Language of document : ECLI:EU:T:2012:9



DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

17 janvier 2012(*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative HELL – Marque communautaire verbale antérieure HELLA – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Similitude des produits et des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑522/10,

Hell Energy Magyarország kft, établie à Budapest (Hongrie), représentée par Me M. Treis, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. D. Botis, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Hansa Mineralbrunnen GmbH, établie à Rellingen (Allemagne), représentée par Mes A. Renck, V. von Bomhard, E. Nicolás Gómez et T. Dolde, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 5 août 2010 (affaire R 1517/2009‑1), relative à une procédure d’opposition entre Hansa Mineralbrunnen GmbH et Hell Energy Magyarország,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood , président, J. Schwarcz (rapporteur) et A. Popescu, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 8 novembre 2010,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 18 mars 2011,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 21 mars 2011,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 15 mai 2007, la requérante, Hell Energy Magyarország kft, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 32 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Boissons non alcooliques, boissons énergétiques/breuvages énergétiques. »

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 63/2007 du 19 novembre 2007.

5        Le 17 décembre 2007, l’intervenante, Hansa Mineralbrunnen GmbH, a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque communautaire verbale antérieure Hella, déposée le 14 juin 2006 et enregistrée le 2 août 2007 sous le numéro 5135331, désignant les produits relevant de la classe 32 et correspondant à la description suivante : « Eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques, boissons de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons ; limonades, boissons pétillantes et boissons aux fruits, boissons diététiques sans alcool non médicinales. »

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

8        Le 5 octobre 2009, la division d’opposition a fait droit à l’opposition pour l’ensemble des produits désignés par la demande de marque.

9        Le 7 décembre 2009, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 5 août 2010, la première chambre de recours de l’OHMI a confirmé la décision de la division d’opposition, rejetant ainsi le recours introduit par la requérante (ci-après la « décision attaquée »). Elle a conclu que, au regard de l’identité des produits désignés par les marques en conflit et de l’existence d’un certain degré de similitude, à tout le moins visuel et phonétique, desdites marques, alors que, sur le plan conceptuel, elles n’étaient pas similaires pour la seule partie du territoire pertinent où l’un des signes était compris, il existait un risque de confusion dans l’esprit du public sur le territoire de l’Union européenne, où la marque antérieure était protégée, pour tous les produits contestés, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer la requête admissible ;

–        annuler la décision attaquée ;

–        enregistrer la demande de marque communautaire ;

–        faire supporter à l’intervenante la charge des dépens de la requérante, aussi bien ceux exposés dans le recours devant le Tribunal que ceux qui l’ont été devant la division d’opposition et la première chambre de recours de l’OHMI.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

13      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens, y compris ceux exposés par la partie intervenante.

 En droit

1.     Sur la recevabilité des conclusions tendant à ce que le Tribunal procède à l’enregistrement de la marque demandée

14      La requérante demande au Tribunal de procéder à l’enregistrement de la marque demandée. De telles conclusions doivent être interprétées comme tendant à enjoindre à l’OHMI d’enregistrer ladite marque.

15      Il résulte d’une jurisprudence constante que, dans le cadre d’un recours introduit devant le juge de l’Union européenne contre la décision d’une chambre de recours de l’OHMI, ce dernier est tenu, conformément à l’article 65, paragraphe 6, du règlement n° 207/2009, de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du juge de l’Union. Dès lors, il n’appartient pas au Tribunal d’adresser des injonctions à l’OHMI, auquel il incombe de tirer les conséquences du dispositif et des motifs des arrêts du juge de l’Union. [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec. p. II‑2579, point 20, et la jurisprudence citée]. Partant, les conclusions de la requérante tendant à ce que le Tribunal ordonne à l’OHMI de faire droit à la demande d’enregistrement sont irrecevables.

2.     Sur la limitation des produits désignés dans la demande d’enregistrement

16      Dans son mémoire en réponse, l’OHMI indique que, le 17 novembre 2010, soit après l’introduction du présent recours, la requérante a introduit une demande pour limiter la liste des produits désignés par la marque demandée aux seules « boissons énergétiques », en supprimant la référence aux « boissons non alcooliques ».

17      En principe, une limitation, au sens de l’article 43, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, de la liste des produits ou des services contenus dans une demande de marque communautaire, qui intervient postérieurement à l’adoption de la décision de la chambre de recours attaquée devant le Tribunal, ne peut affecter la légalité de ladite décision, qui est la seule contestée devant le Tribunal [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 9 juillet 2008, Reber/OHMI – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Mozart), T‑304/06, Rec. p. II‑1927, point 25, et la jurisprudence citée].

18      Toutefois, une déclaration du demandeur de la marque, postérieure à la décision de la chambre de recours, par laquelle celui-ci retire sa demande pour certains des produits initialement visés, peut être interprétée comme une déclaration que la décision attaquée n’est contestée que pour autant qu’elle vise le reste des produits concernés ou comme un désistement partiel, dans le cas où cette déclaration est intervenue à un stade avancé de la procédure devant le Tribunal, laquelle ne modifie pas l’objet du litige. Ainsi, une telle limitation doit être prise en compte par le Tribunal, dans la mesure où il lui est demandé de ne pas contrôler la légalité de la décision de la chambre de recours, pour autant qu’elle porte sur les produits ou services retirés de la liste, mais seulement dans la mesure où elle concerne les autres produits ou services, maintenus sur la même liste (voir, par analogie, arrêt Mozart, point 17 supra, et la jurisprudence citée).

19      Lorsque la limitation de la liste des produits ou des services contenue dans une demande de marque communautaire a pour objet la modification, en tout ou en partie, de la description desdits produits ou services, il ne peut être exclu que cette modification puisse avoir un effet sur l’examen de la marque en question, effectué par les instances de l’OHMI au cours de la procédure administrative. Dans ces circonstances, admettre cette modification au stade du recours devant le Tribunal équivaudrait à une modification de l’objet du litige en cours d’instance, interdite par l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal (arrêt Mozart, point 17 supra, point 29).

20      Dans le cas d’espèce, la limitation opérée par la requérante consiste à retirer de la liste des produits désignés dans la demande de marque l’indication des « boissons non alcooliques » et à ne garder que l’indication « boissons énergétiques ». Une telle limitation peut être prise en considération par le Tribunal.

21      Par suite, il y a lieu de conclure que, pour les besoins du présent litige, les produits désignés par la marque demandée, relevant de la classe 32 et concernés par l’opposition, correspondent à la description « boissons énergétiques ».

3.     Sur le fond

22      À l’appui du recours, la requérante invoque deux moyens tirés, respectivement, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et de la violation du traité CE.

 Sur la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

23      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée ; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

24      Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre ou les marques communautaires dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

25      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement (voir, par analogie, arrêts de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 29, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 17). Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 et 31, et la jurisprudence citée].

26      Cette appréciation globale implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, entre la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêt de la Cour du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI, C‑234/06 P, Rec. p. I‑7333, point 48, et arrêt GIORGIO BEVERLY HILLS, point 25 supra, point 32).

27      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

28      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé qu’il existait un risque de confusion entre la marque antérieure et la marque demandée.

 Sur le public pertinent

29      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Cependant, il convient de tenir compte de la circonstance que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image non parfaite qu’il en a gardée en mémoire [arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 25 supra, point 26, et arrêt du Tribunal du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec. p. II‑449, point 42].

30      La requérante soutient que la chambre de recours n’a pas correctement défini le public pertinent, en ne distinguant pas les consommateurs de « boissons énergétiques » des consommateurs de « boissons non alcooliques ».

31      La chambre de recours a constaté aux points 17 et 32 de la décision attaquée, que le public pertinent était composé de consommateurs moyens dans l’Union, puisque les produits désignés par les marques en conflit étaient des produits de consommation « journalière ».

32      Au préalable, il convient de rappeler que, après prise en considération de la limitation de la liste des produits (voir points 20 et 21 ci-dessus), la marque demandée désigne les boissons énergétiques.

33      Si la requérante soutient que les consommateurs de boissons énergétiques constitueraient un public spécifique, composé essentiellement d’adolescents, qu’elle qualifie de personnes « dans le vent » ou « branchées », et de « fêtards », qui seraient plus réceptifs aux prétendus effets de ces boissons, et plus attentifs pour distinguer les marques en conflit, il convient de constater que, les boissons énergétiques étant des produits de consommation courante, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, au point 32 de la décision attaquée, que le public pertinent était le grand public, dont le degré d’attention ne serait pas plus élevé que la moyenne à leur égard. En outre, la requérante n’a pas démontré que, s’agissant de ces produits, le consommateur ferait, en raison de son appartenance à un groupe d’âge ou de ses habitudes festives, preuve d’un degré d’attention élevé lors de leur achat, à l’instar de ce qui a pu être jugé par le Tribunal s’agissant de produits pour lesquels des consommateurs de la jeune génération peuvent avoir des attentes spécifiques, par exemple sur le plan technologique [arrêt du Tribunal du 9 septembre 2010, adp Gauselmann/OHMI – Maclean (Archer Maclean’s Mercury), T‑106/09, non publié au Recueil, point 20].

34      Dès lors, il résulte des points 32 et 33 ci-dessus que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que le public pertinent était constitué de consommateurs moyens dans l’Union ne faisant pas preuve d’un degré d’attention plus élevé que la moyenne.

 Sur la comparaison des produits

35      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés. (voir, par analogie, arrêt Canon, point 25 supra, point 23, et arrêt PiraÑAM diseño original Juan Bolaños, point 15 supra, point 37, et la jurisprudence citée).

36      Il convient de rappeler que, lorsque les produits visés par la marque antérieure incluent les produits visés par la demande de marque, ces produits sont considérés comme identiques [arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Oberhauser/OHMI – Petit Liberto (Fifties), T‑104/01, Rec. p. II‑4359, points 32 et 33, et du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec. p. II‑4891, point 34].

37      En premier lieu, la requérante soutient que la chambre de recours aurait commis une erreur, en ne reconnaissant pas à quel point les boissons énergétiques seraient distinctes des boissons non alcooliques, par leur nature, leur destination et leur utilisation, et qu’elle aurait conclu à tort que les produits désignés par les marques en conflit étaient identiques, au motif, extrêmement simplificateur, qu’il s’agissait de boissons. Le but premier des boissons énergétiques serait d’améliorer l’activité physique et d’augmenter la vivacité d’esprit ainsi que les performances physiques plutôt que d’étancher la soif.

38      En second lieu, la chambre de recours n’aurait pas tenu compte de la fidélité à la marque des consommateurs de boissons énergétiques, qui sont particulièrement sélectifs et attentifs lors de l’achat.

39      Tout d’abord, il y a lieu de relever que la requérante ne conteste pas que les produits désignés par la marque demandée, à savoir les boissons énergétiques, fassent partie de la catégorie plus large des boissons non alcooliques, désignées par la marque antérieure.

40      Ensuite, il convient de constater que les produits désignés par la marque demandée et ceux désignés par la marque antérieure présentent des caractéristiques communes, puisqu’il s’agit de boissons non alcooliques, lesquelles ont pour principale vertu de rafraîchir, mais également, s’agissant des boissons énergétiques, ainsi que de certaines autres boissons non alcooliques comme les eaux minérales et gazeuses ou les jus de fruits, désignées par la marque antérieure, de revitaliser l’organisme en lui fournissant un apport énergétique.

41      C’est dès lors, à juste titre, que la chambre de recours a constaté, au point 20 de la décision attaquée, que les boissons énergétiques, désignées par la marque demandée, étant comprises dans la catégorie, plus large, des boissons non alcooliques, désignées par la marque antérieure, les produits désignés par les marques en conflit étaient, de ce fait, identiques.

42      Par son argumentation sur la différence de nature, de destination, d’utilisation et de distribution des produits désignés par les marques en conflit, la requérante n’est pas en mesure, notamment eu égard aux caractéristiques communes aux boissons énergétiques et à certaines autres boissons désignées par la marque antérieure (voir point 40 ci-dessus), de remettre en cause la conclusion exposée au point précédent. Il en est de même de l’argument tenant au fait que le public pertinent montrerait une fidélité à la marque au moment d’acheter des boissons énergétiques. En effet, cet argument ne peut être pris en considération au titre de l’analyse de la similitude ou de l’identité des produits visés par les marques en conflit, une telle analyse devant être effectuée de manière objective, au regard, d’une part, des produits couverts par la marque antérieure et, d’autre part, de ceux désignés par la marque demandée.

43      Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’identité des produits visés par les marques en conflit.

 Sur la comparaison des signes

44      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte en particulier de leurs éléments distinctifs et dominants (arrêts de la Cour du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, Rec. p. I‑6191, point 23 ; Lloyd Schuhfabrik Meyer, point 25 supra, point 25, et du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35).

45      Selon une jurisprudence constante, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 30, et du 26 janvier 2006, Volkswagen/OHMI – Nacional Motor (Variant), T‑317/03, non publié au Recueil, point 46].

46      En outre, il a été jugé qu’il y a lieu d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants. Ce n’est toutefois que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant. Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci [voir arrêt du Tribunal du 12 novembre 2008, Shaker/OHMI – Limiñana y Botella (Limoncello della Costiera Amalfitana shaker), T‑7/04, Rec. p. II‑3085, point 40, et la jurisprudence citée].

–       Sur la similitude visuelle

47      La requérante soutient que la chambre de recours aurait commis une erreur dans l’appréciation de l’existence d’une similitude visuelle entre les signes en conflit, en ne prenant pas en considération, dans la marque demandée, les « phénomènes » visuels tels que la couleur et le style, lesquels accentuent le thème de l’enfer, les regardant comme négligeables dans l’impression d’ensemble produite par ladite marque.

48      La chambre de recours a considéré, aux points 25 et 26 de la décision attaquée, que les signes en conflit étaient globalement similaires sur le plan visuel. Elle est parvenue à cette analyse après avoir constaté, premièrement, que la partie composée des quatre premières lettres de la marque antérieure, à savoir « hell », était reproduite dans la marque demandée en caractères standardisés, la seule différence entre les signes en conflit étant la présence de la lettre « a » dans la marque antérieure, deuxièmement, qu’était sans incidence le fait que la marque antérieure, marque verbale, soit écrite en lettres majuscules ou en lettres minuscules, et, troisièmement, que la couleur et la stylisation de la marque demandée ne pouvaient contrebalancer les similitudes entre les deux signes.

49      Si, dans la décision attaquée, la chambre de recours n’a que brièvement évoqué la couleur et le style de la marque demandée, il ne peut être soutenu qu’elle aurait visuellement comparé les signes en conflit, en se limitant à rapprocher les seuls termes « hella » et « hell », et en les tenant pour dominants dans chacun desdits signes au sens de la jurisprudence citée au point 46 ci-dessus. En revanche, elle a considéré que, eu égard à la similitude visuelle entre les deux signes, les termes qui les composaient ne se distinguant que par une seule lettre, de surcroît la dernière, la couleur et la stylisation de la marque demandée ne pouvaient, par elles-mêmes, compenser ladite similitude. Dès lors, la chambre de recours n’a ni analysé la similitude visuelle des signes en conflit sur la base de prétendus éléments dominants ni tenu pour négligeables certains aspects desdits signes.

50      Au regard de la grande similitude visuelle des termes constituant les signes en conflit, la marque antérieure étant une marque verbale pouvant être, à l’instar de la marque demandée, écrite en lettres majuscules, et du peu d’impact que sont susceptibles d’avoir les couleurs et la stylisation de cette dernière sur le public pertinent, il convient de constater que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’une similitude visuelle.

–       Sur la similitude phonétique

51      La requérante fait valoir que, sur le plan phonétique, la chambre de recours a insuffisamment pris en compte l’influence que peuvent exercer les terminaisons différentes de chacun des signes en conflit. En l’espèce, il aurait convenu de prendre en compte le fait que la voyelle « a » à la fin de la marque antérieure influait dans une grande mesure sur sa prononciation, étant accentuée dans de nombreuses langues de l’Union.

52      Au point 27 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les signes en conflit étaient globalement similaires sur le plan phonétique, puisqu’ils coïncidaient par leurs premières syllabes et que le simple ajout de la lettre « a », dans la marque antérieure ne suffirait pas à les distinguer, cette lettre n’étant pas accentuée dans certaines langues de l’Union et pouvant, dès lors, passer inaperçue.

53      Si la requérante soutient qu’une petite différence entre deux signes verbaux relativement brefs est de nature à entraîner une différence dans l’impression d’ensemble, il convient de constater que, en l’espèce, la différence entre les signes en conflit ne porte que sur une seule lettre, la dernière de la marque antérieure, et que, comme le fait valoir l’intervenante, la totalité de la marque demandée se retrouve dans la marque antérieure. Par ailleurs, une telle différence entre lesdits signes ne saurait suffire, sur le plan phonétique, à suffisamment les distinguer, dès lors que la requérante n’a pas démontré que l’appréciation de la chambre de recours, selon laquelle une partie du public pertinent dans l’Union n’accentuerait pas la lettre « a » dans la marque antérieure, était erronée.

54      Par suite, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’une similitude phonétique entre les signes en conflit.

–       Sur la similitude conceptuelle

55      Sur le plan conceptuel, la requérante estime que les signes en conflit seraient différents, les couleurs et la stylisation du mot « hell », lequel serait un mot de langue anglaise compris par le grand public, faisant clairement référence au thème de l’enfer.

56      Il convient de constater que, au point 28 de la décision attaquée, la chambre de recours a reconnu que, pour une partie du public pertinent, les signes en conflit seront perçus comme différents sur le plan conceptuel, eu égard au fait que le mot constituant la marque antérieure ou le mot constituant la marque demandée sera compris. Pour les parties du territoire de l’Union où il en sera ainsi, il n’y aura pas, selon la chambre de recours, de similitude conceptuelle entre les signes en conflit. En revanche, dans les parties du territoire de l’Union où aucun des signes en conflit n’aura de signification pour le public pertinent, la chambre de recours considère qu’une comparaison conceptuelle desdits signes n’influencera pas l’appréciation de leur similitude.

57      Ainsi que le relève l’OHMI en défense, il n’est pas nécessaire, pour apprécier l’existence d’un risque de confusion, qu’un tel risque existe dans tout le territoire pris en considération par la chambre de recours et dans toutes les zones linguistiques de ce territoire. Or, la chambre de recours a constaté que, pour une partie du public pertinent, la marque demandée n’aurait aucune signification.

58      Sur ce point, l’argumentation de la requérante quant à la compréhension par le public pertinent du mot de langue anglaise « hell », ainsi que les nombreuses références à des titres de films ou de chansons, à des noms de groupes musicaux ou à des expressions qui seraient passées dans le langage courant de différents pays de l’Union, ne permettent pas d’invalider la constatation de la chambre de recours. En effet, de tels éléments, s’ils indiquent que le sens de ce mot est certainement connu d’une partie du public pertinent dans une partie du territoire de l’Union, ne démontrent pas que, dans l’ensemble du territoire pertinent pour apprécier la similitude conceptuelle des signes en conflit, le public pertinent, qui est le consommateur moyen, prêterait à ce mot la signification de l’« enfer ».

59      S’agissant de la référence faite à l’arrêt du Tribunal du 30 novembre 2006, Camper/OHMI – JC (BROTHERS by CAMPER) (T‑43/05, non publié au Recueil), elle ne saurait non plus remettre en cause la constatation faite par la chambre de recours quant à la similitude conceptuelle des signes en conflit. Dans cette affaire, le public pertinent, eu égard aux marques nationales antérieures opposées, était constitué de consommateurs moyens danois et finlandais, lesquels, ainsi que le Tribunal l’avait constaté au point 55 dudit arrêt, comprennent généralement, outre les langues nationales de leurs pays respectifs, également l’anglais. Tel n’est pas le cas en l’espèce, le public pertinent étant constitué de consommateurs moyens dans l’Union.

60      Quant à l’argumentation selon laquelle la stylisation du signe de la marque demandée faciliterait la compréhension du sens de celle-ci, les couleurs jaune, rouge et noire véhiculant l’image que les produits de la requérante sont « puissants comme l’enfer », elle n’est pas, pour les raisons suivantes, susceptible d’influencer l’appréciation de la similitude conceptuelle des signes en conflit. Le Tribunal ne peut, en effet, que constater, ainsi qu’il ressort de l’examen de la marque demandée (voir point 1 ci-dessus), premièrement, que le mot formant la marque demandée est écrit dans une police de caractère standard, sans ajout d’effet spécifique, deuxièmement, que les trois couleurs des lettres du mot sont peu marquées et, troisièmement, que l’agencement de ces couleurs ne permet pas, à coup sûr, la compréhension de la signification dudit signe, puisque chacune des lettres comporte la couleur noire dans sa partie basse, la couleur rouge dans sa partie haute et une mince bande de couleur jaune autour de ces parties, le tout étant compris dans un trait de couleur noire, lui-même entouré d’une sorte de fin halo de couleur jaune. Les caractéristiques graphiques de ce signe étant, dès lors, peu élaborées, elles ne sont pas de nature à faciliter la compréhension dans le sens invoqué par la requérante.

61      Par conséquent, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu que, dans les parties du territoire de l’Union où aucun des signes en conflit n’a de signification, la comparaison conceptuelle n’influence pas l’appréciation de leur similitude.

62      Il résulte de tout ce qui précède qu’il existe une similitude visuelle et phonétique entre les signes en conflit.

 Sur le risque de confusion

63      Il convient de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, entre la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt Canon, point 25 supra, point 17, et arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 74].

64      La requérante considère que la chambre de recours n’a pas, lors de l’évaluation du risque de confusion, correctement mis en balance les « facteurs » des marques en conflit, en omettant d’analyser, d’une part, les différences entre les consommateurs concernés par les produits désignés par ces marques et leurs capacités respectives à les distinguer correctement les unes des autres, et, d’autre part, les différences incontestables entre lesdits produits. Pour considérer qu’un risque de confusion existait, la chambre de recours aurait relevé une similitude entre ces produits, en les simplifiant à l’extrême pour les présenter comme des boissons, alors qu’il s’agit de produits différents, consommés et utilisés par des consommateurs différents, les marques de boissons véhiculant des images qui sont l’expression d’un style de vie. Par ailleurs, elle aurait inconsidérément repris l’idée selon laquelle les produits désignés par les marques en conflit sont commandés oralement dans des environnements bruyants.

65      Pour apprécier le risque de confusion, la chambre de recours a tout d’abord constaté, au point 32 de la décision attaquée, que le public pertinent était le grand public, lequel ne ferait pas preuve d’un degré d’attention plus élevé que la moyenne s’agissant des boissons énergétiques. Ensuite, au point 33 de la décision attaquée, la chambre de recours a mis en avant la circonstance que les marques en conflit présentaient une telle similitude, sur les plans visuel et phonétique, qu’un risque de confusion ne pouvait être exclu, notamment eu égard au fait que les consommateurs achetaient les produits en cause sans analyse approfondie. Elle a également relevé, aux points 34 et 35 de la décision attaquée, que l’impact phonétique revêtirait, en l’espèce, une plus grande importance que l’impression visuelle ou conceptuelle, les produits en cause étant pour la plupart achetés dans un environnement bruyant, comme un bar ou un restaurant, et commandés verbalement, et que, même lorsqu’ils seraient achetés en supermarché, le degré de similitude des marques en conflit serait susceptible d’entraîner un risque de confusion entre elles, même d’un point de vue visuel.

66      La chambre de recours a conclu que, au vu de l’identité des produits en cause et de la similitude visuelle et phonétique des marques en conflit, il existait un risque de confusion dans l’esprit du public sur le territoire de l’Union où la marque antérieure était protégée.

67      En raison des similitudes visuelle et phonétique entre les marques en conflit et de l’identité des produits en cause, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion.

68      S’agissant de l’argumentation selon laquelle la chambre de recours aurait commis une erreur en concluant à un risque de confusion au motif qu’elle n’aurait pas pris en considération les différences entre les consommateurs et entre les produits désignés par les marques en conflit, il convient de l’écarter, en rappelant que les « boissons énergétiques », désignées par la marque demandée, sont incluses dans les boissons non alcooliques, pour lesquelles la marque antérieure est enregistrée et qui ne se limitent ni à une catégorie du public pertinent ni à une destination ou à un mode de distribution donné.

69      Enfin, si la chambre de recours a considéré que les produits désignés par les marques en conflit seraient généralement commandés dans des environnements bruyants et s’achèteraient principalement de façon verbale, elle n’a pas limité son analyse du risque de confusion entre lesdites marques à leur seule similitude phonétique. Au contraire, elle a également pris en compte le mode de commercialisation auquel la requérante fait référence, en constatant que, lors d’achat en supermarché, la similitude visuelle entre les marques en conflit pourrait également entraîner un risque de confusion.

70      Par suite, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit.

 Sur la violation du traité CE

71      Dans son second moyen, la requérante soutient que la chambre de recours a accordé à l’intervenante un monopole sur une marque dépassant sa sphère d’activités, et plus particulièrement les droits attachés à la marque antérieure, ce qui constituerait une violation du traité CE et serait contraire aux principes généraux en matière de libre circulation des marchandises et de concurrence.

72      L’OHMI fait valoir que le moyen est irrecevable, la requérante n’avançant, à son soutien, aucune explication autre que l’argument tenant au monopole accordé à l’intervenante.

73      En tout état de cause, il convient de relever que ce moyen est non fondé. En effet, l’article 9, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 établit clairement que la marque communautaire confère à son titulaire un droit exclusif, qui l’habilite à interdire à tout tiers de faire usage d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec ladite marque et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par cette marque et le signe concerné, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du Tribunal du 1er juillet 2008, Apple Computer/OHMI – TKS-Teknosoft (QUARTZ), T‑328/05, non publié au Recueil, point 68].

74      Or, l’existence d’un risque de confusion ayant été établie ci-dessus, le prétendu monopole ne consiste en rien d’autre que l’exercice légitime dudit droit exclusif. À cet égard, il convient de relever, d’une part, que la libre circulation du produit visé par la marque demandée n’est limitée que pour autant qu’elle viole le droit exclusif du titulaire de la marque antérieure et, d’autre part, que l’article 36 TFUE admet des dérogations au principe de la libre circulation des marchandises justifiées par des raisons de protection de la propriété industrielle et commerciale (voir, en ce sens et par analogie, arrêt QUARTZ, point 73 supra, point 69).

75      Aucun des moyens invoqués par la requérante n’étant fondé, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

76      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Hell Energy Magyarország kft est condamnée aux dépens.

Forwood

Schwarcz

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 janvier 2012.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.