Language of document : ECLI:EU:T:2018:719

Affaire T122/17

Devin AD

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne verbale DEVIN – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Nom géographique – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001] »

Sommaire – Arrêt du Tribunal (huitième chambre) du 25 octobre 2018

1.      Marque de l’Union européenne – Procédure de recours – Recours devant le juge de l’Union – Faculté pour le Tribunal de réformer la décision attaquée – Limites

(Règlement du Conseil no 207/2009, art. 64, § 1, 2e phrase, et 65, § 3)

2.      Marque de l’Union européenne – Renonciation, déchéance et nullité – Causes de nullité absolue – Enregistrement contrairement à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 – Notion

[Règlement du Conseil no 207/2009, art. 7, § 1, c), et 52, §1, a)]

3.      Marque de l’Union européenne – Renonciation, déchéance et nullité – Causes de nullité absolue – Enregistrement contrairement à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 – Appréciation du caractère descriptif de la marque – Noms géographiques

[Règlement du Conseil no 207/2009, art. 7, § 1, c), et 52, §1, a)]

4.      Marque de l’Union européenne – Renonciation, déchéance et nullité – Causes de nullité absolue – Enregistrement contrairement à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 – Appréciation du caractère descriptif de la marque – Noms géographiques – Critères

[Règlement du Conseil no 207/2009, art. 7, § 1, c), et 52, §1, a)]

5.      Marque de l’Union européenne – Renonciation, déchéance et nullité – Causes de nullité absolue – Enregistrement contrairement à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 – Marque verbale DEVIN – Perception du terme « devin » par le consommateur moyen de l’Union – Disponibilité du nom géographique Devin

[Règlement du Conseil no 207/2009, art. 7, § 1, c), et 52, §1, a)]

6.      Marque de l’Union européenne – Effets de la marque de l’Union européenne – Limitations – Article 12, sous b), du règlement no 207/2009 – Impératif de disponibilité – Incidence

[Règlement du Conseil no 207/2009, art. 7, § 1, c), et 12, b)]

7.      Marque de l’Union européenne – Effets de la marque de l’Union européenne – Droits conférés par la marque – Droit d’interdire l’usage de la marque – Usage d’un signe identique ou similaire sans juste motif tirant indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque ou leur portant préjudice – Notion de juste motif – Portée

[Règlement du Conseil no 207/2009, art. 9, § 2, c)]

1.      Voir le texte de la décision.

(voir points 11, 97-99)

2.      Voir le texte de la décision.

(voir points 17, 18)

3.      Voir le texte de la décision.

(voir points 20-22)

4.      Voir le texte de la décision.

(voir points 23, 24)

5.      La marque verbale DEVIN n’est pas descriptive d’une provenance géographique pour ce qui concerne le consommateur moyen des pays voisins de la Bulgarie, à savoir la Grèce et la Roumanie, ni celui des autres États membres de l’Union, à la seule exception de la Bulgarie.

Alors que le nom géographique Devin est connu des milieux intéressés en Bulgarie, pour ce qui concerne les milieux intéressés des autres États membres de l’Union, le nom géographique Devin leur est largement inconnu ou, à tout le moins, inconnu en tant que désignation d’un lieu géographique.

Le simple fait que la ville de Devin soit détectée par les moteurs de recherche Internet ne suffit pas à établir qu’il s’agit d’un lieu connu d’une partie importante du public pertinent de Grèce et de Roumanie. L’existence d’un « profil touristique sur l’internet », en soi, ne saurait suffire à établir la connaissance d’une petite ville par le public pertinent à l’étranger.

Surtout, le consommateur moyen d’eau minérale et de boissons dans l’Union ne jouit pas d’un haut degré de spécialisation en géographie ou en tourisme. La chambre de recours, en se focalisant à tort sur les touristes étrangers, notamment grecs ou roumains, qui visitent la Bulgarie ou Devin, n’a pas pris en considération l’ensemble du public pertinent, constitué par le consommateur moyen de l’Union, notamment de Grèce et de Roumanie, mais s’est, à tort, limitée à une partie minime ou infime du public pertinent, à savoir les touristes étrangers visitant la Bulgarie ou Devin, qui, en tout état de cause, s’avère négligeable et ne saurait être tenue pour suffisamment représentative de celui-ci au regard de la jurisprudence. Ainsi la chambre de recours a appliqué un mauvais test, qui l’a conduite à une appréciation factuelle erronée de la perception du terme « devin » par le public pertinent.

Concernant la disponibilité du nom géographique Devin, il convient de considérer qu’une utilisation descriptive du nom « Devin » est permise aux fins de promouvoir la ville en tant que destination touristique. Le règlement no 207/2009 sur la marque de l’Union européenne prévoit, dans la définition même du droit exclusif conféré par une marque, des garde-fous destinés à préserver les intérêts des tiers. Le nom de la ville de Devin demeure disponible aux tiers non seulement pour un usage descriptif, tel que la promotion du tourisme dans cette ville, mais également à titre de signe distinctif en cas de « juste motif » et d’absence de risque de confusion excluant l’application des articles 8 et 9 du règlement no 207/2009. L’intérêt général à préserver la disponibilité d’un nom géographique tel que celui de la ville thermale de Devin peut ainsi être protégé grâce à la permission des utilisations descriptives de tels noms et aux garde-fous limitant le droit exclusif du titulaire de la marque contestée, sans que soit requise l’annulation de cette marque.

(voir points 39, 41, 46-48, 79, 83, 89, 90, 93, 95)

6.      L’article 12 du règlement no 207/2009 sur la marque de l’Union européenne vise à concilier les intérêts fondamentaux de la protection des droits de marque et ceux de la libre circulation des marchandises ainsi que de la libre prestation des services dans le marché intérieur, et ce de manière telle que le droit de marque puisse remplir son rôle d’élément essentiel du système de concurrence non faussé que le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne entend établir et maintenir. Plus spécifiquement, l’article 12, sous b), dudit règlement vise à sauvegarder la possibilité pour l’ensemble des opérateurs économiques d’utiliser des indications descriptives. Cette disposition constitue donc une expression de l’impératif de disponibilité. Toutefois, l’impératif de disponibilité ne saurait en aucun cas constituer une limitation autonome des effets de la marque s’ajoutant à celles expressément prévues audit article. Ainsi, même si l’article 12, paragraphe 1, sous b) ne confère pas aux tiers l’usage d’un tel nom en tant que marque, il garantit néanmoins qu’ils peuvent l’utiliser de manière descriptive, à savoir en tant qu’indication relative à la provenance géographique, à condition que l’utilisation en soit faite conformément aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale.

(voir points 76-78)

7.      Voir le texte de la décision.

(voir points 87, 88)