Language of document : ECLI:EU:T:2012:22

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

23 janvier 2012 (*)

« Référé – Concurrence – Décision de la Commission refusant la transmission de documents à une autorité nationale de la concurrence – Demande de mesures provisoires – Absence d’intérêt à agir – Méconnaissance des exigences de forme – Absence de caractère provisoire des mesures demandées – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑607/11 R,

Henkel AG & Co. KGaA, établie à Düsseldorf (Allemagne),

Henkel France, établie à Boulogne-Billancourt (France),

représentées par Mes R. Polley, T. Kuhn, F. Brunet et É. Paroche, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission européenne, représentée par MM. N. Khan et P. J. O. Van Nuffel, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande de mesures provisoires relatives à la décision de la Commission du 30 septembre 2011 (affaire COMP/39.579 – Détergents domestiques – et affaire 09/0007 F) rejetant la demande de l’Autorité de la concurrence française de lui transférer, dans le cadre de l’affaire 09/0007 F portant sur le secteur français des détergents, plusieurs documents produits dans l’affaire COMP/39.579,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige, procédure et conclusions des parties

1        En décembre 2009, la Commission européenne a engagé une procédure contre Unilever NV et Unilever PLC (ci-après, ensemble, « Unilever »), The Procter & Gamble Company et Procter & Gamble International Sàrl (ci-après, ensemble, « P&G ») ainsi que Henkel AG & Co. KGaA, la société mère de Henkel France, concernant une entente anticoncurrentielle sur le marché de la consommation des détergents textiles domestiques dans huit États membres dont la France. Cette procédure a été clôturée par la décision C (2011) 2528 final de la Commission, du 13 avril 2011, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/39.579 – Détergents domestiques), dont un résumé est publié au Journal officiel de l’Union européenne du 2 juillet 2011 (JO C 193, p. 14).

2        Ainsi qu’il ressort de la décision C (2011) 2528, Henkel AG & Co. était la première entreprise à informer la Commission, en 2008, de l’existence de l’entente en cause. Par conséquent, en application de sa communication sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2006, C 298, p. 17), la Commission l’a fait bénéficier d’une immunité totale d’amendes (amende fixée à 0 euro). En revanche, P&G et Unilever, qui avaient également déposé des demandes d’application de ladite communication, assorties de plusieurs documents, n’ont obtenu qu’une réduction des amendes que la Commission leur a finalement imposées à hauteur, respectivement, de 211,2 millions d’euros et de 104 millions d’euros.

3        Parallèlement à l’affaire COMP/39.579 instruite par la Commission, l’Autorité de la concurrence française (ci-après l’« ADLC ») a effectué une enquête fondée sur l’article 101 TFUE et son équivalent national, à savoir l’article L. 420-1 du code de commerce français, qui concernait une entente anticoncurrentielle dans le secteur des détergents textiles de consommation en France et qui visait Henkel France, Unilever, P&G et Colgate Palmolive. Les quatre fabricants de lessives visés ayant successivement sollicité le bénéfice du régime de clémence français, Unilever a été considérée comme étant la première entreprise à révéler l’entente et a, dès lors, fait l’objet d’un avis conditionnel de clémence envisageant de lui accorder le bénéfice d’une exonération totale de sanction, alors que la réduction de sanction prévue pour Henkel France ne dépasserait pas le taux de 30 %.

4        Estimant que les comportements anticoncurrentiels poursuivis par la Commission et par l’ADLC constituent une infraction unique ou, à tout le moins, deux infractions étroitement liées portant sur le même objet et rappelant qu’elles ont présenté les mêmes éléments en vue d’obtenir la clémence devant la Commission et devant l’ADLC, les requérantes, Henkel AG & Co. et Henkel France., sont d’avis qu’elles ont été les premières à révéler non seulement à la Commission, mais également à l’ADLC, le lien existant entre lesdits comportements anticoncurrentiels. Selon les requérantes, le dossier de la Commission contient des documents, soumis par P&G et par Unilever, démontrant précisément l’existence de ce lien, documents que les requérantes détiendraient d’ailleurs en copie.

5        Les requérantes ont ainsi remis à la Commission une liste de tous les documents concernés, en expliquant pourquoi il leur était nécessaire de les invoquer dans la procédure devant l’ADLC. La Commission a répondu que l’engagement de confidentialité que les requérantes avaient souscrit dans le cadre de la procédure COMP/39.579 les empêchait de transmettre elles-mêmes ces documents à l’ADLC, mais qu’elles pouvaient demander à l’ADLC d’inviter la Commission à lui remettre une copie desdits documents en application de l’article 11, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101 TFUE] et [102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1). À la suite d’une demande formulée par les requérantes en ce sens, l’ADLC s’est adressée, le 12 septembre 2011, à la Commission pour demander la transmission des documents en cause.

6        Par lettre du 30 septembre 2011 (affaire COMP/39.579 – Détergents domestiques – et affaire 09/0007 F), la Commission a rejeté la demande de transmission des documents de l’ADLC (ci-après la « décision attaquée ») aux motifs que ces documents, soumis par des entreprises demandant la clémence, bénéficiaient d’une protection de confidentialité particulièrement élevée et qu’ils ne pouvaient, en outre, être utilisés comme moyen de preuve, en vertu de l’article 12, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, que pour l’objet pour lequel ils avaient été recueillis. Or, selon la Commission, la procédure COMP/39.579 et la procédure devant l’ADLC portaient sur des infractions différentes au droit de la concurrence, de sorte que les documents ne pouvaient pas être transmis en application du règlement n° 1/2003.

7        C’est dans ces circonstances que, par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 novembre 2011, les requérantes ont introduit un recours visant, en substance, à ce que la décision attaquée soit annulée et à ce qu’il soit ordonné à la Commission d’autoriser la divulgation des documents litigieux dans la procédure en cours devant l’ADLC ou dans la procédure ultérieure devant la cour d’appel de Paris (France). À l’appui du recours, elles ont soulevé un moyen unique, tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 3, TUE, de leurs droits de la défense et du principe de l’égalité des armes. Elles se sont opposées aux considérations de la Commission tenant à ce que la transmission à l’ADLC des documents en cause se heurterait à l’article 12 du règlement n° 1/2003 et au caractère confidentiel desdits documents.

8        Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 2 décembre 2011, les requérantes ont introduit la présente demande en référé, dans laquelle elles ont conclu, en substance, à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        surseoir, en application de l’article 105, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, à l’exécution de la décision attaquée jusqu’à ce que le Tribunal ait statué sur la présente demande en référé ou, en tout état de cause, jusqu’à ce que le Tribunal se soit prononcé sur le recours principal ;

–        ordonner à la Commission d’autoriser la divulgation provisoire des documents dans la procédure en cours devant l’ADLC ou dans la procédure ultérieure devant la cour d’appel de Paris ;

–        condamner la Commission aux dépens ;

–        adopter toute autre mesure jugée utile.

9        Par décision du 8 décembre 2011, l’ADLC a clôturé la procédure dans l’affaire 09/0007 F. Elle a constaté que plusieurs sociétés, dont les requérantes, avaient enfreint l’article 101, paragraphe 1, TFUE et l’article L. 420-1 du code de commerce français par leur participation à une entente anticoncurrentielle dans le secteur des lessives standards pratiquée à l’égard de la grande distribution en France En conséquence, elle a imposé, notamment, à P&G une amende de plus de 200 millions d’euros et aux requérantes une amende de plus de 90 millions d’euros. Toutefois, Unilever a bénéficié d’une exonération totale de la sanction qui lui aurait été infligée en l’absence de clémence.

10      Par télécopie parvenue au greffe du Tribunal le 16 décembre 2011, les requérantes ont indiqué que, compte tenu de la décision de l’ADLC du 8 décembre 2011 – qu’elles avaient l’intention d’attaquer devant la cour d’appel de Paris –, elles entendaient préciser les conclusions tant du recours principal que de la demande en référé en ce sens qu’elles visaient à ce qu’il soit ordonné à la Commission de les autoriser à invoquer les documents en cause dans la procédure devant la cour d’appel de Paris.

11      Dans ses observations sur la demande en référé, déposées au greffe du Tribunal le 22 décembre 2011, la Commission conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        rejeter la demande en référé ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

12      Par acte déposé au greffe du Tribunal le même jour, Unilever a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission. Par mémoire du 9 janvier 2012, les requérantes se sont opposées à cette demande, alors que la Commission s’est prononcée en sa faveur.

 En droit

13      Il ressort d’une lecture combinée de l’article 278 TFUE et de l’article 279 TFUE, d’une part, et de l’article 256, paragraphe 1, TFUE, d’autre part, que le juge des référés peut, s’il estime que les circonstances l’exigent, ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant le Tribunal ou prescrire les mesures provisoires nécessaires. Néanmoins, l’article 278 TFUE pose le principe du caractère non suspensif des recours, les actes adoptés par les institutions, organes et organismes de l’Union européenne bénéficiant d’une présomption de légalité. Ce n’est donc qu’à titre exceptionnel que le juge des référés peut ordonner le sursis à l’exécution d’un tel acte ou prescrire des mesures provisoires (voir, en ce sens, ordonnance du président du Tribunal du 17 décembre 2009, Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht/Commission, T‑396/09 R, non publiée au Recueil, point 31, et la jurisprudence citée).

14      En outre, l’article 104, paragraphe 2, du règlement de procédure dispose que les demandes en référé doivent spécifier l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue l’octroi de la mesure provisoire à laquelle elles concluent. Ainsi, le sursis à exécution et les mesures provisoires peuvent être accordés par le juge des référés s’il est établi que leur octroi est justifié à première vue en fait et en droit (fumus boni juris) et qu’ils sont urgents en ce sens qu’il est nécessaire, pour éviter un préjudice grave et irréparable aux intérêts de la partie qui les sollicite, qu’ils soient édictés et produisent leurs effets dès avant la décision sur le recours principal [ordonnance du président de la Cour du 14 octobre 1996, SCK et FNK/Commission, C‑268/96 P(R), Rec. p. I‑4971, point 30].

15      Dans le cadre de cet examen d’ensemble, le juge des référés dispose d’un large pouvoir d’appréciation et reste libre de déterminer, au regard des particularités de l’espèce, la manière dont ces différentes conditions doivent être vérifiées ainsi que l’ordre de cet examen, dès lors qu’aucune règle de droit ne lui impose un schéma d’analyse préétabli pour apprécier la nécessité de statuer provisoirement [ordonnances du président de la Cour du 19 juillet 1995, Commission/Atlantic Container Line e.a., C‑149/95 P(R), Rec. p. I‑2165, point 23, et du 3 avril 2007, Vischim/Commission, C‑459/06 P(R), non publiée au Recueil, point 25]. Dans ce contexte, le juge des référés peut vérifier, même d’office et in limine litis, la recevabilité de la demande en référé dont il est saisi, les conditions de recevabilité de toute demande en référé étant d’ordre public [voir, en ce sens, ordonnances du président du Tribunal du 18 février 2008, Jurado Hermanos/OHMI (JURADO), T‑410/07 R, non publiée au Recueil, point 25, et du 25 avril 2008, Vakakis/Commission, T‑41/08 R, non publiée au Recueil, point 41].

16      Compte tenu des éléments du dossier, le juge des référés estime qu’il dispose de tous les éléments nécessaires pour statuer sur la présente demande de mesures provisoires, sans qu’il soit utile d’entendre, au préalable, les parties en leurs explications orales.

17      En l’occurrence, il convient d’examiner d’emblée les questions de recevabilité soulevées par la demande en référé.

18      À cet égard, il convient de rappeler que la demande en référé vise notamment à obtenir que le juge des référés, d’une part, sursoit à l’exécution de la décision attaquée, refusant la transmission à l’ADLC des documents litigieux que les requérantes entendaient invoquer dans la procédure en cours devant cette autorité, et, d’autre part, ordonne à la Commission d’autoriser la divulgation provisoire desdits documents dans la procédure devant l’ADLC. Or, il est constant que la procédure en cause a été clôturée par décision de l’ADLC du 8 décembre 2011 (voir point 9 ci-dessus).

19      Dans ces circonstances, ces deux chefs de conclusions en tant qu’ils ont trait à la procédure pendante devant l’ADLC sont devenus sans objet, les requérantes n’étant plus en mesure de se prévaloir des documents en cause devant l’ADLC. Il s’ensuit que, dans cette mesure, les requérantes ne justifient plus d’un intérêt à l’obtention des mesures provisoires sollicitées, celles-ci n’étant pas susceptibles de leur procurer un bénéfice direct (voir, en ce sens, ordonnance du président du Tribunal du 7 mai 2002, Aden e.a./Conseil et Commission, T‑306/01 R, Rec. p. II‑2387, point 57 ; arrêt du Tribunal du 28 septembre 2004, MCI/Commission, T‑310/00, Rec. p. II‑3253, point 44, et la jurisprudence citée, et ordonnance du président du Tribunal du 12 mai 2006, Gollnisch/Parlement, T‑42/06 R, non publiée au Recueil, point 28).

20      Par ailleurs, ainsi qu’il ressort de leur télécopie du 16 décembre 2011, les requérantes semblent elles-mêmes considérer que l’adoption de la décision de l’ADLC du 8 décembre 2011 a privé d’objet les deux chefs de conclusions susmentionnés, puisqu’elles indiquent vouloir demander dorénavant qu’il soit ordonné à la Commission de les autoriser à invoquer les documents litigieux dans la procédure devant la cour d’appel de Paris. Cependant, cette télécopie n’a pas été suivie du dépôt de la version originale signée de l’acte de procédure en cause. Par conséquent, à défaut de respecter les conditions de l’article 43, paragraphe 1, du règlement de procédure, les requérantes n’ont pas valablement modifié les conclusions de la demande en référé, ni d’ailleurs celles du recours principal.

21      S’agissant plus particulièrement de la demande de sursis à l’exécution de la décision attaquée, il convient d’ajouter que cette décision, rejetant une demande de l’ADLC, constitue une décision administrative négative. Or, selon une jurisprudence bien établie, en principe, une demande de sursis à l’exécution d’une telle décision ne se conçoit pas, l’octroi du sursis sollicité ne pouvant avoir pour effet de modifier la situation du requérant. En effet, le sursis à l’exécution de la décision attaquée ne serait d’aucune utilité pratique pour les requérantes, dans la mesure où un tel sursis ne pourrait tenir lieu de décision positive faisant droit à cette demande. Ce chef de conclusions doit, dès lors et en tout état de cause, être rejeté pour défaut d’intérêt à agir, sauf dans la mesure où le sursis à l’exécution de la décision attaquée pourrait être nécessaire afin de prescrire l’une des autres mesures provisoires sollicitées par les requérantes, que le juge des référés jugerait recevables et fondées (voir, en ce sens, ordonnance Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht/Commission, précitée, points 34 et 35, et la jurisprudence citée).

22      En ce qui concerne ces autres mesures provisoires, force est de constater que le chef de conclusions invitant le juge des référés à adopter toute autre mesure jugée utile revêt un caractère vague et imprécis, de sorte qu’il ne remplit pas les conditions de l’article 44, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure, auquel renvoie l’article 104, paragraphe 3, de ce même règlement. Par conséquent, ce chef de conclusions doit être déclaré manifestement irrecevable (voir, en ce sens, ordonnance Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht/Commission, précitée, point 36, et la jurisprudence citée).

23      S’agissant du chef de conclusions invitant le juge des référés à ordonner à la Commission d’autoriser la divulgation provisoire des documents litigieux dans la procédure ultérieure devant la cour d’appel de Paris, il s’avère qu’il correspond à celui présenté dans le recours principal et visant à ce qu’il soit ordonné à la Commission d’autoriser la divulgation des documents litigieux dans la procédure ultérieure devant la cour d’appel de Paris. Or, bien que les requérantes aient pris soin de qualifier la divulgation sollicitée de « provisoire », ce chef de conclusions de la demande en référé méconnaît la jurisprudence constante selon laquelle, d’une part, les mesures que peut ordonner le juge des référés sont provisoires, en ce sens qu’elles doivent cesser, en principe, de produire leurs effets dès le prononcé de l’arrêt qui met fin à l’instance et ne peuvent préjuger en rien la décision du Tribunal à rendre ultérieurement sur le recours principal, ni neutraliser par avance les conséquences de cette décision, et, d’autre part, ces mesures sont de nature accessoire, en ce sens qu’elles doivent tendre uniquement à sauvegarder, pendant la procédure principale devant le Tribunal, les intérêts d’une des parties au litige afin de ne pas rendre illusoire l’arrêt au principal en le privant d’effet utile (voir, en ce sens, ordonnances du président de la Cour du 17 mai 1991, CIRFS e.a./Commission, C‑313/90 R, Rec. p. I‑2557, points 23 et 24 ; et Commission/Atlantic Container Line e.a., précitée, point 22 ; ainsi que du président du Tribunal du 17 décembre 1996, Moccia Irme/Commission, T‑164/96 R, Rec. p. II‑2261 point 29 ; du 3 mars 1997, Comafrica et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, T‑6/97 R, Rec. p. II‑291, point 51, et du 7 mai 2002, Aden e.a./Conseil et Commission, T‑306/01 R, Rec. p. II‑2387, point 41).

24      En l’espèce, si les documents litigieux étaient divulgués dans la procédure devant la cour d’appel de Paris à la suite d’une mesure provisoire telle que sollicitée par les requérantes, il est évident que cette divulgation préjugerait la décision du Tribunal sur le recours principal, ayant pour objet justement la divulgation de ces mêmes documents. De plus, la divulgation de ces documents produirait des effets, à savoir la prise de connaissance de leur contenu par toutes les personnes ayant accès à la procédure devant ladite cour d’appel, qui ne pourraient cesser dès le prononcé de la décision du Tribunal (voir, par analogie, ordonnance du président du Tribunal du 3 mars 1998, Carlsen e.a./Conseil, T‑610/97 R, Rec. p. II‑485, point 56). Ainsi, une telle mesure provisoire ne se conçoit pas dans la mesure où elle est susceptible de neutraliser par avance les conséquences de la décision à rendre ultérieurement sur le fond (voir, en ce sens, ordonnance du président de la troisième chambre de la Cour du 20 juillet 1981, Alvarez/Parlement, 206/81 R, Rec. p. 2187, point 6).

25      Par conséquent, le chef de conclusions invitant le juge des référés à ordonner à la Commission d’autoriser la divulgation provisoire des documents litigieux dans la procédure devant la cour d’appel de Paris doit également être déclaré irrecevable.

26      Il résulte de tout ce qui précède que la présente demande en référé doit être rejetée comme irrecevable, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la recevabilité du recours principal, sur lequel elle se greffe, dans la mesure où il vise notamment à obtenir, dans le cadre du contentieux relatif au contrôle de légalité, qu’il soit adressé à la Commission l’injonction d’autoriser la divulgation des documents en cause dans la procédure devant la cour d’appel de Paris.

27      Dans ces circonstances, il n’est pas besoin de statuer sur la demande d’intervention d’Unilever.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      La demande en référé est rejetée.

2)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 23 janvier 2012.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’anglais.