Language of document : ECLI:EU:C:2010:456

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

29 juillet 2010 (*)

«Pourvoi – Marque communautaire – Règlement (CE) n° 40/94 –Demande d’enregistrement de la marque verbale BUDWEISER – Opposition – Article 8, paragraphe 1, sous a) et b), dudit règlement – Marques internationales verbales et figuratives antérieures BUDWEISER et Budweiser Budvar – Usage sérieux de la marque antérieure – Article 43, paragraphes 2 et 3, du même règlement – Production de preuves ‘en temps utile’ – Certificat de renouvellement de la marque antérieure – Article 74, paragraphe 2, du règlement n° 40/94»

Dans l’affaire C‑214/09 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 12 juin 2009,

Anheuser-Busch Inc., établie à Saint Louis (États-Unis), représentée par Mes V. von Bomhard et B. Goebel, Rechtsanwälte,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant:

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse en première instance,

Budějovický Budvar, národní podnik, établie à České Budĕjovice (République tchèque), représentée par Me K. Čermák, advokát,

partie intervenante en première instance,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. J.-C. Bonichot (rapporteur), président de chambre, Mme C. Toader, MM. K. Schiemann, L. Bay Larsen et J.-J. Kasel, juges,

avocat général: M. P. Cruz Villalón,

greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 11 mai 2010,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi, Anheuser-Busch Inc. (ci-après «Anheuser-Busch») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 25 mars 2009, Anheuser-Busch/OHMI – Budějovický Budvar (BUDWEISER) (T-191/07, Rec. p. II-691, ci‑après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 20 mars 2007 (affaire R 299/2006-2, ci‑après la «décision litigieuse»), qui a refusé l’enregistrement de la marque verbale BUDWEISER en faisant droit à l’opposition formée contre celui-ci par Budějovický Budvar, národní podnik (ci-après «Budvar»).

 Le cadre juridique

 Le règlement (CE) n° 40/94

2        L’article 8 du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), applicable au litige au principal et qui a été ultérieurement abrogé et remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1), intitulé «Motifs relatifs de refus», dispose à son paragraphe 1:

«Sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement:

a)      lorsqu’elle est identique à la marque antérieure et que les produits ou les services pour lesquels la marque a été demandée sont identiques à ceux pour lesquels la marque antérieure est protégée;

b)      lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.»

3        Aux termes de l’article 15 du règlement n° 40/94, intitulé «Usage de la marque communautaire»:

«1.      Si, dans un délai de cinq ans à compter de l’enregistrement, la marque communautaire n’a pas fait l’objet par le titulaire d’un usage sérieux dans la Communauté pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, ou si un tel usage a été suspendu pendant un délai ininterrompu de cinq ans, la marque communautaire est soumise aux sanctions prévues au présent règlement, sauf juste motif pour le non-usage.

2.      Sont également considérés comme usage au sens du paragraphe 1:

a)      l’emploi de la marque communautaire sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée;

[…]»

4        L’article 42, paragraphe 3, dudit règlement prévoit:

«L’opposition doit être formée par écrit et motivée. Elle n’est réputée formée qu’après paiement de la taxe d’opposition. Dans un délai imparti par l’[OHMI], celui qui a formé opposition peut présenter à son appui des faits, preuves et observations.»

5        L’article 43, paragraphes 1 à 3, du règlement n° 40/94 est libellé comme suit:

«1.      Au cours de l’examen de l’opposition, l’[OHMI] invite les parties, aussi souvent que cela est nécessaire, à présenter, dans un délai qu’il leur impartit, des observations sur les communications émanant des autres parties ou de lui-même.

2.      Sur requête du demandeur, le titulaire d’une marque communautaire antérieure qui a formé opposition apporte la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la publication de la demande de marque communautaire, la marque communautaire antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans la Communauté pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage, pour autant qu’à cette date la marque antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins. À défaut d’une telle preuve, l’opposition est rejetée. Si la marque communautaire antérieure n’a été utilisée que pour une partie des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée, elle n’est réputée enregistrée, aux fins de l’examen de l’opposition, que pour cette partie des produits ou services.

3.      Le paragraphe 2 s’applique aux marques nationales antérieures visées à l’article 8 paragraphe 2 point a), étant entendu que l’usage dans la Communauté est remplacé par l’usage dans l’État membre où la marque nationale antérieure est protégée.»

6        Figurant sous le titre IX du règlement n° 40/94, consacré aux dispositions de procédure, la première section de ce titre, intitulée «Dispositions générales», comporte un article 74 qui dispose, sous l’intitulé «Examen d’office des faits»:

«1.      Au cours de la procédure, l’[OHMI] procède à l’examen d’office des faits; toutefois, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties.

2.      L’[OHMI] peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile.»

7        Aux termes de l’article 76, paragraphe 1, dudit règlement:

«Dans toute procédure devant l’[OHMI], les mesures d’instruction suivantes peuvent notamment être prises:

a)      l’audition des parties;

b)      la demande de renseignements;

c)      la production de documents et d’échantillons;

d)      l’audition de témoins;

e)      l’expertise;

f)      les déclarations écrites faites sous serment ou solennellement ou qui ont un effet équivalent d’après la législation de l’État dans lequel elles sont faites.»

 Le règlement d’exécution de 1995

8        La règle 16 du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1, ci‑après le «règlement d’exécution de 1995»), dispose:

«1.      Tout acte d’opposition peut contenir des renseignements détaillés sur les faits, les preuves et les observations présentés à l’appui de l’opposition, accompagnés des pièces justificatives.

2.      Si l’opposition est fondée sur l’existence d’une marque antérieure qui n’est pas une marque communautaire, l’acte d’opposition doit de préférence être accompagné de preuves de l’enregistrement ou du dépôt de cette marque antérieure, telles que le certificat d’enregistrement. […]

3.      Les renseignements détaillés concernant les faits, les preuves et les observations ainsi que les pièces justificatives visés au paragraphe 1 et les preuves visées au paragraphe 2 peuvent être produits, s’ils ne l’ont pas été en même temps que l’acte d’opposition ou à la suite de celui-ci, dans un délai suivant l’ouverture de la procédure d’opposition que l’[OHMI] fixe conformément à la règle 20 paragraphe 2.»

9        Aux termes de la règle 20, paragraphe 2, du règlement d’exécution de 1995:

«Lorsque l’acte d’opposition ne contient pas de renseignements détaillés sur les faits, preuves et observations, tels que mentionnés à la règle 16 paragraphes 1 et 2, l’[OHMI] invite l’opposant à les lui fournir dans le délai qu’il lui impartit. Tout élément fourni par l’opposant est communiqué au demandeur qui dispose de la possibilité de répondre dans un délai imparti par l’[OHMI].»

10      Le règlement d’exécution de 1995 a été modifié par le règlement (CE) n° 1041/2005 de la Commission, du 29 juin 2005 (JO L 172, p. 4, ci‑après le «règlement d’exécution de 2005»), lequel est entré en vigueur le 25 juillet 2005.

11      La règle 18, paragraphe 1, du règlement d’exécution de 2005 énonce:

«Lorsque l’opposition est jugée recevable conformément à la règle 17, l’[OHMI] informe les parties que la procédure d’opposition est réputée ouverte deux mois après la réception de la communication. Ce délai peut être prorogé jusqu’à un total de 24 mois si les deux parties présentent des requêtes de prorogation avant l’expiration du délai.»

12      La règle 19 du règlement d’exécution de 2005 prévoit:

«1.      L’[OHMI] donne à l’opposant l’opportunité de présenter les faits, preuves et observations à l’appui de son opposition ou de compléter les faits, preuves et observations d’ores et déjà présentés conformément à la règle 15, paragraphe 3, dans un délai fixé par lui et qui doit être de deux mois au moins à partir de la date d’ouverture présumée de la procédure d’opposition conformément à la règle 18, paragraphe 1.

2.      Au cours du délai visé au paragraphe 1, l’opposant produit également la preuve de l’existence, de la validité et de l’étendue de la protection de sa marque antérieure ou de son droit antérieur, ainsi que des éléments de preuve de son habilitation à former opposition. L’opposant produit notamment les preuves suivantes:

a)      si l’opposition est fondée sur l’existence d’une marque autre qu’une marque communautaire, la preuve de son dépôt ou enregistrement, en produisant:

[…]

ii)      si la marque est enregistrée, une copie du certificat d’enregistrement correspondant et, le cas échéant, du dernier certificat de renouvellement, attestant que le délai de protection de la marque dépasse le délai visé au paragraphe 1 et de toute extension de celui-ci, ou tout autre document équivalent émanant de l’administration auprès de laquelle la demande de marque a été déposée;

[…]

4.      L’[OHMI] ne prend pas en considération les observations écrites ou documents ou parties de ceux-ci qui ne sont pas présentés ou qui ne sont pas traduits dans la langue de procédure, dans le délai imparti par l’[OHMI].»

 Les antécédents du litige

13      Les antécédents du litige porté devant le Tribunal, tels qu’ils résultent de l’arrêt attaqué, peuvent être résumés comme suit.

14      Le 1er avril 1996, Anheuser-Busch a demandé à l’OHMI l’enregistrement, en tant que marque communautaire, du signe verbal «budweiser», pour des produits qui relèvent de la classe 32 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et qui correspondent à la description suivante: «Bière, ale, porter, boissons maltées alcooliques et non alcooliques».

15      Le 28 septembre 1999, Budvar a formé une opposition à l’encontre de l’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits concernés en invoquant, sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement nº 40/94, d’une part, l’existence de trois marques, à savoir:

–        la marque internationale verbale BUDWEISER (R 238 203) (ci-après la «marque R 238 203»), enregistrée pour de la «bière de tout genre», avec effet en Allemagne, en Autriche, au Benelux et en Italie,

–        la marque internationale figurative comprenant les termes «Budweiser Budvar» (n° 674 530) (ci-après la «marque n° 674 530»), enregistrée pour les produits «malt» et «bière», avec effet en Autriche, au Benelux, en France et en Italie, ainsi que

–        la marque internationale figurative comprenant les termes «Budweiser Budvar» (n° 614 536) (ci-après la «marque n° 614 536»), enregistrée pour le produit «bière», avec effet en Allemagne, en Autriche, au Benelux, en France et en Italie.

16      D’autre part, Budvar s’est prévalue, sur le fondement de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 40/94, de plusieurs appellations d’origine incluant le terme «budweiser».

17      L’OHMI avait initialement fixé au 24 juin 2000 le délai dans lequel Budvar devait présenter les faits, preuves et observations à l’appui de son opposition. Ce délai a par la suite été reporté au 26 février 2002. Les documents que Budvar a transmis à cet effet par télécopie ont été intégralement reçus par l’OHMI le 27 février 2002.

18      Le 8 juillet 2002, Anheuser-Busch a demandé, conformément à l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 40/94, que Budvar apporte la preuve de l’usage sérieux des marques invoquées au soutien de son opposition.

19      Budvar a répondu à cette demande par une lettre du 8 novembre 2002, le délai, fixé à cet effet par l’OHMI dans une lettre du 10 septembre 2002, expirant le 11 novembre 2002.

20      Dans ladite lettre, Budvar a expressément renvoyé aux documents reçus par l’OHMI le 27 février 2002, tendant à prouver l’usage des appellations d’origine incluant le terme «budweiser», et a considéré que ces documents s’appliquaient, notamment, à la marque R 238 203.

21      Devant la division d’opposition de l’OHMI, Budvar a en outre produit, en annexe à ses observations du 21 janvier 2004, un document émis par l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) certifiant que l’enregistrement de la marque R 238 203 avait été renouvelé le 5 décembre 2000 (ci-après le «certificat de renouvellement»).

22      Par une première décision du 10 juin 2004, la division d’opposition a fait droit à l’opposition formée par Budvar, en considérant, en substance, qu’il existait un risque de confusion, en Autriche et en France, entre la marque dont l’enregistrement est demandé et la marque n° 674 530.

23      Par une décision du 11 juillet 2005, la deuxième chambre de recours de l’OHMI a accueilli le recours d’Anheuser-Busch contre la décision du 10 juin 2004, au motif que la marque n° 674 530 n’était protégée dans les deux États membres susmentionnés qu’après le dépôt de la demande de marque communautaire concernée, et a renvoyé l’affaire devant la division d’opposition.

24      Par une seconde décision du 22 décembre 2005, la division d’opposition a de nouveau fait droit à l’opposition formée par Budvar. Estimant que la preuve de l’usage de la marque R 238 203 était insuffisante, elle a limité son examen à la marque n° 614 536 et a, à cet égard, décidé de prendre en considération les documents fournis par Budvar au soutien de son opposition. En conclusion, la division d’opposition a considéré, en substance, qu’il existait un risque de confusion, en Allemagne, en Autriche, au Benelux, en France et en Italie, entre la marque dont l’enregistrement est demandé et ladite marque antérieure.

25      Par la décision litigieuse, la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours d’Anheuser-Busch contre la décision du 22 décembre 2005.

26      Elle a considéré, contrairement à la division d’opposition, que la marque R 238 203 pouvait être prise en compte, en estimant, sur le fondement des documents fournis par Budvar, que la preuve de l’usage sérieux de cette marque avait été apportée.

27      La chambre de recours a conclu que, pour les produits «bière, ale, porter, boissons maltées alcooliques», l’opposition pouvait être accueillie sur la base de l’article 8, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94 et que, pour les produits restants («boissons non alcooliques»), compte tenu de l’identité des marques et des similitudes manifestes entre les produits, l’opposition pouvait être accueillie, pour ces produits, sur le fondement du paragraphe 1, sous b), dudit article.

 La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

28      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 31 mai 2007, Anheuser‑Busch a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse.

29      L’OHMI et Budvar ont conclu au rejet du recours.

30      Dès lors que, par son pourvoi, Anheuser-Busch ne vise que certaines parties de l’arrêt attaqué, seules ces parties seront examinées ci-après.

31      Par son deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 74, paragraphe 2, du règlement n° 40/94, Anheuser-Busch reprochait notamment à la chambre de recours de ne pas avoir écarté le certificat de renouvellement, ce document ayant été fourni par Budvar le 21 janvier 2004.

32      À cet égard, le Tribunal a jugé, aux points 63 à 71 de l’arrêt attaqué, d’une part, qu’une violation de l’article 74, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 ne saurait être retenue à l’encontre de la décision litigieuse dès lors qu’il ne ressort pas de celle-ci que la chambre de recours aurait estimé que le certificat de renouvellement n’avait pas été produit en temps utile et aurait appliqué ladite disposition afin de pouvoir le prendre en compte, et que, d’autre part, pour les motifs énoncés aux points 78 et 79 de l’arrêt attaqué, ledit certificat avait été fourni en temps utile.

33      Auxdits points 78 et 79, le Tribunal a considéré en particulier que, s’il résulte d’une lecture combinée des règles 16 et 20 du règlement d’exécution de 1995 que l’OHMI est en droit de demander la preuve du renouvellement de la marque antérieure lorsque celle-ci arrive à expiration après la date du dépôt de l’acte d’opposition, le paragraphe 2 de ladite règle 20 n’oblige pas l’opposant à produire d’office une telle preuve et ne précise pas non plus que l’OHMI est tenu d’écarter un document lorsque celui-ci est porté tardivement à sa connaissance.

34      S’agissant de la règle 20, paragraphe 2, du règlement d’exécution de 1995, le Tribunal a également jugé, au point 73 de l’arrêt attaqué, que, en vertu de l’article 74, paragraphe 2, du règlement n° 40/94, l’OHMI dispose d’un pouvoir d’appréciation au regard de la prise en considération d’éléments produits après l’expiration d’un délai et que ladite règle ne saurait être interprétée dans un sens contraire à celui résultant des termes clairs dudit règlement.

35      À titre surabondant, le Tribunal a considéré, aux points 74 à 77 de l’arrêt attaqué, que, eu égard au principe de sécurité juridique tel que consacré par la jurisprudence de la Cour, les dispositions introduites par le règlement d’exécution de 2005 dans le règlement d’exécution de 1995, en particulier l’article 19, paragraphe 4, de celui-ci, ne pouvaient être appliquées de manière rétroactive dans le cas d’espèce.

36      Partant, le Tribunal a rejeté le deuxième moyen soulevé par Anheuser-Busch comme étant non fondé.

37      Par son troisième moyen, tiré de la violation de l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 40/94, Anheuser-Busch faisait valoir que les éléments fournis par Budvar étaient insuffisants pour démontrer l’usage sérieux de la marque R 238 203.

38      Après avoir rappelé, aux points 99 à 105 de l’arrêt attaqué, la jurisprudence relative à l’interprétation de la notion d’usage sérieux, le Tribunal a constaté, au point 106 du même arrêt, que, en l’espèce, la chambre de recours avait considéré que «les preuves produites par Budvar étaient clairement suffisantes pour prouver l’usage sérieux de la marque […] [R 238 203]» et que ladite chambre avait renvoyé, en particulier, aux publicités montrant des images de la bière de Budvar sur lesquelles figurent la marque BUDWEISER, aux factures adressées à des clients en Allemagne et en Autriche, ainsi qu’au fait que ces documents concernaient la période pertinente aux fins de l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 40/94.

39      S’agissant d’abord des publicités, parues dans un magazine autrichien et des magazines allemands, transmises par Budvar à l’OHMI le 8 novembre 2002, le Tribunal a constaté, au point 110 de l’arrêt attaqué, qu’Anheuser-Busch ne contestait pas que ces documents apportaient des éléments de preuve quant à la nature des produits (bière), au lieu (Allemagne et Autriche) ainsi qu’à la durée (1995 pour l’Autriche et entre 1996 et 1998 pour l’Allemagne) de l’usage du terme «budweiser». Au même point 110, le Tribunal a ajouté qu’Anheuser-Busch ne contestait pas non plus que l’usage du terme «budweiser», sous les diverses formes employées dans les publicités produites par Budvar, pouvait être rapporté à la marque R 238 203.

40      Pour ce qui concerne, ensuite, des publicités et des factures intégralement reçues par l’OHMI le 27 février 2002, le Tribunal a relevé, au point 111 de l’arrêt attaqué, que Budvar avait transmis ces documents pour prouver l’usage des appellations d’origine incluant le terme «budweiser», mais que, dans sa lettre du 8 novembre 2002, en réponse à la demande d’Anheuser-Busch de prouver l’usage sérieux des marques antérieures invoquées au soutien de l’opposition, Budvar avait expressément renvoyé auxdits documents, considérant qu’ils s’appliquaient, notamment, à la marque R 238 203.

41      À cet égard, le Tribunal a considéré, au point 112 de l’arrêt attaqué, qu’Anheuser-Busch ne contestait pas, devant le Tribunal, le fait que les documents en cause avaient trait à l’usage de la marque R 238 203 et qu’elle ne remettait pas non plus en cause le fait que ces documents apportaient des éléments de preuve concernant le lieu, la durée et l’importance de l’usage de ladite marque, éléments qui, selon le Tribunal, ressortaient, au demeurant, clairement desdits documents.

42      Enfin, au point 114 de l’arrêt attaqué, s’agissant de l’argument d’Anheuser-Busch selon lequel la chambre de recours aurait dû s’appuyer sur d’autres considérations, comme la nature de l’usage de la marque R 238 203 en Allemagne et en Autriche, le Tribunal a jugé qu’il suffisait de relever à cet égard que la chambre de recours avait fait référence aux publicités montrant des images de la «bière» de Budvar portant ladite marque antérieure. Le Tribunal a également considéré que la nature de l’usage de celle-ci, à savoir en tant qu’il était fait référence à de la bière, ressortait tant des publicités que des factures produites par Budvar et que, en renvoyant aux publicités, la chambre de recours avait implicitement, mais nécessairement, retenu cette même nature de l’usage.

43      Par conséquent, le Tribunal a rejeté le troisième moyen soulevé par Anheuser-Busch comme non fondé.

44      Le Tribunal a donc rejeté le recours en annulation dans son intégralité.

 Les conclusions des parties

45      Par son pourvoi, Anheuser-Busch demande à la Cour:

–        d’annuler l’arrêt attaqué, et

–        de condamner la requérante aux dépens.

46      L’OHMI et Budvar concluent au rejet du pourvoi et à la condamnation d’Anheuser-Busch aux dépens.

 Sur le pourvoi

47      À l’appui de son pourvoi, Anheuser-Busch invoque trois moyens, tirés de la violation, le premier, de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, lu en combinaison avec les règles 16, paragraphes 1 et 3, et 20, paragraphe 2, du règlement d’exécution de 1995, le deuxième, de l’article 74, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 et, le troisième, de l’article 43, paragraphes 2 et 3, de ce dernier règlement.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, lu en combinaison avec les règles 16, paragraphes 1 et 3, et 20, paragraphe 2, du règlement d’exécution de 1995

 Argumentation des parties

48      Par son premier moyen, Anheuser-Busch soutient que l’interprétation de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 retenue par le Tribunal aux points 78 et 79 de l’arrêt attaqué est entachée d’une erreur de droit.

49      Selon elle, cette interprétation est en net contraste avec la jurisprudence antérieure du Tribunal ainsi qu’avec la pratique constante de l’OHMI depuis de nombreuses années, plus précisément jusqu’à la codification de cette interprétation et de cette pratique à la règle 19 du règlement d’exécution de 2005.

50      Il ressortirait en effet des arrêts du Tribunal du 20 avril 2005, Atomic Austria/OHMI – Fabricas Agrupadas de Muñecas de Onil (ATOMIC BLITZ) (T‑318/03, Rec. p. II-1319), et du 13 septembre 2006, MIP Metro/OHMI – Tesco Stores (METRO) (T-191/04, Rec. p. II-2855), que le Tribunal considérait, à l’instar de l’OHMI, que, lorsqu’il lui est demandé de fournir les faits, preuves et observations à l’appui de son opposition, l’opposant avait l’obligation d’y donner suite dans le délai imparti par l’OHMI et que cette obligation s’étendait à la preuve du renouvellement de la marque antérieure lorsque celle-ci avait entre temps été renouvelée, pour autant que cette preuve ne ressortait d’aucun des documents fournis avec l’acte d’opposition.

51      La pratique constante de l’OHMI consistant à demander que soit fournie en temps utile la preuve du renouvellement aurait conduit à une modification de ses lignes directrices, puis à une codification à la règle 19, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement d’exécution de 2005.

52      Dans ces conditions, en ne reconnaissant pas l’obligation qu’avait Budvar de fournir le certificat de renouvellement de la marque R 238 203 à la date à laquelle les faits, preuves et observations à l’appui de l’opposition devaient être présentés, à savoir le 26 février 2002, le Tribunal serait parvenu à la conclusion erronée selon laquelle la chambre de recours était libre d’apprécier si ce certificat, présenté tardivement, devait ou non être pris en compte.

53      L’OHMI rétorque que les conclusions du Tribunal sont fondées en droit dès lors que, si, en vertu des règles 16 et 20 du règlement d’exécution de 1995, lui-même ou une partie à une procédure d’opposition était en droit de demander la preuve du renouvellement d’un droit antérieur venant à échéance au cours de la procédure, cela n’impliquait pas, ainsi que le confirmerait d’ailleurs la jurisprudence du Tribunal invoquée par Anheuser-Busch, que le titulaire de ce droit antérieur avait l’obligation de fournir d’office le certificat de renouvellement.

54      L’OHMI rappelle, en outre, que le délai initialement imparti par la division d’opposition pour la production des preuves à l’appui de l’opposition, formée le 28 septembre 1999, était le 24 juin 2000 et que la marque R 238 203 ne devait être renouvelée que le 5 décembre 2000 au plus tard. Or, aucune disposition du règlement d’exécution de 1995 n’exigerait la preuve d’un événement futur, en l’occurrence la preuve dudit renouvellement. Si le délai initialement fixé a par la suite été prorogé jusqu’au 26 février 2002, la division d’opposition n’aurait pas explicitement demandé que la preuve de renouvellement fût fournie dans ce délai.

55      Budvar relève que son acte d’opposition était accompagné d’annexes constituées de pièces justificatives détaillées et d’un certain nombre de preuves parmi lesquelles figurait le certificat d’enregistrement de la marque R 238 203 établissant la validité de cette marque à la date du dépôt de l’acte d’opposition. Elle aurait ainsi respecté son obligation de «fournir les faits, preuves et observations à l’appui de son opposition» et n’aurait pas eu l’obligation de présenter, après la date du dépôt de l’acte d’opposition, le certificat de renouvellement.

 Appréciation de la Cour

56      Par son premier moyen, Anheuser-Busch soutient en substance que, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal au point 79 de l’arrêt attaqué, il découle d’une lecture combinée de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 ainsi que des règles 16, paragraphes 1 et 3, et 20, paragraphe 2, du règlement d’exécution de 1995 que l’opposant doit fournir d’office la preuve du renouvellement de la marque antérieure dont il est titulaire, invoquée au titre de l’article 8, paragraphe 1, du règlement nº 40/94, avec les autres faits, preuves et observations présentés à l’appui de l’opposition dans le délai imparti par l’OHMI en vertu de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, dans le cas où un tel renouvellement interviendrait après la date du dépôt de l’acte d’opposition, mais avant le terme dudit délai.

57      À cet égard, il convient de constater que, ainsi qu’il a été jugé par le Tribunal, ni l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 ni les règles 16, paragraphes 1 et 3, et 20, paragraphe 2, du règlement d’exécution de 1995 ne précisent quels sont les faits, preuves et observations qui doivent être présentés à l’appui de l’opposition dans le délai imparti en vertu de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94.

58      En particulier, lesdites dispositions ne comportent aucune indication en ce sens que l’opposant devrait fournir d’office et dans ledit délai la preuve du renouvellement de la marque antérieure invoquée dans le cas où ce renouvellement doit intervenir après le dépôt de l’acte d’opposition.

59      En outre et en tout état de cause, contrairement à ce que soutient Anheuser-Busch, une telle interprétation ne ressort ni de la jurisprudence du Tribunal, en particulier des arrêts précités Atomic Austria/OHMI – Fabricas Agrupadas de Muñecas de Onil (ATOMIC BLITZ) et MIP Metro/OHMI – Tesco Stores (METRO), ni d’une pratique constante de l’OHMI avant l’adoption du règlement d’exécution de 2005.

60      Dans les litiges ayant donné lieu à ces deux arrêts du Tribunal, l’OHMI avait demandé de manière explicite que l’opposant produise la preuve du renouvellement des marques antérieures dans le délai imparti en vertu de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 dans le cas où ce renouvellement devrait avoir lieu avant l’expiration dudit délai. Dans ces litiges, la question n’était donc pas de savoir s’il incombait à l’opposant de produire d’office une telle preuve. Cette question se pose en revanche dans le présent litige dès lors qu’il est constant que, en l’espèce, l’OHMI n’a pas expressément invité l’opposant à fournir une telle preuve.

61      En outre, dans l’arrêt Atomic Austria/OHMI – Fabricas Agrupadas de Muñecas de Onil (ATOMIC BLITZ), précité, le Tribunal a jugé que, même en présence d’une demande expresse de production de la preuve de renouvellement de la marque antérieure au titre de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, l’OHMI ne pouvait rejeter l’opposition en raison de l’absence de production d’une telle preuve.

62      Au point 40 de l’arrêt Atomic Austria/OHMI – Fabricas Agrupadas de Muñecas de Onil (ATOMIC BLITZ), précité, le Tribunal a en effet jugé que l’opposant est libre du choix de la preuve qu’il juge utile de présenter à l’OHMI pour appuyer son opposition et que ce dernier est tenu d’analyser tous les éléments présentés pour conclure s’ils sont effectivement une preuve de l’enregistrement ou du dépôt de la marque antérieure, sans pouvoir d’emblée refuser un type donné de preuve comme inacceptable en raison de sa forme. En outre, au point 46 du même arrêt, le Tribunal a considéré que les extraits du registre des marques accompagnant l’acte d’opposition permettaient, d’une part, de déterminer la date d’expiration de la protection des marques antérieures et, d’autre part, de conclure que quatre des cinq marques antérieures étaient valides à la date à laquelle la chambre de recours a rendu sa décision.

63      Au point 46 de l’arrêt MIP Metro/OHMI – Tesco Stores (METRO), précité, le Tribunal a jugé que, en l’absence de production par l’opposant de la preuve du renouvellement de la marque antérieure, demandée en vertu de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 par l’OHMI, celui-ci avait commis une double erreur de droit en considérant, d’une part, que l’expiration de la validité de la marque antérieure avant le moment où la division d’opposition statue sur l’opposition ne peut pas être prise en compte par celle-ci et, d’autre part, que la division d’opposition n’a pas le pouvoir de demander des renseignements sur le renouvellement de la marque antérieure après le dépôt initial des preuves.

64      Contrairement à ce que soutient Anheuser-Busch et en tout état de cause, il n’apparaît pas non plus que, avant l’adoption du règlement d’exécution de 2005, la pratique constante de l’OHMI était établie en ce sens que l’opposant devait fournir d’office la preuve du renouvellement de la marque antérieure avec les autres faits, preuves et observations devant être présentés à l’appui de l’opposition dans le délai imparti à cet effet par l’OHMI en vertu de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94.

65      À cet égard, il y a lieu de constater que, dans la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 9 juillet 2003 en cause dans le litige ayant abouti à l’arrêt Atomic Austria/OHMI – Fabricas Agrupadas de Muñecas de Onil (ATOMIC BLITZ), précité, cette chambre avait rejeté l’opposition en raison de l’absence de production, dans le délai imparti, de la preuve du renouvellement des marques antérieures, tout en observant qu’une telle preuve avait été demandée d’une manière claire et non équivoque dans une note accompagnant la lettre de l’OHMI adressée à l’opposant au titre de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94.

66      En revanche, dans la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 23 mai 2004 en cause dans le litige ayant donné lieu à l’arrêt MIP Metro/OHMI – Tesco Stores (METRO), précité, ladite chambre a fait droit au recours contre une décision de la division d’opposition ayant rejeté l’opposition au motif que, bien qu’ayant été invité à produire la preuve du renouvellement de la marque antérieure, l’opposant avait omis de fournir cette preuve. La chambre de recours a considéré que, à la date du dépôt de l’opposition et même à la date à laquelle les preuves avaient été demandées, le droit antérieur était toujours valable et que, dès lors, l’opposant n’avait pas à prouver le renouvellement de l’enregistrement de la marque dont il était titulaire.

67      Il en découle également que, contrairement à ce que soutient Anheuser-Busch, il n’apparaît pas non plus que les dispositions de la règle 19, paragraphes 2 et 4, du règlement d’exécution de 2005 puissent être prises en compte en l’espèce au motif qu’elles ne constitueraient qu’une simple codification de l’interprétation consacrée par le Tribunal à partir d’une pratique constante de l’OHMI de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 et des règles 16, paragraphes 1 et 3, et 20, paragraphe 2, du règlement d’exécution de 1995.

68      En tout état de cause, si lesdites dispositions du règlement d’exécution de 2005 prévoient désormais, dans certaines limites, une obligation explicite pour l’opposant de produire la preuve du renouvellement de la marque antérieure dans le délai visé à l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, elles comportent ainsi sur ce point une précision de la règle générale prévue par cette dernière disposition visant à renforcer la sécurité juridique des opérateurs engagés dans des procédures d’opposition devant l’OHMI. Dans ces circonstances, ainsi que l’a jugé à bon droit le Tribunal au point 76 de l’arrêt attaqué, les nouvelles règles établies par ledit règlement d’exécution ne sauraient être appliquées de manière rétroactive dans le présent litige.

69      Dès lors, il y a lieu de conclure que c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a jugé, au point 79 de l’arrêt attaqué, en se référant d’ailleurs au point 41 de l’arrêt MIP Metro/OHMI – Tesco Stores (METRO), précité, qu’il résulte d’une lecture combinée des règles 16 et 20 du règlement d’exécution de 1995 que, d’une part, l’OHMI est en droit de demander la preuve du renouvellement de la marque antérieure lorsque celle-ci arrive à expiration après la date du dépôt de l’acte d’opposition et que, d’autre part, il ne découle pas de ces mêmes dispositions que l’opposant a l’obligation de produire d’office une telle preuve.

70      Il convient d’ajouter, comme l’a d’ailleurs jugé le Tribunal aux points 41 et 46 de l’arrêt MIP Metro/OHMI – Tesco Stores (METRO), précité, que le pouvoir ainsi conféré à l’OHMI de demander la preuve du renouvellement de la marque antérieure peut également être fondé sur l’article 76 du règlement n° 40/94.

71      Il s’ensuit que le premier moyen du pourvoi doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 74, paragraphe 2, du règlement n° 40/94

 Argumentation des parties

72      Par son deuxième moyen, Anheuser-Busch fait grief au Tribunal d’avoir jugé que la chambre de recours pouvait prendre en compte le certificat de renouvellement sans être tenue d’exercer le pouvoir d’appréciation que lui confère l’article 74, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 et consacré par l’arrêt du 13 mars 2007, OHMI/Kaul (C‑29/05 P, Rec. p. I‑2213, point 43).

73      En considérant que le certificat de renouvellement avait été fourni dans le délai imparti et que l’article 74, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 ne s’appliquait pas, le Tribunal aurait violé non seulement les règles de procédure relatives à la présentation des preuves dans les délais impartis dans le cadre des procédures d’opposition devant l’OHMI, grief examiné dans le cadre du premier moyen, mais également ledit article 74, paragraphe 2, lui-même.

74      L’OHMI fait valoir que, dès lors que Budvar n’était tenue par aucun délai spécifique pour la présentation de la preuve du renouvellement de l’enregistrement de la marque R 238 203, l’article 74, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 n’était pas applicable aux circonstances de l’espèce et la chambre de recours ne devait donc pas exercer le pouvoir d’appréciation y prévu.

75      Budvar soutient que, l’opposant n’ayant pas l’obligation de fournir le certificat de renouvellement dans un quelconque délai, il n’y a pas eu de «dépôt tardif» dans le cas d’espèce. Avant de statuer sur l’opposition, l’OHMI devrait examiner d’office si les droits invoqués à l’appui de l’opposition sont valides. Le moment auquel l’opposant a remis le certificat de renouvellement de la marque antérieure dont il est titulaire ou la question de savoir s’il l’a effectivement remis n’auraient pas d’importance.

 Appréciation de la Cour

76      Par son deuxième moyen, Anheuser-Busch fait grief au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en jugeant, au point 71 de l’arrêt attaqué, qu’aucune violation de l’article 74, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 ne saurait être retenue à l’encontre de la décision litigieuse, s’agissant de la prise en compte du certificat de renouvellement.

77      Dès lors que, selon Anheuser-Busch, ledit certificat n’a pas été produit dans le délai imparti par l’OHMI en vertu de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, il s’agirait d’une preuve qui n’a pas été produite en temps utile au sens de l’article 74, paragraphe 2, dudit règlement. Par conséquent, l’OHMI aurait pu n’en tenir compte qu’en exerçant le pouvoir d’écarter les preuves présentées tardivement que lui confère à cet effet cette même disposition. Or, en l’espèce, l’OHMI n’aurait pas exercé ce pouvoir dès lors qu’il aurait estimé à tort que la preuve avait été fournie en temps utile.

78      À cet égard, il convient de rappeler qu’il découle du point 69 du présent arrêt que c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a considéré que, en l’espèce, l’opposant n’était pas tenu de produire la preuve du renouvellement de la marque R 238 203 dans le délai imparti en vertu de l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 40/94.

79      Dès lors que le certificat de renouvellement avait été produit en temps utile, le Tribunal a jugé à bon droit qu’il n’y avait pas lieu pour l’OHMI de faire application du pouvoir qui lui est conféré par ledit article 74, paragraphe 2, afin de prendre en compte cette preuve.

80      En conséquence, le deuxième moyen du pourvoi doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n°40/94

 Argumentation des parties

81      Par son troisième moyen, Anheuser-Busch fait valoir que le Tribunal a violé l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 40/94 en jugeant que les preuves de l’usage de la marque R 238 203 fournies par Budvar à l’appui de son opposition étaient suffisantes.

82      La preuve de l’usage fournie par Budvar ne démontrerait dans sa presque totalité que l’usage d’une autre marque, à savoir la marque n° 674 530, comprenant, sous une forme stylisée, les termes «Budweiser Budvar». Or, cette dernière marque n’aurait pas été prise en compte par la chambre de recours ni par le Tribunal dès lors qu’elle ne constitue pas un droit antérieur par rapport à la marque dont l’enregistrement est demandé.

83      Il découlerait cependant des points 81 à 86 de l’arrêt du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI (C-234/06 P, Rec. p. I-7333), que la preuve de l’usage d’une marque enregistrée ne peut constituer en même temps la preuve de l’usage d’une autre marque enregistrée. Le Tribunal aurait dû examiner l’applicabilité de ce principe dans le cas d’espèce.

84      Anheuser-Busch estime que le Tribunal aurait dû procéder à cet examen dès lors qu’elle avait soutenu que les documents fournis en tant que preuves d’usage par Budvar ne satisfaisaient pas aux critères prévus par l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 40/94 et qu’elle avait mis en cause ces preuves pour ce qui concerne, en particulier, la nature de l’usage fait de la marque, à savoir la manière dont celle-ci apparaissait sur les produits mêmes.

85      Ce serait donc à tort que le Tribunal a considéré, au point 112 de l’arrêt attaqué, qu’Anheuser-Busch n’avait pas contesté le fait que les documents en cause avaient trait à l’usage de la marque R 238 203.

86      L’OHMI soutient tout d’abord que le troisième moyen du pourvoi est irrecevable à un double titre.

87      En premier lieu, il s’agirait d’un moyen nouveau modifiant l’objet du litige tel que présenté devant le Tribunal, alors que la présentation d’un tel moyen nouveau serait interdite par les articles 113, paragraphe 2, et 116, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, le contrôle de celle-ci se limitant aux réponses faites par le Tribunal aux moyens invoqués devant ce dernier.

88      Cela serait d’autant plus vrai que l’arrêt du Tribunal ayant fait l’objet du pourvoi qui a donné lieu à l’arrêt Il Ponte Finanziaria/OHMI, précité, était déjà intervenu lors du dépôt de la requête d’Anheuser-Busch devant le Tribunal, de sorte que rien n’empêchait cette dernière de présenter un moyen en ce sens dans cette requête.

89      En second lieu, il découlerait de l’arrêt attaqué que le Tribunal a pris le soin d’indiquer que les preuves présentées par Budvar attestent l’usage du terme «budweiser» «sous diverses formes». En revanche, le Tribunal n’aurait, à aucun moment, suggéré que l’usage de la marque R 238 203 aurait été établi sur le fondement de preuves d’usage concernant la marque n° 674 530. S’il avait procédé ainsi, le Tribunal aurait d’ailleurs évoqué l’application en l’espèce de l’article 15, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 40/94.

90      La conclusion tirée par le Tribunal des preuves produites par Budvar, à savoir que celles-ci confirment l’usage sérieux de la marque R 238 203, y compris sous la forme d’un mot, constituerait d’ailleurs une constatation de fait qui échappe au contrôle de la Cour.

91      Ensuite, à supposer même que ledit moyen soit recevable, l’OHMI fait valoir qu’il n’est en tout état de cause pas fondé, car il repose sur une dénaturation des faits.

92      Enfin, le principe consacré par la Cour dans l’arrêt Il Ponte Finanziaria/OHMI, précité, ne pourrait s’appliquer dans le cas d’espèce, les circonstances de celui-ci excluant toute analogie. Ce principe ne s’appliquerait que si deux marques différentes sont valablement invoquées par l’opposant et toutes deux soumises à l’exigence de la preuve de l’usage. Ce ne serait que dans un tel cas qu’existerait le risque que la preuve de l’usage d’une marque puisse servir à contourner le rejet de l’autre marque dans le cadre de l’opposition.

93      Toutefois, cela ne serait pas le cas dans le présent litige, car la marque n° 674 530, comprenant, sous une forme stylisée, les termes «Budweiser Budvar» dès lors qu’elle ne constitue pas un droit antérieur, ne pourrait être invoquée dans une procédure d’opposition.

94      Budvar soutient que tant l’OHMI que le Tribunal ont confirmé que les preuves qu’elle avait produites établissaient clairement la nature de l’usage de la marque, à savoir un usage pour de la bière.

95      Budvar fait valoir qu’elle a fourni des documents prouvant l’usage de la marque R 238 203, car cette marque apparaît à tout le moins sur les produits pertinents, à savoir de la bière, dont les publicités ont été fournies par elle. Ces faits auraient clairement été pris en compte aux points 110 à 115 de l’arrêt attaqué.

96      En outre, il serait exclu de se référer en l’espèce à l’arrêt Il Ponte Finanziaria/OHMI, précité, dès lors que celui-ci portait sur la question de savoir si la preuve de l’usage d’une marque peut servir de preuve de l’usage d’une autre marque alors que, dans le présent litige, la preuve de l’usage sérieux de la marque R 238 203 a bien été fournie par l’opposant au moyen de la production de divers documents démontrant l’usage du terme «budweiser» en relation avec de la bière.

 Appréciation de la Cour

97      Par son troisième moyen, Anheuser-Busch reproche essentiellement au Tribunal de ne pas avoir annulé la décision litigieuse au motif que, au vu des conditions prescrites à l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 40/94, les documents produits par Budvar étaient insuffisants pour démontrer l’usage sérieux de la marque R 238 203.

98      L’arrêt attaqué serait sur ce point entaché d’une erreur de droit dès lors que les documents en cause démontreraient essentiellement l’usage d’une autre marque, à savoir la marque n° 674 530, laquelle n’a toutefois pas été prise en considération par la chambre de recours dès lors qu’elle ne constitue pas une marque antérieure au sens de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 40/94. Or, il découlerait de l’arrêt Il Ponte Finanziaria/OHMI, précité, et en particulier du point 86 de celui-ci, que la preuve de l’usage d’une marque enregistrée ne peut constituer en même temps la preuve de l’usage d’une autre marque enregistrée au motif que cette dernière ne serait qu’une légère variante de la première.

99      Toutefois, ainsi que le fait valoir à bon droit l’OHMI, Anheuser-Busch soulève un moyen qui ne fait pas partie du recours introduit devant le Tribunal à l’encontre de la décision litigieuse.

100    Il s’agit, dès lors, d’un moyen nouveau qui étend l’objet du litige et qui, de ce fait, ne saurait être articulé pour la première fois au stade du pourvoi (voir, notamment, arrêt du 18 décembre 2008, Les Éditions Albert René/OHMI, C-16/06 P, Rec. p. I-10053, point 125).

101    En effet, il y a lieu de relever que, aux points 110 et 112 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté qu’Anheuser-Busch n’avait pas contesté le fait que les documents en cause avaient trait à l’usage de la marque R 238 203. Au point 114 dudit arrêt, le Tribunal a indiqué qu’Anheuser-Busch a soutenu devant lui que la chambre de recours aurait dû s’appuyer sur d’autres considérations, comme la nature de l’usage de cette marque en Allemagne et en Autriche.

102    Il en découle que le Tribunal a considéré que l’objet du litige dont il était saisi concernait uniquement la question de savoir si les documents en cause étaient suffisants pour établir l’usage sérieux de la marque R 238 203, en particulier quant à la nature de l’usage de celle-ci, et ne portait pas sur la question de savoir si ces documents avaient trait à l’usage de cette marque ou à celle d’une autre marque également invoquée par l’opposant, mais écartée par l’OHMI au cours de la procédure d’opposition.

103    Partant, le Tribunal s’est limité, au point 114 de l’arrêt attaqué, à répondre aux arguments soulevés devant lui concernant la première question et n’a pas traité la seconde question qui, au demeurant, n’a pas été débattue devant lui.

104    Devant la Cour, Anheuser-Busch fait cependant valoir que cette dernière question est couverte par sa requête devant le Tribunal, en particulier par son troisième moyen.

105    Toutefois, il résulte du libellé même des points 110, 112 et 114 de l’arrêt attaqué que le Tribunal n’a aucunement méconnu la portée de ce moyen.

106    En outre, l’argumentation selon laquelle les preuves fournies par Budvar concerneraient l’usage d’une marque autre que celle qui seule a été prise en considération par la chambre de recours ne présente pas un lien suffisant avec le troisième moyen invoqué devant le Tribunal, tiré de ce que ces preuves ne remplissaient pas les conditions requises pour que la marque antérieure en cause soit considérée comme ayant fait l’objet d’un usage sérieux et, partant, une telle argumentation ne saurait être regardée comme un simple développement du troisième moyen.

107    Cette argumentation concerne en effet les points 81 à 86 de l’arrêt Il Ponte Finanziaria/OHMI, précité, qui portent sur un moyen tiré de l’article 15, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 40/94, alors que le troisième moyen invoqué par Anheuser-Busch devant le Tribunal est tiré de l’article 43, paragraphes 2 et 3, dudit règlement.

108    En tout état de cause, l’objet de cette argumentation est différent de celui du troisième moyen du recours en annulation, dès lors qu’il vise non pas à contester la réalité de l’exploitation commerciale de la marque antérieure, mais la question de savoir si des preuves se rattachent à une marque plutôt qu’à une autre.

109    Il y a donc lieu d’écarter le troisième moyen du pourvoi comme irrecevable.

110    Il résulte de ce qui précède qu’aucun des trois moyens invoqués par Anheuser-Busch au soutien de son pourvoi ne saurait être accueilli et, partant, celui-ci doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

111    Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’OHMI et Budvar ayant conclu à la condamnation d’Anheuser-Busch et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) déclare et arrête:

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      Anheuser-Busch Inc. est condamnée aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure: l’anglais.