Language of document : ECLI:EU:T:2022:384

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

22 juin 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale Revolution Vodka – Marque de l’Union européenne verbale antérieure TEQUILA REVOLUCIÓN – Motifs relatifs de refus – Article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement (UE) 2017/1001 – Absence d’usage sérieux – article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑628/21,

Tequila Revolución S.A.P.I. De C.V., établie à Mexico (Mexique), représentée par Me M. Pomares Caballero, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Pétrequin et M. V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Horizons Group (London) Ltd, établie à Reading (Royaume-Uni),

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, MM. S. Frimodt Nielsen et J. Schwarcz (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Tequila Revolución S.A.P.I. De C.V., demande l’annulation et la réformation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 22 juillet 2021 (affaire R 2266/2020-5) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 29 août 2018, RDV Spirits Limited, dont l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, Horizons Group (London) Ltd, est le successeur en droit, a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal Revolution Vodka.

3        La marque demandée désignait le produit relevant de la classe 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant à la description suivante : « Vodka ».

4        Le 5 janvier 2019, la requérante a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée.

5        L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure TEQUILA REVOLUCIÓN, déposée le 10 novembre 2010 et enregistrée le 25 mars 2011, désignant les produits et les services relevant des classes 32, 33 et 43, correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 32 : « Bières ; eaux minérales, gazeuses, jus de fruits » ;

–        classe 33 : « Tequila » ;

–        classe 43 : « Restaurants, bars, snacks ».

6        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement (UE) 2017/1001, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        À la suite de la demande formulée par l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours, l’EUIPO a invité la requérante à apporter la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure invoquée à l’appui de l’opposition. Cette dernière a déféré à ladite demande dans le délai imparti et a également présenté postérieurement des éléments de preuve additionnels.

8        Le 7 octobre 2020, la division d’opposition a rejeté l’opposition, ayant considéré que la requérante n’avait pas démontré l’usage sérieux de la marque antérieure dans l’Union européenne pendant la période de cinq ans précédant la demande d’enregistrement de la marque demandée, à savoir du 29 août 2013 au 28 août 2018 inclus (ci-après la « période pertinente »).

9        Le 30 novembre 2020, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

10      Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours, en substance, au motif que l’usage de la marque antérieure démontré par la requérante n’était qu’un usage symbolique, minime ou fictif, confirmant l’appréciation de la division d’opposition selon laquelle les éléments de preuve produits par la requérante n’étaient pas suffisants en ce qui concerne l’intensité de l’usage de la marque antérieure.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        réformer la décision attaquée en constatant que l’usage de la marque antérieure a été réel et suffisant ;

–        réformer la décision attaquée en constatant que l’opposition est fondée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

12      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité du troisième chef de conclusions de la requérante

13      Par son troisième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal, en substance, de juger que l’opposition est fondée.

14      À cet égard, selon la jurisprudence, le pouvoir de réformation reconnu au Tribunal n’a pas pour effet de conférer à celui-ci le pouvoir de substituer sa propre appréciation à celle de la chambre de recours et, pas davantage, de procéder à une appréciation sur laquelle ladite chambre n’a pas encore pris position. L’exercice du pouvoir de réformation doit par conséquent, en principe, être limité aux situations dans lesquelles le Tribunal, après avoir contrôlé l’appréciation portée par la chambre de recours, est en mesure de déterminer, sur la base des éléments de fait et de droit tels qu’ils sont établis, la décision que la chambre de recours était tenue de prendre (arrêt du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI, C‑263/09 P, EU:C:2011:452, point 72). Or, en l’espèce, la chambre de recours a rejeté l’opposition uniquement sur la base de l’absence de preuve d’usage sérieux de la marque antérieure, sans procéder à une analyse additionnelle de l’opposition.

15      Partant, il convient de rejeter le troisième chef de conclusions de la requérante comme irrecevable.

 Sur le fond

16      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique tiré de la violation de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001. Elle soutient, en substance, que la chambre de recours a commis une erreur dans l’appréciation des preuves d’usage de la marque antérieure, en omettant de les évaluer de manière globale.

17      L’EUIPO conteste les allégations de la requérante.

18      Aux termes de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, sur requête du demandeur, le titulaire d’une marque de l’Union européenne antérieure qui a formé opposition apporte la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la date de dépôt ou la date de priorité de la demande de marque de l’Union européenne, la marque de l’Union européenne antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage, pour autant que, à cette date, la marque antérieure soit enregistrée depuis cinq ans au moins. À défaut d’une telle preuve, l’opposition est rejetée. Si la marque de l’Union européenne antérieure n’a été utilisée que pour une partie des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée, elle n’est réputée enregistrée, aux fins de l’examen de l’opposition, que pour cette partie des produits ou des services.

19      Selon une jurisprudence constante, il ressort, en substance, de l’article 47, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001, lu à la lumière du considérant 24 du même règlement, que l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux pour être opposable à une demande de marque de l’Union européenne vise à limiter les conflits entre deux marques, à moins qu’il n’existe un juste motif économique à l’absence d’usage sérieux de la marque antérieure découlant d’une fonction effective de celle-ci sur le marché. En revanche, lesdites dispositions ne visent ni à évaluer la réussite commerciale ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [voir, en ce sens, arrêt du 17 janvier 2013, Reber/OHMI – Wedl & Hofmann (Walzer Traum), T‑355/09, non publié, EU:T:2013:22, point 25 et jurisprudence citée].

20      Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (voir, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43).

21      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque [arrêt du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, EU:T:2004:225, point 40 ; voir également, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43].

22      Quant à l’importance de l’usage qui a été fait de la marque antérieure, il convient de tenir compte, notamment, du volume commercial de l’ensemble des actes d’usage, d’une part, et de la durée de la période pendant laquelle des actes d’usage ont été accomplis ainsi que de la fréquence de ces actes, d’autre part [arrêts du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, EU:T:2004:223, point 35, et du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 41].

23      Pour examiner, dans un cas d’espèce, le caractère sérieux de l’usage d’une marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte. Ainsi, un faible volume de produits commercialisés sous ladite marque peut être compensé par une forte intensité ou une grande constance dans le temps de l’usage de cette marque, et inversement (arrêts du 8 juillet 2004, HIPOVITON, T‑334/01, EU:T:2004:223, point 36, et du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 42).

24      Le chiffre d’affaires réalisé ainsi que la quantité de ventes de produits sous la marque antérieure ne sauraient être appréciés dans l’absolu, mais doivent l’être en rapport avec d’autres facteurs pertinents, tels que le volume de l’activité commerciale, les capacités de production ou de commercialisation ou le degré de diversification de l’entreprise exploitant la marque ainsi que les caractéristiques des produits ou des services sur le marché concerné. De ce fait, il n’est pas nécessaire que l’usage de la marque antérieure soit toujours quantitativement important pour être qualifié de sérieux (arrêts du 8 juillet 2004, HIPOVITON, T‑334/01, EU:T:2004:223, point 36, et du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 42). Un usage, même minime, peut donc être suffisant pour être qualifié de sérieux, à condition qu’il soit considéré comme justifié, dans le secteur économique concerné, pour maintenir ou créer des parts de marché pour les produits ou les services protégés par la marque. Ainsi, il n’est pas possible de dire a priori, de façon abstraite, quel seuil quantitatif devrait être retenu pour déterminer si l’usage avait ou non un caractère sérieux, de sorte qu’une règle de minimis, qui ne permettrait pas à l’EUIPO ou, sur recours, au Tribunal d’apprécier l’ensemble des circonstances du litige qui leur est soumis, ne saurait être fixée (arrêt du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 72).

25      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’évaluer si la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en estimant que les éléments de preuve produits par la requérante ne démontraient pas un usage sérieux de la marque antérieure.

 Sur les éléments de preuve pris en compte par la chambre de recours

26      Il convient de constater que, ainsi qu’il ressort des points 5 et 8 de la décision attaquée, la chambre de recours a tenu compte de l’ensemble des éléments de preuve présentés par la requérante devant l’EUIPO, c’est-à-dire tant des éléments de preuve qui ont été présentés devant la division d’opposition le 9 décembre 2019 et le 13 juillet 2020 que des éléments de preuve complémentaires présentés pour la première fois devant la chambre de recours.

27      À cet égard, ainsi qu’il ressort des points 14 à 19 de la décision attaquée, la chambre de recours a procédé, conformément à l’article 95, paragraphe 2, du règlement no 2017/1001, lu en combinaison avec l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), à une appréciation de la recevabilité des éléments de preuve complémentaires présentés pour la première fois devant elle, en concluant qu’ils semblaient, à première vue, pertinents pour l’issue du litige et qu’ils venaient compléter ceux déjà produits devant la division d’opposition. Dans ces circonstances, elle les a jugés tous recevables, ce qui n’est, d’ailleurs, pas contesté dans la présente procédure. Partant, le Tribunal tiendra compte de l’ensemble de ces éléments de preuve, tels qu’énumérés aux points 5 et 8 de la décision attaquée.

 Sur l’usage sérieux de la marque antérieure

28      La chambre de recours a analysé les preuves de l’usage sérieux de la marque antérieure aux points 24 à 68 de la décision attaquée, en subdivisant son appréciation en deux volets, le premier portant sur le lieu et la durée de l’usage et le second sur l’intensité de celui-ci.

–       Sur le lieu et la durée de l’usage

29      En premier lieu, ainsi qu’il ressort du point 26 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que, en raison de la date de dépôt de la demande de marque contestée, à savoir le 29 août 2018, la requérante était tenue de prouver que la marque antérieure avait fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pendant la période pertinente (voir, également, point 8 ci-dessus).

30      En second lieu, la chambre de recours a examiné le lieu et la durée de l’usage de la marque antérieure aux points 36 à 44 de la décision attaquée. Tout d’abord, d’une part, elle a constaté que, étant donné que cette marque était une marque de l’Union européenne, l’usage devait être démontré sur le territoire de l’Union. D’autre part, elle a souligné que, néanmoins, les frontières du territoire devaient être ignorées lors de l’appréciation de l’usage sérieux dans l’Union.

31      Ensuite, s’agissant de la durée de l’usage, la chambre de recours a considéré qu’il convenait non pas d’examiner si la marque antérieure avait fait l’objet d’un usage continu au cours de la période pertinente, mais de s’assurer que celle-ci avait fait l’objet d’un usage sérieux pendant cette période, et plus particulièrement d’apprécier si l’étendue et la fréquence de l’usage de cette marque étaient de nature à démontrer sa présence sur le marché d’une manière effective et constante dans le temps.

32      À cet égard, la chambre de recours a considéré, premièrement, que le certificat d’enregistrement de la marque mexicaine REVOLUCIÓN, sous le numéro 492167, pour des produits relevant de la classe 33 et le certificat de cession de cette marque en faveur de la requérante n’établissaient aucunement l’usage de la marque antérieure. Selon la chambre de recours, il en était de même en ce qui concerne la photographie de la médaille d’or attribuée lors du concours mondial de vins de Bruxelles en 1998 pour « TEQUILA REVOLUCIÓN », qui, d’une part, portait sur un fait se situant en dehors de la période pertinente et, d’autre part, n’indiquait pas quel avait été le lieu d’usage effectif de la marque.

33      Deuxièmement, la chambre de recours a constaté que les certificats d’authenticité émis par le Consejo Regulador del Tequila A.C. (Conseil régulateur de la tequila) étaient destinés à des clients établis aux États-Unis, au Mexique, au Costa Rica, à Hong-Kong et au Guatemala, c’est-à-dire hors du territoire pertinent. De plus, ils ne prouveraient pas que les produits avaient été exportés depuis l’Union. En outre, les quatre certificats destinés à un client établi au Royaume-Uni et datés du 13 septembre 2018 ne seraient pas pertinents, cette date se situant en dehors de la période pertinente.

34      Troisièmement, concernant les factures adressées à Brands of Switzerland BoS GmbH, société de droit suisse, par la requérante, dont la chambre de recours a rappelé que le siège était au Mexique, elles ne démontreraient pas non plus un usage de la marque antérieure dans l’Union. S’agissant de certaines autres factures produites, dont certaines également avec des certificats d’exportation, selon la chambre de recours, leurs dates étaient situées en dehors de la période pertinente et ne confirmaient donc pas l’usage de la marque antérieure durant celle-ci.

35      Dès lors, la chambre de recours a confirmé, au point 42 de la décision attaquée, le constat de la division d’opposition selon lequel les conditions relatives à la durée et au lieu d’utilisation de la marque antérieure n’étaient remplies que pour les factures constituant les annexes nos 48 et 49 des éléments de preuve produits le 3 octobre 2019, à savoir, respectivement, une facture du 15 décembre 2015 émise par Brands of Switzerland BoS agissant avec le consentement de la requérante, adressée à Hamberger Grossmarkt Berlin GmbH & Co. K, établie en Allemagne, concernant la vente sous la marque antérieure de 48 bouteilles pour un montant de 1 363,28 euros et une facture du 5 mars 2014, émise par la même société et adressée à Selection Prestige GmbH, établie en Allemagne, concernant la vente sous la marque antérieure de 30 bouteilles pour un montant de 1 201,66 euros, ainsi qu’en ce qui concerne les annexes nos 1 à 5 des éléments de preuve produits le 13 juillet 2020.

36      Les éléments de preuve du 13 juillet 2020 contenaient, premièrement, une attestation, en espagnol et en français, datée du 15 juin 2020, émanant de M. A. H., Directeur Commercial de Dufry México S.A. de C.V., société dont l’activité était la vente de produits dans les boutiques hors taxe dans les principaux aéroports du Mexique, dont la tequila REVOLUCIÓN (annexes nos 1 et 2). Il y est attesté que cette société commercialisait des produits de la requérante au Mexique ainsi qu’aux États-Unis et au Costa Rica. Selon cette déclaration, entre 2016 et 2019, « Dufry a vendu, hors taxe, dans les magasins des aéroports au Mexique, la tequila mentionnée sous la marque REVOLUCIÓN au Royaume-Uni, en France, en Espagne, en Russie, en Allemagne, en Italie, en Pologne et en Suède à des personnes de nationalité européenne, pour une valeur de 566 895 USD ».

37      Deuxièmement, les éléments de preuve du 13 juillet 2020 incluaient une copie du contrat de distribution exclusif conclu entre Brands of Switzerland BoS, en tant que distributeur, et la requérante dans le courant du mois d’octobre 2012, relatif à la distribution de produits sous la marque antérieure en Allemagne, en Suisse et en Autriche ainsi que dans tous les pays de l’Union durant la première année de ce contrat (annexe no 3).

38      Troisièmement, lesdits éléments de preuve incluaient une facture du 12 mai 2014, émise par la requérante et adressée à un client en Espagne, à savoir Agavus Trade SL, qui concernait la vente de 462 bouteilles de tequila pour 4 703 USD (soit environ 4 013 euros) (annexe no 4).

39      Quatrièmement, les éléments de preuve du 13 juillet 2020 incluaient trois factures émises par Agavus Trade et adressées à des clients établis en Espagne, en 2014 et en 2015, concernant la revente des bouteilles mentionnées au point 38 ci-dessus (annexe no 5). Au total, elles portent sur la vente de 24 bouteilles pour un montant de 585,23 euros. Par ailleurs, une facture adressée à un client établi en Norvège était également incluse dans lesdits éléments de preuve.

40      Au point 43 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté, en ce qui concerne certaines preuves supplémentaires présentées pour la première fois devant elle (voir points 26 et 27 ci-dessus), que les diverses campagnes publicitaires invoquées par la requérante, ayant eu lieu, notamment, sur Internet, étaient relatives à la période comprise entre les années 2010 et 2019 et que les tableaux concernant des exportations mondiales ne relevaient pas de la période pertinente, puisqu’ils étaient relatifs au mois de mars 2020.

41      Finalement, au point 44 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que l’extrait du catalogue intitulé « TEQUILA REVOLUCIÓN » affichait les prix en dollars, ce qui situait la vente des produits en dehors de l’Union.

–       Sur l’intensité de l’usage

42      La chambre de recours a constaté, aux points 45 à 68 de la décision attaquée, à titre liminaire, que les objections soulevées par la division d’opposition portaient sur l’exigence d’intensité de l’usage de la marque antérieure, l’importance économique de celui-ci n’étant, selon elle, pas démontrée. La requérante contestait les conclusions de la division d’opposition, notamment au regard des volumes de ventes et des frais de publicité.

43      À cet égard, la chambre de recours a constaté, en se référant aux éléments de preuve visés au point 35 ci-dessus, premièrement, que les deux factures produites en tant qu’annexes nos 48 et 49 établissaient une vente de 78 bouteilles de tequila pour un montant total de 2 564,94 EUR sur une période de 21 mois. Compte tenu de la taille du marché européen et de la nature des produits, qui seraient de consommation relativement courante, il s’agissait, selon la chambre de recours, d’une quantité minime.

44      Deuxièmement, la chambre de recours a relevé que la facture produite en tant qu’annexe no 4 des éléments de preuve produits le 13 juillet 2020 démontrait la vente de 462 bouteilles pour un montant de 4 703 USD. De plus, les trois factures produites en tant qu’annexe no 5 des éléments de preuve produits le 13 juillet 2020 porteraient sur la vente de 24 bouteilles revendues par Agavus Trade à des clients établis en Espagne, ce qui ne pourrait être qualifié que d’usage symbolique dans l’Union.

45      Troisièmement, la chambre de recours a souligné, en ce qui concerne les données et dépenses déclarées par la requérante, que les déclarations sur l’honneur fournies par un employé de la partie concernée constituaient des preuves valables, mais devaient être corroborées par d’autres éléments. En l’espèce, la chambre de recours a constaté, s’agissant de la déclaration sous serment produite par la requérante (annexes nos 1 et 2 des éléments de preuve produits le 13 juillet 2020, voir point 36 ci-dessus), en substance, que celle-ci ne possédait qu’une faible valeur probante et n’était pas corroborée par des documents indépendants. Elle a, en outre, écarté les données fournies par la requérante relatives, d’une part, aux dépenses de publicité et, d’autre part, aux volumes de ventes de tequila dans plusieurs États membres, en ce qu’elles n’étaient corroborées par aucun autre élément de preuve objectif. En ce qui concerne spécifiquement les frais de publicité, la chambre de recours a relevé que la requérante n’avait fourni aucune information relative à l’importance et à l’étendue de cette publicité, ni au territoire où celle-ci s’était matérialisée.

46      Enfin, quatrièmement, la chambre de recours a indiqué qu’il n’existait en l’espèce aucun rapport annuel ni aucune preuve concernant le volume commercial de l’exploitation de la marque antérieure (hormis les tableaux figurant parmi les documents produits devant la chambre de recours, visés au point 40 ci-dessus), bien que de tels éléments eussent pu aisément être fournis. De surcroît, la requérante n’aurait pas invoqué des raisons valables l’empêchant de présenter de telles preuves. Partant, la chambre de recours a conclu que l’usage de la marque antérieure démontré par la requérante n’était pas plus qu’un usage symbolique, minime ou fictif et que les preuves produites n’étaient donc pas suffisantes en ce qui concerne l’intensité de l’usage.

47      Selon la requérante, premièrement, la chambre de recours n’aurait pas tenu compte de ses efforts de marketing ni des preuves concrètes portant sur les publicités visant la marque antérieure. Or, la requérante avance que la fonction publicitaire ou de communication au marché est l’une des fonctions les plus importantes des marques. La combinaison des preuves de facturation et des efforts de marketing permettaient, selon elle, de démontrer l’usage sérieux de la marque antérieure.

48      Deuxièmement, la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir pris en compte certaines factures présentées en considérant qu’elles n’étaient pas significatives. La requérante avance, en substance, qu’il n’existait pas de montants seuils, en dessous desquels l’usage de la marque antérieure ne pouvait pas être considéré comme étant sérieux, mais qu’il convenait d’analyser au cas par cas les situations pertinentes, tenant compte du secteur concerné et des produits ou des services en cause.

49      Troisièmement, la requérante prétend que la chambre de recours n’a pas pris en compte « l’effort du travail de vente », qui aurait débuté au Mexique et aurait porté jusqu’à l’Union.

50      Quatrièmement, la requérante explique que la tequila est considérée comme « l’ambassadrice du Mexique au sein du marché des spiritueux ». Elle souligne l’influence de la déclaration de la dénomination d’origine de la tequila et la déclaration du « paysage de l’agave comme patrimoine de l’humanité » par l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) en 2006. La requérante invoque le fait que le Conseil régulateur de la tequila est l’organisme de certification, disposant de pouvoirs délégués par le gouvernement mexicain pour certifier la qualité de la tequila et garantir le respect des spécifications établies par la norme officielle mexicaine « NOM-06-SCFI-2012 ». Elle souligne l’existence de deux certifications pour la tequila, à savoir « tequila » et « tequila 100 % Agave ». Dans ce contexte, la requérante indique avoir créé la marque antérieure et avoir consacré des efforts à sa commercialisation au Mexique depuis 1995.

51      Cinquièmement, la requérante avance que, en Europe, elle a commencé la promotion de la marque antérieure en 1998, ayant obtenu la médaille d’or au concours mondial de Vins de Bruxelles. Elle souligne qu’elle a créé au Mexique une société visant à produire des tequilas « super-premium » et des tequilas « ultra-premium ». La chambre de recours n’aurait pas pris en compte le fait que la marque REVOLUCIÓN était une marque internationale, présente dans de nombreuses régions du monde, utilisée « notamment pour distinguer TEQUILA » et jouissant d’une « réputation remarquable ». La marque REVOLUCIÓN est protégée, selon la requérante, au Mexique, aux États-Unis, dans l’Union, en Russie, en Nouvelle-Zélande, au Guatemala, au Costa-Rica, en Colombie et en Corée du Sud. Elle aurait été utilisée pour distinguer ses ventes et ses approvisionnements en tequila. Tous les produits commercialisés sous la marque antérieure seraient des produits « premium », c’est-à-dire « Tequila 100 % Agave ». Le site Internet TEQUILA REVOLUCIÓN serait indicatif du caractère international de l’entreprise de la requérante.

52      Sixièmement, la requérante soutient, en se basant sur des informations compilées par le Conseil régulateur de la tequila, que les ventes mondiales de tequila dépassent 350 millions de litres par an. Le principal marché serait celui des États-Unis. Le marché de l’Union représenterait une proportion relativement faible des ventes mondiales de tequila. La requérante présente des tableaux portant sur les ventes de différents types de tequila dans l’Union et aux États-Unis, basés sur des statistiques portant sur la période allant du 9 mars 2015 au 9 mars 2020.

53      Septièmement, la requérante avance que la chambre de recours n’a pas pris en considération le fait que le modèle commercial pour son expansion dans l’Union consistait initialement à faire appel à des distributeurs qui recevaient les produits désignés par la marque antérieure pour les revendre dans l’Union. Ainsi, la requérante avance avoir conclu un contrat de distribution exclusive avec Brands of Switzerland BoS, pour une durée d’un an, contenant une clause de prorogation automatique de deux ans en cas de non-résiliation 180 jours avant l’expiration du contrat. Le contrat mentionnait, selon la requérante, que « le territoire comprenait l’Allemagne et l’Autriche ».

54      Huitièmement, la requérante met en exergue des statistiques portant sur des publicités par le biais de sites Internet présentant un lien avec la marque antérieure. Les données indiqueraient tant l’emplacement des utilisateurs (au sein de l’Union), le nombre de fichiers (ainsi que le nombre de pages) transmis aux utilisateurs, le nombre de demandes adressées au serveur desdits sites ou encore le trafic total au départ desdits sites vers des États membres durant les années 2018 et 2019.

55      Neuvièmement, la requérante avance que la chambre de recours n’a pas pris en considération des ventes dans des magasins hors taxe ayant eu lieu au Mexique et qui concernaient des produits exportés vers l’Union. Elle invoque la déclaration sous serment signée de M. A. H., directeur de Dufry México, société établie notamment à l’aéroport international de Mexico, filiale de la société Dufry International. Celui-ci aurait attesté que, entre 2016 et 2019, ladite société avait vendu en franchise, dans les magasins situés dans les aéroports du Mexique, de la tequila sous la marque antérieure à des personnes résidant dans l’Union pour une valeur de 566 895 USD. Le volume des ventes vers l’Union démontrerait la réputation mondiale de la marque antérieure.

56      Dixièmement, la requérante renvoie à des recherches effectuées sur le moteur de recherche Google pour démontrer la réputation de la marque antérieure, au niveau mondial, pour la tequila, ou encore aux réseaux sociaux Facebook, Twitter, YouTube et Instagram, sur lesquels des publicités pour la marque antérieure auraient été diffusées et ladite marque serait suivie par une multitude d’internautes. Elle donne des exemples de vidéos, dont le coût aurait été élevé et qui auraient été produites par des artistes renommés, et soutient les avoir présentées sur lesdits réseaux sociaux en rapport avec la marque antérieure. Elle invoque également des événements promotionnels retransmis sur ces réseaux sociaux en rapport avec des événements de sponsoring. Selon la requérante, tous les comptes sur les médias sociaux liés à la marque antérieure étaient accessibles aux consommateurs de l’Union depuis le 9 mars 2015.

57      Onzièmement, la requérante fait valoir que l’ensemble de ces éléments démontraient une utilisation sérieuse de la marque antérieure, visant à surmonter différents obstacles à la commercialisation dans l’Union des produits désignés par celle-ci, incluant celui lié à la perception de la tequila « super premium » et « ultra-premium » comme un produit de haut de gamme dont le coût doit être élevé. Plusieurs articles publiés sur Internet démontreraient que le marché international de la tequila « super premium » et « ultra-premium » était petit mais en croissance rapide, à mesure que la tequila gagnait en reconnaissance même en dehors du Mexique et des États-Unis.

58      Enfin, douzièmement, la requérante avance que la chambre de recours aurait dû tenir compte de ses efforts constants visant à se développer au niveau mondial selon ses propres capacités, ce qui se serait traduit, dans l’Union, par une croissance certes lente, en raison du caractère « premium » du produit en cause, mais progressive, tenant compte des accords avec des distributeurs établis en Suisse, au Royaume-Uni et en France. Ces efforts, bien qu’actuellement limités, devaient augmenter dans le futur. La requérante fait notamment valoir qu’il suffit que la preuve de l’usage d’une marque démontre que son titulaire s’est sérieusement efforcé d’acquérir ou de maintenir une position commerciale sur le marché en cause et n’a pas utilisé ladite marque uniquement dans le but de préserver les droits conférés par celle-ci.

59      Selon la requérante, il ressort de la jurisprudence que, pour être qualifié de « sérieux », l’usage ne devait pas s’étendre sur une période minimale. En particulier, il n’était pas nécessaire que l’usage soit étendu sur l’ensemble des cinq années de la période pertinente, mais il suffisait qu’il se situe en son début ou à sa fin, sous réserve d’être sérieux.

60      L’EUIPO conteste les allégations de la requérante.

61      À titre liminaire, il convient de constater que les preuves de l’usage de la marque antérieure présentées par la requérante concernent uniquement le produit dénommé « Tequila », relevant de la classe 33, et non les autres produits ou services visés par cette marque (voir point 5 ci-dessus).

62      S’agissant de ce produit, les allégations présentées par la requérante devant le Tribunal n’invalident pas, dans leur ensemble, les appréciations de la chambre de recours résumées aux points 26 à 46 ci-dessus ni sa conclusion portant sur l’absence d’éléments de preuve suffisants pour démontrer un usage sérieux de la marque antérieure.

63      En effet, en premier lieu, il convient de constater que c’est à juste titre que la chambre de recours a écarté certains éléments de preuve, dès lors que ceux-ci ne présentaient pas de lien avec le territoire de l’Union et/ou ne concernaient pas la période pertinente. Partant, c’est à bon droit que la chambre de recours a examiné, en particulier, les éléments rappelés aux points 35 à 40 ci-dessus.

64      En deuxième lieu, s’agissant, plus particulièrement, des allégations de la requérante portant sur le fait que la chambre de recours n’aurait pas tenu compte de ses efforts de marketing ni des preuves concrètes portant sur les publicités relatives à la marque antérieure, il convient de les écarter comme non fondées. D’abord, certains éléments de preuve présentés dans ce contexte concernent une période éloignée de la période pertinente, telle la preuve portant sur la médaille d’or obtenue au concours mondial de vins de Bruxelles en 1998 (voir point 51 ci-dessus), sans qu’il soit possible de considérer qu’elle démontre l’usage sérieux de cette marque durant la période pertinente. Il en est de même de quatre certificats destinés à un client au Royaume-Uni portant la date du 13 septembre 2018 (voir point 33 ci-dessus). Ensuite, les références, premièrement, au fait que la tequila soit considérée comme « l’ambassadrice du Mexique au sein du marché des spiritueux », deuxièmement, à l’influence de la déclaration de la dénomination d’origine de la tequila et, troisièmement, à la norme officielle mexicaine pour sa production et à certaines déclarations de l’UNESCO concernant le paysage de l’agave (voir point 50 ci-dessus) n’ont pas de pertinence dans l’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque antérieure sur le territoire de l’Union.

65      Enfin, la chambre de recours a relevé à juste titre qu’une large partie des documents présentés concernaient un territoire hors de l’Union, tels que des certificats d’authenticité émis par le Conseil régulateur de la tequila, qui étaient destinés à des clients établis aux États-Unis, au Mexique, au Costa Rica, à Hong-Kong et au Guatemala, et non dans l’Union (voir point 33 ci-dessus).

66      Il en est de même en ce qui concerne les éléments de preuve présentés par la requérante portant sur des sites Internet et sur des réseaux sociaux, et renvoyant à la marque antérieure (voir point 56 ci-dessus). En effet, ces éléments relevant du secteur numérique pouvaient viser, notamment, les marchés mentionnés au point 65 ci-dessus et il n’est pas démontré que les consommateurs de l’Union suivaient la marque antérieure sur les réseaux sociaux YouTube, Instagram, Facebook ou Twitter, ou d’autres réseaux sociaux, ou encore, au moyen des recherches sur le moteur de recherche Google, telles que mentionnées dans les éléments de preuve. Si certains chiffres ont été présentés comme indicatifs du trafic total desdits sites Internet vers des États membres durant les années 2018 et 2019 (voir point 54 ci-dessus), il convient de constater que, même à considérer ces chiffres comme démontrés, ils ne portent pas uniquement sur la période pertinente, mais peuvent relever d’une période qui la suivait directement, ce qui ne permet pas d’en tirer des conclusions décisives en l’espèce. En tout état de cause, ils ne confirment pas un usage visant le territoire de l’Union. À cet égard, il y a lieu de relever qu’il s’agit de sites en anglais pouvant viser notamment le marché des États-Unis, aucun élément ne permettant d’affirmer qu’ils cibleraient spécifiquement un public dans l’Union. Une même conclusion s’applique également s’agissant des événements promotionnels retransmis sur divers réseaux sociaux en rapport avec des événements de sponsoring, dont l’impact sur le marché de l’Union n’est pas suffisamment démontré. Partant, ne saurait être décisif l’argument de la requérante selon lequel tous les comptes sur les médias sociaux liés à la marque antérieure étaient accessibles aux consommateurs de l’Union depuis le 9 mars 2015, et ce indépendamment même de la question de savoir s’il était possible ou non d’identifier précisément les contenus que les sites Internet concernés présentaient à des dates situées dans la période pertinente.

67      S’il est également vrai que la requérante a produit devant la chambre de recours certains chiffres visant à illustrer les montants dépensés en publicité, force est de constater qu’il s’agissait de simples déclarations ou de tableaux non étayés, de sorte qu’il n’est pas possible d’évaluer leur véracité. S’agissant plus précisément des tableaux concernant les prétendus montants consacrés à la publicité, ils n’indiquent pas à quel moment ni à quelles fins ces dépenses ont été exposées ni ne contiennent de renvois à des factures ou à d’autres éléments probants. Dans ces circonstances, ces tableaux ne sont pas suffisamment probants.

68      De surcroît et à titre superfétatoire, dans la mesure où la requérante renvoie à ce qu’elle présente comme la « réputation de la marque antérieure au niveau mondial » (voir point 56 ci-dessus), il y a lieu de souligner que la présente affaire porte sur des preuves concrètes de l’usage sérieux de cette marque sur le territoire de l’Union.

69      En troisième lieu, quant aux autres critiques de la requérante portant sur l’absence ou l’insuffisance de prise en compte de certaines factures, premièrement, c’est à juste titre que la chambre de recours a affirmé, s’agissant de celles adressées à Brands of Switzerland BoS par la requérante, qu’elles ne démontraient pas non plus un usage dans l’Union. La chambre de recours a également écarté à bon droit d’autres factures produites, adressées par ladite société suisse à des entreprises européennes, dont certaines accompagnées de certificats d’exportation, lorsqu’elles portaient une date située en dehors de la période pertinente et ne confirmaient donc pas l’usage de la marque antérieure durant celle-ci (voir point 34 ci-dessus), ni n’apportaient de précision sur son usage sérieux durant cette même période.

70      Deuxièmement, ni « l’effort de travail de vente », ayant commencé au Mexique, ni les autres éléments de preuve pris dans leur ensemble ne permettent de constater des ventes suffisamment significatives dans l’Union.

71      En effet, c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé, aux points 51 et 52 de la décision attaquée (voir également points 35 à 39 ci-dessus), que la vente de quelques centaines de bouteilles de tequila dans l’Union, pour une somme d’environ 8 000 EUR, ne saurait être jugée suffisante pour établir l’usage sérieux de la marque antérieure, compte tenu de la taille du marché européen et de la nature des produits en cause, qui sont des produits de consommation relativement courante, eu égard à la jurisprudence rappelée aux points 19 à 24 ci-dessus.

72      Troisièmement, aucun des arguments de la requérante n’invalide l’approche de la chambre de recours portant sur la déclaration sous serment signée de M. A. H., consistant à considérer cette déclaration comme n’étant pas confirmée par des éléments de preuve concrets présentés devant l’EUIPO. À cet égard, il suffit de constater, d’une part, que les éléments de preuve relatifs à des ventes hors taxe effectuées au Mexique ne permettent pas une constatation du fait que les acheteurs provenaient de l’Union et, en tout état de cause, qu’il ne se serait pas agi d’une utilisation de la marque antérieure sur le territoire pertinent. D’autre part, les éléments présentés dans leur ensemble, notamment les diverses factures, ne permettent aucunement de confirmer la véracité de l’information selon laquelle les ventes de tequila sous la marque antérieure à des personnes résidant dans l’Union représentaient une valeur de 566 895 USD.

73      En quatrième et dernier lieu, aucune des allégations de la requérante ne permet de considérer qu’il existait un juste motif économique à l’absence d’usage sérieux de la marque antérieure découlant d’une fonction effective de celle-ci sur le marché, conformément à la jurisprudence rappelée au point 19 ci-dessus, ou encore qu’il y aurait eu des obstacles à la commercialisation dans l’Union des produits concernés désignés par la marque antérieure (voir point 57 ci-dessus).

74      Partant, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en qualifiant l’usage de la marque antérieure de symbolique ou de minime, considéré comme insuffisant pour constituer un usage sérieux dans l’Union au sens de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001.

75      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le moyen unique de la requérante, présenté au soutien de ses conclusions en annulation et en réformation, ainsi que le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

76      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

77      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Tequila Revolución S.A.P.I. De C.V. est condamnée aux dépens.

Marcoulli

Frimodt Nielsen

Schwarcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 22 juin 2022.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

S. Papasavvas


*      Langue de procédure : le français.