Language of document : ECLI:EU:T:2012:36

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

31 janvier 2012 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale LA VICTORIA DE MEXICO – Marque communautaire figurative antérieure comportant l’élément verbal ‘victoria’ et marque nationale verbale antérieure VICTORIA – Refus partiel d’enregistrement – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑205/10,

Cervecería Modelo, SA de CV, établie à Mexico (Mexique), représentée par Me C. Lema Devesa, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. J. Crespo Carrillo, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant le chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant,

Plataforma Continental, SL, établie à Madrid (Espagne), représentée par Me P. González-Bueno Catalán de Ocón, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 5 mars 2010 (affaire R 322/2009-2), relative à une procédure d’opposition entre Plataforma Continental, SL et Cervecería Modelo, SA de CV,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood, président, F. Dehousse et J. Schwarcz (rapporteur), juges,

greffier : Mme C. Heeren, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 4 mai 2010,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 9 août 2010,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 27 août 2010,

à la suite de l’audience du 8 novembre 2011,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 20 octobre 2005, la requérante, Cervecería Modelo, SA de CV, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal LA VICTORIA DE MEXICO.

3        Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 25, 32 et 43 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie » ;

–        classe 32 : « Bières ; eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons » ;

–        classe 43 : « Services de restauration (alimentation) ; bars ; hébergement temporaire ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 10/2006, du 6 mars 2006.

5        Le 5 juin 2006, l’intervenante, Plataforma Continental, SL, a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits et services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur l’enregistrement espagnol n° 1648564 de la marque verbale antérieure VICTORIA et sur l’enregistrement communautaire n° 2632271 de la marque figurative antérieure suivante :

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7        En ce qui concerne l’enregistrement communautaire, la marque figurative comportant l’élément verbal « victoria » avait été présentée le 22 mars 2002 et enregistrée le 5 novembre 2003 pour des produits relevant des classes 31, 32 et 33. En ce qui concerne l’enregistrement espagnol, la marque verbale VICTORIA avait été présentée le 17 juillet 1991 et enregistrée le 20 avril 1994 pour des produits relevant de la classe 32.

8        L’opposition était fondée sur tous les produits relevant des classes 31, 32 et 33 couverts par les enregistrements communautaire et national antérieurs. S’agissant de la classe 32, l’enregistrement communautaire antérieur visait les bières, eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques, boissons de fruits et jus de fruits, sirops et autres préparations pour faire des boissons.

9        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

10      Par décision du 28 janvier 2009, la division d’opposition a rejeté l’opposition au motif que, les différences entre les signes en conflit étant suffisantes pour compenser les similitudes graphiques, phonétiques et conceptuelles, il n’existait pas de risque de confusion entre ces signes dans l’esprit du public.

11      Le 18 mars 2009, l’intervenante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009), contre la décision de la division d’opposition.

12      Par décision du 5 mars 2010, la deuxième chambre de recours de l’OHMI a partiellement accueilli le recours, en refusant l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant de la classe 32 visés dans la demande de marque (ci-après la « décision attaquée »).

13      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que le public pertinent était composé de consommateurs moyens de l’Union européenne, que les produits contestés relevant de la classe 32 visés par la demande de marque étaient identiques à ceux de la marque antérieure de la même classe et qu’il existait une certaine similitude visuelle, phonétique et conceptuelle entre les marques en conflit, en raison de la présence du mot « victoria » dans chacune d’entre elles, ce terme étant dominant dans la marque communautaire antérieure. La chambre de recours a relevé que, sur le plan conceptuel, le mot « victoria » n’aurait pas de signification et serait perçu comme un prénom féminin pour une majorité du public pertinent des États membres de langue ni latine ni anglaise. Par suite, la chambre de recours a conclu à un risque de confusion entre la marque communautaire antérieure et la marque demandée, n’estimant pas nécessaire de procéder à l’examen de la marque nationale antérieure.

 Procédure et conclusions des parties

14      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler partiellement la décision attaquée en ce qu’elle refuse l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant de la classe 32 ;

–        déclarer qu’il y a lieu de procéder à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant de la classe 32 ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

15      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

16      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

17      La requérante a demandé, en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, à être entendue lors d’une audience et que le Tribunal statue à l’issue de la procédure orale. Le Tribunal a fait droit à cette demande.

 En droit

 Sur l’objet du litige

18      Si, dans la requête, il est demandé au Tribunal d’annuler partiellement la décision attaquée et, en conséquence, de déclarer qu’il y a lieu de procéder à l’enregistrement de la marque demandée, la requérante a précisé à l’audience qu’elle ne demandait pas qu’il soit fait injonction à l’OHMI de procéder audit enregistrement et qu’elle ne visait que l’annulation partielle de la décision attaquée.

19      Par conséquent, il convient de prendre acte que le recours ne tend qu’à l’annulation partielle de la décision attaquée, en ce qu’elle refuse l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant de la classe 32.

 Sur la demande d’annulation partielle de la décision attaquée

20      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la méconnaissance de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

21      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, « en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée ; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure ».

22      Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre ou les marques communautaires dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

23      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement (voir, par analogie, arrêts de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 29, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 17). Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 et 31, ainsi que la jurisprudence citée].

24      Cette appréciation globale implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, entre la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêt de la Cour du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI, C‑234/06 P, Rec. p. I‑7333, point 48, et arrêt GIORGIO BEVERLY HILLS, point 23 supra, point 32).

25      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

26      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé qu’il existait un risque de confusion entre la marque communautaire figurative antérieure et la marque demandée, puisqu’il ressort de la décision attaquée que ladite chambre a examiné le risque de confusion uniquement entre ces marques, estimant qu’il n’était pas nécessaire d’examiner la marque nationale antérieure invoquée par l’intervenante.

27      Par ailleurs, il convient de constater que la requérante n’a présenté aucun argument pour contester la décision attaquée, en ce qu’elle a refusé l’enregistrement de la marque demandée pour des produits relevant de la classe 32 autres que les bières, comme les eaux minérales et gazeuses et les autres boissons non alcooliques, les boissons de fruits et jus de fruits, ainsi que les sirops et autres préparations pour faire des boissons.

 Sur le public pertinent

28      La requérante soutient que, étant habitué à être confronté à des marques complexes comportant différents éléments figuratifs et verbaux, le consommateur moyen de bière de l’Union est attentif à tous les éléments qui composent la marque et les prend en considération au moment d’acheter. Elle fait ainsi implicitement valoir que, lors de l’achat ou de la commande, ledit consommateur ferait preuve d’un degré particulièrement élevé d’attention.

29      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

30      La chambre de recours a considéré que le public pertinent pour comparer les signes en conflit était constitué de consommateurs moyens de l’Union, normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés.

31      Ainsi que l’OHMI le relève, s’il est vrai que, dans le secteur des boissons alcooliques, le consommateur est habitué à ce que les produits soient fréquemment désignés par des marques comprenant plusieurs éléments verbaux ou figuratifs, il ne saurait en être conclu que ledit consommateur serait particulièrement attentif à tous les éléments d’une marque, verbaux ou figuratifs, au moment de procéder à l’acte d’achat, les produits en cause étant des produits de consommation courante, pour lesquels le public pertinent est le consommateur moyen des produits de grande consommation, qui est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 septembre 2009, Dominio de la Vega/OHMI – Ambrosio Velasco (DOMINIO DE LA VEGA), T‑458/07, non publié au Recueil, point 27). Une telle considération vaut tout particulièrement, en ce qui concerne la marque antérieure, pour les éléments verbaux « cerveza », « pilsener », « málaga » ou « 1928 », et, en ce qui concerne la marque demandée, pour l’élément verbal « de mexico ». Dans l’impression d’ensemble produite par les signes en conflit, le public pertinent percevra ces différents éléments verbaux comme des éléments descriptifs des produits désignés par les signes en conflit ou, en ce qu’ils font référence à un lieu géographique ou à une année, comme des éléments clairement accessoires et non comme des éléments permettant de distinguer l’origine commerciale de ces produits (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 6 juillet 2004, Grupo El Prado Cervera/OHMI – Héritiers Debuschewitz (CHUFAFIT), T‑117/02, Rec. p. II‑2073, point 53).

32      Par suite, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que le public pertinent, constitué de consommateurs moyens de l’Union, était normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

 Sur la similitude des produits

33      Il convient de rappeler que, par la décision attaquée, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit pour les produits relevant de la classe 32, pour lesquels la marque demandée avait été présentée. La requérante n’a pas contesté la conclusion de la chambre de recours figurant au point 18 de la décision attaquée, selon laquelle les produits visés par les marques en conflit étaient identiques.

34      Dans la mesure où ce constat est conforme au règlement n° 207/2009, tel qu’interprété par la jurisprudence, il y a lieu de se fonder sur celui-ci lors de l’examen du bien-fondé du présent recours.

 Sur la similitude des signes

35      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte en particulier de leurs éléments distinctifs et dominants (arrêts de la Cour du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, Rec. p. I‑6191, point 23 ; Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 23 supra, point 25, et du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35).

36      Selon une jurisprudence constante, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 30, et du 26 janvier 2006, Volkswagen/OHMI – Nacional Motor (Variant), T‑317/03, non publié au Recueil, point 46].

37      En outre, il a été jugé qu’il y a lieu d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants. Ce n’est toutefois que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant. Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci [voir arrêt du Tribunal du 12 novembre 2008, Shaker/OHMI – Limiñana y Botella (Limoncello della Costiera Amalfitana shaker), T‑7/04, Rec. p. II‑3085, point 40, et la jurisprudence citée].

38      Enfin, il y a lieu de rappeler que, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [voir arrêts du Tribunal du 15 décembre 2009, Trubion Pharmaceuticals/OHMI – Merck (TRUBION), T‑412/08, non publié au Recueil, point 45, et la jurisprudence citée, et du 2 février 2011, Oyster Cosmetics/OHMI – Kadabell (Oysters cosmetics), T‑437/09, non publié au Recueil, point 36].

–       Sur les signes comparés par la chambre de recours

39      Si la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas tenu compte, dans la comparaison des signes en conflit, de l’absence de démonstration de l’usage effectif de la marque nationale antérieure, il convient de constater, comme le font remarquer l’OHMI et l’intervenante, que l’analyse du risque de confusion a été faite en comparant la marque demandée à la marque communautaire antérieure.

40      Dès lors, l’argument soulevé par la requérante, relatif à la marque nationale antérieure, opposée par l’intervenante, est inopérant.

–       Sur la comparaison des signes en conflit dans leur ensemble

41      La requérante soutient que la chambre de recours n’a pas comparé les signes en conflit dans leur ensemble, mais qu’elle a indûment considéré l’élément verbal « victoria » comme dominant, déclarant les éléments graphiques de la marque antérieure et l’élément verbal « mexico » de la marque demandée comme dépourvus de caractère distinctif. La chambre de recours n’aurait pas non plus tenu compte du faible caractère distinctif de l’élément verbal « victoria » dans le secteur de la bière et de la coexistence de la marque antérieure avec d’autres marques comportant cet élément.

42      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

43      Il y a lieu de constater que, au point 23 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, dans la marque antérieure, l’élément verbal « victoria » était dominant. A cet égard, elle a rappelé le principe selon lequel, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et d’éléments figuratifs, les premiers sont considérés comme plus distinctifs que les seconds. Elle a ensuite constaté que, dans la marque antérieure, les éléments figuratifs n’étaient pas particulièrement imaginatifs et n’étaient pas susceptibles de détourner l’attention du public des éléments verbaux, plus particulièrement de l’élément verbal « victoria ». Par ailleurs, toujours dans la marque antérieure, la chambre de recours a noté que l’élément « victoria » apparaissait dans une dimension plus importante que les autres éléments verbaux.

44      S’agissant de la marque demandée, la chambre de recours l’a analysée sur les plans visuel, phonétique et conceptuel. Visuellement, elle a considéré, au point 24 de la décision attaquée, qu’aucun élément de la marque demandée n’était dominant. Sur le plan phonétique, elle a, en revanche, distingué l’élément « victoria » en le qualifiant, au point 27 de la décision attaquée, de dominant, au motif qu’il s’agissait de l’élément qui serait prononcé en premier dans cette marque, l’élément « la » étant perçu comme un article par le public pertinent et donc négligeable, que l’élément « victoria » était court et frappant et qu’il n’était pas exclu que, lorsque les boissons seraient commandées verbalement, il fût seul prononcé. Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a considéré, aux points 29 et 30 de la décision attaquée, que, pour une partie du public pertinent, l’élément « victoria » serait le plus distinctif.

45      Il y a lieu de constater que la marque antérieure est une marque comportant des éléments figuratifs et des éléments verbaux. Elle est constituée d’une étiquette de couleur orange sur laquelle figure une forme ovale à la bordure bleue et au fond blanc, que traverse horizontalement en son milieu un bandeau rouge, sur lequel apparaît en lettres blanches majuscules le mot « victoria ». Dans la partie haute de la bordure bleue, les éléments verbaux « cerveza » et « pilsener » sont inscrits en lettres fines et dorées, et deux traits de même couleur figurent dans la partie basse de la bordure. Sur le fond blanc, un écusson ou blason apparaît au-dessus du bandeau comportant le mot « victoria », les éléments verbaux « málaga » et « 1928 », ainsi que deux épis de blé placés au-dessous du bandeau.

46      Il convient, également, de constater que, dans la marque antérieure, l’élément verbal « victoria » est placé dans une position centrale par rapport aux autres éléments, qu’il est écrit en grands caractères blancs sur fond rouge, ce qui le fait bien ressortir de ce fond ainsi que de la forme ovale que traverse le bandeau rouge, et que sa taille est plus importante que celle des autres éléments verbaux de cette marque. Dès lors, c’est le mot « victoria » que le public pertinent garde en mémoire. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que cet élément verbal était dominant dans la marque antérieure.

47      Pour autant, la chambre de recours n’a pas limité son analyse du risque de confusion entre les signes en conflit au seul élément verbal « victoria », qu’elle n’a considéré comme dominant que dans la marque antérieure, se bornant à estimer qu’il était dominant dans la marque demandée sur le seul plan phonétique.

48      S’agissant, premièrement, des éléments graphiques de la marque antérieure, la chambre de recours les a pris en considération pour apprécier l’éventuelle similitude entre les signes en conflit. Elle a considéré, au point 23 de la décision attaquée, que ces éléments ne faisaient « pas particulièrement preuve d’une grande imagination », relevant plus précisément que « la composition des éléments géométriques de l’étiquette et la conception du blason [étaient] plutôt communes dans le secteur des boissons ». Au point 26 de la décision attaquée, elle a poursuivi en constatant que, sur le plan visuel, « l’élément figuratif de la marque antérieure ne revêt[ait] pas une grande importance dans l’appréciation d’ensemble du signe, étant donné qu’il [était] plutôt banal pour les produits en cause ».

49      Au regard des appréciations ainsi portées dans la décision attaquée sur les éléments figuratifs de la marque antérieure, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, après les avoir pris en considération, que ces éléments n’étaient pas de nature à détourner l’attention du public pertinent de l’élément verbal « victoria », sans qu’elle ait d’ailleurs relevé qu’ils étaient dépourvus de caractère distinctif. Par suite, l’argument de la requérante doit être écarté.

50      S’agissant, deuxièmement, des autres éléments verbaux de la marque antérieure, et tout particulièrement du terme « málaga », dont la requérante soutient que, ne renvoyant pas à des caractéristiques spécifiques au produit commercialisé, à savoir la bière, il aurait un caractère fantaisiste et serait donc de nature à attirer le public, il convient de constater que, ainsi que l’a noté la chambre de recours au point 31 de la décision attaquée, les quatre éléments verbaux de la marque antérieure, autres que « victoria », soit sont clairement descriptifs du produit vendu sous cette marque, soit se rapportent à l’origine géographique du produit ou à l’année du début de sa commercialisation.

51      Troisièmement, si la requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur en considérant que, dans la marque demandée, l’élément verbal « mexico », qui serait pourtant peu habituel dans le secteur de la bière, n’était pas distinctif, il y a lieu de relever qu’aucun passage de la décision attaquée ne porte sur l’absence de caractère distinctif de cet élément. Au contraire, la chambre de recours a tenu compte de cet élément verbal sur les plans phonétique et conceptuel, mais a relativisé la portée que lui donne la requérante.

52      Sur le plan phonétique, la chambre de recours a considéré, au point 27 de la décision attaquée, que l’élément verbal « victoria » était dominant dans la marque demandée, en raison de sa place au début de cette marque et du fait qu’il était suffisamment court et frappant, ce qui ne permettait pas d’exclure qu’il serait le seul à être prononcé lors de commandes orales. Ainsi, la chambre de recours n’a pas dénié tout caractère distinctif à l’élément verbal « mexico », mais a estimé que, phonétiquement, il était secondaire dans la marque demandée, laquelle était dominée par l’élément verbal qu’elle partageait avec la marque antérieure, la chambre de recours notant également que l’ajout, dans la marque demandée, de l’élément verbal « de mexico » ne remettait pas en cause le degré de similitude entre les marques en conflit.

53      Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a pris en considération, au point 29 de la décision attaquée, le caractère distinctif de l’élément verbal « mexico », en admettant que, pour le public pertinent de langues espagnole, française, italienne, portugaise et roumaine, et pour la partie de ce public de langue anglaise, la marque demandée constituait un ensemble sémantique singulier différent de celui de la marque antérieure dont l’élément dominant se référait à un concept plus général. S’agissant du reste du public pertinent, la chambre de recours a uniquement conclu, eu égard au fait que le mot « mexico » correspondait ou ressemblait, dans toutes les autres langues de l’Union, au nom de l’État mexicain, que « victoria » représenterait l’élément le plus distinctif de la marque demandée.

54      Quant à la contradiction relevée par la requérante au point 34 de la décision attaquée, la chambre de recours y affirmant, dans la dernière phrase, que l’impact du terme « victoria » sur le public dont la langue n’est ni une langue d’origine latine ni l’anglais, et en particulier du point de vue phonétique, serait moindre que l’impact de la locution « de mexico », elle n’est pas de nature à remettre en cause l’ensemble de l’analyse de la similitude des signes en conflit opérée par la chambre de recours. En effet, il est clair, à la lecture tant du point 34 que de l’ensemble de la décision attaquée, que la chambre de recours a considéré que l’élément verbal « de mexico » ne pouvait détourner l’attention du public pertinent de l’élément commun aux signes en conflit, à savoir « victoria », qui était l’élément dominant dans la marque antérieure et dans la marque demandée, sur le seul plan phonétique.

55      Par suite, l’argument de la requérante doit être écarté.

56      Quatrièmement, la requérante soutient que la chambre de recours n’aurait pas tenu compte du faible caractère distinctif de l’élément verbal « victoria », fréquent dans le secteur de la bière, eu égard notamment à la coexistence de la marque antérieure avec d’autres marques comportant ledit élément.

57      Sur ce point, force est de constater, à l’instar de l’OHMI, que la requérante est restée en défaut d’étayer son argument. En effet, ainsi que la chambre de recours l’a constaté dans la décision attaquée, les neuf marques communautaires invoquées par la requérante, qui comporteraient le mot « victoria » pour cinq d’entre elles et le mot « victory » pour les quatre autres, ne reflètent que leur inscription au registre communautaire des marques, et non la situation sur le marché [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 décembre 2008, Torres/OHMI – Navisa Industrial Vinícola Española (MANSO DE VELASCO), T‑259/06, non publié au Recueil, point 48]. Il en est de même des marques, espagnoles et portugaise, invoquées devant la chambre de recours, la requérante n’ayant fourni aucune preuve de la coexistence sur le marché de ces marques avec la marque antérieure.

58      S’agissant de deux messages publicitaires télévisés invoqués par la requérante, tant devant la chambre de recours que devant le Tribunal, il convient de relever, à l’instar de l’OHMI, qu’aucune copie desdits messages n’a été fournie par la requérante et que, au demeurant, l’existence de deux messages publicitaires n’est pas de nature, à elle seule, à démontrer que la marque antérieure coexisterait avec d’autres marques, comportant un élément verbal identique ou similaire, sur une partie du territoire de l’Union.

59      Quant à l’argumentation de la requérante selon laquelle, l’intervenante ayant accepté la coexistence pacifique de plusieurs autres marques comprenant l’élément verbal « victoria » ou « victory » avec la marque antérieure, l’OHMI ne saurait, en application du principe d’égalité de traitement, refuser l’enregistrement de la marque demandée, il convient de rappeler qu’il a été constaté au point 57 ci-dessus que la requérante était restée en défaut de démontrer que les marques susvisées coexistaient sur le marché avec la marque antérieure. En tout état de cause, la circonstance que l’intervenante aurait laissé coexister plusieurs autres marques avec la marque antérieure en ne s’opposant pas à leur enregistrement, ne saurait obliger l’OHMI, en application du principe d’égalité de traitement, à enregistrer la marque demandée, au motif qu’elle comprendrait un élément verbal identique ou similaire à un élément de la marque antérieure et aux marques supposées coexister avec cette dernière. Saisi de l’opposition présentée par l’intervenante à l’enregistrement de la marque demandée, l’OHMI devait apprécier l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit au regard des dispositions de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sans être tenu de prendre en considération le fait que l’intervenante n’avait pas formé opposition dans d’autres procédures d’enregistrement, communautaires ou nationales, concernant d’autres marques.

60      Par conséquent, il convient d’écarter ce dernier argument et, avec lui, le grief relatif à l’absence de comparaison des marques en conflit dans leur ensemble.

–       Sur la comparaison visuelle des signes en conflit

61      La requérante soutient que, sur le plan visuel, la chambre de recours n’a pas pris en considération les différences graphiques des signes en conflit, le graphisme de la marque communautaire antérieure ayant une pertinence particulière lors de l’achat, qui aurait généralement lieu en supermarché.

62      S’il est vrai que la marque antérieure comporte des éléments figuratifs, alors que la marque demandée est purement verbale, il convient de rappeler, ainsi qu’il a déjà été dit au point 48 ci-dessus, que la chambre de recours a considéré que, dans la marque antérieure, la composition des éléments géométriques de l’étiquette et la conception du blason étaient plutôt communes dans le secteur des boissons et que, partant, sur le plan visuel, ces éléments étant plutôt banals pour les bières, ils ne revêtaient pas une grande importance dans l’appréciation d’ensemble du signe.

63      Il a été également jugé, aux points 46 et 49 ci-dessus, que, au regard de ces appréciations, c’était à juste titre que la chambre de recours avait considéré que, d’une part, l’élément verbal « victoria » était dominant dans la marque antérieure et, d’autre part, que, dans la même marque, les éléments figuratifs n’étaient pas de nature à détourner l’attention du public de cet élément. Il ne peut donc être soutenu que les éléments figuratifs de la marque antérieure n’auraient pas été pris en considération et qu’ils auraient une pertinence particulière pour le public pertinent lors de l’acte d’achat, puisqu’ils ne sont que secondaires dans la marque antérieure.

64      Quant à l’affirmation de la requérante, selon laquelle les produits de la marque antérieure s’achetant principalement en supermarché, les éléments figuratifs de celle-ci revêtiraient une pertinence particulière, il y a lieu de relever que, au contraire, un tel mode de commercialisation des produits ne remet pas en cause la conclusion de la chambre de recours sur le caractère dominant de l’élément verbal « victoria » dans la marque antérieure, qui est d’autant plus perçu comme tel lorsque les produits sont appréhendés visuellement.

65      Par suite, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’une certaine similitude visuelle entre les signes en conflit due à l’élément verbal « victoria », commun aux deux marques.

–       Sur la comparaison phonétique des signes en conflit

66      La requérante soutient que la décision attaquée ne contient aucune comparaison d’ensemble des signes en conflit sur le plan phonétique, puisque la chambre de recours se contente de comparer l’unique élément que les signes ont en commun, alors que la marque antérieure comporte l’énoncé de quatre mots et d’une année, et la marque demandée de quatre mots.

67      S’agissant de la marque antérieure, il convient de rappeler que, au point 46 ci-dessus, il a été jugé que l’élément verbal « victoria » était dominant, comme l’avait conclu la chambre de recours. Pour la marque demandée, la chambre de recours a considéré, au point 27 de la décision attaquée, que l’élément verbal « victoria » était dominant sur le plan phonétique, aux motifs qu’il était le premier à être prononcé dans ladite marque et qu’il n’était pas exclu qu’il serait le seul prononcé, en raison de ses caractères bref et frappant. La chambre de recours a conclu à l’existence d’une similitude phonétique entre les marques en conflit.

68      La conclusion de la chambre de recours sur le caractère secondaire des autres éléments verbaux de la marque antérieure, concernant la comparaison conceptuelle des signes en conflit, vaut également sur le plan phonétique, comme le fait valoir l’OHMI. En effet, les éléments verbaux « cerveza », « pilsener », « málaga » et « 1928 » seront difficilement prononcés par le public pertinent lorsqu’il commandera le produit en question. Une telle conclusion ne saurait être remise en cause par la considération, avancée par la requérante, selon laquelle les consommateurs de bière, habitués à être confrontés à des marques complexes ou composées de plusieurs mots, les retiendraient et en percevraient tous les éléments. Les éléments verbaux susmentionnés sont clairement accessoires et descriptifs, et, quand bien même ils pourraient être perçus par le public pertinent, ne seraient pas prononcés au moment de l’acte d’achat.

69      Dès lors, c’est à juste titre que, sur le plan phonétique, la chambre de recours a conclu que la répétition de l’élément dominant de la marque antérieure au début de la marque demandée emportait un certain degré de similitude, qui n’était pas remis en cause par l’ajout dans celle-ci de l’élément « de mexico ».

–       Sur la comparaison conceptuelle des signes en conflit

70      S’agissant de la comparaison conceptuelle, la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas tenu compte des différences conceptuelles entre les signes en conflit, les éléments desdits signes autres que l’élément verbal « victoria » ayant une signification.

71      En vue de comparer les marques en conflit sur le plan conceptuel, la chambre de recours a distingué, aux points 28 à 32 de la décision attaquée, deux groupes au sein du public pertinent. Elle a considéré que la partie du public pertinent de langues espagnole, française, italienne, portugaise et roumaine, et, dans une certaine mesure, de langue anglaise comprendrait la signification du mot « victoria », en l’associant à la notion de « victoire ». Dès lors, selon elle, cette partie du public pertinent comprendrait plus facilement l’ensemble sémantique « la victoria de mexico », constituant la marque demandée, comme faisant allusion à une victoire de l’État du Mexique. Quant à la grande majorité du public pertinent d’autres langues de pays de l’Union, elle ne serait pas en mesure de donner une telle signification au mot « victoria », le percevant plus probablement comme un prénom féminin. Pour cette partie du public pertinent, la chambre de recours a considéré que les marques en conflit seraient similaires du point de vue conceptuel, dans la mesure où elles feraient référence au même prénom féminin, et que les éléments verbaux « de mexico » ne pourraient signifier que l’indication de l’origine du produit sur laquelle la marque était apposée ou la nationalité de la femme dont le prénom distinguait ledit produit, remarquant que, dans toutes les langues de l’Union, le terme « mexico » correspondait ou ressemblait au nom de l’État du Mexique.

72      En ce qui concerne la marque antérieure, la chambre de recours a constaté, au point 31 de la décision attaquée, que la conclusion relative à la similitude conceptuelle des marques en conflit, reposant sur la présence du mot « victoria », ne pouvait pas être remise en cause par les éléments verbaux « cerveza », « pilsener », « málaga » et « 1928 », qui jouaient un rôle accessoire dans cette marque et qui, même s’ils étaient compris, n’auraient qu’une capacité limitée à la distinguer de la marque demandée, en raison de leur faible caractère distinctif, puisqu’ils renvoyaient, pour les deux premiers, à la bière, pour le troisième, à une indication géographique et, pour le quatrième, à la date du début de commercialisation du produit.

73      Dans ces conditions, il convient, premièrement, d’écarter l’argument de la requérante tiré de ce que la comparaison conceptuelle des marques en conflit n’aurait été opérée qu’au regard de l’élément verbal « victoria », sans accorder « aucune charge conceptuelle » aux autres éléments de ces marques. Bien au contraire, la chambre de recours a non seulement pris en considération les différents éléments verbaux des marques en conflit pour déterminer l’existence d’une similitude conceptuelle, mais a correctement apprécié leur importance relative dans la perception de chacune des marques en conflit, reconnaissant la signification pour une partie du public pertinent d’ l’ensemble sémantique « la victoria de mexico ».

74      S’agissant, deuxièmement, de la signification particulière qu’aurait pour le public pertinent la marque demandée, à savoir LA VICTORIA DE MEXICO, comme faisant référence à l’indépendance du Mexique par une victoire de celui-ci sur le Royaume d’Espagne, il convient de constater que la chambre de recours a considéré, à juste titre, que le mot « victoria » n’était susceptible d’être compris dans le sens de « victoire » que par la partie du public pertinent de langues espagnole, française, italienne, portugaise et roumaine, et, dans une certaine mesure, de langue anglaise. Dès lors, pour le reste du public pertinent, la signification de la marque demandée, invoquée par la requérante, n’apparaîtra aucunement à la lecture, puisqu’il ne sera pas en mesure de comprendre le mot « victoria » comme signifiant « victoire ». Pour la partie du public pertinent qui comprendra ce mot, il n’est aucunement démontré par la requérante qu’elle serait susceptible de donner à la marque demandée le sens qui lui est accordé par celle-ci, à savoir la victoire pour l’indépendance du Mexique.

75      Dès lors que, pour une partie du public pertinent, la marque demandée ne peut avoir de signification particulière, notamment pas celle invoquée au point 74 ci-dessus, l’élément verbal « mexico » ne pouvant qu’être au mieux regardé comme indiquant le pays d’origine du produit en cause ou de la personne portant le prénom « Victoria », il convient d’écarter l’argument de la requérante.

76      Troisièmement, l’argument selon lequel l’utilisation de l’article « la » au début de la marque demandée confèrerait une situation de prééminence ou de supériorité aux termes qui suivraient n’est pas de nature à remettre en cause l’appréciation portée par la chambre de recours sur la similitude conceptuelle des signes en conflit.

77      En effet, pris strictement, un tel argument revient à considérer que, dans la marque demandée, l’article « la » confère une prééminence au mot « victoria », ce que la requérante conteste par toute son argumentation. Pris largement, cet argument n’emporte pas l’adhésion, puisqu’il ne permet pas à la partie du public pertinent ne comprenant pas le mot « victoria » comme signifiant « victoire » de donner à la marque demandée le sens que lui accorde la requérante, à savoir l’évènement qui serait la victoire la plus importante obtenue par le Mexique au cours de son histoire. Enfin, l’absence de l’article « la » au début de la marque antérieure ne permet pas de conclure, comme le soutient la requérante, que, sur le plan conceptuel, il ne pourrait y avoir de similitude entre les signes en conflit, au motif qu’une telle absence interdirait de comprendre le terme « victoria » dans le sens de « victoire », puisque, pour la partie du public pertinent qui n’est ni de langue latine ni de langue anglaise, la présence ou l’absence de cet article n’est pas susceptible de l’aider à comprendre le sens du mot « victoria » ou de la locution formant la marque demandée.

78      Par suite, c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que, eu égard notamment aux éléments relevés au point 71 ci-dessus s’agissant du public pertinent, les signes en conflit étaient similaires sur le plan conceptuel.

79      Par conséquent, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’une similitude entre les signes en conflit.

 Sur le risque de confusion

80      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques en conflit et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement. En l’espèce, il a été constaté l’existence, d’une part, d’une identité entre les produits couverts par les marques en conflit et, d’autre part, d’une similitude des signes en cause.

81      Eu égard au fait que les produits couverts par les marques en conflit seront achetés, ainsi qu’il a été dit aux points 31 et 32 ci-dessus, par des consommateurs moyens de l’Union, de sorte que le public pertinent est en l’espèce normalement informé, raisonnablement attentif et avisé, la similitude des signes en conflit crée un risque de confusion, incluant le risque d’association, entre lesdites marques sur le territoire de l’Union.

82      Par suite, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit en ce qui concerne les produits relevant de la classe 32.

83      Le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 n’étant pas fondé, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

84      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Cervecería Modelo, SA de CV est condamnée aux dépens.

Forwood

Dehousse

Schwarcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 31 janvier 2012.

Signatures


* Langue de procédure : l’espagnol.