mensuelle nette, soit la différence entre le plafond de 35 % et le taux de 16 %.

- Appréciation du Tribunal

42.
    À titre liminaire, il y a lieu d'observer que, aux termes de l'article 17, paragraphe 1, de l'annexe VII du statut, les sommes dues au fonctionnaire sont payées au lieu et dans la monnaie du pays où celui-ci exerce ses fonctions. Par dérogation à cette règle, le paragraphe 2 du même article permet le transfert d'une partie des émoluments du fonctionnaire, par l'entremise de l'institution dont il relève, dans un autre pays et dans une autre monnaie. Lorsque le transfert est autorisé, il est, en vertu de l'article 17, paragraphe 3, de l'annexe VII du statut, effectué à un taux de change spécial visé à l'article 63, deuxième alinéa, du statut et les montants transférés sont affectés ducoefficient résultant du rapport qui existe entre le coefficient correcteur fixé pour le pays dans la monnaie duquel le transfert est effectué et le coefficient correcteur fixé pour le pays d'affectation du fonctionnaire (arrêt Ouzounoff Popoff II, point 31, et ordonnance du Tribunal du 12 novembre 1999, Bonaiti Brighina/Commission, T-93/99, RecFP p. I-A-219 et II-1127, point 21).

43.
    Pour résoudre, en l'espèce, le problème d'interprétation soulevé par le requérant, il convient d'examiner le contenu et les objectifs des dérogations à la règle du paiement au lieu et dans la monnaie du pays où le fonctionnaire exerce ses fonctions, prévues par l'article 17, paragraphe 2, de l'annexe VII du statut et précisées par la réglementation commune.

44.
    La dérogation prévue par l'article 17, paragraphe 2, sous a), de l'annexe VII du statut est, d'une part, limitée au montant de l'indemnité de dépaysement ou d'expatriation et, d'autre part, liée à l'utilisation de certaines monnaies correspondant, notamment, à celles de l'État membre dont le fonctionnaire est ressortissant ou de l'État membre de son domicile propre ou de la résidence d'un membre de sa famille à charge. L'article 17, paragraphe 2, sous c), de l'annexe VII du statut permet, en outre, à titre tout à fait exceptionnel, des transferts occasionnels également dans les monnaies visées au paragraphe 2, sous a), de cet article. La nature des exceptions ainsi définies à la règle générale fait ressortir que celles-ci ont pour but de soutenir le fonctionnaire, déplacé pour l'exercice de ses fonctions au lieu de son affectation, dans la gestion des intérêts personnels ou familiaux qu'il pourrait continuer d'avoir, notamment dans le pays d'où il vient ou dans celui de la résidence d'un membre de sa famille à charge (arrêt Brautigam/Conseil, précité, point 27).

45.
    L'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut élargit la possibilité prévue au paragraphe 2, sous a), de cet article, en ce sens qu'il permet des transferts réguliers de montants dépassant le plafond indiqué sous a). Si l'application de cette disposition n'est apparemment pas limitée à l'utilisation de certaines monnaies, il résulte toutefois de son libellé que les transferts en question doivent être destinés à couvrir des dépenses résultant notamment de charges régulières que le fonctionnaire aurait à assumer en dehors du pays du siège de son institution ou du pays où il exerce ses fonctions. L'article 2 de la réglementation commune, qui définit les catégories de dépenses justifiant de tels transferts, fait apparaître que ces dépenses relèvent notamment de certaines charges de famille, de la constitution de pensions complémentaires et de l'habitat du fonctionnaire, toujours en dehors du pays d'affectation. Dans un but analogue à celui envisagé à l'article 17, paragraphe 2, sous a) et c), de l'annexe VII du statut, l'exception prévue sous b) vise donc à permettre au fonctionnaire concerné de poursuivre la gestion de certains intérêts, situés en dehors du pays de son affectation et tenant notamment à sa situation de famille, à sa retraite ou à son habitat (arrêt Brautigam/Conseil, précité, point 28).

46.
    Dans ces circonstances, l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut doit être interprété en ce sens que, pour en bénéficier, le fonctionnaire doit prouver qu'il doit faire face à des charges régulières dans le pays dans la monnaie duquel ildemande le transfert (arrêt Ouzounoff Popoff II, point 35). La notion de charges régulières en dehors du pays du siège de l'institution du fonctionnaire ou du pays où il exerce ses fonctions, figurant à l'article précité et précisée à l'article 2 de la réglementation commune, doit être interprétée en ce sens que ces charges relèvent de la gestion de certains intérêts du fonctionnaire concerné, situés en dehors du pays de son affectation et tenant à sa situation de famille, à sa retraite ou à son habitat (arrêts Brautigam/Conseil, précité, point 29, et Ouzounoff Popoff II, point 32).

47.
    S'agissant, ensuite, de la partie des émoluments que le fonctionnaire concerné peut transférer en vertu de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, il convient de relever que, si le montant pouvant être transféré en vertu du paragraphe 2, sous a), de cet article est équivalent au montant que ce fonctionnaire perçoit au titre de l'indemnité de dépaysement ou d'expatriation, le paragraphe 2, sous b), du même article se réfère, en ce qui concerne le montant des transferts réguliers, uniquement aux charges régulières et prouvées que l'intéressé aurait à assumer en dehors du pays du siège de son institution ou du pays où il exerce ses fonctions, sans fixer une limite déterminée (arrêt du Tribunal du 4 décembre 2001, López Madruga/Commission, T-125/00, non encore publié au Recueil, point 39).

48.
    Or, si, selon l'article 3 de la réglementation commune, l'ensemble des transferts réguliers tels qu'ils sont définis au paragraphe 2, sous a) et b), de l'article 17 de l'annexe VII du statut ne peut pas dépasser 35 % de la rémunération mensuelle nette, il ne s'ensuit pas, comme la Commission le préconise, qu'en toute circonstance le maximum disponible pour les transferts au titre du paragraphe 2, sous b), de cet article s'élève au montant qui résulte de la différence entre 35 % de la rémunération nette et le montant de l'indemnité de dépaysement. En effet, le critère déterminant pour les transferts au titre du paragraphe 2, sous b), étant celui des charges régulières et prouvées que l'intéressé aurait à assumer en dehors du pays du siège de son institution ou du pays où il exerce ses fonctions, le montant des transferts réguliers, au sens du même paragraphe 2, sous b), se situe au niveau desdites charges, dans le respect du plafond de 35 %, ou dans les limites de la marge résultant de la déduction du montant éventuellement utilisé au titre du paragraphe 2, sous a), du maximum global de 35 % (voir arrêt López Madruga/Commission, précité, point 40).

49.
    Cette interprétation est confirmée par les considérations suivantes.

50.
    Tout d'abord, s'il fallait admettre, comme le soutient la Commission, qu'aux fins d'un transfert au titre de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, jusqu'à hauteur de 35 % de la rémunération mensuelle nette du fonctionnaire intéressé, ce dernier doit au préalable remplir les conditions prévues au paragraphe 2, sous a), de cet article, les «charges régulières et prouvées» auxquelles se réfère le paragraphe 2, sous b), devraient nécessairement être assumées dans un des pays visés sous a), à savoir, soit dans l'État membre dont le fonctionnaire est ressortissant (premier tiret), soit dans l'État membre de son domicile propre ou de la résidence d'un membre de sa famille à charge (deuxième tiret), soit, enfin, dans le pays de son affectation précédente ou le pays du siège de son institution à condition qu'il s'agisse d'un fonctionnaireaffecté en dehors du territoire des Communautés (troisième tiret). Une telle approche serait contraire aux libellés de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut et de l'article 2, deuxième alinéa, quatrième tiret, de la réglementation commune, qui prévoient la possibilité d'un transfert au titre du paragraphe 2, sous b), destiné à couvrir, notamment, des dépenses du fonctionnaire intéressé résultant d'une acquisition immobilière «dans un pays des Communautés» autre que le pays du siège de son institution ou du pays où il exerce ses fonctions.

51.
    Ensuite, l'interprétation suivie par la Commission aboutissant, ainsi qu'il a été relevé au point précédent, à limiter la possibilité de transfert, au titre de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, aux cas de transferts effectués à la fois vers les pays visés au paragraphe 2, sous a), de cet article et dans la monnaie de ces pays n'est pas compatible avec l'article 2, deuxième alinéa, quatrième tiret, de la réglementation commune, qui prévoit, également, la possibilité d'un transfert au titre du paragraphe 2, sous b), en cas d'acquisition d'une «deuxième habitation dans un pays des Communautés». Or, rien n'exclut que cette habitation se situe, selon le choix du fonctionnaire concerné, dans un pays autre que ceux qui sont visés sous a).

52.
    Enfin, force est de constater que, selon la pratique administrative de la Commission, un fonctionnaire peut faire transférer une partie de ses émoluments, en application de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, alors même qu'il ne satisfait pas aux conditions du paragraphe 2, sous a), de cet article. Conformément à cette pratique, la Commission a accordé, en l'espèce, au requérant, depuis le mois de février 1999, le bénéfice d'un transfert au titre de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, d'une partie de la rémunération nette du requérant en raison des études de sa fille au Royaume-Uni (voir point 9 ci-dessus), sans exiger que celui-ci remplisse les conditions du paragraphe 2, sous a), de cet article, ni examiner s'il en était ainsi. La Commission ne s'est prévalue, pour la première fois, de ce que l'application de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut dépendait de celle du paragraphe 2, sous a), de cet article, ainsi que de l'application par analogie de la conclusion n° 102/84 au cas du requérant, que lorsque ce dernier a demandé un transfert supplémentaire au titre du même paragraphe 2, sous b), pour couvrir les dépenses résultant de son acquisition immobilière à Londres.

53.
    Or, ainsi que le Tribunal l'a relevé au point 41 de l'arrêt López Madruga/Commission, précité, aucun élément de droit ou de fait ne permet de justifier, dans le cadre de la pratique administrative de la Commission dissociant les transferts au titre de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, des transferts au titre du paragraphe 2, sous a), de cet article, que, même lorsque les possibilités de transfert au titre du paragraphe 2, sous a), n'ont pas été épuisées, le maximum transférable au titre du paragraphe 2, sous b), devrait être limité à 19 % de la rémunération mensuelle nette, alors même que le plafond de 35 % ne serait pas dépassé.

54.
    Compte tenu des considérations qui précèdent, il convient de déclarer le premier moyen fondé, dans la mesure où, par la décision attaquée, la Commission a limité à 19 % de la rémunération mensuelle nette du requérant le montant que celui-ci peutfaire transférer au titre de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut, au lieu de permettre au requérant de faire transférer un montant équivalent aux charges régulières et prouvées que celui-ci expose en raison des études de sa fille et de son acquisition immobilière au Royaume-Uni, dans les limites du plafond de 35 % exprimé à l'article 3 de la réglementation commune et précisé au point 48 ci-dessus.

55.
    Il s'ensuit que la décision attaquée doit être annulée, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens invoqués à l'appui du recours en annulation, ni d'examiner la légalité de la conclusion n° 102/84.

Sur la demande en indemnité

Arguments des parties

56.
    Le requérant estime avoir subi, depuis le mois de mars 2000, un préjudice financier important, correspondant à la différence entre le montant en livres sterling que la Commission aurait dû transférer en tenant compte du coefficient correcteur applicable et du taux de change euro/livre sterling et le montant effectivement transféré par celle-ci.

57.
    Pour l'année 2000, le requérant, partant de l'hypothèse qu'il a droit à un transfert égal à 35 % de sa rémunération mensuelle nette et tenant compte des conditions défavorables dans lesquelles il a dû transférer, en dehors du régime de l'article 17 de l'annexe VII du statut, les montants non transférés par la Commission au cours de cette année, évalue son préjudice à 2 231 GBP. Ce montant de préjudice devrait, selon le requérant, être majoré en tenant compte de l'alourdissement des charges auquel il a dû faire face. Cet alourdissement résulterait, d'une part, de l'augmentation du taux d'intérêt du prêt hypothécaire du requérant, lequel serait passé de 4 à 7,25 % environ à compter de septembre 2000, et, d'autre part, de la condamnation du requérant, par le tribunal de première instance de Bruxelles, à verser directement à sa fille, chaque mois depuis le 1er mars 2000, la contre-valeur en livres sterling de la somme de 69 791,76 francs belges (BEF), à titre de contribution aux frais d'entretien et d'éducation de celle-ci, outre les allocations scolaires et les frais de voyage. De plus, ce montant de préjudice devrait être majoré en fonction de la durée de la présente procédure qui s'étendrait, normalement, sur quinze mois. Compte tenu de ces éléments, le requérant demande la condamnation de la Commission à lui verser, à titre de réparation du préjudice matériel subi, la somme provisionnelle de 5 000 GBP, majorée des intérêts de retard.

58.
    La Commission soutient que les conclusions en indemnité doivent être rejetées comme non fondées dans la mesure où elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui sont également non fondées. En effet, en l'absence d'une faute imputable à la Commission, rien ne justifierait son obligation de réparer le préjudice prétendument subi pas le requérant. À titre subsidiaire, la Commission estime que les calculs du requérant concernant le préjudice prétendument subi sont erronés.

Appréciation du Tribunal

59.
    Selon une jurisprudence constante, l'engagement de la responsabilité de la Communauté suppose la réunion d'un ensemble de conditions en ce qui concerne l'illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l'existence d'un lien de causalité entre le comportement et le préjudice invoqué (arrêts du Tribunal Ouzounoff Popoff II, point 63, et du 5 décembre 2000, Gooch/Commission, T-197/99, RecFP p. I-A-271 et II-1247, point 67 et la jurisprudence citée).

60.
    Pour ce qui est de l'illégalité du comportement de l'institution concernée, il suffit de constater que, ainsi qu'il a été conclu ci-dessus, dans le cadre de l'examen du premier moyen du recours en annulation, en limitant le transfert des émoluments du requérant au titre de l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut à 19 % de sa rémunération nette, au motif que le requérant ne remplit pas les conditions prévues par le paragraphe 2, sous a), de cet article, la Commission a adopté un comportement illégal susceptible d'engager sa responsabilité.

61.
    En ce qui concerne la réalité du dommage, il convient de souligner que, à la suite de l'adoption de la décision attaquée, le requérant a été contraint d'effectuer des transferts de ses émoluments vers le Royaume-Uni dépassant la limite autorisée, en dehors du régime avantageux prévu par l'article 17, paragraphe 2, de l'annexe VII du statut. Le requérant a, dès lors, subi un préjudice correspondant, pour les transferts ainsi opérés et jusqu'à concurrence de ses charges régulières et prouvées au Royaume-Uni, aux dépenses encourues en raison de la perte des avantages liés à ce régime de transfert. Dans la requête, ce préjudice est évalué à 5 000 GBP environ pour l'année 2000 et pour une durée d'instance de 15 mois.

62.
    Quant à l'existence d'un lien de causalité entre le comportement illégal de la défenderesse et le préjudice du requérant, il suffit de constater que c'est précisément à cause de l'adoption par la Commission de la décision attaquée que le requérant n'a pas pu bénéficier d'un transfert de ses émoluments supérieur à 19 % et jusqu'à 35 % conformément à l'article 17, paragraphe 2, sous b), de l'annexe VII du statut et aux articles 2 et 3 de la réglementation commune.

63.
    Il s'ensuit que la Commission a adopté un comportement illégal qui a causé au requérant un dommage et qu'elle est tenue de l'indemniser, l'annulation de la décision ne constituant pas, en elle-même, une réparation adéquate ni suffisante du préjudice subi.

64.
    En ce qui concerne le montant de l'indemnité à verser au requérant, le Tribunal considère qu'il n'est pas nécessaire, à ce stade, de condamner la Commission à lui verser la somme provisionnelle de 5 000 GBP réclamée dans la requête. En effet, cette somme n'est qu'approximative et ne tient pas compte de tous les facteurs à prendre en considération par la défenderesse dans le cadre de l'exécution de l'arrêt du Tribunal et, notamment, des montants déjà transférés, de la période pendant laquelle lerequérant a subi les dommages qui sont jugés par le Tribunal comme devant être réparés par la Communauté et du niveau des charges régulières et prouvées du requérant au Royaume-Uni en raison des études de sa fille et de son acquisition immobilière.

65.
    À cet égard, il convient de relever que, lors de l'audience, la défenderesse a déclaré que, dans l'hypothèse, où sa responsabilité extra-contractuelle serait engagée du fait d'une faute qui lui serait imputable, elle serait amenée, dans le cadre de l'exécution de l'arrêt du Tribunal, non seulement à régulariser la situation des transferts du requérant, mais également à lui réparer le préjudice matériel subi du fait de l'adoption de la décision attaquée.

66.
    Dans ces conditions, le Tribunal invite les parties à rechercher un accord, à la lumière du présent arrêt, sur le montant de l'indemnisation afférente à l'intégralité du dommage subi par le requérant, majoré des intérêts de retard, conformément à ses conclusions, dans un délai de cinq mois. À défaut d'accord, les parties soumettront au Tribunal, dans ce délai, leurs conclusions chiffrées.

Sur les dépens

67.
    Eu égard à ce qui a été exposé au point 66 ci-dessus, la décision sur les dépens est réservée.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

déclare et arrête:

1)    La décision de la Commission du 24 février 2000 limitant le transfert des émoluments du requérant vers le Royaume-Uni à 19 % de sa rémunération mensuelle nette est annulée.

2)    La Commission est condamnée à réparer le dommage subi par le requérant du fait de la décision du 24 février 2000, la réparation étant majorée d'intérêts de retard au taux annuel de 5,25 % jusqu'au paiement.

3)    Les parties transmettront au Tribunal, dans un délai de cinq mois à compter de la date du prononcé du présent arrêt, les montants à payer, établis d'un commun accord.

4)    À défaut d'accord, elles feront parvenir au Tribunal, dans le même délai, leurs conclusions chiffrées.

5)    La décision sur les dépens est réservée.

Vilaras
Tiili
Mengozzi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 mai 2002.

Le greffier

Le président

H. Jung

M. Vilaras


1: Langue de procédure: le français.