Language of document : ECLI:EU:C:2020:118

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

27 février 2020 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Règlement (CE) n° 207/2009 – Article 7, paragraphe 1, sous f) – Motif absolu de refus – Marque contraire aux bonnes mœurs – Signe verbal “Fack Ju Göhte” – Rejet de la demande d’enregistrement »

Dans l’affaire C‑240/18 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 4 avril 2018,

Constantin Film Produktion GmbH, établie à Munich (Allemagne), représentée par Mes E. Saarmann et P. Baronikians, Rechtsanwälte,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. D. Hanf, en qualité d’agent,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. E. Regan, président de chambre, MM. I. Jarukaitis, E. Juhász, M. Ilešič (rapporteur) et C. Lycourgos, juges,

avocat général : M. M. Bobek,

greffier : Mme C. Strömholm, administratrice,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 13 février 2019,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 2 juillet 2019,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi, Constantin Film Produktion GmbH demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 24 janvier 2018, Constantin Film Produktion/EUIPO (Fack Ju Göhte) (T‑69/17, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2018:27), par lequel celui‑ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 1er décembre 2016 (affaire R 2205/2015‑5, ci-après la « décision litigieuse »), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal « Fack Ju Göhte » comme marque de l’Union européenne.

 Le cadre juridique

2        Le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), a été modifié par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015 (JO 2015, L 341, p. 21), lequel est entré en vigueur le 23 mars 2016. Le règlement n° 207/2009, tel que modifié par le règlement 2015/2424, a été abrogé et remplacé, avec effet au 1er octobre 2017, par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1). Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 21 avril 2015, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement n° 207/2009.

3        L’article 7 du règlement n° 207/2009, intitulé « Motifs absolus de refus », prévoit, à ses paragraphes 1 à 3 :

« 1.      Sont refusés à l’enregistrement :

[...]

f)      les marques qui sont contraires à l’ordre public ou aux bonnes mœurs ;

[...]

2.      Le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de [l’Union européenne]. 

3.      Le paragraphe 1, points b), c) et d) n’est pas applicable si la marque a acquis pour les produits ou services pour lesquels est demandé l’enregistrement un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait. »

4        L’article 75 du règlement n° 207/2009, intitulé « Motivation des décisions », énonce:

« Les décisions de l’Office sont motivées. [...] »

5        L’article 76 du règlement n° 207/2009, intitulé « Examen d’office des faits », prévoit, à son paragraphe 1 :

« Au cours de la procédure, l’Office procède à l’examen d’office des faits ; toutefois, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties. »

6        Le considérant 21 du règlement 2015/2424 énonce :

« (21)      [...] En outre, le présent règlement devrait être appliqué de façon à garantir le plein respect des libertés et droits fondamentaux, en particulier la liberté d’expression. »

7        Le considérant 21 du règlement 2017/1001 reprend, à l’identique, les termes du considérant 21 du règlement 2015/2424 énoncés au point précédent.

 Les antécédents du litige et la décision litigieuse

8        Le 21 avril 2015, la requérante, Constantin Film Produktion, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’EUIPO, en vertu du règlement no 207/2009.

9        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal « Fack Ju Göhte », qui est, par ailleurs, le titre d’une comédie cinématographique allemande, produite par la requérante, ayant été l’un des plus grands succès cinématographiques de l’année 2013 en Allemagne. Deux suites à cette comédie cinématographique ont été produites par la requérante, lesquelles sont sorties en salle sous les titres « Fack Ju Göhte 2 » et « Fack Ju Göhte 3 » respectivement en 2015 et en 2017.

10      Les produits et les services pour lesquels ledit enregistrement a été demandé relèvent des classes 3, 9, 14, 16, 18, 21, 25, 28, 30, 32, 33, 38 et 41 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Préparations pour blanchir et autres substances pour lessiver ; préparations pour nettoyer, polir, dégraisser et abraser ; savons, parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux, dentifrices » ;

–        classe 9 : « Supports de données enregistrées en tous genres ; publications électroniques (téléchargeables), à savoir données audio, vidéo, textes, images et graphiques au format numérique ; appareils et instruments photographiques, cinématographiques et d’enseignement ; appareils pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction du son ou des images ; [...] » ;

–        classe 14 : « Joaillerie ; bijouterie ; pierres précieuses ; [...] » ;

–        classe 16 : « Produits de l’imprimerie ; photographies ; papeterie ; articles de bureau [...] » ;

–        classe 18 : « Malles et valises ; parapluies et parasols ; cannes ; bagages ; [...] » ;

–        classe 21 : « Verrerie, porcelaine et faïence non compris dans d’autres classes ; chandeliers » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie » ;

–        classe 28 : « Jeux, jouets ; articles de gymnastique et de sport non compris dans d’autres classes ; décorations pour sapins de Noël » ;

–        classe 30 : « Café, thé, cacao et succédanés du café ; riz ; tapioca et sagou ; farines et préparations faites de céréales, pain, pâtisserie et confiserie ; glaces alimentaires ; sucre, miel, mélasse ; levure, poudre pour faire lever ; [...] » ;

–        classe 32 : « Bières ; eaux minérales et gazeuses et autres boissons sans alcool ; boissons à base de fruits et jus de fruits ; [...] » ;

–        classe 33 : « Boissons alcooliques (à l’exception des bières) » ;

–        classe 38 : « Services de télécommunication ; mise à disposition de salons de discussion et de forums sur l’internet, transmission de données via l’internet [...] » ;

–        classe 41 : « Éducation ; formation ; divertissement, en particulier divertissements télévisés et cinématographiques, montage de programmes radiophoniques et de télévision, production radiophonique, télévisuelle et cinématographique, location de films cinématographiques, présentations de films dans des cinémas ; activités sportives et culturelles ».

11      Par décision du 25 septembre 2015, l’examinateur a refusé la demande d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 2, de ce règlement, pour les produits et les services visés au point précédent.

12      Le 5 novembre 2015, la requérante a formé un recours devant l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009, contre la décision de l’examinateur.

13      Par la décision litigieuse, la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté ce recours.

 La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

14      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 3 février 2017, la requérante a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse.

15      À l’appui de son recours, la requérante a soulevé deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 207/2009 et, le second, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce règlement.

16      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté ces deux moyens et, partant, le recours dans son ensemble.

 Les conclusions des parties devant la Cour

17      La requérante demande à la Cour :

–        d’annuler l’arrêt attaqué, et

–        de condamner l’EUIPO aux dépens.

18      L’EUIPO demande à la Cour :

–        de rejeter le pourvoi, et

–        de condamner la requérante aux dépens.

 Sur le pourvoi

19      À l’appui de son pourvoi, la requérante soulève trois moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 207/2009, le deuxième, de la violation du principe de l’égalité de traitement et, le troisième, de la violation des principes de sécurité juridique et de bonne administration.

20      Il y a lieu d’examiner, en premier lieu, le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 207/2009.

 Argumentation des parties

21      Par son premier moyen, la requérante reproche, en substance, au Tribunal d’avoir commis, dans le cadre de son examen du point de savoir si la marque demandée porte atteinte aux bonnes mœurs, plusieurs erreurs dans l’interprétation et l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 207/2009. Ce moyen s’articule en quatre branches.

22      En premier lieu, la requérante affirme que le Tribunal a méconnu le principe de l’examen individuel en ce qu’il n’aurait pas examiné la marque demandée, à savoir Fack Ju Göhte, mais le signe « Fuck you, Goethe ».

23      En outre, la requérante fait valoir que les expressions « Fuck » et « Fuck you » ont perdu de leur vulgarité à la suite des évolutions du langage dans la société. Il n’y aurait pas de refus général d’enregistrer en tant que marques des expressions comprenant ces termes, comme en attesterait l’enregistrement de signes tels que « Fucking Hell » et « MACAFUCKER » en tant que marques de l’Union européenne.

24      En deuxième lieu, la requérante soutient que le Tribunal a fait une application trop extensive du motif absolu de refus, relatif aux bonnes mœurs, visé à l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009, en appliquant les appréciations concernant les termes « Fuck » et « Fuck you » à la marque demandée dans sa globalité et en considérant que le signe verbal « Fack Ju Göhte » est empreint d’une vulgarité intrinsèque que l’élément « Göhte » n’est pas susceptible d’atténuer.

25      La requérante considère, notamment, que le Tribunal n’a pas fait preuve de la prudence et de la sensibilité requises dans l’application de ce motif de refus qui, tout en concernant des valeurs subjectives, devrait être appliqué de manière restrictive et aussi objectivement que possible afin d’éviter le risque que des signes soient exclus de l’enregistrement au seul motif qu’ils ne correspondent pas au goût personnel de celui qui effectue l’examen. Ainsi, le Tribunal aurait dû tenir compte du fait que l’impression globale de la marque demandée revêt, compte tenu de la transcription phonétique en langue allemande de l’expression « Fuck You » combinée à l’élément « Göhte » compris comme désignant des matières scolaires impopulaires, un caractère anodin, enfantin et ludique, exprimant la frustration scolaire.

26      En troisième lieu, la requérante soutient que c’est à tort que le Tribunal a considéré qu’il n’est pas établi que le public germanophone pertinent ne serait pas choqué par la marque demandée en rapport avec les produits et les services revendiqués. À cet égard, elle fait valoir que le Tribunal a fait une application erronée des règles relatives à la charge de la preuve. En outre, le Tribunal aurait méconnu le fait que la perception de la marque demandée par le public pertinent ne pourrait pas être déterminée de manière abstraite et détachée de toute base empirique, sur le seul fondement de valeurs subjectives, mais devrait être évaluée en tenant compte des éléments fournissant des indices relatifs à la perception réelle par ce public. Or, notamment le grand succès du film éponyme ainsi que l’utilisation de ce film par l’Institut Goethe (Allemagne) à des fins pédagogiques démontreraient que le grand public germanophone, qui est le public pertinent en l’espèce, comprend le caractère humoristique de la marque demandée et ne la considère aucunement comme choquante ou vulgaire.

27      En quatrième lieu, en raison de ses appréciations erronées, le Tribunal aurait commis une erreur de droit lors de la mise en balance, d’une part, de l’intérêt de la requérante à l’enregistrement de la marque demandée et, d’autre part, de l’intérêt du public à ne pas être confronté à des marques qui sont contraires aux bonnes mœurs, et donc à des marques qui sont dérangeantes, grossières, insultantes ou même menaçantes.

28      L’EUIPO soutient que le premier moyen doit être rejeté.

29      Premièrement, l’EUIPO estime que l’argument de la requérante selon lequel le Tribunal aurait examiné le signe « Fuck you, Goethe » et non pas la marque demandée, à savoir Fack Ju Göhte, repose sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué. Les points 17, 18 et 20 de cet arrêt devraient être lus au regard de la prémisse exposée au point 16 dudit arrêt, selon laquelle le consommateur « perçoit normalement une marque comme un tout », ce qui ne l’empêche pas d’identifier des « éléments verbaux qui, pour lui, suggèrent une signification concrète ou ressemblent à des mots qu’il connaît ».

30      Deuxièmement, l’argument de la requérante selon lequel les expressions « Fuck » et « Fuck you » auraient perdu leur signification sexuelle initiale, de sorte qu’elles ne seraient plus perçues comme vulgaires et choquantes, serait irrecevable dès lors qu’il concernerait une constatation de fait. En tout état de cause, cet argument ne serait pas fondé dès lors que le Tribunal aurait constaté la vulgarité inhérente de l’expression « Fuck you » également dans l’hypothèse où cette expression n’est, en raison de l’évolution du langage, plus comprise dans sa connotation sexuelle.  

31      Troisièmement, l’EUIPO fait valoir que le Tribunal a, au point 18 de l’arrêt attaqué, explicitement tenu compte du changement de sens de l’expression « Fuck you », en expliquant qu’elle peut également être utilisée pour exprimer la colère, la défiance ou le mépris à l’égard d’une personne.

32      Quatrièmement, l’EUIPO considère comme non fondé l’argument de la requérante selon lequel le Tribunal aurait retenu une interprétation erronée de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 207/2009, en constatant que le grand succès du film Fack Ju Göhte ne signifie pas que le public pertinent ne serait pas choqué par la marque demandée. Contrairement à ce que fait valoir la requérante, le Tribunal n’aurait pas appliqué un critère purement subjectif lors de l’examen des bonnes mœurs, mais aurait explicitement analysé, aux points 28 à 30 de l’arrêt attaqué, la possibilité que la marque demandée ne soit pas vulgaire, mais qu’elle puisse être comprise comme une « blague ».

33      L’EUIPO fait valoir, dans ce contexte, que l’objectif du droit d’exclusivité accordé par une marque serait d’assurer la concurrence non faussée et non pas la liberté d’expression, alors que le titre d’un film servirait à distinguer une œuvre artistique d’une autre et à désigner son contenu tout en exprimant la liberté d’expression et la liberté artistique. Le consommateur moyen serait conscient de cette différence et ne percevrait donc pas nécessairement les marques et les titres de films de la même manière. Partant, même pour les consommateurs qui connaîtraient le film en cause, il ne serait pas possible de présumer que la marque demandée est perçue comme une « blague ». En outre, les consommateurs pertinents en l’espèce seraient nettement plus nombreux que ceux qui connaissent le film en cause et qui sont familiarisés avec « l’argot des jeunes ».

34      Cinquièmement, l’EUIPO soutient que le Tribunal a correctement conclu que, si la marque demandée est constituée d’un terme qui est perçu par le public pertinent comme intrinsèquement vulgaire et donc comme choquant, il s’agit d’une « marque manifestement obscène » et contraire aux « bonnes mœurs ».

35      Sixièmement, l’EUIPO estime que c’est à tort que la requérante reproche au Tribunal d’avoir effectué un renversement illicite de la charge de la preuve au point 30 de l’arrêt attaqué en considérant qu’il ne serait pas établi que le public pertinent reconnaisse dans la marque demandée le titre du film en cause et donc une « blague ». Ce constat devrait être lu dans son contexte. S’il était vrai que, en vertu de l’article 75, paragraphe 1, et de l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, les motifs absolus de refus devraient être examinés d’office par l’EUIPO et que leur existence devrait être motivée de manière cohérente, il n’en resterait pas moins que, lorsque l’EUIPO ou le Tribunal, auquel s’appliqueraient ces mêmes exigences légales lorsque ce dernier rejette un recours dirigé contre le rejet d’une demande de marque par l’EUIPO, confrontent le demandeur à des faits notoires ou à une appréciation fondée sur l’inaptitude de la marque demandée à être enregistrée, il incomberait au demandeur de les réfuter par des informations concrètes et fondées. Or, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal respecterait lesdites exigences légales.

36      Enfin, septièmement, l’EUIPO considère que l’argument de la requérante, selon lequel le Tribunal n’aurait pas effectué une juste mise en balance des intérêts du demandeur et du public, n’est pas fondé.

 Appréciation de la Cour

37      En vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 207/2009, les marques qui sont contraires à l’ordre public ou aux bonnes mœurs sont refusées à l’enregistrement. En outre, il résulte de l’article 7, paragraphe 2, de ce règlement que les motifs absolus de refus énoncés à l’article 7, paragraphe 1, dudit règlement sont applicables même s’ils n’existent que dans une partie de l’Union.

38      Ainsi que l’a constaté le Tribunal au point 24 de l’arrêt attaqué, sans être contredit par la requérante, l’EUIPO a refusé, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 207/2009, l’enregistrement du signe verbal « Fack Ju Göhte » non pas en raison d’une éventuelle contrariété de ce signe à l’ordre public, mais au seul motif que celui-ci serait contraire aux bonnes mœurs. Ce n’est donc qu’au regard de ce dernier motif absolu de refus qu’il convient d’examiner le premier moyen du pourvoi.

39      S’agissant dudit motif de refus, il convient de relever que la notion de « bonnes mœurs » n’étant pas définie par le règlement n° 207/2009, elle doit être interprétée en tenant compte de son sens habituel ainsi que du contexte dans lequel elle est généralement utilisée. Or, comme l’a relevé en substance M. l’avocat général au point 77 de ses conclusions, cette notion se réfère, dans son sens habituel, aux valeurs et aux normes morales fondamentales auxquelles une société adhère à un moment donné. Ces valeurs et ces normes, qui sont susceptibles d’évoluer au fil du temps et de varier dans l’espace, doivent être déterminées en fonction du consensus social prévalant dans cette société au moment de l’évaluation. Aux fins de cette détermination, il doit être tenu dûment compte du contexte social, y compris, le cas échéant, des diversités culturelles, religieuses ou philosophiques qui le caractérisent, afin d’évaluer, de manière objective, ce que ladite société considère à ce moment comme moralement acceptable.

40      Par ailleurs, dans le cadre de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 207/2009, l’examen du point de savoir si un signe, dont l’enregistrement en tant que marque de l’Union européenne est demandé, est contraire aux bonnes mœurs nécessite une analyse de l’ensemble des éléments propres à l’espèce afin de déterminer la manière dont le public pertinent percevrait un tel signe en cas d’utilisation de celui-ci en tant que marque pour les biens ou les services revendiqués.

41      À cet égard, pour relever du champ d’application de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 207/2009, il n’est pas suffisant que le signe concerné soit considéré comme étant de mauvais goût. Celui-ci doit, au moment de l’examen, être perçu par le public pertinent comme allant à l’encontre des valeurs et des normes morales fondamentales de la société telles qu’elles existent à ce moment.

42      Afin d’établir si tel est le cas, il y a lieu de se fonder sur la perception d’une personne raisonnable ayant des seuils de sensibilité et de tolérance moyens, en tenant compte du contexte dans lequel la marque est susceptible d’être rencontrée ainsi que, le cas échéant, des circonstances particulières propres à la partie de l’Union concernée. À cet effet, sont pertinents des éléments tels que les textes législatifs et les pratiques administratives, l’opinion publique et, le cas échéant, la manière dont le public pertinent a réagi dans le passé à ce signe ou à des signes similaires, ainsi que tout autre élément susceptible de permettre d’évaluer la perception de ce public.

43      L’examen qui est ainsi à effectuer ne saurait se limiter à une appréciation abstraite de la marque demandée, voire de certaines composantes de celle-ci, mais il doit être établi, en particulier lorsque le demandeur a invoqué des éléments qui sont susceptibles de mettre en doute le fait que cette marque est perçue par le public pertinent comme contraire aux bonnes mœurs, que l’utilisation de ladite marque dans le contexte social concret et actuel serait effectivement perçue par ce public comme allant à l’encontre des valeurs et des normes morales fondamentales de la société.

44      C’est au regard de ces principes qu’il convient d’examiner le bien-fondé du premier moyen, tiré d’une interprétation et d’une application erronées par le Tribunal de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 207/2009.

45      En l’occurrence, il n’est pas contesté, ainsi que l’a constaté le Tribunal aux points 14 et 17 de l’arrêt attaqué en confirmant à cet égard l’appréciation de la chambre de recours, que le public pertinent est composé du grand public germanophone de l’Union, à savoir notamment celui d’Allemagne et d’Autriche.

46      S’agissant de la perception de la marque demandée par ce public, le Tribunal a relevé, au point 18 de l’arrêt attaqué, que ledit public assimilera cette marque à l’expression anglaise « Fuck you » assortie du patronyme Goethe, le tout rédigé avec une orthographe différente résultant d’une retranscription phonétique en langue allemande de ces termes. Si, dans son sens premier, l’expression anglaise « Fuck you » possédait une connotation sexuelle et était empreinte de vulgarité, elle serait également utilisée dans un contexte différent pour exprimer de la colère, de la défiance ou du mépris à l’égard d’une personne. Toutefois, même dans une telle hypothèse, cette expression n’en demeurerait pas moins empreinte d’une vulgarité intrinsèque et l’ajout de l’élément « Göhte » à la fin du signe en cause, s’il permettait d’identifier à qui sont « adressés » les termes composant le début dudit signe, ne serait pas susceptible d’en atténuer la vulgarité.

47      Au point 19 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a ajouté que, contrairement à ce qu’a suggéré la requérante, la circonstance que le film Fack Ju Göhte ait été vu par plusieurs millions de personnes lors de sa sortie cinématographique ne signifie pas que le public pertinent ne serait pas choqué par la marque demandée.

48      Il en a conclu au point 20 de l’arrêt attaqué que, dans ces conditions, il y avait lieu de considérer que c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que l’expression anglaise « Fuck you » et, partant, la marque demandée dans son ensemble étaient intrinsèquement vulgaires et qu’elles étaient susceptibles de choquer le public pertinent. Dès lors, ce serait à bon droit qu’elle en a déduit que la marque demandée devait être refusée à l’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009.

49      À cet égard, il y a lieu de constater que l’examen effectué par le Tribunal ne satisfait pas aux standards que commande l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009, exposés aux points 39 à 43 du présent arrêt.

50      En effet, compte tenu du contexte social et des éléments invoqués à cet égard par la requérante, et en particulier du fait que le signe verbal « Fack Ju Göhte » correspond, ainsi que le Tribunal l’a relevé aux points 2 et 19 de l’arrêt attaqué, au titre d’une comédie cinématographique allemande, produite par la requérante, ayant été l’un des plus grands succès cinématographiques de l’année 2013 en Allemagne et ayant été vue par plusieurs millions de personnes lors de sa sortie en salle, le Tribunal, afin d’établir à suffisance de droit que la marque demandée est perçue par le grand public germanophone comme contraire aux bonnes mœurs, ne pouvait pas se borner à une appréciation abstraite de cette marque et de l’expression anglaise à laquelle la première partie de celle-ci est assimilée par ce public.

51      Ainsi, la circonstance que c’est cette marque elle-même qu’il convient d’examiner ne signifie pas que, lors de cet examen, il pourrait être fait abstraction d’éléments de contexte, susceptibles d’éclairer la manière dont le public pertinent perçoit ladite marque.

52      Comme l’a relevé M. l’avocat général au point 94 de ses conclusions, figurent parmi de tels éléments le grand succès de ladite comédie éponyme auprès du grand public germanophone et la circonstance que son titre ne semble pas avoir suscité de controverses, ainsi que le fait que l’accès du jeune public à celle-ci avait été autorisé et que l’Institut Goethe, qui est l’institut culturel de la République fédérale d’Allemagne actif au niveau mondial dont l’une des missions est de promouvoir la connaissance de la langue allemande, s’en sert à des fins pédagogiques.

53      Dans la mesure où ces éléments sont, a priori, susceptibles de constituer un indice que, nonobstant l’assimilation de la première partie de la marque demandée à l’expression anglaise « Fuck you », le grand public germanophone ne perçoit pas le signe verbal « Fack Ju Göhte » comme moralement inacceptable, le Tribunal, pour conclure à l’incompatibilité de ce signe avec les bonnes mœurs, ne pouvait pas se fonder uniquement sur le caractère intrinsèquement vulgaire de cette expression anglaise, sans examiner lesdits éléments et sans exposer de manière concluante les raisons pour lesquelles il estime, malgré ceux-ci, que le grand public germanophone perçoit ledit signe comme allant à l’encontre des valeurs et des normes morales fondamentales de la société lorsque celui-ci est utilisé en tant que marque.

54      Ne suffisent notamment pas à ces exigences d’examen et de motivation de simples affirmations, telles que celle figurant au point 19 de l’arrêt attaqué, reproduite au point 47 du présent arrêt, ou celle figurant au point 30 de l’arrêt attaqué, selon laquelle il ne serait pas établi que, à l’occasion des activités lors desquelles le public pertinent est susceptible d’être confronté à la marque demandée, ce public reconnaisse dans cette marque le titre d’un film à succès et perçoive ladite marque comme une « blague ».

55      S’agissant en particulier de cette dernière affirmation, il importe de relever, d’une part, que le Tribunal était tenu, dans l’arrêt attaqué, de s’assurer que l’EUIPO n’avait pas méconnu l’article 76, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 qui, dans le cadre d’une procédure concernant des motifs absolus de refus, impose à ce dernier de procéder à un examen d’office des faits et d’établir à suffisance de droit la présence de tels motifs. D’autre part, la nécessité d’examiner des éléments de contexte tels que ceux figurant au point 52 du présent arrêt aux fins de l’évaluation concrète de la manière dont le public pertinent perçoit la marque demandée n’est nullement soumise à la condition qu’il soit établi que ce public reconnaisse en cette marque le titre de la comédie éponyme ou qu’il perçoive ladite marque comme une « blague », l’absence de ces deux circonstances ne permettant d’ailleurs pas d’établir un outrage aux bonnes mœurs.

56      Enfin, il convient encore d’ajouter que, contrairement à ce que constate le Tribunal au point 29 de l’arrêt attaqué, aux termes duquel « il existe, dans le domaine de l’art, de la culture et de la littérature, un souci constant de préserver la liberté d’expression qui n’existe pas dans le domaine des marques », la liberté d’expression, consacrée à l’article 11 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doit, ainsi que l’a reconnu l’EUIPO lors de l’audience et comme l’a exposé M. l’avocat général aux points 47 à 57 de ses conclusions, être prise en compte lors de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009. Une telle conclusion est d’ailleurs corroborée tant par le considérant 21 du règlement 2015/2424, qui a modifié le règlement no 207/2009, que par le considérant 21 du règlement 2017/1001, lesquels soulignent expressément la nécessité d’appliquer ces règlements de façon à garantir le plein respect des libertés et des droits fondamentaux, en particulier de la liberté d’expression.

57      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’interprétation et l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009, auxquelles le Tribunal s’est livré dans l’arrêt attaqué, sont entachées d’erreurs de droit, qui suffisent à elles seules à accueillir le premier moyen du pourvoi, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres arguments invoqués par la requérante au soutien de ce moyen.

58      En conséquence, l’arrêt attaqué doit être annulé, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les deuxième et troisième moyens du pourvoi.

 Sur le recours devant le Tribunal

59      En vertu de l’article 61, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lorsque le pourvoi est fondé, la Cour peut statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé.

60      Tel est le cas en l’espèce.

61      Par son premier moyen, la requérante a fait valoir, devant le Tribunal, que la décision litigieuse enfreint l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009.

62      Or, il convient de constater que cette décision, et notamment l’examen effectué aux points 21 à 41 de celle-ci, portant sur la perception de la marque demandée par le public pertinent, présente, en grande partie, les mêmes erreurs que celles entachant l’arrêt attaqué.

63      Ainsi, après avoir constaté en substance, aux points 21 à 23 de la décision litigieuse, que le public pertinent reconnaît dans la première partie de la marque demandée l’expression anglaise « Fuck you », la chambre de recours a relevé, aux points 24 à 28 de cette décision, que cette expression est vulgaire et choquante. Elle a par la suite considéré, aux points 29 à 33 de ladite décision que l’ajout de l’élément « Göhte » n’est pas en mesure de modifier de façon substantielle la perception de l’insulte « Fack ju », en se fondant sur une appréciation largement abstraite de l’expression anglaise « Fuck you » et sans tenir compte des éléments de contexte mentionnés au point 52 du présent arrêt.

64      S’agissant de ces éléments, la chambre de recours a concédé, au point 36 de la décision litigieuse, qu’il peut être indubitablement déduit des documents produits par la requérante que la comédie Fack ju Göhte, vue par près de 7,4 millions de spectateurs en Allemagne, et la comédie Fack ju Göhte 2 comptent parmi les plus grands succès du cinéma allemand en termes de nombre de spectateurs et ont également connu un grand succès en Autriche. La chambre de recours a constaté qu’il peut donc être présumé que le public général germanophone pertinent a, à tout le moins, déjà entendu parler de ces comédies. La chambre de recours a toutefois estimé, au point 37 de cette décision, qu’il ne serait pas possible de déduire du large succès de ces comédies auprès du public pertinent que ce dernier ne soit pas choqué par leur titre, dès lors que celui-ci ne serait pas descriptif du contenu desdites comédies et que Goethe n’y joue notamment aucun rôle. Au contraire, l’utilisation de l’insulte « Fack ju » en tant que titre de film ne dirait rien de son acceptation sociale.

65      Cependant, d’une part, il n’est nullement nécessaire que le titre d’un film soit descriptif du contenu de celui-ci afin de constituer un élément de contexte pertinent pour évaluer le point de savoir si le public pertinent perçoit ce titre et un signe verbal éponyme comme contraires aux bonnes mœurs.

66      D’autre part, si, certes, le succès d’un film ne prouve pas automatiquement l’acceptation sociale de son titre et d’un signe verbal éponyme, il n’en reste pas moins qu’il s’agit à tout le moins d’un indice d’une telle acceptation qu’il convient d’évaluer à la lumière de l’ensemble des éléments pertinents de l’espèce afin d’établir de manière concrète la perception de ce signe en cas d’utilisation de celui-ci en tant que marque.

67      À cet égard, il importe de relever que, en l’occurrence, non seulement les comédies Fack ju Göhte et Fack ju Göhte 2, qui ont d’ailleurs eu une suite en 2017, ont connu, précisément auprès du public pertinent, un succès tel que la chambre de recours a même constaté qu’il peut être présumé que les consommateurs formant ce public ont à tout le moins déjà entendu parler de ces comédies, mais, de plus et malgré la grande visibilité accompagnant un tel succès, le titre de celles-ci n’apparaît pas avoir provoqué de controverse au sein de ce public. Par ailleurs, l’accès du jeune public auxdites comédies, qui se déroulent dans le milieu scolaire, avait été autorisé avec ce titre et celles-ci ont reçu, ainsi qu’il ressort du point 39 de la décision litigieuse, des fonds de diverses organisations et ont été utilisées par l’Institut Goethe à des fins pédagogiques.

68      Il y a ainsi lieu de constater que l’ensemble de ces éléments de contexte indiquent de manière concordante que, malgré l’assimilation des termes « Fack ju » à l’expression anglaise « Fuck you », le titre desdites comédies n’a pas été perçu comme moralement inacceptable par le grand public germanophone. Il convient aussi d’observer à cet égard que la perception de cette expression anglaise par le public germanophone n’est, même si celle-ci est notoirement connue auprès de ce public et ce dernier en connaît la signification, pas nécessairement la même que la perception par le public anglophone, la susceptibilité dans la langue maternelle étant potentiellement plus importante que dans une langue étrangère. Pour cette même raison, le public germanophone ne perçoit pas non plus forcément ladite expression anglaise de la même manière qu’il percevrait la traduction allemande de celle-ci. En outre, le titre des comédies en cause et, ainsi, la marque demandée consistent non pas en cette expression anglaise en tant que telle, mais dans sa retranscription phonétique en langue allemande, accompagnée de l’élément « Göhte ».

69      Dans ces conditions, et compte tenu du fait qu’aucun élément concret n’a été avancé afin d’expliquer de manière plausible pourquoi le grand public germanophone percevra le signe verbal « Fack Ju Göhte » comme allant à l’encontre des valeurs et des normes morales fondamentales de la société lorsque celui-ci est utilisé en tant que marque, bien que ce même public n’apparaît pas avoir considéré comme contraire aux bonnes mœurs le titre des comédies éponymes, il y a lieu de constater que l’EUIPO n’a pas démontré à suffisance de droit que l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009 s’oppose à l’enregistrement de la marque demandée.

70      Il convient encore d’ajouter que, contrairement à ce que suggère la chambre de recours au point 38 de la décision litigieuse, le caractère pertinent du succès des comédies éponymes, en tant qu’élément de contexte, n’est nullement infirmé par le fait que le motif absolu de refus de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009 ne saurait être surmonté par la preuve du caractère distinctif acquis par l’usage au sens de l’article 7, paragraphe 3, de ce règlement, de la marque demandée. En effet, le succès des comédies éponymes auprès du public pertinent et, notamment, l’absence de controverses en ce qui concerne leur titre doivent être pris en compte en vue de déterminer si le public pertinent perçoit la marque demandée comme contraire aux bonnes mœurs et donc d’établir si ce motif absolu de refus s’oppose à son enregistrement, et non pas en vue d’écarter ledit motif après que son applicabilité au cas d’espèce a été établie.

71      Il résulte de ce qui précède que la chambre de recours s’est livrée en l’espèce à une interprétation et à une application erronées de l’article 7, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009 et qu’il y a lieu, en conséquence, d’annuler la décision litigieuse.

 Sur les dépens

72      Aux termes de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens.

73      Conformément à l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

74      La requérante ayant conclu à la condamnation de l’EUIPO aux dépens, et celui-ci ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens relatifs tant à la procédure de première instance dans l’affaire T‑69/17 qu’à celle de pourvoi.

Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) déclare et arrête :

1)      L’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 24 janvier 2018, Constantin Film Produktion/EUIPO (Fack Ju Göhte) (T69/17, non publié, EU:T:2018:27), est annulé.

2)      La décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle du 1er décembre 2016 (affaire R 2205/20155), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal « Fack Ju Göhte » comme marque de l’Union européenne, est annulée.

3)      L’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle est condamné à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par Constantin Film Produktion GmbH, relatifs tant à la procédure de première instance dans l’affaire T69/17 qu’à celle de pourvoi.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.