Language of document : ECLI:EU:T:2009:451

ORDONNANCE DU 19. 11. 2009 – AFFAIRE T-94/07


EREF / COMMISSION


DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (sixième chambre)

19 novembre 2009(*)

« Recours en annulation – Représentation par un avocat n’ayant pas la qualité de tiers – Irrecevabilité manifeste »

Dans l’affaire T‑94/07,

European Renewable Energies Federation ASBL (EREF), établie à Bruxelles (Belgique), représentée par Me D. Fouquet, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. N. Khan, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision C (2006) 4963 final de la Commission, du 24 octobre 2006, relative à un prêt syndiqué et à un prêt bilatéral consentis dans le cadre de la construction par Framatome ANP d’une centrale nucléaire pour Teollisuuden Voima Oy,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (sixième chambre),

composé de MM. A. W. H. Meij (rapporteur), président, V. Vadapalas et L. Truchot, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Procédure

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 26 mars 2007, la requérante, European Renewable Energies Federation ASBL (EREF), a introduit une demande d’annulation de la décision C (2006) 4963 final de la Commission, du 24 octobre 2006, relative à un prêt syndiqué et à un prêt bilatéral consentis dans le cadre de la construction par Framatome ANP d’une centrale nucléaire pour Teollisuuden Voima Oy (ci-après la « décision attaquée »). Aux termes de cette décision, lesdits prêts ne constituent pas une aide d’État.

2        Par lettre du greffe du 20 novembre 2008, le Tribunal a demandé à la requérante de produire, dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure, une copie officielle de l’acte de nomination en tant que directeur d’EREF de MFouquet, l’avocat représentant la requérante dans la présente affaire et ayant signé la requête.

3        Le 15 décembre 2008, la requérante a déféré à la demande du Tribunal en déposant au greffe du Tribunal une copie du procès-verbal de la réunion du conseil d’administration d’EREF du 29 juin 2004 (ci-après le « procès-verbal du 29 juin 2004 »). Toutefois, la requérante a indiqué que cette copie n’avait pas fait l’objet d’un enregistrement officiel conformément à la législation nationale. En outre, cette copie était partiellement raturée.

4        Par lettre du greffe du 16 janvier 2009, le Tribunal a demandé à la requérante de produire, dans le cadre d’une mesure d’organisation complémentaire de la procédure, une copie non raturée du procès-verbal du 29 juin 2004 ainsi que de confirmer que l’acte de nomination de M Fouquet en tant que directeur d’EREF n’avait pas fait l’objet d’un enregistrement officiel conformément à la législation nationale applicable.

5        Le 13 février 2009, la requérante a déféré à la demande du Tribunal en déposant au greffe du Tribunal une copie non raturée du procès-verbal du 29 juin 2004 et en confirmant que cet acte n’avait pas été enregistré officiellement.

6        La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la sixième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

7        M. le juge Tchipev étant empêché de siéger, le président du Tribunal a désigné, en application de l’article 32, paragraphe 3, du règlement de procédure, M. le juge Truchot pour compléter la chambre.

 Conclusions des parties

8        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        déclarer nul le montage financier faisant l’objet de ladite décision ;

–        à titre subsidiaire, enjoindre à la Commission d’ouvrir dans cette affaire une procédure formelle en vertu de l’article 88, paragraphe 2, CE ;

–        condamner la Commission aux dépens.

9        La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 Sur la recevabilité

10      Aux termes de l’article 111 du règlement de procédure, lorsqu’un recours est manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée. En l’espèce, le Tribunal estime qu’il est suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cette disposition, de statuer sans poursuivre la procédure.

11      Aux termes de l’article 19, premier, troisième et quatrième alinéas, du statut de la Cour, applicable au Tribunal en vertu de l’article 53 dudit statut :

« Les États ainsi que les institutions de la Communauté sont représentés devant la Cour par un agent nommé pour chaque affaire ; l’agent peut être assisté d’un conseil ou d’un avocat.

[…]

Les autres parties doivent être représentées par un avocat.

Seul un avocat habilité à exercer devant une juridiction d’un État membre ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen [(EEE)] peut représenter ou assister une partie devant la Cour. »

12      L’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour dispose en outre ce qui suit :

« La Cour est saisie par une requête adressée au greffier. La requête doit contenir l’indication du nom et du domicile du requérant et de la qualité du signataire

[…] »

13      Selon l’article 43, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement de procédure :

« L’original de tout acte de procédure doit être signé par l’agent ou l’avocat de la partie. »

14      Selon une jurisprudence constante, il ressort des dispositions précitées, en particulier de l’emploi du terme « représentées » à l’article 19, troisième alinéa, du statut de la Cour, que, pour saisir le Tribunal d’un recours, une partie, au sens de cet article, n’est pas autorisée à agir elle-même, mais doit recourir aux services d’un tiers qui doit être habilité à exercer devant une juridiction d’un État membre ou d’un État partie à l’accord sur l’EEE [ordonnance de la Cour du 5 décembre 1996, Lopes/Cour de justice, C-174/96 P, Rec. p. I-6401, point 11 ; ordonnances du Tribunal du 29 novembre 1999, Shaw e.a./Commission, T‑131/99, non publiée au Recueil, point 11 ; du 8 décembre 1999, Euro-Lex/OHMI (EU-LEX), T-79/99, Rec. p. II-3555, point 27, et du 13 janvier 2005, Sulvida/Commission, T‑184/04, Rec. p. II‑85, point 8].

15      Cette exigence d’avoir recours à un tiers correspond à la conception du rôle de l’avocat selon laquelle celui-ci est considéré comme collaborateur de la justice et est appelé à fournir, en toute indépendance et dans l’intérêt supérieur de celle-ci, l’assistance légale dont le client a besoin. Cette conception répond aux traditions juridiques communes aux États membres et se retrouve également dans l’ordre juridique communautaire, ainsi qu’il résulte, précisément, de l’article 19 du statut de la Cour [arrêt de la Cour du 18 mai 1982, AM & S/Commission, 155/79, Rec. p. 1575, point 24 ; ordonnances EU-LEX, précitée, point 28, et Sulvida/Commission, précitée, point 9].

16      En outre, selon la jurisprudence, les dispositions concernant la représentation des parties non privilégiées devant le Tribunal doivent être interprétées, dans la mesure du possible, de manière autonome, sans référence au droit national [voir, en ce sens, ordonnance EU-LEX, précitée, point 26].

17      En l’espèce, il y a lieu de constater, tout d’abord, que selon le procès-verbal produit par la requérante dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, le 29 juin 2004, MFouquet a été nommée directeur d’EREF, titre qu’elle détenait à la date de présentation de la requête à l’origine du présent recours.

18      Ensuite, l’article 20 des statuts d’EREF dispose ce qui suit :

« Le conseil d’administration peut déléguer la gestion quotidienne de la fédération, ainsi que la signature afférente à cette gestion, à un directeur. Le directeur est choisi par le conseil qui fixera ses pouvoirs et mandat et éventuellement ses salaire ou appointements ».

19      Il s’ensuit que MFouquet ne peut être considérée, aux fins de la présente affaire, comme un tiers, au sens de l’ordonnance Lopes/Cour de justice, précitée, indépendant de la requérante. En effet, la requête dans la présente affaire a été déposée au nom de la requérante par MFouquet en sa qualité d’avocat. Or, il résulte de l’article 20 des statuts d’EREF que, en sa qualité de directeur, Me Fouquet est chargée de la gestion quotidienne d’EREF. 

20      Par ailleurs, le procès-verbal du 29 juin 2004 révèle que MFouquet dispose d’un pouvoir de signature à titre individuel pour tout retrait d’argent des comptes d’EREF ne dépassant pas un montant déterminé. De surcroît, sa signature est également requise, conjointement avec celle du président d’EREF ainsi que celle d’un autre membre du conseil d’administration, pour effectuer des retraits dépassant ce montant.

21      Dans ces circonstances, il apparaît que MFouquet n’est pas autorisée à représenter valablement EREF dans la présente procédure.

22      Par conséquent, la requête ayant été signée par M Fouquet, le présent recours n’a pas été introduit conformément à l’article 19, troisième et quatrième alinéas, du statut de la Cour.

23      Dès lors, le recours doit être rejeté comme étant manifestement irrecevable.

 Sur les dépens

24      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme manifestement irrecevable.

2)      European Renewable Energies Federation ASBL (EREF) supportera ses propres dépens ainsi que ceux de la Commission des Communautés européennes.

Fait à Luxembourg, le 19 novembre 2009.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       A. W. H. Meij


* Langue de procédure : l’anglais.