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DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

19 juin 2024 (*)

« Procédure – Taxation des dépens »

Dans l’affaire T‑200/20 DEP,

Stone Brewing Co. LLC, établie à Escondido, Californie (États-Unis), représentée par Mes M. Kloth et R. Briske, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Molson Coors Brewing Company (UK) Ltd, établie à Burton Upon Trent (Royaume-Uni), représentée par MM. G. Orchison, solicitor, et J. Abrahams, KC,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, M. J. Schwarcz (rapporteur) et Mme L. Spangsberg Grønfeldt, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu l’arrêt du 14 juin 2023, Stone Brewing/EUIPO – Molson Coors Brewing Company (UK) (STONE BREWING) (T‑200/20, non publié, EU:T:2023:330),

rend la présente

Ordonnance

1        Par sa demande, fondée sur l’article 170 du règlement de procédure du Tribunal, l’intervenante, Molson Coors Brewing Company (UK) Ltd, demande au Tribunal de fixer à la somme de 58.401,04 euros le montant des dépens récupérables devant lui être payés par la requérante, Stone Brewing Co. LLC, au titre des frais qu’elle a exposés dans le cadre de la procédure au principal dans l’affaire T‑200/20.

 Antécédents de la contestation

2        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 15 avril 2020 et enregistrée sous le numéro T‑200/20, la requérante a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 31 janvier 2020 (affaire R 1524/2018-4).

3        À la demande de la requérante, le Tribunal a, par décision du 18 juin 2020, suspendu la procédure au principal jusqu’à l’adoption d’une décision définitive dans le cadre d’une procédure parallèle de déchéance de la marque de l’Union européenne antérieure STONES de l’intervenante, laquelle est intervenue par arrêt du 9 mars 2022, PrenzMarien/EUIPO – Molson Coors Brewing Company (UK) (STONES) (T‑766/20, non publié, EU:T:2022:123).

4        Par un arrêt du 14 juin 2023, Stone Brewing/EUIPO – Molson Coors Brewing Company (UK) (STONE BREWING) (T‑200/20, non publié, EU:T:2023:330), le Tribunal a rejeté le recours et a condamné la requérante à supporter les dépens exposés par l’intervenante.

5        Par lettre du 7 décembre 2023, l’intervenante a demandé à la requérante de lui rembourser la somme de 50.185 livres sterling (GBP) au titre des dépens récupérables afférents à la procédure au principal.

6        Aucun accord n’est intervenu entre les parties sur le montant des dépens récupérables.

 Conclusions des parties

7        L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        fixer le montant total des dépens récupérables, dont le remboursement incombe à la requérante, à 58.401,04 euros ;

–        augmenter ledit montant des intérêts de retard à compter de la date de signification de l’ordonnance à intervenir et jusqu’à leur paiement.

8        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        réduire de manière significative le montant total des dépens réclamés.

 En droit

9        Aux termes de l’article 170, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, s’il y a contestation sur les dépens récupérables, le Tribunal statue par voie d’ordonnance non susceptible de recours à la demande de la partie intéressée, après avoir mis la partie concernée par la demande en mesure de présenter ses observations.

10      Selon l’article 140, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme dépens récupérables « les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération d’un agent, conseil ou avocat ». Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et qui ont été indispensables à cette fin (voir ordonnance du 6 mars 2003, Nan Ya Plastics et Far Eastern Textiles/Conseil, T‑226/00 DEP et T‑227/00 DEP, EU:T:2003:61, point 33 et jurisprudence citée).

11      En l’espèce, l’intervenante demande le remboursement des honoraires des avocats ayant assuré la défense de ses intérêts dans la procédure au principal, à savoir, 21.800 GBP pour les prestations effectuées par deux barristers, 11.250 GBP pour les prestations effectuées par le cabinet d’avocats spécialisés en propriété intellectuelle Groom Wilkes & Wright LLP et 16.685 GBP pour les prestations effectuées par deux solicitors du cabinet d’avocats TLT LLP. L’intervenante demande également le remboursement des frais correspondants aux prestations effectuées par un « Costs draftsman », soit le montant de 450 GBP, ainsi que les intérêts de retard dus sur la totalité desdites sommes à compter de la date de signification de l’ordonnance à intervenir et jusqu’à leur paiement.

 Sur les dépens récupérables au titre de la procédure au principal

 Sur les honoraires d’avocat

12      Il est de jurisprudence constante que le juge de l’Union est habilité non à taxer les honoraires dus par les parties à leurs propres avocats, mais à déterminer le montant à concurrence duquel ces rémunérations peuvent être récupérées auprès de la requérante. En statuant sur la demande de taxation des dépens, le Tribunal n’a pas à prendre en considération un tarif national fixant les honoraires des avocats ni un éventuel accord conclu à cet égard entre la partie intéressée et ses agents ou conseils [voir ordonnance du 26 janvier 2017, Nurburgring/EUIPO – Biedermann (Nordschleife), T‑181/14 DEP, EU:T:2017:41, point 10 et jurisprudence citée].

13      Il convient également de rappeler que, à défaut de dispositions du droit de l’Union de nature tarifaire ou relatives au temps de travail nécessaire, le Tribunal doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit de l’Union ainsi que des difficultés de la cause, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer aux agents ou aux conseils intervenus et des intérêts économiques que le litige a présentés pour les parties (voir ordonnance du 26 janvier 2017, Nordschleife, T‑181/14 DEP, EU:T:2017:41, point 11 et jurisprudence citée).

14      C’est en fonction de ces considérations qu’il convient d’apprécier le montant des honoraires d’avocat récupérables en l’espèce.

15      En premier lieu, s’agissant de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit de l’Union et des difficultés de la cause, il convient de relever que l’affaire T‑200/20 ne présentait pas, quant à son objet et à sa nature, de complexité particulière. En effet, elle concernait une problématique relativement fréquente en droit des marques, à savoir, l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1) et, plus particulièrement, la question de la preuve de l’usage sérieux de la marque de l’Union européenne antérieure STONES invoquée à l’appui de l’opposition, laquelle ne présentait pas de difficulté particulière.

16      En outre, puisque la chambre de recours a examiné l’existence d’un risque de confusion sur le fondement de la marque susmentionnée et non sur celui de la marque britannique antérieure STONES de l’intervenante, il y a lieu de rejeter l’allégation de cette dernière selon laquelle l’affaire T‑200/20 soulevait, en substance, des questions complexes concernant le retrait du Royaume-Uni de l’Union et ses conséquences au regard de la procédure au principal.

17      Dès lors, l’affaire T‑200/20 s’inscrivait dans un contentieux récurrent du Tribunal et n’impliquait pas de questions particulièrement complexes, en droit comme en fait, ou revêtant une importance particulière au regard du droit de l’Union, de sorte qu’elle ne saurait être considérée comme présentant de difficulté particulière. En outre, elle ne posait pas de question de droit nouvelle nécessitant un renvoi devant une formation de jugement élargie et pouvait être traitée sur la base d’une jurisprudence constante.

18      Par conséquent, il y a lieu de considérer que l’affaire en cause revêtait une importance limitée sous l’angle du droit de l’Union.

19      En deuxième lieu, s’agissant des intérêts économiques en jeu, il y a lieu de relever que si l’affaire T‑200/20 présentait un certain intérêt économique pour l’intervenante, en l’absence d’éléments apportés par cette dernière, cet intérêt économique ne saurait être considéré comme étant d’une intensité inhabituelle ou significativement différent de celui qui sous-tend toute procédure d’opposition à l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne.

20      En troisième lieu, en ce qui concerne l’ampleur du travail que la procédure a pu engendrer pour l’intervenante, il appartient au juge de tenir principalement compte du nombre total d’heures de travail pouvant apparaître comme objectivement indispensables aux fins de la procédure devant le Tribunal. À cet égard, la possibilité pour le juge de l’Union d’apprécier la valeur du travail effectué dépend de la précision des informations fournies [voir ordonnance du 17 mars 2016, Norma Lebensmittelfilialbetrieb/OHMI – Yorma’s (Yorma Eberl), T‑229/14 DEP, non publiée, EU:T:2016:177, point 19 et jurisprudence citée]. En particulier, il ressort de la jurisprudence qu’il est particulièrement important pour une partie demandant le remboursement des dépens, afin de démontrer la nécessité des heures de travail de ses avocats, de fournir des indications précises quant aux tâches accomplies par eux aux fins de la procédure, au nombre d’heures consacrées à chacune de ces tâches et aux taux horaires appliqués [ordonnance du 19 décembre 2022, PrenzMarien/EUIPO – Molson Coors Brewing Company (UK) (STONES), T‑766/20 DEP, non publiée, EU:T:2022:866, point 21].

21      En l’espèce, l’intervenante a produit un tableau dans lequel sont listées les différentes catégories de prestations effectuées par les deux solicitors du cabinet d’avocats TLT LLP, le temps global passé par ces derniers pour accomplir lesdites prestations, ainsi que le montant total des honoraires y afférents. Ledit tableau comporte également l’indication du taux horaire appliqué respectivement par lesdits solicitors (soit les taux respectifs de 250 GBP et de 150 GBP) ‑ dont l’un des deux était, initialement, intervenu comme stagiaire (ses prestations étaient, dans ce cas, facturées 95 GBP de l’heure) - ainsi que du montant forfaitaire facturé par ceux-ci au titre des appels téléphoniques passés et des courriers rédigés. En outre, ce tableau mentionne les différentes catégories de prestations effectuées par les deux barristers ainsi que le montant total des honoraires y afférents, sans indication du temps effectivement passé et du taux horaire. En ce qui concerne le cabinet d’avocats Groom Wilkes & Wright LLP, ce tableau se limite à mentionner le montant total des honoraires qui lui seraient dus.

22      Par ailleurs, l’intervenante a produit un document qui explicite plus en détail chaque prestation effectuée par les solicitors du cabinet d’avocats TLT LLP, incluant une indication de la date de la prestation et du temps qui y a été consacré.

23      L’intervenante a également produit un tableau avec la liste des prestations effectuées mensuellement par le cabinet d’avocats Groom Wilkes & Wright LLP au cours des mois de mai 2020 à octobre 2023, avec une indication du montant total des honoraires mensuels y correspondants. Il convient de relever que ce tableau ne mentionne ni le taux horaire ni le temps passé pour chacune des prestations facturées.

24      Enfin, l’intervenante a communiqué un tableau récapitulatif des honoraires dus à l’ensemble de ses avocats, incluant un descriptif très succinct de leurs prestations et mentionnant le temps passé par les deux solicitors du cabinet d’avocats TLT LLP sur chacune des prestations facturées ainsi que le nombre de courriers et d’appels téléphoniques passés.

25      Il ressort de ce qui précède que la répartition des honoraires pour les diverses prestations fournies par chacun des avocats ayant assisté l’intervenante dans le cadre de la procédure au principal, le nombre d’heures allouées à chaque prestation effectuée et le taux horaire retenu pour l’accomplissement de chaque poste visé n’ont pas fait l’objet d’un décompte exhaustif par l’intervenante dans sa requête en taxation et ne sont pas systématiquement précisés dans les documents qu’elle a produit à l’appui de sa demande. En particulier, ces documents fournissent une indication du nombre d’heures consacrées au traitement de l’affaire T‑200/20 seulement pour les deux solicitors du cabinet d’avocats TLT LLP. Aussi, aucune information n’est fournie s’agissant du nombre d’heures consacrées au traitement de l’affaire au principal par les deux barristers et par le cabinet d’avocats Groom Wilkes & Wright LLP et du taux horaire appliqué.

26      De plus, force est de constater que le descriptif des diligences effectuées par les avocats de l’intervenante est souvent rédigé en de termes généraux et vagues (par exemple « engaged in conference with Counsel », « engaged in conference », « reviewing substantial quantity of relevant documents, considering relevant procedural rules », « preparing draft instruction to Counsel ») ce qui rend particulièrement difficile la vérification de leur caractère « indispensable » au sens de la jurisprudence citée au point 20 ci-dessus.

27      Il s’ensuit que l’ampleur du travail que la procédure au principal a engendré pour les avocats de l’intervenante n’est pas justifiée de manière détaillée.

28      Or, si l’absence d’indications précises sur les dépens effectivement exposés aux fins de la procédure, y compris notamment sur les taux horaires et le temps passé par chacun des avocats de l’intervenante pour l’accomplissement de différentes tâches, ne fait pas obstacle à la fixation, par le Tribunal, sur la base d’une appréciation équitable, du montant des dépens récupérables, elle le place dans une situation d’appréciation nécessairement stricte en ce qui concerne les revendications de l’intervenante (voir ordonnance du 8 juillet 2020, Fastweb/Commission, T‑19/17 DEP, non publiée, EU:T:2020:331, points 44, 46 et 47).

29      Premièrement, en l’espèce, il y a lieu d’observer que la procédure au principal a comporté seulement une phase écrite pendant laquelle l’intervenante a produit un mémoire en réponse de 7 pages, accompagné de 7 annexes de 64 pages au total qui comprenaient les documents formels requis pour le dépôt du mémoire en réponse devant le Tribunal et les copies de documents n’ayant requis aucun travail de rédaction de la part des avocats de l’intervenante, tels que des précédentes décisions de l’EUIPO.

30      Par ailleurs, la requête à laquelle l’intervenante a répondu comportait 15 pages, dont environ 12 pages consacrées aux arguments et aux conclusions de la requérante. Cette requête soulevait trois moyens, tirés, le premier, de la violation de la règle 20, paragraphe 7, sous c), du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre1995, portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO 1995, L 303, p. 1), le deuxième, de la violation de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 et de la règle 20, paragraphe 3, du règlement no 2868/95 et, le troisième, de l’absence de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1).

31      Enfin, le 11 juin 2020, l’intervenante a présenté des observations sur la suspension de la procédure au principal, lesquelles comptaient quatre pages et demi et, le 5 juillet 2022, des observations d’une page et demi en réponse à une mesure d’organisation de la procédure du Tribunal, notifiée aux parties le 21 juin 2022, concernant les conséquences de l’arrêt du 9 mars 2022, STONES (T‑766/20, non publié, EU:T:2022:123) au regard de l’affaire T‑200/20. Les observations du 11 juin 2020 étaient accompagnées de cinq annexes, à savoir : un mandat accordé à deux des avocats représentant l’intervenante devant le Tribunal et la preuve de leur habilitation à exercer la profession d’avocat, les documents formels de l’intervenante requis pour l’introduction d’un recours devant le Tribunal et une copie d’une décision de la division d’annulation de l’EUIPO du 5 décembre 2019.

32      Il s’ensuit que les écritures de l’intervenante dans l’affaire T‑200/20 n’étaient pas longues.

33      Deuxièmement, dans la mesure où le mémoire en réponse de l’intervenante tendait au rejet du recours formé à l’encontre de la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 31 janvier 2020, il appartient au Tribunal de prendre en compte le fait que la tâche de ses représentants a pu être facilitée dans la mesure où ils ont pu s’appuyer sur la décision attaquée pour répondre aux arguments de la requérante [ordonnance du 5 février 2021, Khadi and Village Industries Commission/EUIPO – BNP Best Natural Products (Khadi, khadí Naturprodukte aus Indíen, et Khadi Ayurveda), T‑681/17 DEP à T‑683/17 DEP, non publiée, EU:T:2021:83, point 29 et jurisprudence citée].

34      De plus, il y a lieu de tenir compte du fait que le cabinet d’avocats Groom Wilkes & Wright LLP avait déjà assisté l’intervenante au cours de la procédure administrative devant l’EUIPO qui s’était achevée par l’adoption de la décision attaquée dans l’affaire T‑200/20. Ainsi, une partie des représentants de l’intervenante dans la procédure au principal disposait déjà d’une connaissance d’éléments pertinents pour le litige qui est de nature à avoir facilité leur travail et réduit le temps de préparation nécessaire pour la procédure contentieuse (voir ordonnance du 13 janvier 2006, IPK-München/Commission, T‑331/94 DEP, EU:T:2006:11, point 59 et jurisprudence citée).

35      Troisièmement, lorsqu’une partie est représentée, comme en l’espèce, par plusieurs avocats, il incombe au Tribunal d’examiner la mesure dans laquelle les prestations effectuées par l’ensemble des conseils concernés étaient nécessaires pour le déroulement de la procédure judiciaire et de s’assurer que l’engagement de plusieurs conseils n’a pas entraîné une duplication inutile des frais [voir ordonnance du 23 août 2023, Lück/EUIPO - R. H. Investement (MALLE), T‑188/21 DEP, non publiée, EU:T:2023:482, point 26 et jurisprudence citée].

36      En l’espèce, il y a lieu de considérer que l’intervention de deux cabinets d’avocats et de deux barristers n’apparaît pas indispensable dès lors que l’affaire en cause relevait d’un contentieux récurrent du Tribunal et que les questions procédurales et matérielles posées par celle-ci ne présentaient pas de difficulté particulière (voir points 15 à 18 ci-dessus).

37      En tout état de cause, il ressort des éléments de preuve produits par l’intervenante à l’appui de la présente demande de taxation que la collaboration entre ces différents professionnels a donné lieu à une duplication inutile des efforts entrepris pour une même tâche. En particulier, il ressort de ces éléments que plusieurs avocats ont travaillé sur la rédaction des mandats donnés à l’un des deux solicitors et aux deux barristers pour qu’ils représentent l’intervenante devant le Tribunal, ainsi que sur la rédaction du mémoire en réponse. À cet égard, il convient de rappeler que s’il n’est pas anormal qu’un avocat travaille sur une tâche et que son travail soit ensuite révisé par un avocat plus expérimenté, un tel travail de révision ne saurait se confondre avec une duplication des heures dédiées à une même tâche [arrêt du 21 décembre 2021, Magic Box Int. Toys/EUIPO – KMA Concepts (SUPERZINGS), T‑549/20, non publié, EU:T:2021:935, point 37]. Dès lors, une partie des heures de travail réclamées ne saurait être considérée comme objectivement indispensable.

38      De surcroît, l’implication de plusieurs avocats a nécessité plusieurs actions de coordination (voir, par exemple, les prestations suivantes : « engaged in conference with Counsel », « preparing draft instructions to Counsel », « reviewing GO instructions to Counsel and attachments, reviewing note from Counsel, considering next steps », « engaged liaising with SW and briefing with regard to today’s call », « preparation for call with Leading Counsel and client », « liasing with SQ to update and brief on sorting the formalities ») lesquelles ont engendré des frais qui n’étaient pas indispensables (voir, en ce sens, ordonnance du 13 janvier 2017, Idromacchine e.a./Commission, T‑88/09 DEP, EU:T:2017:5, point 32 et jurisprudence citée).

39      Quatrièmement, il y a lieu de relever que plusieurs prestations mentionnées dans les éléments de preuve produits par l’intervenante au soutien de sa demande de taxation, ne sont pas liées à la conduite de la procédure au principal. En particulier, tel semble être le cas de la prestation « Drafting Brexit points on submissions on appeal to the Board of Appeal (SQ(T)) » (« rédaction de points sur le Brexit dans les observations sur le recours devant la chambre de recours de l’EUIPO »), effectuée le 14 juillet 2020 par un stagiaire du cabinet d’avocats TLT LLP (voir point 21 ci-dessus), dès lors que la question de l’incidence de la sortie du Royaume-Uni de l’Union ne s’était pas posée en l’espèce (voir point 16 ci-dessus). De plus, la rédaction d’un recours contre la décision du Tribunal de suspendre la procédure au principal par l’un des barristers représentant l’intervenante ne saurait être considérée comme indispensable, une telle décision étant, en tout état de cause, insusceptible de recours. Enfin, les diligences accomplies par l’un des solicitors du cabinet d’avocats TLT LLP en relation avec la ventilation des honoraires et leur facturation ne se rattachent pas à la procédure au principal.

40      Les diligences susmentionnées ne sauraient donc donner lieu à une récupération des dépens y afférents.

41      Cinquièmement, il y a lieu de rejeter la récupération des dépens se rapportant à la période où aucun acte de procédure n’a été adopté (voir ordonnances du 10 avril 2014, Éditions Odile Jacob/Commission, T‑279/04 DEP, non publiée, EU:T:2014:233, point 39, et du 8 décembre 2022, Lackmann Fleisch- und Feinkostfabrik/EUIPO (Хозяйка), T‑185/21 DEP, non publiée, EU:T:2022:789, point 18). À cet égard, force est de constater que, en l’espèce, pendant la période où la procédure au principal était suspendue, c’est-à-dire du 18 juin 2020 au 9 mars 2022 (voir point 3 ci-dessus), aucun acte de procédure n’a été adopté à l’exception du mémoire en réponse de l’intervenante, qui a été déposé au greffe du Tribunal le 24 juin 2020. En outre, le premier acte de procédure suivant la fin de la période de suspension a été adopté, par le Tribunal, le 21 juin 2022 et consistait en une mesure d’organisation de la procédure (voir point 31 ci-dessus). En conséquence, il y a lieu de conclure que les dépens afférents à la période comprise entre le 25 juin 2020 et le 20 juin 2022 ne sont pas directement liés aux interventions des avocats de l’intervenante devant le Tribunal et ne sauraient être considérés comme des frais indispensables aux fins de la procédure au principal (voir, par analogie, ordonnance du 21 décembre 2010, Le Levant 015 e.a./Commission, T‑34/02 DEP, EU:T:2010:559, point 33).

42      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il sera fait une juste appréciation de l’ampleur du travail ayant été indispensable à l’analyse de la requête et à la préparation du mémoire en réponse et des observations des 11 juin 2020 et 5 juillet 2022 en la fixant à un total de 20 heures de travail.

43      Par conséquent, avec un taux horaire de 250 euros, considéré comme approprié pour le type de contentieux en cause en l’espèce (voir, en ce sens, ordonnance du 19 décembre 2022, STONES, T‑766/20 DEP, non publiée, EU:T:2022:866, point 27 et jurisprudence citée), le montant des honoraires d’avocat devant être considéré comme objectivement indispensable aux fins de la procédure au principal s’élève à 5.000 euros correspondant à 20 heures de travail. 

 Sur les frais afférents aux prestations du « Costs draftsman »

44      Il ressort des documents produits par l’intervenante à l’appui de la demande de taxation, que le montant qu’elle réclame au titre des dépens récupérables inclut les frais afférents à la ventilation des honoraires et à la préparation des factures par un « Costs draftsman », soit la somme de 450 GBP pour trois heures de travail.

45      À cet égard, il convient de rappeler que les dépens récupérables se limitent aux frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure au principal (voir point 10 ci-dessus).

46      En l’espèce, les éléments versés au dossier ne fournissent aucune indication de la date à laquelle les prestations du « Costs draftsman » ont été effectuées.

47      En outre, à défaut de toute explication avancée par l’intervenante quant à la portée exacte des prestations effectuées par le « Costs draftsman », il y a lieu de considérer que celles-ci ne se rattachent à aucun acte de procédure accompli lors de la procédure au principal et, partant, ne sauraient être considérées comme indispensables aux fins de celle-ci.

48      Enfin, force est de constater que, dans le cadre de la présente demande de taxation, l’intervenante n’a pas demandé au Tribunal de fixer le montant des dépens afférents à la procédure de taxation, dont le remboursement incomberait à la requérante.

49      Dès lors, les frais afférents aux prestations du « Costs draftsman » doivent être exclus du calcul du montant des dépens récupérables.

 Sur les intérêts de retard

50      L’intervenante demande au Tribunal de condamner la requérante à lui verser des intérêts de retard sur le montant des dépens à rembourser.

51      Selon une jurisprudence bien établie, une demande de majoration de la somme due dans le cadre d’une procédure de taxation de dépens d’intérêts de retard doit être accueillie pour la période comprise entre la date de la signification de l’ordonnance de taxation des dépens et la date du remboursement effectif des dépens (voir ordonnance du 27 novembre 2020, Flabeg Deutschland/Commission, T‑103/15 DEP, non publiée, EU:T:2020:585, point 60 et jurisprudence citée).

52      Le taux d’intérêt applicable est calculé, compte tenu de l’article 99, paragraphe 2, sous b), du règlement (UE, Euratom) 2018/1046 du Parlement européen et du Conseil, du 18 juillet 2018, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union, modifiant les règlements (UE) no 1296/2013, (UE) no 1301/2013, (UE) no 1303/2013, (UE) no 1304/2013, (UE) no 1309/2013, (UE) no 1316/2013, (UE) no 223/2014, (UE) no 283/2014 et la décision no 541/2014/UE, et abrogeant le règlement (UE, Euratom) no 966/2012 (JO 2018, L 193, p. 1), sur la base du taux appliqué par la Banque centrale européenne (BCE) à ses opérations principales de refinancement et en vigueur le premier jour de calendrier du mois de l’échéance du paiement, majoré de 3,5 points (ordonnance du 25 septembre 2019, Bilbaína de Alquitranes e.a./Commission, T‑689/13 DEP, non publiée, EU:T:2019:698, point 58).

53      Par conséquent, le montant des dépens récupérables produira, à compter de la signification de la présente ordonnance, des intérêts de retard au taux calculé sur la base du taux fixé par la BCE pour les opérations principales de refinancement applicable pendant la période concernée, majoré de 3,5 points de pourcentage.

54      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation des dépens récupérables par l’intervenante en fixant leur montant à 5.000 euros, lequel montant tient compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’au moment de l’adoption de la présente ordonnance.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

ordonne :

1)      Le montant total des dépens à rembourser par Stone Brewing Co. LLCà Molson Coors Brewing Company (UK) Ltd est fixé à 5.000 euros.

2)      Ladite somme portera intérêts de retard à compter de la date de la signification de la présente ordonnance jusqu’à la date du paiement.

Fait à Luxembourg, le 19 juin 2024.

Le greffier

 

Le président

V. Di Bucci

 

A. Marcoulli


*      Langue de procédure : l’anglais.