Language of document : ECLI:EU:C:2008:745

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JÀN MAZÀK

présentées le 18 décembre 2008 (1)

Affaire C‑343/07

Bavaria NV

Bavaria Italia S.r.l.

contre

Bayerischer Brauerbund eV

[demande de décision préjudicielle formée par la Corte d’appello di Torino (Italie)]

«Validité des règlements (CEE) n° 2081/92 et (CE) n° 1347/2001 – Recevabilité – Protection des indications géographiques et des appellations d’origine pour les produits agricoles et denrées alimentaires –– Indication géographique ‘Bayerisches Bier’ – Marque ‘Bavaria’ – Conditions de procédure et de fond de l’enregistrement – Coexistence entre la marque et l’indication géographique protégée»





I –    Introduction

1.        Par ordonnance du 6 juillet 2007, parvenue à la Cour le 25 juillet 2007, la Corte d’appello di Torino (cour d’appel, Turin) (Italie) a soulevé plusieurs questions préjudicielles au titre de l’article 234 CE relativement à, d’une part, la validité du règlement (CE) n° 1347/2001 du Conseil, du 28 juin 2001, complétant l’annexe du règlement (CE) n° 1107/96 de la Commission relatif à l’enregistrement des indications géographiques et des appellations d’origine au titre de la procédure prévue à l’article 17 du règlement (CEE) n° 2081/92 (2) du Conseil et à la validité du règlement (CEE) n° 2081/92 du Conseil, du 14 juillet 1992, relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d’origine des produits agricoles et des denrées alimentaires (3), lui-même et, d’autre part, l’interprétation du règlement n° 1347/2001.

2.        Plus particulièrement, la juridiction de renvoi souhaite, par ses questions, savoir en substance si, compte tenu des exigences de forme et de fond imposées par le règlement n° 2081/92, la dénomination «Bayerisches Bier» a régulièrement été enregistrée au titre du règlement n° 1347/2001 en tant qu’indication géographique protégée (ci-après l’«IGP») et, le cas échéant, dans quelle mesure cette IGP affecte la validité ou la possibilité d’utiliser des marques préexistantes pour des bières dans la dénomination desquelles apparaît le terme «Bavaria».

3.        Les questions préjudicielles ont été soulevées dans le cadre d’un litige opposant, d’une part, le Bayerischer Brauerbund eV (ci-après «Bayerischer Brauerbund») et, d’autre part, Bavaria NV et Bavaria Italia SrL (ci-après «Bavaria» et «Bavaria Italia») à propos de l’usage par cette dernière de marques internationales contenant le terme «Bavaria».

4.        Une procédure connexe a été introduite devant les juridictions communautaires, à savoir, devant le Tribunal, le 6 décembre 2007, Bavaria/Conseil (T-178/06), et devant la Cour, le 20 mars 2008, Bayerischer Brauerbund (C-120/08). Les deux procédures ont été suspendues, respectivement, les 6 décembre 2007 et 20 mars 2008, dans l’attente du prononcé de la décision à intervenir dans la présente affaire.

II – Le cadre juridique

A –    Le règlement n° 2081/92

5.        Le règlement n° 2081/92 établit un cadre de règles communautaires visant à protéger les appellations d’origine et les indications géographiques enregistrées pour certains produits agricoles et denrées alimentaires lorsqu’il existe un lien entre les caractéristiques du produit ou de la denrée alimentaire et son origine géographique. Ce règlement établit un système d’enregistrement au niveau communautaire des indications géographiques et des appellations d’origine conférant protection dans tous les États membres.

6.        L’article 1er, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 2081/92 énonce:

«1. Le présent règlement établit les règles relatives à la protection des appellations d’origine et des indications géographiques des produits agricoles destinés à l’alimentation humaine visés à l’annexe II du traité et des denrées alimentaires visées à l’annexe I du présent règlement ainsi que des produits agricoles visés à l’annexe II du présent règlement.

[…]

2. Le présent règlement s’applique sans préjudice d’autres dispositions communautaires particulières.»

7.        L’annexe I du règlement n° 2081/92, intitulée «Denrées alimentaires visées à l’article 1er paragraphe 1» mentionne les «Bières» au premier tiret.

8.        Aux termes de l’article 2, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92,

«Aux fins du présent règlement, on entend par:

[…]

b)       ‘indication géographique’: le nom d’une région, d’un lieu déterminé ou, dans des cas exceptionnels, d’un pays, qui sert à désigner un produit agricole ou une denrée alimentaire:

–        originaire de cette région, de ce lieu déterminé ou de ce pays

et

–        dont une qualité déterminée, la réputation ou une autre caractéristique peut être attribuée à cette origine géographique et dont la production et/ou la transformation et/ou l’élaboration ont lieu dans l’aire géographique délimitée.»

9.        L’article 3, paragraphe 1, dispose:

«1. Les dénominations devenues génériques ne peuvent être enregistrées.

Aux fins du présent règlement, on entend par ‘dénomination devenue générique’, le nom d’un produit agricole ou d’une denrée alimentaire qui, bien que se rapportant au lieu ou à la région où ce produit agricole ou cette denrée alimentaire a été initialement produit ou commercialisé, est devenu le nom commun d’un produit agricole ou d’une denrée alimentaire.

Pour déterminer si un nom est devenu générique, il est tenu compte de tous les facteurs et notamment:

–        de la situation existant dans l’État membre où le nom a son origine et dans les zones de consommation,

–        de la situation existant dans d’autres États membres,

–        des législations nationales ou communautaires pertinentes.

Si, au terme de la procédure définie aux articles 6 et 7, une demande d’enregistrement est rejetée parce qu’une dénomination est devenue générique, la Commission publie cette décision au Journal officiel des Communautés européennes

10.      Conformément à l’article 13, paragraphe 1, du règlement n° 2081/92:

«1. Les dénominations enregistrées sont protégées contre toute:

a)       utilisation commerciale directe ou indirecte d’une dénomination enregistrée pour des produits non couverts par l’enregistrement, dans la mesure où ces produits sont comparables à ceux enregistrés sous cette dénomination ou dans la mesure où cette utilisation permet de profiter de la réputation de la dénomination protégée;

b)       usurpation, imitation ou évocation, même si l’origine véritable du produit est indiquée ou si la dénomination protégée est traduite ou accompagnée d’une expression telle que ‘genre’, ‘type’, ‘méthode’, ‘façon’, ‘imitation’ ou d’une expression similaire;

c)       autre indication fausse ou fallacieuse quant à la provenance, l’origine, la nature ou les qualités substantielles du produit figurant sur le conditionnement ou l’emballage, sur la publicité ou sur des documents afférents au produit concerné, ainsi que l’utilisation pour le conditionnement d’un récipient de nature à créer une impression erronée sur l’origine;

d)       autre pratique susceptible d’induire le public en erreur quant à la véritable origine du produit.

[…]»

11.      L’article 14 du règlement n° 2081/92 concerne la relation existant entre les appellations d’origine ou les indications géographiques protégées et les marques. L’article 14, paragraphes 2 (dans sa version originaire) et 3, énonce:

«2. Dans le respect du droit communautaire, l’usage d’une marque correspondant à l’une des situations visées à l’article 13, enregistrée de bonne foi avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement de l’appellation d’origine ou de l’indication géographique peut se poursuivre nonobstant l’enregistrement d’une appellation d’origine ou d’une indication géographique, lorsque la marque n’encourt pas les motifs de nullité ou de déchéance prévus respectivement par la directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques, (4) à son article 3 paragraphe 1 points c) et g) et à son article 12 paragraphe 2 point b).

3. Une appellation d’origine ou une indication géographique n’est pas enregistrée lorsque, compte tenu de la renommée d’une marque, de sa notoriété et de la durée de son usage, l’enregistrement est de nature à induire le consommateur en erreur quant à la véritable identité du produit.»

12.      L’article 14 du règlement n° 2081/92 a été modifié par le règlement (CE) n° 692/2003 du Conseil (5), entré en vigueur le 24 avril 2003.

13.      Le onzième considérant de ce règlement n° 692/2003 énonce à cet égard:

«L’article 24.5 de l’accord sur les ADPIC [aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce] vise non seulement les marques enregistrées ou déposées, mais aussi les cas des marques pouvant être acquises par l’usage, avant la date de référence prévue, notamment la date de protection de la dénomination dans le pays d’origine. Il convient par conséquent de modifier l’article 14, paragraphe 2, du règlement (CEE) n° 2081/92: la date de référence y prévue deviendrait celle de la protection dans le pays d’origine ou celle de dépôt de la demande d’enregistrement de l’indication géographique ou de l’appellation d’origine, selon qu’il s’agit respectivement d’une dénomination relevant, soit de l’article 17, soit de l’article 5 dudit règlement; en outre à l’article 14.1 la date de référence deviendrait celle du dépôt de la demande d’enregistrement au lieu de la date de la première publication.»

14.      L’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92, tel que modifié par le règlement n° 692/2003, énonce:

«2. Dans le respect du droit communautaire, l’usage d’une marque correspondant à l’une des situations visées à l’article 13, déposée, enregistrée ou, dans les cas où cela est prévu par la législation concernée, acquise par l’usage de bonne foi sur le territoire communautaire, soit avant la date de protection dans le pays d’origine, soit avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement de l’appellation d’origine ou de l’indication géographique à la Commission, peut se poursuivre nonobstant l’enregistrement d’une appellation d’origine ou d’une indication géographique, lorsque la marque n’encourt pas les motifs de nullité ou de déchéance prévus respectivement par la directive 89/104/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des États membres sur les marques et/ou par le règlement (CE) n° 40/94 du Conseil du 20 décembre 1993 sur la marque communautaire.»

15.      À titre de dérogation à la procédure normale prévue par les articles 5 à 7 du règlement n° 2081/92, l’article 17 de ce règlement organise une procédure simplifiée aux fins de l’enregistrement d’une IGP ou d’une appellation d’origine protégée applicable aux enregistrements de dénominations existant déjà au moment de l’entrée en vigueur dudit règlement. L’article 17 énonce à cet égard:

«1. Dans un délai de six mois suivant la date d’entrée en vigueur du présent règlement, les États membres communiquent à la Commission quelles sont, parmi leurs dénominations légalement protégées ou, dans les États membres où un système de protection n’existe pas, consacrées par l’usage, celles qu’ils désirent faire enregistrer en vertu du présent règlement.

2. La Commission enregistre, selon la procédure prévue à l’article 15, les dénominations visées au paragraphe 1 qui sont conformes aux articles 2 et 4. L’article 7 ne s’applique pas. Toutefois, les dénominations génériques ne sont pas enregistrées.

3. Les États membres peuvent maintenir la protection nationale des dénominations communiquées conformément au paragraphe 1 jusqu’à la date à laquelle une décision sur l’enregistrement est prise.»

16.      La procédure simplifiée prévue à l’article 17 du règlement n° 2081/92 a été abrogée par le règlement n° 692/2003 à compter du 24 avril 2003.

B –    Le règlement n° 1347/2001

17.      Le règlement n° 1347/2001 a eu pour effet d’enregistrer la dénomination «Bayerisches Bier», notifiée par la République fédérale d’Allemagne, en tant qu’IGP conformément à la procédure simplifiée figurant à l’article 17 du règlement n° 2081/92 et de l’ajouter à l’annexe du règlement (CE) n° 1107/96 de la Commission (6) à compter du 5 juillet 2001.

18.      Les troisième et quatrième considérants du règlement n° 1347/2001 énoncent:

«(3) Les informations transmises permettent de constater l’existence de la marque ‘Bavaria’ ainsi que le caractère valable de cette marque; en outre, il a été considéré qu’en vertu des faits et des informations disponibles, l’enregistrement de la dénomination ‘Bayerisches Bier’ n’est pas de nature à induire le consommateur en erreur quant à la véritable identité du produit. De ce fait l’indication géographique ‘Bayerisches Bier’ et la marque ‘Bavaria’ ne se trouvent pas dans la situation visée au paragraphe 3 de l’article 14 du règlement (CEE) n° 2081/92.

(4) L’usage de certaines marques, par exemple, la marque néerlandaise ‘Bavaria’ ainsi que la marque danoise ‘Høker Bajer’, peut se poursuivre nonobstant l’enregistrement de l’indication géographique ‘Bayerisches Bier’ dans la mesure où elles remplissent les conditions prévues à l’article 14, paragraphe 2, du règlement (CEE) n° 2081/92.»

III – Les faits, la procédure et les questions préjudicielles

19.      Bayerischer Brauerbund, fondée en 1880, est une association allemande dont l’objectif est de promouvoir les intérêts communs des entreprises bavaroises opérant dans le secteur de la bière et, notamment, de protéger en Allemagne et à l’étranger l’IGP «Bayerisches Bier» dont elle est titulaire depuis son enregistrement au titre du règlement n° 1347/2001. Depuis 1968, elle est également titulaire des marques internationales collectives «Bayrisch Bier» et «Bayerisches Bier».

20.      Bavaria est un producteur de bières néerlandais actif sur le marché international. Appelé à l’origine «Firma Gebroeders Swinkels», «Bavaria» est sa dénomination sociale officielle depuis 1930. Bavaria Italia fait partie du groupe d’entreprises Bavaria.

21.      Bavaria et Bavaria Italia sont, respectivement, le titulaire et l’utilisateur de plusieurs marques internationales, en vigueur en Italie et ailleurs, et dont l’élément essentiel est le terme «Bavaria» assorti d’autres expressions ou d’éléments figuratifs.

22.      En engageant une procédure devant le Tribunale di Torino (cour régionale, Turin) le 27 septembre 2004, à la suite de procédures similaires introduites dans plusieurs autres États européens, notamment en Allemagne et en Espagne, Bayerischer Brauerbund a tenté de faire cesser l’usage, par Bavaria et Bavaria Italia, de ces marques en Italie et d’obtenir une décision interlocutoire prononçant la nullité ou la déchéance desdites marques. Bayerischer Brauerbund estimait, au titre des articles 13 et 14 du règlement n° 2081/92, que ces marques étaient en conflit avec l’IGP «Bayerisches Bier» et, en tout cas, qu’elles contenaient une indication géographique – le terme «Bavaria» – de nature générique susceptible d’induire en erreur quant à l’origine géographique des bières en question, étant donné que celles-ci étaient néerlandaises.

23.      Par décision du 30 novembre 2006, le Tribunale di Torino a accueilli l’action de Bayerischer Brauerbund et interdit l’usage des marques en cause en Italie au motif qu’elles étaient de nature à induire en erreur et étaient en conflit avec l’IGP «Bayerisches Bier».

24.      Bavaria et Bavaria Italia ont régulièrement interjeté appel de cette décision devant la juridiction de renvoi en invoquant plusieurs moyens.

25.      Selon la juridiction de renvoi, le grief matériel invoqué en l’espèce porte sur l’opinion du Tribunale di Torino selon laquelle celui-ci ne pouvait pas saisir la Cour d’une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE relativement à la validité du règlement n° 1347/2001, au motif que Bavaria Italia aurait dû contester cet acte directement au titre de l’article 230 CE, c’est-à-dire dans un délai de deux mois après sa publication.

26.      La juridiction de renvoi estime qu’à cet égard les doutes soulevés à propos de la possibilité de former un renvoi préjudiciel dans les circonstances présentes devraient être tranchés par la Cour elle-même.

27.      En outre, la juridiction de renvoi se réfère de manière détaillée à plusieurs arguments avancés par Bavaria et Bavaria Italia aux fins de contester la validité du règlement n° 1347/2001 et de l’enregistrement, par ledit règlement, de «Bayerisches Bier» en tant qu’IGP, notamment la violation de principes généraux du droit et le non-respect de plusieurs conditions de fond et de forme prévues par le règlement n° 2081/92, en particulier ses articles 2, paragraphe 2, sous b), 14, paragraphe 3, et 17.

28.      Dans ce contexte, la Corte d’appello di Torino a suspendu la procédure et saisi la Cour des questions préjudicielles suivantes:

«1)       Le règlement (CE) n° 1347/2001 du Conseil, du 28 juin 2001, est-il ou non nul, éventuellement entre autres au titre d’une nullité dérivée de celle d’autres actes, des points de vue suivants:

Violation de principes généraux

–        au motif que les dispositions combinées de l’article 1er, paragraphe 1, et de l’annexe I du règlement (CEE) n° 2081/92 sont nulles, en ce qu’elles permettent l’enregistrement d’indications géographiques relatives à la ‘bière’, qui est une boisson alcoolique incluse (erronément) à l’annexe I précitée parmi les ‘denrées alimentaires’ visées à l’article 1er, paragraphe 1, et qu’elle n’est pas comprise parmi les ‘produits agricoles’ visés à l’annexe I du traité CE et aux articles 32 et 37 CE, sur lesquels le Conseil s’est fondé pour adopter le règlement (CEE) n° 2081/92;

–        au motif que l’article 17 du règlement (CEE) n° 2081/92 est nul en ce qu’il prévoit une procédure d’enregistrement accélérée susceptible de limiter les droits des opérateurs concernés et de leur porter atteinte de façon substantielle, en ne prévoyant aucun droit d’opposition et en comportant une violation manifeste des principes de transparence et de sécurité juridique et ce, en particulier, tant à la lumière de la complexité de la procédure d’enregistrement de l’IGP ‘Bayerisches Bier’ elle-même, qui a duré plus de 7 ans de 1994 à 2001, que de la reconnaissance expresse figurant au 13e considérant du règlement (CE) n° 692/03, dont l’article 15 a abrogé l’article 17 du règlement (CEE) n° 2081/92 pour les raisons précitées.

Absence de conditions formelles

–        Au motif que l’indication ‘Bayerisches Bier’ ne remplit pas les conditions exigées par l’article 17 du règlement (CEE) n° 2081/92 pour pouvoir obtenir l’enregistrement d’après la procédure simplifiée que cette disposition prévoit, dans la mesure où, lors de la présentation de la demande d’enregistrement, cette indication n’était pas ‘légalement protégée’ ni ‘consacrée par l’usage’ en Allemagne;

–        au motif que la présence des conditions d’enregistrement de l’indication ‘Bayerisches Bier’ n’a été dûment examinée ni par le gouvernement allemand avant de présenter la demande d’enregistrement à la Commission, ni par la Commission elle-même après avoir reçu la demande, contrairement ce que prévoit la jurisprudence de la Cour (arrêt du 6 décembre 2001 dans l’affaire C-269/99, [Carl Kühne e.a.]);

–        au motif que la demande d’enregistrement de l’indication ‘Bayerisches Bier’ n’a pas été présentée en temps opportun par le gouvernement allemand, conformément à ce que prévoit l’article 17, paragraphe 1, du règlement (CEE) n° 2081/92 (délai de six mois suivant la date d’entrée en vigueur du règlement), dès lors que la demande présentée initialement par la demanderesse prévoyait huit indications différentes, avec la possibilité de variations supplémentaires et indéfinies, qui ont uniquement convergé vers l’indication unique actuelle ‘Bayerisches Bier’ alors que le délai final du 24 janvier 1994 était déjà passé depuis longtemps.

Absence de conditions substantielles

–        Au motif que l’indication ‘Bayerisches Bier’ ne remplit pas les conditions substantielles fixées par l’article 2, paragraphe 2, sous b, du règlement (CEE) n° 2081/92 aux fins de son enregistrement à titre d’indication géographique protégée, compte tenu du caractère générique de cette indication qui a historiquement désigné de la bière produite d’après une méthode de production particulière ayant son origine en Bavière au cours du XIXe siècle et qui s’est donc diffusée dans le reste de l’Europe et dans le monde entier (ce que l’on qualifie de ‘méthode bavaroise’ à basse fermentation) qui est aujourd’hui aussi dans quelques langues européennes (danois, suédois, finnois) le terme générique pour la bière et qui, en toute hypothèse, peut uniquement et génériquement indiquer ‘bière produite en Bavière allemande’, d’une quelconque typologie parmi les très nombreuses et très différentes typologies existantes, et ce sans que l’on puisse identifier aucun ‘lien direct’ (arrêt de la Cour du 7 novembre 2000 dans l’affaire C ‑312/98, Warsteiner Branerei) entre une qualité déterminée, la réputation ou une autre caractéristique du produit (bière) et son origine géographique spécifique (Bavière), et sans que l’on soit en présence des ‘cas exceptionnels’ exigés par la disposition précitée pour permettre l’enregistrement d’une indication géographique comprenant le nom d’un pays;

–        au motif que, compte tenu des considérations figurant au paragraphe qui précède, l’indication ‘Bayerisches Bier’ est une indication ‘générique’ qui, en tant que telle, ne peut pas faire l’objet d’un enregistrement au sens des articles 3, paragraphe 1, et 17, paragraphe 2, du règlement (CEE) n° 2081/92;

–        au motif que l’indication ‘Bayerisches Bier’ n’aurait pas dû être enregistrée au sens de l’article 14, paragraphe 3, du règlement (CEE) n° 2081/92 dès lors que ‘Bayerisches Bier’, compte tenu ‘de la renommée, de la notoriété et de la durée d’usage’ des marques Bavaria, est de ‘nature à induire le consommateur en erreur quant à la véritable identité du produit’.

2)       À titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la première question est jugée irrecevable ou dépourvue de fondement, le règlement (CE) n° 1347/2001 du Conseil, du 28 juin 2001, doit-il ou non être interprété en ce sens que la reconnaissance de l’IGP ‘Bayerisches Bier’ qui y est contenue ne porte pas atteinte à la validité et à la possibilité d’utiliser les marques de tiers préexistantes dans lesquelles figurent le mot ‘Bavaria’»?

IV – Analyse juridique

A –    Première question

29.      Par sa première question, divisée en huit sous-questions (ou moyens d’annulation), la Corte d’appello di Torino met en cause la validité du règlement n° 1347/2001, compte tenu d’une violation éventuelle des principes généraux du droit communautaire ou des conditions, de fond ou de forme, prévues par le règlement n° 2081/92. Les sous-questions relatives au respect des principes généraux de droit communautaire portent sur le règlement n° 2081/92, en tant que fondement juridique du règlement n° 1347/2001.

1.      Quant à la recevabilité

a)      Principaux arguments des parties

30.      Dans la présente procédure, des observations écrites ont été déposées par Bavaria et Bavaria Italia (conjointement), Bayerischer Brauerbund, la Commission des Communautés européennes, le Conseil de l’Union européenne, ainsi que par les gouvernements allemand, grecque, italien et néerlandais. Ces parties ont été représentées à l’audience du 18 septembre 2008 lors de laquelle le gouvernement tchèque a également plaidé. Ce dernier déclare partager les points de vue de la Commission, du Conseil, de la République fédérale d’Allemagne et de la République italienne à propos des aspects matériels soulevés par la première question et, à part cela, il a concentré sa plaidoirie sur la question de la recevabilité des première et secondes questions préjudicielles.

31.      Bayerischer Brauerbund, le Conseil et les gouvernements tchèque, allemand, grec et italien soutiennent que la question est irrecevable. Étant donné que Bavaria et Bavaria Italia sont directement et individuellement concernées par le règlement n° 1347/2001, comme il ressort des troisième et quatrième considérants du préambule de celui-ci, mais n’ont pas formé de recours en annulation au titre de l’article 230 CE, elles ne peuvent pas plaider l’irrégularité de ce règlement devant les juridictions nationales. Selon le Conseil, il était manifeste que l’usage de la marque «Bavaria» pouvait être affecté par l’enregistrement faisant l’objet dudit règlement. Bavaria était donc manifestement en mesure de comprendre les conséquences de cet enregistrement.

32.      Bavaria et Bavaria Italia, la Commission et le gouvernement néerlandais concluent, en revanche, à la recevabilité de la première question. Ces parties font valoir que Bavaria et Bavaria Italia pouvaient légitimement nourrir certains doutes quant au point de savoir si elles étaient concernées directement et individuellement par les dispositions du règlement n° 1347/2001, étant donné que les effets de ce règlement à l’égard de ces sociétés découlaient de l’application, par les juridictions nationales, dans le litige pendant devant elles, des articles 13 et 14 du règlement n° 2081/92 visant à organiser la coexistence des marques existantes avec les IGP enregistrées ultérieurement. La Commission souligne, à cet égard, que l’enregistrement en cause n’impliquait pas automatiquement que la marque «Bavaria» ne pût plus être utilisée.

b)      Appréciation

33.      La question préliminaire soulevée dans ce contexte par la juridiction de renvoi et par plusieurs parties porte sur le point de savoir si la première question préjudicielle, mettant en cause la validité du règlement n° 1347/2001, ainsi que certaines dispositions du règlement n° 2081/92 sur lequel il se fonde, est irrecevable compte tenu du fait que Bavaria et Bavaria Italia n’ont pas formé de recours en annulation contre le règlement n° 1347/2001 devant le Tribunal dans le délai prévu à l’article 230 CE, alors qu’ils pouvaient en avoir le droit.

34.      Selon la décision TWD Textilwerke Deggendorf, une personne physique ou morale n’est en principe plus fondée à mettre en cause indirectement la validité d’un acte émanant d’une institution communautaire par le biais d’une décision préjudicielle lorsque cette personne pouvait former un recours direct contre ledit acte au titre de l’article 230 CE (7).

35.      Cette limitation de la possibilité de contester un acte communautaire par le biais d’une demande de décision préjudicielle vise à sauvegarder la sécurité juridique, en évitant la remise en cause indéfinie des actes communautaires entraînant des effets de droit. Dans l’hypothèse inverse, cela reviendrait à reconnaître à quiconque la faculté de contourner le caractère définitif que revêt la décision après l’expiration des délais du recours direct prévus à l’article 230, quatrième alinéa, CE (8).

36.      Il ressort toutefois clairement d’une jurisprudence constante qu’une personne ne peut se voir empêchée de soulever l’illégalité d’un acte communautaire devant une juridiction nationale et de contester sa validité indirectement au titre de l’article 234 CE que si son droit d’agir en annulation au titre de l’article 230 CE est à la fois manifestement et sans aucun doute recevable (9).

37.      Par conséquent, comme le cas d’espèce porte sur un règlement, il y a lieu de répondre à la question de savoir si un recours formé par Bavaria ou Bavaria Italia à l’encontre du règlement n° 1347/2001 aurait été sans aucun doute recevable au motif que les dispositions de celui-ci les concernaient directement et individuellement (10).

38.      A mon avis, il n’est pas établi que ce soit bien le cas en l’espèce.

39.      S’agissant en premier lieu de la condition de l’affectation directe (11), il y a lieu de noter que la question de savoir si et dans quelle mesure la situation juridique des entreprises et des titulaires de marques autres que les entreprises utilisant la dénomination «Bayerisches Bier», enregistrée en tant qu’IGP par le règlement n° 1347/2001, est affectée par ledit règlement, dépend en réalité de la portée de la protection attachée à cet enregistrement. Par conséquent, le point de savoir si l’utilisateur d’une dénomination comme celle de «Bavaria» est affecté par l’enregistrement de «Bayerisches Bier» en tant qu’IGP dépend essentiellement de la réponse à la question de savoir si l’usage de la dénomination en cause empiète sur l’IGP aux termes de l’article 13 du règlement n° 2081/92 ou si la dénomination concernée est protégée en tant que marque aux termes de l’article 14 dudit règlement.

40.      La réponse à cette question ne découle pourtant pas automatiquement et sans plus du règlement n° 1347/2001 ou du règlement n° 2081/92, ce que démontre également l’essence même du présent cas d’espèce.

41.      Dans ce contexte, certaines parties ont à juste titre fait observer que, s’agissant plus particulièrement de l’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92, il appartient à la juridiction nationale de décider si les conditions visées par cette disposition sont respectées et si, par conséquent, l’usage d’une marque comme «Bavaria» peut être poursuivi (12).

42.      Enfin – il s’agit d’une question également soulevée en l’espèce –, la mesure dans laquelle la situation juridique de Bavaria peut directement être affectée par les troisième et quatrième considérants du règlement est pour le moins douteuse.

43.      Compte tenu des considérations qui précèdent, on ne peut pas prétendre, selon moi, qu’il est manifeste que Bavaria est directement concernée par le règlement n° 1347/2001, combiné au règlement n° 2081/92, aux fins de former un recours en annulation au titre de l’article 230, quatrième alinéa, CE.

44.      En deuxième lieu, s’agissant de la condition selon laquelle la mesure contestée doit concerner individuellement les personnes la contestant, c’est-à-dire qu’elle doit les affecter, selon le test Plaumann, «en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d’une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne» (13), le cas d’espèce doit, à mon avis, être distingué de l’arrêt Codorníu invoqué par plusieurs parties à la procédure.

45.      En premier lieu, à l’inverse de l’affaire Codorníu, dans laquelle il était clair que la disposition communautaire en cause, en réservant l’usage du terme «crémant» aux producteurs français et luxembourgeois, empêchait Codorníu d’utiliser sa marque graphique «Grand Cremant de Codorníu» (14), il est beaucoup moins évident en l’espèce de déterminer la mesure dans laquelle l’IGP «Bayerisches Bier» affecte notamment l’usage de la marque «Bavaria» et, par conséquent, différencie le titulaire de cette marque de tous les autres opérateurs économiques au sens de cette jurisprudence.

46.      En deuxième lieu, et sans doute de manière plus fondamentale, même s’il est vrai que la marque «Bavaria», de même que la marque «Høker Bajer», est distinguée par la référence expresse qui en est faite aux troisième et quatrième considérants du règlement contesté, j’estime qu’il y a lieu de tenir compte du contenu de ces considérations, à savoir que l’usage de la marque «Bavaria» ne saurait être négativement affecté par l’enregistrement de «Bayerisches Bier» en tant qu’IGP.

47.      Par conséquent, à mon avis, Bavaria et Bavaria Italia pouvaient légitimement nourrir certains doutes quant à leur affectation directe et individuelle au titre du règlement n° 1347/2001, combiné au règlement n° 2081/92, et il n’est pas évident qu’un recours qu’elles auraient formé au titre de l’article 230 CE aurait été déclaré recevable (15).

48.      J’estime donc que la première question est recevable.

2.      Quant au fond

a)      Première sous-question relative au fondement juridique du règlement n° 2081/92

49.      Par cette question, la juridiction de renvoi s’enquiert de la légalité du règlement n° 2081/92 dans la mesure où il vise le secteur de la bière. Étant donné que la bière est une boisson alcoolique, elle ne peut pas être traitée comme une «denrée alimentaire», comme elle l’est dans ce règlement, et par conséquent elle aurait dû être soustraite du champ d’application dudit règlement. La juridiction de renvoi met également en cause la légalité du règlement n° 2081/92 compte tenu du fait que, comme la bière ne figure pas parmi les «produits agricoles» énumérés à l’annexe I du traité CE, les articles 32 CE et 37 CE ne constituent pas des fondements juridiques appropriés pour l’adoption de ce règlement.

i)      Les principaux arguments des parties

50.      Le gouvernement néerlandais, Bavaria et Bavaria Italia partagent les doutes exprimés dans la première sous-question. Bavaria et Bavaria Italia soutiennent qu’insérer la bière parmi les «denrées alimentaires» est arbitraire et incorrect et que la bière aurait dû être exclue de la portée du règlement n° 2081/92 de la même manière que le vin en a été exclu conformément à l’article 1er, paragraphe 1, deuxième alinéa, dudit règlement. Elles ajoutent que la bière n’est couverte qu’indirectement par les règlements n° 2081/92 et n° 1347/2001. Selon Bavaria et Bavaria Italia, la nature juridique des IGP, en tant que véritables droits de propriété intellectuelle, a rendu nécessaire de fonder le règlement n° 2081/92 non sur l’article 37 CE, mais bien sur l’article 308 CE et/ou sur les articles 94 CE et 95 CE.

51.      Bayerischer Brauerbund, la Commission et le Conseil, ainsi que les gouvernements allemand, grec et italien contestent l’interprétation suggérée par la juridiction de renvoi et maintiennent que l’article 37 CE constitue le fondement juridique correct de l’adoption du règlement n° 2081/92. En outre, et de manière plus générale, le gouvernement italien n’accepte pas que la légalité du règlement n° 2081/92 puisse être contestée aux fins de mettre en cause la légalité du règlement n° 1347/2001.

52.      Selon le gouvernement allemand et le Conseil, la bière est bien une denrée alimentaire à la lumière de la définition de la «denrée alimentaire» visée à l’article 2 du règlement (CE) n° 178/2002 (16). Le gouvernement allemand fait également valoir, comme le gouvernement italien, qu’une interprétation schématique du règlement n° 2081/92 révèle que l’exclusion des vins et des spiritueux de son champ d’application est basée sur d’autres motifs et qu’il n’est pas nécessaire d’exclure toutes les boissons alcooliques.

53.      Bayerischer Brauerbund, la Commission et le Conseil, ainsi que les gouvernements allemand et italien avancent également que l’objectif premier ou fondamental du règlement n° 2081/92 est celui visé à l’article 37 CE et, conformément à la jurisprudence de la Cour, c’est bien cette disposition qui doit lui servir de fondement juridique.

ii)    Appréciation

54.      En premier lieu, il faut rejeter l’idée que la bière ne devrait pas être considérée comme une «denrée alimentaire» et ne pourrait donc pas figurer en tant que telle à l’annexe I du règlement n° 2081/92. Cette opinion n’est pas seulement contredite par le rôle important traditionnellement joué par la bière dans la gastronomie et les habitudes alimentaires de plusieurs États membres, comme le gouvernement tchèque l’a souligné à l’audience. Mais, comme le gouvernement allemand et le Conseil l’ont rappelé, la bière semble correspondre, par exemple, à la définition de la «denrée alimentaire», visée à l’article 2 du règlement n° 178/2002, dans laquelle la ‘denrée alimentaire’ ou l’«aliment» est défini comme étant «toute substance ou produit, transformé, partiellement transformé ou non transformé, destiné à être ingéré ou raisonnablement susceptible d’être ingéré par l’être humain».

55.      Il convient de noter, en deuxième lieu, que le fait que le législateur communautaire a décidé, conformément à l’article 1er, paragraphe 1, du règlement n° 2081/92, d’exclure les produits relevant du secteur vitivinicole et les boissons spiritueuses de la portée de ce règlement ne permet pas de déduire que ce même législateur n’avait pas compétence pour inclure les boissons alcooliques ou, plus particulièrement, la bière dans le champ d’application de ce règlement. Ainsi qu’il ressort clairement du huitième considérant du règlement n° 2081/92, les vins et les boissons spiritueuses n’ont pas été inclus dans ce règlement au motif que ces boissons étaient déjà couvertes par une législation communautaire spécifique visant à établir un niveau de protection plus élevé.

56.      En troisième lieu, s’agissant de la référence à l’article 37 CE en tant que fondement juridique, et quoique la bière ne soit pas l’un des produits agricoles figurant à l’annexe I du traité CE, il ressort d’une jurisprudence constante que cet article constitue la base juridique appropriée pour toute réglementation relative à la production et à la commercialisation des produits agricoles énumérés à l’annexe I du traité, qui contribue à la réalisation d’un ou de plusieurs objectifs de la politique agricole commune énoncés à l’article 33 CE (17).

57.      Il est également de jurisprudence constante que, si l’examen d’un acte communautaire démontre qu’il poursuit une double finalité ou qu’il a une double composante et si l’une de celles-ci est identifiable comme principale ou prépondérante, tandis que l’autre n’est qu’accessoire, l’acte doit être fondé sur une seule base juridique, à savoir celle exigée par la finalité ou la composante principale ou prépondérante (18).

58.      Dans le même esprit, la Cour a estimé, dans un contexte comparable à celui en cause en l’espèce, que, lorsqu’une mesure législative contribue à la réalisation d’un ou de plusieurs objectifs de la politique agricole commune énoncés à l’article 33 CE, elle doit être adoptée sur le fondement de l’article 37 CE, même si, s’appliquant essentiellement à des produits relevant de l’annexe du traité citée dans ledit article, elle vise cependant de façon accessoire certains produits qui n’y sont pas compris (19).

59.      Dans ce contexte, il apparaît que le règlement n° 2081/92 pouvait régulièrement être adopté sur la base de l’article 37 CE, étant donné qu’il est manifeste qu’il vise essentiellement des produits énumérés à l’annexe I du traité et seulement un nombre limité d’autres produits, comme la bière, qui ne figurent pas dans ladite annexe. Le fait que ce règlement se réfère aussi à la bière, qui n’est pas indiquée à l’annexe I du traité, ne permet donc pas, à mon avis, de mettre en question le choix de l’article 37 CE en tant que fondement juridique, étant donné notamment que la bière constitue un produit dont la production et la distribution contribuent clairement à la réalisation des objectifs de la politique agricole commune.

60.      Par conséquent, j’estime que le moyen d’annulation tiré du fondement juridique du règlement n° 2081/92 n’est pas fondé.

b)      Deuxième sous-question relative à la validité de l’article 17 du règlement n° 2081/92

61.      Par la seconde sous-question, la juridiction nationale souhaite essentiellement savoir si l’article 17 du règlement n° 2081/92, sur la base duquel le règlement n° 1347/2001 a été approuvé, est nul au motif que la procédure d’enregistrement accélérée établie à ce titre enfreint manifestement les principes de transparence et de sécurité juridique en ce qu’aucune disposition ne prévoit de droit d’opposition en faveur des opérateurs économiques concernés.

i)      Principaux arguments des parties

62.      Selon le gouvernement néerlandais, Bavaria et Bavaria Italia, les moyens d’annulation indiqués dans la deuxième sous-question sont fondés.

63.      Bavaria et Bavaria Italia soulignent la différence entre l’article 17 du règlement n° 2081/92 et l’article 7 de ce règlement, qui prévoit expressément un droit d’opposition dans le cadre de la procédure normale d’enregistrement. Le libellé du treizième considérant du règlement n° 692/2003 reconnaît implicitement que l’article 17 du règlement n° 2081/92 est nul. En outre, ces parties estiment que l’arrêt Carl Kühne e.a. (20) ne peut pas s’appliquer en l’espèce dans la mesure où, dans cette affaire, les parties tierces concernées avaient pu jouer un rôle actif dans la procédure nationale au titre de laquelle le gouvernement allemand avait proposé l’enregistrement.

64.      Bayerischer Brauerbund, la Commission et le Conseil, ainsi que les gouvernements allemand, grec et italien contestent l’interprétation proposée par la juridiction de renvoi. Ils font essentiellement valoir que, quoique l’article 17 du règlement n° 2081/92 ne prévoie pas de droit d’opposition dans la ligne de l’article 7, il n’en reste pas moins que les parties tierces concernées sont libres de faire connaître leurs objections aux autorités des États membres qui peuvent alors les déférer au comité mis en place conformément à l’article 15 du règlement, comme cela s’est d’ailleurs passé en l’espèce. Ces parties soulignent également que la raison essentielle de l’abrogation de l’article 17 du règlement n° 2081/92 réside dans le fait qu’il avait à l’origine été conçu comme provisoire et qu’il avait épuisé ses effets.

65.      La Commission et le Conseil soulignent que la légalité de l’article 17 du règlement n° 2081/92 a été reconnue par la Cour à maintes reprises et que la procédure prévue par cet article ne conduit pas à l’absence d’examen diligent des conditions de fond de l’enregistrement, mais plutôt à la situation contraire, comme il ressort de la présente affaire. Ils ajoutent que le treizième considérant du règlement n° 692/2003 fait simplement état de certaines observations relatives aux difficultés pouvant survenir à la suite de l’absence de tout droit d’opposition dans le cadre de l’article 17 du règlement n° 2081/92; ce considérant ne met toutefois pas en question la légalité de cette disposition.

ii)    Appréciation

66.      Contrairement à l’opinion exprimée par le gouvernement néerlandais, Bavaria et Bavaria Italia, on peut déduire de l’arrêt Carl Kühne e.a. (21) que la Cour n’a pas estimé que la procédure simplifiée d’enregistrement visée à l’article 17 du règlement n° 2081/92 serait illégale au motif qu’elle ne permettrait pas aux tiers intéressés de soulever des objections à l’enregistrement proposé, à l’inverse de la procédure normale à laquelle s’applique l’article 7 de ce règlement.

67.      Dans cette affaire, bien que la Cour ait relevé l’absence de droit des tiers de soulever des objections dans le cadre de la procédure d’enregistrement simplifiée, elle a estimé que l’application de cette procédure était légale, même si des tiers avaient soulevé au niveau national des objections sérieuses à l’enregistrement de la dénomination en cause (22). Dans ce contexte, la Cour a également confirmé qu’il appartenait aux juridictions nationales de tenir compte des objections éventuelles soulevées par les tiers qui estiment leurs droits violés par l’enregistrement ou la demande d’enregistrement (23).

68.      Dans ce contexte, comme l’a relevé le gouvernement allemand, les parties intéressées établies dans les autres États membres avaient également la possibilité de soulever des objections devant les autorités compétentes allemandes – ou devant les autorités de leur État membre – à propos de l’enregistrement des IGP concernées, et ce bien que la légalité de l’application de la procédure simplifiée ne dépende pas, comme il ressort de l’arrêt Carl Kühne e.a., de tiers faisant réellement usage de cette possibilité (24).

69.      Des informations dont dispose la Cour, il ressort en outre que Bavaria pouvait en réalité, dans le cadre du processus législatif ayant abouti à l’adoption du règlement n° 1347/2001, faire connaître son opinion à la Commission par l’intermédiaire des autorités néerlandaises et déposer des observations détaillées à cet égard.

70.      Ensuite, s’agissant de l’abrogation de la procédure simplifiée par le règlement n° 692/2003 et du treizième considérant de ce règlement qui renvoie à cette abrogation, je suis d’avis, comme le Conseil et la Commission, que ce considérant ne constitue pas une «reconnaissance», par le législateur communautaire, que la procédure simplifiée ainsi abrogée était illégale. En premier lieu, ce considérant peut simplement être interprété comme la reconnaissance que cette procédure suscitait quelques problèmes en matière de sécurité juridique et de transparence, ce qui ne va pas jusqu’à affirmer qu’elle était illégale pour cette raison. En deuxième lieu et, en tout cas, le point de savoir si une disposition de droit communautaire dérivé, comme l’article 17 du règlement n° 2081/92 est légale, ne dépend pas de la mention éventuelle qu’en fait le législateur communautaire dans le préambule d’un acte communautaire amendant cette disposition.

71.      Par conséquent, le motif d’opposition soulevé contre la validité de l’article 17 du règlement n° 2081/92 n’est pas fondé.

c)      Troisième, quatrième et cinquième sous-questions relatives au défaut éventuel de respect des conditions de procédure

72.      Par ces questions, qu’il est approprié d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en premier lieu, si l’indication «Bayerisches Bier» remplit les conditions d’application de la procédure simplifiée visée à l’article 17 du règlement n° 2081/92, c’est-à-dire si, au moment de l’introduction de la demande d’enregistrement, l’indication en cause était «légalement protégée» ou «consacrée par l’usage», dans l’État membre ayant déposé la demande. En deuxième lieu, la juridiction de renvoi demande si le règlement n° 1347/2001 est nul étant donné que les conditions préalables à l’enregistrement de l’IGP «Bayerisches Bier» n’avaient pas été dûment prises en compte, ni par le gouvernement allemand ni par la Commission, et que la demande d’enregistrement de l’indication n’avait pas été déposée dans les délais.

i)      Principaux arguments des parties

73.      Le gouvernement néerlandais ainsi que Bavaria et Bavaria Italia soutiennent qu’aucune des conditions visées à l’article 17 du règlement n° 2081/92 n’était remplie et que le règlement n° 1347/2001 est nul pour les motifs précisés par la juridiction de renvoi.

74.      S’agissant de la condition relative au fait que l’indication en cause était «légalement protégée», Bavaria et Bavaria Italia soulignent que, au moment de la demande d’enregistrement, il n’existait pas en Allemagne de système applicable spécifiquement à la protection légale des indications géographiques. À cet égard, elles avancent que ni les règles relatives à la concurrence déloyale ni les marques collectives enregistrées sous le nom de «Bayerischer Brauerbund», ne peuvent être considérées comme constituant une protection légale au sens de l’article 17 du règlement n° 2081/92, ce qui est également vrai à propos des traités bilatéraux pour la protection des indications géographiques signés entre la République d’Allemagne et la République française (1960), la République italienne (1963), la République hellénique (1964), la Confédération suisse (1967) et le Royaume d’Espagne (1970) (25).

75.      S’agissant de la condition relative au fait que l’indication en cause est «consacrée par l’usage», Bavaria et Bavaria Italia soutiennent que l’indication «Bayerisches Bier» n’a jamais désigné un produit spécifique: au contraire, elle vise tout type de bière produite en Bavière, même si les caractéristiques de ces bières divergent largement.

76.      Bavaria et Bavaria Italia poursuivent en faisant valoir que, à la lumière des déclarations intervenues au soutien de l’enregistrement et des remarques de fond qu’elles contiennent, il était clair que la demande d’enregistrement n’était pas fondée et que, par conséquent, la vérification entreprise par le gouvernement allemand et la Commission à propos du respect des conditions prévues par le règlement n° 2081/92 était entachée d’une erreur manifeste. Bavaria et Bavaria Italia soutiennent, à cet égard, que la demande initiale se référait de manière générale à tous les types de bières produites en Bavière, n’établissant aucune distinction par rapport à d’autres bières, et que la motivation figurant dans le règlement n° 1347/2001 est inappropriée.

77.      Enfin, Bavaria et Bavaria Italia avancent que les modifications de la demande d’enregistrement, faites après l’expiration du délai fixé à l’article 17 du règlement n° 2081/92, sont matérielles et qu’il est donc légitime de conclure que la demande n’a pas été déposée dans le délai imparti.

78.      Adoptant la position inverse, Bayerischer Brauerbund, la Commission, le Conseil ainsi que les gouvernements allemand, grec et italien soutiennent en substance que les conditions prévues à l’article 17 du règlement n° 2081/92 sont remplies en l’espèce, compte tenu des traités bilatéraux précités et des documents déposés par les autorités allemandes. Le Conseil et le gouvernement italien font valoir qu’il appartient en tout cas aux États membres de déterminer si l’indication était légalement protégée ou consacrée par l’usage. En deuxième lieu, les arguments relatifs à l’examen des conditions préalables à l’enregistrement des IGP et à l’expiration de la période prévue pour le dépôt de la demande d’enregistrement ne sont pas fondés, étant donné que la demande a été examinée avec toute la diligence appropriée et qu’elle a été déposée dans les délais. La Commission souligne, à cet égard, que les éléments essentiels du cahier des charges du produit énumérés à l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92 n’ont jamais été modifiés.

ii)    Appréciation

79.      S’agissant du respect du délai de six mois prévu à l’article 17 du règlement n° 2081/92, qu’il y a lieu d’examiner en premier lieu, il convient de noter, dès l’abord, que les parties ne contestent pas que la demande originale a été déposée par le gouvernement allemand auprès de la Commission le 20 janvier 1994, et donc avant l’expiration dudit délai le 26 janvier 1994.

80.      Concernant les modifications de la demande originaire mentionnées par la juridiction de renvoi et l’échange d’informations entre la Commission et les autorités allemandes ayant eu lieu après l’expiration du délai de six mois, il convient de rappeler que la Cour a déclaré dans l’arrêt Carl Kühne e.a., qui porte également sur une demande déposée par le gouvernement allemand, que, «contrairement à l’article 5 du règlement n° 2081/92, qui prévoit expressément que, dans la procédure normale, la demande d’enregistrement est accompagnée du cahier des charges, l’article 17 du même règlement se limite à imposer aux États membres de communiquer à la Commission quelles sont, parmi leurs dénominations légalement protégées ou, dans les États membres où un système de protection n’existe pas, consacrées par l’usage, celles qu’ils désirent faire enregistrer». La Cour en a conclu que, «dans ces circonstances, l’article 17 du règlement n° 2081/92 ne saurait être interprété comme imposant aux États membres de communiquer, dans le délai de six mois, la version définitive du cahier des charges et des autres documents pertinents, de sorte que toute modification du cahier des charges initialement soumis entraînerait l’application de la procédure normale» (26).

81.      Par conséquent, la Cour a déclaré dans cet arrêt que les modifications en cause (27), intervenant après l’expiration du délai de six mois, n’ont pas rendu illégale l’application de la procédure simplifiée (28).

82.      Dans ce contexte, et compte tenu du degré de précision et de complétude qu’il est réaliste d’attendre des États membres lors du dépôt de la demande initiale dans le délai de six mois visé à l’article 17 du règlement n° 2081/92, il n’apparaît pas que les modifications de la demande d’enregistrement et les documents et les informations supplémentaires fournis par le gouvernement allemand en l’espèce, concernant notamment les variétés de bières visées par la demande, auraient modifié la demande originaire de manière tellement substantielle que la procédure d’enregistrement en aurait été illégale.

83.      Il faudrait noter, à cet égard, que les éléments essentiels du cahier des charges, comme le nom du produit et l’indication géographique «Bayerisches Bier», la description du produit et la délimitation de la zone géographique, sont restés inchangés au cours de la procédure d’enregistrement.

84.      J’en conclus, par conséquent, que la demande d’enregistrement de l’indication «Bayerisches Bier» ne doit pas être considérée comme ayant été déposée en dehors du délai prévu à l’article 17 du règlement n° 2081/92.

85.      Aux fins d’évaluer si les autres moyens soulevés par la juridiction de renvoi en matière de respect des conditions procédurales de la procédure simplifiée sont fondés, il est approprié de rappeler le système de partage des compétences et des obligations dans le cadre du système d’enregistrement établi par le règlement n° 2081/92 entre, d’une part, l’État membre concerné et, d’autre part, la Commission, tel que la Cour a défini ce système dans l’arrêt Carl Kühne e.a. (29).

86.      Selon ce système, il incombe à l’État membre concerné de vérifier, dans le cadre tant de la procédure normale que de la procédure simplifiée, si la demande d’enregistrement est justifiée au regard des conditions édictées par le règlement n° 2081/92 et, lorsqu’il estime que les exigences dudit règlement sont remplies, de la transmettre à la Commission. Celle-ci ne procède qu’à un «simple examen formel» pour vérifier si lesdites exigences sont remplies (30).

87.      La Cour explique ce système de partage des compétences notamment par le fait que l’enregistrement présuppose la vérification de la réunion d’un certain nombre de conditions, ce qui exige, dans une large mesure, des connaissances approfondies d’éléments particuliers à l’État membre concerné, éléments que les autorités compétentes de cet État sont les mieux placées pour vérifier (31).

88.      Dans ce contexte, dans la mesure où la juridiction de renvoi renvoie, en premier lieu, à l’absence de vérification, par le gouvernement allemand, du respect des conditions d’enregistrement de l’indication «Bayerisches Bier», avant le dépôt de la demande, il suffit de noter qu’il appartient aux juridictions nationales de statuer sur la légalité d’une demande d’enregistrement (32).

89.      S’agissant, en deuxième lieu, de la question de savoir si la Commission a correctement rempli sa mission dans le cas d’espèce, à savoir vérifier si les conditions d’enregistrement imposées par le règlement n° 2081/92 étaient remplies, il y a lieu de faire valoir que rien dans le dossier n’indique en général que la Commission s’est déchargée de son obligation d’entreprendre les examens formels requis. Au contraire, comme la Commission et le Conseil l’ont souligné à juste titre, il apparaît que l’indication en cause n’a été enregistrée qu’après une longue procédure de sept années et à la suite de discussions et d’examens approfondis quant au respect des différentes conditions de l’enregistrement. À cet égard, il y a lieu de rappeler que le premier considérant du règlement n° 1347/2001 lui-même indique que des compléments d’informations ont été demandés en vue d’assurer la conformité de l’enregistrement de la dénomination «Bayerisches Bier» aux articles 2 et 4 du règlement n° 2081/92.

90.      À mon avis, la critique générale portant sur le fait que la question du respect des conditions préalables de l’enregistrement au titre de l’article 17 du règlement n° 2081/92 n’a pas été dûment examinée est manifestement infondée.

91.      En ce qui concerne, enfin, la question de la juridiction de renvoi de savoir si l’indication «Bayerisches Bier» est une indication «légalement protégée» ou «consacrée par l’usage» comme requis par l’article 17 du règlement n° 2081/92, il convient à nouveau de noter qu’il incombe aux autorités de l’État membre concerné de procéder à une telle appréciation sur la base de laquelle la Commission peut dûment enregistrer l’indication, à moins qu’elle ne soit entachée d’une erreur manifeste (33).

92.      À cet égard, il faut remarquer en l’espèce que, dans la mesure où Bavaria et Bavaria Italia font valoir qu’il n’existait pas de système en Allemagne spécifiquement conçu pour aborder la question de la protection légale des indications géographiques ou du moins de système ayant un effet ou une finalité comparable, leurs arguments sont, à mon avis, fondés sur une interprétation incorrecte ou, en tout cas, trop étroite de l’article 17, paragraphe 1, du règlement n° 2081/92. Il y a lieu de tenir compte du fait que, au moment où le système de protection communautaire établi par le règlement n° 2081/92 est entré en vigueur, un système de ce type visant à protéger les appellations d’origine et les indications géographiques n’existait pas dans de nombreux États membres, dont l’Allemagne (34). Les notions de dénominations «protégées légalement» et «consacrées par l’usage» ne devraient donc pas être interprétées de manière stricte, étant donné que toute interprétation doit avoir pour effet de permettre aux différents États membres, malgré leurs traditions juridiques différentes, de demander l’enregistrement d’appellations et d’indications dans le cadre de la procédure simplifiée.

93.      Cela étant dit, je suis d’accord avec le gouvernement allemand que les cinq traités bilatéraux sur la protection de l’indication «Bayerisches Bier» mentionnés dans la demande d’enregistrement suffiraient en eux-mêmes pour établir la protection légale de cette désignation en Allemagne aux fins de l’application de la procédure simplifiée.

94.      En outre, il apparaît en tout cas que la Commission a déduit de ces traités, en combinaison avec plusieurs étiquettes de bière contenant la dénomination «Bayerisches Bier» et avec certaines publications que le gouvernement allemand lui avait communiquées, que cette désignation était consacrée par l’usage, conclusion que j’estime pouvoir être tirée valablement, ou en tout cas sans commettre une erreur manifeste. Il y a lieu d’ajouter à cet égard que la protection légale et l’usage d’une dénomination ne sont pas nécessairement des concepts s’excluant réciproquement, étant donné que l’usage d’une dénomination peut même, dans certains systèmes, constituer une condition préalable à sa protection légale.

95.      Il apparaît par conséquent que la Commission pouvait à juste titre conclure que l’indication «Bayerisches Bier» remplissait les conditions pour être protégée légalement ou consacrée par l’usage de manière à assurer l’enregistrement dans le cadre de la procédure simplifiée visée à l’article 17 du règlement n° 2081/92.

96.      Par conséquent, il y a lieu de conclure que les moyens soulevés par la juridiction de renvoi à propos du défaut éventuel de respect des exigences procédurales aux fins de l’application de la procédure simplifiée au titre de l’article 17 du règlement n° 2081/92 ne sont pas fondés.

d)      Sixième et septième sous-questions relatives au non-respect éventuel des exigences de fond visées aux articles 2, paragraphe 2, sous b), 3, paragraphe 1, et 17, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92.

97.      Par ces sous-questions, qu’il est approprié d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande surtout si l’enregistrement de «Bayerisches Bier» en tant qu’IGP pourrait être nul dans la mesure où il s’agit en réalité d’un «terme générique» qui ne révèle aucun «lien direct», au sens de l’arrêt Warsteiner Brauerei (35), entre une qualité déterminée, une réputation ou une autre caractéristique et son origine spécifique (Bavière) et que, par conséquent, les conditions de fond visées aux articles 2, paragraphe 2, sous b), 3, paragraphe 1, et 17, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92 ne sont ainsi pas respectées.

i)      Principaux arguments des parties

98.      Selon le gouvernement néerlandais, Bavaria et Bavaria Italia, les moyens de nullité soulevés dans ces sous-questions sont fondés.

99.      En premier lieu, Bavaria et Bavaria Italia soutiennent que, étant donné que Bavaria est un pays, l’enregistrement d’une IGP contenant le même nom, ce qu’aucun élément particulier ne vient justifier, constitue une violation de l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 2081/92. En deuxième lieu, il n’existe aucun lien direct entre une qualité, une réputation ou une autre caractéristique quelconque de la bière en question et son origine géographique en Bavière.

100. Bavaria et Bavaria Italia soutiennent ensuite que le caractère générique de l’indication «Bayerisches Bier» est dû à la diffusion de la méthode de production bavaroise fondée sur la fermentation basse. Vient, entre autres, corroborer la vérité de cette affirmation l’usage du terme «Bavaria», ou ses traductions dans d’autres langues, en tant qu’élément de dénominations, marques et étiquettes de sociétés du monde entier, y compris l’Allemagne, et en tant que synonyme de bière dans trois États membres au moins (Danemark, Suède et Finlande).

101. Bayerischer Brauerbund, la Commission et le Conseil, ainsi que les gouvernements allemand, grec et italien contestent l’interprétation suggérée par la juridiction de renvoi.

102. En ce qui concerne, plus particulièrement, les conditions fixées par l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 2081/92, la Commission soutient, en premier lieu, qu’il incombe à l’État membre en cause de vérifier qu’elles sont remplies, les contrôles effectués par la Commission et le Conseil étant périphériques et se bornant à constater l’absence d’erreur manifeste.

103. En tout état de cause, ainsi que le soutiennent le Bayerischer Brauerbund, la Commission, le Conseil et les gouvernements allemand et italien, dans le cadre du règlement n° 1347/2001, l’élément déterminant justifiant l’enregistrement de «Bayerisches Bier» en tant qu’IGP n’était pas tant la qualité de la bière ou d’autres caractéristiques, mais bien sa réputation. En outre, il est évident que le terme «pays» renvoie à un État membre ou à un pays tiers, et non à une région.

104. En ce qui concerne la nature générique du terme, ces intervenants sont d’accord que rien dans l’ordonnance de renvoi ne vient invalider le raisonnement exposé dans le préambule du règlement n° 1347/2001. Le gouvernement italien ajoute qu’il s’agit là d’une question qui ne peut être soulevée que dans le cadre de la procédure d’enregistrement et que, en tout cas, Bavaria et Bavaria Italia n’ont pas réussi à démontrer que, au moment où la demande d’enregistrement a été déposée, l’indication était devenue générique. Bayerischer Brauerbund prétend qu’il s’agit là d’une question de fait dont l’appréciation ne relève pas de la compétence de la Cour dans le cadre d’une demande de décision préjudicielle. Le gouvernement allemand se réfère aux traités bilatéraux cités au point 74 ci-dessus pour démontrer que l’indication n’est pas générique.

ii)    Appréciation

105. Pour commencer, il y a lieu de noter que, bien que l’enregistrement dans le cadre de la procédure simplifiée présuppose que le nom en cause respecte les conditions de fond du règlement n° 2081/92, qui découlent de la définition de la notion d’indication géographique visée à l’article 2, paragraphe 2, sous b), de ce règlement ainsi que de l’interdiction d’enregistrer des dénominations devenues génériques prévue aux articles 3, paragraphe 1, et 17, paragraphe 2, dudit règlement (36), et quoique la Commission ait l’obligation de vérifier avant l’enregistrement que la dénomination respecte ces conditions (37), le contrôle juridique matériel de ces questions doit néanmoins rester limité à certains égards.

106. De telles limitations découlent, d’une part, du fait que, comme nous l’avons exposé ci-dessus, la mission de vérifier le respect des conditions de fond du règlement n° 2081/92, qui incombe à la Commission, peut elle-même, compte tenu du partage des compétences entre l’État membre concerné et la Commission, être limitée dans la mesure où une telle vérification exige des connaissances approfondies d’éléments que les autorités compétentes de cet État sont les mieux placées pour vérifier (38).

107. D’autre part, dans la mesure où il incombe en effet à la Commission de vérifier le respect des conditions de fond de l’enregistrement, il convient de noter que, dans la mesure où une telle appréciation implique manifestement des constatations complexes et sensibles, ce qui est particulièrement le cas pour la question de savoir si un terme est utilisé dans un sens générique dans les États membres, la Commission devrait en fait se voir conférer une certaine liberté d’appréciation (39).

108. Dans ce contexte, je ne pense pas que les éléments soulevés par la juridiction de renvoi concernant les conditions de fond du règlement n° 2081/92 établissent que l’enregistrement de la dénomination «Bayerisches Bier» par le règlement n° 1347/2001 devrait être considéré comme invalide.

109. À propos du respect de l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 2081/92, cet article requiert, en premier lieu, l’existence d’un lien direct entre, d’une part, une qualité déterminée, une réputation ou une autre caractéristique du produit et, d’autre part, son origine géographique spécifique (40).

110. À ce propos, comme la Commission et le Conseil l’ont précisé, la décision d’enregistrer la dénomination «Bayerisches Bier» en tant qu’IGP était fondée à l’origine, conformément au cahier des charges déposé, sur la réputation généralement attachée, selon eux, à la bière originaire de Bavière.

111. La Commission a apparemment estimé que cette réputation particulière de la bière produite en Bavière, au moment de l’enregistrement, s’ancrait dans la longue tradition du brassage en Bavière et dans les mesures précoces qui y ont été arrêtées pour garantir une certaine qualité de la production, comme en témoigne par exemple la «Reinheitsgebot» allemande remontant à 1516. J’estime que cette conclusion pouvait légitimement être tirée.

112. L’objection formulée par la juridiction de renvoi selon laquelle aucun produit appelé «Bayerisches Bier» ayant ce lien direct avec son origine n’est actuellement présent sur le marché, alors qu’il existe un large éventail de différents types de bières dont la caractéristique commune est d’avoir été produites par des brasseries en Bavière, semble fondée sur une méprise quant à la nature d’une IGP ainsi que sur une certaine confusion entre la notion d’IGP et celle de marque. L’élément décisif pour l’enregistrement d’une IGP n’est pas la question de savoir si la qualité, la réputation ou une autre caractéristique d’un type ou d’une marque de bière spécifique est due à l’origine géographique de celle-ci, mais plutôt de déterminer si ce lien peut être établi entre la boisson «bière» et l’origine géographique en cause. De la même manière, les IGP ne sont pas conçues pour distinguer un produit ou un producteur spécifique, mais peuvent être utilisées par tous les producteurs et pour tous les produits, en l’espèce pour tous les types de bières qui proviennent de la zone géographique concernée et qui respectent le cahier des charges du produit en cause.

113. En deuxième lieu, la définition de l’indication géographique visée à l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 2081/92 requiert que cette indication contienne le «nom d’une région, d’un lieu déterminé ou, dans des cas exceptionnels, d’un pays».

114. Bien qu’il puisse toujours être exceptionnellement possible d’enregistrer l’IGP en cause, même si Bavaria devait être considéré comme étant un «pays», j’estime que cette opinion, soutenue par Bavaria, Bavaria Italia et le gouvernement néerlandais, doit être rejetée. La Bavière est un Land, et par conséquent l’une des entités fédérales de l’État fédéral allemand, et à ce titre il n’est pas approprié, puisqu’il est évident que l’Allemagne est un pays, de traiter la Bavière comme étant aussi un «pays» au sens de l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 2081/92. Par conséquent, la Bavière devrait plutôt être considérée comme une «région» au sens de cette disposition, une région, pourrait-on ajouter, à l’identité culturelle particulièrement forte et aux traditions spécifiques parmi lesquelles la bière a une place proéminente.

115. Il ne ressort donc pas des éléments invoqués par la juridiction de renvoi que l’enregistrement de «Bayerisches Bier» ne respecterait pas les conditions visées à l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 2081/92.

116. En ce qui concerne la question de savoir si l’indication «Bayerisches Bier» aurait dû être considérée comme un terme générique au sens des articles 3, paragraphe 1, et 17, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92, il y a lieu de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, aux fins d’apprécier le caractère générique d’une dénomination, il est nécessaire «de prendre en compte les lieux de production du produit concerné existant tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’État membre qui a obtenu l’enregistrement de la dénomination en cause, la consommation de ce produit et la manière dont est perçue cette dénomination par les consommateurs à l’intérieur et à l’extérieur dudit État membre, l’existence d’une législation nationale particulière concernant ledit produit ainsi que la façon dont ladite dénomination a été utilisée en droit communautaire» (41).

117. En ce qui concerne plus particulièrement l’argument avancé par la juridiction de renvoi et tiré du fait que l’indication en question a été utilisée historiquement pour désigner, depuis le XIXe siècle, une méthode particulière de production fondée sur la fermentation basse et originaire de Bavière, mais qui s’est depuis répandue dans toute l’Europe, il y a lieu de faire valoir, en premier lieu, que, quand bien même cela serait, de la même manière qu’une dénomination servant à l’origine à relier des produits à une région déterminée peut devenir générique avec le temps, il est possible pour des termes auparavant génériques d’être utilisés à nouveau dans le sens de l’indication géographique du produit, comme cela a été le cas, selon la Commission et le Conseil, pour la dénomination «Bayerisches Bier» après 1940.

118. À cet égard, comme le souligne la Commission et comme il ressort du cinquième considérant du règlement n° 1347/2001, la Commission a invité tous les États membres à fournir des informations concernant l’usage de la dénomination «Bayerisches Bier» ou de parties de celle-ci aux fins d’établir si, dans le cadre de la Communauté prise dans son ensemble, ce terme était générique de par sa nature.

119. Même s’il est vrai que cinq États membres, comme l’ont souligné Bavaria et Bavaria Italia, ont indiqué que cette dénomination ou ses traductions peuvent être devenues génériques dans les États membres considérés, la Commission a estimé, après avoir évalué les preuves qui lui étaient soumises, qu’au Danemark seulement les termes «bajersk» et «bajer» sont sur le point d’être utilisés de manière générique pour désigner la bière.

120. La constatation de la Commission selon laquelle les termes liés à «Bayerisches Bier» deviennent génériques dans un État membre, constatation qui se fonde sur une appréciation de preuves que je ne considère pas comme étant manifestement entachées d’erreurs, ne fait pas en soi obstacle à ce que cette indication puisse faire l’objet d’un enregistrement au titre des articles 3, paragraphe 1, et 17, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92 (42).

121. Par conséquent, les éléments exposés par la juridiction de renvoi ne permettent pas d’étayer la conclusion selon laquelle l’indication «Bayerisches Bier» a été enregistrée contrairement à l’interdiction, visée aux articles 3, paragraphe 1, et 17, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92, d’enregistrer des dénominations qui sont ou sont devenues des termes génériques ou que la Commission aurait dépassé la marge d’appréciation dont elle dispose pour apprécier si cette condition relative à l’enregistrement a bien été respectée.

122. Il s’ensuit que les moyens d’annulation figurant dans les sixième et septième sous-questions ne sont pas fondés.

e)      Huitième sous-question relative à l’absence éventuelle de respect des conditions de fond visées à l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 2081/92

123. Par cette question, la juridiction de renvoi souhaite essentiellement savoir si l’enregistrement de «Bayerisches Bier» n’aurait pas dû être refusé au titre de l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 2081/92, étant donné que, au regard «de la réputation et de la notoriété» de la marque Bavaria ainsi que de la durée de son usage, l’indication «Bayerisches Bier» était «de nature à induire le consommateur en erreur quant à la véritable identité du produit».

i)      Principaux arguments des parties

124. Le gouvernement néerlandais ainsi que Bavaria et Bavaria Italia estiment que cette question appelle une réponse affirmative.

125. Bavaria et Bavaria Italia considèrent que cette question est étroitement liée à la deuxième question relative à la coexistence de l’IGP «Bayerisches Bier» et de la marque «Bavaria». Elles soutiennent que, comme le troisième considérant du règlement n° 1347/2001 réfute tout risque que le consommateur soit induit en erreur au sens de l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 2081/92, un tel risque doit également être rejeté dans le contexte de l’analyse relative à la coexistence des termes précités et que, par conséquent, il y a lieu d’autoriser leur coexistence.

126. Bayerischer Brauerbund, la Commission, le Conseil ainsi que les gouvernements allemand, grec et italien font valoir que la situation visée par l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 2081/92 n’est pas celle de «Bayerisches Bier» et de «Bavaria».

127. La Commission et le Conseil soulignent le large pouvoir d’appréciation laissé aux institutions par l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 2081/92. Comme le gouvernement allemand, ils soulignent que, sur la base des informations et des faits réunis au cours de la procédure et compte tenu du nombre de marques enregistrées contenant le mot «Bavaria» ou des termes similaires, même si l’on ne peut pas conclure que ces marques ont acquis un caractère distinctif grâce à leur usage prolongé et intensif, les preuves produites n’étaient pas suffisantes pour étayer la constatation selon laquelle les consommateurs auraient associé les bières étiquetées «Bavaria» à (aux sociétés) Bavaria et Bavaria Italia, plutôt qu’avec le Land allemand de Bavière. Cela est d’autant plus vrai que de nombreuses bières «bavaroises» et d’autres produits originaires de Bavière portant ce nom étaient disponibles sur le marché à l’époque. Par conséquent, sur la base des informations disponibles, il a été estimé que l’enregistrement de «Bayerisches Bier» ne serait pas de nature à induire en erreur les consommateurs quant à l’identité du produit.

ii)      Appréciation

128. L’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 2081/92 est manifestement conçu pour protéger une marque existant au moment de l’enregistrement, étant donné que cet article interdit l’enregistrement d’une appellation d’origine ou d’une indication géographique lorsque ledit enregistrement est de nature à induire le consommateur en erreur quant à la véritable identité du produit. Je comprends cette disposition en ce sens qu’elle vise à prévenir, pour le consommateur, toute confusion entre un produit portant une IGP et un produit d’une marque donnée.

129. Il appartient au législateur communautaire d’apprécier si c’est le cas, selon les termes mêmes de cette disposition, «compte tenu de la renommée d’une marque, de sa notoriété et de la durée de son usage».

130. En l’espèce, comme il ressort du troisième considérant du règlement n° 1347/2001, le Conseil et la Commission, reconnaissant l’existence de la dénomination «Bavaria» en tant que marque valide, en outre, ont considéré que, en vertu des faits et des informations disponibles, l’enregistrement de «Bayerisches Bier» en tant qu’IGP n’était pas de nature à induire le consommateur en erreur quant à la véritable identité du produit par rapport à la marque «Bavaria».

131. À cet égard, il y a lieu de noter que ni la juridiction de renvoi, ni les parties à la procédure, en particulier Bavaria, Bavaria Italia ou le gouvernement néerlandais, n’ont en réalité produit aucun élément de nature à démontrer dans quelle mesure cette constatation pourrait être erronée.

132. Par conséquent, il suffit de constater qu’il n’est pas contesté que la dénomination «Bavaria» est une marque bien connue et établie qui a été utilisée pendant une longue période, comme Bavaria et Bavaria Italia l’ont elles-mêmes souligné. Il ressort également des mémoires déposés par la Commission et le Conseil que, en vérifiant si les conditions de l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 2081/92 étaient remplies, ils ont particulièrement tenu compte de la durée et de l’intensité de l’usage de la marque Bavaria ainsi que du caractère distinctif qu’elle a ainsi acquis.

133. Dans ce contexte, la constatation selon laquelle l’indication géographique «Bayerisches Bier» et la marque «Bavaria» ne relèvent pas de la situation que l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 2081/92 est censé viser n’apparaît pas erronée ou aller au-delà du pouvoir discrétionnaire dont disposent la Commission et le Conseil pour statuer sur cette question (43), étant donné que plus importante est la renommée ou la réputation d’une marque, et donc plus fort est son caractère distinctif, plus faible sera le risque que les consommateurs seront induits en erreur et attribueront un produit comportant une IGP donnée à cette marque.

134. Par conséquent, le moyen d’invalidité relatif au non-respect éventuel de l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 2081/92 doit être considéré comme non fondé.

f)      Conclusion relative à l’appréciation de la validité

135. Compte tenu des considérations qui précèdent, il y a lieu de faire valoir que cette appréciation n’a rien révélé de nature à établir l’invalidité du règlement n° 1347/2001 ou du règlement n° 2081/92 sur lequel il se fonde.

B –    Seconde question

136. Par la seconde question, soulevée dans l’hypothèse où la première est déclarée irrecevable ou non fondée, la juridiction de renvoi demande en substance quels sont les effets que l’enregistrement de «Bayerisches Bier», en tant qu’IGP, peut avoir sur des marques préexistantes contenant le terme «Bavaria». Elle souhaite, en particulier, apprendre si le règlement n° 1347/2001 doit être interprété en ce sens que l’enregistrement ne peut avoir aucun effet adverse sur la validité ou la possibilité d’utiliser lesdites marques.

1.      Principaux arguments des parties

137. Bavaria et Bavaria Italia font valoir que la coexistence de l’IGP «Bayerisches Bier» avec des marques préexistantes contenant le mot «Bavaria» est expressément autorisée, ce qui lie de manière contraignante les juridictions nationales, conformément au quatrième considérant du règlement n° 1347/2001. En tout cas, au titre des troisième et quatrième considérants du règlement n° 2081/92, les conditions visées en son article 14, paragraphe 2, sont remplies.

138. En premier lieu, elles soulignent que les marques sont antérieures à l’enregistrement de l’IGP, comme l’est d’ailleurs l’usage du terme «Bavaria» dans la dénomination sociale. En deuxième lieu, la validité et la bonne foi des marques ainsi que l’absence de tout risque de confusion ont été confirmées tant par la position adoptée par les différents représentants au cours des travaux préparatoires du règlement n° 1347/2001, exprimée dans plusieurs documents et dans le quatrième considérant du règlement, que par les références constantes aux Pays-Bas en tant que pays d’origine de la bière dans les marques et indications concernées.

139. Le gouvernement néerlandais soutient la position de Bavaria et de Bavaria Italia et fait valoir que, pendant toute la procédure d’enregistrement, la Commission et le gouvernement allemand ont favorisé la coexistence des marques enregistrées «Bavaria» avec l’IGP «Bayerisches Bier», ce qui a été reflété tant dans les procès-verbaux figurant dans le dossier que dans le quatrième considérant du règlement n° 1347/2001. Même s’il incombe à la juridiction nationale d’appliquer l’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92, on ne peut pas raisonnablement prétendre qu’une constatation du législateur communautaire ne soit pas valable à la fois pour la Communauté et les États membres. En toute hypothèse, les juridictions nationales ne peuvent appliquer l’article 14, paragraphe 2, qu’en ce qui concerne la période postérieure à l’enregistrement.

140. D’ailleurs, protéger l’indication «Bayerisches Bier» en tant qu’IGP au motif que ni la Commission ni le Conseil n’ont décelé de conflit avec les marques enregistrées «Bavaria», irait à l’encontre de l’économie générale du règlement n° 2081/92 alors qu’en revanche, si les juridictions nationales estiment qu’il y a conflit, la protection sera octroyée à «Bayerisches Bier» au détriment des marques «Bavaria».

141. Bayerischer Brauerbund et la Commission ainsi que les gouvernements tchèque, allemand, grec et italien insistent au contraire sur le fait qu’en tout état de cause il incombe à la juridiction nationale d’apprécier si les conditions visées à l’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92 sont respectées et, par conséquent, si les marques «Bavaria» peuvent continuer à être utilisées.

142. Le gouvernement tchèque déclare que les paragraphes 2 et 3 de l’article 14 du règlement n° 2081/92 ont des objectifs distincts qui ne peuvent être fusionnés. Alors que le respect de l’article 14, paragraphe 3, doit être apprécié avant l’enregistrement, l’article 14, paragraphe 2, porte sur l’usage d’une marque après l’enregistrement et peut donc amener une juridiction nationale à interdire l’usage d’une marque antérieure.

143. Selon la Commission, le règlement n° 1347/2001 ne reflète aucune position définitive quant à la coexistence de l’IGP «Bayerisches Bier» avec les marques comportant le terme «Bavaria». Selon le gouvernement grec, les considérants de ce règlement montrent bien que les consommateurs ne seront pas induits en erreur.

144. Bayerischer Brauerbund soutient que le troisième considérant du règlement n° 1347/2001 ne se rapporte qu’à l’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 2081/92 et ne peut être appliqué à l’article 14, paragraphe 2, de ce dernier. Selon Bayerischer Brauerbund, les conditions prévues à l’article 14, paragraphe 2, ne sont pas remplies en l’espèce dans la mesure où, en premier lieu, les marques en cause sont de nature à induire en erreur les consommateurs quant à l’origine géographique de la bière concernée et où, en deuxième lieu, les marques n’ont pas été enregistrées de bonne foi, étant donné qu’elles enfreignent les législations nationale et internationale applicables dans l’État d’enregistrement de la marque au moment du dépôt de la demande d’enregistrement.

2.      Appréciation

145. Ainsi qu’il ressort de l’ordonnance de renvoi et des mémoires, en particulier, de Bavaria et de Bavaria Italia, la question de savoir si l’enregistrement de «Bayerisches Bier» en tant qu’IGP par le règlement n° 1347/2001 peut affecter la validité ou la possibilité d’utiliser des marques préexistantes comportant le mot «Bavaria» est soulevée par référence, notamment, aux troisième et quatrième considérants de ce règlement.

146. Par conséquent, il conviendrait de noter, pour commencer, que le préambule d’un acte communautaire vise à décrire la motivation et l’objectif du législateur communautaire quant à l’adoption dudit acte. En tant que tel, le préambule d’un acte communautaire peut donc être utile à la Cour dans la mesure où il expose les raisons de l’adoption de celui-ci aux fins de pouvoir apprécier la validité de l’acte concerné (44), ou, dans la mesure où il illustre l’objet et la finalité d’un acte législatif, il peut également entrer en ligne de compte dans l’interprétation des dispositions clés de cet acte (45).

147. En revanche, le préambule d’un acte communautaire n’a pas de valeur juridique contraignante en lui-même, indépendamment des dispositions clés dudit acte (46).

148. Par conséquent, en l’espèce, les troisième et quatrième considérants du préambule du règlement n° 1347/2001 ne peuvent pas en tant que tels fonder la coexistence de marques comportant «Bavaria» et de l’IGP «Bayerisches Bier».

149. Les effets juridiques entraînés par l’acte d’enregistrement en tant qu’IGP, tel le règlement n° 1347/2001 en l’espèce, sont fixés par le règlement n° 2081/92 sur lequel est fondé cet enregistrement (47). Si et dans quelle mesure l’enregistrement de «Bayerisches Bier» en tant qu’IGP par le règlement n° 1347/2001 est de nature à affecter la validité ou l’usage des marques préexistantes «Bavaria» doit par conséquent être évalué dans le cadre de l’article 14 du règlement n° 2081/92, qui régit spécifiquement les relations entre les dénominations enregistrées au titre de ce règlement et les marques.

150. À ce propos, comme plusieurs parties l’ont fait observer à juste titre, les paragraphes 2 et 3 de l’article 14 du règlement n° 2081/92 ont chacun des objectifs et des fonctions distincts dans le cadre de l’équilibre que ce règlement vise à établir entre, d’une part, les indications géographiques et les appellations d’origine et, d’autre part, les droits sur les marques.

151. En ce qui concerne l’article 14, paragraphe 3, dudit règlement, cette disposition offre, comme nous l’avons indiqué ci-dessus, une protection pour les marques préexistantes dans la mesure où elle empêche l’enregistrement d’une indication ou d’une désignation, dont l’usage entraînerait un risque de confusion avec une marque antérieure (48).

152. L’article 14, paragraphe 3, du règlement n° 2081/92, s’il est correctement appliqué par le législateur communautaire, joue donc le rôle d’une barrière à l’enregistrement des indications et des désignations de nature à être confondues avec une marque existante au sens spécifique de cette disposition, sans toutefois écarter la possibilité que la marque préexistante puisse également entrer en conflit avec la dénomination enregistrée aux fins de l’article 13 du règlement n° 2081/92.

153. Le «test de compatibilité», fondé sur le risque de confusion, tel qu’envisagé par l’article 14, paragraphe 3, dudit règlement, ne permet pas de couvrir toutes les situations dans lesquelles, conformément au domaine de protection offert par cet article, des marques peuvent empiéter sur les dénominations enregistrées au titre de ce règlement. Par exemple, il pourrait y avoir évocation, aux fins de l’article 13, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 2081/92, d’une appellation protégée en l’absence de tout risque de confusion entre les produits concernés, et alors même qu’aucune protection communautaire ne s’appliquerait aux éléments de la dénomination de référence que reprend la terminologie litigieuse (49).

154. Il s’ensuit que la constatation du législateur communautaire en l’espèce, telle qu’indiquée au troisième considérant du règlement n° 1347/2001, et sous-entendant que la condition de l’enregistrement prévue à l’article 14, paragraphe 3, est remplie, ne reflète pas une conclusion contraignante signifiant que l’indication géographique «Bayerisches Bier» peut coexister avec des marques comportant le terme «Bavaria».

155. En revanche, le principe de coexistence est consacré par l’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92, qui prévoit les conditions dans lesquelles une marque antérieure – même si son usage correspond à l’une des situations couvertes par l’article 13 dudit règlement (50) – peut continuer à être utilisée en dépit de l’enregistrement d’une appellation ou d’une indication.

156. Comme son libellé le montre clairement, cette disposition autorise la poursuite de l’usage d’une marque en conflit avec une IGP ou une appellation d’origine, aux fins de l’article 13 du règlement n° 2081/92, uniquement à condition que, en premier lieu, la marque ait été enregistrée de bonne foi avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement de l’appellation d’origine ou de l’indication géographique et, en deuxième lieu, que la marque n’encoure pas les motifs de nullité ou de déchéance prévus aux articles 3, paragraphe 1, sous c) et g), et 12, paragraphe 2, sous b), de la directive sur les marques.

157. En d’autres termes, dans ces circonstances précises, c’est-à-dire lorsque la marque antérieure n’a pas été enregistrée de bonne foi – condition qui, selon l’arrêt Consorzio per la tutela del formaggio Gorgonzola, tourne surtout autour de la question de savoir si la demande d’enregistrement de la marque concernée a tenu compte de l’ensemble de la législation, nationale et internationale, applicable au moment où la demande d’enregistrement de la marque a été déposée – ou, même si elle a été enregistrée de bonne foi, si cette marque n’est pas susceptible d’encourir les motifs de nullité ou de déchéance prévus par les dispositions pertinentes de la directive sur les marques, la protection de l’appellation d’origine ou de l’indication géographique enregistrée prévaut sur la marque antérieure (51).

158. À cet égard, il est important de souligner que la Cour a clairement établi, dans l’arrêt Gorgonzola, qu’il appartient à la juridiction nationale de statuer sur le point de savoir si la marque en cause a été enregistrée de bonne foi et si elle est susceptible d’encourir les motifs de nullité ou de déchéance figurant dans la directive sur les marques (52).

159. Cela implique qu’il n’appartient pas au législateur communautaire de faire cette constatation lorsqu’il procède à l’enregistrement d’une appellation d’origine ou d’une indication géographique au titre du règlement n° 2081/92.

160. Il ressort clairement des considérations qui précèdent qu’en déclarant, au quatrième considérant du règlement n° 1347/2001, que l’usage de certaines marques, comme «Bavaria», peut se poursuivre nonobstant l’enregistrement de l’indication géographique «Bayerisches Bier» dans la mesure où elles remplissent les conditions prévues à l’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92, le législateur communautaire a simplement confirmé la situation juridique résultant en tout état de cause de cet article.

161. Je propose donc de répondre à la seconde question préjudicielle en ce sens que le règlement n° 1347/2001, combiné au règlement n° 2081/92, doit être interprété comme signifiant que l’enregistrement de «Bayerisches Bier» en tant qu’IGP n’affecte ni la validité ni la possibilité d’utiliser des marques préexistantes de parties tierces comportant le mot «Bavaria», pourvu toutefois que ces marques aient été enregistrées de bonne foi et ne soient pas susceptibles d’encourir la nullité ou la déchéance au titre de la directive sur les marques, conformément à l’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92, ce qu’il incombe à la juridiction nationale de vérifier.

V –    Conclusion

162. J’invite par conséquent la Cour à répondre aux questions préjudicielles de la manière suivante:

«1)      L’appréciation de la question préjudicielle n’a pas révélé d’élément de nature à affecter la validité du règlement (CE) n° 1347/2001 du Conseil, du 28 juin 2001, complétant l’annexe du règlement (CE) n° 1107/96 de la Commission relatif à l’enregistrement des indications géographiques et des appellations d’origine au titre de la procédure prévue à l’article 17 du règlement (CEE) n° 2081/92 du Conseil, ou la validité du règlement (CEE) n° 2081/92 du Conseil, du 14 juillet 1992, relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d’origine des produits agricoles et des denrées alimentaires, sur lequel le premier règlement cité se fonde.

2)      Le règlement n° 1347/2001, combiné au règlement n° 2081/92, doit être interprété en ce sens que l’enregistrement de ‘Bayerisches Bier’ en tant qu’indication géographique protégée n’affecte ni la validité ni la possibilité d’utiliser des marques préexistantes appartenant à des tiers et comportant le terme ‘Bavaria’, pourvu toutefois que ces marques aient été enregistrées de bonne foi et ne soient pas susceptibles d’encourir la nullité ou la déchéance au titre de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques, conformément à l’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 2081/92, ce qu’il incombe à la juridiction nationale de vérifier.


1 – Langue originale: l’anglais.


2 – JO L 182, p. 3.


3 – JO L 208, p. 1.


4 –      JO 1989, L 40, p. 1 (ci-après la «directive relative aux marques»).


5 – Règlement du 8 avril 2003 modifiant le règlement n° 2081/92 (JO L 99, p. 1).


6 – Règlement (CE) du 12 juin 1996, relatif à l'enregistrement des indications géographiques et des appellations d'origine au titre de la procédure prévue à l'article 17 du règlement nº 2081/92 du Conseil (JO L 148, p. 1).


7 – Arrêts du 9 mars 1994 (C-188/92, Rec. p. I-833, points 13 à 15, et du 15 février 2001, Nachi Europe (C-239/99, Rec. p. I-1197, point 36).


8 – Voir, à cet égard, arrêts TWD Textilwerke Deggendorf, précité à la note 7, points 16 à 18; Nachi Europe, précité à la note 7, point 37, et du 8 mars 2007, Roquette Frères (C-441/05, Rec. p. I‑1993, point 40.


9 – Voir, notamment, à cet égard, arrêts TWD Textilwerke Deggendorf, précité à la note 7, points 24 et 25; Nachi Europe, précité à la note 7, point 37; Roquette Frères, précité à la note 8, points 40 et 41, et du 12 décembre 1996, Accrington Beef e.a. (C-241/95, Rec. p. I-6699, point 15).


10 – Voir arrêts Roquette Frères, précités, point 41, et Nachi Europe, point 37.


11 – Voir, notamment, à propos de cette condition, arrêt du 5 mai 1998, Dreyfus/Commission (C‑386/96P, Rec. p. I-2309, point 43 et jurisprudence citée).


12 – Voir arrêt du 4 mars 1999, Consorzio per la tutela del formaggio Gorgonzola (C-87/97, Rec. p. I-1301, point 36); voir, également, points 156 à 158 ci-après.


13 – Voir arrêts du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, Rec. p. 197); du 18 mai 1994, Codorníu (C-309/89, Rec. p. I-1853, point 20), et du 25 juillet 2002, Unión de Pequeños Agricultores/Conseil (C-50/00 P, Rec. p. I-6677, point 36).


14 – Arrêt Codorníu, précité à la note 13, points 21 et 22.


15 – Je devrais ajouter que, au cas où la Cour devrait estimer que, dans les circonstances de fait et de droit sous-jacentes au cas d’espèce, qui permettent de soutenir que le règlement en cause suggère lui-même que Bavaria pouvait ne pas être affectée par l’enregistrement concerné, celle-ci aurait néanmoins dû former un recours en annulation et donc, au cas où la Cour devrait adopter une position relativement restrictive quant à la recevabilité des demandes de décision préjudicielle concernant la validité, cela pourrait avoir pour effet d’encourager des recours en annulation «préventifs» sans nécessité, par exemple par des titulaires de marques, ce qui ne serait pas dans l’intérêt d’une administration efficace de la justice dans la Communauté.


16 – Règlement du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier 2002, établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l'Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires (JO L 31, p. 1).


17 – Voir, à cet égard, arrêts du 23 février 1988, Royaume-Uni/Conseil (68/86, Rec. p. 855, point 14); du 23 février 1988, Royaume-Uni/Conseil (131/86, Rec. p. 905, point 19); du 16 novembre 1989, Commission/Conseil (C-131/87, Rec. p. 3743, point 28), et du 5 mai 1998, Royaume-Uni/Commission (C-180/96, Rec. p. I-2265, point 133).


18 – Voir, notamment, arrêts du 17 mars 1993, Commission/Conseil (C-155/91, Rec. p. I-939, points 19 et 21); du 30 janvier 2001, Espagne/Conseil (C-36/98, Rec. p. I-779, point 59), et du 29 avril 2004, Commission/Conseil (C-338/01, Rec. p. I-4829, point 55).


19 – Voir, à cet égard, arrêts du 16 novembre 1989, Commission/Conseil (C-11/88, Rec. p. 3799, point 15), et arrêt Royaume-Uni/Commission, précité à la note 17, points 133 et 134.


20 – Arrêt du 6 décembre 2001 (C-269/99, Rec. p. I-9517).


21 – Précité à la note 20.


22 – Voir, à cet égard, points 35 et 40 dudit arrêt.


23 – Voir, à cet égard, points 41, 57 et 58 de l’arrêt.


24 – Voir point 40 de l’arrêt.


25 – France: BGBl. 1961 II, p. 23 [traité du 8 mars 1960, Recueil des traités des Nations unies (RTNU) 1969 II n° 2064, vol. 747, p. 2]; Italie: BGBl. 1965 II, p. 157 [traité du 23 juillet 1963, Recueil des traités des Nations unies (RTNU) 1967 II n° 1815]; Grèce: BGBl. 1965 II, p. 177 [traité du 16 avril 1964, Recueil des traités des Nations unies (RTNU) 1972 II n° 564, vol. 609, p. 27]; Suisse: BGBl. 1969 II, p. 139, et BGBl. 1965 II, p. 157 (traité du 7 mars 1967); et Espagne: BGBl. 1972 II, p. 110 [traité du 11 septembre 1970, Recueil des traités des Nations unies (RTNU) 1995 II n° 492, vol. 992, p. 87].


26 – Arrêt précité à la note 20, point 32.


27 – Les modifications en cause consistaient, en l'occurrence, à demander l’enregistrement en tant qu’indication géographique plutôt qu’à titre d’appellation d'origine et à modifier la région concernée et la proportion de matières premières pouvant provenir d'autres régions. Voir, à cet égard, conclusions de l’avocat général Jacobs dans cette affaire, précitée à la note 20, points 40 et 44.


28 – Voir points 33 et 34 de cet arrêt.


29 – Précité à la note 20, points 50 à 54.


30 – Ibidem, point 52.


31 – Voir point 53 de cet arrêt.


32 – Voir, à cet égard, points 57 et 58 de cet arrêt.


33 – Voir arrêt Carl Kühne e.a., précité à la note 20, notamment point 60.


34 – Ibidem, point 33; voir aussi, dans ce contexte, arrêt du 25 octobre 2005, Allemagne et Danemark/Commission (C-465/02 et C-466/02, Rec. p. I‑9115, point 98).


35 – Arrêt du 7 novembre 2000 (C-312/98, Rec. p. I-9187).


36 – Voir, à cet égard, notamment, arrêt du 16 mars 1999, Danemark e.a./Commission, (C-289/96, C‑293/96 et C-299/96, Rec. p. I-1541, point 92).


37 – Voir, à cet égard, point 86 ci-dessus et arrêt Danemark e.a./Commission, précité, point 54.


38 – Voir points 85 à 87 ci-dessus et arrêt Carl Kühne e.a., précité à la note 20, points 50 à 54 et 59 et suiv.


39 – Voir, à cet égard, la jurisprudence intervenue dans plusieurs domaines du droit communautaire relativement à l’exercice de leurs compétences par les institutions communautaires dans des matières impliquant des appréciations économiques et/ou sociales complexes: notamment, arrêts du 14 janvier 1997, Espagne/Commission (C-169/95, Rec. p. I-135, point 34); du 19 novembre 1998, Royaume-Uni/Conseil (C-150/94, Rec. p. I-7235, point 49); du 14 décembre 2000, Italie/Commission (C-99/99, Rec. p. I-11535, point 26); du 12 mars 2002, Omega Air e.a., (C-27/00 et C-122/00, Rec. p. I-2569, point 65); du 29 avril 2004, Italie/Commission C-372/97, Rec. p. I‑3679, point 83); et du 12 octobre 2004, Nicoli (C‑87/00, Rec. p. I-9357, point 37).


40 – Voir arrêts Warsteiner Brauerei, précité à la note 35, point 43, et du 7 mai 1997, Pistre e.a (C‑321/94 à C‑324/94., Rec. p. I-2343, point 35).


41 – Voir arrêts du 26 février 2008, Commission/Allemagne (C-132/05Rec. p. I–957, point 53), et Allemagne et Danemark/Commission, précité à la note 34, points 76 à 99.


42 – Voir, à cet égard, arrêt Allemagne et Danemark/Commission, précité à la note 34, points 75 à 84.


43 – Voir points 106 et 107 ci-dessus.


44 – Voir, par exemple, arrêts du 22 janvier 1986, Eridania e.a., (250/84, Rec. p. 117, point 37); du 19 septembre 2002, Huber (C-336/00, Rec. p. I-7699, point 35), et du 9 septembre 2004, Espagne/Commission (C-304/01, Rec. p. I-7655, point 50).


45 – Voir, par exemple, arrêts du 20 septembre 2001, Grzelczyk (C-184/99, Rec. p. I‑6193, point 44) et du 16 octobre 2007, Palacios de la Villa (C-411/05, Rec. p. I-8531, points 42 et 44).


46 – Voir, à cet égard, par exemple, arrêt du 19 novembre 1998, Nilsson e.a. (C-162/97, Rec. p. I‑7477, point 54).


47 – Le fait que la juridiction de renvoi ne se réfère, dans cette question, qu’au règlement n° 1347/2001 n’empêche pas la Cour de tenir compte également du règlement n° 2081/92; voir, à cet égard, notamment, arrêts du 2 février 1994, Verband Sozialer Wettbewerb, dit «Clinique», (C-315/92, Rec. p. I-317, point 7), et du 7 juillet 2005, Weide (C-153/03, Rec. p. I‑6017, point 25).


48 – Voir points 128 et 129 ci-dessus.


49 – Voir arrêt Consorzio per la tutela del formaggio Gorgonzola, précité à la note 12, point 26.


50 – Si ce n’est pas le cas, il n’y a a priori aucun conflit entre la dénomination enregistrée et la marque concernée du point de vue de la protection offerte au titre du règlement n° 2081/92.


51 – Arrêt, précité à la note 12, points 35 et 37.


52 – Ibidem, points 36 et 42.