Language of document : ECLI:EU:T:2012:408

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (première chambre)

6 septembre 2012 (*)

« Accès aux documents – Règlement (CE) n° 1049/2001 – Classification, emballage et étiquetage de certains composés de carbonate de nickel en tant que substances dangereuses – Directives 2008/58/CE et 2009/2/CE – Trentième et trente et unième adaptations au progrès technique de la directive 67/548/CEE – Refus partiel d’accès – Recours en annulation – Non-lieu à statuer »

Dans l’affaire T‑180/10,

Nickel Institute, établi à Toronto (Canada), représenté initialement par Me K. Nordlander, avocat, et Mme H. Pearson, solicitor, puis par Me Nordlander,

partie requérante,

soutenu par

République de Finlande, représentée par M. J. Heliskoski et Mme M. Pere, en qualité d’agents,

et par

Royaume de Suède, représenté par Mmes A. Falk, K. Petkovska, C. Meyer-Seitz et S. Johannesson, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

contre

Commission européenne, représentée par M. P. Oliver et Mme P. Costa de Oliveira, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de la Commission européenne du 8 février 2010 [SG.E3/HP/psi – Ares(2010)65824] portant refus d’accorder à Nickel Institute l’accès intégral à certains documents internes, en particulier à des avis du service juridique de la Commission établis dans le cadre de deux procédures consécutives ayant abouti à la classification, notamment, de certains composés de carbonate de nickel dans l’annexe I de la directive 67/548/CEE du Conseil, du 27 juin 1967, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à la classification, l’emballage et l’étiquetage des substances dangereuses (JO 196, p. 1),

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de M. J. Azizi (rapporteur), président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. S. Frimodt Nielsen, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        La présente affaire concerne une demande de Nickel Institute d’annuler la décision de la Commission européenne du 8 février 2010 [SG.E3/HP/psi – Ares(2010)65824] (ci-après la « décision litigieuse ») portant refus de lui accorder l’accès intégral à certains documents internes, en particulier à des avis du service juridique de la Commission établis dans le cadre de deux procédures consécutives ayant abouti à la classification, notamment, de certains composés de carbonate de nickel dans l’annexe I de la directive 67/548/CEE du Conseil, du 27 juin 1967, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à la classification, l’emballage et l’étiquetage des substances dangereuses (JO 196, p. 1). Ces classifications ont été adoptées, d’une part, par la directive 2008/58/CE de la Commission, du 21 août 2008, portant trentième adaptation au progrès technique de la directive 67/548 (JO L 246, p. 1), et, d’autre part, par la directive 2009/2/CE de la Commission, du 15 janvier 2009, portant trente et unième adaptation au progrès technique de la directive 67/548 (JO L 11, p. 6).

2        Par lettres séparées du 25 septembre 2009, Nickel Institute a demandé à la Commission l’accès à « tous les documents donnant l’avis d[e son] service juridique […] sur les projets des trentième et trente et unième adaptations au progrès technique de la directive 67/548, y compris […] les documents complémentaires ou commentaires sur ce sujet ». En outre, par deux lettres identiques du même jour, Nickel Institute a demandé à la Commission l’accès à « tous les avis émis par une direction générale [(DG)] ou un service de la Commission, notamment ceux de la [DG] ‘Entreprises et industrie’ et de la [DG] ‘Commerce’, en réponse à toute consultation interservices menée au sujet des projets des trentième et trente et unième adaptations au progrès technique de la directive 67/548, y compris […] les documents complémentaires ou commentaires sur ce sujet ».

3        Le secrétariat général de la Commission a enregistré ces demandes d’accès le 28 septembre 2009, sous les références « GESTDEM 2009/3819 » et « GESTDEM 2009/3820 », concernant respectivement des documents du service juridique et de la DG « Environnement ».

4        Par courriel du 21 octobre 2009, le service juridique de la Commission a invité Nickel Institute à clarifier sa demande d’accès en précisant la signification de l’expression « documents complémentaires ou commentaires sur ce sujet ». Nickel Institute a répondu à cette demande par courriel du 22 octobre 2009 en indiquant que, par lesdits documents et commentaires, il entendait, par exemple, « tout avis supplémentaire, révisé ou modifié du service juridique sur les projets des trentième et trente et unième adaptations au progrès technique de la directive 67/548, ou tout document ou toute correspondance commentant ou discutant un avis du service juridique sur les projets des trentième et trente et unième adaptations au progrès technique de la directive 67/548 ».

5        Dans sa lettre du 10 novembre 2009 concernant la demande d’accès enregistrée sous la référence « GESTDEM 2009/3819 », le directeur général du service juridique de la Commission a identifié neuf documents liés au projet de trentième adaptation au progrès technique de la directive 67/548. Il a accordé un accès intégral à deux de ces documents et un accès seulement partiel aux sept documents restants. S’agissant des parties des documents dont la divulgation a été refusée, le directeur général a relevé, en substance, qu’elles étaient couvertes par l’exception visant la « protection des avis juridiques » au sens de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43). S’agissant du projet de trente et unième adaptation au progrès technique de la directive 67/548, le directeur général a indiqué que le service juridique n’avait donné son accord que par le biais du système informatique CIS-net et que, par conséquent, il n’existait pas de document correspondant à la demande d’accès de Nickel Institute.

6        Par lettre du 2 décembre 2009, Nickel Institute a soumis une demande confirmative relative à la demande d’accès concernant les documents du service juridique et a sollicité un accès entier aux sept documents en cause ainsi qu’une « confirmation explicite de ce que la Commission ne disposait d’aucun document, d’aucun rapport et d’aucune correspondance (y compris tout avis supplémentaire ou révisé ou commentaire sur ces documents) contenant une appréciation du service juridique sur [le projet de la trente et unième adaptation au progrès technique de la directive 67/548] […] ».

7        À l’égard de la demande confirmative de Nickel Institute concernant les documents du service juridique, la Commission a confirmé, dans la décision litigieuse, d’une part, l’appréciation exposée dans la lettre du 10 novembre 2009 et, d’autre part, le fait que le service juridique avait donné son accord sur le projet de la trente et unième adaptation au progrès technique de la directive 67/548 sans observations additionnelles ou pièces jointes. Elle a néanmoins précisé que le document n° 9 du service juridique se référait en réalité également au projet de la trente et unième adaptation au progrès technique de la directive 67/548, ce que le service juridique aurait omis de mentionner par erreur (points 2 et 3 de la décision litigieuse).

 Procédure et conclusions des parties

8        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 16 avril 2010, Nickel Institute a introduit le présent recours.

9        Par actes déposés au greffe du Tribunal respectivement les 16 juillet 2010 et 5 août 2010, la République de Finlande et le Royaume de Suède ont demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de Nickel Institute. Par ordonnance du 8 septembre 2010, le président de la troisième chambre du Tribunal a admis ces interventions. La République de Finlande et le Royaume de Suède ont soumis leurs mémoires en intervention respectivement les 24 et 25 novembre 2010. Nickel Institute et la Commission ont soumis leurs observations sur ces mémoires en intervention respectivement les 21 et 24 janvier 2011.

10      Par lettre du 23 janvier 2012, la Commission a transmis au Tribunal une « décision de la Commission du 19 janvier 2012 » accordant à Nickel Institute un accès intégral aux documents demandés, essentiellement au motif que les affaires litigieuses concernant les composés de carbonate de nickel ont été définitivement tranchées par les juridictions de l’Union, ainsi que, en annexe, les versions complètes desdits documents.

11      Par lettre du 16 février 2012, en réponse à des mesures d’organisation de la procédure du Tribunal au titre de l’article 64 de son règlement de procédure, la Commission a demandé à ce que le Tribunal, d’une part, prononce une décision de non-lieu à statuer sur le présent litige au motif que tous les documents demandés ont été divulgués à Nickel Institute et, d’autre part, condamne celui-ci aux dépens.

12      Par lettre du 28 février 2012, en réponse à des mesures ultérieures d’organisation de la procédure du Tribunal au titre de l’article 64 du règlement de procédure, Nickel Institute a demandé au Tribunal de procéder à des mesures d’instruction, au titre de l’article 65 du règlement de procédure, pour vérifier et confirmer qu’il n’existait pas de courriel ou d’autre correspondance dans lesquels le service juridique de la Commission, notamment M. Oliver, aurait pris position sur la classification envisagée des composés de carbonate de nickel. En outre, Nickel Institute a fait part de son accord avec une décision de non-lieu à statuer du Tribunal, à condition que la Commission divulgue intégralement les avis du service juridique sur le projet de trente et unième adaptation au progrès technique de la directive 67/548.

13      Par lettre du 27 mars 2012, Nickel Institute, d’une part, a indiqué que sa demande d’accès n’a pas perdu son objet et qu’il conservait un intérêt à agir contre la décision litigieuse et, d’autre part, a contesté les conclusions de la Commission sur les dépens.

14      Par lettre du 30 mars 2012, la Commission a reconnu avoir omis d’identifier, en raison d’une « erreur administrative » dans le classement du dossier, un échange de courriels entre M. Oliver et les services compétents ayant précédé l’accord du service juridique, tel qu’introduit dans le système informatique CIS-net. En outre, la Commission a joint à sa lettre une impression de cet accord ainsi qu’une copie de l’échange de courriels susmentionné.

15      Par lettre du 30 mai 2012, en réponse à une nouvelle mesure d’organisation de la procédure du Tribunal en vertu de l’article 64 du règlement de procédure, la Commission a confirmé avoir divulgué à Nickel Institute la totalité des documents demandés.

16      Par lettre du 29 juin 2012, Nickel Institute a donné son accord avec une décision de non-lieu à statuer du Tribunal et a demandé à ce que la Commission soit condamnée aux dépens, dès lors qu’elle a omis de divulguer des documents couverts par la demande d’accès en raison d’une erreur administrative et d’un classement erroné du dossier administratif.

 En droit

17      En vertu de l’article 113 du règlement de procédure, le Tribunal peut à tout moment, d’office, les parties entendues, statuer sur les fins de non-recevoir d’ordre public ou constater que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer.

18      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier pour statuer sans poursuivre la procédure.

19      Ainsi qu’il a été reconnu par une jurisprudence établie, l’objet du litige, tel qu’il a été déterminé par le recours introductif d’instance, doit perdurer, tout comme l’intérêt à agir, jusqu’au prononcé de la décision juridictionnelle sous peine de non-lieu à statuer, ce qui suppose que le recours soit susceptible, par son résultat, de procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (arrêts de la Cour du 7 juin 2007, Wunenburger/Commission, C‑362/05 P, Rec. p. I‑4333, point 42, et du Tribunal du 24 septembre 2008, Reliance Industries/Conseil et Commission, T‑45/06, Rec. p. II‑2399, point 35).

20      Étant donné que Nickel Institute s’est vu accorder en cours d’instance un accès complet aux documents demandés, il convient de considérer que le litige a perdu son objet et que, partant, il n’y a plus lieu de statuer (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 23 novembre 2004, Turco/Conseil, T‑84/03, Rec. p. II‑4061, points 28 à 30, et du 9 septembre 2011, LPN/Commission, T‑29/08, non encore publié au Recueil, point 56). En effet, eu égard à cet accès complet, Nickel Institute a donné son accord avec une décision du Tribunal de non-lieu à statuer et n’a plus fait valoir conserver un intérêt à agir contre la décision litigieuse.

21      Par conséquent, il convient de conclure qu’il n’y a plus lieu de statuer sur le présent recours.

 Sur les dépens

22      Aux termes de l’article 87, paragraphe 6, de son règlement de procédure, en cas de non-lieu à statuer, le Tribunal règle librement les dépens.

23      Dans les circonstances particulières de l’espèce, le Tribunal estime qu’il y a lieu d’ordonner que la Commission soit condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que la moitié des dépens exposés par Nickel Institute. En effet, ainsi qu’elle l’a reconnu en cours d’instance, la Commission a omis d’identifier dès la procédure administrative, en raison d’une « erreur administrative » dans le classement de son dossier, un échange de courriels entre M. Oliver et les services compétents ayant précédé l’accord du service juridique donné par le biais du système informatique CIS-net. La Commission a dès lors fait preuve d’une négligence manifeste dans la gestion et dans l’instruction de son dossier administratif et n’a divulgué que très tardivement l’échange de courriels entre les services concernés et M. Oliver, alors même que ce dernier est également son représentant légal devant le Tribunal dans la présente affaire.

24      Conformément à l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, la République de Finlande et le Royaume de Suède, intervenants au présent litige, supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

ordonne :

1)      Il n’y a plus lieu de statuer sur le recours.

2)      La Commission européenne est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que la moitié des dépens exposés par Nickel Institute.

3)      Nickel Institute supportera la moitié de ses propres dépens.

4)      La République de Finlande et le Royaume de Suède supporteront leurs propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 6 septembre 2012.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       J. Azizi


* Langue de procédure : l’anglais.