Language of document : ECLI:EU:T:2020:442

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

23 septembre 2020 (*)

« Fonction publique – Recrutement – Avis de concours – Décision de ne pas inscrire le nom de la requérante sur la liste de réserve du concours – Obligation de motivation – Rejet de la demande d’accès aux questions à choix multiple posées dans les tests d’accès – Secret des travaux du jury »

Dans l’affaire T‑596/18,

ZL, représentée par Me H. Tettenborn, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme A. Lukošiūtė et M. K. Tóth, en qualité d’agents, assistés de Me B. Wägenbaur, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant à l’annulation, premièrement, de la décision du jury du concours EUIPO/AD/01/17 – Administrateurs (AD 6) dans le domaine de la propriété intellectuelle du 7 mars 2018 rejetant la demande de la requérante concernant le réexamen de la décision de ce même jury du 1er décembre 2017 de ne pas inscrire son nom sur la liste de réserve constituée en vue du recrutement d’administrateurs par l’EUIPO et, deuxièmement, de la décision de l’EUIPO du 27 juin 2018 rejetant ses réclamations,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. S. Gervasoni, président, P. Nihoul (rapporteur) et J. Martín y Pérez de Nanclares, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 12 janvier 2017, l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) a publié au Journal officiel de l’Union européenne l’avis de concours général EUIPO/AD/01/17 – Administrateurs (AD 6) dans le domaine de la propriété intellectuelle (JO 2017, C 9 A, p. 1, ci-après l’« avis de concours »). Ce concours, organisé par l’EPSO, visait la constitution d’une liste de réserve en vue du recrutement d’administrateurs par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO).

2        L’avis de concours indiquait, sous le titre « Comment serai-je sélectionné ? », que les candidats remplissant les conditions d’admission et ayant obtenu une des meilleures notes lors de la présélection sur titres seraient invités au centre d’évaluation de l’EPSO où ils seraient évalués, par le biais d’une série de tests de type « questions à choix multiple », sur leurs aptitudes en matière de raisonnement verbal, numérique et abstrait et, par le biais de deux entretiens, d’un exercice de bac à courrier, d’un exercice de groupe et d’un test écrit, sur leurs compétences spécifiques dans le domaine du concours ainsi que sur huit compétences générales, à savoir l’analyse et la résolution de problèmes, la communication, la qualité et les résultats, l’apprentissage et le développement, la hiérarchisation des priorités et l’organisation, la résilience, le travail d’équipe et les capacités d’encadrement.

3        L’avis de concours indiquait également que le test de raisonnement verbal, de type « questions à choix multiple », était organisé dans la langue choisie comme « langue 1 » par le candidat, se composait de 20 questions et durait 35 minutes. Il était précisé que ce test était éliminatoire et que la note minimale requise était de 10 sur 20.

4        S’agissant des possibilités de plaintes, l’avis de concours indiquait notamment, en son annexe III prévoyant les « dispositions générales applicables aux concours généraux », sous le point 6.3 intitulé « Erreurs dans les tests de type “questionnaire à choix multiple” (QCM) sur ordinateur », ce qui suit :

« La base de données QCM est soumise en permanence à un contrôle de qualité minutieux effectué par [l’]EPSO et les jurys.

Si vous estimez qu’en raison d’une erreur dans une ou plusieurs questions à choix multiple, il vous a été impossible ou difficile de répondre correctement, vous pouvez demander le réexamen par le jury de la ou des questions concernées (dans le cadre de la procédure de “neutralisation”).

Le jury peut décider d’annuler la question contenant l’erreur et de redistribuer les points entre les questions restantes du test. Ce nouveau calcul ne concernera que les candidats qui auront dû répondre à cette question. La notation des tests reste telle qu’indiquée dans l’avis de concours.

Les modalités de réclamation sont les suivantes :

–        procédure : veuillez contacter [l’]EPSO […] uniquement au moyen du formulaire de contact en ligne,

–        délai : dans les 10 jours de calendrier à compter de la date des tests sur ordinateur,

–        référence : “Réclamations”,

–        informations supplémentaires : décrire le sujet (contenu) de la question afin d’identifier la (les) question(s) concernée(s), et expliquer la nature de l’erreur alléguée le plus clairement possible.

Les réclamations se limitant, par exemple, à relever de prétendus problèmes de traduction sans apporter d’autres précisions ne seront pas admises.

Les demandes introduites hors délai, ou qui ne décrivent pas clairement la (les) question(s) contestée(s) et prétendument erronée(s) ne seront pas prises en compte. »

5        La requérante, ZL, s’est portée candidate au concours litigieux et a été informée par l’EPSO, le 12 juillet 2017, qu’elle était invitée au centre d’évaluation. Elle a passé les épreuves du centre d’évaluation les 18 et 19 septembre 2017 à Bruxelles (Belgique). Il s’agissait d’un test de raisonnement verbal, numérique et abstrait de type « questions à choix multiple » dans la première langue choisie par la requérante, à savoir l’espagnol, et d’une autre série de tests décrits au point 2 ci-dessus dans la seconde langue choisie par la requérante, à savoir l’anglais.

6        Le 1er décembre 2017, l’EPSO a informé la requérante que le jury avait décidé de ne pas inscrire son nom sur la liste de réserve des lauréats du concours (ci-après la « décision initiale du jury »). Le jury a motivé sa décision en indiquant que la requérante, ayant obtenu une note de 9 sur 20 au test de raisonnement verbal, n’avait pas atteint la note minimale requise de 10 sur 20. En annexe était joint un tableau indiquant, pour chacune des 20 questions de ce test, la réponse donnée par la requérante, identifiée par une lettre, la réponse correcte, également identifiée par une lettre, et le temps consacré à cette question, mesuré en secondes. Il ressort de ce tableau que la requérante a répondu erronément à onze questions, à savoir celles portant les numéros 1 à 5, 7, 8, 10, 15, 17 et 20 (ci-après les « questions litigieuses »). Dans la décision initiale du jury, il était par ailleurs souligné que l’EPSO n’était pas en mesure de communiquer les questions, au motif que celles-ci seraient utilisées dans d’autres concours.

7        Le 10 décembre 2017, la requérante a formé une demande de réexamen concernant la décision initiale du jury. Dans sa demande, elle a sollicité l’accès aux questions litigieuses.

8        Le 28 février 2018, la requérante a introduit auprès de l’autorité investie du pouvoir de nomination de l’EUIPO (ci-après l’« AIPN ») une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») contre la décision initiale du jury. Ce faisant, elle a précisé se réserver le droit d’introduire une réclamation complémentaire si la demande qu’elle avait formulée en vue d’obtenir le réexamen de ladite décision devait être rejetée.

9        Par lettre du 7 mars 2018, l’EPSO a informé la requérante que le jury du concours avait réexaminé son dossier à la suite de sa demande et qu’il avait confirmé sa décision initiale de non-inscription de son nom sur la liste de réserve (ci-après la « décision prise après réexamen »). À cet égard, le jury a relevé que la requérante n’avait pas obtenu la note minimale requise au test de raisonnement verbal. Le jury a également indiqué s’être assuré auprès de l’EPSO, d’une part, qu’aucune erreur n’était survenue dans le système informatique et, d’autre part, que la requérante n’avait pas, en suivant la procédure de neutralisation, demandé le réexamen d’une ou de plusieurs questions au jury. Il a conclu qu’il n’y avait pas eu d’erreur dans le processus de notation, que les résultats communiqués étaient corrects et que la procédure avait été respectée. Enfin, la requérante a été informée qu’elle recevrait une réponse à sa demande d’accès aux questions litigieuses.

10      Par communication électronique du 21 mars 2018, la requérante a demandé à l’EPSO quand et par quel moyen lui seraient transmises les questions litigieuses.

11      Par communication électronique du 22 mars 2018, l’EUIPO a suggéré à la requérante de compléter la réclamation qu’elle avait introduite contre la décision initiale du jury, en prenant en compte la décision prise après réexamen qui lui était parvenue entre-temps, et de diriger cette réclamation, cette fois, contre la décision prise après réexamen.

12      Par communication électronique du 26 avril 2018, l’EPSO a transmis à la requérante une copie de son test écrit et du « texte source ».

13      Par communication électronique du 1er mai 2018, la requérante a précisé qu’elle n’avait pas demandé la copie de son test écrit ainsi que du texte source dans sa demande de réexamen, mais une copie des questions litigieuses, en espagnol et dans la langue originale.

14      Le 7 juin 2018, la requérante a introduit un complément à sa précédente réclamation contre la décision initiale du jury et la décision prise après réexamen. 

15      Par décision du 27 juin 2018, communiquée à la requérante le 28 juin 2018, l’AIPN a rejeté les réclamations de la requérante (ci-après la « décision de rejet des réclamations »).

 Procédure et conclusions des parties

16      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 septembre 2018, la requérante a introduit le présent recours.

17      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision initiale du jury ;

–        à titre subsidiaire, annuler la décision prise après réexamen ;

–        à titre subsidiaire également, annuler la décision de rejet des réclamations ;

–        lui donner accès au texte des questions et réponses litigieuses, en espagnol et dans la langue source ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

18      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur l’objet du recours

19      Avant d’analyser le fond du litige, il convient de déterminer l’objet du recours eu égard aux différents chefs de conclusions soulevés par la requérante.

 Sur les demandes formulées par la requérante, en ce qu’elles visent les décisions prises par le jury

20      Par le premier chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal d’annuler la décision initiale du jury.

21      À cet égard, il y a lieu d’observer que, en vertu du point 6.4 des dispositions générales applicables aux concours généraux qui figure à l’annexe III de l’avis de concours, le candidat peut demander un réexamen de toute décision prise par le jury ou par l’EPSO qui établit ses résultats ou détermine s’il peut passer à l’étape suivante du concours ou s’il en est exclu.

22      La requérante a introduit une demande de réexamen le 10 décembre 2017.

23      Par la décision prise après réexamen, le jury a confirmé sa décision initiale.

24      Par son deuxième chef de conclusions, la requérante demande d’annuler la décision prise après réexamen.

25      Selon la jurisprudence, lorsqu’une personne dont la demande d’admission à un concours a été rejetée sollicite le réexamen de cette décision sur la base d’une disposition précise liant l’administration, c’est la décision prise par le jury, après réexamen, qui constitue l’acte faisant grief, au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut (arrêt du 12 décembre 2018, Colin/Commission, T‑614/16, non publié, EU:T:2018:914, point 26 ; voir également, en ce sens, ordonnance du 3 mars 2017, GX/Commission, T‑556/16, non publiée, EU:T:2017:139, points 21 et 22).

26      La décision prise après réexamen se substitue, ce faisant, à la décision initiale du jury (voir arrêt du 16 mai 2019, Nerantzaki/Commission, T‑813/17, non publié, EU:T:2019:335, point 25 et jurisprudence citée).

27      Il s’ensuit qu’il y a lieu de considérer que les premier et deuxième chefs de conclusions tendent à l’annulation de la décision prise après réexamen, qui constitue l’acte faisant grief en l’espèce (ci-après la « décision attaquée »).

 Sur la demande formulée par la requérante, en ce qui concerne la décision de rejet des réclamations

28      Par le troisième chef de conclusions, la requérante demande, à titre subsidiaire, l’annulation de la décision de rejet des réclamations.

29      À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, le recours, même formellement dirigé contre le rejet de la réclamation, a pour effet de saisir le juge de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée, sauf dans l’hypothèse où le rejet de la réclamation a une portée différente de celle de l’acte contre lequel cette réclamation a été formée (arrêt du 21 mai 2014, Mocová/Commission, T‑347/12 P, EU:T:2014:268, point 34).

30      En outre, compte tenu de ce que la procédure précontentieuse présente un caractère évolutif, une décision explicite de rejet de la réclamation qui ne contient que des précisions complémentaires et se borne ainsi à révéler, de manière détaillée, les motifs de la confirmation de la décision antérieure ne constitue pas un acte faisant grief (voir, en ce sens, arrêt du 7 juin 2005, Cavallaro/Commission, T‑375/02, EU:T:2005:199, points 65 et 66).

31      Néanmoins, ce caractère évolutif de la procédure précontentieuse implique que ces précisions complémentaires soient prises en considération pour apprécier la légalité de l’acte attaqué (arrêt du 12 décembre 2018, Colin/Commission, T‑614/16, non publié, EU:T:2018:914, point 29).

32      À cet égard, il convient de relever que, d’une part, la décision de rejet des réclamations a confirmé la décision prise après réexamen au motif, figurant déjà dans cette décision, que la requérante n’avait pas obtenu la note minimale requise de 10 sur 20 au test de raisonnement verbal. En tant qu’elle comporte cet objet, ladite décision a une portée confirmative et, étant dépourvue de contenu autonome, ne doit pas être examinée, dans le cadre du troisième chef de conclusions, séparément de la décision prise après réexamen.

33      D’autre part, la décision de rejet des réclamations a rejeté, pour la première fois, la demande d’accès aux questions litigieuses. Sur ce plan, elle a un contenu autonome et, ne pouvant être considérée comme étant confirmative, elle doit être examinée de manière spécifique en réponse au troisième chef de conclusions.

 Sur la demande d’accès à certains documents

34      Par le quatrième chef de conclusions, la requérante demande l’accès à la copie du texte des questions et réponses litigieuses en espagnol et en langue originale.

35      En l’espèce, cette demande peut être comprise de deux manières distinctes. Ainsi, elle peut être interprétée comme tendant à ce que le Tribunal adresse à l’EUIPO l’injonction de produire les questions litigieuses. Pour autant qu’il pourrait contenir une telle demande d’injonction, le quatrième chef de conclusions devrait être considéré comme irrecevable. En effet, selon la jurisprudence, le Tribunal n’est pas compétent pour adresser des injonctions à l’administration. Conformément à l’article 266 TFUE, il incombe à l’administration dont émane un acte annulé de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt prononçant l’annulation (voir, en ce sens, arrêt du 1er septembre 2010, Skareby/Commission, T‑91/09 P, EU:T:2010:338, point 70, et ordonnance du 13 septembre 2018, WH/EUIPO, T‑819/17, non publiée, EU:T:2018:566, point 22).

36      Par ailleurs, le quatrième chef de conclusions pourrait être compris également comme tendant non au prononcé d’une injonction, mais à obtenir une mesure d’organisation de la procédure. Aux termes des articles 89 et suivants du règlement de procédure du Tribunal, une telle mesure peut être adoptée par ce dernier, qui est compétent à cet égard. Ainsi, le quatrième chef de conclusions devra être examiné, sans pouvoir être déclaré irrecevable, pour autant qu’il pourrait comporter une demande de cette nature.

 Sur le fond

37      À l’appui de son recours, la requérante soulève quatre moyens, tirés respectivement :

–        d’une violation de l’obligation de motivation, des principes de sécurité juridique et de transparence, et des droits de la défense ;

–        d’une violation des droits de la défense, du principe de bonne administration et du droit d’accès aux documents ;

–        d’illégalités commises dans la procédure de concours ;

–        de l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation ayant entaché la procédure de concours.

38      Le Tribunal estime opportun de commencer l’examen par le deuxième moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense, du principe de bonne administration et du droit d’accès aux documents 

39      Dans le cadre du deuxième moyen, la requérante soutient qu’un accès aurait dû lui être accordé aux questions à choix multiple qui lui ont été posées lors du test de raisonnement verbal.

–       Sur le premier grief, concernant le refus de communiquer les questions posées lors du test de raisonnement verbal

40      Dans le cadre du premier grief, la requérante fait valoir que le droit de l’Union européenne lui confère le droit d’accéder aux questions à choix multiple qui lui ont été posées lors du test de raisonnement verbal du concours auquel elle a participé, et que ce droit a été violé lorsque l’accès demandé lui a été refusé.

41      À cet égard, il convient de rappeler que le droit, pour le public, d’accéder aux documents des institutions et des organes de l’Union est énoncé à l’article 15, paragraphe 3, TFUE et consacré par l’article 42 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

42      Selon l’article 15, paragraphe 3, TFUE, les principes généraux et les limites qui, pour des raisons d’intérêt public ou privé, régissent l’exercice de ce droit d’accès sont fixés par voie de règlements par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne, statuant conformément à la procédure législative ordinaire.

43      En application de cette disposition, le règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), a été adopté pour, d’une part, conférer au public un droit d’accès le plus large possible aux documents des institutions et, d’autre part, organiser les situations dans lesquelles des limites doivent être imposées en raison, notamment, de la nécessité de protéger les consultations et délibérés internes des institutions (voir, en ce sens, arrêt du 12 novembre 2015, Alexandrou/Commission, T‑515/14 P et T‑516/14 P, EU:T:2015:844, point 73).

44      En l’occurrence, le régime gouvernant ces limites est défini à l’article 4 du règlement no 1049/2001 et est fondé, en substance, sur un équilibre entre, d’une part, les intérêts qui seraient favorisés par la divulgation des documents concernés et, d’autre part, ceux qui seraient menacés par une telle divulgation (voir, en ce sens, arrêt du 12 novembre 2015, Alexandrou/Commission, T‑515/14 P et T‑516/14 P, EU:T:2015:844, point 75).

45      En application de l’article 4, paragraphe 3, second alinéa, du règlement n° 1049/2001, la jurisprudence considère que les questions posées par les jurys dans le cadre des concours organisés par l’EPSO doivent être protégées en tant que documents internes relevant de l’exception relative à la protection du processus décisionnel (voir, en ce sens, arrêt du 12 novembre 2015, Alexandrou/Commission, T‑515/14 P et T‑516/14 P, EU:T:2015:844, point 86).

46      Dans ce cadre, l’administration est en droit de présumer, sans procéder à un examen concret et individuel des documents auxquels l’accès est demandé, que la divulgation de questions porte en principe atteinte, de manière grave, à son processus décisionnel (voir, en ce sens, arrêt du 12 novembre 2015, Alexandrou/Commission, T‑515/14 P et T‑516/14 P, EU:T:2015:844, point 94).

47      Les travaux des jurys institués pour les procédures de concours doivent en effet demeurer secrets de manière à garantir l’indépendance de ces organes et l’objectivité de leurs travaux en les mettant à l’abri de toutes ingérences ou pressions extérieures pouvant venir de l’administration, des candidats intéressés ou de tiers (voir, en ce sens, arrêts du 28 février 1980, Bonu/Conseil, 89/79, EU:C:1980:60, point 5, et du 12 novembre 2015, Alexandrou/Commission, T‑515/14 P et T‑516/14 P, EU:T:2015:844, point 80).

48      En ce sens, l’annexe III du statut, qui concerne l’organisation des concours, dispose, en son article 6 que « [l]es travaux du jury sont secrets ».

49      Dans ce contexte, le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne a considéré que, en l’absence de circonstances particulières, une administration organisant des épreuves de recrutement sous la forme de questions à choix multiple pouvait se limiter à communiquer aux candidats ayant échoué à ces épreuves, d’une part, la proportion, en pourcentage, des réponses correctes et, d’autre part, sur demande, la réponse qu’il convenait de donner à chacune des questions posées (voir, en ce sens, arrêt du 29 juin 2011, Angioi/Commission, F‑7/07, EU:F:2011:97, point 138).

50      Par la suite, le Tribunal a lui-même précisé, sur pourvoi, que, pour informer correctement les candidats, il suffit, en règle générale, de leur communiquer après le test une grille mentionnant, au regard du numéro correspondant à chaque question, la réponse donnée (sous forme de lettre), la réponse correcte (sous forme de lettre également) et le temps consacré par le candidat à répondre à la question (voir, en ce sens, arrêt du 12 novembre 2015, Alexandrou/Commission, T‑515/14 P et T‑516/14 P, EU:T:2015:844, point 84).

51      En l’espèce, il ressort de la décision initiale du jury que les informations mentionnées au point 50 ci-dessus ont été transmises à la requérante et que, par conséquent, la demande d’accès formulée par la requérante a été rejetée à bon droit par la décision de rejet des réclamations.

52      Cette conclusion est critiquée par la requérante, pour qui des questions à choix multiple ne doivent pas être protégées par le secret devant entourer les travaux du jury, car, en raison de leur nature objective, de telles questions ne sauraient comporter en elles-mêmes un jugement ou une appréciation nécessitant une protection.

53      À cet égard, il convient de rappeler que, établi par le législateur lui-même, le secret des travaux du jury fait l’objet, en application de la jurisprudence, d’une présomption permettant aux organes et aux institutions de l’Union de refuser l’accès aux documents qui y sont associés sans devoir procéder à un examen concret par document ou par catégorie de document pour déterminer si une communication porterait atteinte à l’intérêt protégé (voir respectivement point 46 et point 48 ci-dessus).

54      Cette jurisprudence s’intègre dans un ensemble veillant à garantir la protection des candidats par des règles entourant la composition des jurys, pour veiller notamment à la qualité des personnes siégeant au sein de ces derniers, ainsi que le déroulement des procédures, y compris l’établissement de critères de correction communs aux candidats (voir, notamment, arrêts du 10 novembre 2004, Vonier/Commission, T‑165/03, EU:T:2004:331 ; du 29 septembre 2010, Brune/Commission, F‑5/08, EU:F:2010:111 ; du 29 septembre 2010, Honnefelder/Commission, F‑41/08, EU:F:2010:112, et du 12 février 2014, De Mendoza Asensi/Commission, F‑127/11, EU:F:2014:14).

55      Au-delà de ces garanties, la jurisprudence rend possible, à titre exceptionnel, la communication des questions à choix multiple lorsque deux conditions sont satisfaites de manière cumulative :

–        d’une part, la partie requérante doit avoir concrètement contesté, dans sa réclamation, la pertinence de certaines questions ou le bien-fondé de la réponse retenue comme correcte et ;

–        d’autre part, l’écart entre ses résultats et le seuil de réussite doit être tel que, à supposer sa contestation fondée, la partie requérante pourrait se trouver parmi les candidats ayant réussi les épreuves en question (voir, en ce sens, arrêt du 12 novembre 2015, Alexandrou/Commission, T‑515/14 P et T‑516/14 P, EU:T:2015:844, point 98).

56      En l’espèce, il convient de constater, sans qu’il soit nécessaire d’examiner la seconde, que la première de ces conditions n’est pas satisfaite, la requérante s’étant limitée à critiquer les questions d’une manière générique sans identifier de manière concrète en quoi elles pouvaient poser un problème spécifique ni mettre en doute, comme le requiert pourtant la jurisprudence, leur pertinence.

57      Certes, l’avis de concours envisageait aussi la possibilité que des textes sources ou des énoncés d’exercices soient publiés.

58      Cette possibilité se trouvait toutefois soumise, en vertu du point 5.5 de l’annexe III de l’avis de concours, à une exigence qui n’est pas non plus satisfaite en l’espèce, à savoir la condition que les questions concernées ne soient pas destinées à faire l’objet d’une réutilisation lors d’un concours ultérieur.

59      Or, les questions à choix multiple qui sont utilisées lors de concours sont placées dans une base de données à partir de laquelle certaines sont extraites, par ordinateur, de manière aléatoire, en vue d’être posées lors de concours ultérieurs ou, si un concours dure plusieurs jours, lors des épreuves ayant lieu les jours suivants (voir, en ce sens, arrêt du 12 novembre 2015, Alexandrou/Commission, T‑515/14 P et T‑516/14 P, EU:T:2015:844, point 81).

60      Pour éviter que soit rompue l’égalité entre les participants, la jurisprudence interdit, dans une telle situation, la communication des questions, même si les questions concernées sont nombreuses et si seules certaines d’entre elles seront utilisées, de manière à éviter que, alors que tous pourraient ne pas avoir cette possibilité, certains candidats puissent avoir connaissance des questions susceptibles d’être posées et les préparer (voir, en ce sens, arrêt du 12 novembre 2015, Alexandrou/Commission, T‑515/14 P et T‑516/14 P, EU:T:2015:844, point 82).

61      Ainsi, il convient de considérer, pour l’ensemble des motifs ci-dessus, que, contrairement à ce qu’elle fait valoir, la requérante ne disposait pas d’un droit à obtenir la communication des questions litigieuses.

62      Pour cette raison, le grief doit être écarté. En outre, il convient de rejeter le quatrième chef de conclusions en tant qu’il pourrait être interprété comme comportant une demande de mesure d’organisation de la procédure, notamment pour les motifs exposés au point 56 ci-dessus.

–       Sur le second grief, concernant une violation du principe de transparence, des droits de la défense et de certaines décisions rendues par le Médiateur

63      Par son second grief, la requérante critique la décision attaquée en se fondant sur le principe de transparence, les droits de la défense et diverses décisions rendues par le Médiateur européen.

64      En premier lieu, il suffit de constater que, comme cela a été expliqué aux points 48 à 51 ci-dessus, le principe de transparence n’a pas été méconnu par la décision attaquée, par laquelle a été communiquée à la requérante, conformément à la jurisprudence, une grille mentionnant, au regard du numéro de chaque question, la réponse donnée (sous forme de lettre), la réponse correcte (sous forme de lettre également) et le temps consacré à répondre. L’argument ne saurait donc être accueilli.

65      En deuxième lieu, la requérante soutient que ses droits de la défense ont été violés, car il lui aurait été demandé d’apporter une preuve impossible à fournir. En effet, l’accès aux questions litigieuses lui serait refusé alors que, précisément, cet accès lui permettrait d’établir l’existence d’erreurs.

66      À cet égard, il convient de rappeler que le respect dû aux droits de la défense constitue un principe fondamental du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 3 juillet 2014, Kamino International Logistics et Datema Hellmann Worldwide Logistics, C‑129/13 et C‑130/13, EU:C:2014:2041, point 28) dont l’importance a été reconnue par son inscription à l’article 48 de la charte des droits fondamentaux.

67      Ce principe comporte l’obligation de fournir dans l’acte attaqué les informations utiles et nécessaires pour permettre aux personnes concernées de les contester et pour donner au juge l’occasion d’exercer son contrôle (voir, en ce sens, arrêt du 12 novembre 2015, Alexandrou/Commission, T‑515/14 P et T‑516/14 P, EU:T:2015:844, point 175).

68      Selon la jurisprudence, les actes des institutions bénéficient d’une présomption de légalité en l’absence d’indice de nature à mettre en cause leur validité (voir, en ce sens, arrêts du 19 novembre 1996, Brulant/Parlement, T‑272/94, EU:T:1996:167, point 35 ; du 13 juillet 2000, Griesel/Conseil, T‑157/99, EU:T:2000:192, point 25, et du 5 décembre 2000, Gooch/Commission, T‑197/99, EU:T:2000:282, point 51).

69      Dans ce contexte, c’est à la requérante qu’il incombe de fournir, à tout le moins, des indices de nature à soutenir la véracité ou la vraisemblance des faits à l’appui de sa prétention, ces indices devant être suffisamment précis, objectifs et concordants (voir, en ce sens, arrêts du 6 mars 2001, Connolly/Commission, C‑274/99 P, EU:C:2001:127, point 113, et du 4 février 2010, Wiame/Commission, F‑15/08, EU:F:2010:7, point 21).

70      Or, il ressort de ses écritures que, en l’espèce, la requérante s’est limitée à formuler des allégations, en affirmant par exemple que « l’absence de preuve à l’appui de l’affirmation contraire rend[ait] l’affirmation initiale véridique », alors qu’elle aurait pu apporter divers éléments requis par la jurisprudence en combinant, d’une part, les souvenirs qu’elle pouvait avoir des questions qu’elle considérait problématiques, souvenirs qu’elle aurait pu noter au sortir de l’examen, et, d’autre part, les indications qui lui avaient été fournies par l’administration lors de l’annonce de ses résultats.

71      L’argument doit donc être écarté.

72      En troisième lieu, la requérante se fonde sur des décisions émanant du Médiateur indiquant que la communication de questions ou de leur copie aux candidats évincés en faisant la demande est conforme au principe de transparence qui doit guider, selon lui, l’action des institutions.

73      À cet égard, il convient de relever que, comme le soutient la requérante, le Médiateur a indiqué, dans sa décision 2097/2002/GG, du 4 septembre 2003, que, selon lui, le secret des travaux du jury ne pouvait être opposé à des candidats souhaitant obtenir une copie corrigée de leur examen écrit et, dans sa décision 1312/2007/IP, du 5 février 2008, que la perspective d’une réutilisation de questions à choix multiple ne permettait pas de justifier un refus de les communiquer.

74      Cependant, de telles prises de position du Médiateur ne sauraient lier le juge de l’Union, qui reste seul compétent, au regard des traités, pour apprécier la validité des actes qui sont mis en cause devant lui (voir, en ce sens, arrêts du 25 octobre 2007, Komninou e.a./Commission, C‑167/06 P, non publié, EU:C:2007:633, point 44, et du 8 mai 2019, Stamatopoulos/ENISA, T‑99/18, non publié, EU:T:2019:305, point 33).

75      En l’occurrence, il convient de souligner que, dans le cadre de sa conciliation du principe de transparence et de la protection des processus de délibération, le juge de l’Union a considéré que le secret des travaux du jury devait être garanti avec la possibilité toutefois, pour les candidats le souhaitant, d’obtenir la communication des questions lorsque sont satisfaites les conditions mentionnées au point 55 ci-dessus.

76      Or, il convient de rappeler à cet égard que la requérante est restée en défaut d’apporter les indices requis par la jurisprudence pour satisfaire ces conditions et, en particulier celle exigeant qu’elle fournisse au Tribunal des indications concrètes sur l’absence de pertinence des questions litigieuses ou sur le bien-fondé de la réponse.

77      L’argument doit donc être écarté, de même que, partant, compte tenu des considérations formulées ci-dessus, le second grief et le deuxième moyen dans leur ensemble.

 Sur le premier moyen, tiré d’insuffisances de motivation

78      Par son premier moyen, la requérante soutient que l’obligation de motivation n’a pas été respectée.

79      À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’article 25, deuxième alinéa, du statut, toute décision faisant grief doit être motivée, l’obligation prescrite par cette disposition reprenant celle, plus générale, qui se trouve édictée à l’article 296, deuxième alinéa, TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 12 février 2019, TV/Conseil, T‑453/17, non publié, EU:T:2019:83, point 101).

80      La requérante soulève deux griefs.

81      En premier lieu, elle soutient que les motifs invoqués pour justifier les décisions prises à son égard n’étaient pas suffisants pour satisfaire au standard requis par la jurisprudence relative à l’obligation de motivation.

82      À cet égard, il convient de rappeler que le caractère suffisant de la motivation doit être apprécié en fonction des circonstances concrètes de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que le destinataire peut avoir à recevoir des explications (arrêt du 8 décembre 2005, Reynolds/Parlement, T‑237/00, EU:T:2005:437, point 93).

83      En l’espèce, il suffit de constater que la motivation fournie à la requérante correspond à celle requise par la jurisprudence dans ce type de situation, à savoir la communication de la grille des questions du test litigieux mentionnant le numéro de la question ainsi que les réponses données et les réponses correctes sous forme de lettres et le temps de réponse (voir point 50 ci-dessus).

84      Selon la jurisprudence, ces informations sont en règle générale suffisantes pour permettre au Tribunal d’exercer son contrôle sur la légalité des décisions faisant grief et pour fournir aux intéressés une indication leur permettant d’évaluer si ces décisions sont fondées ou entachées d’un vice permettant d’en contester la légalité (voir, en ce sens, arrêt du 12 novembre 2015, Alexandrou/Commission, T‑515/14 P et T‑516/14 P, EU:T:2015:844, point 84).

85      Le grief doit donc être écarté.

86      En second lieu, la requérante critique l’absence de mention de la jurisprudence pertinente et de communication des pièces justifiant la position adoptée dans la décision attaquée.

87      À cet égard, il convient de relever que l’absence de référence à la jurisprudence pertinente ne fait pas obstacle à la compréhension, par la requérante, du fondement de la décision attaquée, dès lors que le jury et, par la suite, l’EUIPO ont suffisamment exposé les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de cette décision.

88      Par ailleurs, le Tribunal constate que le jury et l’AIPN ont suffisamment exposé les faits et considérations sur lesquels repose la décision attaquée compte tenu de l’argumentation développée par la requérante, sans que des pièces aient été nécessaires à une compréhension de ces éléments.

89      Le présent grief doit donc être écarté, de même que, partant, le premier moyen dans son ensemble.

 Sur le troisième moyen, tiré d’illégalités commises dans la procédure de concours

90      Par son troisième moyen, la requérante conteste différents aspects du concours au cours duquel sa candidature a été écartée. Dans ce cadre, elle formule quatre griefs.

91      Par son premier grief, elle soutient que la possibilité de contester les questions ne pouvait être limitée à la procédure de « neutralisation » mise en place dans l’avis de concours.

92      À cet égard, il convient de constater que, selon le point 6.3 de l’annexe III de l’avis de concours, les candidats avaient la possibilité de soumettre des demandes tendant à obtenir que soient « neutralisées » les questions qui, selon eux, ne devaient être prises en compte, pour diverses raisons, dans l’évaluation.

93      Comme cela était indiqué dans cette disposition, les demandes de cette nature devaient être introduites dans les dix jours suivant le moment auquel l’épreuve avait eu lieu, étant précisé que les demandes introduites après le délai ne seraient pas prises en compte et que les questions « neutralisées » au terme de cette procédure seraient écartées pour tous les candidats.

94      Il ressort par ailleurs de la jurisprudence que, pour contester un élément apparaissant dans un avis de concours, l’introduction d’une réclamation n’est pas requise pour saisir le juge de l’Union contre un acte adopté par un jury (voir, en ce sens, arrêt du 21 mars 2013, Taghani/Commission, F‑93/11, EU:F:2013:40, point 40).

95      Il en résulte que la requérante pouvait contester, devant le juge de l’Union, dans les limites établies par la jurisprudence, les questions qui avaient été posées lors du concours auquel elle avait participé, sans devoir accomplir une démarche préalable, telle qu’introduire une demande de « neutralisation ».

96      Toutefois, le point 6.3 de l’annexe III de l’avis de concours n’a pas pour objet de limiter l’accès au juge en cas de difficulté liée aux questions, mais il ouvre aux candidats la possibilité d’exprimer leurs doutes sur des questions leur paraissant inadéquates, en précisant les modalités à suivre pour recourir à cette possibilité.

97      À cet égard, il est légitime, pour un organe chargé de l’organisation d’un concours, de demander aux candidats que leurs griefs éventuels soient communiqués dans un délai relativement court, de manière à recueillir les réactions au plus tôt et à permettre que soient entamées sans tarder les opérations de correction.

98      En tout état de cause, la requérante n’a pas été entravée dans son accès au juge de l’Union, puisqu’elle a pu introduire le présent recours et faire valoir, dans le cadre de celui-ci, l’ensemble des critiques qu’elle souhaitait voir examiner par le Tribunal.

99      Le grief doit donc être écarté.

100    Par son deuxième grief, la requérante soutient que le jury aurait dû vérifier la clarté des questions litigieuses, leur traduction et, de manière générale, la régularité des tests effectués sur ordinateur.

101    À cet égard, il convient de rappeler que le jury d’un concours dispose d’un large pouvoir d’appréciation quant aux modalités et au contenu détaillé des épreuves (voir, en ce sens, arrêts du 17 janvier 2001, Gerochristos/Commission, T‑189/99, EU:T:2001:12, point 25 et du 15 avril 2010, Matos Martins/Commission, F‑2/07, EU:F:2010:22, point 161).

102    Or, il apparaît que, en l’espèce, la requérante n’a présenté aucun élément ou indice permettant d’établir ou même de soupçonner l’existence de problèmes de clarté, de traduction ou de difficultés techniques pouvant affecter la validité du concours ou de certains de ses éléments.

103    En tout état de cause, il est utile de constater que les questions litigieuses, qui ont été posées à d’autres candidats lors du même concours ou à l’occasion d’autres procédures similaires, n’ont pas causé de difficulté particulière dans ce cadre et, à tout le moins, pas de difficultés qui auraient pu justifier, à leur égard, une vigilance supplémentaire de la part du jury.

104    Ainsi, il ressort des données fournies au Tribunal que, dans les concours où les questions litigieuses ont été posées en espagnol, le taux de réponses correctes a varié, par question, entre 57 et 95 %, ce qui donne à penser que, dans ces concours, la majorité des candidats devant répondre à ces questions ont pu leur apporter une réponse satisfaisante et, donc, que les questions étaient compréhensibles et satisfaisantes.

105    Par ailleurs, dans le concours en cause, seuls deux candidats, dont la requérante, n’ont pas obtenu la note minimale de 10 sur 20 au test comportant lesdites questions, alors que 47 candidats avaient présenté ledit test en espagnol.

106    De la même manière, le taux de réponses correctes apportées par les candidats en espagnol aux questions litigieuses était substantiellement supérieur à 50 % dans tous les concours où elles ont été posées.

107    Enfin, les notes moyennes obtenues en espagnol (14,45) au test concerné se sont révélées plus élevées que les notes attribuées aux candidats ayant choisi de le passer en français (10,86), en allemand (14,3) ou en anglais (12,81), ce qui tend à démontrer que la version espagnole des questions ne suscitait pas de difficulté particulière.

108    Compte tenu des données communiquées par l’EUIPO, il doit être considéré que le jury n’a pas méconnu ses obligations en ce qui concerne la vérification des questions litigieuses, le contrôle de leur traduction vers l’espagnol et, de manière générale, la régularité des tests.

109    Pour cette raison, le grief doit être rejeté.

110    Par son troisième grief, la requérante soutient qu’elle a dû consacrer une partie importante de son temps à la dernière question, ce qui ne lui aurait pas permis de vérifier ses réponses aux autres questions.

111    À cet égard, il convient de relever que, en formulant ce grief, la requérante décrit une situation factuelle sans fournir aucun élément, ni formuler aucune critique de la question en cause de nature à affecter la validité du concours ou de certains de ses aspects, d’autant que, comme indiqué en réponse aux griefs précédents, l’examen des résultats obtenus par les candidats, notamment les candidats ayant choisi l’espagnol, ne permet pas de déceler l’existence d’une quelconque erreur ou irrégularité.

112    Pour cette raison, le grief doit donc être écarté.

113    Par son quatrième grief, la requérante soutient que le jury a erronément délégué à l’EPSO le pouvoir de réexaminer les résultats obtenus par les candidats.

114    À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’article 30, premier alinéa, du statut et l’article 5, premier alinéa, de l’annexe III du statut, c’est au jury qu’il appartient d’établir la liste d’aptitude des candidats et de déterminer la liste de ceux qui répondent aux conditions fixées par l’avis de concours.

115    Ces dispositions ont été respectées en l’espèce, puisque l’avis de concours mentionnait au point 3.2 de son annexe III que le jury était l’organe responsable de la détermination du niveau de difficulté des tests de type « questions à choix multiple » et de l’approbation de leur teneur sur la base des propositions faites par l’EPSO.

116    Par ailleurs, conformément à la jurisprudence, les sujets des questions posées dans le cadre d’un concours échappent à la compétence de l’EPSO, tant pour ce qui concerne le choix des sujets que pour leur appréciation (voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2011, Commission/Pachtitis, T‑361/10 P, EU:T:2011:742, point 52).

117    En outre, il ne ressort pas de la décision prise après réexamen que le jury a opéré une délégation de pouvoirs à l’EPSO. En effet, c’est bien le jury qui a pris la décision de ne pas admettre la requérante sur la liste de réserve, cette dernière n’ayant pas obtenu la note minimale requise pour réussir le test de raisonnement verbal dans le cadre des tests de type « questions à choix multiple ». Ce n’est qu’à la demande du jury que l’EPSO a vérifié le fonctionnement du système informatique, aucune plainte à cet égard n’ayant été introduite à l’occasion d’une procédure de neutralisation. L’EPSO s’est donc contenté d’assurer, pour le compte du jury, des vérifications techniques liées à la procédure et à la notation. Ces tâches de nature organisationnelle ne sont pas équivalentes à celles qui seraient accomplies en cas de délégation de compétences et sont donc conformes à ce qui est admis par la jurisprudence (voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2011, Commission/Vicente Carbajosa e.a., T‑6/11 P, EU:T:2011:747, point 67).

118    Le présent grief doit donc être écarté, de même que, partant, le troisième moyen dans son intégralité.

 Sur le quatrième moyen, tiré de l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation entachant la procédure de concours

119    Par son quatrième moyen, la requérante estime que l’AIPN s’est à tort estimée liée par les appréciations erronées du jury dans sa décision initiale.

120    À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, l’AIPN doit respecter le pouvoir d’appréciation conféré aux jurys et ne peut dès lors, au prétexte qu’elle aurait fait un choix différent, annuler ou modifier une décision prise par un jury de concours. Dans le même temps, l’AIPN ne peut prendre, dans l’exercice de ses propres compétences, des décisions qui seraient entachées d’illégalité (voir, en ce sens, arrêt du 20 février 1992, Parlement/Hanning, C‑345/90 P, EU:C:1992:79, point 22).

121    Pour cette raison, elle ne saurait se trouver liée par des décisions du jury dont l’illégalité serait susceptible d’entacher, par voie de conséquence, ses propres décisions.

122    Ainsi, l’AIPN, pour éviter d’adopter des décisions qui seraient illégales en raison d’un défaut affectant une décision prise par un jury, a l’obligation de vérifier la légalité des décisions prises par le jury (voir, en ce sens, arrêt du 23 octobre 1986, Schwiering/Cour des comptes, 142/85, EU:C:1986:405, point 20).

123    Dans ce cadre, elle doit vérifier, notamment, que l’exercice par le jury de son pouvoir d’appréciation n’a pas été entaché d’une erreur manifeste, un tel défaut étant constitutif d’une illégalité (arrêt du 23 octobre 2012, Eklund/Commission, F‑57/11, EU:F:2012:145, point 50).

124    En l’espèce, la requérante s’est limitée à invoquer, en substance, l’existence d’une probatio diabolica, soit d’une preuve impossible à rapporter, en raison du refus d’accès aux questions, qui ne lui permettrait pas de les contester de manière détaillée.

125    À cet égard, il convient de rappeler que, comme indiqué au point 68 ci-dessus, les actes des institutions bénéficient d’une présomption de légalité en l’absence d’indices de nature à mettre en cause leur validité.

126    Or, comme le relevait déjà la décision de rejet des réclamations, la requérante n’a nullement apporté la preuve d’une erreur du jury, encore moins d’une erreur manifeste. Ainsi que souligné au point 56 ci-dessus, elle s’est limitée à critiquer les questions d’une manière générique sans identifier de manière concrète en quoi elles pouvaient poser un problème spécifique ni mettre en doute, comme le requiert pourtant la jurisprudence, leur pertinence.

127    Dès lors, il y a lieu de rejeter le quatrième moyen comme étant non fondé et, tous les moyens soulevés par la requérante ayant été rejetés, l’ensemble du recours.

 Sur les dépens

128    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

129    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par l’EUIPO, conformément aux conclusions de ce dernier.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      ZL est condamnée aux dépens.

Gervasoni

Nihoul

Martín y Pérez de Nanclares

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 23 septembre 2020.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.