Language of document : ECLI:EU:C:2017:452

Affaire C685/15

Online Games Handels GmbH e.a.

contre

Landespolizeidirektion Oberösterreich

(demande de décision préjudicielle,introduite par le Landesverwaltungsgericht Oberösterreich)

« Renvoi préjudiciel – Article 49 TFUE – Liberté d’établissement – Article 56 TFUE – Libre prestation des services – Jeux de hasard – Réglementation restrictive d’un État membre – Sanctions administratives à caractère pénal – Raisons impérieuses d’intérêt général – Proportionnalité – Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Article 47 – Droit à une protection juridictionnelle effective – Réglementation nationale prévoyant l’obligation pour le juge d’instruire d’office les éléments dont il est saisi dans le cadre de la poursuite des infractions administratives à caractère pénal – Conformité »

Sommaire – Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 14 juin 2017

1.        Droits fondamentaux – Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Champ d’application – Mise en œuvre du droit de l’Union – Réglementation nationale prévoyant une mesure dérogeant à une liberté fondamentale garantie par le traité FUE – Inclusion

(Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 51, § 1)

2.        Liberté d’établissement – Libre prestation des services – Restrictions – Jeux de hasard – Vérification par la juridiction nationale de la conformité au droit de l’Union d’une réglementation nationale restreignant l’exercice d’une liberté fondamentale de l’Union européenne – Droit à une protection juridictionnelle effective – Obligation de la juridiction saisie, dans le cadre de l’examen de l’existence d’infractions administratives, d’instruire d’office les éléments de l’affaire – Admissibilité – Condition

(Art. 49 TFUE et 56 TFUE ; charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 47)

1.      Aux termes de l’article 47, paragraphe 1, de la Charte, toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues audit article. L’article 19, paragraphe 1, TUE impose, par ailleurs, aux États membres d’établir les voies de recours nécessaires pour assurer une protection juridictionnelle effective, au sens notamment de l’article 47 de la Charte, dans les domaines couverts par le droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 8 novembre 2016, Lesoochranárske zoskupenie VLK, C‑243/15, EU:C:2016:838, point 50 et jurisprudence citée). Le champ d’application de cet article de la Charte, pour ce qui est de l’action des États membres, est défini à l’article 51, paragraphe 1, de celle-ci, aux termes duquel les dispositions de la Charte s’adressent aux États membres lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union, cette disposition confirmant la jurisprudence constante de la Cour selon laquelle les droits fondamentaux garantis dans l’ordre juridique de l’Union ont vocation à être appliqués dans toutes les situations régies par le droit de l’Union, mais pas en dehors de celles-ci (arrêt du 8 novembre 2016, Lesoochranárske zoskupenie VLK, C‑243/15, EU:C:2016:838, point 51). Or, ainsi qu’il a été relevé par Mme l’avocat général au point 30 de ses conclusions, lorsqu’un État membre édicte une mesure dérogeant à une liberté fondamentale garantie par le traité FUE, telle que la liberté d’établissement ou la libre prestation des services à l’intérieur de l’Union, cette mesure entre dans le champ d’application du droit de l’Union.

(voir points 54-57)

2.      Les articles 49 et 56 TFUE, tels qu’interprétés notamment par l’arrêt du 30 avril 2014, Pfleger e.a. (C‑390/12, EU:C:2014:281), lus à la lumière de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à un régime procédural national selon lequel, dans le cadre des procédures administratives à caractère pénal, la juridiction appelée à se prononcer sur la conformité au droit de l’Union d’une réglementation restreignant l’exercice d’une liberté fondamentale de l’Union européenne, telle que la liberté d’établissement ou la libre prestation des services à l’intérieur de l’Union européenne, est tenue d’instruire d’office les éléments de l’affaire dont elle est saisie dans le cadre de l’examen de l’existence d’infractions administratives, pourvu qu’un tel régime n’ait pas pour conséquence que cette juridiction est tenue de se substituer aux autorités compétentes de l’État membre concerné, auxquelles il appartient de fournir les éléments de preuve nécessaires afin de permettre à ladite juridiction de contrôler si cette restriction est justifiée.

En l’occurrence, il résulte des dispositions du droit national, citées aux points 3 à 5 et 12 à 20 du présent arrêt, que les décisions des autorités administratives peuvent faire l’objet d’un recours en annulation pour illégalité devant les juridictions administratives, ces dernières statuant au fond sur ces recours. Dans son office, le juge est tenu d’instruire les éléments de l’affaire dont il est saisi dans les limites de sa saisine, en tenant compte de la même manière des circonstances atténuantes et aggravantes. Dans le cadre de ces procédures, l’autorité administrative ayant appliqué la sanction administrative à caractère pénal a qualité de partie. Sur le fondement de ces seuls éléments, il n’y a pas lieu de considérer qu’un tel régime procédural soit de nature à faire naître des doutes concernant l’impartialité du juge national, dans la mesure où celui-ci est chargé d’instruire l’affaire dont il est saisi afin non pas de soutenir l’accusation, mais d’aboutir à la manifestation de la vérité.

(voir points 63, 64, 67 et disp.)