Language of document : ECLI:EU:T:2023:720

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

15 novembre 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative imaster.golf – Enregistrement international de la marque verbale antérieure MASTERS – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 5, du règlement (UE) 2017/1001 – Renommée – Similitude – Lien – Profit indu – Absence de juste motif – Article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑677/22,

Portal Golf Gestión, SA, établie à Madrid (Espagne), représentée par Me J. Garrido Pastor, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme D. Stoyanova-Valchanova et M. V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Augusta National, Inc., établie à Augusta, Géorgie (États-Unis), représentée par Me H. Koenraad, avocat,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de Mme M. J. Costeira (rapporteure), présidente, M. P. Zilgalvis et Mme E. Tichy‑Fisslberger, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Portal Golf Gestión, SA, demande l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 30 août 2022 (affaire R 2204/2021-1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 4 décembre 2018, la requérante a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

Image not found

3        La marque demandée désignait les produits et les services relevant, après limitation intervenue au cours de la procédure devant l’EUIPO, des classes 9, 38, 42 et 45 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Programmes informatiques enregistrés et programmes informatiques [logiciels téléchargeables] pour la gestion de terrains de golf » ;

–        classe 38 : « Services de télécommunications ; communications par réseaux de fibres optiques et par terminaux d’ordinateurs ; informations en matière de télécommunications ; transmission de messages ; messagerie électronique ; location d’appareils pour la transmission de messages, transmission électronique de commandes ; location de temps d’accès à une base de données informatique ; tous les services précités étant liés à la gestion de terrains de golf » ;

–        classe 42 : « Mise à jour et maintenance de logiciels et de programmes informatiques ; crédit-bail, location et crédit-bail d’ordinateurs, de systèmes informatiques, de programmes informatiques et de logiciels ; services de conseils dans le domaine de la conception, de la sélection, de la mise en œuvre et de l’utilisation de matériel informatique et de systèmes logiciels pour des tiers ; création, mise à jour et adaptation de programmes informatiques ; fourniture de services d’assistance en ligne pour utilisateurs de programmes informatiques ; récupération de données informatiques ; conversion de données et de programmes informatiques (autres que transformations physiques) ; location de logiciels informatiques ; conseils dans le domaine des ordinateurs ; tous les services précités se rapportant à la gestion de terrains de golf » ;

–        classe 45 : « Octroi de licences de propriété intellectuelle en rapport avec la gestion de terrains de golf ».

4        Le 27 mai 2019, l’intervenante, Augusta National, Inc., a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était notamment fondée sur l’enregistrement international désignant l’Union européenne no 1076672 de la marque verbale MASTERS, enregistré le 27 décembre 2010, pour des produits et des services relevant, après limitation, des classes 9, 38 et 41, pour lesquels une renommée est revendiquée, et correspondant pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Programmes informatiques et logiciels contenant de l’instruction au golf destinés au domaine du golf et des tournois de golf ; logiciels de jeux informatiques pour l’instruction et le divertissement liés au jeu de golf et aux tournois de golf ; programmes de jeux vidéo liés au jeu de golf et aux tournois de golf ; programmes de jeux vidéo liés au jeu de golf et aux tournois de golf » ;

–        classe 38 : « Diffusion d’événements sportifs à la télévision, à la radio, sur l’internet, sur des réseaux de communications numériques et par câble ; transmission électronique assistée par ordinateur et transmission électronique de voix, données, images et messages dans le domaine du sport, d’événements sportifs, de tournois sportifs et de divertissements sportifs par le biais de réseaux informatiques, de la télévision interactive et de l’internet » ;

–        classe 41 : « Organisation et conduite de tournois de golf ; divertissement sous forme de tournois de golf ».

6        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), et à l’article 8, paragraphe 5, du même règlement.

7        Le 22 octobre 2021, la division d’opposition a fait droit à l’opposition sur le fondement de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

8        Le 22 décembre 2021, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours et confirmé la décision de la division d’opposition, au motif que la marque demandée tirerait indûment profit de la renommée dans plusieurs pays de l’Union européenne de la marque antérieure MASTERS pour les services de « divertissement sous forme de tournois de golf » de la classe 41.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        autoriser l’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits et des services visés ;

–        réformer les condamnations aux dépens prononcées en faveur de l’intervenante par la division d’opposition et par la chambre de recours ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens en cas d’audience.

12      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      À l’appui du recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

14      La requérante conteste, en substance, les conclusions de la chambre de recours tenant au public pertinent, à la renommée de la marque antérieure, au caractère distinctif de la marque antérieure, à la comparaison des signes en conflit, au lien entre ces signes et à l’existence d’un profit indu.

15      Aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure enregistrée au sens du paragraphe 2, la marque demandée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à une marque antérieure, indépendamment du fait que les produits ou les services pour lesquels elle est demandée sont identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque cette marque antérieure est une marque de l’Union européenne qui jouit d’une renommée dans l’Union ou une marque nationale qui jouit d’une renommée dans l’État membre concerné, et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque antérieure ou leur porterait préjudice.

16      La protection élargie accordée à la marque antérieure par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 présuppose donc la réunion de plusieurs conditions. Premièrement, la marque antérieure prétendument renommée doit être enregistrée. Deuxièmement, cette dernière et celle dont l’enregistrement est demandé doivent être identiques ou similaires. Troisièmement, elle doit jouir d’une renommée dans l’Union, dans le cas d’une marque de l’Union européenne antérieure, ou dans l’État membre concerné, dans le cas d’une marque nationale antérieure. Quatrièmement, l’usage sans juste motif de la marque demandée doit conduire au risque qu’un profit puisse être indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’un préjudice puisse être porté au caractère distinctif ou à la renommée de la marque antérieure. Ces conditions étant cumulatives, l’absence de l’une d’entre elles suffit à rendre inapplicable ladite disposition [voir arrêt du 31 mai 2017, Alma-The Soul of Italian Wine/EUIPO – Miguel Torres (SOTTO IL SOLE ITALIANO SOTTO il SOLE), T‑637/15, EU:T:2017:371, point 29 et jurisprudence citée].

17      S’agissant, plus particulièrement, de la quatrième des conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, celle-ci vise trois types de risques distincts. Le premier type de risque visé est caractérisé lorsque la marque antérieure n’est plus en mesure de susciter une association immédiate avec les produits pour lesquels elle est enregistrée et employée. Il vise la dilution de la marque antérieure par la dispersion de son identité et de son emprise sur l’esprit du public. Le deuxième type de risque visé est constitué lorsque les produits ou les services visés par la marque demandée peuvent être perçus par le public d’une manière telle que la force d’attraction de la marque antérieure s’en trouve diminuée. Le troisième type de risque visé est celui que l’image de la marque renommée ou les caractéristiques projetées par cette dernière soient transférées aux produits désignés par la marque demandée, de sorte que leur commercialisation puisse être facilitée par cette association avec la marque antérieure renommée. Il convient cependant de souligner que, dans aucun de ces cas, l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit n’est requise, le public pertinent devant seulement pouvoir établir un lien entre elles sans toutefois devoir forcément les confondre [voir, en ce sens, arrêt du 22 mars 2007, Sigla/OHMI – Elleni Holding (VIPS), T‑215/03, EU:T:2007:93, points 36 à 42 et jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

18      La requérante soutient que la chambre de recours s’est contredite dans l’appréciation du public pertinent. D’une part, elle aurait reconnu que les produits et les services contestés étaient liés à la « gestion de terrains de golf » et aurait laissé entendre que le public pertinent était « attentif ». D’autre part, elle aurait considéré que le public pertinent était composé de « joueurs de golf et d’amateurs de golf ». Or, conformément à la jurisprudence, le public pertinent à prendre en considération serait le public visé par la marque demandée, soit en l’espèce le public composé de sociétés qui exploitent les parcours de golf, comme cela a été établi par la division d’opposition.

19      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

20      À titre liminaire, il convient de rappeler que, premièrement, le public à prendre en considération afin de déterminer si l’enregistrement de la marque demandée est susceptible d’être annulé en application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 varie en fonction du type d’atteinte allégué par le titulaire de la marque antérieure (voir, en ce sens, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 33).

21      En effet, d’une part, l’existence des atteintes constituées par le préjudice porté au caractère distinctif ou à la renommée de la marque antérieure doit être appréciée auprès du consommateur moyen normalement informé et raisonnablement attentif et avisé des produits ou des services pour lesquels cette marque est enregistrée (arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 35).

22      D’autre part, l’existence de l’atteinte constituée par le profit indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure doit être appréciée auprès du consommateur moyen normalement informé et raisonnablement attentif et avisé des produits ou des services pour lesquels la marque postérieure est demandée (voir, en ce sens, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, EU:C:2008:655, point 36).

23      Deuxièmement, l’existence du lien entre les marques en conflit dont dépend la réalisation des comportements abusifs envisagés par l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 présuppose que les publics concernés par les produits ou les services pour lesquels lesdites marques sont enregistrées soient les mêmes ou « se chevauchent » dans une certaine mesure [voir arrêt du 9 mars 2012, Ella Valley Vineyards/OHMI – HFP (ELLA VALLEY VINEYARDS), T‑32/10, EU:T:2012:118, point 23 et jurisprudence citée].

24      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, en substance, aux points 62 à 64 de la décision attaquée, que le public pertinent était composé, au regard des produits et des services en cause, des professionnels du golf et des amateurs de golf, ayant un niveau d’attention élevé. Elle a précisé, au point 42 de cette décision, que le territoire pertinent était, eu égard à la marque antérieure, l’Union dans son ensemble.

25      À cet égard, il convient de relever, à l’instar de la chambre de recours, que les produits et les services pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée concernent le domaine du golf et sont destinés, au regard de leur nature, aux amateurs de golf et aux professionnels du golf. Les produits et les services visés par la marque demandée concernent le domaine du golf et, plus précisément, la gestion des terrains de golf. Ils ne sont, en revanche, destinés, au regard de leur nature, qu’aux professionnels du golf.

26      Dès lors, il y a lieu de conclure que les publics constitués des consommateurs concernés par les produits et les services désignés par les marques en conflit « se chevauchent » aux termes de la jurisprudence citée au point 23 ci-dessus, en ce qu’ils se composent des professionnels du golf.

27      Par ailleurs, la contradiction alléguée par la requérante concernant l’appréciation du public pertinent repose sur une lecture incomplète de la décision attaquée. En effet, s’il est vrai que la chambre de recours a indiqué au point 62 de celle-ci que le public pertinent était composé de joueurs de golf et d’amateurs de golf, elle a en revanche précisé au point 63 que la renommée de la marque antérieure s’étendait également au public qui pratiquait le golf de manière professionnelle, tel que les personnes participant à la gestion de terrains de golf, et que, partant, il y avait un chevauchement entre les marques au niveau du public pertinent.

28      Par suite, dès lors que la chambre de recours a inclus dans le public pertinent les professionnels du golf, et, en particulier, les personnes participant à la gestion des terrains de golf, le grief de la requérante doit être écarté comme étant non fondé.

 Sur la renommée de la marque antérieure

29      La requérante allègue, en substance, que la renommée de la marque antérieure pour les services de « divertissement sous forme de tournoi de golf » n’est pas établie au regard des éléments de preuve produits par l’intervenante. À cet égard, elle soutient que, premièrement, la déclaration de la chambre de recours selon laquelle le terme « masters » désigne « la compétition de golf la plus importante au monde » est fondée sur sa propre connaissance. Cette déclaration serait, par conséquent, en contradiction avec l’article 95 du règlement 2017/1001. Deuxièmement, la renommée de la marque antérieure reposerait principalement sur des éléments de preuve produits pour le Royaume-Uni et pour les États-Unis. Or, il ressortirait clairement de la jurisprudence que les États dans lesquels la renommée doit être démontrée doivent faire partie du territoire de l’Union. Troisièmement, l’affirmation de la chambre de recours selon laquelle tout consommateur de l’Union pourrait aisément accéder à Amazon UK serait erronée, puisque, lorsque lors d’une tentative de se connecter à Amazon, le consommateur est redirigé vers le site de son pays. Les annexes 4C et 4F devraient donc être écartées. Quatrièmement, les informations figurant dans l’annexe 4B concernant les chiffres d’audience en Allemagne et en Italie, d’une part, proviendraient d’un employé de l’intervenante et, d’autre part, ne seraient corroborées par aucune source officielle. Cinquièmement, les documents présentés par l’intervenante ne permettraient pas de démontrer que la marque antérieure est connue en tant que telle du public pertinent. Celle-ci serait souvent associée à d’autres termes.

30      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

31      Selon la jurisprudence, pour satisfaire à la condition relative à la renommée, une marque doit être connue d’une partie significative du public concerné par les produits ou les services couverts par celle-ci. Dans l’examen de cette condition, il convient de prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, à savoir, notamment, la part de marché détenue par la marque antérieure, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de son usage ainsi que l’importance des investissements réalisés par l’entreprise pour la promouvoir, sans qu’il soit exigé que cette marque soit connue d’un pourcentage déterminé du public ainsi défini ou que sa renommée s’étende à la totalité du territoire concerné, dès lors que la renommée existe dans une partie substantielle de celui-ci [voir arrêt du 12 février 2015, Compagnie des montres Longines, Francillon/OHMI – Staccata (QUARTODIMIGLIO QM), T‑76/13, non publié, EU:T:2015:94, point 87 et jurisprudence citée].

32      La renommée d’une marque antérieure doit être établie à la date de dépôt de la demande de la marque contestée [voir arrêt du 16 octobre 2018, VF International/EUIPO – Virmani (ANOKHI), T‑548/17, non publié, EU:T:2018:686, point 103 et jurisprudence citée].

33      À cet égard, il convient de relever d’emblée que, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours n’a pas établi la renommée de la marque antérieure en se fondant principalement sur des éléments de preuve produits pour le Royaume-Uni et pour les États-Unis. Cette allégation de la requérante repose sur une lecture erronée du point 28 de la décision attaquée. En effet, bien que dans ce point la chambre de recours ait toutefois convenu que le raisonnement de la division d’opposition, selon lequel la diffusion par des chaînes basées au Royaume-Uni (BBC et Sky) serait reçue au moins par une partie du public analysé, comme celle de la partie anglophone de l’UE (Irlande et Malte), ainsi que par des passionnés de golf qui ont été habitués à regarder le tournoi de l’intervenante par l’intermédiaire de ces chaînes de télévision basées au Royaume-Uni au fil des ans, était convaincant, elle y a seulement constaté que la division d’opposition avait reconnu la renommée de la marque antérieure principalement sur la base des éléments de preuve produits pour le Royaume-Uni.

34      La conclusion de la chambre de recours selon laquelle les éléments de preuve présentés par l’intervenante permettaient d’établir, à la date de la demande d’enregistrement de la marque demandée, l’existence d’une renommée de la marque antérieure au sein de l’Union pour les services de « divertissement sous forme de tournois de golf » relevant de la classe 41, auprès des passionnés de golf, est essentiellement fondée, ainsi qu’il ressort des points 29 à 35 de la décision attaquée, sur les documents produits par l’intervenante relatifs à l’Allemagne, à la France, à l’Italie et aux Pays-Bas.

35      En particulier, l’intervenante a produit, premièrement, un grand nombre d’extraits d’articles de presse et de magazines relatifs à son tournoi de golf et sur lesquels l’élément « masters » de la marque antérieure apparaissait clairement. Ces extraits, qui proviennent de journaux et de magazines d’importance, tels que Bild en Allemagne, El País en Espagne, Le Monde en France et de Volkskrant aux Pays-Bas, et qui portent sur une période allant de 1967 à 2019, présentent, en substance, le tournoi de golf de l’intervenante comme étant le plus important et le plus célèbre au monde. Ils permettent en l’espèce d’établir l’existence d’une importante couverture médiatique du tournoi de l’intervenante sous la marque antérieure à la date de la demande d’enregistrement de la marque demandée.

36      Il en ressort également que, contrairement à ce que soutient la requérante, le constat de la chambre de recours, figurant au point 62 de la décision attaquée, selon lequel le « masters » serait « le tournoi de golf le plus important au monde », n’est pas fondé sur sa propre connaissance, mais sur les extraits des articles de presse et de magazines présentés par l’intervenante, et notamment sur les extraits figurant aux annexes 4G 09 et 4G 47 du dossier de l’EUIPO.

37      Deuxièmement, l’intervenante a produit une déclaration sous serment de sa directrice principale des affaires commerciales, dans laquelle étaient notamment présentés les chiffres des audiences télévisuelles de son tournoi en Allemagne et en Italie pour les années allant de 2014 à 2019. Ces chiffres, dont la fiabilité n’a du reste pas été contestée par la requérante, mettent en exergue l’importance croissante et grandissante, au cours desdites années, des téléspectateurs pour ce tournoi. Ces chiffres sont, en ce qui concerne l’Italie, corroborés par des courriels du diffuseur italien du tournoi.

38      Troisièmement, l’intervenante a produit de nombreuses captures d’écran de livres, publiés entre 1975 et 2019, sur le « masters ». Elle a également produit des captures d’écran de pages du site Internet Wikipédia relatives à son tournoi, en anglais, en espagnol, en allemand, en français et en néerlandais, intitulés respectivement « Masters Tournament », « The Masters », « The Masters Tournament », « Masters de golf » et « Masters Tournament ». Ces captures d’écran sont datées du 17 décembre 2019.

39      Quatrièmement, l’intervenante a produit des copies de publicités parues dans des journaux et magazines français entre 2012 et 2016 et sur lesquelles la marque antérieure était clairement visible.

40      Il résulte de ce qui précède que les éléments de preuve produits par l’intervenante, pris ensemble, démontrent que, à la date pertinente, la marque antérieure était connue du public concerné comme étant le nom d’un des tournois de golf les plus célèbres au monde. Ces documents permettent, à tout le moins, de postuler la connaissance, par le public concerné, de la marque antérieure pour les services de « divertissement sous forme de tournois de golf », bien que, dans une partie de ceux-ci, la marque antérieure n’apparaisse pas isolément, mais accompagnée des éléments verbaux « the », « usa », « augusta » et « tournament » ou d’éléments figuratifs représentant la carte des États-Unis, un trou et un drapeau.

41      À ce dernier égard, il y a lieu de rappeler que le titulaire d’une marque enregistrée peut, aux fins d’établir le caractère distinctif particulier et la renommée de celle-ci, se prévaloir de preuves de son utilisation, en tant que partie d’une autre marque enregistrée et renommée, pourvu que le public concerné continue à percevoir les produits en cause comme provenant de la même entreprise [voir arrêt du 14 septembre 2022, Itinerant Show Room/EUIPO – Save the Duck (ITINERANT), T‑416/21, non publié, EU:T:2022:560, point 83 et jurisprudence citée]. Or, ainsi qu’il ressort du dossier, l’intervenante est également titulaire, pour les services en cause, des marques de l’Union européenne et d’enregistrements internationaux comprenant l’élément verbal « masters » ainsi que les éléments verbaux ou figuratifs mentionnés au point 40 ci-dessus.

42      De plus, il convient de relever que, contrairement à ce que soutient la requérante, lesdits éléments verbaux et figuratifs n’altèrent pas le caractère distinctif de la marque antérieure. Il s’agit d’éléments négligeables, en raison, d’une part, de leur absence de caractère distinctif, compte tenu de leur caractère descriptif, soit du lieu où le tournoi de l’intervenante se déroule, soit des accessoires nécessaires à la pratique du golf, et, d’autre part, de leur absence de caractère dominant, compte tenu de leur position secondaire.

43      Ainsi, le fait que, dans certains documents, la marque antérieure était représentée avec ces éléments verbaux ou figuratifs n’empêche pas de tenir compte de ceux-ci aux fins de l’appréciation de la renommée de la marque antérieure.

44      Par ailleurs, s’il est vrai, comme le souligne la requérante, que l’existence de la renommée doit être appréciée en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, à savoir, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de son usage ainsi que l’importance des investissements réalisés par l’entreprise pour la promouvoir, il convient toutefois de rappeler que cette énumération n’a qu’un caractère illustratif. Dès lors, il ne saurait être exigé que la preuve de la renommée d’une marque porte sur l’ensemble de ces éléments [arrêt du 26 juin 2019, Balani Balani e.a./EUIPO – Play Hawkers (HAWKERS), T‑651/18, non publié, EU:T:2019:444, points 23 et 24]. Par suite, contrairement à ce que soutient la requérante, l’intervenante n’avait pas l’obligation d’apporter de preuve relative à l’ensemble de ces éléments pour établir la renommée de la marque antérieure. En tout état de cause, il a été considéré au point 40 ci-dessus que les éléments produits par l’intervenante suffisaient à établir la renommée de la marque antérieure au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

45      C’est donc sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a considéré que, dans leur ensemble, les éléments de preuve produits par l’intervenante étaient suffisants pour démontrer, à la date pertinente, une renommée de la marque antérieure au sein de l’Union pour les services de « divertissement sous forme de tournois de golf » relevant de la classe 41.

46      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les autres arguments de la requérante.

47      Premièrement, la requérante soutient qu’il serait impossible pour le public européen n’étant pas du Royaume-Uni de se connecter à Amazon UK, car le site redirigerait automatiquement l’utilisateur vers le site de son pays, de sorte que les annexes 4C et 4F devraient être écartées.

48      À cet égard, d’une part, il convient de relever que, parmi les annexes 4C, les annexes 4C13, 4C16 et 4C20 sont des captures d’écran du site « amazon.de », de sorte qu’elles ne sauraient, en tout état de cause, être écartées. D’autre part, il a été relevé au point 34 ci-dessus que la renommée de la marque antérieure avait été essentiellement établie sur la base des éléments de preuve produits par l’intervenante se rapportant à l’Allemagne, à l’Espagne, à la France, à l’Italie et aux Pays-Bas. Il s’ensuit que l’argument de la requérante doit être, en tout état de cause, écarté étant comme non fondé.

49      Deuxièmement, la requérante soutient que les informations concernant les chiffres des audiences en Allemagne et en Italie, figurant dans la déclaration de la directrice principale des affaires commerciales de l’intervenante, auraient dû être corroborées par une source officielle en matière d’audience et non par des courriels de prestataires de l’intervenante.

50      À cet égard, il suffit de rappeler que ni le règlement 2017/1001, ni le règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001 et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), ne contiennent de disposition relative au type de preuve qui serait exigée pour prouver la renommée d’une marque. En outre, les informations figurant dans ces courriels ne sont pas contestées par la requérante. Il s’ensuit que l’argument de la requérante doit être écarté comme étant non fondé.

 Sur l’absence de caractère distinctif du terme « masters » pour les services de « divertissement sous forme de tournois de golf »

51      La requérante reproche, en substance, à la chambre de recours d’avoir considéré que le terme « masters » revêtait un faible caractère distinctif intrinsèque, alors qu’il est indéniablement descriptif des services en cause et que, par conséquent, il est dépourvu de caractère distinctif. De plus, la marque antérieure serait purement verbale, sans élément typographique ni graphique, ou sans couleur.

52      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

53      Il convient de relever d’emblée que, par son argumentation, la requérante tend en réalité à mettre en cause la validité de la marque antérieure, puisque la caractérisation de l’élément verbal « masters » comme descriptif ou générique des services en cause revient à nier le caractère distinctif de la marque antérieure.

54      Or, dans le cadre d’une procédure d’opposition, il n’est pas possible de constater, à l’égard d’une marque antérieure, un motif absolu de refus, tel que l’absence de caractère distinctif, prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 [voir arrêt du 29 avril 2015, Hostel Tourist World/OHMI – WRI Nominees (HostelTouristWorld.com), T‑566/13, non publié, EU:T:2015:239, point 35 et jurisprudence citée].

55      Il s’ensuit que, dans le cadre de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, il doit être reconnu un certain degré de caractère distinctif à la marque antérieure invoquée à l’appui de l’opposition à l’enregistrement de la marque de l’Union (voir arrêt du 29 avril 2015, HostelTouristWorld.com, T‑566/13, non publié, EU:T:2015:239, point 37 et jurisprudence citée).

56      Partant, à supposer qu’une marque antérieure soit effectivement descriptive pour certains des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée et que sa protection conduise à la monopolisation indue de l’indication descriptive en question, il doit être remédié à une telle conséquence non pas par une application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, mais par une procédure de nullité (voir arrêt du 29 avril 2015, HostelTouristWorld.com, T‑566/13, non publié, EU:T:2015:239, point 35 et jurisprudence citée).

57      Il en résulte que le grief de la requérante doit être écarté comme étant inopérant, dès lors qu’il ne saurait être considéré dans le cadre du présent recours que la marque antérieure présente un caractère générique ou descriptif ou encore qu’elle est dépourvue de tout caractère distinctif.

 Sur la comparaison des signes en conflit

58      Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [voir arrêt du 10 mars 2021, Kerry Luxembourg/EUIPO – Ornua (KERRYMAID), T‑693/19, non publié, EU:T:2021:124, point 48 et jurisprudence citée].

59      Les marques à comparer se présentent comme suit :

–        la marque demandée est la marque complexe :

Image not found

–        la marque antérieure est la marque verbale MASTERS.

 Sur l’absence de détermination du degré de similitude des signes en conflit

60      La requérante fait valoir que la chambre de recours a omis dans la décision attaquée de déterminer le degré de similitude des signes en conflit.

61      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

62      À cet égard, il suffit de rappeler que, selon la jurisprudence, lorsque la chambre de recours entérine la décision de la division d’opposition dans son intégralité, comme en l’espèce, et compte tenu de la continuité fonctionnelle entre divisions d’opposition et chambres de recours, dont atteste l’article 71, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, cette décision et sa motivation font partie du contexte dans lequel la décision de la chambre de recours a été adoptée, contexte qui est connu des parties et qui permet au juge d’exercer pleinement son contrôle de légalité quant au bien‑fondé de l’appréciation de la chambre de recours [voir arrêt du 25 octobre 2012, riha/OHMI – Lidl Stiftung (VITAL&FIT), T‑552/10, non publié, EU:T:2012:576, point 19 et jurisprudence citée].

63      Or, s’il est vrai que la chambre de recours n’a pas expressément précisé dans la décision attaquée le degré de similitude des signes en conflit, la division d’opposition a en revanche indiqué dans sa décision que les signes présentaient, sur le plan visuel, un faible degré de similitude, sur le plan phonétique, un degré de similitude inférieure à la moyenne et, sur le plan conceptuel, un degré de similitude, tout au plus, faible. Cette appréciation de la division d’opposition figure, au demeurant, au point 9 de la décision attaquée.

64      Par suite, cette décision et cette motivation de la division d’opposition, qui a été implicitement mais nécessairement entérinée par la chambre de recours aux points 44 et 45 de la décision attaquée, faisaient partie du contexte dans lequel la décision de la chambre de recours a été adoptée.

65      Le grief de la requérante doit donc être écarté comme non fondé.

 Sur la non-prise en compte de la structure différente des signes en conflit et des éléments dominants de la marque demandée

66      La requérante soutient que, dans le cadre de la comparaison des signes en conflit, la chambre de recours n’a pas tenu compte de la structure différente des signes en conflit ni de l’importance et de l’existence d’éléments dominants dans la marque demandée, lesquels sont essentiels pour l’appréciation globale de la similitude des signes. Elle n’aurait pas non plus mentionné les différences entre les éléments distinctifs de la marque demandée.

67      En particulier, la requérante soutient que, premièrement, la décision attaquée ne ferait pas référence à l’existence d’éléments dominants dans la marque demandée. La chambre de recours aurait ignoré la jurisprudence, en affirmant, d’une part, que l’élément « master » serait « d’autant plus remarquable », alors qu’il s’agirait d’un terme présentant un faible caractère distinctif, et, d’autre part, que les éléments figuratifs de la marque demandée seraient décoratifs alors qu’ils occuperaient une position centrale et feraient partie de l’élément dominant. Elle soutient que, en tout état de cause, la marque demandée ne serait composée d’aucun élément dominant. Deuxièmement, la comparaison et la similitude supposée des signes en conflit seraient simplement fondées sur la coïncidence des termes « masters » et « master », alors que les signes présenteraient une structure complètement différente, qui aurait dû amener la chambre de recours à conclure à leur différence. Troisièmement, la chambre de recours n’aurait pas tenu compte des différences entre les éléments distinctifs de la marque demandée, puisque le faible caractère distinctif de l’élément « master » aurait pour effet de souligner l’importance des différences avec les autres éléments distinctifs de la marque demandée.

68      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

69      À cet égard, il convient de relever, en premier lieu, que les présents griefs reposent sur une lecture erronée de la décision attaquée.

70      En effet, s’agissant du grief selon lequel la chambre de recours n’aurait pas tenu compte de la structure différente des signes en conflit, au point 43 de la décision attaquée, la chambre de recours a souligné que, alors que la marque antérieure était une marque verbale composée du seul mot « masters », la marque demandée était une marque figurative composée des éléments verbaux « i », « master » et « golf », les deux derniers étant séparés par un point, et d’un élément figuratif représentant un anneau de différentes couleurs placé au-dessus de ces éléments verbaux. Au point 44 de la décision attaquée, elle a constaté que, sur le plan visuel, l’élément verbal « master » de la marque demandée reproduisait six des sept lettres de la marque antérieure. Elle a considéré que cela était d’autant plus remarquable que l’élément verbal « master » de la marque demandée était écrit en noir, tandis que ses éléments « i » et « golf » étaient écrits en vert et que l’utilisation d’une couleur différente attirait l’attention. Par suite, elle en a conclu que, en dépit des éléments verbaux supplémentaires et de l’élément figuratif de la marque demandée, le fait que l’élément central « master » correspondait dans une large mesure à la marque antérieure ne serait pas ignoré et entraînerait une similitude visuelle.

71      S’agissant des griefs selon lesquels la chambre de recours n’aurait pas tenu compte des différences entre les éléments distinctifs de la marque demandée et de ses éléments dominants, au point 52 de la décision attaquée, la chambre de recours a rappelé que les marques devaient être comparées dans leur intégralité et que, contrairement à ce que la requérante affirme, un faible degré de caractère distinctif n’excluait pas automatiquement une similitude entre les signes. Elle a également précisé que, en l’espèce, si l’élément verbal « master » de la marque demandée était faiblement distinctif, ses autres éléments, à savoir les éléments verbaux « i » et « golf » et l’élément figuratif, qui étaient respectivement descriptifs des produits et des services en cause et décoratif, l’étaient encore moins. Ces derniers éléments étaient trop faibles pour différencier les signes en conflit dans une mesure telle qu’ils excluaient totalement toute similitude entre eux.

72      Il s’ensuit que, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours a, dans le cadre de son appréciation de la similitude des signes en conflit, tenu compte, et ce de manière précise, de la structure différente des signes en conflit dans le cadre de son appréciation de leur similitude. Elle a, en effet, précisé que la marque antérieure était une marque verbale composée d’un élément unique, alors que la marque demandée était une marque figurative composée de plusieurs éléments verbaux. Elle a également tenu compte des éléments distinctifs et dominants de la marque demandée, puisqu’elle a considéré que, au regard des éléments faiblement distinctifs la composant, elle devait être comparée dans son ensemble. La chambre de recours a ainsi estimé, à l’instar de la requérante, que la marque demandée n’était composée d’aucun élément dominant.

73      En deuxième lieu, il convient de relever que l’argumentation de la requérante repose sur deux prémisses erronées.

74      Premièrement, la requérante considère à tort que, lorsque la structure des signes en conflit est différente, la comparaison amène à conclure à une absence de similitude.

75      Or, d’une part, il convient de rappeler que rien ne s’oppose à ce que soit vérifiée l’existence d’une similitude entre une marque verbale et une marque figurative, étant donné que ces deux types de marques ont une configuration graphique capable de donner lieu à une impression visuelle [voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2011, PJ Hungary/OHMI – Pepekillo (PEPEQUILLO), T‑580/08, EU:T:2011:227, point 75 et jurisprudence citée].

76      D’autre part, il convient de rappeler que, lorsqu’une marque verbale et une marque figurative comportant des éléments verbaux sont comparées, la question qui se pose est de savoir si les signes ont en commun soit un élément verbal soit un nombre considérable de lettres dans la même position. À cet égard, il a été rappelé au point 58 ci-dessus que deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents.

77      Deuxièmement, la requérante considère à tort que le fait que l’élément commun soit non distinctif ou faiblement distinctif suffit à conclure que cet élément est négligeable dans l’impression d’ensemble produite par les signes en conflit. Or, ce n’est que si les éléments non communs des signes en conflit présentent un caractère distinctif supérieur à celui de l’élément commun que ce dernier aura une importance moindre dans l’impression d’ensemble produite par les signes en conflit et, partant, dans l’appréciation de la similitude.

78      Par ailleurs, si, du fait de leur faible, voire très faible, caractère distinctif, les éléments descriptifs d’une marque ne sont généralement pas considérés par le public comme étant dominants dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci, cela ne signifie toutefois pas qu’ils sont nécessairement négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (voir, en ce sens, arrêt du 10 mars 2021, KERRYMAID, T‑693/19, non publié, EU:T:2021:124, point 55 et jurisprudence citée).

79      En troisième lieu, il convient de relever que l’argumentation de la requérante tenant aux éléments dominants de la marque demandée manque de clarté, puisque, au point 39 de la requête, elle reproche à la chambre de recours de ne pas faire référence à l’existence d’éléments dominants dans la marque demandée, mais elle soutient, au point 40, que la marque demandée ne contient aucun élément dominant, ainsi qu’elle l’avait déjà fait valoir devant la chambre de recours.

80      Eu égard à tout ce qui précède, les griefs de la requérante doivent être écartés comme étant non fondés.

 Sur la similitude des signes en conflit

–       Sur la similitude visuelle

81      La requérante soutient, en substance, que les signes sont différents visuellement, compte tenu de leurs structures différentes, de la coïncidence d’un élément non distinctif et de l’importance visuelle, en raison de sa taille, de sa position et de son caractère unique, de l’élément figuratif de la marque demandée.

82      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

83      Au point 44 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que l’élément verbal « master » de la marque demandée reproduisait six des sept lettres de la marque antérieure. Elle a considéré que cela était d’autant plus remarquable que l’élément verbal « master » de la marque demandée était écrit en noir, tandis que ses éléments « i » et « golf » étaient écrits en vert et que l’utilisation d’une couleur différente attirait l’attention. Elle en a ainsi conclu que, en dépit des éléments verbaux supplémentaires de la marque demandée et de son élément figuratif, le fait que l’élément central « master » correspondait dans une large mesure à la marque antérieure ne serait pas ignoré et entraînerait une similitude visuelle.

84      À cet égard, ainsi qu’il a été rappelé au point 58 ci-dessus, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents.

85      En outre, lorsque l’élément unique composant la marque demandée est entièrement inclus dans la marque antérieure, les signes en cause présentent une identité partielle de nature à créer, dans l’esprit du public pertinent, une certaine impression de similitude [voir arrêt du 5 octobre 2020, X-cen-tek/EUIPO – Altenloh, Brinck & Co. (PAX), T‑847/19, non publié, EU:T:2020:472, point 101 et jurisprudence citée].

86      Or, en l’espèce, il convient de relever, à l’instar de la chambre de recours, que, d’une part, à l’exception de la lettre finale « s », la marque antérieure MASTERS est entièrement incluse dans la marque demandée. D’autre part, l’élément verbal commun « master » est clairement reconnaissable et visible dans la marque demandée, compte tenu de sa position centrale et de sa couleur différente de celle des autres éléments verbaux la composant.

87      Par ailleurs, s’il est vrai que les signes en conflit présentent des différences, qui concernent les éléments verbaux supplémentaires de la marque demandée, à savoir « i » et « golf », et son élément figuratif, à savoir un cercle au contour multicolore, toutefois, ces différences ne permettent pas d’aboutir à la conclusion de la requérante selon laquelle les signes seraient différents.

88      En effet, comme l’a considéré à juste titre la chambre de recours, au point 52 de la décision attaquée, ces éléments sont trop faibles pour différencier les signes en conflit dans une mesure telle que toute similitude entre eux soit exclue.

89      D’une part, les éléments verbaux supplémentaires « i » et « golf », compte tenu du faible caractère distinctif du premier et du caractère descriptif des produits et des services en cause du second, ne sont pas plus distinctifs que l’élément verbal commun « master ».

90      D’autre part, l’élément figuratif, qui consiste en un simple cercle au contour multicolore, n’est pas de nature à détourner l’attention des éléments verbaux. À cet égard, il convient de rappeler que, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [voir arrêt du 28 septembre 2022, G-Core Innovations/EUIPO – Coretransform (G CORELABS), T‑454/21, non publié, EU:T:2022:591, point 37 et jurisprudence citée].

91      Ce constat n’est pas remis en cause par l’arrêt du 11 novembre 2009, Frag Comercio Internacional/OHMI – Tinkerbell Modas (GREEN by missako) (T‑162/08, non publié, EU:T:2009:432), cité par la requérante, puisque, outre le fait que la légalité des décisions de l’EUIPO doit être appréciée uniquement sur le fondement du règlement 2017/1001, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci, les circonstances factuelles des affaires sont différentes. En effet, dans l’affaire citée par la requérante, les signes en conflit étaient deux marques figuratives, et l’élément verbal commun était illisible.

92      C’est donc sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a considéré que l’élément verbal commun « master » entraînait une similitude visuelle entre les signes en conflit, qui a été qualifiée, à juste titre, par la division d’opposition, de faible, ainsi qu’il a été relevé aux points 63 et 64 ci-dessus.

–       Sur la similitude phonétique

93      La requérante fait valoir que la marque demandée est composée de quatre syllabes, « i », « mas », « ter », « golf », alors que la marque antérieure est seulement composée de deux syllabes « mas » et « ters ». Elle ajoute que le début et la fin des signes sont également différents. Par suite, les signes en conflit seraient différents.

94      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

95      Au point 45 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que seul l’élément verbal « imaster.golf » de la marque demandée sera prononcé. Elle a ajouté que les syllabes « mas » et « ter » seront prononcées – selon les règles de la langue pertinente – de manière très similaire à la manière dont la marque antérieure « masters » sera prononcée, avec une différence au niveau de la terminaison « s ». Elle a précisé que, dans certaines langues de l’Union, comme le français, cette terminaison ne sera pas prononcée, de sorte que les syllabes centrales de la marque demandée et de la marque antérieure seront perçues de la même manière. Elle en a ainsi conclu que, même si le public pertinent n’ignore pas les premières et dernières syllabes supplémentaires de la marque demandée, l’identité ou, à tout le moins, le degré élevé de similitude de la prononciation de l’élément « master » entraînera une similitude phonétique.

96      À cet égard, s’il est vrai que, dans leur prononciation, les signes en conflit se distinguent, par leur nombre de syllabes, deux pour la marque antérieure et quatre pour la marque demandée, en raison des éléments verbaux supplémentaires, « i » et « golf », placés au début et à la fin de celle-ci, ils concordent, toutefois, par l’élément verbal commun « master ». Par suite, l’identité phonétique des signes en conflit porte sur la totalité de la marque antérieure, à l’exception de la lettre finale « s », qui, ainsi que l’a souligné la chambre de recours, ne sera pas prononcée dans certaines langues de l’Union, et sur deux des quatre syllabes composant la marque demandée.

97      C’est donc sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a considéré que l’élément verbal commun « master » entraînait une similitude phonétique entre les signes en conflit, qui a été qualifiée, à juste titre, par la division d’opposition, d’inférieure à la moyenne, ainsi qu’il a été relevé aux points 63 et 64 ci-dessus.

98      Par ailleurs, ce constat n’est pas remis en cause par l’arrêt du 11 juillet 2006, Torres/OHMI – Bodegas Muga (Torre Muga) (T‑247/03, non publié, EU:T:2006:198), cité par la requérante, puisque, outre le fait que la légalité des décisions de l’EUIPO doit être appréciée uniquement sur le fondement du règlement 2017/1001, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci, les signes en conflit étaient différents.

–       Sur la similitude conceptuelle

99      La requérante soutient que les signes en conflit sont différents sur le plan conceptuel. Elle allègue, en ce sens, que la combinaison verbale « imaster.golf » de la marque demandée est fantaisiste et revêt un caractère distinctif suffisant. Elle évoquerait, indirectement, l’idée d’une gestion efficace ou intelligente des terrains de golf. En revanche, la marque antérieure, ayant un rapport avec une compétition de golf, serait comprise comme une compétition destinée aux meilleurs joueurs. En outre, elle fait valoir que, selon les directives de l’EUIPO, en fonction des circonstances de l’affaire, les marques qui coïncident par un élément non distinctif peuvent être considérées comme différentes sur le plan conceptuel lorsque l’une d’elles est accompagnée d’éléments distinctifs significatifs, ce qui est le cas de la marque demandée.

100    L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

101    Au point 46 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué, en substance, que la marque antérieure pouvait être comprise comme la forme au pluriel du mot « master », qui sera compris par le public non anglophone en raison de son usage courant comme ayant un rapport avec l’enseignement supérieur, par exemple. Elle a également indiqué que le public comprendrait l’élément « master » de la marque demandée comme une forme au singulier du même mot. Elle en a ainsi conclu qu’il résultait, en raison des concepts identiques des éléments « master » et « masters » des signes en conflit, une similitude conceptuelle, qui ne sera pas exclue par les concepts liés aux autres éléments de la marque demandée, « i » et « golf », qui seront respectivement compris comme une référence à l’internet et au golf.

102    À cet égard, il convient de rappeler que, même si le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, cela n’empêche pas que, en présence d’un signe verbal même au sein d’une marque complexe, ledit consommateur le décomposera en des éléments verbaux qui, pour lui, suggèrent une signification concrète ou ressemblent à des mots qu’il connaît [voir arrêt du 23 avril 2015, Iglotex/OHMI – Iglo Foods Group (IGLOTEX), T‑282/13, non publié, EU:T:2015:226, point 84 et jurisprudence citée].

103    Or, il convient de relever, en l’espèce, que, tout d’abord, la combinaison verbale « imaster.golf » de la marque demandée n’a pas de signification claire – en ce sens, la requérante précise dans ses écritures que cette combinaison verbale évoque indirectement un concept – et se décompose en trois éléments verbaux, « i », « master » et « golf », qui seront vraisemblablement identifiés et compris par le public pertinent en raison de leur signification claire, telle que celle indiquée par la chambre de recours au point 46 de la décision attaquée et rappelée au point 101 ci-dessus.

104    Ensuite, il a été relevé au point 86 ci-dessus que l’élément verbal commun « master » était clairement reconnaissable et visible dans la marque demandée, compte tenu de sa position centrale et de sa couleur différente de celle des autres éléments verbaux composant la marque demandée.

105    Enfin, il a été relevé au point 88 ci-dessus que la chambre de recours avait considéré à juste titre que les éléments verbaux « i » et « golf » de la marque demandée présentaient un caractère distinctif inférieur à celui de l’élément « master », contrairement à ce que soutient la requérante, pour différencier les signes en conflit dans une mesure telle que toute similitude entre eux soit exclue.

106    Par suite, il y a lieu de considérer que la similitude conceptuelle entre les signes en conflit est faible.

107    C’est donc sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a considéré que l’élément verbal commun « master » entraînait une similitude conceptuelle entre les signes en conflit, qui a été qualifiée, à juste titre, par la division d’opposition de, tout au plus, faible, ainsi qu’il a été relevé au point 63 ci-dessus.

 Sur l’absence de lien entre les marques

108    La requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur lorsqu’elle a conclu, sur la seule base de la renommée de la marque antérieure, de la similitude des signes, des produits et des services, que le public pertinent établirait un lien entre les marques. En effet, la chambre de recours ne tiendrait pas compte de l’absence de caractère distinctif de la marque antérieure, de son absence de caractère unique, de la nature du public pertinent et de son niveau d’attention. La requérante fait valoir, en substance, à cet égard, que, premièrement, le risque que l’usage de la marque demandée nuise au caractère distinctif de la marque antérieure est inexistant, étant donné que le terme « masters » est utilisé de longue date sur le marché. Deuxièmement, le public pertinent, eu égard à son niveau élevé d’attention, n’établirait pas de lien entre les marques. Troisièmement, les produits et les services ne seraient absolument pas liés, même s’ils se rapportaient tous d’une façon ou d’une autre au golf. Il serait ainsi peu probable que le consommateur fasse un lien entre les marques.

109    L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

110    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, les atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, lorsqu’elles se produisent, sont la conséquence d’un certain degré de similitude entre la marque antérieure et la marque demandée, en raison duquel le public concerné effectue un rapprochement entre ces deux marques, c’est-à-dire établit un lien entre celles-ci, alors même qu’il ne les confond pas. À défaut de l’existence d’un tel lien dans l’esprit du public, l’usage de la marque demandée n’est pas susceptible de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, ou de leur porter préjudice [voir arrêt du 4 octobre 2017, Gappol Marzena Porczyńska/EUIPO – Gap (ITM) (GAPPOL), T‑411/15, non publié, EU:T:2017:689, points 182 et 183 et jurisprudence citée].

111    L’existence d’un tel lien entre les marques en conflit doit être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Parmi ces facteurs peuvent être cités : le degré de similitude entre les marques en conflit, la nature des produits ou des services pour lesquels les marques en conflit sont respectivement enregistrées, y compris le degré de proximité ou de dissemblance de ces produits ou de ces services ainsi que le public concerné, l’intensité de la renommée de la marque antérieure, le degré de caractère distinctif, intrinsèque ou acquis par l’usage, de la marque antérieure et l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public [voir arrêt du 10 octobre 2019, McDreams Hotel/EUIPO – McDonald’s International Property (mc dreams hotels Träumen zum kleinen Preis!), T‑428/18, non publié, EU:T:2019:738, point 30 et jurisprudence citée].

112    Au point 56 de la décision attaquée, la chambre de recours a estimé, en l’espèce, que la similitude entre les signes en conflit, la renommée de la marque antérieure pour l’organisation de tournois de golf et le lien direct avec le golf des produits et des services en cause permettaient de considérer que le public pertinent pouvait raisonnablement établir un lien entre les marques.

113    À cet égard, premièrement, il a été conclu aux points 92, 97 et 107 ci-dessus que l’élément verbal commun « master » entraînait des similitudes visuelle, phonétique et conceptuelle entre les signes en conflit.

114    Deuxièmement, il a été conclu au point 45 ci-dessus que la marque antérieure jouissait d’une renommée au sein de l’Union pour les services de « divertissement sous forme de tournois de golf » relevant de la classe 41.

115    Par ailleurs, il importe de rappeler que, lorsque la renommée d’une marque est établie, il est dépourvu de pertinence d’établir le caractère distinctif intrinsèque de cette marque pour qu’elle soit considérée comme possédant un caractère distinctif [voir arrêt du 1er mars 2018, Shoe Branding Europe/EUIPO – adidas (Position de deux bandes parallèles sur une chaussure), T‑629/16, EU:T:2018:108, point 135 et jurisprudence citée]. Il en ressort, ainsi qu’il a été constaté aux points 54 à 57 ci-dessus, que l’argument de la requérante selon lequel la décision attaquée ne mentionnerait rien sur le fait que la marque antérieure serait dépourvue de caractère distinctif est dénué de pertinence.

116    Il en va de même de l’argument selon lequel la décision attaquée ne mentionnerait rien sur le fait que la marque antérieure ne serait pas unique, puisque cette condition ne figure pas parmi les conditions, rappelées aux points 15 et 16 ci-dessus, devant être remplies pour que l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 s’applique.

117    Troisièmement, il a été relevé au point 25 ci-dessus que les produits et les services en cause ont tous un lien avec le golf, notamment avec la gestion de terrains de golf, comme l’a relevé à juste titre la chambre de recours dans la décision attaquée.

118    En tout état de cause, il résulte des termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 que son application n’est pas subordonnée à la condition que les produits et les services visés par les signes en conflit soient identiques ou similaires. Par suite, l’argument du requérant selon lequel les produits et les services seraient si éloignés les uns des autres qu’il serait peu probable que la marque demandée crée dans l’esprit du consommateur le lien nécessaire avec la marque antérieure est dépourvu de pertinence.

119    Quatrièmement, il a été relevé au point 24 ci-dessus que le public pertinent était composé, au regard des produits et des services en cause, des professionnels du golf et des amateurs de golf, faisant preuve d’un niveau d’attention élevé, compte tenu du caractère onéreux de ces produits et services. Il a été conclu au point 26 ci-dessus que les publics constitués des consommateurs concernés par les produits et les services désignés par les marques en conflit « se chevauchent », aux termes de la jurisprudence mentionnée au point 23 ci-dessus, en ce qu’ils se composent des professionnels du golf.

120    La requérante soutient, en se référant aux arrêts du 19 mai 2015, Swatch/OHMI – Panavision Europe (SWATCHBALL) (T‑71/14, non publié, EU:T:2015:293), du 26 septembre 2018, Puma/EUIPO – Doosan Machine Tools (PUMA) (T‑62/16, EU:T:2018:604), et du 28 mai 2020, Galletas Gullón/EUIPO – Intercontinental Great Brands (gullón TWINS COOKIE SANDWICH) (T‑677/18, non publié, EU:T:2020:229), que, compte tenu de son niveau élevé d’attention, le public pertinent n’établira pas de lien entre les marques.

121    Or, il a été rappelé au point 111 ci-dessus que l’existence d’un lien entre les marques en conflit doit être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Comme cela a été souligné à juste titre par l’EUIPO, la question de savoir si le public pertinent établira un lien entre les marques doit être résolue à la lumière des faits et des circonstances de chaque affaire, qui doivent être mis en balance, ce qui est au demeurant précisé au point 33 de l’arrêt du 19 mai 2015, SWATCHBALL (T‑71/14, non publié, EU:T:2015:293), cité par la requérante. Par conséquent, ces références aux affaires dans lesquelles la mise en balance des facteurs a conduit à un résultat différent, en raison des circonstances propres à celles-ci, ne sont pas pertinentes aux fins de la présente appréciation. Il s’ensuit qu’il ne saurait être valablement reproché à la chambre de recours d’avoir conclu, à la lumière des circonstances de l’espèce, que même un public attentif pouvait établir un lien entre les marques sans les confondre.

122    Eu égard aux considérations qui précèdent et à la jurisprudence rappelée au point 111 ci-dessus, l’existence d’un risque d’association entre les marques en conflit ne peut être écartée. En effet, même à supposer que les produits et les services en cause ne présentent qu’un degré de proximité réduit, au regard de leurs supposées finalité, nature et destination différentes comme le soutient la requérante, ils concernent néanmoins le golf. Ainsi, il est hautement improbable que le public visé par la marque demandée, à savoir les professionnels du golf, comme les personnes qui gèrent et administrent les clubs de golf, ne connaisse pas également la marque antérieure, compte tenu de sa renommée pour les services de « divertissement sous forme de tournois de golf ». C’est donc sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a pu considérer que, dans les circonstances de l’espèce, le public pertinent était susceptible d’établir un lien entre ces marques.

 Sur l’absence de profit indu

123    La requérante soutient que la conclusion de la chambre de recours selon laquelle la marque demandée jouira de l’image et des caractéristiques de la marque antérieure est non seulement dénuée de motivation et d’éléments factuels ou théoriques la corroborant, mais également en contradiction directe avec la jurisprudence. En particulier, elle fait valoir que la chambre de recours s’est contredite lorsqu’elle a apprécié le public pertinent, d’une part, en reconnaissant que les produits et les services étaient liés à la « gestion de terrains de golf » et que le public pertinent était « attentif » et, d’autre part, en affirmant que le public pertinent était composé de « joueurs de golf et d’amateurs de golf ». La requérante fait également valoir qu’elle a démontré, par l’exploitation commerciale et économique ininterrompue dans l’Union entre 1991 et 2022 des termes « master golf », au moyen notamment de la marque nationale espagnole BB MASTER GOLF, qu’il n’existait aucun risque tangible ou potentiel qu’elle bénéficie de la renommée ou du caractère distinctif de la marque antérieure.

124    L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

125    À cet égard, il importe de rappeler, à titre liminaire, que la notion de profit indûment tiré de la renommée de la marque antérieure, désignée sous le terme de « parasitisme », ne s’attache pas au préjudice subi par celle-ci, mais à l’avantage tiré par le tiers de l’usage sans juste motif du signe similaire ou identique à celle-ci. Elle englobe notamment les cas où, grâce à un transfert de l’image de la marque ou des caractéristiques projetées par celle-ci vers les produits désignés par le signe identique ou similaire, il existe une exploitation manifeste dans le sillage de la marque renommée [voir arrêt du 27 octobre 2016, Spa Monopole/EUIPO – YTL Hotels & Properties (SPA VILLAGE), T‑625/15, non publié, EU:T:2016:631, point 61 et jurisprudence citée].

126    Le risque qu’un profit puisse être indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure se produit lorsque le public concerné, sans nécessairement confondre l’origine commerciale du produit ou du service en cause, est attiré par la marque demandée elle-même et achètera le produit ou le service visé par celle-ci au motif qu’il porte cette marque semblable à une marque antérieure renommée (voir arrêt du 27 octobre 2016, SPA VILLAGE, T‑625/15, non publié, EU:T:2016:631, point 62 et jurisprudence citée).

127    Il a été reconnu par la jurisprudence que le titulaire de la marque antérieure n’était pas tenu de démontrer l’existence d’une atteinte effective et actuelle à sa marque. Il doit uniquement apporter des éléments permettant de conclure prima facie à un risque futur non hypothétique de profit indu ou de préjudice. Une telle conclusion peut être établie notamment sur la base de déductions logiques résultant d’une analyse des probabilités et en prenant en compte les pratiques habituelles dans le secteur commercial pertinent ainsi que toute autre circonstance de l’espèce [voir arrêt du 6 juillet 2012, Jackson International/OHMI – Royal Shakespeare (ROYAL SHAKESPEARE), T‑60/10, non publié, EU:T:2012:348, point 53 et jurisprudence citée].

128    Afin de déterminer si l’usage du signe contesté tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale qui tienne compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, au nombre desquels figurent, notamment, l’intensité de la renommée et le degré de caractère distinctif de la marque, le degré de similitude entre les marques en conflit ainsi que la nature et le degré de proximité des produits ou des services concernés (voir arrêt du 6 juillet 2012, ROYAL SHAKESPEARE, T‑60/10, non publié, EU:T:2012:348, point 54 et jurisprudence citée).

129    Au point 62 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, en substance, que, compte tenu de la renommée de la marque antérieure, il était très probable que l’image et les caractéristiques projetées par celle-ci seraient transférées à la marque demandée et susciteraient un intérêt pour les produits et les services visés par cette dernière. La marque demandée bénéficiera, ainsi, selon la chambre de recours, d’un « coup de pouce » indu, en raison de son lien avec la marque antérieure dans l’esprit des consommateurs pertinents. Cette attention ne serait, en effet, pas due aux efforts de la requérante, mais plutôt au pouvoir d’attraction de la marque antérieure et aux efforts de marketing déployés par l’intervenante pour promouvoir sa marque pendant de nombreuses années.

130    À cet égard, premièrement, il a été estimé au point 122 ci-dessus qu’il était hautement improbable que le public visé par la marque demandée ne connaisse pas la marque antérieure, compte tenu de sa renommée pour les services de « divertissement sous forme de tournois de golf ». Il a ainsi été conclu que la chambre de recours avait pu considérer, à juste titre, que, dans les circonstances de l’espèce, le public pertinent était susceptible d’établir un lien entre ces marques.

131    Deuxièmement, il y a lieu de rappeler que, si les signes en conflit ne présentaient globalement qu’un faible degré de similitude, cette similitude découlait toutefois de la présence dans la marque demandée de l’élément verbal commun « master », qui, à l’exception de la lettre finale « s », correspondait à la marque antérieure dans son intégralité.

132    Troisièmement, il a été relevé au point 27 ci-dessus que la contradiction alléguée par la requérante concernant l’appréciation du public pertinent reposait sur une lecture incomplète de la décision attaquée. En effet, s’il est vrai que la chambre de recours a indiqué au point 62 de celle-ci que le public pertinent était composé de joueurs de golf et d’amateurs de golf, elle a en revanche précisé à son point 63 que la renommée de la marque antérieure s’étendait également au public qui pratiquait le golf de manière professionnelle, comme les personnes participant à la gestion de terrains de golf, et qu’il y avait ainsi un chevauchement entre les marques au niveau du public pertinent.

133    C’est donc sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a considéré qu’il existait, en l’espèce, prima facie, un risque futur non hypothétique que la requérante tire un profit indu de la réputation de la marque antérieure, réputation qui résulte des activités, des efforts et des investissements réalisés par l’intervenante.

134    Par suite, la circonstance selon laquelle la requérante ne saurait tirer indûment profit de la renommée de la marque antérieure, puisqu’elle aurait coexisté pendant plus de 20 ans avec la marque nationale espagnole BB MASTER GOLF, est inopérante, dès lors qu’il est constant que cette marque n’était plus utilisée depuis le 26 mai 2010, date de sa déchéance, soit antérieurement à l’enregistrement de la marque antérieure, et que, en tout état de cause, cette coexistence n’aurait concerné que l’Espagne, et non l’Union dans son ensemble, territoire pour lequel la marque antérieure était protégée (voir, en ce sens, arrêt du 10 mars 2021, KERRYMAID, T‑693/19, non publié, EU:T:2021:124, point 160 et jurisprudence citée).

135    Enfin, la requérante n’a avancé devant la chambre de recours aucun juste motif sur lequel reposerait l’usage de la marque demandée, alors qu’il lui appartenait d’en établir un.

136    C’est donc sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a considéré que l’opposition était fondée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.

137    Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité des deuxième et troisième chefs de conclusions de la requérante.

 Sur les dépens

138    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

139    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’intervenante, conformément aux conclusions de celle-ci.

140    En revanche, l’EUIPO n’ayant conclu à la condamnation de la requérante aux dépens qu’en cas d’audience, il convient, en l’absence d’organisation d’une audience, de décider que l’EUIPO supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Portal Golf Gestión, SA supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par Augusta National, Inc.

3)      L’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supportera ses propres dépens.

Costeira

Zilgalvis

Tichy-Fisslberger

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 novembre 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.