Language of document : ECLI:EU:C:2014:2107

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NIILO JÄÄSKINEN

présentées le 17 juillet 2014 (1)

Affaire C‑261/13 P

Peter Schönberger

contre

Parlement européen

«Pourvoi – Droit de pétition au Parlement européen – Articles 20 TFUE et 227 TFUE – Article 44 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Absence de compétence de la commission des pétitions pour statuer sur les questions soulevées – Décision de classer la pétition – Recours en annulation – Acte produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter la situation juridique d’un particulier – Article 263 TFUE»





I –    Introduction

1.        Conformément à un rapport de la commission des pétitions du Parlement européen (ci‑après la «commission des pétitions»), «la pétition constitue un outil important en tant qu’elle permet à l’individu de faire entendre officiellement sa voix et d’obtenir que les sujets qui le préoccupent soient examinés au sein des institutions de l’[Union]. Elle forme donc un lien direct entre nous, représentants élus, et ceux dont nous entendons défendre les intérêts» (2). Ainsi que le démontrent les statistiques de la commission des pétitions, cet instrument a effectivement connu un grand succès. En 2013, le nombre des pétitions enregistrées auprès de cette commission a dépassé les 3 000, ce qui représente une augmentation de plus de 45 % par rapport à l’année 2012 et un doublement par rapport à l’année 2011 (3).

2.        Par son pourvoi, M. Schönberger (ci‑après le «requérant») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne Schönberger/Parlement (T‑186/11, EU:T:2013:111, ci‑après l’«arrêt attaqué»), qui a rejeté comme irrecevable la demande d’annulation de la décision de la commission des pétitions du 25 janvier 2011 ayant mis fin à l’examen de la pétition présentée par le requérant le 2 octobre 2010 (4) (ci‑après la «décision attaquée»).

3.        La présente affaire a donc trait à l’interprétation de la portée du droit de pétition, au sens des articles 20 TFUE et 227 TFUE, tel que confirmé par l’article 44 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la «Charte»). Pour la première fois, la Cour est appelée à trancher la question de savoir si les décisions adoptées par la commission des pétitions relèvent d’un contrôle par le juge de l’Union, au sens de l’article 263 TFUE.

4.        Dans le cadre des présentes conclusions, il convient donc d’analyser l’exercice du droit de pétition à la lumière de la jurisprudence élaborée jusqu’à présent à ce sujet par le Tribunal, en la confrontant à la jurisprudence de la Cour relative à la notion d’acte attaquable. En effet, l’arrêt attaqué représente une application fidèle de l’arrêt Tegebauer/Parlement (5) dans lequel le Tribunal s’est livré à une interprétation selon laquelle l’appréciation de la recevabilité d’une pétition doit faire l’objet d’un contrôle juridictionnel, au motif qu’une décision d’irrecevabilité ou de classement sans suite d’une pétition est de nature à affecter l’essence du droit de pétition et constitue, de ce fait, une décision susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation au sens de l’article 263 TFUE (6).

5.        D’emblée, je considère que, dans l’arrêt Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466), le Tribunal a appliqué de manière erronée la notion d’un acte attaquable et cette erreur repose, me semble‑t‑il, sur une lecture extensive de la portée du droit de pétition. Or, à mon sens, le droit de pétition constitue un outil de dialogue politique direct, l’expression d’une interaction démocratique entre un citoyen et les élus qui devrait, sauf cas exceptionnel, rester à l’abri de l’intervention du juge de l’Union.

6.        Par conséquent, j’entends, dans les présentes conclusions, inviter la Cour à invalider la jurisprudence Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466) qui constitue le fondement de l’arrêt attaqué. En tout état de cause, afin de garantir la sécurité juridique des justiciables, la Cour devrait, dans le cadre du présent pourvoi, adopter une position expresse relative à la jurisprudence Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466) soit en l’invalidant, soit en la confirmant. Dans cette dernière hypothèse, le traitement du pourvoi ne présenterait guère de difficulté.

II – Le cadre juridique

7.        Le droit de pétition est reconnu par les articles 20, sous d), TFUE et 227 TFUE en tant qu’expression particulière de la citoyenneté européenne.

8.        Aux termes de l’article 44 de la Charte:

«Tout citoyen de l’Union ainsi que toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un État membre a le droit de pétition devant le Parlement européen.» (7)

9.        Le traitement des pétitions a été régi par le titre VIII du règlement du Parlement européen (ci‑après le «règlement intérieur»). Les dispositions applicables ratione temporis dans la présente affaire sont les articles 191 à 193 du règlement intérieur (8). Toutefois, il convient de noter que, à la suite de la modification du règlement intérieur, intervenue en 2011, ces dispositions ont été modifiées et figuraient désormais aux articles 201 à 203 du règlement intérieur (ci‑après le «règlement intérieur modifié») (9). Enfin, à la suite d’une modification intervenue en juillet 2014, le droit de pétition est actuellement régi par les articles 215 à 218 du règlement intérieur modifié dans le cadre de la 8ème législature (10). Toutefois, cette dernière modification n’a pas affecté le libellé des dispositions pertinentes par rapport au règlement intérieur modifié.

10.      Aux termes de l’article 191 du règlement intérieur, intitulé «Droit de pétition»:

«1.      Tout citoyen de l’Union européenne ainsi que toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège social dans un État membre a le droit de présenter, à titre individuel ou en association avec d’autres citoyens ou personnes, une pétition au Parlement européen sur un sujet relevant des domaines d’activité de l’Union européenne et qui le ou la concerne directement.

[…]

6.      Les pétitions déclarées irrecevables par la commission sont classées. La décision motivée est notifiée au pétitionnaire.

[…]»

11.      L’article 192 du règlement intérieur, intitulé «Examen des pétitions», prévoit:

«1.      La commission compétente peut décider d’élaborer des rapports ou se prononcer de toute autre manière sur les pétitions qu’elle a déclaré recevables.

La commission peut, en particulier dans le cas de pétitions visant à modifier des dispositions législatives en vigueur, solliciter l’avis d’une autre commission, conformément à l’article 46.

[…]

3.       Dans le cadre de l’examen des pétitions ou de la constatation des faits, la commission peut auditionner des pétitionnaires, organiser des auditions générales ou envoyer des membres sur place pour constater les faits.

[…]

7.       Les pétitionnaires sont avisés par le Président du Parlement des décisions prises et de leurs motifs.»

12.      Aux termes de l’article 201, paragraphe 7, du règlement intérieur modifié, les pétitions inscrites sur le rôle général sont renvoyées par le [président du Parlement] à la commission compétente, qui établit si elles sont recevables ou non selon l’article 227 [TFUE].

13.      L’article 201, paragraphe 8, du règlement intérieur modifié prévoit:

«Les pétitions déclarées irrecevables par la commission sont classées. La décision motivée est notifiée aux pétitionnaires. Dans la mesure du possible, d’autres voies de recours peuvent être recommandées.»

14.      L’article 203 bis du règlement intérieur modifié dans la version résultant de la décision du Parlement européen du 22 mai 2012 (11) régit également le traitement de l’initiative citoyenne.

III – Les antécédents du litige, la procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

15.      Le requérant, ancien fonctionnaire du Parlement, a contesté les points de mérite qui lui ont été attribués dans le cadre de l’exercice de promotion de l’année 2005. À la suite de la plainte introduite le 15 novembre 2008 par le requérant, le Médiateur européen a conclu par décision du 13 juillet 2010 à un acte de mauvaise administration du Parlement en ce que le président du Parlement aurait dû statuer sur la réclamation du requérant.

16.      Le 2 octobre 2010, le requérant a adressé, sur le fondement de l’article 227 TFUE, une pétition au Parlement, dans laquelle il demandait que le Parlement prenne des mesures visant à remédier au constat du Médiateur.

17.      Par la décision attaquée, le président de la commission des pétitions s’est adressé au requérant dans les termes suivants: «[J]e vous informe par la présente que la commission a examiné votre pétition et l’a déclarée recevable conformément au règlement du Parlement européen dans la mesure où elle relève des domaines d’activité de l’Union européenne. Toutefois, la commission des pétitions n’est pas en mesure de traiter votre pétition sur le fond et a donc pris note de vos remarques. Votre pétition sera transmise au directeur général chargé du personnel pour qu’il prenne les mesures appropriées. Je vous prie également de noter que l’examen de votre pétition est ainsi achevé.» Par conséquent, l’examen de la pétition a été clos.

18.      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 26 mars 2011, M. Schönberger a demandé l’annulation de la décision attaquée au motif qu’elle mettait un terme au traitement de sa pétition sans procéder à un examen sur le fond.

19.      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours comme irrecevable. En se fondant sur l’arrêt Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466), le Tribunal a jugé que, dès lors que la pétition du requérant a été considérée comme recevable, la décision attaquée ne produisait pas des effets juridiques obligatoires de nature affecter la situation juridique du requérant. Pour plus de détails, il est renvoyé à l’arrêt attaqué.

IV – Les conclusions des parties et la procédure devant la Cour

20.      Par son pourvoi, M. Schönberger demande à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué, de faire droit au recours introduit en première instance, d’annuler la décision attaquée ainsi que de condamner le Parlement aux dépens.

21.      Dans son mémoire en réponse, le Parlement demande à la Cour de rejeter le pourvoi et de condamner le requérant aux dépens.

V –    Sur le traitement du pourvoi

22.      Au soutien de son pourvoi le requérant invoque six griefs (12), tirés, premièrement, de la méconnaissance des faits (13), deuxièmement, de la méconnaissance du champ d’application du droit fondamental de pétition (14), troisièmement, du défaut de motivation et du défaut de logique entachant l’arrêt attaqué (15), quatrièmement, d’une erreur d’appréciation due à une application erronée de l’arrêt Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466) (16), cinquièmement, d’un défaut de motivation visant le non‑examen de l’absence de motivation de la décision attaquée (17) et, sixièmement, de l’examen incomplet des faits (18).

23.      À cet égard, je propose de regrouper lesdites critiques sous deux moyens, en fonction du lien qui peut être établi entre elles. Le premier moyen comprendra les griefs relatifs à l’étendue du droit de pétition (tirés des deuxième, troisième et quatrième griefs du pourvoi). Le deuxième moyen comprendra les griefs d’ordre procédural (tirés des premier, cinquième et sixième griefs du pourvoi).

24.      Dans la mesure où la réponse aux arguments relatifs à la substance du droit de pétition ainsi qu’à la portée de l’arrêt Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466) est déterminante pour le traitement du présent pourvoi, je propose de commencer par l’examen de ce moyen.

VI – Sur l’étendue du droit de pétition (premier moyen englobant les deuxième, troisième et quatrième griefs du pourvoi)

A –    Argumentation des parties

25.      Par l’ensemble des critiques regroupées sous le premier moyen, le requérant conteste le champ d’application du droit de pétition. Premièrement, en visant le point 18 de l’arrêt attaqué, le requérant reproche au Tribunal d’avoir jugé que seule une décision qualifiant la pétition d’irrecevable est susceptible de restreindre l’exercice du droit de pétition. Ainsi, le champ d’application du droit de pétition aurait été limité à tort à la question de la recevabilité des pétitions. Or, le Parlement serait tenu non seulement d’examiner la recevabilité d’une pétition, mais également d’analyser le fond des pétitions considérées comme recevables. Le refus de traiter une pétition au fond empêcherait l’exercice dudit droit en ce que le pétitionnaire se verrait privé de la possibilité de contribuer à l’amélioration du droit de l’Union et de participer à la vie démocratique de l’Union au sens des articles 10, paragraphe 3, TUE, et 24, deuxième alinéa, TFUE.

26.      Deuxièmement, le requérant reproche au Tribunal un raisonnement illogique en ce qu’il aurait affirmé, d’une part, que, en matière de pétitions, le Parlement n’adopte jamais d’actes contraignants et, d’autre part, que la décision par laquelle une pétition est déclarée irrecevable ou classée sans suite peut faire l’objet d’un recours en annulation (19). Troisièmement, le requérant conteste l’application par le Tribunal de l’arrêt Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466) aux points 16, 17 et 19 de l’arrêt attaqué.

27.      Pour sa part, le Parlement rejette l’ensemble des griefs soulevés. Il souligne, notamment, que, eu égard à la nature extrajudiciaire du droit de pétition, celui‑ci ne garantit qu’un droit de saisir le Parlement, tout en préservant la liberté politique de ce dernier de donner suite ou non à une pétition. Le Parlement fait valoir que ni le droit de pétition consacré par le droit primaire ni les dispositions du règlement intérieur ne permettent de conclure que le pétitionnaire dispose de droits procéduraux particuliers aux fins de l’exercice effectif du droit de pétition. Par ailleurs, il partage l’analyse découlant de l’arrêt Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466).

B –    Sur le droit de pétition en droit de l’Union

1.      Sur l’exercice du droit de pétition

28.      Ainsi que je l’ai déjà signalé, la faculté de présenter une pétition constitue un instrument de participation directe aux fonctions politiques exercées par les représentants des peuples de l’Union. Néanmoins, dans la mesure où c’est pour la première fois que la Cour est invitée à analyser le droit de pétition dans son ensemble, il me paraît utile de présenter une analyse détaillée de cet instrument.

29.      Alors que le droit de pétition au Parlement n’a pas été prévu par les traités fondateurs (20), à l’issue de la première élection au suffrage universel, le Parlement a modifié en 1981 son règlement de procédure et a officiellement reconnu la faculté de présenter des pétitions (21), faculté qui a été ensuite renforcée par une déclaration interinstitutionnelle en 1989 (22). Ce n’est qu’avec l’entrée en vigueur du traité de Maastricht que le droit de pétition au Parlement a été reconnu dans le traité et qu’il s’est finalement vu attribuer le statut de droit fondamental incorporé dans l’article 44 de la Charte (23).

30.      Le droit de pétition (24) a donc été initialement conçu comme un instrument lié à la citoyenneté européenne (25). Le droit d’adresser une pétition au Parlement, consacré par les articles 20, sous d), TFUE 24, paragraphe 2, TFUE et 227 TFUE, et le droit de soumettre une plainte au Médiateur, conformément à l’article 228 TFUE, constituent des moyens permettant aux citoyens européens d’exercer leurs droits civiques démocratiques directs. L’initiative citoyenne européenne, instituée par le traité de Lisbonne conformément à l’article 11, paragraphe 4, TUE (26), constitue un outil comparable.

31.      Indispensable à l’exercice, par les citoyens, de la participation et du contrôle démocratiques, le droit de pétition renforce donc la communication entre le Parlement et les citoyens et résidents de l’Union, tout en représentant, pour ces personnes, un mécanisme ouvert, démocratique et transparent permettant d’obtenir, lorsque cela est légitime et justifié, une solution extrajudiciaire à leur requête (27).

32.      Il est vrai qu’aucun acte n’a défini la pétition en tant que telle. Toutefois, le Parlement a entrepris des efforts en ce sens, en proposant que cette dernière couvre «toute plainte, consultation, demande d’intervention, réaction aux résolutions du Parlement ou aux décisions d’autres institutions ou organes communautaires, qui lui seraient transmises par des individus et des associations» (28). Sans qu’une telle définition ait été adoptée officiellement, dans les rapports de la commission des pétitions, les pétitions sont entendues comme «des demandes d’intervention, d’action ou de modification d’une politique ou à des consultations, présentées au Parlement». Enfin, je note que, dans un rapport de 2001 (29), un projet de renforcement du droit de pétition et une modification du traité ont été présentés, sans qu’une suite particulière leur ait été réservée.

33.      À titre de comparaison, selon mes informations, dans plusieurs États membres, le droit de pétition est un droit constitutionnel (Espagne, France, Italie, Luxembourg, Roumanie) ou fondamental (République tchèque, Allemagne (30)). Il est néanmoins difficile de donner une définition générale du droit de pétition. Selon les traditions nationales, la pétition peut incorporer une suggestion ou une information, une initiative, exprimant des plaidoiries ou doléances (31). Alors que certains États membres ne connaissent pas d’instrument permettant aux citoyens de saisir le Parlement d’une affaire quelconque (République de Finlande, Royaume de Suède), ces derniers disposent d’autres moyens pour entrer en contact avec les députés, tels que les lettres adressées au Parlement (32).

34.      En droit de l’Union, l’exercice du droit de pétition a été ouvert à tout résident de l’Union et à toute personne morale ayant son siège statutaire dans un État membre. Toutefois, à la suite d’une modification du règlement intérieur intervenue en 2011, le recours aux pétitions a également été élargi à des personnes physiques ou morales qui ne sont pas des citoyens de l’Union et qui ne résident pas ou n’ont pas de siège social dans un État membre (33). Par conséquent, la pétition n’est plus strictement liée à la citoyenneté de l’Union (34). Par ailleurs, les pétitions peuvent être signées par plusieurs millions de personnes qui doivent être représentées par un pétitionnaire (35).

35.      Toutefois, en vertu de l’article 227 TFUE, la possibilité de présenter une pétition se limite aux matières relevant du champ d’application du droit de l’Union. Ainsi, le droit de pétition joue un rôle dans le cadre de la conception et du contrôle du respect du droit de l’Union.

36.      D’une part, les pétitions inspirent le travail d’autres commissions du Parlement, compétentes sur le fond pour rédiger des actes législatifs dans des domaines particuliers. Le Parlement peut également adopter par la suite des résolutions dans des domaines variés et politiquement sensibles (36).

37.      D’autre part, la pétition constitue une forme de contrôle de l’application du droit de l’Union a posteriori par les citoyens de l’Union. En effet, les pétitions sont une source précieuse d’informations pour détecter des manquements au droit de l’Union (37), surtout dans les domaines de l’environnement, du marché intérieur, dans les domaines liés à la reconnaissance des qualifications professionnelles, le secteur des services financiers (38) et surtout en matière de violation des droits fondamentaux (39). Dans plusieurs cas, le dépôt d’une pétition qui coïncide avec la présentation simultanée d’une plainte à la Commission européenne peut aboutir à engager une procédure en manquement ou un recours en carence (40). Les statistiques démontrent qu’un quart, voire un tiers des pétitions sont liées ou donnent lieu à des procédures d’infraction (41). Toutefois, la problématique de la suite à donner tant aux plaintes qu’aux pétitions ne relève pas de l’objet de la présente procédure (42).

2.      Sur la procédure d’examen des pétitions

38.      Les modalités d’exercice du droit de pétition sont régies par les articles 201 à 203 du règlement intérieur modifié (43) (dans sa dernière version) (44). Au regard de ces dispositions, il me semble incontestable que le Parlement s’efforce d’instaurer une procédure transparente et équitable qui permet à toute personne habilitée d’exercer son droit de pétition (45).

39.      Conformément aux dispositions en vigueur, les demandes de pétition qui satisfont aux conditions de recevabilité formelle (46) sont inscrites au rôle général, dans leur ordre d’arrivée. Les pétitions qui ne remplissent pas les conditions prévues à l’article 201, paragraphe 2, du règlement intérieur modifié sont classées et les pétitionnaires informés des motifs du classement. Tout en admettant que les pétitions non enregistrées et celles qui sont irrecevables relèvent de deux catégories distinctes (47), la différence entre les deux n’est pas facile à établir à la lumière des rapports de la commission des pétitions (48).

40.      Les demandes inscrites sont transmises à la commission des pétitions qui vérifie leur recevabilité matérielle à la lumière de l’article 227 TFUE, dont il ressort que toute personne peut présenter une pétition sur un sujet relevant des domaines d’activité de l’Union et qui le ou la concerne directement.

41.      Les pétitions déclarées irrecevables à ce stade sont classées. Le règlement intérieur modifié prévoit également un vote dans le cas où les membres de la commission des pétitions ne parviendraient pas à un consensus sur la recevabilité de la pétition. En tout état de cause, une décision d’irrecevabilité motivée est notifiée au pétitionnaire, souvent accompagnée de la suggestion de s’adresser à l’organe national ou international compétent (49). À cet égard, l’article 201, paragraphe 8, dudit règlement prévoit la possibilité de recommander d’autres voies de recours.

42.      Parmi les demandes recevables figurent les demandes closes avec réponse immédiate ou celles envoyées pour analyse à d’autres institutions ou à d’autres organes, pour avis ou information. La commission des pétitions demande ensuite généralement à la Commission de lui fournir toute information pertinente ou son avis sur les points soulevés par le pétitionnaire.

43.      Au regard des dispositions régissant l’examen des pétitions, il est clair que les compétences de la commission des pétitions sont en réalité assez limitées. En effet, cette commission «n’est pas un organe judiciaire habilité à dire ce qui est juste et ce qui ne l’est pas dans une affaire déterminée ni à se prononcer sur le caractère approprié ou non d’une décision politique prise par l’autorité compétente d’un État membre, pas plus qu’elle n’est investie d’un pouvoir de coercition» (50).

44.      En revanche, il est clair que la commission des pétitions jouit d’une liberté d’appréciation quant à la suite à donner à une pétition. Par ailleurs, la décision concernant la recevabilité d’une pétition peut également revêtir un caractère discrétionnaire, malgré le lien établi avec l’article 227 TFUE. Certes, il est vrai que cette dernière disposition exige pour qu’une pétition soit recevable qu’elle porte sur un sujet relevant des domaines d’activité de l’Union et qu’elle concerne le pétitionnaire directement. Toutefois, au‑delà desdites exigences formelles, il ressort de l’article 201, paragraphe 7, du règlement intérieur modifié que, si la commission des pétitions ne parvient pas à un consensus sur la recevabilité de la pétition, celle‑ci peut être déclarée recevable à la demande d’un quart au moins des membres de ladite commission.

45.      Enfin, je rappelle que la commission des pétitions considère que «la procédure de pétition peut, et devrait, demeurer un complément aux autres mécanismes de recours [au sens large] dont peuvent se prévaloir les citoyens, tels que les plaintes à la Commission ou au Médiateur européen» (51). À côté des autres organes, institutions et instruments que sont les commissions d’enquête, l’initiative citoyenne européenne et le Médiateur, la commission des pétitions joue un rôle autonome et clairement défini en tant que point de contact pour chaque citoyen (52).

46.      Cela m’amène à examiner la problématique de la notion d’acte attaquable, telle qu’elle a été interprétée par le Tribunal dans l’arrêt Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466) et qui l’a conduit dans l’arrêt attaqué, à rejeter le recours comme irrecevable au motif que, aux termes de la décision attaquée, la pétition avait été qualifiée de recevable.

C –    Sur les effets juridiques de l’exercice du droit de pétition à l’aune de l’article 263 TFUE

1.      Sur la notion d’acte produisant des effets juridiques

47.      Selon une jurisprudence constante, un recours en annulation peut être exercé contre toutes dispositions prises par les institutions, quelles qu’en soient la nature ou la forme, qui visent à produire des effets de droit. En particulier, sont considérées comme attaquables, au sens de l’article 263 TFUE, toutes les mesures produisant des effets juridiques obligatoires qui sont susceptibles d’affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique (53). Sont en revanche irrecevables les recours dirigés contre des actes qui ne constituent que des mesures d’ordre interne à l’administration et qui ne créent, par conséquent, aucun effet à l’extérieur de celle‑ci (54).

48.      Dès lors que, en l’espèce, il s’agit d’un acte adopté par le Parlement, il convient de rappeler que, dans l’arrêt Les Verts/Parlement, la Cour a confirmé qu’un recours en annulation pouvait être dirigé contre les actes du Parlement destinés à produire des effets juridiques vis‑à‑vis des tiers (55). Selon une jurisprudence constante, des actes ne touchant que l’organisation interne des travaux du Parlement ne peuvent, toutefois pas, faire l’objet d’un recours en annulation (56).

49.      Ainsi, la Cour a jugé que la constatation du président du Parlement selon laquelle la procédure budgétaire a été menée à terme relève des actes de nature à produire des effets juridiques vis à‑vis des tiers (57). La Cour a également considéré qu’était recevable un recours contre la réglementation relative à l’indemnité transitoire de fin de mandat en faveur des députés du Parlement (58). La voie du contrôle judiciaire a également été ouverte dans le cas d’une résolution du Parlement qui désignait le personnel chargé de certaines activités (59).

50.      En revanche, la Cour a conclu que les actes relatifs à la constitution des commissions d’enquête du Parlement ne concernent que l’organisation interne des travaux du Parlement (60). De même, la Cour a rappelé que les délégations interparlementaires n’ont qu’une compétence d’information et de contact et que les actes relatifs à la désignation de leurs membres et à l’élection de leur président ne sont pas des actes attaquables (61). La Cour a encore jugé qu’une lettre d’une institution envoyée en réponse à une demande formulée par un destinataire ne constituait pas un acte ouvrant la voie du recours en annulation (62). La Cour a également joint au fond l’examen de la recevabilité du recours contre les actes du Parlement (63).

51.      S’agissant du cas d’espèce, au regard des caractéristiques du droit de pétition en tant qu’instrument du dialogue politique relevant de la responsabilité du Parlement, on pourrait admettre que les décisions adoptées par la commission des pétitions sont, à première vue, assimilables à des actes d’organisation interne du Parlement, adoptés dans le cadre de ses travaux politiques. Au regard de ce constat, il convient néanmoins d’examiner les effets des décisions de la commission des pétitions à l’égard des tiers, tels qu’ils découlent de l’arrêt Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466).

2.      Sur les effets des décisions de la commission des pétitions

a)      Sur l’arrêt Tegebauer/Parlement

52.      Tout d’abord, contrairement aux affirmations du requérant, il est constant que l’arrêt Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466) ne confère pas à toutes les décisions de la commission des pétitions la qualité de décisions attaquables, ce qui ouvrirait la voie du contrôle par le juge de l’Union.

53.      En revanche, le Tribunal a jugé dans cet arrêt que, «si les suites données par le Parlement à une pétition déclarée recevable ne relèvent pas du domaine du contrôle du juge de l’Union, le Parlement conservant à cet égard une entière liberté d’appréciation de nature politique, l’appréciation de la recevabilité d’une pétition doit cependant faire l’objet d’un contrôle juridictionnel, celui‑ci étant la seule garantie de l’effectivité du droit à présenter une pétition énoncé par l’article 194 CE. En effet, une décision d’irrecevabilité et de classement sans suite d’une pétition par la commission des pétitions est de nature à affecter l’essence même du droit des citoyens à présenter une pétition tel que consacré par le traité et constitue de ce fait une décision pouvant faire l’objet d’un recours en annulation».

54.      En l’espèce, il ressort de l’arrêt attaqué que le Tribunal a appliqué le principe qui veut que seules les décisions de la commission des pétitions qui qualifient les demandes d’irrecevables sont susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation.

55.      Or, selon le requérant, une telle conclusion est entachée d’une erreur de logique dès lors que, d’une part, la jurisprudence du Tribunal laisse une grande marge d’appréciation quant au bien‑fondé des pétitions et aux suites à donner à celles‑ci et, d’autre part, confère à certaines de ces décisions la nature d’acte attaquable, au sens de l’article 263 TFUE.

56.      En effet, tant pour les motifs déjà exposés relatifs aux caractéristiques de l’instrument de pétition en droit de l’Union que pour les motifs qui suivent, je suis d’avis que la jurisprudence Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466) est entachée d’une contradiction. En effet, à mon sens, aucune sorte de décision de la commission des pétitions n’est susceptible de modifier de manière caractérisée la situation juridique du pétitionnaire.

b)      Sur les contours de la notion du «droit» de pétition

57.      Premièrement, il convient de rappeler que, aux fins d’analyser les effets juridiques d’un acte quelconque du droit de l’Union, il convient de s’attacher avant tout à sa substance et à sa nature et non à sa dénomination ou à sa forme. Tel doit être également le cas du droit de pétition. Ainsi, il est erroné de partir du principe que l’emploi du terme «droit» équivaut automatiquement à l’existence d’un droit subjectif.

58.      À cet égard, en ce qui concerne le fait que le droit de pétition figure dans la Charte et constitue un droit fondamental, il suffit de renvoyer à l’article 52 de la Charte qui établit, dans son paragraphe 5, une distinction entre droits et principes (64). Toutefois, malgré leur dénomination dans la Charte, certains «droits» y figurant ne sont pas considérés comme des droits individuels. Ainsi que le démontre l’arrêt Association de médiation sociale (65), «le droit à l’information et à la consultation», au sens de l’article 27 de la Charte, a été érigé en «principe», au sens de la Charte. En effet, cette disposition ne définit pas une situation juridique individuelle, mais exige des pouvoirs publics qu’ils définissent un contenu objectif (information et consultation des travailleurs) et certains objectifs (effectivité de l’information, représentativité en fonction des niveaux, et ce en temps utile) (66).

59.      En outre, le droit de l’Union connaît plusieurs instruments extrajudiciaires qui sont dénommés «droits» sans qu’ils engendrent un contrôle juridictionnel.

60.      Ainsi, les citoyens ont le droit d’introduire une plainte s’ils estiment que la Commission ne respecte pas le code de bonne conduite administrative (67). La seule voie de recours prévue correspond à la faculté pour le plaignant de demander au secrétaire général de la Commission le réexamen de sa plainte. Ce code prévoit aussi la possibilité de s’adresser au Médiateur européen. Par ailleurs, la Commission a également établi les principes généraux et les normes minimales applicables aux consultations du public (68), sans pour autant les assortir, au profit des particuliers, du droit de contester en justice les décisions adoptées en violation de ces principes et normes.

61.      En outre, alors que ce droit n’est pas régi par un acte juridique particulier, les citoyens disposent du droit de dénoncer auprès de la Commission une violation du droit de l’Union par un État membre. Il est constant, en revanche, que les particuliers ne sont pas recevables à attaquer un refus de la Commission d’engager une procédure en manquement à l’encontre d’un État membre (69). Si un plaignant estime que, à l’occasion du traitement de sa plainte, il y a eu mauvaise administration de la part de la Commission, il peut exercer un recours devant le Médiateur (70).

62.      À cet égard, dans le pourvoi présentement examiné, le requérant soulève le risque d’une violation d’un droit fondamental ou, en tout état de cause, de l’exercice de ce droit sous l’angle des garanties procédurales dont il aurait été assorti. Une telle violation pourrait conduire à affecter d’une manière caractérisée la situation juridique du pétitionnaire.

63.      Il est, en effet, constant que le principe de protection juridictionnelle effective constitue un principe général du droit de l’Union, qui découle des traditions constitutionnelles communes aux États membres, consacré par les articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (71), et également réaffirmé à l’article 47 de la Charte.

64.      Je relève toutefois que ce principe trouve son origine dans le constat selon lequel «l’existence d’une voie de recours de nature juridictionnelle contre toute décision d’une autorité nationale refusant le bénéfice d’un droit est essentielle pour assurer au particulier la protection effective de son droit» (72). L’absence d’une protection juridique efficace équivaut donc à la violation d’un droit garanti.

65.      Or, tel n’est pas le cas du droit de pétition. En effet, dans l’hypothèse où une pétition ferait l’objet d’une décision d’irrecevabilité, de classement, de transfert vers une autre institution ou d’une clôture de la procédure avec une réponse, il ne se pose aucune question de limitation ou de refus du bénéfice d’un droit reconnu par le droit de l’Union engendrant la nécessité d’une protection juridictionnelle. Au contraire, dans un tel cas de figure, le droit d’exercer le droit de pétition est pleinement respecté dans la mesure où le requérant a pu introduire sa demande, a été informé des étapes procédurales au sein du Parlement et a reçu une réponse à sa demande.

66.      Je note, dans le même ordre d’idées, que s’il n’est pas fait droit à sa demande, le pétitionnaire peut réintroduire une demande de pétition auprès du Parlement qui – à la suite d’une appréciation politique différente, le cas échéant – peut librement adopter une décision opposée sur cette pétition. Il est important de rappeler dans ce contexte que le Parlement a élargi le champ des pétitions recevables par rapport au traité. En outre, il peut prendre en général une position politique sur des sujets qui ne relèvent pas de la compétence de l’Union. Or, les prises de position de la commission des pétitions n’ont aucune autorité négative ou positive de la chose jugée. En outre, il est loisible au pétitionnaire de s’adresser par la suite au Médiateur et à la Commission.

c)      Sur la jurisprudence relative aux plaintes

67.      Deuxièmement, afin d’identifier les origines de l’erreur dont me semble être entachée la distinction établie par le Tribunal dans l’arrêt Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466) et qui a été appliquée dans l’arrêt présentement attaqué, il convient de se référer aux règles relatives aux pouvoirs des autorités saisies de demandes informelles ou de plaintes dans le droit de l’Union.

68.      Ainsi, d’une part, l’exemple le plus classique peut être trouvé dans la jurisprudence relative aux compétences de la Commission, qui est dotée de pouvoirs contraignants en matière de plaintes en droit de concurrence. En effet, la Cour a déjà jugé que, si la Commission n’est pas tenue d’adopter une décision établissant l’existence d’une infraction aux règles de concurrence ni de procéder à l’instruction d’une plainte lorsqu’elle est saisie au titre du règlement [nº 17 – devenu 1/2003 (73)], elle est toutefois tenue d’examiner attentivement les moyens de fait et de droit soulevés par l’auteur de la plainte pour vérifier l’existence d’un comportement anticoncurrentiel. De plus, en cas de classement sans suite, la Commission est obligée de motiver sa décision afin de permettre au Tribunal de vérifier si elle a commis des erreurs de fait ou de droit ou encore un détournement de pouvoir (74).

69.      Dans ces conditions, la Cour a jugé qu’une institution, qui est dotée du pouvoir de constater et de sanctionner une infraction et qui peut être saisie par une plainte d’un particulier, comme c’est le cas de la Commission en droit de la concurrence, adopte nécessairement un acte produisant des effets juridiques lorsqu’elle procède au classement total ou partiel de cette plainte (75) (souligné par mes soins).

70.      Or, il est évident que, eu égard à la finalité tout à fait distincte de la réglementation économique en cause ainsi qu’au rôle joué par la Commission dans ce contexte, la jurisprudence en matière de concurrence ne peut nullement constituer un point de référence en matière de droit de pétition. La distinction établie par l’arrêt Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466) semble pourtant suivre cette logique. Par ailleurs, la référence faite par le requérant à l’arrêt Rendo e.a./Commission (76) en matière de concurrence est non seulement inapplicable en matière de pétitions, mais également erronée en ce que l’arrêt Rendo n’a pas confirmé que toute restriction d’un droit produit nécessairement des effets juridiques (77).

71.      D’autre part, l’exemple tout à fait opposé est celui des compétences du Médiateur qui n’a pas le pouvoir de prendre des mesures contraignantes (78). Tout en admettant que cette jurisprudence ne répond pas pleinement aux questions soulevées dans la présente espèce, il serait utile d’opérer un rapprochement entre l’appréciation des décisions adoptées par la commission des pétitions et les actes adoptés par le Médiateur dans le cadre de l’examen des plaintes qui lui sont adressées en vertu de l’article 228 TFUE.

72.      En particulier, il a été jugé que le rapport du Médiateur constatant un cas de mauvaise administration ne produit, par définition, aucun effet juridique à l’égard des tiers, au sens de l’article 230 CE, et ne lie pas non plus le Parlement qui est libre de décider, dans le cadre de l’exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par le traité, de la suite à y donner. Il en est de même, a fortiori, du rapport annuel que le Médiateur doit également présenter au Parlement à la fin de chaque session annuelle et qui porte sur l’ensemble des résultats de ses enquêtes (79). Ainsi, une décision motivée du Médiateur clôturant l’examen au fond d’une plainte par le classement de cette dernière ne constitue pas un acte attaquable par la voie du recours en annulation, dans la mesure où une telle décision ne produit pas d’effets juridiques vis‑à‑vis des tiers (80).

73.      Eu égard aux compétences de la commission des pétitions, il est donc justifié de considérer qu’aucune obligation de résultat ne lui incombe, à l’instar du Médiateur (81). De surcroît, eu égard aux caractéristiques du droit de pétition ci‑dessus exposées, ce principe devrait trouver à s’appliquer aux décisions d’irrecevabilité ou de classement sans examen de la pétition.

d)      Sur la substance du droit de pétition

74.      Troisièmement, je ne crois pas que le droit de pétition en droit de l’Union puisse refléter ou doive s’inspirer du modèle des pétitions en vigueur dans plusieurs États membres. Au regard des informations dont je dispose, seuls la République fédérale d’Allemagne (82), le Royaume d’Espagne (83) et les collectivités territoriales d’outre‑mer françaises (84) ont prévu un contrôle juridictionnel des décisions adoptées à la suite d’une pétition. Néanmoins, selon mes sources, même en droit allemand, les décisions adoptées en réponse à une pétition ne sont pas considérées comme étant des «actes administratifs», car il n’y a pas d’effet juridique sur le pétitionnaire (85).

75.      Or, le droit de pétition en droit de l’Union doit être considéré comme un concept autonome et, afin de relever du champ d’application de l’article 263 TFUE, il doit satisfaire aux critères de la jurisprudence relative à la notion d’acte susceptible de modifier la situation juridique du pétitionnaire de façon caractérisée. De plus, je rappelle que, dans le cadre du contrôle de légalité fondé sur les articles 263 TFUE et 265 TFUE, le juge de l’Union n’est pas compétent pour prononcer des injonctions à l’endroit des institutions et organes de l’Union (86).

76.      En effet, l’établissement du droit de pétition relève en principe de la seule responsabilité du Parlement, en tant que garant des intérêts de ses électeurs. Je tiens à souligner que l’exercice du droit de pétition devant le Parlement ne s’inscrit pas dans le cadre des activités d’un organe administratif, mais relève des activités d’un organe politique. Cela implique que les citoyens peuvent contrôler et sanctionner les décisions adoptées par le Parlement à l’occasion des élections européennes.

77.      Les différents types de réponses que la commission des pétitions peut adopter par rapport à une pétition, y compris le transfert à un autre organe vu les limites de son mandat, ne sauraient donc être assimilées à un refus d’un organe administratif dès lors que la commission des pétitions est un démembrement d’un organe représentatif de nature politique.

78.      Par conséquent, je propose de considérer que la substance du droit de pétition réside dans la possibilité de porter officiellement à la connaissance du Parlement certaines questions, sans que le demandeur se voie conférer le droit de réclamer directement une protection juridique. Il ne s’agit pas d’un droit individuel qui vise à produire des effets juridiques à l’égard de la situation d’un pétitionnaire, mais d’un outil politique de participation à la vie démocratique.

79.      En effet, la possibilité pour les citoyens d’envoyer des lettres ou d’autres écrits au Parlement et aux députés ne dépend guère d’un droit formel de pétition. Pour cette raison, je pense que, d’un point de vue constitutionnel, la fonction de cet instrument équivaut à une autorisation pour le Parlement d’être saisi formellement par des initiatives qui n’émanent ni de la Commission ni de ses députés, fractions ou commissions (87).

80.      Le corollaire du droit de pétition correspond donc à l’obligation pour le Parlement d’instaurer les mécanismes permettant à des demandeurs d’accéder au Parlement selon des procédures efficaces et transparentes. Seul l’établissement de ces mécanismes peut donc relever du contrôle du juge de l’Union par le biais d’un recours en carence, en vertu de l’article 265 TFUE.

81.      À cet égard, je suis enclin à penser que le contrôle du juge de l’Union ne s’impose que dans l’hypothèse où le Parlement adopterait une attitude reflétant une violation grave et persistante du droit de pétition, remettant en cause l’application de l’instrument des pétitions en tant que tel, notamment en cas de refus de recevoir des pétitions ou en cas de défaut de réponse à des pétitions. En effet, une telle attitude constituerait une violation de l’obligation qui incombe au Parlement en vertu des articles 20 TFUE, 227 TFUE et 44 de la Charte. Dans cette hypothèse, à la suite d’une plainte d’un particulier, la Commission, en tant que gardienne des traités, devrait intervenir conformément à l’article 265 TFUE.

82.      En tout état de cause, il n’est pas exclu d’appliquer par analogie la solution que la Cour a élaborée dans le cadre de la jurisprudence relative aux décisions du Médiateur, malgré l’approche selon laquelle le droit de pétition ne constitue pas un droit subjectif. Selon cette jurisprudence, dans des circonstances tout à fait exceptionnelles, un citoyen pourrait démontrer que la commission des pétitions a commis une violation suffisamment caractérisée du droit de l’Union dans l’exercice de ses fonctions, de nature à causer un préjudice au citoyen concerné (88).

83.      Eu égard à tout ce qui précède, je considère que la jurisprudence Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466) est fondée sur une interprétation incorrecte de la portée du droit de pétition au sens des articles 20 TFUE et 227 TFUE en ce qu’elle confère aux décisions d’irrecevabilité et de classement d’une pétition le caractère de décisions attaquables.

84.      Par conséquent, en appliquant cette jurisprudence, le Tribunal a commis une erreur de droit dans l’arrêt attaqué.

85.      Toutefois, cette erreur n’a pas d’implications sur le dispositif de l’arrêt attaqué. En effet, l’erreur de droit commise par le Tribunal n’est pas de nature à invalider l’arrêt attaqué dès lors que le dispositif de celui‑ci apparaît fondé pour d’autres motifs de droit (89). Je propose donc à la Cour de procéder à une substitution des motifs, en ce sens que le contrôle juridictionnel par rapport à toute décision de la commission des pétitions du Parlement doit être exclu dès lors que celles‑ci ne constituent pas un acte attaquable au sens de l’article 263 TFUE.

VII – Sur le deuxième moyen (premier, cinquième et sixième griefs du pourvoi)

86.      Eu égard à ce qui précède, il n’y a pas lieu d’examiner les griefs restants du pourvoi, qui sont, par ailleurs, considérés dans les observations du Parlement comme manifestement irrecevables. L’analyse qui suit est donc présentée à titre subsidiaire.

87.      Par son premier grief, le requérant reproche au Tribunal d’avoir ignoré le fait que la pétition du requérant n’a pas été examinée quant au fond par la commission des pétitions. Une telle dénaturation des faits aurait conduit le Tribunal à conclure à tort que le droit de pétition n’a pas été violé en l’espèce.

88.      À cet égard, il convient de rappeler que, si, dans le cadre du pourvoi, la Cour n’est pas compétente pour constater les faits ni, en principe, pour examiner les preuves que le Tribunal a retenues à l’appui de ces faits, le pouvoir de contrôle de la Cour sur les constatations de fait opérées par le Tribunal s’étend, notamment, à l’inexactitude matérielle des constatations résultant des pièces du dossier, à la dénaturation des éléments de preuve, à la qualification juridique de ceux‑ci et à la question de savoir si les règles en matière de charge et d’administration de la preuve ont été respectées (90).

89.      Or, la comparaison entre le point 3 de l’arrêt attaqué et la réponse figurant dans la décision attaquée ne permet de constater aucune dénaturation ni aucune inexactitude matérielle. Tout en admettant que le Tribunal n’a pas reproduit textuellement la lettre du président de la commission des pétitions, il peut être clairement déduit de l’arrêt attaqué que la commission n’a pas examiné la demande du requérant. En tout état de cause, il résulte de l’ensemble de l’arrêt attaqué que le Tribunal a correctement identifié la pétition en cause comme recevable, ce qui l’a conduit à rappeler à juste titre que les suites à donner à une pétition relèvent de l’entière appréciation du Parlement qui n’est pas tenu d’adopter un acte spécifique à l’égard du pétitionnaire. Par conséquent, cet argument est manifestement non fondé.

90.      Par le cinquième grief du pourvoi, le requérant reproche au Tribunal un défaut de motivation. Selon le requérant, c’est à tort que le Tribunal s’est abstenu d’examiner dans l’arrêt attaqué si, lors de l’adoption de la décision attaquée, le Parlement avait violé l’obligation de motivation malgré le grief soulevé en première instance par le requérant. Or, dès lors que je propose de considérer que la décision attaquée ne constitue pas un acte attaquable, toute analyse à cet égard est superflue et ce grief devrait être rejeté comme manifestement irrecevable.

91.      Par le sixième grief du pourvoi, le requérant reproche au Tribunal un examen incomplet des faits dès lors que ce dernier n’aurait pas vérifié si le requérant a eu l’occasion d’exposer son cas devant la commission des pétitions. À la lumière de la jurisprudence rappelée au point 88 des présentes conclusions, cette critique doit être rejetée comme manifestement irrecevable. En tout état de cause, dès lors que je propose de déclarer le recours contre la décision attaquée comme irrecevable, le Tribunal ayant également fondé à bon droit l’arrêt attaqué sur l’irrecevabilité de la demande du requérant, il ne lui incombait pas d’examiner le déroulement de la procédure devant la commission des pétitions.

VIII – Conclusion

92.      Je propose à la Cour de:

–        rejeter le pourvoi, tout en procédant à une substitution des motifs de l’arrêt attaqué,

–        condamner le requérant aux dépens et faire supporter au Parlement européen ses propres dépens.


1 –      Langue originale: le français.


2 – Rapport sur les délibérations de la commission des pétitions au cours de l’année parlementaire 1999/2000, A5‑0162/2000: http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=‑//EP//NONSGML+REPORT+A5‑2000‑0162+0+DOC+PDF+V0//FR


3 –      Rapport sur les activités de la commission des pétitions au cours de l’année 2013 [2014/2008(INI), p. 17].


4 – Pétition nº 1188/2010.


5 – T‑308/07, EU:T:2011:466.


6 –      Arrêt Tegebauer/Parlement (EU:T:2011:466, point 21).


7 –      Conformément aux explications de la Charte, le droit garanti à cet article est le droit garanti par les articles 20 TFUE et 227 TFUE. Conformément à l’article 52, paragraphe 2, de la Charte, il s’applique dans les conditions prévues à ces deux articles.


8 – Version du mois de juillet 2004 (JO 2005, L 44, p.1).


9 – Une modification des dispositions du règlement régissant le droit de pétition en vertu de la version de la 7e législature du mois de mars 2011 (JO 2011, L 116). Celle-ci reprend en substance la révision, seulement intermédiaire, du règlement intérieur adoptée en vertu de la décision du Parlement européen du 6 mai 2009 (2006/2209(REG) (JO 2010, C 212 E, p. 140).


10 – http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+RULES-EP+20140701+TOC+DOC+XML+V0//FR


11 – Proposition de modification du règlement du Parlement européen (B7-0732/2011) ainsi que décision du Parlement européen du 22 mai 2012 sur la modification du règlement du Parlement européen concernant la mise en œuvre de l'initiative citoyenne européenne (2011/2302(REG)) (JO 2013, C 264 E, p. 98).


12 – Dès lors qu’il ne s’agit d’arguments ni autonomes ni autosuffisants, je propose de ne pas utiliser le terme «moyen» pour qualifier chacun d’entre eux.


13 – Selon le requérant, dans son exposé des faits, le Tribunal ignore que la présidente de la commission des pétitions a, sans justification aucune, indiqué au requérant que, malgré sa recevabilité, la pétition ne pouvait pas être examinée au fond. Par la suite, le Tribunal a dénaturé les faits en considérant que la pétition avait été examinée.


14 –      Selon le requérant, le Tribunal méconnaît le champ d’application du droit fondamental de pétition en considérant, à tort, qu’il se limite à l’examen de la recevabilité de la pétition. Toutefois, le champ d’application du droit de pétition englobe aussi l’examen matériel des pétitions jugées recevables ainsi que la décision adoptée au fond (droit au traitement de la pétition).


15 –      Selon le requérant, le Tribunal fait preuve d’illogisme lorsqu’il affirme que le défaut d’examen d’une pétition recevable ne produit pas d’effets juridiques, contrairement au défaut d’examen d’une pétition irrecevable.


16 –      Selon le requérant, le Tribunal contredit l’arrêt Tegebauer/Parlement dans lequel il aurait déclaré qu’il peut être porté atteinte à l’efficacité du droit de pétition lorsque le contenu de la pétition n’a pas été examiné.


17 –      Selon le requérant, le Tribunal méconnaît que le Parlement a commis une erreur de droit en s’abstenant de motiver sa décision. Le Tribunal y substituerait sa propre motivation afin de justifier le défaut de traitement de la pétition.


18 –      Selon le requérant, le Tribunal ignore que le requérant n’a pas eu la possibilité d’exposer son cas de manière objective devant la commission des pétitions.


19 – Alors que le requérant vise le point 17 de l’arrêt attaqué, il s’agit du point 16 de cet arrêt.


20 – J’observe que le dépôt et l’examen des pétitions à l’Assemblée étaient déjà prévus dans le règlement de l’Assemblée commune de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA). Au sommet de Paris en 1977, le Parlement a adopté une résolution sur l’attribution de droits spéciaux aux citoyens de la Communauté européenne, invitant la Commission des Communautés européennes à considérer à attribuer en priorité aux citoyens le droit de pétition.


21 – La reconnaissance du droit de pétition aux citoyens européens a été confirmée pour la première fois lors du Conseil européen en 1984 par l’adoption des propositions du Comité «Europe des citoyens».


22 – Accord signé le 12 avril 1989 (JO C 120, p. 90).


23 – Il convient de noter que, conformément à son article 52, paragraphe 2, la Charte garantit le droit de pétition dans les limites résultant des articles 20 TFUE et 227 TFUE. Le droit de pétition figure également à l’article 24 TFUE.


24 – Étymologiquement, «pétition» signifie «demande» (du latin «petere» qui signifie «demander»). Pour une analyse voir, Surrel, H., «Le ‘droit de pétition’ au Parlement européen», RMC, nº 335, mars 1990.


25 – Résolution du Parlement européen sur les délibérations de la commission des pétitions au cours de l’année parlementaire 2003‑2004 [2004/2090(INI), JO 2005, C 320 E, p. 161].


26 – Ses conditions d’exercice figurent dans le règlement (UE) nº 211/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 2011, relatif à l’initiative citoyenne (JO L 65, p. 1).


27 – Rapport sur les activités de la commission des pétitions au cours de l’année 2013 [2014/2008(INI), A7‑0131/2014].


28 – Rapport sur les activités de la commission des pétitions pendant l’année parlementaire 1993/1994 (A3‑0158/94).


29 – Rapport du 27 novembre 2001 (A5‑0429/2001), sur le droit de pétition du citoyen européen: pour son renforcement une révision du traité CE [2001/2137(INI)].


30 – Le droit de pétition est consacré par l’article 17 de la loi fondamentale, sous la rubrique intitulée «Droits fondamentaux»: http://www.bundestag.de/bundestag/aufgaben/rechtsgrundlagen/grundgesetz/gg_01/245122.


      En vertu de l’article 45c de la loi fondamentale, une commission de pétitions a été créée: http://www.bundestag.de/bundestag/aufgaben/rechtsgrundlagen/grundgesetz/gg_03/245126.


      La tâche et les pouvoirs de cette commission sont régis de manière plus détaillée par la loi sur les compétences de la commission de pétition : http://www.bundestag.de/bundestag/ausschuesse18/a02/grundsaetze/petitionsausschuss_befugnisse/260546


      et par le règlement intérieur du Bundestag (paragraphes 108 et suivants): http://www.bundestag.de/bundestag/aufgaben/rechtsgrundlagen/go_btg/go09/245168


31 –      Pour une analyse plus approfondie, voir rapport du Parlement «Le droit de pétition dans les pays de l’Union» établi en 2001: http://www.uni‑mannheim.de/edz/pdf/dg4/POLI119_FR.pdf


32 –      Voir rapport du Parlement européen «Le droit de pétition dans les pays de l’Union», p. 140 et 141.


33 – La commission des pétitions n’est toutefois pas tenue de les examiner (voir article 201, paragraphe 13, règlement intérieur modifié).


34 – Il convient toutefois de souligner que les articles 20, sous d), TFUE, 24, deuxième alinéa, TFUE et 227 TFUE visent expressément le droit des citoyens de l’Union.


35 – Voir pétition nº 1038/96 contre les expériences sur les animaux dans le secteur des produits cosmétiques, signée par 4 millions de personnes.


36 – Voir, par exemple, Impact sur l’environnement du gazoduc prévu en mer Baltique pour relier la Russie à l’Allemagne P6_TA(2008)0336, résolution du Parlement européen du 8 juillet 2008 sur l’impact environnemental du projet de construction dans la mer Baltique du gazoduc destiné à relier la Russie à l’Allemagne (pétitions nº 0614/2007 et nº 0952/2006) [2007/2118(INI), JO 2009, C 294 E, p. 3].


37 – Voir résolution 2003‑2004 [2004/2090(INI)]: «considérant que le Parlement européen, en tant qu’organe élu au suffrage direct représentant les citoyens européens au niveau européen, a pour obligation et apanage spécifiques de défendre les droits des citoyens; considérant que le Parlement doit cependant compter sur l’aide et la coopération loyale de la Commission, gardienne des traités, s’il veut être en mesure de résoudre les problèmes qui ont poussé les citoyens à solliciter son aide».


38 – 23e rapport de la Commission sur l’application du droit de l’Union: http://eur‑lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2006:0416:FIN:FR:PDF, p. 4.


39 – Projet de rapport sur les activités de la commission des pétitions au cours de l'année 2012 [2013/2013(INI)]: http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=‑//EP//NONSGML+COMPARL+PE‑508.200+03+DOC+PDF+V0//FR&language=FR


40 – Rapport sur l’institut de la pétition à l’aube du XXIème siècle [(2000/2026(INI)] (A5‑0088/2001, p. 11).


41 – Voir 23e rapport de la Commission cité ci-dessus.


42 – Voir la demande de la commission des pétitions à la Commission de traiter les pétitions et les plaintes sur un pied d’égalité dans le cadre des procédures d’infraction; point 17 du projet de rapport sur les activités de la commission des pétitions, précité, [2013/2013(INI)], http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=‑//EP//NONSGML+COMPARL+PE‑508.200+03+DOC+PDF+V0//FR&language=FR


43 –      Contrairement à l’initiative citoyenne régie par le règlement nº 211/2011.


44 – Alors qu’elles ne sont pas applicables aux faits d’espèce, ces dispositions restent, en substance, les mêmes. Pour les modifications consécutives, voir le cadre juridique.


45 –      Le Parlement s’est même s’interrogé sur la nécessité de réviser l’ensemble de la procédure de pétition: Rapport sur les activités de la commission des pétitions au cours de l’année 2013 [2014/2008(INI), p. 18].


46 – Les pétitions doivent mentionner le nom, la nationalité et le domicile de chacun des pétitionnaires. Elles doivent être rédigées dans l’une des langues officielles de l’Union. Toutefois, conformément à l’article 201, paragraphe 5, les pétitions rédigées dans une autre langue peuvent faire l’objet d’un examen si les pétitionnaires ont joint une traduction.


47 – Voir rapport sur les activités de la commission des pétitions au cours de l’année 2012 [2013/2013(INI)] – Annexe visant les statistiques comprenant les catégories des demandes.


48 –      J’observe qu’il ressort des rapports précédents de la commission des pétitions que les requêtes non conformes à l’article 227 TFUE n’étaient pas enregistrées en tant que pétitions. Il ressort du rapport de la commission des pétitions pour l’année 2013 que «[l]a commission a reçu, depuis 2009 et jusqu’à présent, près de 10 000 pétitions qui ont été enregistrées, dont quelque 60 % ont été déclarées recevables car relevant des domaines d’activité de l’Union». La distinction entre les demandes non enregistrées et irrecevables prête à une confusion. Selon le rapport, «la commission a reçu un total de 2 885 pétitions au cours de l’année 2013. Elle a réussi à traiter près de 989 pétitions, dont 654 ont été déclarées recevables, 335 irrecevables, et 538 ont été clôturées. 199 pétitions ont été déclarées recevables, examinées et clôturées». Il n’est pas clair si ces décisions ont été notifiées et motivées. Tel ne semble pas être le cas des demandes non enregistrées.


49 – Selon l’analyse du Parlement, la plupart des pétitions déclarées irrecevables le sont à la suite d’une confusion persistante entre les compétences européennes et nationales ainsi qu’entre les institutions européennes et le Conseil de l’Europe ou la Cour européenne des droits de l’homme (voir http://www.europarl.europa.eu/ftu/pdf/fr/FTU_2.1.4.pdf).


50 – Rapport sur les délibérations de la commission des pétitions au cours de l’année parlementaire 1999/2000 (A5‑0162/2000).


51 – Projet de rapport sur les activités de la commission des pétitions au cours de l’année 2012 [2013/2013(INI), point J].


52 – Idem.


53 – Arrêts IBM/Commission (60/81, EU:C:1981:264, point 9); Athinaïki Techniki/Commission (C‑521/06 P, EU:C:2008:422, point 29), ainsi que Internationaler Hilfsfonds/Commission (C‑362/08 P, EU:C:2010:40, point 51).


54 – Ordonnance Planet/Commission (T‑320/09, EU:T:2011:172, points 37 à 39).


55 – 294/83, EU:C:1986:166, arrêt codifié par l’article G, point 53, du traité de Maastricht modifiant l’article 173 du traité CE.


56 – Arrêt Weber/Parlement (C‑314/91, EU:C:1993:109, points 9 et 10).


57 – Arrêt Conseil/Parlement (34/86, EU:C:1986:291). Ultérieurement, il a été précisé que l’acte fondé sur l’article 314, paragraphe 9, TFUE constitue un acte attaquable au sens de l’article 263 TFUE, dans la mesure où il confère force obligatoire au budget de l’Union. Voir arrêt Conseil/Parlement (C‑77/11, EU:C:2013:559, points 50, 54 à 56, 60 et 63).


58 – Arrêt Weber/Parlement (EU:C:1993:109, points 9 et 10).


59 – Arrêt Luxembourg/Parlement (C‑213/88 et C‑39/89, EU:C:1991:449).


60 – Ordonnance Groupe des droites européennes/Parlement (78/85, EU:C:1986:227, point 11).


61 – Ordonnance Blot et Front national/Parlement (C‑68/90, EU:C:1990:222, point 12).


62 – Voir, ordonnance Miethke/Parlement (C‑25/92, EU:C:1993:32) relative à une demande adressée au Parlement de déclarer que les mandats des députés allemands avaient perdu leur validité en raison de la réunification de l’Allemagne.


63 – Dans une affaire récente, portant sur une demande d’annulation des délibérations du Parlement relatives au calendrier des périodes de sessions, arrêt France/Parlement (C‑237/11 et C‑238/11, EU:C:2012:796).


64 – Ainsi qu’il ressort des explications de la Charte, les droits subjectifs doivent être respectés, tandis que les principes doivent être observés. En outre, il est précisé que, dans certains cas, un article de la Charte peut contenir des éléments relevant d’un droit et d’un principe.


65 –      C‑176/12, EU:C:2014:2.


66 – Voir conclusions Association de médiation sociale (C‑176/12, EU:C:2013:491, point 54).


67 – Code de bonne conduite de la Commission adopté en 2000: http://ec.europa.eu/transparency/code/_docs/code_fr.pdf.


68 –      Vers une culture renforcée de consultation et de dialogue, Principes généraux et normes minimales applicables aux consultations engagées par la Commission avec les parties intéressées [COM(2002) 704 final].


69 – Voir, ex multis, ordonnances Grúas Abril Asistencia/Commission (C‑521/10 P, EU:C:2011:418, point 29) et Altner/Commission (C‑411/11 P, EU:C:2011:852, point 8).


70 – http://ec.europa.eu/eu_law/your_rights/your_rights_fr.htm#6recours


71 – Arrêts Johnston (222/84, EU:C:1986:206, points 18 et 19); Heylens e.a. (222/86, EU:C:1987:442, point 14); Commission/Autriche (C‑424/99, EU:C:2001:642, point 45); Unión de Pequeños Agricultores/Conseil (C‑50/00 P, EU:C:2002:462, point 39), et Eribrand (C‑467/01, EU:C:2003:364, point 61).


72 – Arrêt Heylens e.a. (EU:C:1987:442, point 14).


73 – Règlement (CE) nº 1/2003 du Conseil du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité (JO L 1, p. 1).


74 – Arrêt Rendo e.a./Commission (C‑19/93 P, EU:C:1995:339, point 27).


75 – Arrêt SFEI e.a./Commission (C‑39/93 P, EU:C:1994:253, point 27 et jurisprudence citée).


76 – T‑16/91, EU:T:1992:109, points 54 à 56.


77 – Cet arrêt a, par ailleurs, été annulé par la Cour dans l’arrêt Rendo e.a./Commission (EU:C:1995:339) et a donné lieu à l’arrêt Rendo e.a./Commission (T‑16/91, EU:T:1996:189).


78 – Voir arrêt Komninou e.a./Commission (C‑167/06 P, EU:C:2007:633, point 44).


79 – Ordonnance Associazione delle Cantine Sociali Venete/Médiateur et Parlement (T‑103/99, EU:T:2000:135, point 50).


80 – Voir ordonnance Srinivasan/Médiateur (T‑196/08, EU:T:2008:470).


81 – Voir, par analogie, arrêt Médiateur/Lamberts (C‑234/02 P, EU:C:2004:174, points 48 à 52 et jurisprudence citée).


82 – En principe, ces actes ne sont pas considérés comme étant des «actes administratifs», car ils n’ont pas d’effet juridique sur le pétitionnaire. Cependant, il existe «l’action en injonction» qui permet au pétitionnaire de soumettre une décision ne produisant pas d’effets juridiques au contrôle juridictionnel d’un tribunal administratif. Un recours constitutionnel est également envisageable après épuisement de toutes les autres voies judiciaires. Sur la pratique, voir, par exemple, http://www.bundesverfassungsgericht.de/entscheidungen/rk20121121_2bvr172012.html, où la Cour constitutionnelle a déclaré irrecevable un recours constitutionnel visant une décision de l’Oberverwaltungsgericht Berlin‑Brandeburg du 20 juin 2012 dont l’origine était une décision de la commission des pétitions du Bundestag de refuser l’examen d’une pétition au motif que deux pétitions similaires étaient déjà au cours d’examen par les ministères fédéraux compétents.


83 – En droit espagnol, s’agissant d’une pétition devant les chambres législatives, dans l’hypothèse où un acte du parlement viole un droit fondamental, la possibilité d’introduire un recours devant la Cour constitutionnelle est prévue. Dans ce cas, le recours devant les juridictions administratives est exclu, l’activité du parlement revêtant une nature constitutionnelle.


84 – Pour ce qui est du droit français, seules les collectivités d’outre‑mer bénéficient d’un recours devant le tribunal administratif, mais seulement pour certaines décisions.


85 – Pour être plus précis, le contrôle admis en droit allemand correspond à un contrôle formel et non substantiel. Ainsi, un citoyen peut saisir un tribunal administratif au motif que le Bundestag n’a pas traité sa pétition ou qu’il n’a pas suivi la procédure correcte. En revanche, le juge administratif ne peut pas statuer sur le fond.


86 – Voir ordonnance Pevasa et Inpesca/Commission (C‑199/94 P et C‑200/94 P, EU:C:1995:360, point 24); arrêt Assurances du crédit/Conseil et Commission (C‑63/89, EU:C:1991:152, point 30); ordonnances Victoria Sánchez/Parlement et Commission (EU:C:2011:693, point 38), ainsi que Mugraby/Conseil et Commission (C‑581/11 P, EU:C:2012:466, point 75).


87 – Je rappelle la prise de position de la commission des pétitions figurant au point 1 des présentes conclusions, selon laquelle une pétition permet à un individu de faire entendre officiellement sa voix (souligné par mes soins).


88 – Voir, par analogie, arrêt Médiateur/Lamberts (EU:C:2004:174, point 52).


89 – Arrêt ThyssenKrupp Nirosta/Commission (C‑352/09 P, EU:C:2011:191, point 136).


90 – Arrêt Siemens e.a./Commission (C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, EU:C:2013:866, point 38 et 39 ainsi que jurisprudence citée).