Language of document : ECLI:EU:C:2009:82

Affaire C-138/07

Belgische Staat

contre

Cobelfret NV

(demande de décision préjudicielle, introduite par

le hof van beroep te Antwerpen)

«Directive 90/435/CEE — Article 4, paragraphe 1 — Effet direct — Réglementation nationale visant à supprimer la double imposition des bénéfices distribués — Déduction du montant des dividendes perçus de la base imposable de la société mère uniquement dans la mesure où celle-ci a réalisé des bénéfices imposables»

Sommaire de l'arrêt

1.        Rapprochement des législations — Régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d'États membres différents — Directive 90/435

(Directive du Conseil 90/435, art. 4, § 1, 1er tiret)

2.        Rapprochement des législations — Régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents — Directive 90/435

(Directive du Conseil 90/435, art. 4, § 1, 1er tiret)

1.        L'article 4, paragraphe 1, premier tiret, de la directive 90/435, concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents, doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à la réglementation d'un État membre qui prévoit que les dividendes perçus par une société mère sont inclus dans la base imposable de celle-ci, pour en être par la suite déduits à hauteur de 95 % dans la mesure où, pour la période d'imposition concernée, un solde bénéficiaire positif subsiste après déduction des autres bénéfices exonérés.

En effet, l'obligation de l’État membre ayant choisi le système prévu à l’article 4, paragraphe 1, premier tiret, de la directive 90/435 de s’abstenir d'imposer les bénéfices que la société mère reçoit, à titre d'associée, de sa société filiale n'est assortie d'aucune condition et est exprimée sous la seule réserve des paragraphes 2 et 3 du même article ainsi que de celle prévue à l’article 1er, paragraphe 2, de cette directive. Aucune condition n'est notamment prévue à l’article 4, paragraphe 1, premier tiret, de ladite directive en ce qui concerne l'existence d'autres bénéfices imposables pour que les dividendes perçus par la société mère ne soient pas soumis à l'imposition. Ainsi, les États membres ne sauraient instaurer unilatéralement des mesures restrictives, telles que l’exigence de l'existence de bénéfices imposables dans le chef de la société mère, et soumettre ainsi à des conditions la possibilité de bénéficier des avantages prévus par la directive 90/435.

En outre, lorsque la société mère ne réalise pas d’autres bénéfices imposables au titre de la période d’imposition concernée, une telle réglementation a pour effet de réduire les pertes de la société mère à hauteur des dividendes perçus. Dès lors que, en principe, cette réglementation fiscale admet le report des pertes sur des exercices fiscaux ultérieurs, la réduction des pertes de la société mère susceptibles de bénéficier d’un tel report à hauteur des dividendes perçus a un effet sur la base imposable de cette société lors de l’exercice fiscal qui suit celui durant lequel ces dividendes sont perçus, dans la mesure où ses bénéfices sont supérieurs aux pertes reportables. Il s’ensuit que, même si les dividendes perçus par la société mère ne sont pas soumis à l’impôt sur les sociétés au titre de l’exercice fiscal au cours duquel ces dividendes ont été distribués, ladite réduction des pertes de la société mère est susceptible d’avoir pour effet que cette dernière subit indirectement une imposition sur ces dividendes lors des exercices fiscaux ultérieurs, lorsque son résultat est positif, une telle limitation de la déduction des dividendes perçus n’étant pas compatible avec la directive 90/435.

Quand bien même, en appliquant ce même régime aux dividendes distribués tant par les filiales résidentes que par celles établies dans d’autres États membres, un État membre chercherait à éliminer toute pénalisation de la coopération entre sociétés d’États membres différents par rapport à la coopération entre sociétés d’un même État membre, cela ne justifie pas l’application d’un régime qui n’est pas compatible avec le système de prévention de la double imposition économique prévu à l’article 4, paragraphe 1, premier tiret, de la même directive.

(cf. points 33-34, 36-37, 39-41, 46 et disp.)

2.        L'article 4, paragraphe 1, premier tiret, de la directive 90/435, concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d'États membres différents, est inconditionnel et suffisamment précis pour pouvoir être invoqué devant les juridictions nationales. En effet, l'obligation de s’abstenir d’imposer les bénéfices distribués par une filiale à sa société mère prévue à l'article 4, paragraphe 1, premier tiret, de la directive 90/435 est formulée en des termes non équivoques et n’est assortie d’aucune condition ni subordonnée dans son exécution ou dans ses effets à l'intervention d’aucun autre acte, émanant soit des institutions communautaires, soit des États membres.

(cf. points 64-65 et disp.)