Language of document : ECLI:EU:C:2024:218

Édition provisoire

CONCLUSIONS DE L’AVOCATE GÉNÉRALE

MME LAILA MEDINA

présentées le 7 mars 2024 (1)

Affaires jointes C771/22 et C45/23

Bundesarbeitskammer

contre

HDI Global SE

[demande de décision préjudicielle formée par le Bezirksgericht für Handelssachen Wien (tribunal de district pour les affaires commerciales de Vienne, Autriche)]

et

A,

B,

C,

D

contre

MS Amlin Insurance SE

[demande de décision préjudicielle formée par le Nederlandstalige Ondernemingsrechtbank Brussel (tribunal de l’entreprise néerlandophone de Bruxelles, Belgique)]

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Voyages à forfait et prestations de voyage liées – Directive (UE) 2015/2302 – Circonstances exceptionnelles et inévitables – Pandémie de COVID-19 – Insolvabilité de l’organisateur – Article 17, paragraphe 1 – Résiliation du contrat de voyage à forfait avant l’insolvabilité – Garantie de remboursement de tous les paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom – Champ d’application de la protection contre l’insolvabilité »






 I.      Introduction

1.        Le secteur des voyages et du tourisme a été l’un des secteurs les plus touchés par la pandémie de COVID-19, les répercussions sur l’ensemble du domaine des voyages étant sans précédent (2). L’apparition de la pandémie a entraîné des annulations massives de voyages à forfait sans que de nouvelles réservations soient effectuées. Cela a créé de sérieux problèmes de liquidité pour les organisateurs de voyages à forfait qui étaient confrontés à un grand nombre de demandes de remboursement. Dans ce contexte, la présente affaire soulève la question du champ d’application de la protection des voyageurs en cas d’insolvabilité des organisateurs de voyages prévue à l’article 17, paragraphe 1, de la directive (UE) 2015/2302 (3).

 II.      Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

2.        Les considérants 39 et 40 de la directive 2015/2302 disposent :

« (39)      Les États membres devraient veiller à ce que les voyageurs achetant un forfait soient totalement protégés contre l’insolvabilité de l’organisateur. Les États membres dans lesquels sont établis les organisateurs devraient veiller à ce que ceux-ci fournissent une garantie, en cas d’insolvabilité de l’organisateur, pour le remboursement de tous les paiements effectués par des voyageurs ou en leur nom et, dans la mesure où un forfait comprend le transport des passagers, pour le rapatriement des voyageurs. Cependant, il devrait être possible de proposer aux voyageurs la continuation du forfait. Tout en conservant leur pouvoir discrétionnaire quant à la manière dont la protection contre l’insolvabilité doit être assurée, les États membres devraient veiller à ce que la protection soit effective. Pour qu’une protection soit effective, il faut qu’elle s’applique dès que, du fait des problèmes de liquidités de l’organisateur, des services de voyage ne sont pas exécutés, ne seront pas exécutés ou ne le seront qu’en partie, ou que des prestataires de services demandent aux voyageurs de payer pour ces services. Les États membres devraient pouvoir exiger que les organisateurs fournissent aux voyageurs un certificat attestant qu’ils disposent d’un droit qu’ils peuvent directement faire valoir contre le prestataire de la protection contre l’insolvabilité.

(40)      Pour être effective, la protection contre l’insolvabilité devrait couvrir les montants prévisibles de paiements sur lesquels se répercutent l’insolvabilité de l’organisateur et, s’il y a lieu, les coûts prévisibles de rapatriement. En d’autres termes, la protection devrait être suffisante pour couvrir tous les paiements prévisibles effectués par les voyageurs ou pour leur compte en ce qui concerne les forfaits en haute saison, compte tenu de la période écoulée entre la réception de ces paiements et la fin du voyage ou du séjour de vacances, ainsi que, s’il y a lieu, les coûts prévisibles de rapatriement. […] Toutefois, une protection efficace contre l’insolvabilité ne devrait pas avoir à tenir compte de risques extrêmement ténus, par exemple l’insolvabilité simultanée de plusieurs des principaux organisateurs, lorsqu’une telle couverture aurait une incidence disproportionnée sur le coût de la protection, entravant ainsi son efficacité. En pareil cas, la garantie relative aux remboursements peut être limitée. »

3.        L’article 12 de la directive 2015/2302, intitulé « Résiliation du contrat de voyage à forfait et droit de rétractation avant le début du forfait », dispose :

« 1.      Les États membres veillent à ce que le voyageur puisse résilier le contrat de voyage à forfait à tout moment avant le début du forfait. Lorsque le voyageur résilie le contrat de voyage à forfait en vertu du présent paragraphe, il peut lui être demandé de payer à l’organisateur des frais de résiliation appropriés et justifiables. […]

2.      Nonobstant le paragraphe 1, le voyageur a le droit de résilier le contrat de voyage à forfait avant le début du forfait sans payer de frais de résiliation si des circonstances exceptionnelles et inévitables, survenant au lieu de destination ou à proximité immédiate de celui-ci, ont des conséquences importantes sur l’exécution du forfait ou sur le transport des passagers vers le lieu de destination. En cas de résiliation du contrat de voyage à forfait en vertu du présent paragraphe, le voyageur a droit au remboursement intégral des paiements effectués au titre du forfait mais pas à un dédommagement supplémentaire.

3.      L’organisateur peut résilier le contrat de voyage à forfait et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués pour le forfait, mais il n’est pas tenu à un dédommagement supplémentaire, si :

[…]

b)      l’organisateur est empêché d’exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résiliation du contrat au voyageur sans retard excessif avant le début du forfait.

4.      L’organisateur procède aux remboursements requis en vertu des paragraphes 2 et 3 ou, au titre du paragraphe 1, rembourse tous les paiements effectués par le voyageur ou en son nom pour le forfait moins les frais de résiliation appropriés. Ces remboursements au profit du voyageur sont effectués sans retard excessif et en tout état de cause dans les quatorze jours au plus tard après la résiliation du contrat de voyage à forfait.

[…] »

4.        L’article 17 de la directive 2015/2302, intitulé « Effectivité et champ d’application de la protection contre l’insolvabilité », dispose :

« 1.      Les États membres veillent à ce que les organisateurs établis sur leur territoire fournissent une garantie pour le remboursement de tous les paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom dans la mesure où les services concernés ne sont pas exécutés en raison de l’insolvabilité des organisateurs. Si le transport des passagers est inclus dans le contrat de voyage à forfait, les organisateurs fournissent aussi une garantie pour le rapatriement des voyageurs. La continuation du forfait peut être proposée.

[…]

2.      La garantie visée au paragraphe 1 est effective et couvre les coûts raisonnablement prévisibles. Elle couvre les montants des paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom en ce qui concerne les forfaits, compte tenu du laps de temps entre les paiements de l’acompte et du solde et l’exécution des forfaits, ainsi que les coûts estimés de rapatriement en cas d’insolvabilité de l’organisateur.

[…]

5.      Pour les services de voyage qui n’ont pas été exécutés, le remboursement est effectué sans retard excessif après que le voyageur en a fait la demande. »

 Le droit national

 Le droit autrichien

5.        L’article 3 de la Verordnung der Bundesministerin für Digitalisierung und Wirtschaftsstandort über Pauschalreisen und verbundene Reiseleistungen (arrêté de la ministre fédérale du Numérique et de l’Activité économique relatif aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées) est libellé comme suit :

« 1.      Les opérateurs habilités à fournir des prestations de voyage veillent à ce que le voyageur se voie rembourser :

1)      les paiements déjà versés (à titre d’acompte et de solde), si, en raison de l’insolvabilité de l’opérateur habilité à fournir des prestations de voyage, les services de voyage ne sont pas fournis du tout ou ne le sont que partiellement, ou si le prestataire exige du voyageur le paiement de ces prestations ;

[…] »

 Le droit belge

6.        L’article 54, première phrase, de la loi belge du 21 novembre 2017 relative à la vente de voyages à forfait, de prestations de voyage liées et de services de voyage (Moniteur belge no 2017014061, du 1er décembre 2017, p. 106673 ; ci-après la « loi sur les voyages à forfait ») dispose :

« Les organisateurs et les détaillants établis en Belgique fournissent une garantie pour le remboursement de tous les paiements déjà effectués par les voyageurs ou en leur nom dans la mesure où les services concernés ne sont pas exécutés en raison de leur insolvabilité. »

7.        L’arrêté royal du 29 mai 2018 relatif à la protection contre l’insolvabilité lors de la vente de voyages à forfait, les prestations de voyage liées et de services de voyage (Moniteur belge no 2018012508, du 11 juin 2018, p. 48438 ; ci-après l’« arrêté royal ») définit la manière dont la garantie prévue à l’article 54 de la loi sur les voyages à forfait doit être constituée.

8.        Aux termes de l’article 12, paragraphe 1, de l’arrêté royal :

« En cas d’insolvabilité du professionnel, le contrat d’assurance offre la couverture suivante :

1°      la poursuite du voyage, si cela est possible ;

2°      le remboursement des montants déjà payés lors de la conclusion du contrat avec le professionnel ;

3°      le remboursement des montants des services de voyage qui ne peuvent être fournis en raison de l’insolvabilité du professionnel ;

4°      le rapatriement des voyageurs, lorsque l’exécution du contrat avec le professionnel a déjà commencé et que ce contrat prévoit le transport du bénéficiaire, et, si besoin, l’hébergement en attendant le rapatriement. […] »

9.        L’article 13, premier alinéa, de l’arrêté royal dispose :

« Le remboursement concerne tous les montants que le bénéficiaire a versés au professionnel pour le contrat de voyage lorsqu’il n’a pas été exécuté du fait de son insolvabilité ou de toutes les sommes payées pour les services de voyage qui n’ont pas été fournis en raison de son insolvabilité. »

 III.      Le litige au principal et les questions préjudicielles

 Affaire C771/22

10.      Le 3 mars 2020, un consommateur autrichien a conclu un contrat de voyage à forfait avec l’organisateur de voyages Flamenco Sprachreisen GmbH (ci-après « Flamenco ») portant sur un voyage en Espagne. Le voyage devait avoir lieu du 3 mai 2020 au 2 juin 2020. Le prix du voyage a été intégralement acquitté par le consommateur le 9 mars 2020.

11.      Le 16 mars 2020, le consommateur a résilié le contrat de voyage à forfait en invoquant des circonstances exceptionnelles et inévitables liées à l’épidémie de COVID-19. Le droit de résilier le contrat n’a pas été contesté dans l’affaire au principal.

12.      Le 20 mai 2020, la procédure d’insolvabilité de Flamenco a été ouverte devant le Landesgericht Linz (tribunal régional de Linz, Autriche). Flamenco a cessé ses activités. Après une dernière répartition des actifs de l’entreprise, la faillite a été prononcée par ordonnance du 9 juin 2022, qui est devenue définitive.

13.      Le 8 juin 2020, le syndic a formellement résilié le contrat de voyage à forfait.

14.      Le consommateur a cédé sa créance de remboursement des sommes versées au titre du forfait contre Flamenco à la Bundesarbeitskammer (chambre fédérale du travail, Autriche) qui est la requérante au principal.

15.      La requérante a introduit un recours contre HDI Global SE, l’assureur de Flamenco. Pour sa défense, HDI Global a fait valoir qu’elle n’était pas tenue de rembourser le consommateur au motif que l’insolvabilité n’était pas à l’origine de l’inexécution des services de voyage. La requérante a soutenu que l’existence d’un tel lien de causalité n’était pas requise par l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302.

16.      La juridiction de renvoi relève que tant le libellé de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 que la disposition nationale de transposition indiquent qu’il doit exister un lien de causalité entre l’insolvabilité et l’inexécution des services de voyage. Cela signifierait que la protection contre l’insolvabilité ne couvre pas les créances de remboursement lorsqu’il est mis fin au forfait avant qu’un organisateur ne devienne insolvable. Toutefois, la juridiction de renvoi note que le considérant 39 de la directive 2015/2302 en dispose autrement dès lors qu’il impose aux États membres de constituer une garantie pour le remboursement de « tous les paiements effectués par des voyageurs ou en leur nom ». L’interprétation selon laquelle l’article 17, paragraphe 1, couvre le remboursement de tous les paiements effectués est étayée par l’objectif consistant à atteindre un niveau élevé de protection dont bénéficient les consommateurs en vertu de l’article 114, paragraphe 3, et de l’article 169 TFUE, ainsi qu’en vertu de l’article 38 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci‑après la « Charte »).

17.      La juridiction de renvoi se demande également si le fait que l’organisateur soit devenu insolvable au moment où le voyage devait avoir lieu ou le fait que la cause de la résiliation du contrat et, indirectement, de l’insolvabilité soit la même circonstance exceptionnelle, à savoir la pandémie de COVID-19, sont des éléments pertinents pour l’interprétation de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302.

18.      Estimant que la solution du litige dont il est saisi dépend de l’interprétation de la directive 2015/2302, le Bezirksgericht für Handelssachen Wien (tribunal de district pour les affaires commerciales de Vienne, Autriche) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      L’article 17 de la [directive 2015/2302] doit-il être interprété en ce sens que les paiements effectués par le voyageur au profit de l’organisateur avant le début du voyage sont garantis uniquement lorsque c’est en raison de l’insolvabilité dudit organisateur que le voyage n’est pas réalisé, ou bien en ce sens que sont également garantis des paiements effectués par le voyageur au profit de l’organisateur avant l’ouverture de la procédure d’insolvabilité, si le voyageur résilie le contrat avant la survenance de l’insolvabilité et en raison de circonstances exceptionnelles au sens de l’article 12 de la directive 2015/2302 ?

2)      L’article 17 de la [directive 2015/2302] doit-il être interprété en ce sens que les paiements effectués par le voyageur au profit de l’organisateur avant le début du voyage sont garantis lorsque, avant même la survenance de l’insolvabilité, le voyageur résilie le contrat de voyage en raison de circonstances exceptionnelles au sens de l’article 12 de cette directive, alors même que l’insolvabilité est survenue pendant la durée durant laquelle le voyage réservé devait avoir lieu ?

3)      L’article 17 de la [directive 2015/2302] doit-il être interprété en ce sens que les paiements effectués par le voyageur au profit de l’organisateur avant le début du voyage sont garantis lorsque, avant même la survenance de l’insolvabilité, le voyageur résilie le contrat de voyage en raison de circonstances exceptionnelles au sens de l’article 12 de cette directive et que l’insolvabilité de l’organisateur s’est produite en raison de ces circonstances extraordinaires ? »

19.      Des observations écrites ont été déposées par les parties au principal, le gouvernement grec et la Commission européenne. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries lors de l’audience qui a eu lieu le 7 décembre 2023.

 Affaire C45/23

20.      Les requérants sont des consommateurs et la défenderesse, MS Amlin Insurance SE, est l’assureur en cas d’insolvabilité de l’organisateur de voyages, Exclusive Destinations NV.

21.      Le 13 novembre 2019, le premier requérant a conclu, par l’intermédiaire d’un détaillant, un contrat de voyage à forfait avec l’organisateur Exclusive Destinations. Le voyage à forfait devait avoir lieu au mois de mars 2020.

22.      En raison de la pandémie de COVID-19, le voyage a été reporté au mois de novembre 2020, et son prix a été revu à la hausse. Le prix initial avait déjà été acquitté à l’organisateur.

23.      Au mois d’octobre 2020, le détaillant, à la demande des consommateurs, a informé l’organisateur de la décision de ces derniers d’annuler le contrat et d’obtenir un remboursement intégral. L’organisateur a assuré qu’il prendrait les mesures nécessaires à cet effet.

24.      Par jugement du 8 décembre 2020, l’Ondernemingsrechtbank Gent (tribunal de l’entreprise de Gand, Belgique) a prononcé la faillite de l’organisateur.

25.      Le 9 décembre 2020, le détaillant a remboursé aux consommateurs la partie du prix du forfait qui n’avait pas encore été payée à l’organisateur.

26.      Le 22 janvier 2021, MS Amlin Insurance a été mise en demeure de rembourser la totalité du prix du voyage. La compagnie a rejeté la demande au motif que la résiliation n’était pas due à l’insolvabilité de l’organisateur de voyages, Exclusive Destinations.

27.      Les consommateurs ont demandé devant la juridiction de renvoi le remboursement du prix qu’ils avaient payé. À l’appui de leur demande, ils soutiennent que les conditions générales du contrat d’assurance entre MS Amlin Insurance et Exclusive Destinations prévoient clairement le remboursement aux voyageurs des sommes versées à l’organisateur assuré lors de la conclusion du contrat ou après cette date.

28.      MS Amlin Insurance considère que la situation des requérants n’est pas couverte par le contrat d’assurance, dès lors que la garantie d’assurance ne s’applique qu’aux remboursements liés à un voyage qui n’a pas eu lieu en raison de l’insolvabilité de l’organisateur.

29.      La juridiction de renvoi estime que la garantie prévue à l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 n’est obligatoire que dans la mesure où les services concernés ne sont pas exécutés en raison de l’insolvabilité de l’organisateur. Selon elle, la directive 2015/2302 ne prévoit pas de garantie obligatoire lorsque les services ne sont pas exécutés pour une raison autre que l’insolvabilité de l’organisateur, telle que l’annulation du voyage à forfait par le voyageur à cause de circonstances exceptionnelles et inévitables, conformément à l’article 12, paragraphe 1, de la directive 2015/2302.

30.      La juridiction de renvoi relève que le libellé de l’article 54 de la loi sur les voyages à forfait, qui transpose la directive 2015/2302, correspond, en substance, à celui de l’article 17, paragraphe 1, de cette directive, sans prévoir une protection plus étendue.

31.      Compte tenu du libellé de la directive 2015/2302 et de sa transposition nationale, la juridiction de renvoi considère que la demande des consommateurs dans l’affaire au principal n’est pas couverte par l’assurance et qu’elle doit en principe être rejetée.

32.      Toutefois, la juridiction de renvoi nourrit des doutes quant à la compatibilité d’un tel résultat avec l’objectif consistant à assurer un niveau élevé de protection des consommateurs et quant au fait qu’il puisse donner lieu à une inégalité de traitement.

33.      Plus particulièrement, la juridiction de renvoi souligne, d’une part, que, en vertu de la directive 90/314/CEE du Conseil (4), la Cour a jugé que la garantie destinée au remboursement des fonds déposés par le consommateur a pour objet de protéger ce dernier contre les risques financiers découlant de l’insolvabilité ou de la faillite de l’organisateur de voyages (5).

34.      D’autre part, la juridiction de renvoi relève que, en cas d’insolvabilité, il existe globalement deux catégories de voyageurs qui supportent un risque financier lié au prix payé. La première catégorie comprend les voyageurs dont le voyage ne peut avoir lieu en raison de l’insolvabilité de l’organisateur. Ces voyageurs subissent un préjudice financier, car ils perdent le prix du voyage payé. La seconde catégorie comprend les voyageurs qui ont droit au remboursement intégral du prix du voyage payé en raison de la résiliation de leur contrat de voyage à forfait à cause de circonstances exceptionnelles et inévitables. Ces voyageurs subissent également une perte financière lorsque l’organisateur devient insolvable après la résiliation du contrat de voyage à forfait, mais avant que le prix du voyage ne leur soit remboursé.

35.      La juridiction de renvoi souligne que les deux catégories de voyageurs supportent le même risque financier. Elle reconnaît que la situation de ces deux catégories de voyageurs est différente à d’autres égards. Par exemple, l’insolvabilité d’un organisateur rend définitivement impossible l’exécution du contrat de voyage à forfait, alors que les circonstances exceptionnelles et inévitables sont généralement de nature temporaire. En outre, la première catégorie de voyageurs dispose d’un contrat de voyage à forfait lorsque l’organisateur devient insolvable, alors que la seconde catégorie de voyageurs a résilié le contrat avant que l’organisateur ne devienne insolvable. La juridiction de renvoi se demande toutefois dans quelle mesure ces éléments sont susceptibles de justifier une différence de traitement.

36.      Considérant que la solution du litige dont il est saisi dépend de l’interprétation de la directive 2015/2302, le Nederlandstalige Ondernemingsrechtbank Brussel (tribunal de l’entreprise néerlandophone de Bruxelles, Belgique) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 17, paragraphe 1, de la [directive 2015/2302], doit-il être interprété en ce sens que la garantie obligatoire prévue par cette disposition s’applique aussi au remboursement de tous les paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom lorsque les voyageurs résilient le contrat de voyage à forfait en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l’article 12, paragraphe 2, de la même directive et que l’organisateur est déclaré en faillite après la résiliation du contrat de voyage à forfait pour cette raison, mais avant que ces paiements soient effectivement remboursés aux voyageurs, de sorte que ces voyageurs subissent une perte financière et supportent donc un risque économique en cas de faillite de l’organisateur de voyage ? »

37.      Des observations écrites ont été déposées par les parties au principal, les gouvernements belge, danois et grec, le Conseil de l’Union européenne, le Parlement européen et la Commission. Mis à part le gouvernement danois, les parties ont été entendues en leurs plaidoiries lors de l’audience qui s’est tenue le 7 décembre 2023.

38.      Par décision de la Cour du 24 octobre 2023, les affaires C‑771/22 et C‑45/23 ont été jointes aux fins de la procédure écrite et orale ainsi que de l’arrêt.

 IV.      Appréciation juridique

 Sur la première question posée dans l’affaire C771/22 et la seule question posée dans l’affaire C45/23

39.      Par leurs questions, qu’il convient de traiter conjointement, les juridictions de renvoi cherchent à déterminer, en substance, le champ d’application de la protection contre l’insolvabilité pour le remboursement de tous les paiements effectués par les voyageurs, prévue à l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302.

40.      Plus précisément, par la première question dans l’affaire C‑771/22 et par la question unique dans l’affaire C‑45/23, les juridictions de renvoi demandent, en substance, si la garantie de remboursement couvre uniquement les paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom lorsque le voyage ou le séjour de vacances n’a pas eu lieu en raison de l’insolvabilité de l’organisateur, ou également les paiements effectués par les voyageurs ou pour le compte des voyageurs qui ont résilié le contrat à cause de circonstances exceptionnelles et inévitables, au sens de l’article 12, paragraphe 2, de la directive 2015/2302, avant l’insolvabilité de l’organisateur.

41.      À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, dans le cadre de l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, il y a lieu de tenir compte, non seulement, des termes de celle-ci, mais également de son contexte, des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie et, le cas échéant, de sa genèse (6).

42.      Il est également de jurisprudence constante qu’une interprétation d’une disposition du droit de l’Union ne saurait avoir pour résultat de retirer tout effet utile au libellé clair et précis de cette disposition. Ainsi, dès lors que le sens d’une disposition du droit de l’Union ressort sans ambiguïté du libellé même de celle-ci, la Cour ne saurait se départir de cette interprétation (7).

43.      Enfin, dans la mesure où la juridiction de renvoi dans l’affaire C‑45/23 remet en cause la validité de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302, il y a lieu de rappeler que, selon un principe général d’interprétation, un acte de l’Union doit être interprété, dans la mesure du possible, d’une manière qui ne remette pas en cause sa validité et en conformité avec l’ensemble du droit primaire et, notamment, avec les dispositions de la Charte. Ainsi, lorsqu’un texte du droit dérivé de l’Union est susceptible de plus d’une interprétation, il convient de donner la préférence à celle qui rend la disposition conforme au droit primaire plutôt qu’à celle conduisant à constater son incompatibilité avec celui-ci (8).

44.      Il convient donc de vérifier d’emblée si le libellé de l’article 17, paragraphe 1, se prête à plus d’une interprétation.

 a)      Le libellé de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302  peutil être interprété de plusieurs manières ?  

45.      L’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 prévoit que les organisateurs fournissent une garantie pour le remboursement de tous les paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom « dans la mesure où les services concernés ne sont pas exécutés en raison de l’insolvabilité des organisateurs ».

46.      Dans les deux affaires, les juridictions de renvoi considèrent que le libellé de l’article 17, paragraphe 1, exige un lien de causalité entre l’insolvabilité et l’inexécution des services, ce qui subordonne la couverture des demandes de remboursement à l’inexécution résultant de l’insolvabilité. L’effet de ce lien de causalité ou de cette conditionnalité semblerait exclure de la garantie les créances de remboursement impayées (non contestées) résultant de la résiliation du contrat avant l’insolvabilité.

47.      Dans leurs observations écrites, les parties ont des points de vue divergents sur la question de savoir si l’article 17, paragraphe 1, exclut clairement les demandes impayées ou s’il peut donner lieu à plusieurs interprétations. Schématiquement, HDI Global, MS Amlin Insurance, les gouvernements belge et danois ainsi que la Commission considèrent que le libellé de l’article 17, paragraphe 1, exige un lien de causalité manifeste entre l’insolvabilité et l’inexécution (ou la violation) du contrat. La Bundesarbeitskammer (chambre fédérale du travail), A et le gouvernement grec soutiennent la thèse inverse. Selon le Parlement, il est possible d’interpréter l’article 17, paragraphe 1, à la lumière du principe d’égalité de traitement, en ce sens qu’il couvre les demandes de tous les voyageurs, de sorte que la question de la validité ne se pose pas en premier lieu. Le Conseil n’a pas pris position sur ce point.

48.      À cet égard, il y a lieu de relever que les termes « dans la mesure où les services concernés ne sont pas exécutés en raison de l’insolvabilité des organisateurs », et plus particulièrement l’expression « en raison de », pourraient être lus, à première vue, en ce sens que la garantie de remboursement exige un lien de causalité entre l’inexécution et l’insolvabilité. La version française de cette disposition (9) ainsi que d’autres versions linguistiques (10) pourraient également être interprétées de la même manière, en ce sens qu’elles soulignent toutes que l’inexécution du contrat doit être une conséquence directe de l’insolvabilité.

49.      La question de l’interprétation de cette disposition pourrait être résolue en suivant l’argument de la Bundesarbeitskammer (chambre fédérale du travail), soutenu également par le gouvernement grec lors de l’audience, en ce qui concerne la signification des termes « services concernés ». Dans les observations de la Bundesarbeitskammer (chambre fédérale du travail) et du gouvernement grec, l’expression « services concernés » devrait être entendue de manière large comme incluant toute obligation de l’organisateur liée au contrat de voyage, y compris le remboursement.

50.      Je ne suis pas convaincue que le terme « services » doive être interprété comme couvrant la demande de remboursement. Premièrement, la nature juridique du remboursement est une créance que le voyageur détient contre l’organisateur. La demande de remboursement du voyageur ne saurait être qualifiée de « service » devant être exécuté.

51.      Deuxièmement, il ressort du contexte dans lequel s’inscrit l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302, que les « services concernés » doivent être compris comme des « services de voyage ». Ces derniers sont définis à l’article 3, point 1, comme signifiant le transport de passagers, l’hébergement, la location de voitures et tout autre service touristique qui ne fait pas partie intégrante d’un service de voyage. L’article 17, paragraphe 5, indique que, « pour les services de voyage » qui n’ont pas été exécutés, le remboursement est effectué sans retard excessif. Le considérant 39 fait également référence aux « services de voyage [qui] ne sont pas exécutés […] ». L’article 19, paragraphe 1, qui régit la protection contre l’insolvabilité pour les prestations de voyage liées se réfère à l’inexécution d’un « service de voyage ». Plus largement, l’article 13, paragraphe 1, qui régit la responsabilité de l’exécution du forfait, mentionne l’exécution des « services de voyage » compris dans le contrat de voyage à forfait. Il s’ensuit que, dans le cadre de la directive 2015/2302, la notion de « services » doit être interprétée dans le contexte d’un contrat de voyage à forfait couvrant des services de voyage.

52.      Cela étant, même si le droit au remboursement ne saurait être considéré comme un « service concerné », force est de constater qu’il est intrinsèquement lié à l’exécution du contrat de voyage. Cela pourrait laisser entendre que les conséquences pour la couverture d’assurance de la demande de remboursement ne sauraient être différenciées selon que la créance en cause découle de la résiliation du contrat de voyage ou de l’inexécution des services de voyage.

53.      Par ailleurs, il convient de souligner que l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 pourrait être compris, comme l’a soutenu en substance la Bundesarbeitskammer (chambre fédérale du travail), comme signifiant simplement que le prix payé pour des services de voyage qui ont déjà été partiellement exécutés n’est pas remboursé en cas d’insolvabilité.

54.      L’article 17, paragraphe 1, de cette directive pourrait également être interprété comme prévoyant une couverture d’assurance dans toutes les situations dans lesquelles, en raison de l’insolvabilité de l’organisateur, les voyageurs ont payé le prix sans bénéficier de services de la part de l’organisateur.

55.      Entendu dans ce sens, l’article 17, paragraphe 1, est une disposition qui renforce l’effectivité de la protection contre l’insolvabilité en englobant tous les cas d’inexécution des services de voyage en raison de l’insolvabilité de l’organisateur, sans pour autant vouloir exclure les créances de remboursement (non contestées) impayées.

56.      Le considérant 39 de la directive renforce cette dernière lecture de l’article 17, paragraphe 1, de celle-ci. Aux termes de ce considérant, les États membres devraient veiller à ce que les voyageurs achetant un forfait soient « totalement protégés » contre l’insolvabilité de l’organisateur et fournir une garantie pour le remboursement de « tous les paiements » effectués par des voyageurs ou en leur nom. Ce considérant précise également que les États membres doivent veiller à ce que la protection soit « effective ».

57.      Il est également important de noter que les termes de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 ressemblent à ceux utilisés dans la jurisprudence de la Cour en ce qui concerne l’interprétation de son « prédécesseur », à savoir l’article 7 de la directive 90/314. Plus particulièrement, l’arrêt rendu dans l’affaire Verein fur Konsumenteninformation (11) portait sur la question de savoir si cette dernière disposition devait être interprétée en ce sens qu’elle couvre une situation dans laquelle un hôtelier oblige un voyageur à payer l’hébergement mis à sa disposition, en prétendant que l’organisateur de voyages, désormais insolvable, ne lui aurait jamais versé cette somme. La Cour a jugé que l’article 7 de la directive 90/314 couvrait une telle situation au regard de sa finalité qui est de protéger les consommateurs contre les risques résultant de l’insolvabilité de l’organisateur. La Cour a constaté que les sommes versées par le voyageur à l’organisateur de voyages devraient être remboursées puisque, « à la suite de l’insolvabilité de ce dernier, les services convenus ne lui ont pas été fournis par l’organisateur » (12). Il ressort de cette jurisprudence que les situations relevant de l’article 7 de la directive 90/314 devaient être entendues largement.

58.      L’expression « en raison de l’insolvabilité de l’organisateur » utilisée à l’actuel article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 pourrait être interprétée comme reflétant l’arrêt rendu dans l’affaire Verein für Konsumenteninformation. Au lieu d’exclure de la garantie contre l’insolvabilité les créances de remboursement impayées, le libellé de l’article 17, paragraphe 1, pourrait être compris comme visant à inclure toutes les situations de risque découlant de l’insolvabilité de l’organisateur de voyages.

59.      Les gouvernements ayant soumis des observations écrites à la Cour ont exprimé des points de vue divergents quant au sens du libellé de l’article 17, paragraphe 1. Alors que le gouvernement belge a considéré que cette disposition ne couvre pas les créances de remboursement impayées, le gouvernement grec (13) a estimé le contraire. Le gouvernement danois a fait valoir que le droit de l’Union n’est pas harmonisé s’agissant de cette question et que les États membres (comme c’est le cas au Danemark) devraient rester compétents pour assurer un niveau de protection plus élevé (14). De telles divergences de vues de la part des gouvernements nationaux démontrent, à tout le moins, que le libellé de l’article 17, paragraphe 1, est tel qu’il ne doit pas être considéré comme excluant sans équivoque les demandes de remboursement impayées (15).

60.      Indépendamment de la formulation relative au lien de causalité, il existe une autre expression à l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 qui peut donner lieu à diverses interprétations. Cette disposition se réfère à l’« insolvabilité de l’organisateur ». Toutefois, le considérant 39 de cette directive fait plus largement référence à des « problèmes de liquidités ». En effet, ainsi que l’a souligné la Bundesarbeitskammer (chambre fédérale du travail), si l’expression « insolvabilité de l’organisateur » devait être entendue strictement comme l’ouverture formelle de la procédure d’insolvabilité, cela impliquerait que les créances de remboursement pour des services qui n’ont pas été exécutés, qui sont nées peu de temps avant la date de l’insolvabilité en raison de problèmes de liquidité, ne sont pas couvertes par la garantie.

61.      Compte tenu de ce qui précède, je considère qu’il ne ressort pas clairement du libellé de l’article 17, paragraphe 1, que les créances de remboursement des voyageurs, qui sont nées avant l’insolvabilité, sont exclues du champ d’application protecteur de cette disposition (16).

 b)      La genèse de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 : sur la question de savoir s’il existe l’intention du législateur de réduire la protection des consommateurs

62.      Selon une jurisprudence constante, la genèse d’une disposition du droit de l’Union peut également révéler des éléments pertinents pour son interprétation (17).

63.      Dans ses observations écrites et orales, la Commission a avancé des arguments relatifs à la genèse de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 qui conduiraient à la conclusion selon laquelle le législateur de l’Union avait l’intention d’exclure de la garantie les créances de remboursement qui surviennent avant que l’organisateur ne devienne insolvable. Afin d’examiner correctement la position de la Commission, il est utile de retracer brièvement la genèse de l’article 17, paragraphe 1, en commençant par son prédécesseur.

64.      Conformément à l’article 7 de la directive 90/314, l’organisateur était tenu de justifier « des garanties suffisantes propres à assurer, en cas d’insolvabilité ou de faillite, le remboursement des fonds déposés et le rapatriement du consommateur ». Selon une jurisprudence constante de la Cour depuis l’arrêt Dillenkofer (18), cette disposition « vis[ait] à protéger intégralement les droits des consommateurs mentionnés dans cette disposition et, partant, à protéger ces derniers contre l’intégralité des risques définis par cet article et résultant de l’insolvabilité de l’organisateur de voyages » (19). Ces risques sont « inhérents au contrat passé entre le consommateur et l’organisateur du voyage à forfait » et « découlent du paiement par avance du prix du forfait » (20).

65.      La Commission a souligné que l’objectif général de sa proposition d’abroger la directive 90/314 (21) était d’atteindre un niveau élevé de protection des consommateurs consacré à l’article 169 TFUE. En ce qui concerne la protection contre l’insolvabilité, cette institution a expliqué que la proposition visait à maintenir le même niveau de protection. Ainsi, le considérant 34 et l’article 15 de la proposition de la Commission se fondaient sur le niveau de protection existant (22).

66.      Toutefois, la Commission a expliqué que, au cours du processus législatif, il y a eu un revirement en ce qui concerne le champ d’application de la protection contre l’insolvabilité.

67.      À cet égard, la Commission renvoie à l’exposé des motifs du Conseil concernant la position de celui-ci en première lecture sur la proposition législative (23). Au point 15 de ce document, le Conseil a indiqué que, selon le texte (de la directive régissant la protection contre l’insolvabilité), « la protection contre l’insolvabilité devrait prévoir une couverture suffisante pour toutes les circonstances vraisemblables et correspondre au niveau de risque financier que représentent les activités du professionnel, mais que cette responsabilité ne devrait pas être illimitée ». Ce même point précise que « [l]a responsabilité prévue dans le cadre d’un régime de protection contre l’insolvabilité devrait se limiter aux circonstances reflétant l’évaluation normale du risque » et qu’« une protection efficace contre l’insolvabilité ne devrait pas avoir à tenir compte de risques extrêmement ténus […] ».

68.      Selon la Commission, le libellé de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 tel qu’il a été finalement adopté par le législateur « s’écarte considérablement » des termes de l’article 7 de la directive 90/314 et de l’article 15 de la proposition de la Commission.

69.      Ces éléments amènent la Commission à considérer que l’article 17, paragraphe 1, de cette directive exige un lien de causalité entre l’insolvabilité et l’inexécution des services de voyage, ce qui exclut les demandes de remboursement impayées.

70.      L’interprétation restrictive du champ d’application de l’article 17, paragraphe 1, par la Commission est à la base de la recommandation (UE) 2020/648 (24). Aux termes des considérants de cette recommandation, « [e]n cas d’insolvabilité des organisateurs […], le risque existe que de nombreux voyageurs […] ne bénéficient d’aucun remboursement, étant donné que leurs créances à l’égard des organisateurs […] ne sont pas protégées » (25). Afin de protéger les voyageurs de ce risque, la Commission a recommandé que les bons à valoir soient couverts par une protection contre l’insolvabilité (26).

71.      La présentation par la Commission de la genèse de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 soulève certains doutes quant à sa signification. Toutefois, cette présentation ne permet pas, à elle seule, de conclure à l’existence d’une volonté claire du législateur de s’écarter du niveau de protection antérieur et de la jurisprudence de la Cour et d’exclure les droits à remboursement des voyageurs nés avant l’insolvabilité.

72.      Contrairement à ce que soutient la Commission, le Parlement a affirmé que le libellé de la directive 2015/2302 vise à sauvegarder la « continuité » entre l’article 7 de la directive 90/314 et l’article 17 de la directive 2015/2302. Cette dernière disposition a pour but de continuer à assurer un niveau élevé et uniforme de protection des voyageurs, en ce sens qu’elle « a élargi et renforcé » cette protection.

73.      Plus particulièrement, le Parlement rappelle que, selon la jurisprudence de la Cour relative à l’article 7 de la directive 90/314, cette disposition a été interprétée comme comportant l’« obligation de résultat de conférer aux voyageurs à forfait un droit aux garanties de remboursement des fonds versés et de rapatriement en cas de faillite de l’organisateur de voyages » (27). Cette obligation de résultat était déjà claire au moment de l’adoption de la directive 2015/2302, sans qu’il y ait d’ambiguïtés à supprimer ou de vides à combler à cet égard (28).

74.      Le Parlement observe, en outre, qu’« aucune disposition ni aucun considérant » de cette directive ne comporte d’indication selon laquelle le législateur de l’Union a souhaité toucher à cette obligation de résultat pour la protection des voyageurs. Il relève qu’il serait contraire à la logique et à la jurisprudence constante de considérer que la protection accordée par l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 ne s’applique pas si le voyageur a exercé son droit de résiliation du contrat consacré à l’article 12, paragraphe 2, de cette directive.

75.      Dans ses observations orales, le Parlement a également pris position sur la pertinence de l’exposé des motifs du Conseil. Le Parlement a soutenu qu’il pouvait seulement être déduit de cet exposé que les adaptations de la proposition de la Commission visaient à apporter des précisions quant à la manière dont les États membres devaient mettre en place les mécanismes d’insolvabilité. Ces adaptations concernaient principalement le calcul du risque sur la base de facteurs tels que le chiffre d’affaires, les paiements anticipés ou les variations saisonnières. Par ailleurs, le Parlement a précisé que l’intention du législateur, reflétée dans la dernière partie du considérant 40 de la directive 2015/2302, de veiller à ce qu’une protection efficace contre l’insolvabilité ne doive pas avoir à tenir compte de risques extrêmement ténus, n’est liée à aucune disposition qui limiterait la protection du voyageur en cas de résiliation du contrat avant l’insolvabilité.

76.      En ce qui concerne le Conseil, ce dernier n’a pas pris position, dans ses observations écrites, sur l’interprétation de l’article 17, paragraphe 1, ni, plus précisément, sur la question de savoir si le législateur de l’Union a voulu exclure certaines créances des voyageurs de la protection contre l’insolvabilité.

77.      Lors de l’audience, il y avait une question de la Cour à la Commission et au Conseil pour savoir leur point de vue sur la raison susceptible d’expliquer le changement de libellé de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 au cours du processus législatif. À cet égard, la Commission a noté que l’article 12, paragraphe 2, de cette directive introduisait un nouveau droit pour le voyageur de résilier le contrat en cas de circonstances exceptionnelles et inévitables, alors que le droit au remboursement correspondant n’était pas inclus dans le champ d’application protecteur de l’article 17, paragraphe 2, de ladite directive. Selon la Commission, le niveau de protection des consommateurs n’a pas été réduit par rapport au niveau de protection offert par la directive antérieure, la raison en étant que l’exclusion de la protection contre l’insolvabilité concerne la créance découlant de l’exercice d’un droit qui n’existait pas auparavant.

78.      En réponse à la même question, le Conseil a déclaré que dans le cas où la Cour jugerait que l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 devait être interprété comme excluant de la protection contre l’insolvabilité les créances de remboursement des voyageurs nées avant que l’organisateur ne devienne insolvable, on pourrait considérer que le législateur a pris la décision politique d’instaurer un régime de protection spécifique. Toutefois, le Conseil n’a pas explicitement confirmé l’existence d’une intention législative d’exclure certaines catégories de créances.

79.      D’après ma compréhension de la position défendue par la Commission, il existe une sorte de logique de « contrepoids » expliquant pourquoi, selon elle, l’article 17, paragraphe 1, exclut les créances de remboursement impayées. Le contrepoids au nouveau droit reconnu aux voyageurs de résilier le contrat est la limitation de la protection de ce droit en cas d’insolvabilité. Étant donné que le droit de résilier le contrat est nouveau, la Commission prétend qu’il n’y a pas de réduction par rapport au niveau de protection des consommateurs établi par le droit de l’Union.

80.      Le problème de cette position est qu’elle repose sur des hypothèses. La Commission a précisé, lors de l’audience, que c’est ce qu’elle « pense » qui justifie une formulation différente entre sa proposition et le texte de la directive tel qu’il a été finalement adopté.

81.      En outre, l’idée que le législateur a voulu créer une sorte de « demidroit », à savoir le droit à un remboursement après résiliation du contrat en vertu de l’article 12, paragraphe 2, de la directive 2015/2302 mais sans aucune protection correspondante contre l’insolvabilité, n’apparaît nulle part dans les considérants ni dans les documents sur lesquels la Commission s’est appuyée. Ainsi que l’a relevé en substance le Parlement, l’exposé des motifs du Conseil auquel la Commission s’est référée porte sur la limitation de la garantie en cas de risques extrêmement ténus, qui fait l’objet d’une autre disposition, à savoir l’article 17, paragraphe 2.

82.      Il existe également, à mon sens, une incohérence en ce qui concerne l’argument relatif au niveau de protection des consommateurs. Certes, le droit du voyageur de résilier le contrat en cas de circonstances exceptionnelles et inévitables n’était pas prévu par la directive 90/314. Cependant, s’il fallait interpréter l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 comme excluant les créances des voyageurs nées avant l’insolvabilité, cette exclusion devrait porter non pas uniquement sur les créances découlant de l’exercice du droit de résilier le contrat en cas de circonstances exceptionnelles et inévitables, mais également sur les créances de remboursement découlant de l’exercice du droit de résiliation du contrat par l’organisateur ou le voyageur dans d’autres circonstances prévues par la directive 2015/2302. Par exemple, le voyageur a droit à un remboursement en cas de résiliation du contrat par l’organisateur en vertu de l’article 12, paragraphe 3, de la directive 2015/2302 ou en cas de résiliation du contrat en vertu de l’article 11, paragraphe 5, de celle-ci. Ce droit au remboursement existait déjà dans le cadre de la directive 90/314 (29). Dans de telles situations, la protection des consommateurs serait réduite par rapport à l’ancien régime s’il fallait considérer que les créances de remboursement correspondantes ne seraient plus couvertes par la protection contre l’insolvabilité.

83.      En tout état de cause, compte tenu du fait que l’un des colégislateurs, à savoir le Parlement, a pris une position ferme selon laquelle le législateur n’avait pas l’intention de limiter le champ d’application de la protection contre l’insolvabilité au titre de l’article 17, paragraphe 1, il n’est pas possible de discerner une intention législative claire en sens contraire (30).

84.      Compte tenu de ce qui précède, il convient d’examiner, ensuite, le contexte dans lequel s’inscrit cette disposition et les objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie, avant de procéder à une interprétation conforme à l’ensemble du droit primaire de l’Union.

 c)      Le contexte et les objectifs de la réglementation dont l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 fait partie

85.      En ce qui concerne le contexte dans lequel s’inscrit l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302, il y a lieu de relever que la première partie de la première phrase précise que la garantie concerne le remboursement de « tous les paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom ». L’article 17, paragraphe 5, prévoit que, « [p]our les services de voyage qui n’ont pas été exécutés, le remboursement est effectué sans retard excessif après que le voyageur en a fait la demande ». Le considérant 39, exposant les raisons ayant conduit à l’adoption de cette disposition, énonce que les voyageurs sont « totalement protégés contre l’insolvabilité de l’organisateur » et que les organisateurs doivent veiller à fournir une garantie pour le remboursement de « tous les paiements effectués ». Aux termes du même considérant, « [p]our qu’une protection soit effective, il faut qu’elle s’applique dès que, du fait des problèmes de liquidités de l’organisateur, des services de voyages ne sont pas exécutés […] ».

86.      Comme précédemment indiqué (31), l’« activation » de la protection contre l’insolvabilité, dans la mesure où les services concernés ne sont pas exécutés en raison de l’insolvabilité de l’organisateur, doit être associée à l’effectivité de ladite protection.  L’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 ne saurait, dès lors, être interprétée d’une manière qui exclurait certaines catégories de créances de remboursement du champ d’application de la protection contre l’insolvabilité.

87.      Il convient également de souligner que l’article 17, paragraphe 2, de la directive 2015/2302 a un champ d’application différent de celui de l’article 17, paragraphe 1, de cette directive qui régit la limitation de la garantie en matière de remboursement. La limitation pertinente concerne la couverture des « coûts raisonnablement prévisibles ». Le considérant 40 explique qu’« une protection efficace contre l’insolvabilité ne devrait pas avoir à tenir compte de risques extrêmement ténus, par exemple l’insolvabilité simultanée de plusieurs des principaux organisateurs, lorsqu’une telle couverture aurait une incidence disproportionnée sur le coût de la protection, entravant ainsi son efficacité ».

88.      Toutefois, l’exercice par les voyageurs de leur seul droit de résiliation du contrat prévu à l’article 12, paragraphe 2, de la directive 2015/2302 et l’obligation qui en découle pour l’organisateur de procéder à un remboursement intégral en vertu de l’article 12, paragraphe 4, ne peuvent être considérés comme un « risque extrêmement ténu » qui exclurait les paiements avancés de la garantie.

89.      À cet égard, il convient de rappeler que l’article 12, paragraphe 2, reconnaît le droit de résilier le contrat en cas de circonstances exceptionnelles et inévitables. Les voyageurs ont le droit correspondant à un remboursement intégral. Ce droit, tel qu’il résulte de l’article 23, paragraphes 2 et 3, de la directive 2015/2302, a un caractère impératif (32). L’article 17, paragraphe 1, doit être interprété de manière à garantir le plein effet du droit de résilier le contrat et d’obtenir un remboursement intégral en vertu de l’article 12, paragraphe 2, et non d’une manière qui limite l’effectivité de ce droit. Si le voyageur devait perdre le bénéfice de la protection contre l’insolvabilité du seul fait qu’il a résilié le contrat avant l’insolvabilité, cela pourrait dissuader les voyageurs d’exercer leurs droits en premier lieu. Comme le Parlement l’a observé en substance, l’article 12, paragraphe 2, serait privé de son effet utile s’il était admis que la protection contre l’insolvabilité ne s’applique pas aux voyageurs qui ont exercé un droit conféré par la directive.

90.      Plus largement, une interprétation différente placerait les voyageurs qui décident de résilier le contrat avant le début du forfait sur le fondement de l’article 12, paragraphe 1, de la directive 2015/2302, dès qu’ils perçoivent l’existence de problèmes de liquidité, dans une position moins favorable que ceux qui décident de ne pas le faire. En effet, dans une telle situation, il se peut que les voyageurs préfèrent payer des frais de résiliation et se faire rembourser le montant restant, conformément à l’article 12, paragraphe 4, plutôt que de prendre le risque d’un éventuel rapatriement en raison d’une insolvabilité survenue au cours de leur voyage.

91.      Ensuite, il y a lieu de relever que, selon l’article 17, paragraphe 2, de la directive 2015/2302, la garantie couvre « les montants des paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom en ce qui concerne les forfaits ». Les critères de calcul de la couverture comprennent « [le] laps de temps entre les paiements de l’acompte et du solde et l’exécution des forfaits ». Le considérant 40 précise que « la protection devrait être suffisante pour couvrir tous les paiements prévisibles effectués par les voyageurs ou pour leur compte en ce qui concerne les forfaits en haute saison » (33). Selon le même considérant, cela signifiera d’une manière générale que la garantie doit couvrir « un pourcentage suffisamment élevé du chiffre d’affaires de l’organisateur en matière de forfaits ». Il ressort de l’article 17, paragraphe 2, et du considérant 40 que tous les paiements effectués au titre des forfaits sont inclus dans le calcul de la protection contre l’insolvabilité qui se fonde sur les données relatives au chiffre d’affaires (34). En revanche, le fondement juridique de la demande de remboursement de ces paiements ne semble pas avoir d’importance pour le calcul de la couverture nécessaire.

92.      Enfin, l’exclusion de la protection contre l’insolvabilité des créances impayées créerait une incohérence grave entre l’article 17, paragraphe 1, et les informations précontractuelles qui doivent être fournies aux voyageurs au moyen des formulaires pertinents figurant dans la partie A ou B de l’annexe I. Selon ces informations standard, « [s]i, l’organisateur ou, dans certains États membres, le détaillant devient insolvable, les montants versés seront remboursés » (35). Il convient de noter que les informations communiquées au voyageur ne comportent aucune précision sur l’exclusion de la protection contre l’insolvabilité. Il ne saurait être admis, ainsi que la Bundesarbeitskammer (chambre fédérale du travail) l’a relevé en substance, que le législateur ait incité le voyageur à comprendre de manière erronée la documentation en donnant, dans le formulaire d’information standard, la fausse impression que tous les voyageurs sont protégés contre l’insolvabilité, alors qu’en réalité seuls certains d’entre eux le sont.

93.      S’agissant de l’objectif spécifique de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302, cette disposition vise à protéger les voyageurs contre des risques résultant de l’insolvabilité de l’organisateur. Sous l’empire de l’ancienne directive 90/314, la Cour a jugé, dans l’arrêt rendu dans l’affaire Verein für Konsumenteninformation, que les risques résultant de l’insolvabilité, inhérents au contrat passé entre le voyageur et l’organisateur, découlent du paiement par avance du prix du forfait (36). Ainsi, la Cour a dit pour droit que le résultat prescrit par l’article 7 de la directive comporte l’attribution au voyageur de droits garantissant le remboursement des fonds qu’il a déposés. Le risque lié à l’insolvabilité n’a pas changé dans le cadre de la directive actuelle. Par conséquent, l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 doit également avoir pour effet d’accorder aux voyageurs à forfait des droits garantissant le remboursement des sommes qu’ils ont versées, ce qui inclut les créances nées avant l’insolvabilité.

94.      L’interprétation selon laquelle tous les voyageurs doivent être pleinement protégés contre l’insolvabilité, y compris ceux qui ont résilié le contrat avant l’insolvabilité de l’organisateur, est également corroborée par l’objectif de la directive 2015/2302 qui est, ainsi qu’il est énoncé à son article premier, de réaliser un niveau élevé de protection des consommateurs. L’objectif d’assurer un niveau élevé de protection des consommateurs est également inscrit dans le droit primaire (article 169 TFUE et article 38 de la Charte). Une interprétation différente signifierait, comme l’a souligné le gouvernement grec, qu’un voyageur supporterait le risque économique lié à l’insolvabilité ultérieure de l’organisateur du voyage.

95.      Compte tenu de ce qui précède, le contexte dans lequel s’inscrit l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 et les objectifs poursuivis par la réglementation dont il fait partie permettent de conclure que la protection contre l’insolvabilité couvre également les créances de remboursement des voyageurs nées avant que l’organisateur ne devienne insolvable.

 d)      L’interprétation de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 à la lumière du principe d’égalité de traitement  

96.      Comme cela a été précédemment indiqué (37), selon un principe général d’interprétation, un acte de l’Union doit être interprété, dans la mesure du possible, d’une manière qui ne remet pas en cause sa validité. De même, lorsqu’une disposition du droit de l’Union est susceptible de plusieurs interprétations, il convient de privilégier celle qui est de nature à sauvegarder son effet utile (38).

97.      À cet égard, tout acte de l’Union doit être interprété en conformité avec l’ensemble du droit primaire, y compris le principe d’égalité de traitement, qui exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (39).

98.      Compte tenu de l’objectif d’assurer un niveau élevé de protection des consommateurs, consacré par le droit primaire (40), et à la lumière de l’objectif plus spécifique de l’article 17 de la directive 2015/2302, qui est de protéger les voyageurs contre le risque résultant de l’insolvabilité (41), les situations visées par cette disposition doivent être comparées notamment en fonction du risque économique supporté par les voyageurs.

99.      Dans la présente affaire, la situation des voyageurs qui introduisent une demande de remboursement après avoir résilié leur contrat de voyage (en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables) devrait être comparée à celle des voyageurs qui introduisent une telle demande au motif que les services de voyage ne sont pas exécutés en raison de l’insolvabilité de l’organisateur. Ainsi que l’a souligné le gouvernement grec lors de l’audience, les deux catégories de voyageurs sont exposées au même risque financier lié aux paiements effectués par avance au profit de l’organisateur qui devient par la suite insolvable.

100. La Commission, le Conseil et le gouvernement belge, ainsi que le Parlement à titre subsidiaire, ont soutenu qu’il n’y a pas d’inégalité de traitement entre les différentes catégories de voyageurs dès lors que leur situation n’est pas comparable. D’une part, les voyageurs qui ont résilié leur contrat avant l’insolvabilité n’ont aucun droit contractuel à l’exécution des services de voyage ; ils disposent seulement d’un droit pécuniaire à remboursement. D’autre part, les voyageurs qui n’ont pas résilié leur contrat au moment de l’insolvabilité ont droit à l’exécution des services de voyage.

101. Toutefois, la différence, décrite par la Commission, le Conseil, le Parlement et le gouvernement belge, dans la relation juridique des parties contractantes au moment de l’insolvabilité n’est pas la mesure de comparaison appropriée. Malgré la différence qui caractérise la relation contractuelle, les voyageurs des deux catégories disposent du même droit au remboursement de tous les paiements effectués. Comme je l’ai déjà indiqué, et comme le souligne le gouvernement grec, le point de référence pour la comparaison est le risque financier encouru par les voyageurs. Étant donné que le risque d’obtenir effectivement le remboursement de tous les paiements effectués par les voyageurs qui ont résilié leur contrat et par ceux qui ne l’ont pas encore résilié au moment de l’insolvabilité est le même, ces situations ne sauraient être traitées différemment sans méconnaître le principe d’égalité de traitement. Il en est ainsi d’autant plus au regard de l’objectif poursuivi par la directive 2015/2302 qui est d’assurer un niveau élevé de protection des consommateurs à tous les voyageurs (42).

102. Au vu de ce qui précède, j’estime que l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302, lu à la lumière du principe d’égalité de traitement, doit être interprété en ce sens que la garantie de remboursement comprend la demande de remboursement de tous les paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom, y compris ceux qui résilient le contrat avant que l’organisateur ne devienne insolvable.

 e)      Le principe de sécurité juridique 

103. Dans ses observations orales, HDI Global a soutenu que, pour calculer l’étendue du risque assumé lors de la fixation des conditions d’assurance (43) et des primes à payer par les organisateurs, elle s’est fondée sur les textes juridiques pertinents. Dès lors que, selon HDI Global, l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 exige clairement un lien de causalité entre l’insolvabilité et l’inexécution des services de voyage, s’écarter de cette interprétation irait à l’encontre du principe de sécurité juridique, qui est un principe fondamental du droit de l’Union.

104. À cet égard, ainsi que cela a été souligné précédemment (44), s’il ressortait clairement du libellé même de l’article 17, paragraphe 1, qu’il exige un tel lien de causalité, la Cour ne pourrait pas s’écarter de cette interprétation. Toutefois, ainsi qu’il a été démontré ci-dessus [point a)], le libellé de l’article 17, paragraphe 1, n’exclut pas sans équivoque les demandes des voyageurs qui ont résilié leur contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables. Il est donc sujet à interprétation. Selon l’approche suivie dans les présentes conclusions, cette interprétation conduirait à considérer que tous les paiements effectués doivent être protégés en cas d’insolvabilité.

105. Par ailleurs, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, l’interprétation que cette dernière donne d’une règle de droit de l’Union, dans l’exercice de la compétence que lui confère l’article 267 TFUE, éclaire et précise la signification et la portée de cette règle, telle qu’elle doit ou aurait dû être comprise et appliquée depuis le moment de son entrée en vigueur. Il en résulte que la règle ainsi interprétée peut et doit être appliquée par le juge même à des rapports juridiques nés et constitués avant l’arrêt statuant sur la demande d’interprétation si, par ailleurs, les conditions permettant de porter devant les juridictions compétentes un litige relatif à l’application de ladite règle se trouvent réunies (45).

106. Ce n’est qu’à titre très exceptionnel que la Cour peut, par application d’un principe général de sécurité juridique inhérent à l’ordre juridique de l’Union, être amenée à limiter la possibilité pour tout intéressé d’invoquer une disposition qu’elle a interprétée en vue de mettre en cause des relations juridiques établies de bonne foi. Pour qu’une telle limitation puisse être décidée, il est nécessaire que deux critères essentiels soient réunis, à savoir la bonne foi des milieux intéressés et le risque de troubles graves (46).

107. Toutefois, dans la présente affaire, ni les compagnies d’assurances parties au litige au principal ni le gouvernement belge n’ont demandé à la Cour de limiter dans le temps les effets de l’arrêt à intervenir pour des raisons de sécurité juridique. Même si une telle demande avait été présentée, ces parties n’ont pas invoqué de répercussions économiques graves de nature à justifier une limitation dans le temps des effets du futur arrêt si la Cour devait suivre l’interprétation proposée dans les présentes conclusions (47).

108. Il est également pertinent de relever que les contrats en cause dans l’affaire au principal sont antérieurs à la recommandation 2020/648 de la Commission, laquelle pourrait donner à penser que les créances des voyageurs nées avant l’insolvabilité ne sont pas protégées. Les compagnies d’assurances qui sont parties au litige au principal n’auraient pas pu élaborer leur police d’assurance sur la base de l’interprétation retenue dans cette recommandation. En outre, ainsi qu’il a été relevé précédemment (48), le calcul de la garantie est fondé sur le montant de tous les paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom pour des forfaits, conformément à l’article 17, paragraphe 2, de la directive 2015/2302. Cette disposition donne une indication claire aux compagnies d’assurances quant à la base de calcul de la couverture nécessaire.

109. Par ailleurs, on peut noter que, lors de l’apparition de la pandémie de COVID-19, des mesures spécifiques ont été mises en place par le droit de l’Union pour permettre aux États membres d’utiliser toute la flexibilité prévue par les règles en matière d’aides d’État pour soutenir les organisateurs de voyages et les assureurs ainsi que pour protéger les voyageurs des conséquences de l’insolvabilité des organisateurs de voyages (49).

110. Au vu de ce qui précède, le principe de sécurité juridique ne s’oppose pas à une interprétation selon laquelle la garantie d’assurance prévue à l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 couvre tous les paiements effectués par les voyageurs avant l’insolvabilité.

111. Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302, eu égard à son libellé, au contexte et à la finalité ainsi qu’à la lumière du principe d’égalité de traitement, doit être interprétée en ce sens que la garantie de remboursement couvre non seulement les paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom lorsque le voyage ou le séjour de vacances n’a pas eu lieu en raison de l’insolvabilité de l’organisateur, mais également les paiements effectués par les voyageurs ou pour le compte des voyageurs qui ont résilié le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, au sens de l’article 12, paragraphe 2, de la directive 2015/2302, avant l’insolvabilité de l’organisateur.

 Sur les deuxième et troisième questions dans l’affaire C771/22

112. Les deuxième et troisième questions dans l’affaire C‑771/22 sont posées par la juridiction de renvoi dans l’hypothèse où sa première question recevrait une réponse négative. Par ces questions, auxquelles il peut être répondu ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 doit être interprété en ce sens qu’il vise les voyageurs qui ont résilié le contrat avant l’insolvabilité de l’organisateur de voyages en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables au moins dans les deux cas suivants : d’une part, lorsque la procédure d’insolvabilité a été ouverte au cours de la période pendant laquelle le voyage devait avoir lieu et, d’autre part, lorsque la résiliation du contrat et l’insolvabilité trouvent leur origine dans la même circonstance exceptionnelle.

113. Si la Cour décide de suivre l’approche interprétative exposée dans les présentes conclusions, il n’y aura pas lieu de répondre à ces questions. Si tel n’était pas le cas, ma réponse à ces questions serait négative. Si la garantie prévue à l’article 17, paragraphe 1, ne couvre pas les créances de remboursement nées avant l’insolvabilité, son champ d’application ne saurait être différent en fonction des circonstances décrites par la juridiction de renvoi. Ainsi que l’a relevé la Commission, l’étendue du champ d’application de cette disposition juridique ne saurait varier en fonction des dates auxquelles le voyage était censé avoir lieu ou selon que les circonstances invoquées pour justifier la résiliation du contrat ont conduit ou non à l’insolvabilité de l’organisateur.

114. Compte tenu de ce qui précède, je suis d’avis que, aux fins de l’interprétation du champ d’application de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302, il n’est pas déterminant de savoir si le voyage devait avoir lieu pendant ou après l’insolvabilité ou si l’insolvabilité est due aux mêmes circonstances exceptionnelles et inévitables qui ont été invoquées par le voyageur pour résilier le contrat en vertu de l’article 12, paragraphe 2, de cette directive.

 V.      Conclusion

115. Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le Bezirksgericht für Handelssachen Wien (tribunal de district pour les affaires commerciales de Vienne, Autriche) et le Nederlandstalige Ondernemingsrechtbank Brussel (tribunal de l’entreprise néerlandophone de Bruxelles, Belgique) de la manière suivante :

L’article 17, paragraphe 1, de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2015, relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) no 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil, compte tenu de son libellé, de son contexte et de sa finalité ainsi qu’à la lumière du principe d’égalité de traitement,

doit être interprété en ce sens que la garantie de remboursement couvre non seulement les paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom lorsque le voyage ou le séjour de vacances n’a pas eu lieu en raison de l’insolvabilité de l’organisateur, mais également les paiements effectués par les voyageurs ou pour le compte des voyageurs qui ont résilié le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, au sens de l’article 12, paragraphe 2, de la directive 2015/2302, avant l’insolvabilité de l’organisateur.

À titre subsidiaire, pour l’interprétation du champ d’application de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302, il n’est pas déterminant de savoir si le voyage devait avoir lieu pendant ou après l’insolvabilité ou si l’insolvabilité est due aux mêmes circonstances exceptionnelles et inévitables qui ont été invoquées par le voyageur pour résilier le contrat en vertu de l’article 12, paragraphe 2, de cette directive.


1      Langue originale : l’anglais.


2      Voir les données pertinentes dans les notes d’information des Nations unies sur le tourisme : https://www.unwto.org/tourism-and-covid-19-unprecedented-economic-impacts.


3      Directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2015, relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) no 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil (JO 2015, L 326, p. 1).


4      Directive du Conseil, du 13 juin 1990, concernant les voyages, vacances et circuits à forfait (JO 1990, L 158, p. 59). Cette directive a été abrogée par la directive 2015/2302.


5      Arrêt du 14 mai 1998, Verein für Konsumenteninformation (C‑364/96, EU:C:1998:226, point 18 et jurisprudence citée).


6      Arrêt du 12 janvier 2023, FTI Touristik (Voyage à forfait aux îles Canaries) (C‑396/21, EU:C:2023:10, point 19 et jurisprudence citée).


7      Arrêt du 25 janvier 2022, VYSOČINA WIND (C‑181/20, EU:C:2022:51, point 39).


8      Arrêt du 14 mai 2019, M e.a. (Révocation du statut de réfugié) (C‑391/16, C‑77/17 et C‑78/17, EU:C:2019:403, point 77).


9      La phrase pertinente de la version française de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 énonce ce qui suit : « dans la mesure où les services concernés ne sont pas exécutés en raison de l’insolvabilité des organisateurs ».


10      Voir, par exemple, la version allemande de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/2302 (« sofern die betreffenden Leistungen infolge der Insolvenz des Reiseveranstalters nicht erbracht werden »), la version espagnole (« en que los servicios correspondientes no se hayan ejecutado por causa de la insolvencia del organizador ») et la version italienne (« in cui i servizi pertinenti non sono eseguiti a causa dello stato di insolvenza dell’organizzatore »).


11      Arrêt du 14 mai 1998 (C‑364/96, EU:C:1998:226, point 20 ; ci-après l’« arrêt rendu dans l’affaire Verein für Konsumenteninformation »).


12      Arrêt du 14 mai 1998, Verein für Konsumenteninformation (C‑364/96, EU:C:1998:226, point 22) (souligné par mes soins).


13      Du moins en ce qui concerne les demandes de remboursement découlant de l’exercice du droit de résilier le contrat en vertu de l’article 12, paragraphe 2, de la directive 2015/2302.


14      Le Danemark a indiqué qu’il avait mis en place un fonds de garantie qui couvre les bons ainsi que les créances de remboursement impayées.


15      Il est également intéressant de mentionner l’exemple de la transposition allemande de l’article 17, paragraphe 1 de la directive 2015/2302. L’article 651r, paragraphe 1, du Bürgerliches Gesetzbuch (code civil allemand ; ci-après le « BGB ») énonce que l’organisateur doit garantir au voyageur le remboursement du prix payé pour le forfait dans la mesure où, « en cas […] » (« im Fall » en allemand) d’insolvabilité de l’organisateur, les services de voyage ne se concrétisent pas. L’article 651r, paragraphe 1, du BGB est rédigé de manière plus large que son prédécesseur, l’article 651k, paragraphe 1, point 1, du BGB. Cette dernière disposition prévoyait que l’organisateur de voyages devait garantir aux voyageurs le remboursement du montant payé pour le voyage, dans la mesure où les services de voyage ne se concrétisent pas « en raison de » (« infolge ») de l’insolvabilité de l’organisateur de voyages. Cette formulation de l’ancienne version de l’article 651k, paragraphe 1, point 1, du BGB soulevait des problèmes de respect de la directive 90/314, ainsi qu’il a été démontré dans l’arrêt du 16 février 2012, Blödel-Pawlik (C‑134/11, EU:C:2012:98). Au moment de l’adoption de la directive 2015/2302, il a été souligné dans la doctrine allemande que « le péché originel d’un filtre général tel que “en raison de” » (« der Sündenfall eines allgemeinen Filters wie “infolge” ») ne devait pas se répéter dans les dispositions de transposition (voir Staudinger, A., « Erste Überlegungen zur Umsetzung der reformierten Pauschalreiserichtlinie mit Bezug auf den Insolvenzschutz », Reise-Recht Aktuell (RRa), 2015 (6). p. 281 à 287, à la page 282).


16      Cette conclusion n’est pas remise en cause par les considérations que j’ai développées au point 61 de mes conclusions dans l’affaire UFC – Que choisir et CLCV (C‑407/21, EU:C:2022:690), mentionnés par la Commission dans ses observations écrites. En effet, ce point n’avait pas pour objet d’analyser en profondeur la portée de l’article 17 de la directive 2015/2302, mais plutôt de répondre aux arguments avancés par certains gouvernements quant à l’inapplicabilité du droit à un remboursement intégral dans le cas de la pandémie de COVID-19, ainsi que de réfléchir à l’incidence de celle-ci sur la liquidité des organisateurs découlant de demandes d’annulation généralisées. Pour les mêmes raisons, le point 55 de l’arrêt de la Cour du 8 juin 2023, Commission/Slovaquie (Droit de résiliation sans frais) (C‑540/21, EU:C:2023:450), ne doit pas être compris comme reflétant la position de la Cour sur le champ d’application de la protection contre l’insolvabilité au titre de l’article 17 de la directive 2015/2302.


17      Arrêt du 16 mars 2023, Towercast (C‑449/21, EU:C:2023:207, point 31).


18      Arrêt du 8 octobre 1996, Dillenkofer e.a. (C‑178/94, C‑179/94 et C‑188/94 à C‑190/94, EU:C:1996:375, point 42).


19      Arrêt du 15 juin 1999, Rechberger e.a. (C‑140/97, EU:C:1999:306, point 61).


20      Arrêt du 14 mai 1998, Verein für Konsumenteninformation (C‑364/96, EU:C:1998:226, point 18).


21      Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage assistées, modifiant le règlement (CE) no 2006/2004 et la directive 2011/83/UE, et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil [COM (2013) 512 final].


22      Le considérant 34 de la proposition de la Commission énonçait que « les voyageurs achetant un forfait […] de voyage [étaient] totalement protégés contre l’insolvabilité de l’organisateur » et que « les États membres devraient veiller à ce que leur régime national de protection soit effectif et puisse garantir le prompt rapatriement et le remboursement de tous les voyageurs lésés par l’insolvabilité ou la faillite ». L’article 15 de la proposition de la Commission, intitulé « Effectivité et champ d’application de la protection contre l’insolvabilité », prévoyait que les États membres devaient veiller à ce que les organisateurs « obtiennent une garantie propre à assurer […] le remboursement effectif et rapide de tous les paiements effectués par les voyageurs » (souligné par mes soins).


23      Exposé des motifs du Conseil du 18 septembre 2015 : Position (UE) no 13/2015 du Conseil en première lecture en vue de l’adoption de la directive du Parlement européen et du Conseil relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) no 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil (JO 2015, C 360, p. 37).


24      Recommandation (UE) 2020/648 de la Commission, du 13 mai 2020, concernant des bons à valoir destinés aux passagers et voyageurs à titre d’alternative au remboursement des voyages à forfait et des services de transport annulés dans le contexte de la pandémie de COVID-19 (JO 2020, L 151, p. 10).


25      Considérant 14 de la recommandation 2020/648 de la Commission.


26      Point 2 de la recommandation 2020/648 de la Commission. Ainsi qu’il ressort du point 1, les bons concernés sont ceux que les organisateurs peuvent proposer aux voyageurs comme alternative au remboursement en espèce en cas de résiliation du contrat pour des raisons liées à la pandémie de COVID-19, dans le cadre de l’article 12, paragraphes 3 et 4, de la directive 2015/2302.


27      Arrêt du 15 juin 1999, Rechberger e.a. (C‑140/97, EU:C:1999:306, point 74).


28      Le Parlement cite le considérant 1 de la directive 2015/2302.


29      Voir article 4, paragraphe 6, sous b), de la directive 80/314 régissant le droit du consommateur au remboursement dans les meilleurs délais de toutes les sommes versées en vertu du contrat.


30      Il serait d’ailleurs souhaitable, de lege ferenda, que le législateur précise le champ d’application de l’article 17, paragraphe 1, de la directive 2015/230. C’est l’un des objectifs de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive (UE) 2015/2302 afin de renforcer l’efficacité de la protection des voyageurs et de simplifier et clarifier certains aspects de la directive [COM (2023) 905 final). Selon la nouvelle formulation proposée par la Commission pour cette disposition, la garantie de remboursement de tous les paiements effectués par les voyageurs « en cas d’insolvabilité de l’organisateur » inclut la protection des paiements effectués « [dans] les cas où un voyageur avait droit à un remboursement ».


31      Voir point 55 des présentes conclusions.


32      Arrêt du 8 juin 2023, UFC – Que choisir et CLCV (C‑407/21, EU:C:2023:449, point 60).


33      Souligné par mes soins.


34      Voir Keiler, S., « Agens und Folge der Insolvenz eines Reiseveranstalters », 2020 Zeitschrift für Insolvenzrecht und Kreditschutz – ZIK, Vol. 6, 2020, p. 229, à la page 231.


35      Souligné par mes soins.


36      Arrêt du 14 mai 1998, (C-364/96, EU:C:1998:226, point 18).


37      Point 43 des présentes conclusions.


38      Arrêt du 19 novembre 2009, Sturgeon e.a. (C‑402/07 et C‑432/07, EU:C:2009:716, point 47). Dans cet arrêt fondateur, relatif à l’interprétation du règlement (CE) no 261/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol, et abrogeant le règlement (CEE) no 295/91 (JO 2004, L 46, p. 1), la Cour a dit pour droit que les passagers de vols retardés qui subissent une perte de temps égale ou supérieure à trois heures et les passagers de vols annulés ne sauraient être traités d’une manière différente, sauf à ce qu’il soit porté atteinte au principe d’égalité de traitement.


39      Arrêt du 23 octobre 2012, Nelson e.a. (C‑581/10 et C‑629/10, EU:C:2012:657, point 33 et jurisprudence citée).


40      Voir point 93 des présentes conclusions.


41      Voir point 91 des présentes conclusions.


42      Voir, par analogie, arrêt du 19 novembre 2009, Sturgeon e.a. (C‑402/07 et C‑432/07, EU:C:2009:716, point 60).


43      J’entends par là les conditions pour que la couverture d’assurance soit valable.


44      Point 42 des présentes conclusions.


45      Arrêts du 6 mars 2007, Meilicke e.a. (C‑292/04, EU:C:2007:132, point 34) et du 23 avril 2020, Herst (C‑401/18, EU:C:2020:295, point 54). Ces conditions concernent, notamment, la recevabilité de l’action concernée ou le respect des délais de prescription pertinents.


46      Arrêt du 23 avril 2020, Herst (C‑401/18, EU:C:2020:295, point 56 et jurisprudence citée).


47      Voir, en ce sens, arrêt du 23 octobre 2014, Schulz et Egbringhoff (C‑359/11 et C‑400/11, EU:C:2014:2317, points 57 et suivants).


48      Point 91 des présentes conclusions.


49      Voir communication de la Commission Encadrement temporaire des mesures d’aide d’État visant à soutenir l’économie dans le contexte actuel de la flambée de COVID-19 [C(2020) 1863] (JO 2020, C°91I, p. 1), telle que modifiée. Les gouvernements autrichien et belge ont tous deux eu recours à l’encadrement temporaire relatif aux aides d’État dans le contexte de l’épidémie de coronavirus. (voir, pour plus de détails, fiche d’information intitulée « Coronavirus Outbreak – List of Member State Measures approved under Articles 170(2)b, 107(3)b and 170(3)c TFEU and under the State Aid Temporary Framework », pouvant être consultée à l’adresse suivante : https://competition-policy.ec.europa.eu/state-aid/coronavirus/temporary-framework_en. Voir également, en ce sens, arrêt du 8 juin 2023, UFC – Que choisir et CLCV (C‑407/21, EU:C:2023:449, point 73).