Language of document : ECLI:EU:T:2020:139

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

2 avril 2020 (*)

« Dumping – Importations de certains papiers thermosensibles légers originaires de Corée du Sud – Droit antidumping définitif – Calcul de la marge de dumping – Calcul de la marge de préjudice – Détermination du préjudice »

Dans l’affaire T‑383/17,

Hansol Paper Co. Ltd, établie à Séoul (Corée du Sud), représentée par Mes J.-F. Bellis et B. Servais, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mme A. Demeneix, MM. M. França et N. Kuplewatzky, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

European Thermal Paper Association (ETPA), établie à Zürich (Suisse), représentée par Mes H. Hobbelen, J. Rivas Andrés et B. Vleeshouwers, avocats,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation du règlement d’exécution (UE) 2017/763 de la Commission, du 2 mai 2017, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations de certains papiers thermosensibles légers originaires de la République de Corée (JO 2017, L 114, p. 3), en tant qu’il concerne la requérante,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mmes V. Tomljenović, présidente, A. Marcoulli (rapporteure) et O. Spineanu-Matei, juges,

greffier : Mme E. Artemiou, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 5 septembre 2019,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 18 février 2016, à la suite d’une plainte, la Commission européenne a publié un avis d’ouverture d’une procédure antidumping concernant les importations de certains papiers thermosensibles légers originaires de Corée du Sud (JO 2016, C 62, p. 7).

2        Le produit faisant l’objet de l’enquête correspondait aux papiers thermosensibles légers d’un poids de 65 g/m2 ou moins, présentés en rouleaux d’une largeur de 20 cm ou plus, d’un poids (papier compris) de 50 kg ou plus et d’un diamètre (papier compris) de 40 cm ou plus (ci-après les « rouleaux jumbo »), avec ou sans couche de base sur une face ou sur les deux, enduits d’une substance thermosensible (mélange de colorant et de révélateur qui réagissent et forment une image lorsqu’ils sont soumis à la chaleur) sur une face ou sur les deux et avec ou sans couche de protection, originaires de Corée du Sud, relevant des codes NC ex 4809 90 00, ex 4811 90 00, ex 4816 90 00 et ex 4823 90 85 (ci-après le « produit considéré »).

3        L’enquête sur les pratiques de dumping et sur le préjudice a porté sur la période allant du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2015 (ci-après la « période d’enquête »). L’examen des tendances pertinentes aux fins de l’évaluation du préjudice a couvert la période comprise entre le 1er janvier 2012 et la fin de la période d’enquête.

4        La requérante, Hansol Paper Co. Ltd, établie en Corée du Sud, est active dans la production et dans l’exportation du produit considéré, notamment vers l’Union européenne. Ses ventes dudit produit ont été faites, dans l’Union, pendant la période d’enquête, à des clients indépendants ainsi qu’à un négociant lié, Hansol Europe BV (ci-après « Hansol Europe »), et à quatre transformateurs liés, à savoir Schades Ltd, Schades Nordic A/S, Heipa technische Papiere GmbH (ci-après « Heipa ») et R+S Group GmbH (ci-après « R+S »). Les transformateurs liés avaient notamment pour activité de transformer ce produit en nouveaux produits, dénommés « petits rouleaux », vendus dans l’Union à des clients indépendants ou liés.

5        Un autre producteur-exportateur coréen, Hansol Artone Co. Ltd (ci-après « Artone »), qui était lié à la requérante, a coopéré à l’enquête antidumping. Il a fusionné avec la requérante le 3 mars 2017.

6        Le 18 février 2016, la requérante a reçu le questionnaire antidumping destiné aux producteurs-exportateurs du produit considéré.

7        Le 19 février 2016, compte tenu de l’absence ou du nombre limité de ventes du produit considéré par certaines des sociétés qui lui étaient liées à des clients indépendants dans l’Union, la requérante a demandé à ce que Schades Nordic, Heipa et R+S soient exemptées de l’obligation de remplir le questionnaire pour les sociétés liées au producteur-exportateur, repris en annexe I au questionnaire antidumping.

8        Le 23 février 2016, la Commission a accepté cette demande, tout en se réservant le droit de procéder à d’autres demandes de renseignements ou d’information.

9        Le 7 mars 2016, après examen de certaines informations fournies par la requérante, la Commission a décidé que Schades Nordic, Heipa et R+S devraient répondre aux sections F et G, relatives aux coûts de production et à la profitabilité, et remplir l’annexe I du questionnaire antidumping.

10      Le 8 mars 2016, la requérante a sollicité l’intervention du conseiller-auditeur concernant les demandes de la Commission adressées à Schades Nordic, à Heipa et à R+S. En particulier, elle a mis en avant la charge de travail importante aux fins de fournir des données relatives aux ventes et aux coûts relatifs aux petits rouleaux, non concernés par la procédure, et le caractère inopérant de cette demande dans la mesure où il n’aurait pas été possible de déterminer si les petits rouleaux avaient été fabriqués à partir de ses rouleaux jumbo ou à partir d’autres sources.

11      Le 10 mars 2016, une audition s’est tenue avec la Commission, présidée par le conseiller-auditeur.

12      Les 16 et 17 mars 2016, la Commission a procédé à une visite dans les locaux de Schades.

13      Le 21 mars 2016, la Commission a indiqué à la requérante que les demandes d’information adressées le 7 mars 2016 étaient désormais limitées à Schades.

14      Le 15 avril 2016, la Commission a accusé réception des réponses de la requérante et d’Artone aux questionnaires antidumping et des réponses d’Hansol Europe et de Schades à l’annexe I du questionnaire antidumping.

15      Entre le 15 juin et le 26 août 2016, la Commission a effectué des visites de vérifications dans les locaux de la requérante, d’Artone, d’Hansol Europe et de Schades.

16      Le 16 novembre 2016, la Commission a adopté le règlement d’exécution (UE) 2016/2005, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de certains papiers thermosensibles légers originaires de la République de Corée (JO 2016, L 310, p. 1).

17      Le 17 novembre 2016, un document d’information reprenant les conclusions provisoires de la Commission a été adressé à la requérante. Cette dernière a présenté ses observations sur lesdites conclusions provisoires le 8 décembre 2016.

18      Le 13 décembre 2016, à la demande de la requérante, une audition s’est tenue avec la Commission, présidée par le conseiller-auditeur.

19      Le 17 février 2017, un document d’information finale reprenant les conclusions définitives de la Commission a été adressé à la requérante. Cette dernière a présenté ses observations sur ce document le 27 février 2017.

20      Les 2 et 22 mars 2017, à la demande de la requérante, des auditions se sont tenues avec la Commission, présidées par le conseiller-auditeur.

21      Les 20 et 23 mars 2017, la Commission a présenté, respectivement, des conclusions définitives additionnelles et des conclusions définitives révisées, qui ont fait l’objet d’observations de la part de la requérante.

22      Le 2 mai 2017, la Commission a adopté le règlement d’exécution (UE) 2017/763, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations de certains papiers thermosensibles légers originaires de la République de Corée (JO 2017, L 114, p. 3, ci-après le « règlement d’exécution attaqué »).

23      Le règlement d’exécution attaqué est notamment fondé sur l’article 9, paragraphe 4, du règlement (UE) 2016/1036 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de l’Union européenne (JO 2016, L 176, p. 21, ci-après le « règlement de base »).

24      L’article 1er du règlement d’exécution attaqué prévoit l’imposition d’un droit antidumping définitif sur les importations du produit considéré, prenant la forme d’un montant fixe de 104,46 euros par tonne, net.

 Procédure et conclusions des parties

25      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 20 juin 2017, la requérante a introduit le présent recours.

26      Le 22 septembre 2017, la Commission a déposé le mémoire en défense.

27      Par ordonnance du 27 novembre 2017, le président de la septième chambre du Tribunal a admis l’European Thermal Paper Association (ETPA) à intervenir au soutien des conclusions de la Commission dans la présente affaire.

28      Par ordonnance du 16 octobre 2018, Hansol Paper/Commission (T‑383/17, non publiée, EU:T:2018:742), le président de la septième chambre du Tribunal a partiellement fait droit à des demandes de traitement confidentiel de la requérante concernant certains passages des écritures des parties principales.

29      Par lettres du 14 novembre 2018, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89, paragraphe 3, de son règlement de procédure, le Tribunal a invité les parties à répondre à certaines questions. Les parties ont déféré à cette demande dans le délai imparti, à savoir le 23 novembre 2018 s’agissant de la réponse de la requérante et le 6 décembre 2018 s’agissant de la réponse de la Commission ainsi que de celle de l’intervenante.

30      Par ordonnance du 28 février 2019, Hansol Paper/Commission (T‑383/17, non publiée, EU:T:2019:146), le président de la septième chambre du Tribunal a partiellement fait droit à des demandes de traitement confidentiel de la requérante concernant certains passages de la réponse de la requérante du 23 novembre 2018 et de la réponse de la Commission du 6 décembre 2018 aux mesures d’organisation de la procédure.

31      Un membre de la septième chambre ayant été empêché de siéger, le président du Tribunal a désigné, le 20 mai 2019, en application de l’article 17, paragraphe 2, du règlement de procédure, un autre juge pour compléter la chambre.

32      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 5 septembre 2019.

33      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler le règlement d’exécution attaqué dans la mesure où il la concerne ;

–        condamner la Commission aux dépens ;

–        condamner la partie intervenante à supporter ses propres dépens.

34      La Commission et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme étant irrecevable ;

–        à titre subsidiaire, rejeter le recours comme étant non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité du recours

35      La Commission soutient que la requête ne satisfait pas aux exigences formelles de l’article 76, sous d), du règlement de procédure. Selon cette disposition, la requête devrait contenir un exposé sommaire des moyens invoqués par la requérante. Or, un tel exposé sommaire des moyens ferait défaut en l’espèce. Le recours, dans son ensemble, serait donc irrecevable.

36      La requérante relève que les moyens invoqués au soutien du recours ne sont pas seulement présentés de façon sommaire, mais sont également exposés de manière complète, claire, cohérente et structurée. La fin de non-recevoir soulevée par la Commission serait donc manifestement non fondée.

37      Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, la requête doit, notamment, contenir l’objet du litige et un exposé sommaire des moyens invoqués. Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autres informations. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (voir, en ce sens, ordonnance du 11 janvier 2013, Charron Inox et Almet/Commission et Conseil, T‑445/11 et T‑88/12, non publiée, EU:T:2013:4, point 57).

38      Plus particulièrement, s’il convient d’admettre, d’une part, que l’énonciation des moyens du recours n’est pas liée à la terminologie et à l’énumération du règlement de procédure et, d’autre part, que la présentation de ces moyens, par leur substance plutôt que par leur qualification légale, peut suffire, c’est à la condition toutefois que lesdits moyens se dégagent de la requête avec suffisamment de netteté. En outre, la seule énonciation abstraite des moyens dans la requête ne répond pas aux exigences du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et du règlement de procédure, et les termes « exposé sommaire des moyens », employés dans ces textes, signifient que la requête doit expliciter en quoi consiste le moyen sur lequel le recours est fondé [ordonnance du 28 avril 1993, De Hoe/Commission, T‑85/92, EU:T:1993:39, point 21 ; arrêts du 28 septembre 2016, Pinto Eliseu Baptista Lopes Canhoto/EUIPO – University College London (CITRUS SATURDAY), T‑400/15, non publié, EU:T:2016:569, point 43, et du 15 février 2017, Morgese e.a./EUIPO – All Star (2 STAR), T‑568/15, non publié, EU:T:2017:78, point 20].

39      Or, en l’espèce, la requête contient non seulement une énonciation structurée des moyens invoqués au soutien du recours, mais également des développements détaillés explicitant en quoi consistent lesdits moyens, ce qui a d’ailleurs permis à la Commission de répondre précisément à chacun des moyens.

40      En conséquence, il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par la Commission.

 Sur la portée du recours

41      La Commission, soutenue par l’intervenante, relève que la requérante, tout en demandant l’annulation du règlement d’exécution attaqué dans son ensemble, ne contesterait pas le fait que des droits antidumping seraient dus sur les importations du produit considéré dans l’Union. Dès lors, si le Tribunal devait accueillir l’un des moyens du recours, il ne pourrait annuler l’article 1er du règlement d’exécution attaqué que pour autant que ce dernier impose un droit antidumping supérieur à celui qui aurait dû être appliqué sur les importations de la requérante. Cette approche serait conforme à l’arrêt du 21 novembre 2002, Kundan et Tata/Conseil (T‑88/98, EU:T:2002:280, points 149 et 150).

42      La requérante soutient qu’une annulation partielle de l’article 1er du règlement d’exécution attaqué serait contraire à la jurisprudence. Elle estime, dès lors, que, si le Tribunal devait accueillir l’un des moyens du recours, ledit règlement d’exécution devrait être annulé dans son ensemble, dans la mesure où il la concerne.

43      À cet égard, il y a lieu de constater que la Commission, soutenue par l’intervenante, ne conclut qu’au rejet du recours et à la condamnation de la requérante aux dépens. Elle ne conclut pas, à titre subsidiaire, à l’instar de ce qui était le cas dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 21 novembre 2002, Kundan et Tata/Conseil (T‑88/98, EU:T:2002:280), à l’annulation partielle de l’article 1er du règlement d’exécution attaqué. Il s’ensuit que les arguments développés par la Commission ne viennent pas au soutien de ses chefs de conclusions. Par ailleurs, il y a lieu de relever que, dans l’affaire susmentionnée, la demande d’annulation partielle présentée par le Conseil reposait sur un calcul précis du droit antidumping qui aurait résulté, le cas échéant, de la prise en compte de l’illégalité invoquée au soutien du deuxième moyen dans cette affaire (voir points 88 et 145 de cet arrêt). Tel n’est pas le cas en l’espèce.

44      En outre, et en tout état de cause, il ressort d’une jurisprudence constante que l’annulation partielle d’un acte de l’Union n’est possible que dans la mesure où les éléments dont l’annulation est demandée sont détachables du reste de l’acte. À cet égard, il a été itérativement jugé qu’il n’est pas satisfait à cette exigence lorsque l’annulation partielle d’un acte aurait pour effet de modifier la substance de celui-ci (voir arrêt du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil, C‑204/16 P, EU:C:2017:838, point 36 et jurisprudence citée).

45      Or, contrairement à ce qu’avance la Commission, dans les circonstances de l’espèce, il ne serait pas possible d’annuler partiellement l’article 1er du règlement d’exécution attaqué, en ce sens qu’il serait annulé uniquement en ce qu’il imposerait un droit trop élevé du fait de l’erreur qui pourrait être constatée concernant la méthode de calcul du taux du droit antidumping.

46      En effet, la requérante avance, au soutien du recours, plusieurs moyens mettant en cause le calcul du prix à l’exportation ou de la valeur normale. Le prix à l’exportation et la valeur normale étant des conditions essentielles pour déterminer le taux du droit antidumping applicable, l’article 1er du règlement d’exécution attaqué ne pourrait être maintenu, dans la mesure où il impose un droit antidumping individuel à la requérante, si l’un des moyens avancés au soutien du recours à cet égard devait être fondé (voir, en ce sens, arrêt du 15 septembre 2016, PT Pelita Agung Agrindustri/Conseil, T‑121/14, non publié, EU:T:2016:500, point 82).

47      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter l’argumentation de la Commission, soutenue par l’intervenante, selon laquelle, si le Tribunal devait accueillir l’un des moyens du recours, il ne pourrait annuler l’article 1er du règlement d’exécution attaqué que pour autant que ce dernier impose un droit antidumping supérieur à celui qui aurait dû être appliqué sur les importations de la requérante.

 Sur le fond

48      La requérante invoque cinq moyens au soutien du recours.

49      Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 11, et de l’article 17, paragraphe 2, du règlement de base ainsi que du caractère illégal du calcul de la marge de dumping de la requérante.

50      Le deuxième moyen est pris de la violation de l’article 9, paragraphe 3, de l’accord sur la mise en œuvre de l’article VI de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (GATT) (JO 1994, L 336, p. 103, ci-après l’« accord antidumping »), figurant à l’annexe I A de l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (JO 1994, L 336, p. 3), et de l’article 9, paragraphe 4, second alinéa, du règlement de base ainsi que du principe de bonne administration.

51      Le troisième moyen est tiré de l’application erronée de l’article 2, paragraphes 9 et 10, du règlement de base, dans la mesure où la Commission a opéré des ajustements excessifs pour les ventes de petits rouleaux obtenus à partir de rouleaux jumbo acquis par Schades auprès de producteurs européens.

52      Le quatrième moyen est pris de la violation de l’article 2, paragraphe 1, du règlement de base, dans la mesure où la Commission a construit de manière erronée la valeur normale prévue à l’article 2, paragraphe 3, dudit règlement.

53      Le cinquième moyen est tiré de la violation de l’article 1er, paragraphe 1, et de l’article 3, paragraphes 1 à 3 et 5 à 8, du règlement de base, de la jurisprudence des juridictions de l’Union et des décisions de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), de la pratique décisionnelle antérieure de la Commission et des principes de la comparaison équitable et de l’égalité de traitement dans le calcul de la marge de préjudice.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 11, et de l’article 17, paragraphe 2, du règlement de base ainsi que du caractère illégal du calcul de la marge de dumping de la requérante

54      Le premier moyen repose sur deux branches.

55      Dans une première branche, la requérante soutient que la Commission a eu recours à la technique de l’échantillonnage, bien que celle-ci démente l’avoir fait, violant ainsi l’article 17, paragraphe 2, du règlement de base.

56      Dans une seconde branche, la requérante invoque un calcul erroné de sa marge de dumping, en violation de l’article 2, paragraphe 11, du règlement de base.

–       Sur la première branche du premier moyen, tirée d’une violation de l’article 17, paragraphe 2, du règlement de base

57      La requérante rappelle que la Commission a finalement exempté Schades Nordic, Heipa et R+S de répondre à l’annexe I du questionnaire antidumping et a limité sa demande à Schades. Lors de l’audition du 2 mars 2017, la Commission aurait précisé qu’il ne s’agissait pas d’un échantillonnage. La requérante indique que, si l’affirmation de la Commission est exacte, le règlement de base n’offre aucun fondement pour extrapoler la marge de dumping de Schades aux autres transformateurs liés. Si, au contraire, il devait être retenu que la Commission a procédé à un échantillonnage, elle aurait alors violé l’article 17, paragraphe 2, dudit règlement en n’invitant pas la requérante à communiquer ses observations sur l’échantillonnage proposé.

58      La requérante ajoute qu’elle a effectivement demandé une exemption pour que Schades Nordic, Heipa et R+S ne remplissent pas l’annexe I du questionnaire antidumping. Toutefois, l’exemption accordée signifierait que ces sociétés devaient être ignorées aux fins du calcul de la marge de dumping. Enfin, la requérante conteste la représentativité de Schades en ce qui concerne la situation des trois autres transformateurs liés dans le cadre du calcul de la marge de dumping, car, notamment, d’une part, auraient été incluses des ventes de petits rouleaux produits à partir de rouleaux jumbo qui n’auraient pas été achetés en Corée du Sud et, d’autre part, les quantités de rouleaux jumbo qui lui ont été achetées par Schades n’étaient que marginalement supérieures à celles achetées par Schades Nordic.

59      La Commission et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

60      Aux termes de l’article 17, paragraphe 1, du règlement de base, dans sa version applicable au moment des faits, dans les cas où le nombre de plaignants, d’exportateurs ou d’importateurs, de types de produits ou de transactions est important, l’enquête peut se limiter à un nombre raisonnable de parties, de produits ou de transactions en utilisant des échantillons statistiquement représentatifs d’après les renseignements disponibles au moment du choix ou au plus grand volume de production, de ventes ou d’exportations sur lequel l’enquête peut raisonnablement porter compte tenu du temps disponible. Selon le paragraphe 2 dudit article, la préférence est accordée au choix d’un échantillon en concertation avec les parties intéressées ou avec leur consentement.

61      En l’espèce, ainsi qu’il résulte des considérants 22 à 46 du règlement d’exécution attaqué, la Commission a utilisé les données de Schades aux fins de calculer la marge de dumping des ventes du produit considéré faites aux transformateurs liés, en ce comprises les ventes faites à Schades Nordic, à Heipa et à R+S qui n’ont pas rempli l’annexe I du questionnaire antidumping. Plus précisément, l’utilisation des données de Schades portait sur la construction du prix à l’exportation des ventes dudit produit.

62      La requérante soutient que la Commission a violé l’article 17, paragraphe 2, du règlement de base, dans la mesure où elle n’aurait pas été invitée à communiquer ses observations sur l’échantillonnage proposé.

63      La première branche du premier moyen repose donc sur la prémisse que la Commission a appliqué l’article 17, paragraphe 1, du règlement de base lorsque celle-ci a décidé d’utiliser les données de Schades aux fins de calculer la marge de dumping des ventes du produit considéré faites aux transformateurs liés.

64      Or, une telle prémisse est erronée.

65      En effet, tout d’abord, la Commission a clairement indiqué au considérant 32 du règlement d’exécution attaqué qu’elle « n’a[vait] pas recouru à l’article 17 du règlement de base ». Cette position de la Commission avait déjà été exprimée à la requérante lors de l’audition du 2 mars 2017 avec le conseiller-auditeur.

66      Ensuite, il convient de rappeler que l’article 17, paragraphe 1, du règlement de base prévoit que la technique de l’échantillonnage peut être utilisée dans les cas où le nombre de producteurs de l’Union, d’exportateurs ou d’importateurs de types de produits ou de transactions est « important ». Or, tel n’est pas le cas en l’espèce, cette circonstance n’ayant jamais été mise en avant, au demeurant, par la Commission.

67      Par ailleurs, il y a lieu de relever que le fait que Schades Nordic, Heipa et R+S n’ont pas rempli l’annexe I du questionnaire antidumping provenait d’une demande initiale de la requérante, formalisée par un courriel du 19 février 2016. Dans ce cadre, la requérante ne pouvait ignorer que sa demande d’exemption ne signifierait pas que l’enquête se limiterait, s’agissant des transformateurs liés, aux seules ventes du produit considéré faites à Schades, compte tenu de l’obligation qui pèse sur la Commission, au titre de l’article 2, paragraphe 11, du règlement de base, de prendre en compte l’ensemble des transactions à l’exportation vers l’Union lors du calcul de la marge de dumping (voir, en ce sens, arrêt du 5 avril 2017, Changshu City Standard Parts Factory et Ningbo Jinding Fastener/Conseil, C‑376/15 P et C‑377/15 P, EU:C:2017:269, point 61). La Commission a d’ailleurs souligné, lors de l’audition du 10 mars 2016 avec le conseiller-auditeur, qu’une très grande partie des ventes dudit produit étaient faites à des transformateurs liés et que la marge de dumping pour ces ventes était plus importante que celle pour les ventes à des acheteurs indépendants. Elle a également indiqué, lors de l’audition du 13 décembre 2016 avec le conseiller-auditeur, que, compte tenu de la structure des ventes de la requérante, la méthode la plus appropriée pour déterminer le prix à l’exportation des ventes de ce produit était de le construire sur la base des prix de vente du produit transformé, à savoir les petits rouleaux.

68      En outre, il ressort du considérant 32 du règlement d’exécution attaqué que la Commission a expressément visé l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base comme fondement juridique de la construction du prix à l’exportation pour les ventes du produit considéré faites aux transformateurs liés. Ainsi, après avoir précisé qu’elle n’avait pas appliqué l’article 17 dudit règlement, la Commission a indiqué que, « [a]u lieu de cela, conformément à l’article 2, paragraphe 9, [de ce règlement], [elle avait] cherché à établir, dans les circonstances particulières de l’espèce, […] le prix à l’exportation le plus fiable pour ce qui [était] des ventes de rouleaux jumbo à des parties liées en vue d’une transformation en petits rouleaux ». La requérante ne soutient pas, dans le cadre de la première branche du premier moyen, que la Commission a violé cette dernière disposition.

69      Au vu de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de de rejeter la première branche du premier moyen comme étant non fondée.

–       Sur la seconde branche du premier moyen, tirée d’une violation de l’article 2, paragraphe 11, du règlement de base

70      La requérante indique que la Commission a calculé une marge de dumping pour les ventes directes et indirectes du produit considéré par la requérante et par Schades ainsi qu’une marge de dumping pour les ventes de petits rouleaux par Schades. Elle fait ensuite valoir que la Commission a pondéré les marges de dumping ainsi calculées en tenant compte de la part des ventes de rouleaux jumbo qu’elle avait réalisées, en premier lieu, avec des clients indépendants (entre 15 et 25 %) et, en second lieu, avec les transformateurs liés pour revente sous forme de petits rouleaux à des entreprises indépendantes (entre 75 et 85 %). Cette pondération aurait donné une marge de dumping globale de 10,3 % applicable à l’ensemble de ses ventes. Or, la pondération opérée par la Commission serait entachée d’une erreur manifeste dans la mesure où elle serait dépourvue de base juridique et aboutirait à un résultat artificiellement élevé. En premier lieu, la requérante soutient que la Commission a commis une erreur en déterminant la part des ventes de rouleaux jumbo aux transformateurs liés pour revente sous forme de petits rouleaux à des entreprises indépendantes. Ainsi, la Commission n’aurait pas tenu compte du fait que Schades Nordic aurait vendu un certain tonnage du produit considéré. En second lieu, la prise en compte des petits rouleaux pour le calcul de la marge de dumping serait contraire à l’article 2, paragraphe 11, du règlement de base dans la mesure où, d’une part, une quantité importante de petits rouleaux inclus dans la marge de dumping de Schades n’aurait pas été produite par cette société et où, d’autre part, certains types de produits revendus par Schades en petits rouleaux provenaient de producteurs de l’Union ou auraient été produits à partir de rouleaux jumbo achetés auprès de producteurs de l’Union.

71      La requérante ajoute que, contrairement à ce qu’a indiqué la Commission dans le mémoire en défense, les frais de vente, des dépenses administratives et d’autres frais généraux (ci-après les « frais VGA ») ont été calculés uniquement sur la base du questionnaire de Schades, et non sur la base de la réponse de trois transformateurs liés.

72      La Commission, soutenue par l’intervenante, indique que l’essentiel des ventes des rouleaux jumbo (entre 75 et 85 %) ont été faites pour des parties liées, aux fins de transformation en petits rouleaux et de revente ultérieure dans l’Union. En outre, il n’aurait pas été possible de retracer, auprès des transformateurs liés, l’origine des rouleaux jumbo dans le cadre de la fabrication des petits rouleaux. La Commission estime dès lors que, si la marge de dumping avait été calculée en tenant compte uniquement des ventes directes ou indirectes à des clients indépendants, cette marge n’aurait pas reflété correctement l’ensemble des ventes à l’exportation. Elle indique qu’elle devait donc utiliser les ventes directes ou indirectes du produit considéré à des clients indépendants ainsi que celles réalisées auprès de sociétés liées. S’agissant des ventes à des clients indépendants, le prix à l’exportation aurait été déterminé sur la base du prix réellement payé ou à payer pour le produit considéré vendu à l’exportation vers l’Union. S’agissant des ventes à des sociétés liées, la Commission affirme avoir établi le prix à l’exportation sur la base du prix auquel le produit importé et transformé avait été revendu pour la première fois à des clients indépendants dans l’Union. Cette méthode serait conforme à l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base. Ce prix de revente à un client indépendant aurait été ajusté à la baisse en déduisant les frais VGA (obtenus à partir de la réponse au questionnaire des trois transformateurs liés), une marge bénéficiaire raisonnable ainsi que d’autres coûts. La Commission précise que, si cette vente concernait un petit rouleau, elle déduisait les coûts de transformation déclarés et vérifiés. Elle soutient que, une fois ces prix à l’exportation établis, elle les a pondérés selon la part respective des exportations vers l’Union qu’ils représentaient, c’est-à-dire entre 15 et 25 % pour les ventes à des clients indépendants ou entre 75 et 85 % pour les ventes aux transformateurs liés pour revente sous forme de petits rouleaux à des entreprises indépendantes. Enfin, elle indique qu’elle avait conscience que certains types de produits revendus par Schades en tant que petits rouleaux provenaient de producteurs de l’Union. Toutefois, deux types de produits n’auraient pas été inclus dans la détermination des ventes à l’exportation dans la mesure où Schades ne les auraient pas repris dans la liste des ventes de rouleaux jumbo transformés. Pour deux autres types de produits, il n’aurait pas été possible de déterminer les petits rouleaux qui auraient été produits à partir de rouleaux jumbo non coréens. La Commission souligne avoir inclus dans le calcul du dumping la quantité totale identifiée comme étant le produit acheté auprès des producteurs à l’origine de la plainte. Elle fait toutefois observer qu’elle a procédé à des ajustements en faveur de la requérante pour tenir compte de cette situation.

73      La Commission ajoute que, s’agissant des volumes de produit considéré vendus par Schades Nordic, elle ne disposait d’aucune information à cet égard, dans la mesure où la requérante avait demandé à ce que cette société soit exemptée de l’obligation de remplir l’annexe I du questionnaire antidumping. S’agissant du calcul des frais VGA, elle reconnaît une erreur commise dans le mémoire en défense et précise que ce calcul reposait uniquement sur les données de Schades.

74      L’article 2, paragraphe 11, du règlement de base prévoit que l’existence de marges de dumping au cours de la période d’enquête est normalement établie sur la base d’une comparaison d’une valeur normale moyenne pondérée avec la moyenne pondérée des prix de toutes les exportations vers l’Union ou sur la base d’une comparaison des valeurs normales individuelles et des prix à l’exportation individuels vers l’Union, transaction par transaction. Toutefois, une valeur normale établie sur une moyenne pondérée peut être comparée aux prix de toutes les exportations individuelles vers l’Union si la configuration des prix à l’exportation diffère sensiblement entre les différents acquéreurs, régions ou périodes et si les méthodes spécifiées dans la première phrase dudit paragraphe ne permettraient pas de refléter l’ampleur réelle du dumping pratiqué.

75      En ce qui concerne, tout d’abord, le libellé de l’article 2, paragraphe 11, du règlement de base, il convient de relever que cette disposition prévoit deux méthodes de comparaison de la valeur normale et du prix à l’exportation : une méthode dite « symétrique », basée soit sur la comparaison d’une valeur normale moyenne pondérée avec la moyenne pondérée des prix de toutes les exportations vers l’Union, soit sur la comparaison transaction par transaction, et une méthode dite « asymétrique », basée sur la comparaison d’une valeur normale moyenne pondérée avec les prix de toutes les exportations individuelles vers l’Union. Ensuite, s’agissant de l’objectif poursuivi par ladite disposition, il découle de cette dernière que les méthodes tant symétrique qu’asymétrique de calcul de la marge de dumping doivent permettre de refléter l’ampleur réelle du dumping pratiqué (arrêt du 5 avril 2017, Changshu City Standard Parts Factory et Ningbo Jinding Fastener/Conseil, C‑376/15 P et C‑377/15 P, EU:C:2017:269, points 53 et 54).

76      Par ailleurs, aux termes de l’article 2, paragraphe 12, du règlement de base, la marge de dumping est le montant par lequel la valeur normale dépasse le prix à l’exportation.

77      En outre, il y a lieu de rappeler que, dans le domaine de la politique commerciale commune, et tout particulièrement en matière de mesures de défense commerciale, les institutions de l’Union disposent d’un large pouvoir d’appréciation en raison de la complexité des situations économiques, politiques et juridiques qu’elles doivent examiner. L’application de l’article 2, paragraphe 11, du règlement de base supposant l’appréciation de situations économiques complexes, le contrôle juridictionnel d’une telle appréciation doit être limité à la vérification du respect des règles de procédure, de l’exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, de l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou de l’absence de détournement de pouvoir (voir arrêt du 5 avril 2017, Changshu City Standard Parts Factory et Ningbo Jinding Fastener/Conseil, C‑376/15 P et C‑377/15 P, EU:C:2017:269, point 47 et jurisprudence citée).

78      Ce contrôle juridictionnel limité n’implique cependant pas que le juge de l’Union s’abstienne de contrôler l’interprétation, par les institutions, de données de nature économique. En particulier, il appartient au Tribunal non seulement de vérifier l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également de contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (arrêt du 29 janvier 2014, Hubei Xinyegang Steel/Conseil, T‑528/09, EU:T:2014:35, point 53).

79      En l’espèce, la Commission a utilisé la méthode de comparaison symétrique entre la valeur normale moyenne pondérée et la moyenne pondérée des prix de toutes les exportations vers l’Union.

80      La Commission a par ailleurs tenu compte, dans son calcul de la marge de dumping, de la pondération existante entre, d’une part, les ventes à des clients indépendants (entre 15 et 25 %) et, d’autre part, les ventes aux transformateurs liés pour revente sous forme de petits rouleaux à des entreprises indépendantes (entre 75 et 85 %).

81      Sur cette base, la Commission a déterminé l’existence d’une marge de dumping, exprimée en pourcentage de la valeur CAF (coût, assurance, fret) des transactions à l’exportation de la requérante, de 10,3 %. Elle a par ailleurs décidé, à la demande de la requérante, d’appliquer un droit antidumping définitif fixe de 104,46 euros par tonne, net, ce dernier correspondant à la marge de dumping exprimée par tonne de produit exporté par la requérante.

82      La requérante soulève, en substance, deux griefs au regard des calculs effectués par la Commission.

83      Par un premier grief, la requérante conteste la pondération retenue par la Commission s’agissant des ventes aux transformateurs liés pour revente sous forme de petits rouleaux à des entreprises indépendantes (entre 75 et 85 %).

84      Ainsi qu’il résulte des éléments versés aux débats, et en particulier du tableau de calcul de la marge de dumping de la requérante, la pondération retenue repose sur une comparaison par rapport aux ventes totales du produit considéré vers l’Union entre, d’une part, les ventes directes et indirectes à des clients indépendants et, d’autre part, les ventes aux transformateurs liés pour transformation en petits rouleaux. La pondération retenue a eu une incidence sur le calcul du dumping pratiqué par la requérante dans la mesure où le dumping pratiqué pour les ventes directes et indirectes du produit considéré était sensiblement plus faible que le dumping pratiqué pour les ventes aux transformateurs liés pour transformation en petits rouleaux.

85      Or, ainsi qu’il résulte également des éléments versés aux débats, et en particulier du tableau de calcul de la marge de dumping de la requérante, la Commission a inclus dans les ventes indirectes à des clients indépendants les reventes du produit considéré par Schades. Toutefois, sans que cela soit contesté par la Commission et comme il découle des éléments produits durant la procédure administrative, au moins un autre transformateur lié, à savoir Schades Nordic, a revendu un certain volume du produit considéré acheté à la requérante. La requérante a précisé cet état de fait, dans le cadre de ses observations du 27 février 2017 sur le document d’information finale, en indiquant, en annexe, les volumes concernés. Malgré ces précisions, toutes les ventes de la requérante à ce transformateur lié, comme celles aux deux autres transformateurs liés en dehors de Schades, à savoir Heipa et R+S, ont été considérées comme ayant été faites pour transformation en petits rouleaux, comme le soutient la requérante dans ses écritures et comme l’a confirmé la Commission lors de l’audience.

86      Certes, comme le relève la Commission, Schades Nordic n’a pas répondu au questionnaire antidumping. Toutefois, ainsi qu’il vient d’être indiqué, il résulte des éléments versés aux débats que le chiffre des reventes du produit considéré par Schades Nordic, avancé par la requérante, avait été produit durant la procédure administrative. Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que la Commission a décidé d’utiliser les données de Schades pour calculer la marge de dumping sur les ventes faites par la requérante aux trois autres transformateurs liés. Dès lors, compte tenu du fait que la Commission savait qu’une partie des ventes du produit considéré à Schades avait été revendue sans transformation à des clients indépendants, elle aurait dû refléter cette situation au niveau des ventes du produit considéré aux autres transformateurs liés. En omettant de tenir compte de cette circonstance, la Commission a attribué une trop grande pondération aux ventes aux transformateurs liés pour transformation en petits rouleaux en augmentant, de ce fait, le dumping réel pratiqué par la requérante.

87      Les calculs effectués par la Commission ne reflétant pas l’ampleur réelle du dumping pratiqué par la requérante, il y a lieu de constater une violation de l’article 2, paragraphe 11, du règlement de base.

88      Par un second grief, la requérante soutient, en substance, que la Commission a commis une erreur en prenant en compte, pour Schades, un volume de ventes de petits rouleaux plus important que le volume des rouleaux jumbo achetés à la requérante. La Commission aurait ainsi inclus, dans le calcul de la marge de dumping de Schades, un certain volume de rouleaux jumbo achetés à des producteurs de l’Union.

89      À cet égard, il est constant que la Commission a inclus, dans le calcul de la marge de dumping de Schades, l’intégralité des ventes de petits rouleaux de cette société auprès d’acheteurs indépendants dans l’Union, en incluant ceux fabriqués à partir d’un certain volume de rouleaux jumbo achetés auprès de producteurs de l’Union.

90      Toutefois, comme le reconnaît la requérante dans ses écritures, il n’a pas été possible de faire correspondre les importations du produit considéré avec les ventes de petits rouleaux. Dans ces conditions, et compte tenu de l’obligation qui pèse sur la Commission de prendre en compte l’ensemble des transactions à l’exportation vers l’Union lors du calcul de la marge de dumping (voir point 67 ci-dessus), il ne saurait lui être reproché d’avoir procédé à une construction du prix à l’exportation qui tienne compte de l’ensemble des ventes du produit transformé dès lors que, par ailleurs, un ajustement était réalisé pour tenir compte de cette situation. Ainsi, en l’espèce, et comme le souligne la Commission, les ajustements totaux des petits rouleaux lors du calcul du prix à l’exportation ont été substantiellement réduits pour tenir compte du fait qu’un certain volume de ces petits rouleaux avaient été produits à partir de rouleaux jumbo européens. La requérante n’a contesté ni les chiffres avancés par la Commission dans ses écritures ni le fait que ces ajustements étaient susceptibles, en soi et sous réserve des arguments spécifiques présentés dans le cadre du troisième moyen portant sur le montant des ajustements opérés, de palier la prise en compte des achats réalisés auprès des producteurs de l’Union. Dès lors, aucun élément, en particulier avancé par la requérante, ne permet de considérer que la méthode employée par la Commission et les ajustements opérés pour tenir compte de la situation particulière du cas d’espèce seraient contraires à l’article 2, paragraphe 11, du règlement de base.

91      Il convient donc de rejeter le second grief de la seconde branche du premier moyen comme étant non fondé.

92      Au vu de ce qui précède, et pour les raisons exposées aux points 83 à 87 ci-dessus, il y a lieu d’accueillir le premier grief de la seconde branche du premier moyen.

93      Dans la mesure où l’illégalité constatée ne porte que sur une partie du calcul du dumping et où la requérante avance d’autres moyens à cet égard ainsi qu’à l’encontre de la détermination du préjudice, il convient de poursuivre l’analyse des autres moyens avancés au soutien du recours.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 9, paragraphe 3, de l’accord antidumping et de l’article 9, paragraphe 4, second alinéa, du règlement de base ainsi que du principe de bonne administration

94      Le deuxième moyen repose sur deux branches.

95      Dans une première branche, la requérante soutient que le montant du droit antidumping excède la marge de dumping constatée, en violation de l’article 9, paragraphe 3, de l’accord antidumping et de l’article 9, paragraphe 4, second alinéa, du règlement de base.

96      Dans une seconde branche, la requérante invoque une violation du principe de bonne administration, dans la mesure où la Commission a calculé sa marge de dumping ad valorem de manière erronée et illégale en utilisant une valeur CAF construite plutôt que la valeur CAF réelle.

–       Sur la première branche du deuxième moyen, tirée d’une violation de l’article 9, paragraphe 3, de l’accord antidumping et de l’article 9, paragraphe 4, second alinéa, du règlement de base

97      La requérante soutient que le droit antidumping définitif de 104,46 euros par tonne, net, imposé par la Commission reflète un niveau de dumping supérieur à celui qui a été constaté pendant l’enquête. En particulier, pour les raisons exposées dans le cadre de la seconde branche du premier moyen, la pondération entre les marges de dumping pour le produit considéré et celles pour les petits rouleaux serait illégale.

98      La requérante ajoute que, contrairement à ce que soutient la Commission, elle est recevable à contester une mesure qui affecte ses intérêts juridiques. Par ailleurs, les arguments développés dans le cadre de cette branche seraient clairs.

99      La Commission, soutenue par l’intervenante, indique, en premier lieu, que la première branche du deuxième moyen est irrecevable dans la mesure où la requérante ne pourrait pas contester une mesure qu’elle a elle-même sollicitée. Il conviendrait d’opérer une distinction entre un règlement qui institue des mesures antidumping et les mesures elles-mêmes. En deuxième lieu, ladite branche serait irrecevable pour manque de clarté. En troisième lieu, les arguments de la requérante seraient non fondés. Selon la Commission, elle était tenue de pondérer les importations directes dans l’Union différemment des importations par l’intermédiaire de sociétés liées. La pondération justifiant le droit antidumping aurait été expliquée aux considérants 46 et 49 du règlement d’exécution attaqué.

100    Tout d’abord, il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par la Commission. En effet, d’une part, même si la requérante a sollicité l’établissement d’un droit antidumping fixe plutôt que d’un droit antidumping ad valorem, elle reste recevable à contester le niveau du droit fixe imposé par la Commission. D’autre part, il résulte clairement des écritures devant le Tribunal que la requérante met en cause, dans le cadre de la fixation du droit antidumping fixe, la pondération opérée par la Commission entre, d’une part, les ventes directes et indirectes à des clients indépendants et, d’autre part, les ventes aux transformateurs liés pour transformation en petits rouleaux en renvoyant, notamment, à la seconde branche du premier moyen. Les arguments de la requérante, à cet égard, sont présentés de façon cohérente et compréhensible et suffisamment clairs. Dès lors, la première branche du deuxième moyen est recevable.

101    Ensuite, il y a lieu de rappeler que l’article 9, paragraphe 4, second alinéa, du règlement de base prévoit, à l’instar de l’article 9, paragraphe 3, de l’accord antidumping, que le montant du droit antidumping n’excède pas la marge de dumping établie et devrait être inférieur à cette marge si ce droit moindre suffit à éliminer le préjudice causé à l’industrie de l’Union.

102    L’article 9, paragraphe 4, second alinéa, du règlement de base met en balance les intérêts des producteurs-exportateurs, des importateurs, de l’industrie et des consommateurs de l’Union, et il exprime, dans le domaine des mesures de défense commerciale de l’Union, le principe général de proportionnalité (voir arrêt du 28 février 2017, JingAo Solar e.a./Conseil, T‑157/14, non publié, EU:T:2017:127, point 198 et jurisprudence citée).

103    En l’espèce, la Commission a fixé le droit antidumping sous la forme d’un droit fixe, plutôt que d’un droit ad valorem, compte tenu de la difficulté de déterminer un prix CAF fiable pour les ventes (considérants 127 et 128 du règlement d’exécution attaqué).

104    Le droit antidumping définitif fixe, de 104,46 euros par tonne, net, a été déterminé en tenant compte de la pondération entre, d’une part, les ventes directes et indirectes à des clients indépendants et, d’autre part, les ventes aux transformateurs liés pour transformation en petits rouleaux, comme il résulte des éléments versés aux débats, en particulier du tableau de calcul de la marge de dumping de la requérante.

105    Or, pour les raisons exposées dans le cadre du premier grief de la seconde branche du premier moyen (voir points 83 à 87 ci-dessus), les calculs effectués par la Commission ne reflètent pas l’ampleur réelle du dumping pratiqué par la requérante. Cette erreur, liée à la pondération utilisée par la Commission, affecte donc également l’établissement du droit antidumping définitif fixe de 104,46 euros par tonne, net, qui excède ainsi le dumping réellement pratiqué par la requérante en violation de l’article 9, paragraphe 4, second alinéa, du règlement de base.

106    En conséquence, et sans qu’il y ait lieu de déterminer si l’erreur de la Commission constitue également, comme le soutient la requérante, une violation de l’article 9, paragraphe 3, de l’accord antidumping, il convient d’accueillir la première branche du deuxième moyen.

–       Sur la seconde branche du deuxième moyen, tirée d’une violation du principe de bonne administration

107    La requérante relève que la Commission a utilisé une valeur CAF construite des ventes à Schades, au lieu d’utiliser la valeur CAF réelle, comme dénominateur dans le calcul du taux de droit antidumping définitif de 10,3 % mentionné au considérant 129 du règlement d’exécution attaqué. Elle indique avoir attiré l’attention de la Commission sur ce qu’elle considérait être une erreur méthodologique. Lors des auditions des 2 et 22 mars 2017, le conseiller-auditeur aurait également considéré que l’approche de la Commission était erronée en relevant que l’utilisation d’une valeur CAF réelle avait été appliquée pendant des décennies. La requérante souligne en particulier que, dans le système prospectif caractérisant les règles antidumping de l’Union, il est essentiel que la valeur CAF réelle soit utilisée pour calculer le droit antidumping ad valorem. Par ailleurs, en présence d’une valeur CAF construite moins élevée qu’une valeur CAF réelle, comme cela serait le cas en l’espèce, le montant du droit antidumping à acquitter serait plus élevé. La requérante estime que, en ignorant les recommandations du conseiller-auditeur et en ne répondant pas à ses objections, la Commission a violé le principe de bonne administration et ses droits de la défense. Enfin, contrairement à ce que soutient la Commission dans ledit règlement d’exécution, elle considère qu’elle a un intérêt à contester la validité du calcul du taux de droit ad valorem de 10,3 %, à tout le moins pour clarifier la question de savoir si la nouvelle méthode appliquée par la Commission est légale ou pas dans la perspective de futures procédures antidumping. En outre, la Commission pourrait décider de remplacer le droit fixe par le droit ad valorem. La requérante ajoute que les prix CAF du produit considéré ont été vérifiés par la Commission lors des visites de vérification sur place et qu’aucune erreur ni déclaration inexacte n’a été constatée.

108    La Commission et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

109    À titre liminaire, il y a lieu de relever que, bien que l’intitulé de la seconde branche du deuxième moyen se limite à invoquer une violation du principe de bonne administration, la requérante avance également, dans ses écritures, une violation des droits de la défense.

110    S’agissant du principe de bonne administration, il convient de rappeler que, dans le cas où les institutions de l’Union disposent d’un large pouvoir d’appréciation, le respect des garanties conférées par l’ordre juridique de l’Union dans les procédures administratives revêt une importance d’autant plus fondamentale. Parmi ces garanties figure, notamment, l’obligation pour l’institution compétente d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce (arrêts du 13 juillet 2006, Shandong Reipu Biochemicals/Conseil, T‑413/03, EU:T:2006:211, point 63, et du 25 juin 2015, PT Musim Mas/Conseil, T‑26/12, non publié, EU:T:2015:437, point 112).

111    À cet égard, il convient de relever que la Commission a indiqué, au considérant 127 du règlement d’exécution attaqué, que « le groupe Hansol [avait] contesté le fait que la Commission ait construit le prix CAF utilisé comme dénominateur » pour les ventes par l’intermédiaire de parties liées et que, « [p]our remédier à cette distorsion, le groupe Hansol [avait] proposé [qu’elle] applique un droit antidumping sous la forme d’un montant spécifique par tonne au lieu d’un droit ad valorem ». La Commission a ajouté, au considérant 128 dudit règlement d’exécution, que « cet argument [avait] été dûment analysé » et que, « compte tenu des circonstances particulières de l’espèce en ce qui concerne la détermination d’un prix CAF fiable pour ces ventes, [elle était] parvenue à la conclusion qu’il serait plus approprié d’utiliser une forme de droit qui ne [nécessitait] pas l’établissement d’un prix CAF fiable ».

112    Il en résulte que la Commission, d’une part, a tenu compte des éléments avancés par la requérante durant la procédure administrative et, d’autre part, a décidé de choisir la forme du droit antidumping finalement imposé en l’espèce en suivant une demande de la requérante en ce sens et en motivant son choix. Compte tenu de ces éléments, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir manqué au principe de bonne administration et il convient de rejeter les arguments de la requérante à cet égard.

113    S’agissant des droits de la défense, il convient de rappeler que, en matière antidumping, les entreprises intéressées doivent avoir été mises en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire connaître utilement leur point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et des circonstances allégués et sur les éléments de preuve retenus par la Commission à l’appui de son allégation de l’existence d’une pratique de dumping et du préjudice qui en résulterait (arrêt du 16 février 2012, Conseil et Commission/Interpipe Niko Tube et Interpipe NTRP, C‑191/09 P et C‑200/09 P, EU:C:2012:78, point 76).

114    En l’espèce, il suffit de relever que la requérante a pu faire utilement connaître son point de vue quant au fait que la Commission a construit le prix CAF utilisé comme dénominateur pour les ventes par l’intermédiaire de parties liées, ainsi qu’il résulte notamment du considérant 127 du règlement d’exécution attaqué. Par ailleurs, ainsi qu’il résulte du considérant 128 dudit règlement d’exécution, la Commission a pris en compte les arguments développés par la requérante en choisissant la forme du droit antidumping finalement imposé. Dès lors, aucune violation des droits de la défense de la requérante ne saurait être retenue en l’espèce et il convient de rejeter les arguments de la requérante à cet égard.

115    En outre, et en tout état de cause, il y a lieu de relever que la seconde branche du deuxième moyen repose, en substance, sur la prémisse que la Commission a commis une erreur dans la détermination de la valeur CAF des ventes à Schades et que cette erreur a une incidence sur le montant du droit antidumping à acquitter. En particulier, la requérante indique dans la requête que la détermination de la valeur CAF est importante, « parce que les droits antidumping ad valorem sont perçus sur la base du prix CAF des produits importés tel qu’il est déclaré aux autorités douanières de l’Union » et que, « si le taux de droit ad valorem est calculé à partir d’un prix CAF construit moins élevé que le prix CAF réel, comme c’est le cas dans la présente affaire, le montant du droit antidumping à payer à l’importation sera plus élevé que le montant du dumping constaté pendant la période d’examen ».

116    Or, il convient de souligner que, si la valeur CAF construite des ventes à Schades a été utilisée dans le cadre du calcul de la marge de dumping ad valorem, elle n’a pas été utilisée dans le cadre du calcul du droit antidumping définitif fixe de 104,46 euros par tonne, net, qui est le seul droit antidumping imposé au titre de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement d’exécution attaqué. En effet, ainsi qu’il résulte du tableau de calcul de la marge de dumping de la requérante, le droit antidumping définitif fixe a été calculé en divisant le montant global de dumping (après application du taux de change) par les quantités importées et en appliquant une pondération entre, d’une part, les ventes directes et indirectes à des clients indépendants et, d’autre part, les ventes aux transformateurs liés pour transformation en petits rouleaux.

117    Dès lors, une éventuelle erreur quant à l’utilisation de la valeur CAF construite n’aurait aucune incidence sur la légalité du droit antidumping définitif fixe de 104,46 euros par tonne, net, imposé en l’espèce au titre de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement d’exécution attaqué. La seconde branche du deuxième moyen ne saurait donc conduire à l’annulation dudit règlement d’exécution à cet égard. La requérante a d’ailleurs reconnu, dans sa réponse aux mesures d’organisation de la procédure, que l’illégalité qu’elle avance dans le cadre de la seconde branche du deuxième moyen « n’a eu aucune incidence » sur le calcul du droit antidumping définitif fixe de 104,46 euros par tonne, net.

118    Par ailleurs, contrairement à ce qu’indique la requérante dans ses écritures, elle n’est pas sans voie de recours si la Commission décidait de modifier la forme des droits antidumping et d’imposer ceux-ci sur une base ad valorem. En effet, ce changement et les effets juridiques qu’il impliquerait prendrait nécessairement la forme d’une modification des droits existants et l’adoption d’un nouveau règlement d’exécution. Dans ce contexte, la requérante pourrait contester la modification intervenue et les nouveaux effets juridiques en découlant devant le Tribunal.

119    En conséquence, il y a lieu de rejeter la seconde branche du deuxième moyen.

120    Au vu de ce qui précède, et pour les raisons exposées aux points 100 à 106 ci-dessus, il y a lieu d’accueillir la première branche du deuxième moyen.

121    Dans la mesure où l’illégalité constatée ne porte que sur une partie du calcul du dumping et où la requérante avance d’autres moyens à cet égard ainsi qu’à l’encontre de la détermination du préjudice, il convient de poursuivre l’analyse des autres moyens avancés au soutien du recours.

 Sur le troisième moyen, tiré de l’application erronée de l’article 2, paragraphes 9 et 10, du règlement de base, dans la mesure où la Commission a opéré des ajustements excessifs pour les ventes de petits rouleaux obtenus à partir de rouleaux jumbo acquis par Schades auprès de producteurs européens

122    La requérante relève que, dans le cadre de la construction des prix à l’exportation, sur la base des ventes de petits rouleaux de Schades, la Commission a déduit notamment les frais de transport et de manutention pour les rouleaux jumbo de Corée du Sud vers l’Union. Or, durant la période d’enquête, Schades aurait acheté un volume considérable de rouleaux jumbo à des producteurs de l’Union. Il n’aurait toutefois pas été possible de retrouver l’origine des rouleaux jumbo utilisés par Schades pour fabriquer des petits rouleaux. La requérante indique avoir signalé à la Commission qu’il convenait de ne pas traiter de la même manière les rouleaux jumbo provenant de producteurs de l’Union. La Commission aurait tenu compte de cette situation « en déduisant, pour un volume représentatif de ventes de petits rouleaux, des montants jusqu’au niveau CAF uniquement » (considérant 42 du règlement d’exécution attaqué). Ce faisant, la Commission aurait commis deux erreurs.

123    La première erreur proviendrait du fait que la Commission aurait appliqué la correction en cause à un type de produit, qui constituait un « volume représentatif de ventes de petits rouleaux » fabriqués à partir de rouleaux jumbo européens, sur la base des dépenses encourues pour tous les types de produits. Or, la Commission aurait disposé d’informations précises pour ce qui concerne le type de produit en question. La Commission aurait ainsi violé l’article 2, paragraphes 9 et 10, du règlement de base en ne se fondant pas uniquement sur les frais engagés pour ce type de produit, mais en utilisant une moyenne de ventes de tous les types de produits. La requérante ajoute que, tout en affirmant qu’il était impossible de mettre en relation les achats de rouleaux jumbo par Schades et ses ventes de petits rouleaux, la Commission a basé son calcul de la marge de dumping sur la présomption d’une mise en relation de ces produits, au moins par type de produit.

124    La seconde erreur proviendrait du fait que la Commission aurait considéré à tort que la différence entre les petits rouleaux vendus par Schades et les rouleaux jumbo achetés par Schades aux producteurs de l’Union correspondrait à des rouleaux jumbo achetés en Corée du Sud. Cette supposition serait toutefois manifestement erronée au vu des chiffres réels d’achats de rouleaux jumbo coréens par Schades. La requérante ajoute que la Commission, dans le mémoire en défense, avance un chiffre relatif aux tonnes achetées auprès de producteurs de l’Union qui ne correspond pas à celui utilisé dans son calcul de marge de dumping.

125    La Commission et l’intervenante soutiennent que les arguments de la requérante sont en partie non fondés et en partie irrecevables.

126    L’article 2, paragraphe 9, du règlement de base dispose notamment que, dans le cas de la construction du prix à l’exportation, des ajustements sont opérés pour tenir compte de tous les frais, y compris les droits et les taxes, intervenus entre l’importation et la revente et d’une marge bénéficiaire, afin d’établir un prix à l’exportation fiable au niveau frontière de l’Union. Les coûts au titre desquels un ajustement est opéré incluent ceux normalement supportés par un importateur, mais payés par toute partie ayant ses activités à l’intérieur ou à l’extérieur de l’Union et paraissant être associée à ou avoir conclu un arrangement de compensation avec l’importateur ou l’exportateur.

127    L’article 2, paragraphe 10, du règlement de base prévoit notamment que, pour assurer une comparaison équitable entre la valeur normale et le prix à l’exportation, il sera tenu compte dans chaque cas, sous forme d’ajustements, des différences constatées dans les facteurs dont il est revendiqué et démontré qu’ils affectent les prix et, partant, leur comparabilité. S’agissant des coûts de transport et de manutention, spécifiquement visés par le troisième moyen, l’article 2, paragraphe 10, sous e), dudit règlement prévoit qu’un ajustement est opéré au titre de différences dans ces coûts qui ont un rapport direct avec le produit et qui ont été exposés pour acheminer le produit en question depuis les locaux de l’exportateur jusqu’au premier acheteur indépendant, lorsque ces coûts sont inclus dans les prix pratiqués.

128    Il y a lieu de rappeler qu’il appartient à la Commission d’opérer d’office les ajustements prévus à l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base, lorsque les conditions d’applicabilité de cet article sont remplies. En revanche, il incombe à la requérante d’apporter des éléments de preuve au soutien de sa contestation du niveau des ajustements ainsi déterminés (arrêt du 4 mai 2017, RFA International/Commission, C‑239/15 P, non publié, EU:C:2017:337, point 38).

129    Par ailleurs, les ajustements effectués au titre de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base se distinguent, tant par leur objectif que par leurs conditions d’application, des ajustements opérés dans le cadre de la reconstitution du prix à l’exportation. Alors que ces derniers ajustements visent à déterminer le prix à l’exportation qui correspondrait à des conditions commerciales normales, les ajustements effectués au titre de cette disposition tendent à redresser le prix à l’exportation ou la valeur normale déjà calculés en application des règles fixées à l’article 2, paragraphes 3 à 9, dudit règlement. Les ajustements prévus dans le cadre de l’article 2, paragraphe 10, de ce règlement sont opérés en fonction d’éléments objectifs, qui correspondent aux particularités de chaque marché (d’origine et d’exportation), se répercutent de manière inégale sur les conditions de vente et affectent en conséquence la comparabilité des prix (voir arrêt du 4 mai 2017, RFA International/Commission, C‑239/15 P, non publié, EU:C:2017:337, point 43 et jurisprudence citée).

130    À titre liminaire, il y a lieu de relever que l’ajustement opéré par la Commission, dont le niveau est contesté par la requérante, est intervenu dans le cadre de la construction du prix à l’exportation, ainsi que le montre le considérant 42 du règlement d’exécution attaqué, dans le cadre duquel l’ajustement en cause est évoqué et qui fait partie du point 2.2 des considérants dudit règlement d’exécution, intitulé « Prix à l’exportation ».

131    Toutefois, ainsi que l’a confirmé la Commission en réponse aux mesures d’organisation de la procédure, l’ajustement en cause est également intervenu dans le calcul de la marge de dumping. Il relève donc, également, de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base.

132    S’agissant de la première erreur alléguée dans le cadre du troisième moyen, il y a lieu de rappeler que la Commission a utilisé les données de Schades aux fins de calculer la marge de dumping des ventes du produit considéré faites aux transformateurs liés, en ce comprises les ventes faites à Schades Nordic, à Heipa et à R+S qui n’ont pas rempli l’annexe I du questionnaire antidumping. Plus précisément, l’utilisation desdites données portait sur la construction du prix à l’exportation des ventes du produit considéré. Dans le cadre de ce calcul, la Commission a notamment tenu compte des frais de transport et de manutention pour le transport des rouleaux jumbo de Corée du Sud vers l’Union. Par ailleurs, pour ce qui est du type de produit concerné par le troisième moyen, les petits rouleaux vendus par Schades ont été produits en partie à partir de rouleaux jumbo européens. Pour tenir compte de cette situation et ne pas déduire des frais de transport de Corée du Sud vers l’Union pour des rouleaux jumbo achetés dans l’Union, la Commission a appliqué un ajustement plus faible, c’est-à-dire un ajustement permettant d’obtenir un prix CAF à la frontière de l’Union.

133    C’est le montant de l’ajustement ayant trait aux frais de transport et de manutention pour le transport des rouleaux jumbo de Corée du Sud vers l’Union, dans le contexte de la prise en compte des petits rouleaux fabriqués par Schades, qui fait l’objet du troisième moyen. La requérante soutient essentiellement que la Commission a violé l’article 2, paragraphes 9 et 10, du règlement de base, dans la mesure où celle-ci n’a pas fondé l’ajustement en cause sur les frais « engagés » ou « réellement exposés » pour le numéro de contrôle de produit (ci-après le « NCP ») concerné, mais sur une moyenne pondérée de l’ensemble des NCP.

134    Or, ainsi qu’il résulte du règlement d’exécution attaqué, notamment son considérant 40, et ainsi que l’a confirmé la requérante dans ses écritures, il n’a pas été possible de mettre en relation, durant la procédure administrative, les petits rouleaux fabriqués par Schades et les rouleaux jumbo exportés par la requérante, transaction par transaction. En d’autres termes, pour chaque petit rouleau vendu par Schades, la requérante a été en défaut d’identifier précisément le rouleau jumbo ayant servi à sa fabrication. Schades n’a donc pas été en mesure d’identifier pour chaque transaction, ainsi que la Commission l’a précisé, les frais de transport et de manutention pour le transport de la Corée du Sud vers l’Union des rouleaux jumbo ayant servi à fabriquer des petits rouleaux.

135    Dès lors, la requérante ne saurait valablement reprocher à la Commission de ne pas avoir fondé l’ajustement en cause sur les frais « engagés » ou « réellement exposés » pour le NCP concerné.

136    En outre, la requérante n’a apporté aucun élément circonstancié qui permettrait de remettre en cause la constatation reprise par la Commission au considérant 43 du règlement d’exécution attaqué, selon laquelle les volumes d’achats du produit concerné ne constituaient pas une base fiable pour l’ajustement en cause, dès lors que « la plupart des volumes de ce type de produit ont été achetés par l’intermédiaire d’un autre canal d’achat lié qui n’a pas été utilisé pour ce calcul ».

137    Il convient donc de rejeter les arguments avancés par la requérante dans le cadre de la première erreur alléguée.

138    S’agissant de la seconde erreur alléguée dans le cadre du troisième moyen, il y a lieu de rappeler que la requête doit, notamment, contenir l’objet du litige et un exposé sommaire des moyens invoqués. Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autres informations. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (voir la jurisprudence citée au point 37 ci-dessus).

139    En l’espèce, il y a lieu de souligner que le troisième moyen de la requête porte spécifiquement, ainsi que son intitulé l’indique, sur les « ajustements excessifs pour les ventes de petits rouleaux obtenus à partir de rouleaux jumbo acquis par Schades auprès de producteurs européens ».

140    Or, le grief tiré de la seconde erreur alléguée ne porte pas sur les petits rouleaux obtenus à partir de rouleaux jumbo acquis auprès de producteurs européens, mais sur la quantité de rouleaux jumbo originaires de Corée du Sud. En outre, le grief tiré de la seconde erreur alléguée ne porte pas sur un ajustement qui aurait été réalisé par la Commission, mais sur une erreur alléguée de quantification des quantités achetées en Corée du Sud. Enfin, ainsi que le relèvent justement la Commission et l’intervenante, aucune précision n’est donnée quant au rapport qui existerait entre la seconde erreur alléguée et la violation de l’article 2, paragraphe 9, ou de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base. Il en va de même lorsque la requérante évoque une violation du principe de bonne administration au point 95 de la requête, sans préciser dans quelle mesure l’erreur alléguée serait constitutive d’une telle violation.

141    Il en résulte que le grief tiré de la seconde erreur alléguée dans le cadre du troisième moyen doit être considéré comme étant irrecevable.

142    En tout état de cause, il convient de relever que les chiffres avancés par la requérante dans ses écritures s’agissant des volumes de rouleaux jumbo achetés par Schades en Corée du Sud, pour le type de produit concerné, ne font pas l’objet de renvois précis à des éléments qui auraient été versés au dossier pendant la procédure administrative. Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que les arguments avancés par la requérante à cet égard ne sont pas suffisamment étayés. En outre, aucun élément n’a été apporté par la requérante qui permettrait de mesurer l’incidence de l’erreur alléguée sur les calculs effectués par la Commission et, donc, sur les droits antidumping imposés.

143    Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le troisième moyen comme étant en partie non fondé et en partie irrecevable.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 1, du règlement de base, dans la mesure où la Commission a construit de manière erronée la valeur normale prévue à l’article 2, paragraphe 3, dudit règlement

144    La requérante indique que la Commission a construit, pour Artone, la valeur normale de deux types de produits qui n’avaient pas été vendus par cette société sur le marché intérieur de Corée du Sud. Elle fait observer que ces deux types de produits auraient, en revanche, été vendus par elle. Elle soutient que la Commission aurait dû utiliser ses propres ventes pour calculer la valeur normale d’Artone. L’utilisation des prix sur le marché intérieur concerné serait la méthode prioritaire de détermination de la valeur normale. La Commission aurait d’ailleurs employé cette méthode dans une autre affaire comparable. La requérante fait valoir que, pour rejeter l’emploi de cette méthode, la Commission a invoqué la structure différente des coûts d’Artone et de ses coûts ainsi que la faible représentativité d’un des deux types de produits vendus par elle. Or, ces motifs ne seraient pas valables aux fins d’écarter l’utilisation des prix intérieurs pour calculer la valeur normale. En outre, la requérante estime que la construction de la valeur normale pour elle, s’agissant du type de produit en question, aurait été plus proche de la réalité que celle calculée pour Artone. Un groupe spécial de l’OMC aurait également confirmé qu’il était nécessaire de se fonder avant tout sur des données réelles pour calculer la valeur normale.

145    La requérante ajoute que la présentation de la Commission dans le mémoire en défense est inexacte pour plusieurs raisons. Tout d’abord, un des deux types de produits identifiés par la Commission serait incorrect. Ensuite, contrairement aux allégations de la Commission, Artone n’aurait vendu aucun des deux types de produits identifiés dans le quatrième moyen. Les références aux degrés de représentativité des ventes intérieures seraient donc erronées. Par ailleurs, la requérante estime que ses canaux de ventes ne présentaient aucune caractéristique particulière. Pour ce qui est de l’incertitude quant à la structure des coûts, elle affirme qu’il s’agit d’un élément nouveau qui n’a pas été porté à son attention durant la procédure administrative.

146    La Commission, soutenue par l’intervenante, indique que, pour deux types de produits, les ventes sur le marché intérieur de Corée du Sud n’étaient pas représentatives, car elles représentaient moins de 5 % du volume total des ventes à l’exportation vers l’Union. Elle indique avoir donc construit la valeur normale pour ces deux types de produits. En outre, la structure des coûts d’Artone aurait différé sensiblement de celle de la requérante. La Commission fait également valoir, pour ce qui est de l’argumentation de la requérante selon laquelle elle a rejeté ses arguments pour des motifs non valables, qu’il ne s’agit que d’une répétition des arguments présentés durant la procédure administrative. Le fait que la requérante soit en désaccord avec le choix de la méthode finalement appliquée ne démontrerait pas que le fondement des conclusions figurant dans le règlement d’exécution attaqué est erroné. La Commission soutient avoir tenu compte des caractéristiques particulières des canaux de vente de la requérante et des incertitudes quant à sa structure des coûts, lors de la construction de la valeur normale pour certains types de produits. Par ailleurs, s’agissant d’Artone, elle précise avoir tenu compte des données de cette entreprise. Aucune erreur ne pourrait dès lors lui être reprochée.

147    La Commission ajoute que, s’agissant des types de produits visés dans le mémoire en défense, ils concernaient la requérante. Pour ce qui est d’Artone, aucune vente sur le marché intérieur de Corée du Sud n’aurait eu lieu pour les deux types de produits visés par la requérante et, dès lors, la valeur normale aurait été construite. Le rapport du groupe spécial de l’OMC invoqué par la requérante ne porterait pas sur la disposition invoquée en l’espèce. En tout état de cause, la valeur normale d’Artone aurait été calculée sur la base des frais VGA de ventes réalisées au cours d’opérations commerciales normales, conformément aux conclusions dudit groupe spécial. Enfin, la Commission fait valoir que sa pratique décisionnelle, même si elle était applicable, ne saurait la lier pour l’avenir.

148    Il convient de rappeler que la détermination de la valeur normale d’un produit constitue l’une des étapes essentielles devant permettre d’établir l’existence d’un dumping éventuel (arrêt du 22 mars 2012, GLS, C‑338/10, EU:C:2012:158, point 19). L’article 2, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement de base prévoit, à cet égard, que « [l]a valeur normale est normalement basée sur les prix payés ou à payer, au cours d’opérations commerciales normales, par des acheteurs indépendants dans le pays exportateur ». Il ressort tant du libellé que de l’économie de cette disposition que c’est le prix réellement payé ou à payer au cours d’opérations commerciales normales qu’il faut prendre en considération en principe en priorité pour établir la valeur normale (arrêt du 1er octobre 2014, Conseil/Alumina, C‑393/13 P, EU:C:2014:2245, point 20).

149    Par ailleurs, l’article 2, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement de base dispose que, « lorsque l’exportateur […] ne produit pas ou ne vend pas le produit similaire, la valeur normale est établie sur la base des prix d’autres vendeurs ou producteurs ». Cette disposition permet également, par l’utilisation des prix d’autres vendeurs ou producteurs, une détermination de la valeur normale sur la base des prix payés ou à payer, au cours d’opérations commerciales normales, par des acheteurs indépendants dans le pays exportateur.

150    Il ne peut être dérogé au principe de l’utilisation des prix payés ou à payer, au cours d’opérations commerciales normales, par des acheteurs indépendants dans le pays exportateur, que lorsqu’aucune vente du produit similaire n’a lieu au cours d’opérations commerciales normales ou lorsque ces ventes sont insuffisantes ou lorsque, du fait de la situation particulière du marché, de telles ventes ne permettent pas une comparaison valable (article 2, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de base). Le premier cas, à savoir l’absence de vente du produit similaire au cours d’opérations commerciales normales, vise notamment l’hypothèse dans laquelle les ventes sont réalisées à des prix inférieurs aux coûts de production unitaires, fixes et variables, majorés des frais de vente, des dépenses administratives et des autres frais généraux (article 2, paragraphe 4, dudit règlement). Le deuxième cas, à savoir l’insuffisance des ventes, vise l’hypothèse dans laquelle les ventes du produit similaire dans le pays exportateur représentent moins de 5 % du volume des ventes du produit considéré dans l’Union (article 2, paragraphe 2, de ce règlement). Le troisième cas, à savoir la situation particulière du marché, vise notamment des prix artificiellement bas, une activité de troc importante ou l’existence de régimes de transformation non commerciaux (article 2, paragraphe 3, second alinéa, du même règlement). Ces dérogations à la méthode de fixation de la valeur normale en fonction de prix réels ont un caractère exhaustif (arrêt du 1er octobre 2014, Conseil/Alumina, C‑393/13 P, EU:C:2014:2245, point 21).

151    Dans les cas visés à l’article 2, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de base, la valeur normale du produit similaire est calculée sur la base du coût de production dans le pays d’origine, majoré d’un montant raisonnable pour les frais de vente, les dépenses administratives et les autres frais généraux et d’une marge bénéficiaire raisonnable, ou sur la base des prix à l’exportation, pratiqués au cours d’opérations commerciales normales, vers un pays tiers approprié, à condition que ces prix soient représentatifs.

152    Il résulte de ce qui précède qu’il existe une différence entre la situation dans laquelle l’exportateur ne produit pas ou ne vend pas le produit similaire (article 2, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement de base) et celle dans laquelle aucune vente du produit similaire n’a lieu au cours d’opérations commerciales normales ou, lorsqu’il existe de telles ventes, elles sont insuffisantes ou ne permettent pas une comparaison valable compte tenu de la situation particulière du marché (article 2, paragraphe 3, premier alinéa, dudit règlement). Dans la première situation, la valeur normale est établie sur la base des prix d’autres vendeurs ou producteurs. Dans la seconde situation, la valeur normale est calculée sur la base du coût de production dans le pays d’origine ou des prix à l’exportation vers un pays tiers.

153    En l’espèce, ainsi qu’il résulte du considérant 20 du règlement d’exécution attaqué, la Commission a relevé que, s’agissant d’Artone, « les ventes intérieures étaient inexistantes ou non représentatives pour deux types de produits ». Il en résulte que, à tout le moins s’agissant d’un type de produit, les ventes intérieures étaient inexistantes.

154    Sur cette base, la Commission a calculé la valeur normale d’Artone, pour ces deux types de produits, à partir de ses coûts de production, « conformément à l’article 2, paragraphe 3, du règlement de base ».

155    En premier lieu, il convient de relever à tout le moins une certaine incertitude dans les explications données par la Commission devant le Tribunal. En effet, après avoir tout d’abord indiqué dans le mémoire en défense que, pour les deux types de produits visés au considérant 20 du règlement d’exécution attaqué, les ventes intérieures n’étaient pas représentatives, au sens de l’article 2, paragraphe 2, du règlement de base, la Commission a clairement précisé dans la duplique qu’il n’y avait eu « aucune vente sur le marché intérieur » de Corée du Sud pour ces deux types de produits, ce que soutient d’ailleurs la requérante dans ses écritures.

156    En second lieu, et malgré l’incertitude qui découle des écritures de la Commission, il résulte néanmoins du règlement d’exécution attaqué que les ventes intérieures d’Artone étaient inexistantes s’agissant à tout le moins d’un des deux types de produits visés par la requérante dans ses écritures. Par ailleurs, aucune précision n’a été apportée par la Commission qui permettrait de remettre en cause le fait, avancé par la requérante, qu’Artone n’avait pas vendu les deux types de produits sur son marché intérieur. Les seuls éléments chiffrés mis en avant par la Commission dans ses écritures concernaient la représentativité des types de produits vendus par la requérante sur son marché intérieur, et non par Artone. Par ailleurs, la Commission a confirmé dans ses réponses aux mesures d’organisation de la procédure que, pour un des deux types de produits concernés, les ventes intérieures de la requérante étaient représentatives, mais qu’elle avait néanmoins décidé, pour ce type de produit, de construire la valeur normale d’Artone sur la base de l’article 2, paragraphe 3, du règlement de base. En outre, ainsi qu’il résulte du considérant 36 du règlement d’exécution 2016/2005 et des explications contenues tant dans le document d’information reprenant les conclusions provisoires de la Commission (voir point 17 ci-dessus) que dans le document d’information finale (voir point 19 ci-dessus), la Commission a décidé de procéder à une construction de la valeur normale pour les types de produits qui n’étaient pas vendus sur le marché intérieur de Corée du Sud, en ce compris, donc, ceux d’Artone.

157    Or, ainsi qu’il résulte de l’article 2, paragraphe 1, du règlement de base, lorsque l’exportateur ne vend pas le produit similaire, la valeur normale « est établie sur la base des prix d’autres vendeurs ou producteurs », et non sur la base des coûts de production de la société concernée. Les circonstances avancées par la Commission selon lesquelles la « structure des coûts » ou les « prix de vente » étaient sensiblement différents entre la requérante et Artone (considérant 21 du règlement d’exécution attaqué) ne font pas partie des dérogations à la méthode de fixation de la valeur normale en fonction de prix réels qui ont, comme rappelé au point 150 ci-dessus, un caractère exhaustif. En outre, s’agissant du fait avancé au considérant 21 dudit règlement d’exécution que, pour l’un des deux types de produits concernés, vendus par la requérante, les quantités de ventes intérieures auraient été jugées non représentatives, aucun élément avancé par la Commission dans ses écritures ne permet de déterminer si cette circonstance concernait le type de produit, visé au considérant 20 de ce règlement d’exécution, qui n’aurait pas été vendu par Artone. En outre, et en tout état de cause, cette constatation est sans incidence sur la circonstance avancée par la requérante selon laquelle les deux types de produits en cause n’avaient pas été vendus par Artone sur son marché intérieur.

158    Au vu de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de considérer que la Commission a violé l’article 2, paragraphe 1, du règlement de base dans le cadre de la détermination de la valeur normale d’Artone.

159    Dès lors, il convient d’accueillir le quatrième moyen.

160    Dans la mesure où l’illégalité constatée ne porte que sur une partie du calcul du dumping et où la requérante avance un autre moyen à l’encontre de la détermination du préjudice, il convient d’analyser le cinquième moyen avancé au soutien du recours.

 Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’article 1er, paragraphe 1, et de l’article 3, paragraphes 1 à 3 et 5 à 8, du règlement de base, de la jurisprudence des juridictions de l’Union et des décisions de l’OMC, de la pratique décisionnelle antérieure de la Commission et des principes de la comparaison équitable et de l’égalité de traitement dans le calcul de la marge de préjudice

161    Le cinquième moyen repose sur trois branches. Dans une première branche, la requérante soutient que la Commission a violé l’article 1er, paragraphe 1, et l’article 3, paragraphes 2, 3 et 6, du règlement de base en incluant la revente des petits rouleaux dans le calcul de la marge de préjudice. Dans une deuxième branche, la requérante invoque une violation de l’article 3, paragraphes 1 à 3 et 5 à 8, de ce règlement, la jurisprudence des juridictions de l’Union et des décisions de l’OMC, la pratique décisionnelle antérieure de la Commission et les principes de la comparaison équitable et de l’égalité de traitement, dans la mesure où la Commission a appliqué par analogie l’article 2, paragraphe 9, dudit règlement pour le calcul de la marge de préjudice. Dans une troisième branche, la requérante considère que la Commission a violé l’article 3, paragraphes 2, 3 et 6, du même règlement en n’évaluant pas correctement l’incidence de la marge négative de sous-cotation constatée pour le produit considéré.

–       Sur la recevabilité du cinquième moyen

162    Il y a lieu de rappeler que, selon l’article 9, paragraphe 4, second alinéa, du règlement de base, tel qu’applicable au moment des faits, « [l]e montant du droit antidumping n’excède pas la marge de dumping établie et devrait être inférieur à cette marge, si ce droit moindre suffit à éliminer le préjudice causé à l’industrie de l’Union ».

163    En l’espèce, la marge de préjudice de 37 % était supérieure à la marge de dumping de 10,3 %. En conséquence, la Commission a imposé les droits antidumping sur les importations de la requérante sur la base de la marge de dumping, et non sur la base de la marge de préjudice.

164    À cet égard, il a déjà été retenu que la règle dite du « droit moindre » a pour conséquence qu’un producteur auquel ont été imposés des droits antidumping ne saurait contester ceux-ci au motif que l’enquête a conclu à une marge de préjudice surévaluée au cas où le taux des droits a été fixé au niveau de la marge de dumping, lorsque ce dernier est inférieur aussi bien à la marge de préjudice faussement retenue qu’à la marge de préjudice réelle (voir arrêt du 4 mars 2010, Foshan City Nanhai Golden Step Industrial/Conseil, T‑410/06, EU:T:2010:70, point 94 et jurisprudence citée).

165    En l’espèce, il y a lieu de relever que, certes, la requérante évoque dans l’intitulé du cinquième moyen et dans les arguments au soutien de celui-ci des erreurs dans le calcul de la marge de préjudice, sans indiquer précisément dans quelle mesure ladite marge aurait pu être inférieure à la marge de dumping.

166    Toutefois, il ressort également de l’intitulé du cinquième moyen et des arguments développés dans le cadre dudit moyen que la requérante met plus généralement en cause la détermination du préjudice et du lien de causalité.

167    Ainsi, dans la première branche du cinquième moyen, la requérante soutient notamment que les ventes de petits rouleaux ne pouvaient pas avoir causé de préjudice à l’industrie de l’Union. Dans la deuxième branche du cinquième moyen, elle indique notamment que la méthode employée par la Commission pour déterminer le prix à l’exportation n’a pas permis une évaluation correcte du préjudice réel et, en particulier, des effets sur les prix. Dans la troisième branche du cinquième moyen, elle met en cause l’évaluation de l’incidence de la sous-cotation des prix dans le cadre de l’analyse du préjudice et du lien de causalité.

168    Or, de telles erreurs alléguées concernent la détermination de l’existence d’un préjudice ainsi que d’un lien de causalité et, donc, les conditions essentielles prévues à l’article 3 du règlement de base pour pouvoir imposer un droit antidumping. Ces erreurs alléguées sont dès lors susceptibles de conduire à l’annulation du règlement d’exécution attaqué, sans qu’il soit besoin de s’interroger, par ailleurs, sur la question de savoir si la marge de préjudice aurait été inférieure à la marge de dumping.

169    Il y a donc lieu de considérer que le cinquième moyen est recevable, pour autant qu’il concerne l’analyse menée par la Commission quant à l’existence d’un préjudice et d’un lien de causalité.

–       Sur la première branche du cinquième moyen, tirée d’une violation de l’article 1er, paragraphe 1, et de l’article 3, paragraphes 2, 3 et 6, du règlement de base

170    La requérante, rappelant que les producteurs de l’Union ne fabriquent pas et ne vendent pas des petits rouleaux, conteste l’inclusion de ces produits dans le calcul de la marge de préjudice. En premier lieu, l’article 1er, paragraphe 1, du règlement de base décrirait la « mise en libre pratique » comme étant la cause du préjudice. Or, les petits rouleaux ne seraient pas importés dans l’Union et ne feraient donc pas l’objet d’une mise en libre pratique. En deuxième lieu, l’article 3, paragraphe 2, dudit règlement prévoirait un examen objectif de l’effet des importations sur les prix des produits similaires dans l’Union. Toutefois, les petits rouleaux ne feraient pas l’objet de l’enquête et ne seraient pas importés de Corée du Sud. Ils ne seraient pas non plus fabriqués ou vendus par l’industrie de l’Union. En troisième lieu, l’article 3, paragraphe 3, de ce règlement préciserait que la marge de préjudice doit être déterminée en examinant les importations faisant l’objet d’un dumping par rapport au prix d’un produit similaire de l’industrie de l’Union. Or, les petits rouleaux ne feraient pas l’objet de l’enquête et ne seraient pas des produits similaires. En quatrième lieu, l’article 3, paragraphe 6, du même règlement prévoirait la démonstration que le volume ou les prix des importations ont un impact sur l’industrie de l’Union. Toutefois, les petits rouleaux ne pourraient pas causer de préjudice à l’industrie de l’Union, puisqu’ils n’entreraient pas en concurrence avec les rouleaux jumbo.

171    La requérante ajoute qu’il est inexact d’affirmer, comme le fait la Commission dans les écritures, que seuls les rouleaux jumbo ont été pris en compte dans le calcul de la marge de préjudice. Le point de départ des calculs de la Commission serait le volume des ventes et la valeur des petits rouleaux vendus par Schades à des clients indépendants. L’affirmation de la Commission serait donc inexacte. Pour les ventes de petits rouleaux effectuées par Schades, la Commission ferait une comparaison entre un prix hypothétique frontière de l’Union des rouleaux jumbo et le prix des rouleaux jumbo de l’industrie de l’Union.

172    La Commission et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

173    Au titre de l’article 1er, paragraphe 1, du règlement de base, peut être soumis à un droit antidumping tout produit faisant l’objet d’un dumping lorsque sa « mise en libre pratique » dans l’Union cause un préjudice. Par ailleurs, l’article 3, paragraphes 2 et 3, dudit règlement prévoit, dans le cadre de la détermination de l’existence d’un préjudice, l’examen de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping sur les produits similaires de l’industrie de l’Union. En outre, selon l’article 3, paragraphe 6, de ce règlement, il doit être démontré que les importations faisant l’objet d’un dumping ont un impact important sur l’industrie de l’Union.

174    Dans le cadre de la première branche du cinquième moyen, la requérante conteste l’inclusion des petits rouleaux dans le calcul de la marge de préjudice, dans la mesure où ces produits ne feraient pas l’objet de l’enquête. En substance, donc, la requérante part de la prémisse que l’analyse du préjudice subi par l’industrie de l’Union se fonde sur une comparaison erronée entre, d’une part, les petits rouleaux vendus par les transformateurs liés de la requérante et, d’autre part, les rouleaux jumbo vendus par l’industrie de l’Union.

175    Or, une telle prémisse est erronée.

176    En effet, ainsi que le rappelle la Commission dans ses écritures, les prix de vente des petits rouleaux ont été utilisés uniquement aux fins de construire, après ajustements, les prix à l’exportation des rouleaux jumbo vendus aux transformateurs liés. Cette construction du prix à l’exportation résultait de l’impossibilité de relier les ventes de rouleaux jumbo aux transformateurs liés et les ventes de petits rouleaux, après transformation, aux clients indépendants dans l’Union. Dès lors, l’analyse du préjudice, en ce compris la sous-cotation des prix, repose sur une comparaison entre des produits similaires faisant l’objet de l’enquête, à savoir les rouleaux jumbo. Cette situation est différente de celle envisagée dans le cadre du rapport d’un groupe spécial de l’OMC cité par la requérante dans ses écritures. En effet, dans cette affaire, le groupe spécial avait envisagé la situation d’une analyse de la sous-cotation des prix pour des produits qui n’étaient pas comparables. Or, tel n’est pas le cas en l’espèce.

177    En conséquence, il y a lieu de rejeter la première branche du cinquième moyen comme étant non fondée.

–       Sur la deuxième branche du cinquième moyen, tirée d’une violation de l’article 3, paragraphes 1 à 3 et 5 à 8, du règlement de base, de la jurisprudence des juridictions de l’Union et des décisions de l’OMC, de la pratique décisionnelle antérieure de la Commission et des principes de la comparaison équitable et de l’égalité de traitement

178    La requérante, rappelant que la Commission avait appliqué par analogie l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base pour déterminer la marge de préjudice, invoque, par un premier grief, une violation de l’article 3, paragraphe 1, dudit règlement. Le raisonnement qui sous-tendrait l’application de ces deux dispositions ne serait pas le même. L’application par analogie faite par la Commission serait par conséquent erronée. Elle serait également en contradiction avec la pratique décisionnelle antérieure. La requérante cite en particulier une affaire dans laquelle la Commission n’aurait pas déduit les frais VGA ni un bénéfice fictif pour déterminer un prix en libre pratique. Elle fournit, en annexe A.32 de la requête, un document extrait de la procédure administrative dans cette affaire. Selon elle, la Commission aurait dû tenir compte du prix du produit considéré facturé par Schades à ses clients indépendants et retirer les frais de ventes directs.

179    La requérante ajoute que la deuxième branche du cinquième moyen ne concerne pas le calcul de la marge de dumping. Dès lors, même si le Tribunal devait rejeter les quatre premiers moyens comme étant non fondés, cela n’affecterait pas la pertinence du cinquième moyen. La requérante précise qu’elle soutient que la Commission aurait dû se fonder sur les prix finaux des rouleaux jumbo réellement pratiqués envers les clients indépendants, au lieu de construire un prix à l’exportation artificiel pour les rouleaux jumbo. Par ailleurs, la demande de la Commission de rejeter le point 139 de la requête comme étant irrecevable serait « étrange ». Enfin, s’agissant du document relatif à une autre procédure administrative repris en annexe A.32 de la requête, il aurait été versé au dossier de l’enquête dans cette autre procédure. La requérante soutient que la mise à profit de l’expérience acquise par ses avocats ne viole aucune règle de déontologie ni d’autre règle du droit de l’Union.

180    Par un deuxième grief, la requérante soutient que l’utilisation par analogie de l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base viole également l’article 3, paragraphes 2, 3, 5, 7 et 8, dudit règlement. La méthode retenue par la Commission ne permettrait pas, dans le cadre de l’évaluation du préjudice et notamment de l’effet des importations, de comparer des prix comparables. Il aurait fallu retenir les prix du produit considéré facturés par Schades à des clients indépendants dans l’Union.

181    Par un troisième grief, la requérante considère que la méthode retenue par la Commission est contraire à la jurisprudence et, notamment, à l’arrêt du 30 novembre 2011, Transnational Company « Kazchrome » et ENRC Marketing/Conseil et Commission (T‑107/08, EU:T:2011:704).

182    Par un quatrième grief, la requérante soutient que la méthode retenue par la Commission est contraire au principe de comparaison équitable et aux décisions de l’OMC. En particulier, des décisions de l’OMC auraient rappelé que l’existence d’une sous-cotation des prix doit reposer sur des prix dûment comparables. En l’espèce, une comparaison entre les prix de Schades et ceux de l’industrie de l’Union n’aurait pu se faire qu’à un niveau comparable, à savoir le prix net départ usine. La requérante ajoute que le fait que les ventes de Schades à des clients indépendants représentent un faible pourcentage des ventes à l’exportation totales ne rendrait pas leurs prix non fiables. Ces prix seraient en fait les seuls pertinents aux fins de l’évaluation du préjudice.

183    Par un cinquième grief, la requérante considère que la méthode retenue par la Commission viole le principe d’égalité de traitement, dans la mesure où celle-ci a traité de la même manière des ventes réalisées envers des clients indépendants et des ventes réalisées envers des clients liés. Elle ajoute que, contrairement à ce que soutient la Commission dans ses écritures, son argument est suffisamment clair.

184    La Commission, soutenue par l’intervenante, indique, à titre liminaire, que, si le Tribunal devait rejeter comme non fondés les quatre premiers moyens, il y aurait également lieu de rejeter le cinquième moyen comme dénué de fondement.

185    S’agissant du premier grief, la Commission relève que le prix à l’exportation est un élément essentiel de la détermination de la marge de préjudice. Dans la mesure où seul l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base fournirait des indications sur la construction du prix à l’exportation, son application par analogie serait justifiée. En outre, la requête manquerait de clarté en ce qui concerne la violation alléguée de l’article 3, paragraphe 1, dudit règlement. Le point 139 de la requête devrait être rejeté comme étant irrecevable. Pour ce qui est de la pratique décisionnelle antérieure, la Commission relève que le document produit en annexe A.32 de la requête, relatif à l’autre affaire citée par la requérante, serait confidentiel et propre à ladite affaire. Elle s’interroge sur la source de ce document et considère que sa divulgation pourrait être contraire aux règles de déontologie des avocats et aux règles de l’Union. La Commission invite le Tribunal à supprimer cette information du dossier. En outre, le fait de s’écarter d’une pratique décisionnelle antérieure ne serait pas un motif d’annulation. La méthode appliquée en l’espèce serait par ailleurs conforme au principe d’égalité de traitement.

186    La Commission ajoute que l’argument avancé par la requérante dans la réplique selon lequel elle aurait dû se fonder sur les prix finaux des rouleaux jumbo réellement pratiqués envers les clients indépendants, au lieu de construire un prix à l’exportation artificiel pour les rouleaux jumbo, est irrecevable car avancé tardivement. De plus, la requérante reconnaîtrait dans la réplique la nécessité des ajustements pour garantir la comparabilité des prix. Par ailleurs, les calculs pour déterminer la marge de préjudice exigeraient de déterminer un prix à l’exportation. Ce prix se situerait au niveau auquel le produit considéré entre en concurrence avec celui de l’industrie de l’Union, soit en l’espèce le prix de la première revente à des clients indépendants. En outre, la Commission précise que la structure et l’absence de traçabilité des ventes de la requérante l’ont conduit à considérer que le prix réel n’était pas fiable.

187    S’agissant du deuxième grief, la Commission relève que la concurrence avait lieu en majeure partie au niveau des transformateurs liés. Elle indique avoir dû faire abstraction des transactions de Schades avec des clients indépendants, dans la mesure où elles n’auraient représenté qu’un faible pourcentage des ventes à l’exportation du produit considéré.

188    S’agissant du troisième grief, la Commission considère que la jurisprudence citée par la requérante ne remet pas en cause la construction du prix à l’exportation sur la base du prix de revente au premier client indépendant, dûment ajusté, en appliquant par analogie l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base.

189    S’agissant du quatrième grief, la Commission rappelle qu’elle a considéré que les prix de Schades n’étaient pas fiables. Elle indique que les décisions de l’OMC visées par la requérante ainsi que la jurisprudence confirment la marge d’appréciation dont elle dispose pour s’assurer de la comparabilité des prix et évaluer l’effet des importations. Elle ajoute que le manque de fiabilité des ventes de Schades résultait non seulement de l’absence de traçabilité du produit considéré, mais également du manque de fiabilité des prix réels facturés.

190    S’agissant du cinquième grief, la Commission soutient que l’argument de la requérante est trop vague et imprécis et doit être rejeté comme étant irrecevable. Elle soutient en tout état de cause que la requérante n’explique pas en quoi elle a traité de manière différente les exportations effectuées à des clients indépendants et celles effectuées à des clients liés. En outre, elle rappelle que les prix facturés par la requérante aux transformateurs liés ne pouvaient pas être considérés comme étant fiables.

191    À titre liminaire, et dès lors que certains des premier à quatrième moyens ont été accueillis en tout ou partie, ne saurait prospérer l’argument avancé par la Commission visant à considérer que, si lesdits moyens devaient être rejetés comme dénués de fondement, il conviendrait également de rejeter la deuxième branche du cinquième moyen. Il convient par ailleurs de rejeter la fin de non-recevoir avancée par la Commission concernant l’argument de la requérante avancé dans la réplique, selon lequel la Commission aurait dû se fonder sur les prix finaux des rouleaux jumbo réellement pratiqués envers les clients indépendants, au lieu de construire un prix à l’exportation artificiel pour les rouleaux jumbo. En effet, il résulte clairement de la requête que la requérante soutient que la Commission aurait dû utiliser comme prix en libre pratique pour les reventes par Schades du produit concerné les prix facturés aux clients indépendants de cette société, ramenés à un niveau départ usine. L’argument développé par la requérante dans la réplique se rattache donc directement aux arguments déjà exposés dans la requête.

192    À titre liminaire également, il y a lieu de répondre à la demande de la Commission de voir retirer du dossier un document obtenu par les avocats de la requérante dans le cadre d’une autre procédure antidumping et repris en annexe A.32 de la requête.

193    À cet égard, il y a lieu de rappeler que seules les « parties intéressées » à une procédure antidumping qui se sont fait connaître en temps utile peuvent prendre connaissance de tous les renseignements fournis par toute partie concernée par l’enquête, mis à part les documents internes établis par les autorités de l’Union ou de ses États membres, pour autant que ces renseignements soient pertinents pour la défense de leurs intérêts, qu’ils ne soient pas confidentiels et qu’ils soient utilisés dans l’enquête (article 6, paragraphe 7, du règlement de base).

194    En l’espèce, il est constant que la requérante n’était pas « partie intéressée » à la procédure dont émane le document en cause. Il convient également de relever que ce document, compte tenu de sa nature et du statut attaché à sa consultation, fait partie des documents concernant une matière relative aux politiques, activités et décisions relevant de la compétence de la Commission et n’a pas été rendu public. Dans ce contexte, il aurait été nécessaire, afin que ledit document puisse être rendu public, qu’une demande d’accès audit document eût été introduite, conformément aux dispositions du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43) (voir, en ce sens, ordonnance du 21 février 2013, Besselink/Conseil, T‑331/11, non publiée, EU:T:2013:91, points 9 et 10). Or, une telle demande n’a pas été introduite par la requérante. Par ailleurs, si le Tribunal a pu estimer, en procédant à une mise en balance des intérêts à protéger, qu’il convenait d’apprécier si des circonstances particulières, telles que le caractère décisif de la production du document aux fins d’assurer le contrôle de la régularité de la procédure d’adoption de l’acte attaqué ou d’établir l’existence d’un détournement de pouvoir, peuvent justifier de maintenir un tel document dans le dossier, la requérante n’a pas fait valoir de telles circonstances particulières et n’a pas invoqué le caractère décisif du document concerné (voir, en ce sens, ordonnance du 21 février 2013, Besselink/Conseil, T‑331/11, non publiée, EU:T:2013:91, points 12 et 13).

195    Dès lors, il convient de retirer du dossier de l’affaire le document obtenu par les avocats de la requérante dans le cadre d’une autre procédure antidumping et repris en annexe A.32 de la requête.

196    Sur le fond, en substance, la requérante remet en cause dans la deuxième branche du cinquième moyen un point précis de la méthode employée par la Commission, à savoir le fait que celle-ci a reconstruit le prix à l’exportation des reventes de Schades du produit considéré à des clients indépendants (ventes indirectes du produit considéré), en déduisant notamment les frais VGA et une marge bénéficiaire, pour arriver à un prix CAF hypothétique frontière de l’Union. Selon elle, la Commission aurait dû utiliser les prix de vente réellement facturés et déduire uniquement les frais encourus pour la vente. Elle ne remet pas en cause dans cette branche ni les ventes directes à des clients indépendants, ni l’utilisation des ventes de petits rouleaux.

197    À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’article 1er, paragraphe 1, du règlement de base prévoit que « [p]eut être soumis à un droit antidumping tout produit faisant l’objet d’un dumping lorsque sa mise en libre pratique dans l’Union cause un préjudice ». Cette disposition, tirée de l’article 1er dudit règlement intitulé « Principes », pose la règle essentielle pour l’imposition des droits antidumping selon laquelle il ne suffit pas que les marchandises importées fassent l’objet d’un dumping, il faut encore que leur mise en libre pratique cause un préjudice. C’est précisément aux fins de la détermination de l’existence d’un préjudice que ce règlement prévoit à son article 3, paragraphes 2 et 3, qu’un examen objectif de l’effet des importations sur les prix des produits similaires sur le marché de l’Union doit être effectué et que, à ces fins, sera examiné s’il y a, pour les importations faisant l’objet d’un dumping, une sous-cotation notable du prix par rapport au prix d’un produit similaire ou si ces importations ont, d’une autre manière, pour effet de déprimer sensiblement les prix ou d’empêcher dans une mesure notable des hausses de prix qui, sans cela, se seraient produites (arrêt du 30 novembre 2011, Transnational Company « Kazchrome » et ENRC Marketing/Conseil et Commission, T‑107/08, EU:T:2011:704, point 58).

198    Il en résulte que c’est notamment par référence à la possibilité qu’un préjudice soit causé par les importations objet d’un dumping qu’il convient d’examiner la question de savoir si la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en déterminant le point de référence par rapport auquel il convenait, en l’espèce, de calculer les prix des produits des requérantes devant être comparés avec les prix de l’industrie de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 30 novembre 2011, Transnational Company « Kazchrome » et ENRC Marketing/Conseil et Commission, T‑107/08, EU:T:2011:704, point 59).

199    Dans ce cadre, ce sont les prix négociés entre une entreprise et les clients et non les prix à un stade intermédiaire qui ont pu déterminer la décision de ces clients d’acquérir le produit de cette entreprise et non celui de l’industrie de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 30 novembre 2011, Transnational Company « Kazchrome » et ENRC Marketing/Conseil et Commission, T‑107/08, EU:T:2011:704, point 63).

200    En l’espèce, si la Commission pouvait ramener à un niveau CAF frontière de l’Union le prix à l’exportation du produit considéré lorsqu’il a été vendu puis transformé en petits rouleaux, la construction opérée par la Commission s’agissant des reventes par Schades du produit considéré, et donc non transformé, à des clients indépendants est erronée.

201    En effet, tout d’abord, à la différence de la vente de petits rouleaux, les ventes en cause dans la deuxième branche du cinquième moyen concernent le produit considéré lui-même. C’est ce produit qui entre en concurrence avec le produit similaire de l’industrie de l’Union et qui cause un préjudice à cette industrie. Ainsi, le « point de référence » s’agissant des reventes de Schades, au sens de la jurisprudence rappelée au point 198 ci-dessus, ne se situe pas au niveau frontière de l’Union, mais au niveau des clients indépendants de Schades.

202    Ensuite, s’il est exact que la Commission a indiqué, au considérant 122 du règlement d’exécution attaqué, que la concurrence avait lieu en « majeure partie » au niveau des transformateurs liés, elle n’a pas considéré que « toute » la concurrence avait lieu à ce niveau. À cet égard, il y a lieu de considérer que, s’agissant des ventes directes et indirectes du produit considéré, la concurrence avait lieu au niveau des clients indépendants.

203    Dès lors, la Commission a commis une erreur en décidant de déduire les frais VGA et une marge bénéficiaire, pour les reventes du produit considéré faites par Schades à des clients indépendants, aux fins d’établir les prix à l’exportation dudit produit dans le cadre de la détermination du préjudice.

204    Concernant l’incidence d’une telle erreur, il y a lieu de relever que, certes, les reventes de Schades du produit considéré à des clients indépendants ne représentaient qu’une faible partie des ventes utilisées pour déterminer le prix à l’exportation de la requérante dans le cadre de l’analyse du préjudice. Toutefois, il convient également de rappeler que, ainsi qu’il résulte de l’analyse du premier grief de la seconde branche du premier moyen, les reventes du produit considéré à des clients indépendants auraient dû représenter une part plus importante que celle qui a été retenue par la Commission. En outre, aucun élément ne permet de mesurer précisément l’incidence d’une modification du point de référence pour les reventes du produit considéré à des clients indépendants sur le niveau de sous-cotation des prix retenu par la Commission qui s’élevait, en l’espèce, à 9,4 % (considérant 67 du règlement d’exécution attaqué).

205    Dès lors, il convient d’accueillir la deuxième branche du cinquième moyen.

–       Sur la troisième branche du cinquième moyen, tirée d’une violation de l’article 3, paragraphes 2, 3 et 6, du règlement de base

206    La requérante relève que la marge de sous-cotation calculée par la Commission était négative pour le produit considéré. La Commission n’aurait pu trouver une marge de sous-cotation positive qu’en tenant compte des ventes de petits rouleaux. Or, ainsi qu’il résulterait de la première branche du cinquième moyen, la Commission aurait commis une erreur à cet égard. De même, ainsi qu’il résulterait de la seconde branche du premier moyen, la pondération utilisée par la Commission serait manifestement erronée. Cette erreur fausserait également le calcul des marges de sous-cotation des prix et des prix indicatifs. En outre, la Commission n’aurait pas pris en compte la marge de sous-cotation négative dans son évaluation du préjudice et du lien de causalité, violant ainsi l’article 3, paragraphes 2, 3 et 6, du règlement de base.

207    La Commission, soutenue par l’intervenante, indique que ses conclusions reposaient sur la marge de sous-cotation globale. Contrairement à l’affirmation de la requérante, la marge de sous-cotation du produit considéré n’aurait pas été négative. L’affirmation de la requérante ne serait qu’une simple répétition des arguments de la première branche du cinquième moyen.

208    À cet égard, il y a lieu de rappeler que c’est aux fins de la détermination de l’existence d’un préjudice que le règlement de base prévoit à son article 3, paragraphes 2 et 3, qu’un examen objectif de l’effet des importations sur les prix des produits similaires sur le marché de l’Union doit être effectué et que, à ces fins, sera examiné s’il y a, pour les importations faisant l’objet d’un dumping, une sous-cotation notable du prix par rapport au prix d’un produit similaire ou si ces importations ont, d’une autre manière, pour effet de déprimer sensiblement les prix ou d’empêcher dans une mesure notable des hausses de prix qui, sans cela, se seraient produites (arrêt du 30 novembre 2011, Transnational Company « Kazchrome » et ENRC Marketing/Conseil et Commission, T‑107/08, EU:T:2011:704, point 58).

209    En l’espèce, il y a lieu de rappeler que la Commission a retenu que la sous-cotation des prix était de 9,4 % (considérant 67 du règlement d’exécution attaqué).

210    S’agissant des arguments de la requérante développés sur le fondement de la première branche du cinquième moyen, il y a lieu de les rejeter pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 173 à 177 ci-dessus.

211    S’agissant des arguments de la requérante développés sur le fondement de la seconde branche du premier moyen, il y a lieu de rappeler que, dans le cadre de cette branche, il a été retenu que la Commission avait commis une erreur dans la pondération des ventes aux transformateurs liés pour revente sous forme de petits rouleaux à des entreprises indépendantes (entre 75 et 85 %) (voir points 83 à 87 ci-dessus). Dès lors que la Commission a utilisé la même pondération pour calculer la sous-cotation des prix, l’erreur relevée dans la seconde branche du premier moyen affecte également ledit calcul.

212    Dans la mesure où il ne saurait être exclu que cette erreur, couplée à celle relevée dans le cadre de la deuxième branche du cinquième moyen, affecte la conclusion de la Commission relative à l’analyse de la sous-cotation des prix et à l’examen de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping sur les produits similaires de l’industrie de l’Union, prévus à l’article 3, paragraphes 2 et 3, du règlement de base, il y a également lieu d’accueillir la troisième branche du cinquième moyen dans la mesure où la requérante invoque une violation desdites dispositions.

213    Au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent et des illégalités constatées dans le cadre de l’examen du premier grief de la seconde branche du premier moyen, de la première branche du deuxième moyen, du quatrième moyen et des deuxième et troisième branches du cinquième moyen, il y a lieu d’annuler le règlement d’exécution attaqué, en tant qu’il concerne la requérante.

 Sur les dépens

214    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

215    En application de l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure, l’intervenante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le document repris en annexe A.32 de la requête est retiré du dossier.

2)      Le règlement d’exécution (UE) 2017/763 de la Commission, du 2 mai 2017, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations de certains papiers thermosensibles légers originaires de la République de Corée, est annulé en tant qu’il concerne Hansol Paper Co. Ltd.

3)      La Commission européenne supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par Hansol Paper.

4)      European Thermal Paper Association (ETPA) supportera ses propres dépens.

Tomljenović

Marcoulli

Spineanu-Matei

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 2 avril 2020.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.