Language of document : ECLI:EU:T:2023:759

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

29 novembre 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative Barbarian fashion – Marque de l’Union européenne verbale antérieure BARBARIAN – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑427/22,

Nataly Coljnar, demeurant à Maribor (Slovénie), représentée par Me A. Šiška, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. D. Gája, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Barbarian Sports Wear Inc., établie à Kitchener, Ontario (Canada),

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. D. Spielmann, président, R. Mastroianni (rapporteur) et T. Tóth, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Mme Nataly Coljnar, demande l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 12 mai 2022 (affaire R 1953/2021-4) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 15 janvier 2020, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait les produits relevant de la classe 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant à la description suivante : « Souliers ; parties de vêtements, articles chaussants et articles de chapellerie ; chapeaux ; vêtements ».

4        Le 18 mai 2020, Barbarian Sports Wear Inc. a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était notamment fondée sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure BARBARIAN, enregistrée le 18 mars 1998 sous le numéro 67926, désignant les produits relevant de la classe 25 et correspondant à la description suivante : « Articles d’habillement ; chapellerie ; chaussures ; vêtements de sport ».

6        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 28 septembre 2021, la division d’opposition a fait droit à l’opposition.

8        Le 23 novembre 2021, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours. En particulier, en se fondant sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure BARBARIAN, elle a considéré, en substance, que, compte tenu de l’identité des produits en cause, du degré inférieur à la moyenne de similitude visuelle et du degré élevé de similitude phonétique et conceptuelle entre les marques en conflit, du caractère distinctif intrinsèque normal de la marque antérieure ainsi que du niveau d’attention normal du public pertinent, il existait un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, pour la partie anglophone dudit public.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ainsi que la décision de la division d’opposition et rejeter l’opposition ;

–        condamner l’EUIPO et Barbarian Sports Wear aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens, dans l’hypothèse où une audience serait convoquée.

 En droit

 Sur l’intervention de Barbarian Sports Wear

12      Il ressort de l’article 173, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal qu’une partie à la procédure devant la chambre de recours autre que la partie requérante devient partie à la procédure devant le Tribunal en tant que partie intervenante lorsqu’elle dépose un acte de procédure avant l’expiration du délai prévu pour le dépôt du mémoire en réponse. Cette disposition énonce également que, en l’absence de réponse à la requête dans les formes et les délais prescrits, elle perd son statut de partie intervenante devant le Tribunal [ordonnance du 12 juillet 2022, Cipla Europe/EUIPO et Glaxo Group, C‑245/22 P(I), non publiée, EU:C:2022:549, point 60].

13      Il s’ensuit qu’une partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO autre que la partie requérante qui, à l’instar de Barbarian Sports Wear, a déposé un acte de procédure avant l’expiration du délai prévu pour le dépôt du mémoire en réponse à la requête, mais n’a pas présenté ledit mémoire dans le délai prévu à cet égard par l’article 179 du règlement de procédure, n’a pas la qualité de partie devant le Tribunal et ne peut donc présenter d’observations au cours de la procédure menée devant celui‑ci [voir, en ce sens, ordonnance du 12 juillet 2022, Cipla Europe/EUIPO et Glaxo Group, C‑245/22 P(I), non publiée, EU:C:2022:549, point 61].

 Sur le fond

14      La requérante invoque en substance un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

15      Dans le cadre de ce moyen, la requérante soulève trois griefs à l’égard de la décision attaquée, tirés, en substance, le premier, d’une appréciation erronée de la similitude des signes en conflit, le deuxième, d’une erreur dans l’appréciation du caractère distinctif de la marque antérieure et, le troisième, d’une évaluation erronée du risque de confusion.

16      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

17      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

18      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

19      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union européenne, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 existe dans une partie de l’Union [voir arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée]. De même, il ressort de la jurisprudence que le constat d’un risque de confusion pour une partie non négligeable du public pertinent est suffisant pour accueillir une opposition formée contre une demande d’enregistrement de marque [voir, en ce sens, arrêts du 10 novembre 2011, Esprit International/OHMI – Marc O’Polo International (Représentation d’une lettre sur une poche), T‑22/10, non publié, EU:T:2011:651, point 119, et du 24 juin 2014, Hut.com/OHMI – Intersport France (THE HUT), T‑330/12, non publié, EU:T:2014:569, point 58 et jurisprudence citée].

 Sur le public et le territoire pertinents 

20      Aux points 17 à 19 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que le public pertinent était composé du grand public, que son degré d’attention était moyen et que le territoire pertinent était celui de l’Union. La chambre de recours a, en particulier, indiqué qu’elle examinerait l’opposition du point de vue de la partie anglophone du public pertinent.

21      Ces appréciations ne sont pas contestées par la requérante.

 Sur la comparaison des produits en cause

22      La chambre de recours a considéré, au point 22 de la décision attaquée, que les produits relevant de la classe 25 désignés par la marque demandée étaient identiques aux produits relevant de la même classe visés par la marque antérieure.

23      Ces appréciations ne sont pas contestées par la requérante.

 Sur la comparaison des signes en conflit

24      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

25      Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents, à savoir les aspects visuel, phonétique et conceptuel [voir arrêt du 17 février 2011, Annco/OHMI – Freche et fils (ANN TAYLOR LOFT), T‑385/09, EU:T:2011:49, point 26 et jurisprudence citée].

 Sur les éléments distinctifs et dominants de la marque demandée

26      La requérante soutient, en substance, que la marque demandée est une marque relativement complexe, à savoir une marque mixte comportant, outre des éléments verbaux, des éléments figuratifs saillants, placés au centre et couvrant plus des deux tiers de la marque. Selon la requérante l’élément figuratif « B+B » est l’élément dominant de ladite marque, notamment en raison de sa position et de sa taille.

27      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

28      Selon la jurisprudence, pour déterminer le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’apprécier l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée [ordonnance du 3 mai 2018, Siberian Vodka/EUIPO – Schwarze und Schlichte (DIAMOND ICE), T‑234/17, non publiée, EU:T:2018:259, point 38].

29      Aux fins d’apprécier le caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ses composants en les comparant à celles des autres composants. En outre, et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe [voir arrêt du 8 février 2007, Quelle/OHMI – Nars Cosmetics (NARS), T‑88/05, non publié, EU:T:2007:45, point 58 et jurisprudence citée].

30      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier l’existence éventuelle d’éléments distinctifs et dominants dans la marque demandée.

31      La chambre de recours a considéré, aux points 26 à 28 de la décision attaquée, que, au sein de la marque demandée, l’élément figuratif, qui pouvait être décrit comme un mélange complexe d’un signe « + » et de deux lettres majuscules stylisées « B », jouait un rôle dominant en raison de sa taille et de son positionnement. Toutefois, elle a rappelé que, d’une manière générale, selon une jurisprudence constante, lorsqu’une marque était composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers étaient, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen ferait plus facilement référence au produit en cause en citant le nom de la marque considérée qu’en en décrivant l’élément figuratif. Par conséquent, selon la chambre de recours, le mot « barbarian », en tant que partie de l’élément verbal « barbarian fashion », dont le mot « fashion » était dépourvu de caractère distinctif, jouait un rôle indépendant et distinctif au sein du signe demandé.

32      Ces considérations de la chambre de recours doivent être approuvées.

33      En effet, s’il est certes vrai que l’élément figuratif de la marque demandée représentant deux lettres majuscules stylisées « B » et un signe « + », en raison de sa taille et de son positionnement, qui le met en exergue au sein de la marque demandée, ne passera pas inaperçu pour le public pertinent, il n’en reste pas moins que, ainsi que l’a indiqué à juste titre la chambre de recours, en principe, les éléments figuratifs inclus dans les signes ont une incidence moins importante sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci que leurs éléments verbaux, car le public a tendance à assimiler et à se souvenir des marques grâce à leurs éléments verbaux plutôt qu’en décrivant leurs éléments figuratifs [voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2005, Wassen International/OHMI – Stroschein Gesundkost (SELENIUM-ACE), T‑312/03, EU:T:2005:289, point 37].

34      S’agissant de l’élément verbal du signe demandé, « barbarian fashion », il convient de relever, à l’instar de la chambre de recours, d’une part, que le mot anglais « fashion », qui est associé au « domaine d’activité qui implique des styles de vêtements et l'apparence » (dictionnaire Collins), est dépourvu de caractère distinctif pour les produits en cause, compte tenu du fait qu’il s’agit d’articles de mode et d’accessoires (tels que des « souliers ; parties de vêtements, articles chaussants et articles de chapellerie ; chapeaux ; vêtements »). D’autre part, il convient de constater que le mot « barbarian », qui peut être défini, ainsi que l’a fait la chambre de recours, comme « un membre d’un peuple primitif ou non civilisé ; une personne grossière, insensible ou non cultivée » (dictionnaire Collins) possède un caractère distinctif pour les produits compris dans la classe 25 en ce que ledit terme est étranger aux qualités intrinsèques des produits en cause.

35      Il s’ensuit que la chambre de recours, a, à juste titre, indiqué que le mot « barbarian », en tant que partie de l’élément verbal « barbarian fashion », jouait un rôle indépendant et distinctif au sein du signe demandé.

 Sur la similitude visuelle

36      La requérante fait valoir que la chambre de recours a commis une erreur en concluant qu’il existait un degré de similitude visuelle inférieur à la moyenne entre les signes en conflit. Selon la requérante, bien que les signes litigieux aient en commun l’élément verbal « barbarian », lesdits signes, considérés dans leur ensemble, créent une impression visuelle différente. En effet, la similitude visuelle découlant de l’élément commun « barbarian » serait notamment compensée par la longueur, la configuration et la taille différentes des signes en général. En particulier les éléments figuratifs « B+B » de la marque demandée, placés au centre et couvrant plus des deux tiers de la marque attirerait plus l’attention du public pertinent.

37      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

38      Au point 29 de la décision attaquée la chambre de recours a indiqué que, sur le plan visuel, le seul élément qui composait la marque verbale antérieure, à savoir le mot « barbarian », était reproduit à l’identique dans la marque demandée, dans lequel le mot « barbarian » jouait un rôle indépendant et distinctif. Elle a constaté que les signes différaient par le mot supplémentaire « fashion » du signe demandé, qui toutefois jouait un rôle secondaire en raison de son caractère descriptif. Enfin, elle a indiqué que les signes différaient également par la partie figurative dominante du signe demandé. Par conséquent, elle a conclu que les signes en conflit étaient similaires à un degré inférieur à la moyenne sur le plan visuel.

39      La requérante ne parvient pas à remettre en cause ces considérations.

40      À cet égard, il convient de rappeler, ainsi qu’il a été constaté aux points 33  à 35ci-dessus, en premier lieu, que, même si l’élément figuratif de la marque demandée, en raison de sa taille et de son positionnement, ne passera pas inaperçu pour le public pertinent, il n’en reste pas moins que, selon la jurisprudence précitée, les éléments figuratifs inclus dans les signes ont une incidence moins importante sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci que leurs éléments verbaux en raison du fait que le public a tendance à assimiler et à se souvenir des marques grâce à leurs éléments verbaux plutôt qu’en décrivant leurs éléments figuratifs. En second lieu, il a été constaté que le mot anglais « fashion » était dépourvu de caractère distinctif pour les produits en cause, compte tenu du fait qu’il s’agissait d’articles de mode et d’accessoires. En troisième lieu, il a été constaté que le mot « barbarian » possédait un caractère distinctif pour les produits compris dans la classe 25.

41      Il s’ensuit que la coïncidence du mot « barbarian », qui, d’une part, constitue la marque antérieure et, d’autre part, est reproduit à l’identique dans la marque demandée en tant qu’élément reconnaissable séparément, détermine une similitude visuelle entre les signes en conflit. Toutefois, ainsi que le relève à juste titre l’EUIPO, c’est l’importance sur le plan visuel de l’élément figuratif de la marque demandée qui a empêché la chambre de recours de conclure à un degré plus élevé de similitude visuelle entre lesdits signes.

42      Dans ces conditions il y a lieu de confirmer que c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un degré de similitude visuelle inférieur à la moyenne entre les signes en conflit.

 Sur la similitude phonétique

43      La requérante fait valoir, premièrement, que les éléments « B+B » constituent les éléments dominants du signe litigieux, car, en raison de leur position et de leur taille, il s’agit des éléments les plus frappants. Par conséquent, ces éléments seraient reconnus et prononcés par le public pertinent. Deuxièmement, elle considère que la constatation selon laquelle le mot « fashion » est dépourvu de caractère distinctif est erronée, en raison du fait que le mot « fashion » ou « moda » désigne bien plus que les seuls vêtements ou produits compris dans la classe 25 et, par conséquent, il ne saurait être ignoré. Troisièmement, la chambre de recours n’aurait pas comparé les signes dans leur ensemble et aurait limité la comparaison à un seul élément, à savoir « barbarian ». La requérante conclut que le degré de similitude phonétique est faible et d’une importance limitée.

44      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

45      En l’espèce, la chambre de recours a relevé que la partie figurative de la marque demandée était un mélange d’éléments composés de telle manière qu’ils ne seraient pas prononcés. Ensuite, elle a indiqué que le signe demandé serait prononcé « barbarian fashion », malgré le fait que ces mots apparaissaient verticalement. Compte tenu du rôle secondaire de l’élément « fashion » dans l’impression d’ensemble produite par le signe demandé, elle a conclu que les signes en conflit présentaient un degré élevé de similitude sur le plan phonétique. Ce constat était valable, selon la chambre de recours, indépendamment de la question de savoir si la partie figurative serait perçue ou non comme une référence à la lettre initiale ou à la quatrième lettre « b » du mot « Barbarian ».

46      À cet égard, il convient, tout d’abord, de préciser, à l’instar de l’EUIPO, que, selon la chambre de recours, les éléments figuratifs de la marque demandée ne sont pas imprononçables en tant que tels. Celle-ci a plutôt relevé qu’ils ne seraient pas prononcés par les consommateurs, bien qu’il s’agisse d’un élément dominant, en raison de leur disposition figurative et de leur positionnement spécifique dans le signe demandé, et compte tenu du fait qu’il existait deux éléments verbaux facilement prononçables dans le signe demandé, à savoir « barbarian » et « fashion ».

47      En outre, il convient de rappeler que, lorsque les consommateurs nomment des signes complexes composés d’éléments verbaux et figuratifs, ils ont généralement recours aux seuls éléments verbaux, négligeant par conséquent normalement les éléments figuratifs, qui ne peuvent donc intervenir dans le cadre de l’appréciation phonétique [voir, en ce sens, arrêt du 14 février 2008, Orsay/OHMI – Jiménez Arellano (O orsay), T‑39/04, non publié, EU:T:2008:36, point 49].

48      S’agissant du caractère distinctif du mot anglais « fashion », il a déjà été constaté au point 34 ci-dessus que, étant associé au « domaine d’activité qui implique des styles de vêtements et l’apparence », il est dépourvu de caractère distinctif pour les produits en cause, compte tenu du fait qu’il s’agit d’articles de mode et d’accessoires. Par conséquent, bien que cet élément ne puisse, en principe, être ignoré, il aura une incidence mineure dans l’appréciation de la similitude phonétique, même s’il est prononcé [voir, en ce sens, arrêt du 25 juin 2008, Otto/OHMI – L’Altra Moda (l’Altra Moda), T‑224/06, non publié, EU:T:2008:221, point 43].

49      Enfin, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’aurait pas comparé les signes dans leur ensemble et aurait limité la comparaison à un seul élément, il suffit de constater que la chambre de recours, contrairement à ce que prétend la requérante, n’a pas limité son analyse à un élément isolé, mais a plutôt tenu compte des éléments distinctifs et dominants et de leur poids dans l’impression d’ensemble produite par les signes en conflit.

50      Il résulte de ce qui précède que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré qu’il existait une similitude phonétique élevée entre la marque antérieure et la marque demandée.

 Sur la similitude conceptuelle

51      La requérante fait valoir que, dans la mesure où le mot « barbarian » a plusieurs significations et les signes en conflit se concentrent sur des types différents de vêtements, ils ne sont pas similaires sur le plan conceptuel. En effet, alors que la marque antérieure se concentrerait clairement sur les vêtements de sport, la marque demandée mettrait l’accent sur la mode, les tendances, l’élégance et les vêtements pour femmes.

52      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

53      En l’espèce, il convient de relever que la chambre de recours a considéré au point 31 de la décision attaquée que la similitude conceptuelle entre les signes en conflit était élevée. Elle a indiqué que les marques véhiculaient le concept identique du mot « barbarian », dont la signification avait été fournie précédemment, que la partie figurative ne véhiculait pas de concept clair et que la présence du mot « fashion » dans la marque demandée n’avait pas d’incidence pertinente sur la comparaison conceptuelle en raison de son caractère descriptif.

54      La requérante ne parvient pas à remettre en cause ces considérations de la chambre de recours.

55      En effet, il convient de relever que, en l’espèce, ainsi que la chambre de recours l’a relevé, le consommateur moyen du public pertinent associera tant la marque antérieure que celle demandée à un barbare, « un membre d’un peuple primitif ou non civilisé ; une personne grossière, insensible ou non cultivée », en ce qu’elles contiennent l’élément verbal « barbarian », qui revêt, pour ce public, qui est anglophone, une signification concrète directe. L’argument tiré du fait que le public pertinent puisse également associer la marque antérieure à d’autres concepts n’est pas susceptible de remettre en cause la conclusion selon laquelle, pour au moins l’une de ses significations concrètes et immédiatement compréhensibles, cette marque évoque, dans l’esprit du public pertinent, un barbare.

56      En outre, il y a lieu de souligner, à l’instar de la chambre de recours, d’une part, que l’élément figuratif de la marque demandée n’exprime pas un concept clair, et, par conséquent, il est improbable que les consommateurs attribuent une certaine signification conceptuelle à la marque demandée sur la base de son élément figuratif et, d’autre part, que la présence du mot « fashion » dans la marque demandée n’a pas d’incidence pertinente sur la comparaison conceptuelle en raison de son caractère descriptif.

57      S’agissant, enfin, de l’argument tiré du fait que les marques en cause viseraient des types différents de vêtements relevant de la classe 25, il convient de relever que, selon la jurisprudence, les modalités de commercialisation particulières des produits et services désignés par les marques pouvant varier dans le temps et suivant la volonté des titulaires de ces marques, l’analyse prospective du risque de confusion entre deux marques ne saurait dépendre des intentions commerciales, réalisées ou non, et par nature subjectives, des titulaires des marques [voir, en ce sens, arrêts du 15 mars 2007, T.I.M.E. ART/OHMI, C‑171/06 P, non publié, EU:C:2007:171, point 59, et du 9 septembre 2008, Honda Motor Europe/OHMI – Seat (MAGIC SEAT), T‑363/06, EU:T:2008:319, point 63]. Ainsi, est sans pertinence dans ce contexte l’utilisation qu’entend faire la requérante de la marque demandée. En effet, dans le cadre de la procédure d’opposition, l’EUIPO peut seulement prendre en compte la liste de produits demandés telle qu’elle découle de la demande de marque concernée, sous réserve des modifications éventuelles de cette dernière [voir, en ce sens, arrêt du 22 mars 2007, Saint-Gobain Pam/OHMI – Propamsa (PAM PLUVIAL), T‑364/05, EU:T:2007:96, point 89].

58      Il s’ensuit que la chambre de recours a, à juste titre, considéré que la similitude conceptuelle entre les signes en conflit était élevée.

 Sur le caractère distinctif de la marque antérieure

59      La requérante soutient que le mot « barbarian » a une signification par rapport aux produits pertinents et fait valoir qu’il ne possède « aucun caractère distinctif spécifique sur le marché en cause ». Elle considère avoir démontré qu’il existe dans l’Union plusieurs marques pour des produits de la classe 25 contenant le mot « barbarian ». Par conséquent, elle fait valoir que la considération de la chambre de recours selon laquelle la réponse à la question de savoir quand, où et dans quelle mesure le mot « barbarian » est utilisé sur le marché de l’habillement ne ressort pas des preuves produites n’est pas fondée.

60      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

61      En l’espèce, il convient de relever que la chambre de recours a, au point 32 de la décision attaquée, indiqué que le mot « barbarian », qui composait la marque antérieure, était dépourvu de signification par rapport aux produits pertinents et, par conséquent que le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure était normal.

62      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel le caractère distinctif de la marque antérieure était affaibli en raison du fait qu’il existait trois autres marques enregistrées dans l’Union comprenant le mot « barbarian », la chambre de recours a constaté que, hormis ce nombre très limité, le simple fait que d’autres marques soient enregistrées ou demandées ne pouvait prouver l’usage de ces marques et que le consommateur pertinent était exposé à ces marques sur le marché. Elle a conclu que cet argument n’était donc pas suffisant pour constater une éventuelle faiblesse du caractère distinctif de la marque antérieure.

63      Ces considérations, qui ne sont au demeurant pas remises en cause par les arguments de la requérante, doivent être approuvées. En effet, s’agissant des autres marques enregistrées dans l’Union comprenant le mot « barbarian », il suffit de constater que cette circonstance ne démontre pas que le public pertinent a été exposé à un usage généralisé de marques incluant le mot « barbarian » et considère ce mot comme étant descriptif des produits relevant de la classe 25 en cause.

64      De plus, il convient de relever, à l’instar de l’EUIPO, premièrement, que la marque verbale BARBARIAN est une marque enregistrée, bénéficiant donc d’une présomption de validité et ne saurait être considérée, contrairement à ce que soutient la requérante, comme dépourvue de caractère distinctif dans le cadre d’une procédure d’opposition (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 24 mai 2012, Formula One Licensing/OHMI, C‑196/11 P, EU:C:2012:314, points 40 à 47).

65      Deuxièmement, s’agissant des considérations de la requérante selon lesquelles le mot « barbarian » serait dépourvu de caractère distinctif pour les vêtements d’aujourd’hui en raison du fait que les « Barbares » portaient des vêtements spécifiques qui attestaient du mode de vie et de la culture de l’époque, il suffit de constater que ces considérations ne sont pas suffisantes pour démontrer que le mot « barbarian » est descriptif des caractéristiques des vêtements ou des produits de la classe 25 en cause.

66      Il s’ensuit que la chambre de recours a, à juste titre, conclu que le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure était normal.

 Sur le risque de confusion

67      La requérante conteste l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent. Elle fait essentiellement valoir que, de nos jours, les consommateurs sont beaucoup plus attentifs, avisés et éduqués qu’à l’époque où la jurisprudence vieille de plusieurs décennies sur laquelle la décision attaquée était fondée a été adoptée. En outre, elle réitère en substance les arguments par lesquels elle a contesté la comparaison des signes en conflit effectuée par la chambre de recours.

68      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, VENADO avec cadre e.a., T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74).

69      Il ressort des points 39 et 40 de la décision attaquée que la chambre de recours a apprécié l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit de la partie anglophone du public pertinent en tenant compte du niveau de similitude visuelle inférieur à la moyenne et du niveau élevé de similitude phonétique et conceptuelle entre les signes en conflit, de l’identité des produits en cause, du caractère distinctif intrinsèque normal de la marque antérieure et du niveau d’attention normal du public pertinent.

70      La chambre de recours a également relevé que, s’il était vrai que pour les produits compris dans la classe 25 en cause, la similitude visuelle jouait un rôle plus important dans l’appréciation du risque de confusion, le fait d’accorder une attention particulière à la perception visuelle ne signifiait pas pour autant que l’impression phonétique et conceptuelle puisse être négligée. En l’espèce, elle a, en substance, considéré que le degré de similitude inférieur à la moyenne des signes en conflit sur le plan visuel était compensé par le caractère élevé de leur similitude phonétique et conceptuelle.

71      Or, ainsi qu’il résulte des motifs du présent arrêt, ces appréciations ne sont pas entachées d’erreur.

72      Il s’ensuit que l’appréciation portée par la chambre de recours quant à l’existence d’un risque de confusion entre les signes en conflit n’est pas entachée d’erreur.

73      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le moyen unique, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, doit être écarté.

74      Il y a donc lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

75      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

76      Bien que la requérante ait succombé, l’EUIPO n’a conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens que dans le cas où une audience de plaidoiries serait organisée. En l’absence d’organisation d’une audience, il convient de décider que la requérante et l’EUIPO supporteront chacun leurs propres dépens.

77      Aux termes de l’article 173, paragraphe 2 du règlement de procédure, une partie à la procédure devant la chambre de recours autre que le requérant qui a perdu son statut d’intervenant devant le Tribunal en ce qu’elle n’a pas répondu à la requête dans les formes et délais prescrits, supporte ses propres dépens afférents aux actes de procédure qu’elle a déposés.

78      Barbarian Sports Wear ayant perdu son statut d’intervenant devant le Tribunal, il y a lieu de décider qu’elle supportera ses propres dépens afférents aux actes de procédure qu’elle a déposés.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Mme Nataly Coljnar et l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supporteront chacun leurs propres dépens.

3)      Barbarian Sports Wear Inc. supportera ses propres dépensafférents aux actes de procédure qu’elle a déposés.

Spielmann

Mastroianni

Tóth

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 29 novembre 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.