Language of document : ECLI:EU:T:2022:107

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

2 mars 2022 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative Makeblock – Motifs absolus de refus – Caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] – Absence de caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001] – Absence de marque de nature à tromper le public – Article 7, paragraphe 1, sous g), du règlement no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous g), du règlement 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑86/21,

Distintiva Solutions S. Coop. Pequeña, établie à Vitoria-Gasteiz (Espagne), représentée par Me M. Sanmartín Sanmartín, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. J. Ivanauskas et V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Makeblock Co. Ltd, établie à Shenzhen (Chine), représentée par Me C. Sueiras Villalobos, avocate,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 16 novembre 2020 (affaire R 988/2020-5), relative à une procédure de nullité entre Distintiva Solutions et Makeblock,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. G. De Baere, président, Mme G. Steinfatt (rapporteure) et M. K. Kecsmár, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 8 février 2021,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 10 mai 2021,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 3 juin 2021,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 24 octobre 2013, Shenzhen Maker Works Co. Ltd, le prédécesseur de l’intervenante, Makeblock Co. Ltd, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne auprès de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 7, 16 et 28 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 7 : « Manipulateurs industriels [machines] ; robots [machines] » ;

–        classe 16 : « Matériel d’instruction à l’exception des appareils » ;

–        classe 28 : « Blocs de construction [jouets] ; jouets ; véhicules [jouets] ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 2013/209, du 4 novembre 2013. La marque contestée a été enregistrée le 11 février 2014 sous le numéro 12249488 pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        Le 11 mai 2018, la requérante, Distintiva Solutions S. Coop. Pequeña, a demandé, en vertu de l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b), c), e) et g), du même règlement, la nullité de la marque contestée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        Par décision du 23 mars 2020, la division d’annulation de l’EUIPO a rejeté la demande en nullité dans son intégralité.

7        Le 19 mai 2020, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’annulation. Son recours visait une annulation partielle de la décision de la division d’annulation, en ce que celle-ci avait rejeté la demande en nullité s’agissant des produits relevant des classes 7 et 28 (ci-après les « produits concernés »).

8        Par décision du 16 novembre 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours.

9        Premièrement, s’agissant du public pertinent, la chambre de recours a estimé que les produits en cause s’adressaient à la fois au grand public et aux professionnels. Le niveau d’attention ne serait pas supérieur à la moyenne en ce qui concerne les produits compris dans la classe 28. En revanche, le niveau d’attention serait plus élevé en ce qui concerne les produits compris dans la classe 7, étant donné que ceux-ci nécessiteraient un savoir-faire technique et pourraient être assez coûteux. Dans la mesure où la marque contestée est composée de mots anglais, il conviendrait de prendre en compte le public du territoire anglophone de l’Union européenne, à savoir le Royaume-Uni, l’Irlande et Malte.

10      Deuxièmement, en ce qui concerne le motif de nullité visé à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, la chambre de recours a considéré que, si la combinaison des mots « make » et « block » dans la marque contestée serait comprise comme une invitation ou une demande à « créer ou construire un bloc » (par exemple, un morceau solide de verre, de bois, de béton, un bâtiment, un bloc de texte, etc.), la requérante n’avait pas démontré que le public anglophone pertinent établirait un lien mental suffisamment direct entre la signification de « makeblock » et les produits concernés. En effet, rien n’indiquerait que les produits concernés serviraient à « fabriquer un bloc ». La chambre de recours a conclu que les éléments de preuve soumis par la requérante étaient insuffisants pour démontrer que la marque contestée était effectivement utilisée sur le marché pour décrire des caractéristiques des produits concernés à la date de dépôt de la marque contestée. En outre, il ne saurait être présumé des documents produits par la requérante que le public percevait la marque contestée comme une simple indication de l’espèce, de la destination ou d’autres caractéristiques des produits à l’époque. Tout au plus, selon la chambre de recours, la marque pourrait-elle être suggestive en ce sens que certains des produits sont vaguement liés à des « blocs ». Or, la combinaison des deux termes constituant le signe ne serait pas purement descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001. Par ailleurs, l’élément figuratif représentant un engrenage ne serait pas une forme géométrique simple et ne soulignerait pas le message véhiculé par le mot « makeblock ». La relation entre un engrenage et l’invitation à « fabriquer un bloc » ne serait pas claire. En résumé, la marque contestée dans son ensemble franchirait le seuil d’un signe purement descriptif.

11      Troisièmement, la chambre de recours a considéré que le motif absolu de nullité visé à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 n’était pas applicable. À cet égard, elle a constaté que la marque contestée était apte à distinguer l’origine des produits concernés. En outre, selon la chambre de recours, rien n’indiquait que le public pertinent percevrait la marque comme un message purement élogieux ou comme une simple déclaration factuelle ou sociale. L’élément figuratif de l’engrenage appuierait cette conclusion.

12      Quatrièmement, s’agissant de l’article 7, paragraphe 1, sous g), du règlement 2017/1001, la chambre de recours a estimé que la marque contestée ne trompait pas effectivement les consommateurs et qu’il n’existait pas de risque sérieux que le public pertinent soit induit en erreur lorsqu’il serait en présence de la marque contestée par rapport aux produits concernés. Selon la chambre de recours, la marque pourrait tout au plus être perçue comme vaguement allusive à l’égard de certains des produits, en ce sens que ceux-ci pourraient avoir un lien avec des « blocs », comme par exemple des jouets ou des robots composés de blocs de construction (jouets). Or, en voyant la marque dans son ensemble, le public ne comprendrait pas qu’elle décrit des caractéristiques de ces produits.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

14      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante à ses dépens.

15      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours et, par conséquent, confirmer la décision attaquée et le rejet de la demande en nullité de la marque contestée dans son intégralité ;

–        condamner la requérante à ses dépens.

 En droit

16      La requérante invoque, en substance, quatre moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 59 du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement, le deuxième, de la violation de l’article 59 du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement, le troisième, de la violation de l’article 59 du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 1, sous g), dudit règlement et, le quatrième, de la violation de l’obligation de motivation.

17      La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir commis des erreurs, premièrement, en ayant constaté que la marque contestée n’avait pas de caractère descriptif par rapport aux produits concernés, deuxièmement, en ayant estimé que la marque contestée avait un caractère distinctif au regard des produits concernés, troisièmement, en ayant décidé que la marque contestée n’avait pas de caractère trompeur au regard des produits concernés et, quatrièmement, en n’ayant pas suffisamment tenu compte des arguments et preuves qu’elle avait soumis.

18      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

 Observations liminaires

 Sur l’application ratione temporis des différentes versions des règlements

19      Le règlement no 207/2009, entré en vigueur le 13 avril 2009, a été modifié par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015 (JO 2015, L 341, p. 21), avant d’être abrogé et remplacé, avec effet au 1er octobre 2017, par le règlement 2017/1001. Néanmoins, dès lors que la date déterminante pour l’identification du droit matériel applicable est celle de l’introduction de la demande d’enregistrement, à savoir le 24 octobre 2013, le présent litige demeure régi par le règlement no 207/2009, à tout le moins en ce qui concerne les dispositions à caractère non strictement procédural (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 2 mars 2017, Panrico/EUIPO, C‑655/15 P, non publié, EU:C:2017:155, point 2 et jurisprudence citée, et du 3 juin 2021,  Yokohama Rubber et EUIPO/Pirelli Tyre, C‑818/18 P et C‑6/19 P, non publié, EU:C:2021:431, point 2). Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le litige est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001.

20      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références aux dispositions du règlement 2017/1001 faites par la chambre de recours dans la décision attaquée ainsi que par la requérante, l’EUIPO et l’intervenante dans leurs écritures comme visant les dispositions, d’une teneur identique, du règlement no 207/2009.

 Sur le renvoi global aux arguments présentés pendant la procédure devant l’EUIPO

21      Aux points 17 et suivants de la requête, la requérante renvoie, notamment, de manière globale aux faits et aux arguments présentés dans l’acte de recours qu’elle avait déposé auprès de la chambre de recours ainsi qu’aux écritures qu’elle avait déposées auprès de la division d’annulation, respectivement, le 23 juillet et le 21 décembre 2018.

22      Or, la requérante ne saurait valablement renvoyer le Tribunal à l’ensemble des arguments qu’elle a développés dans le cadre de la procédure devant l’EUIPO. En effet, il n’incombe pas au Tribunal de se substituer aux parties en essayant de rechercher les éléments pertinents dans les documents auxquels elles se réfèrent. Il s’ensuit que la requête, pour autant qu’elle renvoie aux écrits déposés devant l’EUIPO, est irrecevable dans la mesure où le renvoi global qu’elle contient n’est pas rattachable aux moyens et aux arguments qu’elle développe [voir, en ce sens, arrêt du 15 décembre 2016, Keil/EUIPO – NaturaFit Diätetische Lebensmittelproduktion (BasenCitrate), T‑330/15, non publié, EU:T:2016:744, point 13 et jurisprudence citée].

23      Toutefois, contrairement à ce que semble prétendre l’intervenante, la requête n’est pas irrecevable du seul fait que la requérante ait réutilisé certains passages de ses écrits déposés auprès de l’EUIPO.

 Sur la recevabilité du premier chef de conclusions de l’intervenante

24      L’intervenante, par son premier chef de conclusions, ne conclut pas seulement au rejet du recours, mais également à ce que le Tribunal confirme la décision attaquée et rejette la demande en nullité de la marque contestée. Il y a lieu de constater que cette deuxième partie du premier chef de conclusions vise à obtenir du Tribunal un arrêt confirmatif.

25      Il résulte cependant de l’article 72, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001 que le recours ouvert devant le Tribunal vise à examiner la légalité des décisions des chambres de recours et à obtenir, le cas échéant, l’annulation ou la réformation de celles-ci, de sorte qu’il ne saurait avoir pour objet d’obtenir, au regard de telles décisions, des arrêts confirmatifs ou déclaratoires [voir arrêt du 10 juin 2008, Gabel Industria Tessile/OHMI – Creaciones Garel (GABEL), T‑85/07, EU:T:2008:186, point 17 et jurisprudence citée].

26      Il s’ensuit que la deuxième partie du premier chef de conclusions de l’intervenante doit être rejetée comme irrecevable.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 1, sous c), du même règlement

27      Par le premier moyen, la requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a violé l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 en concluant que la marque contestée n’était pas descriptive. La requérante relève que la marque est descriptive des caractéristiques ou de la destination des produits concernés, parce que le public pertinent percevrait Makeblock comme décrivant des produits soit utilisés pour fabriquer des blocs, soit fabriqués à partir de blocs. La chambre de recours n’aurait pas correctement pris en compte cette compréhension par le public pertinent et aurait omis d’évaluer les caractéristiques descriptives des produits.

28      Selon la requérante, premièrement, la chambre de recours aurait erronément restreint son examen à la question de savoir si le public pertinent percevrait le terme « makeblock » dans la marque contestée comme une invitation à construire des blocs avec d’autres blocs. En effet, pour le consommateur pertinent, le terme « makeblock » ne signifierait pas « construire des blocs », mais « assembler des portions d’éléments pour obtenir un produit différent ». Cette interprétation plus large serait confirmée par l’élément dessiné au sein du signe en cause, qui agit comme la voyelle « o » et qui représente un engrenage, ce dernier renvoyant également à la notion de combinaison de pièces pour construire ou faire quelque chose (comme un bloc).

29      Par ailleurs, l’expression « make block » ou « make a block » serait utilisée sur le marché au moins depuis 2006. Puisqu’elle serait connue par le consommateur, il n’y aurait pas d’« exercice mental » à faire dans l’interprétation du mot « makeblock », qui renvoie à une information sur les caractéristiques, composants ou finalités des jouets ou des robots visés par la marque.

30      Deuxièmement, l’expression « make block » ou « make a block » ne renverrait pas seulement à l’une des finalités d’usage ou d’utilisation des produits concernés mais serait en même temps la forme habituelle utilisée pour décrire la manière dont les produits désignés sont fabriqués. En ce qui concerne les produits relevant de la classe 7, la requérante avance que les robots vendus par l’intervenante seraient ainsi constitués de pièces qui forment un bloc. Les produits vendus en tant que robots ou composants électroniques à finalité éducative seraient assemblés en formant des blocs ou en assemblant des blocs ou des composants. Par ailleurs, la requérante soutient qu’il serait possible d’utiliser dans leur programmation l’instruction universelle de Scratch « Fabrique un bloc » (« Make a block ») ou encore l’instruction de programmation « fabrique des blocs » (« make blocks »). S’agissant des produits relevant de la classe 28, la requérante indique que les jouets commercialisés avec le signe Makeblock seront constitués de pièces qui forment un bloc.

31      Troisièmement, la requérante fait valoir que l’élément figuratif dans la marque contestée qui représente un engrenage serait descriptif des produits concernés, étant donné qu’il ressemble à l’une des pièces présentes dans tous les produits vendus par l’intervenante.

32      Quatrièmement, la requérante conteste que le niveau d’attention du consommateur soit toujours élevé quand il s’agit de produits relevant de la classe 7 ou de robots.

33      Cinquièmement, la requérante soutient qu’il serait excessif de considérer la marque contestée comme descriptive uniquement si elle était associée à des jeux de blocs de construction dont la seule finalité serait précisément de construire des blocs.

34      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

35      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci. En vertu de l’article 7, paragraphe 2, du même règlement, le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union.

36      Ces signes ou indications sont réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir identifier l’origine commerciale du produit ou du service [arrêts du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 30, et du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, EU:T:2002:41, point 37].

37      L’intérêt général sous-tendant l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 consiste à assurer que des signes descriptifs de l’une ou de plusieurs des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels un enregistrement en tant que marque est demandé puissent être librement utilisés par l’ensemble des opérateurs économiques offrant de tels produits ou services [voir arrêt du 23 mai 2019, Arçelik/EUIPO (MicroGarden), T‑364/18, non publié, EU:T:2019:355, point 16 et jurisprudence citée].

38      Il s’ensuit que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public pertinent de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [voir arrêt du 11 avril 2019, Adapta Color/EUIPO – Coatings Foreign IP (ADAPTA POWDER COATINGS), T‑223/17, non publié, EU:T:2019:245, point 69 et jurisprudence citée].

39      Par l’emploi, à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, des termes « l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci », le législateur de l’Union a, d’une part, indiqué que ces termes devaient tous être considérés comme correspondant à des caractéristiques de produits ou de services et, d’autre part, précisé que cette liste n’était pas exhaustive, toute autre caractéristique de produits ou de services pouvant également être prise en compte [voir arrêt du 7 mai 2019, Fissler/EUIPO (vita), T‑423/18, EU:T:2019:291, point 42 et jurisprudence citée].

40      Le choix, par le législateur de l’Union, du terme « caractéristique » met en exergue le fait que les signes visés à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 ne sont que ceux qui servent à désigner une propriété, facilement reconnaissable par le public pertinent, des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé. Ainsi, un signe ne saurait être refusé à l’enregistrement sur le fondement de cette disposition que s’il est raisonnable d’envisager qu’il sera effectivement reconnu par le public pertinent comme une description de l’une desdites caractéristiques [voir, en ce sens, arrêts du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 50, et du 3 juillet 2013, Airbus/OHMI (NEO), T‑236/12, EU:T:2013:343, point 32]. Ainsi, l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services concernés et, d’autre part, par rapport à la compréhension qu’en a le public pertinent [voir arrêt du 25 octobre 2005, Peek & Cloppenburg/OHMI (Cloppenburg), T‑379/03, EU:T:2005:373, point 37 et jurisprudence citée].

 Sur la signification de l’élément verbal du signe pour le public pertinent

41      Quant à la signification de l’élément verbal « makeblock » pour le public pertinent, la chambre de recours a, dans la décision attaquée, conclu que la combinaison des mots anglais « make » et « block », écrits ensemble en un seul mot en lettres foncées, la lettre « o » du second mot étant remplacée par l’élément figuratif représentant un engrenage, serait comprise comme une invitation ou une demande « de créer ou de construire un bloc » (par exemple, un morceau solide de verre, de bois, de béton ; un bâtiment, un bloc de texte, etc.).

42      Selon la requérante, l’interprétation de la chambre de recours s’avère trop étroite. En premier lieu, pour le public pertinent, « makeblock » ne signifierait pas « construire des blocs », mais « assembler des portions d’éléments ensemble pour obtenir un produit différent ».

43      Selon la requérante, le consommateur n’a pas besoin de faire un effort mental pour comprendre que « fabriquer un bloc » équivaut à assembler des éléments pour obtenir un résultat. Pour étayer cette affirmation, la requérante invoque le fait que l’université de Washington utilise une méthode mathématique appelée « Make Block ».

44      Or, d’une part, la requérante n’explique pas dans quel contexte et en quel sens l’université de Washington utilise ladite méthode mathématique. Elle n’établit notamment pas de lien entre cette méthode et les produits visés par la marque contestée. D’autre part, il n’est pas évident que le consommateur européen de robots ou de jouets soit au courant des méthodes mathématiques utilisées par une université américaine, même si l’on présume, comme le fait la chambre de recours, que le public pertinent dispose d’un niveau d’attention élevé s’agissant de robots.

45      À cet égard, l’affirmation de la requérante, selon laquelle le niveau d’attention du consommateur n’est pas toujours élevé quand il s’agit de produits relevant de la classe 7 ou de robots, ne saurait prospérer dans la mesure où il serait difficilement concevable de présumer que le public disposant d’un niveau d’attention moyen soit au courant desdites méthodes mathématiques. En tout état de cause, la requérante n’a pas étayé son affirmation.

46      Par ailleurs, il importe de relever que la requérante n’a pas remis en question la définition du mot « block » reproduite dans la décision attaquée et que celle-ci a reprise des documents que la requérante avait elle-même produits dans le cadre de la procédure devant la chambre de recours. Selon cette définition, un « bloc » est, en particulier, « une grosse partie solide de matériaux durs », « un grand bâtiment unique », « une grande quantité de choses » (« un paquet d’actions », « un bloc de texte ») ou « un obstacle au progrès normal » (« un obstacle à l’avancement professionnel ») (www.lexico.com/definition/block, annexe II du mémoire exposant les motifs du recours de la requérante devant l’EUIPO).

47      Comme l’EUIPO l’a correctement relevé, la définition utilisée par la requérante dans sa requête ne trouve pas de fondement dans les dictionnaires. L’explication de la requérante selon laquelle différentes versions de l’expression « make a block » sont utilisées dans des langues de programmation informatique ne suffit pas pour étayer son affirmation selon laquelle le public pertinent perçoit la signification de cette expression immédiatement, sans autre réflexion, dans un sens qui ne correspond pas à celui répertorié dans les dictionnaires ni à celui attribué à cette expression dans la langue de programmation elle-même, mais dans le sens plus abstrait reproduit au point 43 ci-dessus. De plus, les produits visés par la marque contestée ne sont ni des logiciels ni des jeux similaires à « Scratch », auquel se réfère la requérante, mais des catégories bien plus larges et très générales constituées de machines et de robots industriels et de jouets.

48      En second lieu, quant à l’argument de la requérante selon lequel le message véhiculé par le terme « makeblock » par rapport à un produit ne se réfère pas nécessairement à l’utilisation du produit désigné mais également à sa fabrication, il convient de noter, tout d’abord, qu’il ressort des analyses linguistiques concordantes de la requérante et de la chambre de recours que le mot « make » représente la forme impérative et exprime une invitation ou une demande. Or, dans le commerce, pour transmettre une information sur la fabrication d’un produit, il est usuel d’employer la forme du participe passé, à savoir « made » (fabriqué), comme par exemple dans l’expression « made in Germany » (fabriqué en Allemagne) ou « handmade » (fabriqué à la main). Dès lors, l’interprétation proposée par la requérante n’est pas couverte par la terminologie utilisée dans le signe.

49      C’est dans cette même ligne de raisonnement que l’EUIPO relève à juste titre que le mot « block » se présente au singulier dans la marque contestée. Or, si l’élément verbal devait être compris en ce sens qu’il se réfère à la fabrication des produits visés à partir de blocs, il conviendrait d’employer le pluriel.

50      Par ailleurs, même si le public pertinent, sur la base de sa connaissance prétendue des langues de programmation et de leurs commandes, était habitué à comprendre le terme « bloc » dans un sens plus abstrait et si, sur cette base, on acceptait l’interprétation de la requérante selon laquelle le terme « makeblock » ne fait que suggérer une activité d’assemblage de pièces pour construire quelque chose, il ne s’agirait plus d’un contenu qui décrirait une caractéristique d’un produit. En effet, c’est à juste titre que l’intervenante soulève que le simple fait que le terme « makeblock » puisse être associé à l’idée d’assembler des blocs pour créer quelque chose ne suffit pas pour que la marque contestée soit considérée comme descriptive des produits concernés, car le fait que des produits soient issus de l’assemblage de différentes pièces est un trait commun à la plupart des biens fabriqués par l’homme.

 Sur l’élément figuratif du signe

51      En ce qui concerne l’importance de l’élément figuratif représentant une roue d’engrenage dans le cadre de l’appréciation du caractère descriptif de la marque contestée, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, en présence d’un signe composé, il convient de prendre en considération l’impression d’ensemble qu’il produit. Cela ne saurait toutefois impliquer qu’il n’y ait pas lieu de procéder, dans un premier temps, à un examen des différents éléments constitutifs de cette marque [arrêts du 25 octobre 2007, Develey/OHMI, C‑238/06 P, EU:C:2007:635, point 82, et du 15 mars 2018, Hermann Bock/EUIPO (Push and Ready), T‑279/17, non publié, EU:T:2018:149, point 27].

52      Comme la requérante le relève à bon droit, le dessin d’une roue d’engrenage, intégrée au sein de l’élément verbal « makeblock », n’empêche pas le public de saisir la signification du terme « makeblock », puisqu’il s’agit clairement d’un ornement de la lettre « o ».

53      Toutefois, contrairement à ce que fait valoir la requérante, ledit élément figuratif ne peut être considéré comme renforçant la signification de l’élément verbal. En effet, si l’icône de l’engrenage peut, comme la requérante le relève correctement, être considéré comme un symbole pour représenter le fonctionnement ou la création de quelque chose, la création de quelque chose avec un engrenage est caractérisée par un niveau élevé de mécanique qui ne correspond pas à celui d’une construction à partir de blocs ou afin de former un bloc. La construction à partir de blocs fait plutôt allusion au monde des enfants, tandis que l’engrenage vise la mécanique plus fine et fait allusion au monde des ingénieurs. Le dessin de la roue d’engrenage ne contribue donc pas à une clarification du message de l’élément verbal, mais dilue une éventuelle idée de construction de blocs ou à partir de blocs.

54      Il s’ensuit que la requérante n’a pas démontré que la combinaison, d’une part, des éléments « make » et « block », accolés dans un terme artificiel composé, et, d’autre part, de l’engrenage, dans le signe en cause, exprimerait une affirmation claire quelconque. À l’instar de la chambre de recours et de l’intervenante, il y a lieu de constater qu’il s’agit tout au plus d’une composition de nature suggestive.

 Sur le lien suffisamment direct et concret entre la marque contestée et les produits concernés

55      Étant donné que le signe en cause ne comporte pas de message clair et fournit encore moins la description d’une caractéristique de certains produits (voir, à cet égard, points 42 à 50 ci-dessus), il ne saurait être soutenu qu’il existe un lien suffisamment direct et concret entre la marque contestée et les produits concernés. Vu le caractère vague de la marque contestée, laquelle comporte au mieux une référence généralisée et suggestive au monde des activités de construction, il convient de conclure que le public pertinent ne percevra pas immédiatement et sans autre réflexion une description des produits concernés.

56      C’est donc à bon droit que la chambre de recours a constaté qu’il n’existait pas de lien suffisamment direct et concret entre la marque contestée et les produits concernés justifiant que cette marque tombe sous le coup du motif absolu de nullité énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009.

57      Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter le premier moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement

58      Tout d’abord, la requérante conteste la constatation de la chambre de recours selon laquelle la marque contestée a un caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009. Elle estime que, même si un terme donné n’était pas clairement descriptif des produits et des services concernés au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement, il serait toujours possible d’objecter sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement au motif que le terme sera perçu par le public pertinent comme fournissant uniquement des informations sur la nature des produits concernés et non sur leur origine. Tel aurait été le cas quand l’enregistrement de la marque figurative PICK & WIN ainsi que celui de la marque verbale medi ont été refusés pour absence de caractère distinctif, la situation dans l’affaire présente étant comparable à celle desdites affaires. Selon la requérante, le Tribunal devrait, comme dans l’affaire PICK & WIN, constater que Makeblock manque d’un élément fantaisiste.

59      Ensuite, la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir évalué le caractère explicatif ou laudatif du signe, lequel, en l’espèce, se déduirait à la fois de l’emballage du robot du titulaire de la marque et de ce que le titulaire de la marque a affiché sur ses sites Internet. En présence d’un produit portant le signe Makeblock, le consommateur pensera immédiatement à la construction à partir de blocs ou à l’assemblage de blocs aux fins de fabriquer quelque chose. Cette signification serait également illustrée par les slogans sur l’emballage de certains des produits commercialisés sous la marque contestée, à savoir « Construct Your Dreams » ou « Make Your Ideas Rock ! ».

60      En outre, la requérante fait valoir que le caractère distinctif de l’élément figuratif utilisé dans la marque contestée est atténué puisque la représentation d’une roue dentée se réfère à des enseignements en matière de produits mécaniques. Cette forme graphique de la lettre « o » décrirait une des pièces nécessaires de tous les produits vendus par l’intervenante.

61      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

62      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif. En vertu de l’article 7, paragraphe 2, du même règlement, le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union.

63      Selon une jurisprudence constante, le caractère distinctif d’une marque au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 signifie que le signe permet d’identifier le produit ou le service pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit ou ce service de ceux d’autres entreprises (voir arrêt du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 33 et jurisprudence citée).

64      Les signes descriptifs visés à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 sont également dépourvus de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce règlement. À l’inverse, un signe peut être dépourvu de caractère distinctif au sens dudit article 7, paragraphe 1, sous b), pour des raisons autres que son éventuel caractère descriptif (arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 46).

65      Afin d’apprécier si une marque est ou non dépourvue de caractère distinctif, il convient de prendre en considération l’impression d’ensemble qu’elle produit. Cela ne saurait toutefois impliquer qu’il n’y ait pas lieu de procéder, dans un premier temps, à un examen successif des différents éléments de présentation utilisés pour cette marque (voir arrêt du 25 octobre 2007, Develey/OHMI, C‑238/06 P, EU:C:2007:635, point 82 et jurisprudence citée).

66      En premier lieu, la requérante fait valoir que la marque contestée fait référence à la nature des produits visés, de sorte qu’elle serait dépourvue de caractère distinctif.

67      À cet égard, il convient de relever que la marque contestée est constituée d’un élément verbal, qui se compose à son tour des mots anglais « make » et « block », et d’un élément figuratif représentant un engrenage.

68      Ces deux éléments font, certes, référence au domaine de la construction. Or, ils ne se concilient guère avec l’image d’un engrenage qui est utilisé pour des constructions mécaniques sophistiquées et n’est en principe pas employé avec des blocs mais avec des pièces plus fines. La combinaison de ces éléments ne permet donc pas d’en tirer une quelconque information sur les produits commercialisés sous ce signe. Le signe dans son ensemble ne transmet pas d’informations sur les produits relevant des classes 7 et 28 que le consommateur peut facilement discerner.

69      À l’appui de son argument, la requérante invoque une jurisprudence selon laquelle le terme « medi » était considéré comme dépourvu de caractère distinctif car, dans le domaine visé par la marque demandée, le public pertinent perçoit le signe medi comme fournissant des informations sur la nature des produits ou des services qu’il désigne, en l’occurrence leur destination à usage médical ou thérapeutique ou leur référence au domaine médical, et non comme indiquant l’origine des produits et des services en cause [voir arrêt du 12 juillet 2012, medi/OHMI (medi), T‑470/09, EU:T:2012:369, point 36 et jurisprudence citée].

70      Or, le terme « makeblock » n’est pas comparable au terme « medi », en ce qu’il ne fournit pas au public pertinent des informations sur la nature des produits qu’il désigne. Au contraire, il n’exprime aucun message que les consommateurs de produits comme des robots ou des jouets pourront facilement comprendre.

71      Ainsi, il y a lieu d’écarter le premier argument de la requérante selon lequel la marque contestée décrit des caractéristiques des produits en cause et n’est dès lors pas apte à distinguer l’origine des produits compris dans les classes 7 et 28.

72      En deuxième lieu, la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir évalué le caractère laudatif ou explicatif de la marque contestée. Contrairement à ce que soutient l’intervenante, cet argument ne modifie pas l’objet du litige dans le cadre de la procédure devant le Tribunal, l’EUIPO ayant traité le caractère prétendument élogieux du signe au point 47 de la décision attaquée.

73      Toutefois, ledit argument de la requérante, fondé sur l’utilisation de la marque contestée sur l’emballage des produits de l’intervenante, où ladite marque apparaît à côté de l’image d’un robot-constructeur, ainsi qu’avec les slogans « Construct Your Dreams » ou « Make Your Ideas Rock ! », ne saurait convaincre. L’usage effectif de la marque contestée n’a aucune incidence sur son caractère distinctif intrinsèque, lequel doit être apprécié uniquement au regard de sa représentation fournie avec la demande d’enregistrement. En effet, ce n’est que dans le cadre de l’application de l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 207/2009 qu’il y a lieu d’apprécier l’usage effectif d’un signe dont l’enregistrement est demandé [arrêt du 6 juin 2019, Ortlieb Sportartikel/EUIPO (Représentation d’un polygone octogonal), T‑449/18, non publié, EU:T:2019:386, points 34 et 35].

74      Par ailleurs, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la marque contestée n’est pas comparable à la marque figurative PICK & WIN. À cet égard, dans l’arrêt du 9 avril 2019, ZITRO IP/EUIPO (PICK & WIN MULTISLOT) (T‑277/18, non publié EU:T:2019:230, point 19), le Tribunal a constaté qu’un simple slogan publicitaire est dépourvu de caractère distinctif, sauf si la marque peut d’emblée être perçue par le public pertinent, au-delà de sa fonction promotionnelle, comme une indication d’origine commerciale des produits visés. Or, la requérante ne relève pas que le signe Makeblock se présente, en lui-même, comme un slogan ou une partie d’un slogan. Il ressort plutôt des preuves qu’elle a produites que la marque contestée est utilisée en combinaison avec des slogans.

75      En troisième lieu, l’argument de la requérante selon lequel la marque contestée manquerait d’un élément fantaisiste doit être rejeté.

76      À cet égard, il suffit de rappeler que l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne n’est pas subordonné à la constatation d’un certain niveau de créativité ou d’imagination linguistique ou artistique de la part du titulaire de la marque. Il suffit que la marque permette au public pertinent d’identifier l’origine des produits ou des services protégés par celle-ci et de les distinguer de ceux d’autres entreprises (arrêt du 16 septembre 2004, SAT.1/OHMI, C‑329/02 P, EU:C:2004:532, point 41).

77      Ainsi, la requérante ne saurait tirer argument de l’arrêt du 9 avril 2019, PICK & WIN MULTISLOT (T‑277/18, non publié, EU:T:2019:230, point 26), dans lequel le Tribunal a constaté que l’expression « pick & win multislot » ne contenait aucun élément fantaisiste qui pourrait permettre au public pertinent de la mémoriser facilement et immédiatement en tant que marque distinctive pour les produits et les services visés.

78      À cet égard, il y a lieu de tenir compte du contexte de l’affaire PICK & WIN dans laquelle le Tribunal a mis en exergue que l’expression verbale en question avait une signification claire, le terme « win » véhiculant un message clairement élogieux, selon lequel les produits et les services visés par la marque demandée auraient pour but de faire en sorte que le consommateur ait une possibilité multiple de gains. C’est dans ce contexte que le Tribunal a constaté que la marque demandée ne disposait pas d’un degré d’originalité suffisant pour qu’elle soit apte à indiquer au consommateur l’origine commerciale des produits et services concernés (arrêt du 9 avril 2019, PICK & WIN MULTISLOT, T‑277/18, non publié, EU:T:2019:230, points 28 à 30).

79      Ainsi, il s’agit de conditions qui ne sont pas présentes dans le cas d’espèce, l’élément verbal « makeblock » ne véhiculant aucun message clair (voir points 41 et suivants ci-dessus). C’est en vertu de la combinaison des mots « make » et « block » et de l’élément figuratif de l’engrenage que ces éléments, qui sont tous usuels en eux-mêmes, forment un signe qui, dans son ensemble, n’est pas usuel, les éléments verbaux ne se conciliant guère, comme il a été constaté au point 68 ci-dessus, avec l’élément figuratif.

80      En tout état de cause, la combinaison d’éléments conférant des allusions et suggestions plutôt que des déclarations factuelles, comme dans la marque contestée, constitue une création qui est, de fait, dotée d’un certain élément fantaisiste.

81      En quatrième lieu, il convient d’écarter l’argument de la requérante en ce que celle-ci fait valoir que le caractère distinctif de l’élément figuratif utilisé dans la marque contestée est atténué puisque la représentation d’une roue dentée porte sur les enseignements en matière de produits mécaniques. Cette forme graphique de la lettre « o » décrirait une des pièces nécessaires de tous les produits vendus par l’intervenante.

82      Premièrement, il a déjà été constaté aux points 27 et suivants ci-dessus que la marque contestée n’avait pas de caractère descriptif.

83      Deuxièmement, selon la jurisprudence citée au point 65 ci-dessus, afin d’apprécier si une marque est ou non dépourvue de caractère distinctif, il convient de prendre en considération l’impression d’ensemble qu’elle produit. L’élément figuratif étant intégré entièrement dans l’élément verbal de la marque contestée, il est exclu d’en apprécier l’impact de manière isolée.

84      Il ressort de ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter le deuxième moyen de la requérante.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 1, sous g), du même règlement

85      Par son troisième moyen, la requérante fait valoir que la chambre de recours a estimé à tort que la marque contestée n’avait pas de caractère trompeur.

86      D’une part, la requérante semble contester les considérations de la chambre de recours selon lesquelles la marque contestée n’a pas de caractère trompeur par rapport aux larges catégories de produits, et notamment les robots relevant de la classe 7 et les blocs de construction (jouets).

87      D’autre part, elle avance que non seulement il s’agit de biens très spécifiques, mais le terme « make » (faire), verbe largement utilisé dans les activités de création ou de programmation ou dans les jeux avec des blocs, pourrait être utilisé comme l’équivalent de « construire » (build).

88      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

89      En vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 177, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, la requête introduite dans le cadre d’un recours dirigé contre l’EUIPO doit contenir, notamment, l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Elle doit, de ce fait, expliciter en quoi consiste le moyen sur lequel le recours est fondé, de sorte que sa seule énonciation abstraite ne répond pas aux exigences du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et du règlement de procédure. De plus, cet exposé, même sommaire, doit être suffisamment clair et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. La sécurité juridique et une bonne administration de la justice exigent, pour qu’un recours ou, plus spécifiquement, un moyen du recours soient recevables, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels ceux-ci se fondent ressortent de façon cohérente et compréhensible du texte même de la requête [voir arrêt du 13 mai 2020, Peek & Cloppenburg/EUIPO – Peek & Cloppenburg (Peek & Cloppenburg),  T‑444/18, non publié, EU:T:2020:185, point 26 et jurisprudence citée].

90      En l’espèce, les arguments de la requérante selon lesquels la marque contestée a un caractère trompeur (voir points 86 et 87 ci-dessus) ne sont pas compréhensibles. Aux points 109 à 111 de sa requête, la requérante indique qu’elle conteste les considérations de la chambre de recours rejetant le caractère potentiellement trompeur de la marque, mais elle ne précise pas lesquelles de ces considérations elle entend contester. De plus, comme l’avance correctement l’EUIPO, la requérante n’explique pas comment la marque contestée pourrait effectivement tromper le public pertinent ou créer un risque sérieux d’une telle tromperie.

91      Par ailleurs, les seuls éléments de fait que la requérante invoque aux points 109 et 110 de sa requête sont, d’une part, que la marque contestée désigne de larges catégories de produits et, d’autre part, qu’il s’agit de biens très spécifiques. Toutefois, il ne ressort pas du texte de ces points de la requête de quels biens spécifiques il s’agit, ni comment il conviendrait d’apprécier l’existence d’une tromperie au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous g), du règlement no 207/2009. À cet égard, la requérante manque, en effet, de présenter, comme le note à bon droit l’EUIPO, un argumentaire cohérent.

92      Au vu de ce qui précède, le troisième moyen invoqué par la requérante doit être rejeté comme irrecevable.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

93      Finalement, la requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir motivé à suffisance de droit la raison pour laquelle elle a considéré invalides ou insuffisantes certaines preuves présentées au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009.

94      De même, elle critique que la chambre de recours n’a pas pris en considération l’ensemble des arguments avancés au sujet de la jurisprudence concernant l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

95      L’EUIPO ainsi que l’intervenante contestent que la décision attaquée soit entachée d’un défaut de motivation.

96      Le Tribunal estime que le grief fondé sur un défaut de motivation constitue un grief distinct de ceux tirés de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 et de ceux tirés de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement. Le fait que la requérante n’a pas présenté un moyen distinct tiré d’un défaut de motivation ne s’oppose pas à son examen par le Tribunal. Il convient de rappeler qu’un défaut ou une insuffisance de motivation relève de la violation des formes substantielles, au sens de l’article 263 TFUE, et constitue un moyen d’ordre public pouvant, voire devant être soulevé d’office par le juge de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 30 septembre 2015, Anagnostakis/Commission, T‑450/12, EU:T:2015:739, point 21).

97      Aux termes de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. Cette obligation, qui découle également du droit à une bonne administration prévu à l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, a pour double objectif de permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision concernée. Cette obligation a la même portée que celle découlant de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, qui exige que la motivation fasse apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte, sans qu’il soit nécessaire que cette motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents. La question de savoir si la motivation d’un acte satisfait auxdites exigences doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir, en ce sens, arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma, C‑564/16 P, EU:C:2018:509, points 64 et 65 et jurisprudence citée). La motivation peut donc, comme l’a relevé à juste titre l’EUIPO, être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle [arrêt du 25 avril 2013, Bell & Ross/OHMI – KIN (Boîtier de montre-bracelet), T‑80/10, non publié, EU:T:2013:214, point 37].

98      En ce qui concerne, d’une part, la critique selon laquelle la chambre de recours n’aurait pas pris en considération l’ensemble des arguments avancés au sujet de la jurisprudence concernant l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, il faut rejeter cet argument comme irrecevable, comme le fait valoir à juste titre l’EUIPO, la requérante ne précisant pas lequel ou lesquels de ses arguments elle considère comme ayant été ignorés. Selon la jurisprudence, afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même [voir arrêt du 24 septembre 2008, Anvil Knitwear/OHMI – Aprile e Aprile (Aprile), T‑179/07, non publié, EU:T:2008:401, point 16 et jurisprudence citée].

99      En ce qui concerne, d’autre part, le reproche de la requérante concernant l’appréciation insuffisante faite par la chambre de recours de certaines preuves présentées au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, il ressort de manière univoque des points 36 et 37 de la décision attaquée, comme le constate correctement l’intervenante, que la chambre de recours a clairement établi que les preuves en cause se référaient à des exemples uniques très spécifiques et ne démontraient pas que la fabrication de blocs serait comprise comme une caractéristique se rapportant à des jouets, des blocs de construction de jouets ou une sous-catégorie de jouets. En outre, la chambre de recours a également pris en considération ces éléments de preuve dans le cadre de l’appréciation du caractère distinctif de la marque contestée. En effet, si, au point 47 de la décision attaquée, la chambre de recours a renvoyé aux points 27 à 41 de cette décision, ce renvoi inclut les points 36 et 37.

100    Or, la requérante, par sa critique, ne vise en réalité non pas un prétendu non-respect de l’obligation de motivation incombant aux instances de l’EUIPO en vertu de l’article 94 du règlement 2017/1001, mais le bien-fondé de cette motivation. Toutefois, selon une jurisprudence constante, l’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé de la motivation, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. En effet, la motivation d’une décision consiste à exprimer formellement les motifs sur lesquels repose cette décision. Si ces motifs sont entachés d’erreurs, celles-ci entachent la légalité au fond de la décision, mais non la motivation de celle-ci, qui peut être suffisante tout en exprimant des motifs erronés (voir arrêt du 22 septembre 2016, Pensa Pharma/EUIPO, C‑442/15 P, non publié, EU:C:2016:720, point 35 et jurisprudence citée).

101    La motivation avancée dans la décision attaquée est limpide et permet ainsi, d’une part, à la requérante de connaître les motifs de la décision attaquée afin de défendre ses droits et, d’autre part, au Tribunal d’exercer son contrôle de la légalité. En témoignent les arguments que la requérante a été en mesure de formuler dans le cadre de la présente procédure.

102    Partant, pour les motifs qui précèdent, il convient de rejeter le moyen tiré d’un défaut de motivation.

103    Aucun des moyens recevables soulevés par la requérante au soutien de ses conclusions n’étant fondé, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

104    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Distintiva Solutions S. Coop. Pequeña est condamnée aux dépens.

De Baere

Steinfatt

Kecsmár

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 2 mars 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.