Language of document : ECLI:EU:T:2002:79

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre élargie)

20 mars 2002 (1)

«Marque communautaire - Syntagme TELE AID - Motifs absolus de refus - Article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (CE) n° 40/94»

Dans l'affaire T-355/00,

DaimlerChrysler AG, établie à Stuttgart (Allemagne), représentée par Me S. Völker, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. A. von Mühlendahl et D. Schennen, en qualité d'agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la troisième chambre de recours de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) du 12 septembre 2000 (affaire R 142/2000-3) concernant l'enregistrement du syntagme TELE AID comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre élargie),

composé de M. R. M. Moura Ramos, président, Mme V. Tiili, MM. J. Pirrung, P. Mengozzi et A. W. H. Meij, juges,

greffier: M. H. Jung,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 24 novembre 2000,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 23 février 2001,

à la suite de l'audience du 21 novembre 2001,

rend le présent

Arrêt

Antécédents du litige

1.
    Le 18 février 1997, la société Mercedes-Benz AG a présenté une demande de marque verbale communautaire à l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (ci-après l'«Office») en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2.
    La marque dont l'enregistrement est demandé est le syntagme TELE AID.

3.
    Les produits et services pour lesquels l'enregistrement de la marque est demandé relèvent des classes 9, 12, 37, 38, 39 et 42 au sens de l'arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l'enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante:

- classe 9:    «Appareils électriques et électroniques pour la transmission vocale ou de données; appareils d'émission, transmission, relais et réceptionfixes et mobiles; équipement pour le traitement de l'information et leurs pièces; appareils de navigation; systèmes d'appel d'urgence automatiques»;

- classe 12:    «Véhicules automobiles et leurs pièces»;

- classe 37: «Services de réparation pour automobiles; dépannage»;

- classe 38:    «Gestion d'un réseau de communications; direction de groupes et coordination de groupes d'intervention lors d'accidents et groupes de secours»;

- classe 39: «Services de remorquage, services de secours»;

- classe 42:    «Services d'un centre de calcul doté d'un système de localisation de véhicules; collecte, enregistrement, traitement et sortie d'informations».

4.
    En janvier 1999, le transfert, au profit de la requérante, de la demande a été inscrit au dossier de la demande en vertu des articles 17 et 24 du règlement n° 40/94 ainsi que de la règle 31, paragraphe 8, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d'application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1)

5.
    Par décision du 9 décembre 1999, l'examinateur a rejeté la demande au titre de l'article 38 du règlement n° 40/94, au motif que le syntagme TELE AID était descriptif des produits et services concernés et dépourvu de tout caractère distinctif au sens de l'article 7, paragraphe 1, sous c) et b), du règlement n° 40/94.

6.
    Le 2 février 2000, la requérante a formé un recours auprès de l'Office, au titre de l'article 59 du règlement n° 40/94, contre la décision de l'examinateur.

7.
    Par décision du 12 septembre 2000 (ci-après la «décision attaquée»), la troisième chambre de recours a, d'une part, annulé la décision de l'examinateur en ce qu'elle porte rejet de la demande pour les produits relevant de la classe 12 et, d'autre part, rejeté le recours en ce qui concerne les autres classes décrites dans la demande, au motif que, le syntagme en cause tombe sous le coup de l'article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 40/94.

Conclusions des parties

8.
    La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal

    -    annuler la décision attaquée;

-    condamner l'Office aux dépens.

9.
    L'Office conclut à ce qu'il plaise au Tribunal

-    rejeter le recours;

-    condamner la requérante aux dépens.

En droit

10.
    La requérante soulève deux moyens, tirés d'une violation de l'article 7, paragraphe 1, sous c), et de l'article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94

Arguments des parties

11.
    La requérante souligne que, aux fins de l'appréciation des motifs absolus de refus, il convient d'examiner une marque comme un ensemble, telle qu'elle a été demandée. Néanmoins, en l'espèce, même la décomposition du syntagme TELE AID en ses deux éléments ne fait ressortir, selon la requérante, aucune indication descriptive des produits ou services concernés.

12.
    S'agissant de l'élément «tele», la requérante expose que celui-ci ne constitue ni un mot indépendant ni une abréviation, mais bien une double syllabe utilisée dans le langage commun, en tant qu'élément constitutif de nombreux mots. Dans toutes ses combinaisons, l'élément «tele» n'a pas, selon la requérante, la même signification, ni même un sens approximativement semblable. À cet égard, la requérante cite des mots dans lesquels la signification de l'élément «tele» se rapporte au concept de distance, tels que «téléphone» ou «télescope», des mots dans lesquels la signification de l'élément «tele» se rapporte au concept de but ou de fin («telos» en langue grecque), tels que «téléologie», ainsi que des mots dans lesquels aucune de ces significations n'est présente, tels que les noms d'un compositeur de musique (Telemann) et d'un paysage norvégien (Telemark).

13.
    De plus, la requérante affirme que l'élément «tele» est fréquemment utilisé, dans des combinaisons les plus diverses, comme élément d'une marque, de sorte que le public est habitué à la présence de marques contenant cet élément. À cet égard, elle cite, entre autres, les marques TELE-ATLAS, TELE-PAGE et TELE-CARD. Partant, elle soutient que l'élément «tele» n'est pas directement descriptif des produits et services concernés.

14.
    Quant à l'élément «aid», la requérante affirme que celui-ci est fréquemment utilisé, dans des combinaisons les plus diverses, comme élément d'une marque, de sorte que le public est habitué à la présence de marques contenant cet élément. À cetégard, la requérante cite les marques allemandes AID et BIKEAID ainsi que les marques communautaires MICROAID et FIRST AID.

15.
    De même, elle soutient que l'élément «aid» n'est pas concrètement et immédiatement descriptif des produits et services concernés, en ce qu'il ne fait qu'évoquer, tout au plus, l'idée, vague, incertaine et équivoque, que quelque chose ou quelqu'un aide, assiste ou soutient ou est aidé ou assisté.

16.
    En ce qui concerne le syntagme TELE AID, lu dans son ensemble, la requérante affirme que celui-ci constitue un néologisme ne se trouvant pas dans les dictionnaires courants des langues de la Communauté, y compris l'anglais, et n'est utilisé en tant que tel ni dans le langage général ni dans un langage technique.

17.
    De plus, selon la requérante, le syntagme en cause n'a pas de signification claire et déterminée mais évoque seulement des idées vagues et abstraites allant dans le sens d'une aide, d'une assistance, d'un assistant ou d'un moyen d'aide opérant ou fonctionnant «de loin» ou à distance ou encore à l'aide d'un procédé permettant de surmonter la distance.

18.
    Quant au rapport existant entre le syntagme TELE AID, lu dans son ensemble, et les produits et services concernés, la requérante soutient que, contrairement aux énonciations des points 20 et suivants de la décision attaquée, ce syntagme ne constitue pas une indication descriptive suffisamment concrète de la destination ou de la qualité de ces produits et services.

19.
    La requérante fait valoir qu'un impératif de disponibilité d'un signe constitue une limitation immanente des motifs absolus de refus. Par conséquent, mêmes les signes descriptifs ne sont exclus de l'enregistrement que dans la mesure où leur monopolisation s'oppose au besoin légitime des tiers, en particulier des concurrents, de pouvoir les utiliser librement. En l'espèce, il n'existe pas d'impératif de disponibilité à l'égard du syntagme en cause, étant donné que celui-ci n'est pas utilisé pour décrire les produits et services concernés et qu'il n'est pas non plus nécessaire ou indispensable de l'utiliser à cette fin. Selon la requérante, un tel impératif de disponibilité ne saurait être basé sur les seules associations vagues évoquées par ledit syntagme.

20.
    Enfin, la requérante fait valoir que l'enregistrement de la marque en cause correspondrait à la pratique décisionnelle suivie par les chambres de recours. Elle invoque, à cet égard, les décisions des chambres de recours admettant le caractère enregistrable des marques verbales NETMEETING, CareService, Schülerhilfe, GLOBAL CARE, MEGATOURS SAFETYTECH, STEAM TERMINAL, ProBank, FIXIT, TOP-LOK, helpLine, HYPERLITE, Tensiontech, SAFEJAW, SURESEAL, FOILGUARD, OMNICARE, ZONEMESSAGE, BIDWATCH, Oilgear et TELESCAN.

21.
    L'Office récuse l'argumentation de la requérante et considère que le syntagme en cause est descriptif de l'ensemble des produits et services concernés.

22.
    Plus particulièrement, l'Office a déclaré, lors de l'audience, que le caractère descriptif du syntagme TELE AID doit être apprécié, par rapport à l'ensemble des catégories de produits et de services visées dans la demande d'enregistrement, à la lumière du concept de commercialisation envisagé, voire mis en oeuvre, par la requérante.

    Appréciation du Tribunal

23.
    Aux termes de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, sont refusées à l'enregistrement «les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d'indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l'espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l'époque de la production du produit ou de la prestation de services, ou d'autres caractéristiques de ceux-ci». En outre, l'article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 énonce que le «paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n'existent que dans une partie de la Communauté».

24.
    L'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 empêche que les signes ou indications visés par lui soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque. Cette disposition poursuit ainsi un but d'intérêt général, lequel exige que de tels signes ou indications puissent être librement utilisés par tous (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 4 mai 1999, Windsurfing Chiemsee, C-108/97 et C-109/97, Rec. p. I-2779, point 25).

25.
    Dans cette perspective, les signes et les indications visés par l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 sont ceux qui peuvent servir, dans un usage normal du point de vue du public ciblé, pour désigner soit directement, soit par la mention d'une de ses caractéristiques essentielles, le produit ou le service pour lequel l'enregistrement est demandé (arrêt de la Cour du 20 septembre 2001, Procter & Gamble/OHMI, C-383/99 P, Rec. p. I-6251, point 39). Partant, l'appréciation du caractère descriptif d'un signe ne peut être opérée que, d'une part, par rapport aux produits ou services concernés et, d'autre part, par rapport à la compréhension qu'en a un public ciblé déterminé.

26.
    En l'espèce, la chambre de recours a constaté, au point 23 de la décision attaquée, que les produits et services concernés visent le consommateur moyen de manière générale, ce que la requérante n'a pas contesté. Or, il y a lieu de considérer que les consommateurs moyens sont censés être normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés [voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C-342/97, Rec. p. I-3819, point 26, et arrêt du Tribunal du 7 juin 2001, DKV/OHMI (EuroHealth), T-359/99, Rec. p. II-1645, point 27]. Par ailleurs, le syntagme en cause étant composé d'éléments de la langue anglaise, le public ciblé pertinent est un public anglophone.

27.
    Concernant l'argument de la requérante selon lequel des tiers, et plus particulièrement ses concurrents, n'auraient pas besoin d'utiliser le syntagme en cause pour désigner les produits et services visés dans la demande, il y a lieu de relever que, au point 35 de l'arrêt Windsurfing Chiemsee, précité, la Cour a considéré que l'application de l'article 3, paragraphe 1, sous c), de la directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), dont le libellé est, en substance, identique à celui de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, ne dépend pas de l'existence d'un impératif de disponibilité concret, actuel et sérieux.

28.
    Dès lors, ainsi que l'Office l'a relevé à juste titre, il convient uniquement, aux fins de l'application de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, d'examiner, sur la base d'une signification donnée du signe verbal en cause, s'il existe, du point de vue du public ciblé, un rapport suffisamment direct et concret entre le signe et les catégories de produits ou services pour lesquelles l'enregistrement est demandé.

29.
    À titre liminaire, il convient de relever que le syntagme TELE AID est composé d'un substantif (aid) et d'un préfixe (tele). Or, ce syntagme n'est pas inhabituel dans sa structure. En effet, il ne présente pas d'écart par rapport aux règles lexicales de la langue anglaise mais est formé en concordance avec celles-ci.

30.
    En ce qui concerne la signification du syntagme TELE AID, il ressort du point 19 de la décision attaquée ainsi que des explications que l'Office a fournies dans son mémoire en réponse et lors de l'audience que, pour l'Office, ce syntagme signifie «aide à distance». À cet égard, est dépourvue de pertinence l'allégation de la requérante selon laquelle le syntagme en cause n'a pas de signification claire et déterminée. En effet, en prenant en considération les produits et services pour lesquels l'enregistrement est demandé, la signification retenue par la chambre de recours se révèle correcte. Or, il convient de rappeler que, pour tomber sous le coup de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, il suffit qu'un signe verbal, dans l'une au moins de ses significations potentielles, désigne une caractéristique des produits ou services concernés.

31.
    Quant à la nature du rapport existant entre le syntagme TELE AID et les produits et services concernés, la chambre de recours a considéré, au point 21 de la décision attaquée, que ce syntagme désigne la qualité et la destination de ces derniers.

32.
    En premier lieu, il convient d'examiner la question de savoir si le syntagme TELE AID est descriptif par rapport aux catégories de services dénommées «services de réparation pour automobiles; dépannage», relevant de la classe 37, «direction de groupes et coordination de groupes d'intervention lors d'accidents et groupes de secours», relevant de la classe 38, «services de remorquage, services de secours», relevant de la classe 39, et «services d'un centre de calcul doté d'un système de localisation de véhicules», relevant de la classe 42.

33.
    En ce qui concerne les services relevant des catégories mentionnées au point précédent, il y a lieu de considérer que le syntagme TELE AID, lu dans son ensemble, peut servir pour en désigner tant l'espèce que la qualité. En effet, ces services constituent des formes spécifiques d'aide. En outre, le fait que l'aide est apportée à distance doit être considéré comme une qualité de ces services qui est susceptible d'entrer en ligne de compte lors du choix opéré par le public ciblé et qui, dès lors, en constitue une caractéristique essentielle. Partant, il existe, du point de vue du public ciblé, un rapport suffisamment direct et concret entre le syntagme TELE AID et ces services.

34.
    En outre, il ne saurait certes être exclu que les services relevant des catégories mentionnées au point 32 peuvent également être fournis dans des conditions n'impliquant aucun élément de distance et que, partant, le syntagme TELE AID n'est pas descriptif de tous les services relevant de ces catégories. À cet égard, il convient de relever que la requérante a demandé l'enregistrement du syntagme en cause pour chacune de celles-ci dans leur ensemble sans faire de distinctions. Dès lors, il y a lieu de confirmer l'appréciation de la chambre de recours en ce qu'elle porte sur ces catégories de services dans leur ensemble (voir, en ce sens, arrêt EuroHealth, précité, point 33).

35.
    Concernant, en deuxième lieu, la catégorie de produits dénommée «systèmes d'appel d'urgence automatiques», relevant de la classe 9, il y a lieu de considérer que la destination de ces produits se confond en partie avec la description de cette catégorie en ce qu'elle se réfère expressément aux appels d'urgence. En effet, les produits permettant les appels d'urgence peuvent servir à faire appel aux services d'aide à distance. Dans cette mesure, l'aide à distance constitue la destination des ces produits. Dès lors, il existe, du point de vue du public ciblé, un rapport suffisamment direct et concret entre le syntagme TELE AID et les produits relevant de la catégorie sus-mentionnée.

    

36.
    En ce qui concerne l'argument de la requérante relatif aux décisions des chambres de recours admettant le caractère enregistrable d'autres marques, il convient d'observer que des motifs de fait ou de droit figurant dans des décisions antérieures des chambres de recours peuvent constituer des arguments à l'appui d'un moyen tiré de la violation d'une disposition du règlement n° 40/94. Néanmoins, force est de constater que, en l'espèce, la requérante n'a pas invoqué l'existence, dans les décisions citées concernant d'autres marques, de motifs qui seraient susceptibles de mettre en cause l'appréciation donnée ci-dessus. En outre, l'Office relève à juste titre que la marque TELESCAN, étant la seule marque présentant un élément commun avec le syntagme TELE AID, a été enregistrée pour des services entièrement différents de ceux en cause dans la présente affaire, à savoir des investissements et des services financiers.

37.
    Il s'ensuit que le syntagme TELE AID peut servir, au sens de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, du point de vue du public ciblé, pourdésigner des caractéristiques essentielles des produits et services relevant des catégories visées aux points 32 et 35 ci-dessus.

38.
    En troisième lieu, il convient d'examiner la question de savoir si le syntagme TELE AID est descriptif par rapport aux catégories de produits dénommées «appareils électriques et électroniques pour la transmission vocale ou de données; appareils d'émission, transmission, relais et réception fixes et mobiles; équipement pour le traitement de l'information et leurs pièces; appareils de navigation», relevant de la classe 9, ainsi qu'aux catégories de services dénommées «gestion d'un réseau de communications», relevant de la classe 38, et «collecte, enregistrement, traitement et sortie d'informations», relevant de la classe 42.

39.
    En ce qui concerne les produits et services relevant des catégories mentionnées au point précédent, l'Office n'a pas démontré à suffisance de droit que le syntagme TELE AID puisse servir pour en désigner la destination. En effet, l'aide à distance, à supposer même qu'elle requière, voire implique, l'utilisation de ces produits et services, en constituerait, tout au plus, un des multiples domaines d'application mais non pas une fonctionnalité technique. Or, cela ne suffit pas pour pouvoir considérer qu'il existe, du point de vue du public ciblé, un rapport suffisamment direct et concret entre le syntagme TELE AID et ces produits et services.

40.
    À cet égard, il y a lieu de relever que le Tribunal a, certes, jugé, au point 33 de l'arrêt EuroHealth, précité, que le fait qu'un signe verbal soit descriptif par rapport à une partie seulement des produits ou services relevant d'une catégorie mentionnée en tant que telle dans la demande d'enregistrement n'empêche pas que ce signe verbal soit refusé à l'enregistrement dès lors que le demandeur ne limite pas sa demande d'enregistrement aux seuls produits ou services pour lesquels le signe verbal n'est pas descriptif. Toutefois, la situation dans la présente affaire est différente de celle de l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt EuroHealth, précité. En effet, le syntagme TELE AID n'est descriptif par rapport à aucune partie des catégories de produits ou de services mentionnées au point 38 ci-dessus.

41.
    Par ailleurs, l'Office a développé, lors de l'audience, une argumentation selon laquelle il ressortirait des déclarations faites par la requérante que celle-ci commercialise ou entend commercialiser les produits et services mentionnés au point 38 ci-dessus dans le cadre d'un système d'organisation d'aide à distance proposé aux acheteurs des véhicules qu'elle fabrique et comprenant, outre ces derniers produits et services, les produits et services mentionnés au points 32 et 35 ci-dessus. L'Office en déduit que le caractère descriptif du syntagme TELE AID doit être apprécié, par rapport à l'ensemble des catégories de produits et de services visées dans la demande d'enregistrement, à la lumière de ce concept de commercialisation envisagé, voire mis en oeuvre, par la requérante.

42.
    À cet égard, il y a lieu de relever que, contrairement à ce que prétend l'Office, le caractère descriptif d'un signe verbal doit être apprécié individuellement par rapport à chacune des catégories de produits et/ou de services visées dans lademande d'enregistrement. Est sans pertinence, aux fins de l'appréciation du caractère descriptif d'un signe verbal par rapport à une catégorie déterminée de produits et/ou de services, la question de savoir si le demandeur de la marque en cause envisage ou met en oeuvre un certain concept de commercialisation impliquant, outre les produits et/ou les services relevant de cette catégorie, des produits et/ou des services relevant d'autres catégories. En effet, l'existence d'un concept de commercialisation est un facteur extrinsèque au droit conféré par la marque communautaire. En outre, un concept de commercialisation, ne dépendant que du choix de l'entreprise concernée, est susceptible de changer postérieurement à l'enregistrement d'un signe en tant que marque communautaire et ne saurait donc avoir une incidence quelconque sur l'appréciation de son caractère enregistrable.

43.
    Par ailleurs, il n'apparaît pas non plus que le syntagme TELE AID puisse servir pour désigner la qualité ou une autre caractéristique essentielle quelconque des produits et services relevant des catégories mentionnées au point 38 ci-dessus.

44.
    Il s'ensuit que le syntagme TELE AID ne peut pas servir, au sens de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, du point de vue du public ciblé, pour désigner une des caractéristiques essentielles des produits et services relevant des catégories visées au point 38 ci-dessus.

45.
    Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le moyen tiré de la violation de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 doit être accueilli en ce qui concerne les catégories de produits et de services visées au point 38 ci-dessus et rejeté en ce qui concerne les catégories de produits et de services visées aux points 32 et 35 ci-dessus.

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94

Arguments des parties

46.
    La requérante soutient qu'il résulte de la formule «dépourvues de caractère distinctif», figurant à l'article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, que tout degré de caractère distinctif - si faible soit-il - suffit pour justifier l'enregistrement d'un signe en tant que marque et que, par conséquent, lors de l'appréciation du caractère distinctif, une approche trop stricte est interdite.

47.
    En ce qui concerne le syntagme en cause, la requérante affirme que celui-ci, en tant que néologisme dépourvu de signification claire, est doté d'un élément créatif ainsi que d'un minimum de surcroît de fantaisie lui conférant le minimum de caractère distinctif requis.

48.
    En outre, la requérante invoque des décisions des chambres de recours admettant le caractère enregistrable d'autres marques (voir ci-dessus point 21).

49.
    L'Office fait valoir que le signe TELE AID, étant composé exclusivement d'indications descriptives des produits et services concernés à l'exclusion de tout autre élément susceptible de rendre le syntagme globalement apte à distinguer les produits de la requérante de ceux d'autres entreprises, est dépourvu de caractère distinctif. À cet égard, l'Office soutient que les consommateurs ciblés comprennent le syntagme en cause non pas comme une référence à une entreprise déterminée, mais uniquement comme une référence générale au fait qu'une aide leur sera apportée à distance.

    Appréciation du Tribunal

50.
    Aux termes de l'article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sont refusées à l'enregistrement «les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif». En outre, l'article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 énonce que le «paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n'existent que dans une partie de la Communauté».

51.
    Par ailleurs, le caractère distinctif d'un signe ne peut être apprécié que, d'une part, par rapport aux produits ou services pour lesquels l'enregistrement est demandé et, d'autre part, par rapport à la compréhension qu'en a le public ciblé pertinent.

52.
    En l'espèce, pour autant que la décision attaquée concerne les produits et services pour lesquels il a été jugé au point 37 ci-dessus que le syntagme TELE AID est descriptif, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, il suffit qu'un des motifs absolus de refus s'applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire [arrêts du Tribunal du 26 octobre 2000, Harbinger /OHMI (TRUSTEDLINK), T-345/99, Rec. p. II-3525, point 31; du 26 octobre 2000, Community Concepts/OHMI (Investorworld), T-360/99, Rec. p. II-3545, point 26, et du 31 janvier 2001, Sunrider/OHMI (VITALITE), T-24/00, Rec. p. II-449, point 28]. Dans cette mesure, ce moyen est, dès lors, inopérant.

53.
    Il y a lieu, en revanche, d'examiner le moyen, pour autant que la décision attaquée concerne les catégories de produits et de services visées au point 38 ci-dessus.

54.
    Ainsi qu'il ressort du point 25 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que la marque verbale en cause est «dépourvue du caractère distinctif minimum requis, puisque le public ciblé la concevra uniquement comme une indication de l'objet des services ou de la destination des produits». La chambre de recours a donc déduit, en substance, l'absence de caractère distinctif du syntagme TELE AID de son caractère descriptif. Or, il a été jugé au point 44 ci-dessus que, en ce qui concerne les catégories de produits et de services visées au point 38 ci-dessus, l'enregistrement du syntagme TELE AID ne pouvait être refusé sur la base de l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94. Par conséquent, le raisonnement substantiel développé par la chambre de recours au regard de l'article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 doit être écarté, en ce qu'il est fondé sur l'erreur constatée ci-dessus.

55.
    En outre, force est de constater que ni la décision attaquée, ni le mémoire en réponse de l'Office, ni les explications que celui-ci a fournies lors de l'audience ne contiennent d'éléments permettant d'établir l'absence de caractère distinctif du syntagme TELE AID pour les produits et services relevant des catégories visées au point 38 ci-dessus.

56.
    Il s'ensuit que le moyen tiré de la violation de l'article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 doit être accueilli en ce qui concerne les catégories de produits et de services visées au point 38 ci-dessus et rejeté en ce qui concerne les catégories de produits et de services visées aux points 32 et 35 ci-dessus.

57.
    Il résulte de tout ce qui précède qu'il convient de faire droit au recours en ce qui concerne les catégories de produits et de services visées au point 38 ci-dessus et de rejeter le recours pour le surplus.

Sur les dépens

58.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal peut répartir les dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. En l'espèce, la demande de la requérante n'étant accueillie que pour un nombre limité de catégories de produits et de services, il y a lieu de décider que la requérante supportera ses propres dépens et la moitié des dépens de l'Office.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre élargie),

déclare et arrête:

    

1.
    La décision de la troisième chambre de recours de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) du 12 septembre 2000 (affaire R 142/2000-3) est annulée en ce qui concerne les catégories de produits et de services suivantes:

    -    «appareils électriques et électroniques pour la transmission vocale ou de données; appareils d'émission, transmission, relais et réception fixes et mobiles; équipement pour le traitement de l'information et leurs pièces; appareils de navigation», relevant de la classe 9;

    -    «gestion d'un réseau de communications», relevant de la classe 38;

    -    «collecte, enregistrement, traitement et sortie d'informations», relevant de la classe 42.

    

2.
    Le recours est rejeté pour le surplus.

    

3.
    La partie requérante supportera ses propres dépens et la moitié des dépens de la partie défenderesse. Cette dernière supportera l'autre moitié de ses dépens.

Moura Ramos

Tiili
Pirrung

Mengozzi Meij

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 mars 2002.

Le greffier

Le président

H. Jung

R. M. Moura Ramos


1: Langue de procédure: l'allemand.