Language of document : ECLI:EU:C:2021:141

ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)

25 février 2021 (*)

« Renvoi préjudiciel – Tarif douanier commun – Nomenclature combinée – Classement tarifaire – Positions tarifaires 8701 et 8705 – Interprétation – Remorqueur d’avions »

Dans l’affaire C‑772/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche), par décision du 9 octobre 2019, parvenue à la Cour le 22 octobre 2019, dans la procédure

Bartosch Airport Supply Services GmbH

contre

Zollamt Wien,

LA COUR (neuvième chambre),

composée de M. N. Piçarra (rapporteur), président de chambre, M. S. Rodin et Mme K. Jürimäe, juges,

avocat général : M. E. Tanchev,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

–        pour Bartosch Airport Supply Services GmbH, par Mes U. Schrömbges et J. Gesinn, Rechtsanwälte,

–        pour la Commission européenne, par M. R. Pethke et Mme M. Salyková, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la position 8705 de la nomenclature combinée, figurant à l’annexe I du règlement (CEE) n°°2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun (JO 1987, L 256, p. 1), dans sa version résultant du règlement d’exécution (UE) 2016/1821 de la Commission, du 6 octobre 2016 (JO 2016, L 294, p. 1) (ci-après la « NC »).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Bartosch Airport Supply Services (ci-après « Bartosch ») au Zollamt Wien (bureau des douanes de Vienne, Autriche) (ci-après l’« autorité douanière ») au sujet du classement tarifaire d’un « remorqueur d’avions, électrique et sans barre de remorquage », conçu pour tirer et pousser des aéronefs (ci-après un « remorqueur d’avions »).

 Le cadre juridique

 Le SH

3        Le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (ci-après le « SH ») a été institué par la convention internationale sur le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, conclue à Bruxelles le 14 juin 1983, dans le cadre de l’Organisation mondiale des douanes (OMD), et approuvée, avec son protocole d’amendement du 24 juin 1986, au nom de la Communauté économique européenne, par la décision 87/369/CEE du Conseil, du 7 avril 1987 (JO 1987, L 198, p. 1).

4        La nomenclature du SH comporte une section XVII, intitulée « Matériel de transport », laquelle comprend un chapitre 87, intitulé « Voitures automobiles, tracteurs, cycles et autres véhicules terrestres, leurs parties et accessoires ». Dans ce chapitre figurent, notamment, les positions 8701 « Tracteurs (à l’exclusion des chariots-tracteurs du no 8709) » et 8705 « Véhicules automobiles à usages spéciaux, autres que ceux conçus pour le transport de personnes ou de marchandises (dépanneuses, camions-grues, voitures de lutte contre l’incendie, camions-bétonnières, voitures balayeuses, voitures épandeuses, voitures-ateliers, voitures radiologiques, par exemple) ».

5        La note explicative du SH relative à ce chapitre 87 est libellée comme suit :

« Considérations générales

À l’exception de certaines machines mobiles relevant de la Section XVI (voir à cet égard les Notes explicatives des nos 8701, 8705 et 8716), le présent chapitre comprend l’ensemble des véhicules terrestres. On y range donc :

1)      Les tracteurs (no 8701).

2)      Les voitures automobiles pour le transport des personnes (nos 8702 et 8703), des marchandises (no 8704) ou pour usages spéciaux (no 8705).

3)      Les chariots automobiles non munis d’un dispositif de levage, des types utilisés dans les usines, les entrepôts, les ports ou les aéroports, pour le transport des marchandises sur de courtes distances et les chariots-tracteurs des types utilisés dans les gares (no 8709).

[...] »

6        Les notes explicatives du SH relatives à la position 8701 et ses sous-positions énoncent :

« On entend par tracteurs, au sens de la présente position, les véhicules moteurs à roues ou à chenilles conçus essentiellement pour tirer ou pousser d’autres engins, véhicules ou charges. Ils peuvent cependant comporter un plateau accessoire ou un dispositif analogue, permettant le transport, en corrélation avec leur usage principal, d’outils, de semences, d’engrais, etc., ou également des aménagements accessoires pour recevoir des organes de travail.

[...]

À l’exception des chariots-tracteurs du no 8709 (du type utilisé dans les gares), la présente position comprend les tracteurs de tous les types et pour tous usages (tracteurs agricoles, tracteurs forestiers, tracteurs routiers, tracteurs de travaux publics, tracteurs–treuils, etc.), quelle que soit la source d’énergie qui les actionne (moteur à piston à allumage par étincelles ou par compression, électrique, etc.). [...]

Les véhicules repris ici sont généralement pourvus de carrosserie ou ils peuvent être munis d’une cabine de conduite ou de sièges pour les servants. D’autre part, ils peuvent être équipés d’un coffre à outils, d’un dispositif permettant de relever ou d’abaisser les outils de travail, d’un dispositif de remorquage pour remorques ou semi-remorques (notamment sur les tracteurs et engins similaires) ou d’une prise de force permettant de transmettre la force du moteur à diverses machines (batteuses, scies circulaires, etc.).

[...]

Cette position couvre aussi les tracteurs équipés de treuils ou cabestans (dénommés tracteurs-treuils) permettant, par exemple, soit le halage d’un véhicule enlisé, soit l’abattage ou le débardage des arbres ou encore le remorquage à distance d’engins agricoles.

En outre, sont exclus de cette position les camions de dépannage équipés de grues, chèvres, treuils, etc. (no 8705).

[...] 8701.91/95

Ces sous-positions comprennent les véhicules conçus pour tirer des semi-remorques sur de courtes distances. Ces types de véhicules sont connus sous divers noms (par ex., “tracteurs de terminaux”, “tracteurs portuaires”, etc.) et sont destinés à positionner ou à déplacer des semi-remorques au sein d’une zone définie. Ils ne sont pas adaptés pour le transport sur de longues distances pour lequel les tracteurs routiers du no 8701.20 sont conçus. Ils se distinguent des tracteurs routiers en ce qu’ils sont généralement équipés de moteurs diesel, que leur vitesse maximale n’excède généralement pas 50 km/h et qu’ils possèdent habituellement une petite cabine fermée à un seul siège pour le conducteur uniquement ».

7        Les notes explicatives du SH relatives à la position 8705 et ses sous-positions indiquent :

« La présente position comprend un ensemble de véhicules automobiles, spécialement construits ou transformés, équipés de dispositifs ou appareillages divers les rendant propres à remplir certaines fonctions, distinctes du transport proprement dit. Il s’agit donc de véhicules non essentiellement conçus en vue du transport de personnes ou de marchandises.

On peut citer comme relevant de cette position :

1.      Les voitures dépanneuses constituées par un châssis de camion ou camionnette, avec ou sans plateau, équipé d’engins de levage, tels que grues non rotatives, chèvres, palans, treuils, conçus pour soulever et remorquer les voitures en panne.

[...] »

 La NC

8        Le classement tarifaire des marchandises importées dans l’Union européenne est régi par la NC. Conformément à l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 2658/87, cette dernière reprend les positions et les sous-positions à six chiffres du SH, seuls les septième et huitième chiffres formant des subdivisions qui lui sont propres.

9        La première partie de la NC comprend un titre I, consacré aux règles générales, dont la section A, intitulée « Règles générales pour l’interprétation de la [NC] », prévoit :

« Le classement des marchandises dans la [NC] est effectué conformément aux principes ci-après.

1.      Le libellé des titres de sections, de chapitres ou de sous-chapitres est considéré comme n’ayant qu’une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d’après les termes des positions et des notes de sections ou de chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et notes, d’après les règles suivantes.

[...]

3.      Lorsque des marchandises paraissent devoir être classées sous deux ou plusieurs positions par application de la règle 2 b) ou dans tout autre cas, le classement s’opère comme suit.

a)      La position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d’une portée plus générale. Toutefois, lorsque deux ou plusieurs positions se rapportent chacune à une partie seulement des matières constituant un produit mélangé ou un article composite ou à une partie seulement des articles dans le cas de marchandises présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail, ces positions sont à considérer, au regard de ce produit ou de cet article, comme également spécifiques même si l’une d’elles en donne par ailleurs une description plus précise ou plus complète.

[...]

c)      dans le cas où les règles 3 a) et 3 b) ne permettent pas d’effectuer le classement, la marchandise est classée dans la position placée la dernière par ordre de numérotation parmi celles susceptibles d’être valablement prises en considération.

[...]

6.      Le classement des marchandises dans les sous-positions d’une même position est déterminé légalement d’après les termes de ces sous-positions et des notes de sous-positions ainsi que, mutatis mutandis, d’après les règles ci-dessus, étant entendu que ne peuvent être comparées que les sous-positions de même niveau. Aux fins de cette règle, les notes de sections et de chapitres sont également applicables sauf dispositions contraires. »

10      La deuxième partie de la NC, intitulée « Tableau des droits », comprend, notamment, une section XVII, intitulée « Matériel de transport », laquelle comprend le chapitre 87 relatif aux voitures automobiles, tracteurs, cycles et autres véhicules terrestres, leurs parties et accessoires. La note 2 de ce chapitre 87, relative à la position 8701, énonce :

« on entend par “tracteur”, au sens du présent chapitre, les véhicules moteurs essentiellement conçus pour tirer ou pousser d’autres engins, véhicules ou charges, même s’ils comportent certains aménagements accessoires permettant le transport, en corrélation avec leur usage principal, d’outils, de semences, d’engrais, etc.

[...] »

11      Les positions 8701 et 8705, figurant dans ce chapitre 87, sont libellées comme suit :

« 8701

Tracteurs (à l’exclusion des chariots-tracteurs du no 8709) :

8701 10 00

– Tracteurs à essieu simple

8701 20

Tracteurs routiers pour semi-remorques

8701 20 10

– – neufs

8701 20 90

– – usagés

8701 30 00

– Tracteurs à chenilles

 

– autres, d’une puissance de moteur

8701 91

– – n’excédant pas 18 kW

8701 91 10

– – – Tracteurs agricoles et tracteurs forestiers, à roues

8701 91 90

– – – autres

8701 92

– – excédant 18 kW mais n’excédant pas 37 kW

8701 92 10

– – – Tracteurs agricoles et tracteurs forestiers, à roues

8701 92 90

– – – autres

[...]

8705

Véhicules automobiles à usages spéciaux, autres que ceux principalement conçus pour le transport de personnes ou de marchandises (dépanneuses, camions-grues, voitures de lutte contre l’incendie, camions-bétonnières, voitures balayeuses, voitures épandeuses, voitures-ateliers, voitures radiologiques, par exemple) :

8705 10 00

– Camions-grues

8705 20 00

– Derricks automobiles pour le sondage ou le forage

8705 30 00

– Voitures de lutte contre l’incendie

8705 40 00

– Camions-bétonnières

8705 90

– autres :

8705 90 30

– – Voitures-pompes à béton

8705 90 80

– – autres »

 Le litige au principal et la question préjudicielle

12      Le 23 février 2017, Bartosch a sollicité, auprès de l’autorité douanière, la délivrance d’un renseignement tarifaire contraignant au sujet d’un remorqueur d’avions. Ce dernier est décrit, dans la demande de décision préjudicielle, comme un engin capable de remorquer des aéronefs pesant jusqu’à 54 432 kg et composé d’une plate-forme métallique à quatre roues, d’un moteur électrique d’une puissance de 33,8 kW, de dispositifs d’entraînement, de freinage et de direction, de deux sièges conducteur placés l’un en face de l’autre et munis, de chacun des côtés, de leviers de commande. Il est également équipé d’un treuil de remorquage avec un dispositif de traction par courroie et un dispositif électrohydraulique de levage. Par le biais du treuil, la roue avant de l’appareil est tirée sur le dispositif de levage hydraulique puis soulevée au moyen de ce dispositif. Une fois, dans cette position, l’avion peut être remorqué ou poussé.

13      Bartosch a fait valoir qu’un tel véhicule devait être classé dans la sous-position 8705 90 80 de la NC, laquelle correspond aux véhicules automobiles à usages spéciaux, autres que ceux conçus pour le transport de personnes ou de marchandises, pour lesquels un taux de droit de douane de 3,7 % est applicable.

14      Par décision du 8 mai 2017, l’autorité douanière a délivré un renseignement tarifaire contraignant classant ledit véhicule dans la sous-position 8701 92 90 de la NC, en tant que « autres » tracteurs. Un taux de 7 % est applicable aux marchandises relevant de cette sous-position.

15      À la suite du rejet de son opposition contre cette décision, Bartosch a introduit un recours devant le Bundesfinanzgericht (tribunal fédéral des finances, Autriche). Cette juridiction a rejeté ce recours, estimant que seuls les véhicules dont la caractéristique essentielle est de soulever et de remorquer des véhicules en panne relèvent de la qualification de « dépanneuses », au sens de la position 8705 de la NC. Selon cette juridiction, un remorqueur d’avions relève de la position 8701 de la NC, au motif que celle-ci couvre de manière large et non équivoque les « tracteurs ».

16      Bartosch a introduit un recours en Revision contre ce jugement devant la juridiction de renvoi, le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche).

17      Cette dernière indique, tout d’abord, que, d’après les notes explicatives du SH, la position 8701 de la NC comprend les tracteurs de tous types et pour tous usages, quelle que soit la source d’énergie qui les actionne. Cette position ne comprend pas les camions de dépannage équipés de grues, de chèvres et de treuils, qui relèvent de la position 8705 de la NC. La position 8705 de la NC comprendrait un ensemble de véhicules automobiles, spécialement construits ou transformés, équipés de dispositifs ou d’appareillages divers les rendant propres à remplir certaines fonctions, distinctes du transport de personnes ou de marchandises. Il s’agirait notamment de voitures dépanneuses conçues pour soulever et remorquer des voitures en panne. La juridiction de renvoi en déduit que la position 8705 de la NC vise une catégorie plus spécifique de véhicules que la position 8701 de cette nomenclature.

18      Cette juridiction ajoute ensuite qu’un remorqueur d’avions, dans la mesure où il est destiné à tirer ou à pousser des avions sur les aéroports, n’est pas principalement destiné au transport de personnes ou de marchandises. Pour autant, il ne correspond à aucun des usages énumérés, à titre d’exemple, dans la position 8705.

19      Elle souligne, enfin, que dans les versions en langues anglaise et française de la NC, les véhicules mentionnés dans la position 8705 et respectivement dénommés « break down lorries » et « dépanneuses » sont uniquement destinés à remorquer des véhicules en panne, ce qui ne plaiderait pas en faveur d’un classement des remorqueurs d’avions dans cette position tarifaire.

20      Dans ces conditions, le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« La position 8705 de la [NC] doit-elle être interprétée en ce sens que des véhicules automobiles, sans barre de remorquage, munis d’un treuil de traction avec un dispositif à sangle afin de tirer les avions et d’un dispositif de levage électrohydraulique afin de les pousser relèvent de cette position ? »

 Sur la question préjudicielle

21      Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la NC doit être interprétée en ce sens que la position 8705 de cette nomenclature couvre les véhicules conçus pour remorquer et pousser des aéronefs, dénommés « remorqueur d’avions ».

22      Il convient de rappeler, en premier lieu, que, dans l’intérêt de la sécurité juridique et de la facilité des contrôles, le critère décisif pour la classification tarifaire des marchandises doit être recherché, d’une manière générale, dans leurs caractéristiques et propriétés objectives, telles que définies par le libellé de la position et de la sous-position de la NC et des notes de sections ou de chapitres, avant que les autres dispositions des règles générales entrent en ligne de compte [voir en ce sens, notamment, arrêts du 11 décembre 2008, Kip Europe e.a., C‑362/07 et C‑363/07, EU:C:2008:710, point 39 ; du 12 juillet 2012, TNT Freight Management (Amsterdam), C‑291/11, EU:C:2012:459, point 31 ; du 19 décembre 2019, Amoena, C‑677/18, EU:C:2019:1142, points 39 et 40, ainsi que du 26 mars 2020, Pfizer Consumer Healthcare, C‑182/19, EU:C:2020:243, point 37].

23      En deuxième lieu, en dépit de leur absence de force contraignante, les notes explicatives élaborées, en ce qui concerne la NC, par la Commission européenne et, en ce qui concerne le SH, par l’OMD, contribuent de façon importante à l’interprétation de la portée des différentes positions douanières (voir, en ce sens, arrêts du 15 mai 2014, Data I/O, C‑297/13, EU:C:2014:331, point 33, et du 15 mai 2019, Korado, C‑306/18, EU:C:2019:414, point 35).

24      En troisième lieu, lorsque le classement ne peut se faire sur la seule base des caractéristiques et des propriétés objectives du produit concerné, la destination de celui-ci peut constituer un critère objectif de classification, à condition qu’elle soit inhérente audit produit. L’inhérence doit pouvoir s’apprécier en fonction des caractéristiques et propriétés objectives de celui-ci (voir, en ce sens, arrêts du 5 septembre 2019, TDK-Lambda Germany, C‑559/18, EU:C:2019:667, point 27, et du 26 mars 2020, Pfizer Consumer Healthcare, C‑182/19, EU:C:2020:243, point 38 ainsi que jurisprudence citée).

25      S’agissant du doute que nourrit la juridiction de renvoi quant au classement tarifaire du remorqueur d’avions, il convient de relever que ce doute est étroitement lié à l’utilisation du terme « Abschleppwagen », dans la version en langue allemande de la position 8705 de la NC. En effet, ce terme désigne les tracteurs destinés au remorquage d’autres véhicules, que ces derniers soient en panne ou non, alors que les termes de « dépanneuses » et de « break down lorries », dans les versions en langues française et anglaise de cette nomenclature, désignent uniquement des véhicules servant au remorquage de véhicules en panne.

26      Selon une jurisprudence constante de la Cour, la formulation utilisée dans l’une des versions linguistiques d’une disposition du droit de l’Union ne saurait servir de base unique à l’interprétation de cette disposition ou se voir attribuer un caractère prioritaire par rapport aux autres versions linguistiques. Ainsi, la nécessité d’une interprétation et d’une application uniformes de chaque disposition du droit de l’Union exclut que celle-ci soit considérée isolément dans une de ses versions linguistiques, mais exige qu’elle soit interprétée en fonction de l’économie générale et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un éléme (voir en ce sens, notamment, arrêts du 27 octobre 1977, Bouchereau, 30/77, EU:C:1977:172, point 14, et du 8 juin 2017, Sharda Europe, C‑293/16, EU:C:2017:430, point 21).

27      Or, il ressort tant de la finalité que de l’économie de la position 8705 de la NC, interprétée à la lumière des notes explicatives du SH, que cette position ne vise que les véhicules qui servent au remorquage de véhicules en panne, tandis que ceux servant au remorquage de véhicules qui ne sont pas en panne relèvent de la position 8701 de cette nomenclature.

28      Tout d’abord, la note 2 du chapitre 87 de la NC relative à la position 8701 de cette dernière, à l’instar de la note explicative relative à la position 8701 du SH, indique que le terme « tracteurs » désigne les véhicules moteurs essentiellement conçus pour tirer ou pousser d’autres engins, véhicules ou charges, même s’ils comportent certains aménagements accessoires permettant le transport, en corrélation avec leur usage principal, d’outils, de semences, d’engrais etc. La note explicative du SH énonce également que la position 8701 comprend les tracteurs de tous les types et pour tous les usages, notamment les tracteurs-treuils qui sont équipés de treuils ou de cabestans permettant, par exemple, le halage d’un véhicule enlisé ou le remorquage à distance d’engins agricoles. Selon cette même note explicative, sont, en revanche, exclus de la position 8701 les camions de dépannage – lesquels servent à remorquer des véhicules en panne – équipés de grues, de chèvres et de treuils qui relèvent de la position 8705.

29      Par ailleurs, les notes explicatives du SH relatives, plus particulièrement, aux sous–positions 8701 91 à 95 précisent que ces dernières comprennent les véhicules, conçus pour tirer des semi-remorques sur de courtes distances, tels que des tracteurs portuaires.

30      Ensuite, selon la règle générale 3, sous a), pour l’interprétation de la NC, lorsque les marchandises paraissent devoir être classées sous deux ou plusieurs positions, le classement s’opère en donnant la priorité à la position la plus spécifique sur les positions d’une portée générale.

31      Or, il résulte des points 26 à 28 du présent arrêt que la position 8701 de la NC, qui vise les tracteurs, est plus spécifique que la position 8705 de cette nomenclature, laquelle renvoie, plus largement, aux véhicules à usages spéciaux autres que ceux principalement conçus pour le transport de personnes ou de marchandises.

32      Une telle interprétation de la position 8701 de la NC est, enfin, corroborée par l’arrêt du 27 avril 2006, Kawasaki Motors Europe (C‑15/05, EU:C:2006:259), relatif au classement tarifaire d’un véhicule tout terrain. Il ressort en effet du point 46 de cet arrêt que la capacité de traction d’un véhicule constitue la propriété objective permettant de déterminer s’il est essentiellement conçu pour tirer ou pousser d’autres engins, véhicules ou charges ou, au contraire, pour transporter des personnes. La Cour en a déduit, au point 55 dudit arrêt, que les caractéristiques et propriétés objectives de ces véhicules répondent aux indications fournies dans la note 2 du chapitre 87 de la NC en ce qu’ils ont été essentiellement conçus pour tirer ou pousser d’autres véhicules. L’application de la règle générale 1 pour l’interprétation de la NC conduit, par conséquent, à classer lesdits véhicules dans la position 8701 de cette nomenclature.

33      Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de considérer qu’un véhicule présentant les caractéristiques du remorqueur d’avions en cause au principal relève de la position 8701 de la NC, ce véhicule ne servant pas au remorquage de véhicules en panne et n’ayant pas de fonction particulière autre que celle de tirer et de pousser des avions sur de courtes distances.

34      Partant, il convient de répondre à la question posée que la NC doit être interprétée en ce sens que la position 8705 de cette nomenclature ne couvre pas les véhicules conçus pour remorquer et pousser des aéronefs, dénommés « remorqueurs d’avions », ces derniers relevant de la position 8701 de ladite nomenclature.

 Sur les dépens

35      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) dit pour droit :

La nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature douanière et statistique et au tarif douanier commun, dans sa version résultant du règlement d’exécution (UE) 2016/1821 de la Commission, du 6 octobre 2016, doit être interprétée en ce sens que la position 8705 de cette nomenclature ne couvre pas les véhicules conçus pour remorquer et pousser des aéronefs, dénommés « remorqueurs d’avions », ces derniers relevant de la position 8701 de ladite nomenclature.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.